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  • Marianne pendue au gibet du 49.3 !, par Frédéric de Natal.

    (Notre ami Frédéric de Natal a lui aussi évoqué cette "affaire de Toulouse" sur sa page FB, qui se termine par une conclusion non dénuée d'humour; sur ce sujet des descendants d'Henri IV et de Saint Louis, rappelons une fois de plus ce qui va sans dire mais qui va encore mieux en le disant; tout le monde connait bien notre position, qui n'a pas changé et qui ne changera pas : pour nous, l'avenir c'est Jean IV...)

    L'acte a été condamné par divers élus locaux. Hier, à Toulouse et au petit matin, une vingtaine de jeunes militants de l'Action française ont pendu «symboliquement » une effigie de « la gueuse », ce terme méprisant habituellement attribué à la République depuis l’Entre-deux-guerres par les monarchistes.

    Le jour–même, le gouvernement du premier ministre Edouard Philippe dégainait l’article 49.3 de la constitution de 1958 afin de faire passer en force un projet de loi sur les retraites, victime d’une obstruction parlementaire.

    Entre ces deux actes, aucune corrélation si ce n’est le signe d’une France malade de sa démocratie et qui semble entamer désormais le dernier chapitre de son existence sur fond de violences sociales rarement atteintes dans son histoire.

    frédéric de natal.jpg"Contre un régime instable, irresponsable, à court terme et qui divise. Contre une république centralisatrice soumise aux lobbies qui sacrifie le Bien Commun aux intérêts particuliers et à la démagogie, Vite la Monarchie ! Pour que vive la France, Vive le Roi !" peut-on lire sur les divers réseaux sociaux de l’Action française, le mouvement de l’académicien Charles Maurras et dont l’ombre ne cesse de planer au-dessus d’un gouvernement drapé dans le voile aveugle d’un autoritarisme qui ne dit pas encore son nom. Montée du communautarisme religieux, crise sociale, crise identitaire, montée des populismes, scandales en tout genre (comme le Benallagate pour ne citer que celui-ci), actes de terrorisme d’extrême-gauche (osons dire un peu les choses maintenant-ndlr), les chaînes des digues qui protégeaient tout individu contre l’intolérance naturelle de l'homme se sont brisées, la France de Louis XIV de Napoléon, ou de Charles de Gaulle est désormais menacée d’éclatement.

    Encore faut-il-ajouter de nouvelles ingérences politiques étrangères au sein de l’Hexagone sans même que l’état ne daigne bouger pour assurer notre intégrité nationale. Les attaques supposées de la Russie ou des Etats-Unis, l’affaire porno-politique Piotr Andreïevitch Pavlenski , l’incendie à la Gare de Lyon en marge d’un concert d’une star congolaise, les manifestations algériennes du Herak à Paris et hier le rassemblement géant organisé à Perpignan par le député séparatiste catalan Carles Puigdemont i Casamajó sont autant d’exemples récents et de signes de la déliquescence d’une Vème République qui semble à bout de souffle et à l’agonie. Une France réduite à « l’état de servitude volontaire » vis-à-vis de Bruxelles expliquait très justement Bertrand Renouvin, leader de la Nouvelle action royaliste et ancien membre du Conseil économique et Social, dans un éditorial de décembre 2019. Certains évoquent même ouvertement une « guerre civile » à venir sans savoir de qui l’un serait l’ennemi de l’autre, ou bien qui entre deux complot francs-maçons et dans un vague délire masturbatoire, fantasment à un hypothétique coup d’état de la «Grande muette », oubliant ce qu’est la réalité d’une dictature militaire ou la notion de légalisme qui règne au sein de l’armée. Et pourtant, à regarder de plus près, ce sont encore des preuves cette atmosphère d’angoisse générale qui a envahi « le pays réel [plus que jamais opposé] au pays légal ». Rarement dans son histoire, la France post-1945 n’avait atteint un tel niveau de crise révolutionnaire et celle de 1968 paraît bien sobre au regard des événements actuels.

    Un nouveau 6 février 1934 ?

    Hier soir aux abords du parlement, des milliers de français, toutes tendances politiques, se sont rassemblés pour crier leur refus de l’utilisation du 49.3. «Oublié les cahiers de doléances et le Grand débat », vague pitrerie présidentielle qui, à travers un savant coup de marketing, avait tenté de faire redorer le blason terni de « Jupiter», le surnom donné à Emmanuel Macron. Un président qui n’est plus en odeur de sainteté auprès des français. Fin de partie, la magie s’est envolée doucement dans les volutes de l’illusion, happées par le cynisme macronien post-ado du « moi je ». Ce matin, sur les ondes de Radio France Internationale, c’est unanime que l’opposition et les syndicats ont annoncé qu’ils allaient reprendre les manifestations contre le gouvernement alors que les vacances scolaires se terminent. Avec deux motions de censures déjà déposées contre le gouvernement du premier ministre Edouard Philippe, dont la permanence au Havre, a été attaquée pour la 3ème fois consécutive depuis le début de la campagne pour les municipales du 15 mars prochain, Les Républicains (LR), le Rassemblement national (RN) et France Insoumise (FI) vont tenter avec les dissidents de La République en marche (LREM) de faire tomber le gouvernement. Bien que cela ait peu de chances d’aboutir, l’ambiance du moment n’est pas sans rappeler cette journée historique, dans l’histoire de la IIIème République, qui avait menacé les institutions jusque dans ses fondements. La France est-elle au bord de l’implosion ? C’est la théorie qu’avance l’historien et démographe Emmanuel Todd dans son nouvel ouvrage « Les luttes de classes en France au XXIe siècle » et qui évoque « cette France du XXième siècle, paralysée mais vivante, où se côtoient et s'affrontent des dominés qui se croient dominants, des étatistes qui se croient libéraux, des individus égarés qui célèbrent encore l'individu-roi, avant l'inéluctable retour de la lutte des classes ».

    Et si on rappelait le Roi ?

    Le magazine « L’incorrect » affirme que les « français en rêvent ». Il n’est peut-être pas loin de la vérité. Avec 17% des sondages en faveur de la restauration de la monarchie, des prétendants au trône de plus en plus présents dans l’espace médiatique , des titres qui se sont multipliés sur le sujet depuis deux ans des politiques locaux ou nationaux qui ont évoqué ouvertement ce «roi qui manque à la France » et dont elle ne s’est jamais vraiment remis de sa mort en 1793, l’institution républicaine montre des signes certains de fragilité et qui appellent au redressement national. Dans un éditorial dans le magazine «Marianne», la polémiste Natacha Polony, est lapidaire sur la réalité de ce déni flagrant de démocratie. un de plus après le référendum de 2005, balayé du revers de la main par le président Jacques Chirac, irrité que les français n'aient pas voté en faveur d'un nouveau contrat européen. « le projet de réforme des retraites aura constitué un naufrage politique. D’une idée plébiscitée par une majorité de Français, l’obstination technocratique à faire travailler plus longtemps des citoyens soupçonnés de paresse congénitale aura fait une occasion de plus de construire l’image d’un pouvoir autoritaire et sourd. En face, la guerre de tranchées des députés insoumis à coups d’amendements prétextes aura davantage encore détruit ce qui reste de débat à l’Assemblée nationale» écrit Natacha Polony.

    Le parlementarisme actuel a atteint les limites de son existence avec l’utilisation à outrance de cet article constitutionnel ou de ses amendements. De droite comme à gauche, toutes idéologies confondues, on crie haro sur le « monarchisme républicain », pâle-copie sans saveurs de notre défunte royauté sans trop oser encore appeler à un référendum sur la question des institutions. Excepté France insoumise et son idée saugrenue de revenir à un type de IVème république, un des plus beaux échecs de gouvernance républicaine ayant existé.

    La France nostalgique de ses souverains ?

    Exit depuis les trois derniers mandats présidentiel, l’idée d’avoir « un chef d'État arbitral, garant de la continuité et de l'indépendance nationale, véritable clef de voûte des institutions » a été dévoyée. « (…) Il n'est pas étonnant que les Français, attachés à la symbolique politique, se prononcent à chaque élection présidentielle par des votes de rejet plus que d'adhésion » constatait avec inquiétude, le prince Jean d’Orléans, comte de Paris, dans une tribune publiée dans le journal « Le Figaro », en octobre 2018 et à l’aube du mouvement des Gilets Jaunes, nos croquants de ce siècle pour lesquels, les deux prétendants au trône ont apporté leurs soutiens officiels. Les français réclament un arbitre. En guise de conclusion, le comte de Paris ne se faisait-il pas l’écho de la volonté de nos concitoyens lorsqu’il écrivait justement : «Je souhaite, dans la continuité des déclarations de mon grand-père et de mon père, que l'État soit, à nouveau, rétabli dans son indépendance selon sa vocation arbitrale afin qu'il soit pleinement au service de la France et des Français ». « L'Intérêt national et la restauration des pouvoirs régaliens méritent toute notre attention, pour la France et le Roi » martèle l’Action française.

    Jean d’Orléans, Louis-Alphonse de Bourbon, Jean – Christophe Napoléon, autant de descendants d’Henri IV qui se sont déclarés, ces mois passés, tous disponibles à relever le drapeau tricolore si la population le souhaite. Le cheval blanc et Jeanne d’Arc en moins.

  • SOCIAL et ECONOMIE, de Frédéric Winkler.

    Selon Edward Goldsmith : « Le commerce mondial a été multiplié par onze depuis 1950 et la croissance économique par cinq et pourtant au cours de cette période, il y a eu un accroissement sans précédent de la pauvreté, du chômage, de la désintégration sociale et de la destruction de l'environnement. Il n'y a donc pas de preuve que le commerce ou le développement économique soient d'une grande valeur pour l'humanité... » En outre, un contrôle sévère et souvent aveugle de l'Etat sur l'économie toute entière, notamment sur les prix, doublé d'une fiscalité dévorante, décourage l'expansion et le travail.

    ftédéric winkler.jpgNous voici donc, là encore, devant de dangereuses impasses : il ne faudrait pas croire que le sentiment public y soit indifférent et que les résultats concrets ne suivent pas. Si l'on tient compte des créations et des échecs, il y a chaque année des milliers d'entreprises qui disparaissent en France. Certes, les raisons sont multiples, pourtant ce nombre est trop important pour ne pas être inquiétant... Combien ce système libéral aura-t-il suscité de délocalisations, de fuites de cerveaux allant enrichir nos voisins. Nous vivons les conflits sociaux et économiques sans fins, alors que notre économie est sinistrée. Je vous laisse juge de la politique menée pour en arriver là…
    Afin de réduire les coûts le patronat a préfèré utiliser la main-d’œuvre étrangère au lieu de moderniser ses installations (voir Marianne II sur le Net), cela lui permettant de casser les revendications ouvrières salariales. A l’époque, le parti communiste affichait « Produisons Français. Colbert était plus malin lorsqu’il créait les manufactures où ateliers où seule la qualité, le beau et le meilleur était fabriqué, toute l’organisation corporative des métiers veillait alors au bien-être des consommateurs. Il désirait avec Louis XIV, attirer les richesses chez nous comme les artistes et les inventeurs, on a l’inverse aujourd’hui avec la fuite des cerveaux !
    Notre industrie de qualité qui avait réussi à survivre fut largué et vendue pour combler un déficit abyssal permanent, nous livrant à la finance internationale. La politique de l’ouverture vers l’extérieur qui nous est imposé depuis Giscard, condamne la France et ses particularités économiques. Cette politique favorise les pays qui donnent le moins à leur peuple, travaillant pour presque rien. Ce n’est qu’un marché de dupes, pour le profit des riches, un crime contre l’humanité dans un nouvel esclavage pratiqué par des politiques issus des idéaux de 89 !
    La recherche suscite l’investissement vers la création, entraîne la production puis la consommation. Que sont devenus nos mines de charbon alors que l’Allemagne continue d’en produire. Notre acier, notre aéronautique comme l’aérospatiale qui fait quoi ? Sans parler des drames d’Alsthom, de Pechiney voir le chantier naval devenu italien, la vente de nos vignobles et nos terres, châteaux comme richesses architecturales. Nos marchés africains sont laissés à la Chine et l’Allemagne. Nous restons la 2e puissance à posséder le plus d’étendue de mer, qu’en faisons-nous, lorsque l’on ne donne pas nos iles aux anglo-saxons comme pour les Minquiers et les Ecrehous. Devrions-nous parler de l’état de nos voies ferrés, de nos routes… Le monde de la finance explose dans des bénéfices qui dépassent l’entendement, il suffit juste de citer les « GAFA » (Google, Amazone, Facebook et Apple) dont deux dépassent le trillion de dollars en valorisation boursière. Entre le chiffre d’affaire et la valorisation boursière de ces 4 puissances, on trouverait une équivalence avec environ 150 Etats du monde !
    Un système antisocial détruit par « ordonnances » notre code du travail qui, même s’il avait besoin de profondes réformes, va déclencher une nouvelle misère dans le monde du travail, rappelant demain les scandales du monde industriel du XIXe siècle ! La misère dans le nord est pléthorique depuis que la sidérurgie a fermé ses portes, les familles n’arrivent plus à subvenir à l’entretien de leurs enfants, quand ils ne sont pas pris par la DASS ! Ces problèmes paraissent insurmontables, symptômes d’une société malade, fruit d’un système incohérent et antisociale. Nous consommons 70 milliards de plus que ce que nous produisons, alors que l’Allemagne est en excédent commercial de 250 milliards (Radio Courtoisie Henri Fouquereau 11/09/2018) ! Le pays est incroyablement endetté, notre peuple est en danger devant des marionnettes qui prétendent gouverner mais qui ne gère qu’un déficit permanent, nous entraînant vers l’abime ! Le réveil sera dramatique. Lorsque les créanciers refuseront de prêter et qu’ils exigeront de se servir pour être remboursé que croyons-nous qu’il adviendra ?
    Quelle honte de voir ainsi notre pays décliner lorsque celui-ci fut la lumière du monde, jamais le plus médiocre de nos rois ne l’aurait accepté. Le déficit budgétaire comme le déficit commercial annuel avoisinent les 60/70 milliards, la Sécurité sociale, l’Etat perdant autour de 150 milliards chaque année qu’il doit emprunter sans jamais savoir comment rembourser. Un européisme niais attire nos élus comme des veaux à l’abattoir, le jour viendra où les créanciers imposeront leurs volontés sur notre territoire contre le possible effacement de nos dettes si ce n’est pas déjà en cours. Cette pente infernale nous entraîne vers la soumission au nouvel ordre mondial qui prendra en main nos affaires comme mettra en coupe réglée tout notre patrimoine en biens, architectures et paysages. A quand un Henri IV pour redresser la France et mettre dehors une ripoublique handicapant l’avenir de nos enfants ! La pire des monarchies ne peut rivaliser avec une telle faillite dont les français ignorent le gouffre ! Tout cela entraîne des milliers de pertes d'emplois comme plonge dans la misère sociale, des milliers de familles. Ce « jeu » de la mondialisation « sans entraves » défendus par des élites globalisées détruisent les peuples !
    Et puis un peu de réflexion, est-ce que notre économie doit continuer dans cette voie ? N’y a-t-il pas d’autres chemins, devons-nous vivre sous l’infernale augmentation du PIB (Produit Intérieur Brut), entraînant la hausse constante de la consommation donc de la production ? Ce système libéral est une impasse, comme nous l’avons dit dans sa recherche permanente de la réduction des coûts, donc des salaires, entraînant les peuples vers l’esclavage et la robotique (Lire Bernanos). La décroissance apporte, à juste titre, quelques pistes intéressantes, qu’il ne faut pas négliger.
    Qui en est le responsable ?
    Mais contre qui, là encore, faut-il se retourner ?
    Et le syndicalisme !
    Les syndicats patronaux ou ouvriers, eux aussi constituent souvent de grandes féodalités du capital ou du « travail ». Ils se confondent la plupart du temps avec l'action de tel ou tel parti au risque de brouiller les cartes, comme de pervertir le sens même du syndicalisme. Il y aurait tant à dire sur la soumission des officines syndicales devant les « Ordonnances Macron », sur cette acceptation d’une politique mené par un ancien banquier, offrant au libéralisme, le monde du travail sur un plateau, au nom du Cac40 !
    Le syndicaliste devrait se questionner sur le système en question, allant vers le totalitarisme, alors que son véritable rôle est de défendre la JUSTICE SOCIALE, d’où déclinent : Organisation, hiérarchie et décentralisation, sans laquelle il n'y a pas de libertés ! Un globalitarisme règne, où les mots d'ordre sont : Uniformité, égalité, centralisation. Notre doctrine sociale est foncièrement contre le libéralisme économique, représentant le « renard libre dans le poulailler libre ». Le libéralisme est générateur de conflits, de délocalisations, de misère, de destruction du tissu économique et social. Alors que nous sommes basés sur l'humanisme et la recherche de la qualité dans le travail. On voit s'étendre à l'horizon les familles en péril, la réduction du travail valorisé et de l'emploi, mais aussi des magouilles financières en hausse, ainsi que les gâchis comme les superprofits avec cette « arrogance des puissants » qui accable le monde... Le capitalisme, issu en partie de la Révolution Française, après la révolution industrielle née du charbon anglais comme de la machine à vapeur, exploite notre main-d'œuvre et celle des pays du Sud en développement, dans un nouvel esclavage, pour plus de gains !!! Ainsi, en 2012, les grandes fortunes françaises ont vu leur capital grimper de 25 % quand, dans le même temps, le nombre de pauvres a augmenté en France et que le niveau de vie médian a, lui, baissé de 0,5 % dès 2010, mais beaucoup plus pour les moins favorisés de nos concitoyens (environ 3 % par an depuis 2008). Le syndicaliste est (ou devrait être, logiquement...) inévitablement contre la loi Le Chapelier de 1791, qui supprime toute association et tout droit d'association. La loi de 1884, insuffisante, autorisant les syndicats, fut le début d'une liberté, donc d'un pouvoir accordé à des groupements. Ce fut le retour, encore bien timide, des libertés réelles contre la liberté abstraite de 1789... Le savent-ils ces syndicalistes ?
    N'oublions pas que si la « Déclaration des Droits de l'Homme » néglige les devoirs, elle a aussi aboli, en fait, beaucoup de droits communautaires. Les syndicalistes doivent prendre conscience que le régime qu'ils désirent n’est pas celui dans lequel nous vivons !
    Tant qu'il y aura des élections politiques, il ne pourra pas exister d'élections sur le plan professionnel ou communal sans que celles-ci ne soient, tout au moins en grande partie, politiques. Lorsque « l'Etat ou la Commission de Bruxelles sont les patrons » (en particulier sur le plan réglementaire), que peuvent les syndicats ?
    Il n'y a plus d'arbitre souverain pour départager les ouvriers et le patron. Écoutons Jean de France (« Un Prince Français», Entretiens avec Fabrice Madouas, Pygmalion) : « Cette société devient anonyme. Les rapports ne sont plus régis par la politesse, ni par la courtoisie, mais par la loi, forcément impersonnelle. Nous allons vers une judiciarisation des relations humaines. »
    FW (Projet de société, à suivre...)

  • Le président Vladimir Poutine empereur de Russie demain ?, par Frédéric de Natal.

    Au pouvoir depuis 1999, tour à tour comme premier ministre et président de la république, Vladimir Poutine entame son quatrième et dernier mandat présidentiel.

    Sa succession agite d’ores et déjà toutes les ambassades étrangères et le récent remaniement gouvernemental s’est accompagné d’un projet de réforme constitutionnelle, dont les russes ont peine à dessiner les contours, posant des questions qui restent encore sans réponses.

    Dans l’ombre, un nouveau parti monarchiste contrôlé par un oligarque, proche de Vladimir Poutine, entend réaliser l’impossible : couronner l’ancien officier du KGB, Tsar de toutes les Russies.

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    Lors de la dernière commémoration en hommage à Nicolas II et à sa famille en juillet 2019 (ci dessous, ndlr), ils avaient pris la tête du cortège qui avait rassemblé plus de 60 000 personnes. Tous habillés de tee-shirts jaunes floqués d’un aigle bicéphale, les membres de ce nouveau parti monarchiste suivaient les pas du milliardaire Konstantin Valeryevich Malofeev.

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    L’homme de 45 ans n’est pas un inconnu des milieux politiques et affairistes russes. Mieux que cela, il est celui qui murmure à l’oreille du président Vladimir Poutine. Son mouvement, la société de l’Aigle à deux têtes (Двуглавый Орёл), rappelle les grandes heures de la monarchie tsariste défunte. Il a déjà pas moins de 90 sections réparties dans tout le pays, très suivi par des dizaines de milliers de « followers » sur Facebook ou Vkontakte. En novembre 2018, un congrès a réuni ses soutiens et quelques membres de l’épiscopat orthodoxe. « Nous ferons tout ce qui est possible afin de maintenir le Président Poutine au pouvoir ! » déclare Konstantin Malofeev qui a fondé également le Lycée Basile le Grand. Dans les couloirs de cette académie scolaire, les portraits de tous les Tsars depuis 1613, date  un Zemsky Sobor s’était réuni afin de couronner le prince Michel Romanov. Ici on prépare tous les cadres de la future administration impériale qui doit se mettre en place.

    Vladimir Ier ? Le projet peut paraître aussi insensé que séduisant mais divise. Konstantin Malofeev n’ignore pas que le titre impérial est encore entre les mains de la maison impériale des Romanov. D’ailleurs, l’oligarque est lié au Grand-duc George Romanov avec lequel il s’affiche régulièrement. Un prince qui n’a pas hésité à participer et déclamer un discours au dernier congrès mondial des Familles, l’année dernière, dont Malofeev est un des principaux financiers et organisateurs. Il tient à rassurer, l’idée est d’ouvrir la voie à une restauration de la monarchie et les russes décideront de qui ils souhaitent couronner. « La monarchie est, par définition, une affaire de sang uniquement », a déclaré Yevgeny Nikiforov, directeur général d'une station de radio associée à l'Église orthodoxe russe et qui suggère que la couronne doit revenir à un membre de l’aristocratie russe à défaut d’un Romanov.

    « Au cours des 30 dernières années, la Russie a remis sur ses pieds l’empire et élu un dirigeant. L’absence de sang bleu n’est pas un problème désormais » fait remarquer Andrei Afanasyev, présentateur de télévision pour la chaîne de télévision en ligne Tsargrad, une antenne qui diffuse les idées de Konstantin Malofeev. Il a tissé des liens avec divers mouvements conservateurs européens comme le Front de la Liberté en Autriche, le Rassemblement national, le parti Les Républicains voir même avec Philippe de Villiers qui a tenté de lui vendre son Puy du Fou à la sauce russe.Ou d’autres mouvances de droite européennes.

    «Il existe autant de types de monarchies différents dans le monde qu'il y a de monarques», a souligné Malofeev pour justifier sa démarche comme le rapporte une édition du « Washington Post ». D’autres journaux internationaux comme le « Guardian », « Le Monde », « Jeune Afrique », » Le Figaro » ou encore récemment le « Sunday Times », se sont interrogés sur le bien –fondé de cette idée que le principal intéressé se garde bien de commenter. Sur son site officiel, le mouvement a approuvé, il y 3 jours, le projet de loi modification de la constitution qui s’inscrit, selon lui « dans la continuité de la politique de feu le président Boris Eltsine ».

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    "...Lors de la dernière commémoration en hommage à Nicolas II et à sa famille en juillet 2019, ils avaient pris la tête du cortège qui avait rassemblé plus de 60 000 personnes..."

     

    Le premier président de l’ère post-soviétique avait d’ailleurs prévu le retour de la monarchie après lui et pris contact avec la famille impériale afin que le grand-duc George intègre une académie militaire russe. En vain. Pour les monarchistes de la société de l’Aigle à deux têtes, la constitution doit interdire toute forme de libéralisme et sécuriser les valeurs traditionnelles de la Sainte Russie à commencer par la famille et la religion. Les bases de toutes monarchies qui se respectent.

    « Notre histoire n'a pas commencé en 1991 et pas en 1917. Nous sommes les héritiers du plus grand État des deux derniers millénaires, et si nous voulons survivre en tant que peuple et pays, nous devons simplement en parler fièrement » rappelle les monarchistes qui appellent au rejet « de la débauche, du cynisme et de la propagande de valeurs qui nous sont étrangères ». Malofeev a suggéré il y a deux mois, que le mariage pour tous soit interdit en Russie. « La Russie moderne est le successeur légal de l'Empire russe » peut-on encore lire sur le site officiel qui ne cache pas ses intentions.

    Réalité ou fantasme ? Le « Moscow Times » a consacré un long article sur le sujet ces dernières semaines. « Il y a une crise politique dans le pays et il y a une demande réelle pour un parti monarchiste affirme Konstantin Malofeev qui se base sur un sondage qui affirme que 30% des russes souhaitent le retour d’un Tsar. «Bien sûr, ces gens qui aiment [le président] Vladimir Poutine voient la continuation de son pouvoir sous un jour impérial et monarchique. Je partage ces valeurs » ajoute-t-il.

    Du côté de la présidence, on tente de temporiser. « Le Kremlin ne souhaite pas soutenir de telles idées » - du moins en public. «Ce parti politique monarchiste est une initiative personnelle de Malofeev » tient à préciser Dmitry Peskov, porte-parole de Poutine, qui ajoute qu’il n’a aucune approbation du président russe. A la Douma, l’oligarque est courtisé. Le parti Juste Russie, de centre-gauche et affilié à Poutine, lui a demandé son parrainage. En échange, il a reçu carte blanche pour imposer son programme. Le parti nationaliste Rodina (Patrie), de son aveu-même, a entamé des discussions avec le leader monarchiste. Cependant le monde politique n’est pas le monde des affaires et Malofeev n’est pour l’instant pas arrivé à se hisser à la tête d’un parti qui aurait pu fusionner Juste Russie et Rodina. L’union des Cosaques de Russie lui a assuré en revanche de sa fidélité.

    Des deux côtés de ces mouvements, il s’est heurté à de la résistance et n’a pu obtenir ce qu’il souhaitait. Soupçonné également de financer la rébellion du Donbass et en Crimée (dont le président Sergey Aksyonov est ouvertement monarchiste), l’Europe scrute allers et venues avec inquiétude, craignant qu’il ne mette en place une vaste toile d’araignée, notamment dans la mouvance internationale monarchiste. Que pense justement la famille impériale de la situation ? Dans une interview accordée au magazine Hola, la chef de la maison impériale russe, la grande-duchesse Maria Wladmirovna a déclaré qu’il fallait indubitablement à la Russie « une république présidentielle forte » comme celle de Poutine « qui reste le mode de gouvernement le mieux adapté aux russes ».

    Bien que la Russie « soit un pays suffisamment libre pour que l'idéologie monarchiste continue de vivre » avait-elle ajouté, ne renonçant pas à ce qui lui revient de droit. Konstantin Malofeev continue de mener sa barque à l’ombre d’un trône encore virtuel courtisant Romanov et Vladimir Poutine. A Tsargrad, le mot d’ordre reste le suivant : « on critique le parti au pouvoir, Russie Unie, mais on ne critique pas Vladimir Poutine ».

    L’âme russe demeure toujours aussi insondable et qui sait, peut-être que demain, la Russie aura un nouvel empereur élu par le peuple. Dieu sauve le Tsar !

    Frédéric de Natal

  • Sur Figaro Vox, plaidoyer pour une souveraineté industrielle, par Eric Delbecque.

    L’usine Michelin de la Combaude poursuit ses activités malgré la crise sanitaire. Clermont-Ferrand, le 10 avril 2020.

    THIERRY ZOCCOLAN/AFP

    La crise démontre que la souveraineté industrielle conditionne notre sécurité nationale, considère le spécialiste des questions de guerre économique Éric Delbecque. Il appelle à abandonner la logique du capitalisme financier pour rebâtir notre tissu industriel et repenser l’aménagement de notre territoire.

    Le Covid-19 a hélas réussi là où de nombreux spécialistes avaient échoué durant bien des années. Il démontre que la souveraineté industrielle n’est pas un concept ringard de nostalgique des grands programmes gaullistes mais une condition de la sécurité de la nation. L’intervention du Chef de l’État a évoqué ce point de façon claire: certaines productions méritent d’échapper aux simples «lois» du marché et ne peuvent pas être confiées à d’autres pays, Chine en tête. Il faut saluer cet effort de réinvention chez un homme qui n’avait pas placé cette question au centre de ses préoccupations jusqu’à présent. Précisons une fois encore, sur ce point comme sur d’autres depuis les gilets jaunes, qu’il apparaît trop facile de rejeter sur Emmanuel Macron l’intégralité de la responsabilité de tous nos abandons. Son prédécesseur n’a guère brillé en la matière: on peut même affirmer qu’il a résolument accompagné la désindustrialisation de l’Hexagone, et qu’il montra une totale indifférence aux problématiques de la guerre économique, de l’autonomie stratégique et des phénomènes de dépendances multiples mettant en danger la sécurité nationale au sens le plus large. À partir d’aujourd’hui, il faudra juger sur pièces…

    Nous fûmes, en France, les dindons de la farce de la mondialisation de bas étage.

    En fait, voilà 30 ans que nous déconstruisons tranquillement notre souveraineté en commençant par pulvériser les briques économiques. Celles-là mêmes qui nous permettent de ne pas être à la merci de la bonne volonté des autres lorsque l’essentiel sera en question et que chaque nation se concentrera d’abord sur la santé et la préservation des siens. Il est d’ailleurs difficile de le leur reprocher… Nous fûmes, en France, les dindons de la farce de la mondialisation de bas-étage (il en existe une plus intéressante, qui peut rapprocher les peuples et accroître les coopérations et les solidarités). Nos élites, toutes couleurs politiques confondues, publiques comme privées et académiques, firent semblant de croire que les rapports de force et les règles ordinaires de l’échiquier international de la puissance avaient disparu comme par magie. Impossible de laisser partir nos usines à l’autre bout de la planète et d’imaginer que l’on n’en subira jamais les conséquences.

    La France n’a plus le droit désormais de se tromper: l’heure est à l’élaboration d’une solide doctrine sur ce thème précis. La base a été énoncée lundi par le président de la République: «il nous faudra rebâtir une indépendance agricole, sanitaire, industrielle et technologique française et plus d’autonomie stratégique pour notre Europe. Cela passera par un plan massif pour notre santé, notre recherche.» Pour réussir à relever ce défi, il faut cependant aller plus loin dans la définition de secteurs stratégiques tels que la Défense, la sécurité, l’énergie et quelques autres. À commencer par la santé, dont on saisit dorénavant à quel point elle exige d’être qualifiée de stratégique! Aller plus loin, c’est identifier des Entreprises d’intérêt local essentiel (EILES), PME traditionnelles, «Gazelles» et «Licornes», qui ne produisent pas forcément des boulons spécifiques pour les blindés ou les satellites, mais qui se révèlent capitales pour freiner la désertification d’un territoire (par leur nombre de salariés sur un espace fragile, des activités porteuses d’innovations fortes, etc.) ou pour sécuriser une population (par exemple la production de masques). Travail de titan? Sans doute. Néanmoins absolument nécessaire.

    Ce qui repose sur la collaboration de nombreux acteurs implique d’exclure toute arrogance technocratique.

    Il est clair que c’est aussi une manière de promouvoir le Made in France et la French Tech (sous réserve que l’on ne laisse pas le reste du monde la piller allègrement). Il serait sain de revenir à quelques raisonnements de bon sens: commencer par sanctuariser des entreprises indispensables à la continuité d’activité nationale, à la vie ordinaire en situation dégradée, afin de ne pas craindre de perdre les manettes, le contrôle de nos destinées. S’attaquer par conséquent (puisque les deux thèmes sont en partie connectés) à la rénovation de la «France périphérique», en refaçonnant son futur économique et industriel, bref se pencher de nouveau sur l’aménagement du territoire en ne s’abandonnant pas hypocritement au capitalisme financier le plus aveugle aux finalités non négociables de l’intelligence territoriale. Il ne s’agit pas bien sûr de nationaliser compulsivement mais d’épauler les organisations productives dans leur effort pour demeurer un moteur de prospérité des territoires (commune, département, région) dans lesquels elles s’enracinent. Ce qui repose sur la collaboration d’un grand nombre d’acteurs, non sur l’éviction de tel ou tel, et demande impérativement d’exclure toute arrogance technocratique (ou bureaucratique) qui persiste à jouer la partition du bon élève qui sait tout.

    Ce qui implique de créer de véritables Comités stratégiques d’intelligence territoriale (CSIT) pilotés par les préfets de région et intégrant les conseils régionaux, ainsi que les représentants structurant de la vie économique locale (associations professionnelles, grands opérateurs du service public, syndicats, etc.). Ces Comités, qui ne sont pas une idée totalement neuve (le Préfet Rémy Pautrat, dont l’auteur de ces lignes avait l’honneur d’être l’un des collaborateurs à cette époque, porta cette lumineuse idée dès 2005, sans grand succès sur la durée), auraient pour mission de se livrer à un vaste examen de ré-identification et d’enrichissement d’une liste des secteurs prioritaires rafraîchissant la notion de secteur stratégique, ou tout au moins essentiel, au niveau local (où figurerait l’agriculture, les transports). Cette dynamique de ciblage fin s’ajouterait à celle, nationale, de travail sur les SAIV (Secteurs et activités d’importance vitale) et les entreprises de souveraineté nationale. Dans ces enceintes pourrait naître le travail de renaissance de nos tissus industriels locaux: on pourrait y faire le point sur les savoir-faire industriels perdus ou sur le chemin de la disparition et décider de mesures correctives (notamment dans le domaine de la formation) pour recréer une autonomie de production. L’ensemble de la réflexion sur la rénovation économique des territoires trouverait là un instrument adapté, reposant sur la coordination de l’État et des régions, une intelligence collective, une combinaison de volontés réellement coopératives, accompagnée par l’ensemble des partenaires nécessaires (privés, publics, universitaires, sociaux).

    Le coronavirus nous offre une dernière chance de ne pas nous laisser engloutir par une logique budgétaire intégriste.

    Par ailleurs, nous ne pouvons plus nous passer d’un centre d’impulsion permanent sur cette question de l’autonomie économique stratégique, de la souveraineté industrielle indispensable à notre avenir national et européen. Le temps est donc venu de créer un secrétariat d’État à la sécurité économique, rattaché au Premier ministre, dont la vocation serait de donner corps à cette notion. De la même façon que l’on comprend aisément la notion de sécurité sanitaire, il devient urgent de fédérer sous ce vocable de «sécurité économique» l’ensemble des impératifs, relevant de la sécurité nationale, que sont la relocalisation d’activités vitales sur notre sol, la cristallisation de l’idée de souveraineté industrielle (qui implique de stopper certaines logiques mortifères de la société de marché sauvage) et la défense des écosystèmes économiques locaux, sur nos territoires, qui doivent être préservés ou rénovés si l’on veut éviter de dévaler toujours plus vite la pente glissante nous ayant conduits aux gilets jaunes, et que l’on envisage chaque jour avec un peu plus d’appréhension. Le sondage effectué par ODOXA pour l’agence COMFLUENCE avec Les Échos et Radio classique est éclairant: 61 % des personnes interrogées estiment que «nos sociétés ne pourront plus jamais fonctionner comme avant et que notre rapport aux autres, à l’environnement, à la croissance, et à la mondialisation changera profondément». Plus loin, 57 % pensent que l’une des plus grandes leçons de cette crise sera que «les entreprises françaises vont devoir relocaliser leurs productions et repenser leurs responsabilités sociétales». Le Covid-19 fait office de lanceur d’alerte: porteur de mort et de malheur, de solitude et de douloureuses interrogations, il nous offre cependant une dernière chance de ne pas nous laisser totalement engloutir par une logique budgétaire intégriste qui ne nous donne comme seul droit que celui de compter les morts…

     

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    Expert en sécurité intérieure, Eric Delbecque est colonel de réserve de la Gendarmerie Nationale et membre du conseil scientifique du CSFRS (Conseil Supérieur de la Formation et de la Recherche Stratégiques). Il est directeur du pôle intelligence économique de COMFLUENCE. Il fut conseiller défense auprès du Ministre de l’Intérieur (2009-2012) et responsable de la sécurité de Charlie Hebdo après l’attentat de 2015. Docteur en Histoire contemporaine, diplômé de Sciences Po et de la Sorbonne, conférencier à l’IHEDN (Institut des Hautes Études de Défense Nationale), au CHEMI (Centre des Hautes Études du Ministère de l’Intérieur), et à l’École de Guerre Économique, il a enseigné à Sciences-Po, l'ENA, l'ENM et à l'EOGN (École des Officiers de la Gendarmerie Nationale). Il est spécialiste des questions de guerre économique, l’auteur de nombreux ouvrages sur l’intelligence économique et la sécurité notamment L’intelligence économique pour les nuls (First, 2015).

  • Malédiction chilienne

    Par Mathieu Épinay* 

    Bloc-notes

    Macron sous l’uniforme de Pinochet ! Le photomontage où il siège entre ses ministres Philippe et Castaner en militaires bottés aura fait le tour de la toile, centrifugé par les tentatives de l’Élysée de l’en retirer et par la « main de Moscou » qui l’affichait avec gourmandise sur Sputnik, très lu des Français, honni de Macron.

    En Union européenne, Russia Today et Sputnik sont suivis comme jadis Radio Free Europe l’était en Union soviétique et ça horripile l’Élysée dont chaque bavure policière filmée tourne en boucle sur la planète. Récemment encore, un député, un journaliste, un couple de personnes âgées battus, un handicapé gazé à bout portant, pas bon pour l’image du régime dont l’usage déréglé du « lanceur de balles de défense », 20 éborgnés à vie, 180 blessés à la tête, excusez du peu, commence à émouvoir le Conseil de l’Europe. Macron, à qui il demande des comptes, rétorque implicitement qu’ils ne l’ont pas volé, ce sont des casseurs. Les mutilés apprécieront ! Dans les cités grenobloises en feu, les mutinés rigoleront.

    172958.jpgLa photo originelle de Pinochet dans le rôle du méchant, lunettes noires et mine patibulaire, alimentait jadis une campagne orchestrée par Moscou contre ceux qui avaient débarrassé le Chili du stalinien Allende, un coup d’arrêt sans précédent au communisme qui rongeait alors la planète. 17 ans plus tard, Pinochet était encore plébiscité à 43%, pas assez pour se maintenir, il laissait la place. Macron, qui n’est que l’élu des deux tiers de 43% des inscrits, ressemble plus à Allende. Comme lui, il a pris le pouvoir par un hold-up électoral qui le prive de légitimité représentative, comme lui il a cristallisé contre une « nomenklatura » d’idéologues bornés et profiteurs la vindicte d’un peuple exaspéré qui, en France, s’est affranchi de tutelles partisanes et syndicales disqualifiées par 50 ans de compromissions. Comme lui, il fait tirer sur la foule où le nombre de mutilés augmente chaque samedi. Dieu merci, il n’a pas encore suivi ses soutiens « foulards rouges » et l’ancien ministre-philosophe Luc Ferry qui lui conseillent de tirer à balles réelles sur les Gilets jaunes.

    Photo-bloc-note-3-450x225.jpgMadame Bachelet fut deux fois présidente du Chili après Pinochet. Il l’aurait torturée en 1973, lui laissant en tout cas les mains et les yeux que des Gilets jaunes ont perdus. L’ex-torturée de Pinochet, donc, devenue haut-commissaire des droits de l’homme à l’ONU, demande une enquête sur l’usage excessif de la force par Macron : y aurait-il une malédiction chilienne ?

    Crispation républicaine

    En France la situation reste bien inquiétante, non pas tant à cause de la ténacité d’un peuple méprisé par les incapables qui croient nous gouverner, mais plus par le comportement étrange d’un chef d’État dépassé par la fonction. Il organise un grand débat, comme si la situation relevait d’une thérapie de groupe, il croit encore avoir raison et veut l’expliquer à ces provinciaux rustauds qui ne comprennent rien ! Au passage il s’offre une tribune gratuite pour les européennes. Mais les discours fleuves assénés, manches relevées, à un parterre de maires dociles sélectionnés par des préfets qui ne le sont pas moins (mais c’est leur job) rappellent Castro ou Chavez qui tenaient eux aussi des heures au micro. On en frémit. Pire, Le Point, en délicatesse avec Macron, nous révèle qu’il a réuni les patrons des gros médias à l’Élysée pour réfléchir à un service d’information à la botte du palais et… au service de la vérité, « Pravda » en soviétique. Le silence de plomb des autres invités sur ce rendez-vous en dit long sur leur connivence !

    Photo-bloc-note-2.jpgComme chacun sait, la république qui gouverne mal se défend bien et ses tentatives de discréditer le mouvement portent. L’impunité des black blocs et autres antifas infiltrés avec ou sans gilet jaune dans les manifestations entretient un climat de violence qui inquiète. L’agression verbale de Finkielkraut par des « Gilets jaunes » fait le miel des Échos, de BFM TV et de Macron qui hurle au crime antisémite, organise une marche et en fait même trop au dîner du CRIF où son hôte, le président Kalifat, empoigne avec une fougue troublante le bras de Jupiter. Mais il y a un problème, ce sont des salafistes qui ont agressé Finkielkraut. Plutôt compréhensif avec les Gilets jaunes, il l’a constaté sans ambiguïté.

    Général providentiel

    L’exaspération populaire ne faiblit donc pas. La question urgente est maintenant de savoir comment la France pourra échapper à la tyrannie euro-mondialiste ou à la guerre civile. Que faire de Macron ? La dissolution de la chambre basse que la presse d’argent, tenant l’électeur sous hypnose, lui avait servi sur un plateau après l’Élysée, lui permettrait de sauver son mandat. Il serait muselé par une cohabitation, il n’en fera rien. D’aucuns ont proposé un général à Matignon, nommément Pierre de Villiers. On lui savait, par son frère Philippe, une certaine sympathie pour Macron dont la bourde du 13 juillet 2017 aura tempéré l’ardeur. Après cet affront public, Pierre de Villiers ne pouvait plus rester aux armées. Mais à toute chose malheur est bon puisque l’affaire lui valut deux succès éditoriaux, Servir puis Qu’est-ce qu’un chef ?, la consultation du Boston Consulting Group et la bienveillance étrange des gros médias. De fait, on ne trouve rien dans ses livres qui puisse fâcher le pouvoir sinon de timides réserves sur une armée européenne. La démission de son frère, jadis promis à une belle carrière dans la préfectorale, avait eu plus de gueule.

    portrait-1-506x535.jpgQuoi qu’il en soit, un militaire à Matignon ou un remaniement ministériel ne résoudra rien : le problème, c’est bien Macron et la finance apatride qui l’a placé pour purger la dette et nous étouffer dans l’étau européen. D’ailleurs, l’aptitude au commandement dont Macron est dépourvu n’est pas l’apanage des militaires. La France compte par centaines des cadres expérimentés parfaitement aptes intellectuellement, humainement et moralement à la fonction de chef d’État. Elle a même un Prince qui, en plus de tout cela, en aurait la légitimité sacrale et un soutien populaire qu’on ne soupçonne pas.

    En fait, ce qui est intéressant chez les militaires c’est qu’ils ont des armes. Mais cela ne suffit pas pour déposer un tyran. Peut y contribuer un rejet massif du pouvoir en place, nous y allons, et une situation insurrectionnelle suite à une répression policière meurtrière, nous n’en sommes peut-être pas si loin. Mais la République en a vu d’autres sans en être ébranlée. Elle a même survécu aux deux invasions allemandes qu’elle n’avait su prévenir. En outre, l’armée française, loyale, ne bougera pas plus qu’après le 6 février 34. Il lui faudrait des chefs assez courageux pour une aventure où il y a tout à perdre. Il faudrait qu’elle fasse bloc derrière ces chefs et rien n’est moins sûr : il y a dans le haut commandement des obligés du pouvoir, « bons républicains », maçons de diverses obédiences et bien sûr les « généralles et colonelles » promues par la grâce des quotas comme dans les conseils d’administration. Car notre ministre Florence Parly émascule rageusement les tableaux d’avancement et listes d’aptitude que les conseils supérieurs d’armées lui proposent.

    x18laro-drjiy_0.jpgLes colonels courageux, intelligents et expérimentés dont nous avons besoin attendront ! On saluera à l’occasion le colonel Legrier pour son excellent papier sur notre stratégie en Syrie et les jours d’arrêt qu’il lui coûtera, on vomira celui du journaliste Merchet, de L’Opinion, qui le dénonce comme « catholique » au cas où cela aurait échappé au ministre. Un flicage qui rappelle les heures les plus sombres de la secte laïque. En 1904 il l’aurait fiché : VALM-AM (va à la messe avec missel). ■  

    Mathieu Épinay

    * Collectif de spécialistes des questions de Défense et géopolitique
  • Mathieu Bock-Côté: « Finkielkraut, voilà l'ennemi !»

     

    Par  Mathieu Bock-Côté

    TRIBUNE - Ayant déclaré dimanche [10.12] que « les non-souchiens brillaient par leur absence » lors de l'hommage rendu à Johnny, Alain Finkielkraut a déclenché la polémique. Pour Mathieu Bock-Côté [Figarovox, 14.12], l'indignation médiatique est avant tout un prétexte pour faire du philosophe un paria. Ce qu'il nous paraît dénoncer ici avec force, c'est en quelque sorte le totalitarisme qui s'est emparé de nos sociétés modernes ou postmodernes et qui prétend imposer silence à l'intelligence et au courage. A noter que Maurras avait imaginé l'avènement d'un tel « âge de fer » tyrannique, ou âge barbare, dans son Avenir de l'intelligenceLFAR 

     

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    La simple présence d'Alain Finkielkraut dans l'espace public semble aujourd'hui faire scandale. À gauche de la gauche, on a cessé d'écouter ses arguments mais on scrute sans cesse ses propos à la recherche de ce que le système médiatique nomme un dérapage, ou du moins, pour trouver quelques propos controversés qui justifieront sa mise au pilori pour quelques jours. L'objectif, c'est de faire du philosophe un paria, de le discréditer moralement, de le transformer en infréquentable, qui ne sera plus convoqué dans le débat public qu'à la manière d'un repoussoir, sans cesse obligé de se justifier d'exister.

    Celui qui s'est imposé au fil des décennies à travers une critique subtile et mélancolique de la modernité et de sa tentation démiurgique est transformé en commentateur ronchon contre lequel on justifiera toutes les moqueries. On ne prend pas la peine de le lire et on attend simplement le moment où on pourra le lyncher pour de bon. Pour les patrouilleurs zélés du politiquement correct, qui distribuent sans cesse les contraventions idéologiques, Alain Finkielkraut n'est plus le bienvenu dans le débat public.

    C'est à la lumière de cette aversion de plus en plus revendiquée pour Alain Finkielkraut qu'on peut comprendre la tempête médiatique qui le frappe ces jours-ci. On le sait, dans le cadre de son émission hebdomadaire sur RCJ, où il répond aux questions d'Elisabeth Lévy, le philosophe est revenu sur l'hommage national rendu à Johnny Hallyday en cherchant à décrypter une passion qui lui était étrangère. Finkielkraut a aussi noté, comme d'autres, que la communion populaire autour de Johnny Hallyday révélait aussi les failles de la communauté nationale. En gros, Johnny Hallyday était plébiscité par la France périphérique, qu'il aura longtemps fait rêver d'Amérique et d'aventure, mais ignoré par la France issue de la diversité, ou si on préfère le dire moins pudiquement, par celle issue de l'immigration. Il a pour ce faire employé ironiquement le terme « sous-chien » inventé par Houria Bouteldja pour qualifier « les Français de souche » et donc celui de « non souchien » pour ceux qui ne le sont pas. Cette ironie n'a pas été comprise, elle était peut-être malheureuse, plus largement on peut partager ou non son analyse, la trouver pertinente ou insuffisante: telle n'est pas la question.

    Nous ne sommes pas dans une controverse honnête et loyale, dans une correction bienveillante mais dans une volonté délibérée de nuire. Les ennemis de Finkielkraut n'allaient pas se priver de fabriquer un scandale artificiel de part en part pour lui faire un mauvais procès en racisme. On l'a d'un coup décrété double maléfique des Indigènes de la République. Les enquêteurs de la police de la pensée et les milliers de délateurs qui les alimentent et les applaudissent sur les réseaux sociaux étaient extatiques: enfin, ils tenaient leur homme. Enfin, ils avaient devant eux le dérapage de trop. Enfin, Finkielkraut venait de tomber dans un piège dont il ne sortirait pas.

    Il ne vaut même pas la peine de revenir sur le fond du propos tellement il suffit d'un minimum de jugement et de bonne foi pour savoir qu'il n'a jamais tenu le moindre propos raciste dans son commentaire de l'hommage à Johnny Hallyday et qu'il s'est contenté de reprendre de manière moqueuse et au deuxième degré le vocabulaire de ceux qui le conspuent. Que ce qu'il a dit ne diffère en rien du jugement, sur le sujet, d'un Laurent Joffrin ou de Dominique Bussereau.

    Cela dit, la tempête Finkielkraut du moment est intéressante pour ce qu'elle révèle du dérèglement de la vie publique, et cela, pas seulement en France mais à la grandeur du monde occidental. D'abord, on y voit l'importance du buzz comme phénomène médiatique. Une petite phrase arrachée à son contexte et mise en circulation sur internet peut déclencher une marée d'indignation, chacun s'ajoutant alors à la meute en expansion des indignés, qui veulent à tout prix envoyer un signal ostentatoire de conformité idéologique au politiquement correct.

    Une société allergique au pluralisme politique et idéologique

    On s'indigne, on hurle, on exige une punition exemplaire contre celui qui vient de transgresser le dogme diversitaire et la vision irénique du vivre-ensemble. On assiste même au retour de la gauche pétitionnaire à grande échelle. C'est ainsi qu'on a vu une pétition circuler sur internet pour que Finkielkraut soit viré de l'Académique française. Ceux qui la signent ont alors le sentiment gratifiant d'avoir eux-aussi pu cracher sur le philosophe jugé galeux. Les médias sociaux ont redonné vie à la foule lyncheuse. Disons-le autrement : elles transforment en action vertueuse la lapidation virtuelle. Il s'agit d'écraser symboliquement le dissident, de provoquer sa mort sociale.

    On y revient, la tentation lyncheuse qui s'exprime sur les médias sociaux correspond à une réhabilitation de l'ostracisme dans une société de plus en plus allergique au pluralisme politique et idéologique. Il faut être progressiste ou se taire. Il faut chanter les louanges du multiculturalisme et ne jamais noter les lézardes sociales qu'il engendre ou se fermer la gueule. Il faut tweeter dans le sens de l'histoire ou se tenir éloigné de son clavier. Et si on pense autrement, si on critique, si on se moque, si on ironise, même, on sera accusé d'être un provocateur, un polémiste, même, et d'avoir bien cherché sa mauvaise réputation. On se fera coller une sale étiquette qu'il faudra porter à la manière d'un symbole d'infamie.

    Il y a là une forme d'intolérance primitive qui se maquille en tolérance supérieure. On ne se surprendra pas, alors, que les réflexes d'autocensure se développent autant chez tant d'intellectuels qui redoutent d'avoir à subir à leur tour une pluie de crachats, pour peu que quelques esprits mal tournés ne comprennent pas ce qu'ils ont voulu dire et lancent contre eux une campagne de diffamation.

    L'ensauvagement de la vie publique qui se révèle à travers l'effrayante muflerie des réseaux sociaux témoigne purement et simplement d'une régression de la vie démocratique. Et c'est en bonne partie parce qu'il ose braver cet environnement toxique qu'Alain Finkielkraut est admirable. Nous sommes devant un philosophe de grande valeur, nous le savons. Mais il arrive souvent que les meilleurs philosophes n'aient pas un caractère à la hauteur de leur intelligence. Ce n'est pas le cas d'Alain Finkielkraut, qui fait preuve d'un courage civique exemplaire et qui ose aller dans l'espace public pour penser notre temps tout en sachant qu'il n'en sortira pas indemne. Il croit à la discussion, à l'affrontement des idées, et il a toujours le souci, comme on le constate chaque samedi à Répliques, de donner la parole au camp adverse. Ceux qui lui répondent par des injures et qui en appellent à son exécution publique ne nous disent finalement qu'une chose : ils ne sont pas à la hauteur du défi qu'il leur lance.  

    Mathieu Bock-Côté

    Mathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (VLB éditeur, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (Boréal, 2012) de La dénationalisation tranquille (Boréal, 2007), de Le multiculturalisme comme religion politique (éd. du Cerf, 2016) et de Le Nouveau Régime (Boréal, 2017).

     
  • Politique & Religion • L’anticatholicisme n’est-il aujourd'hui qu’un antioccidentalisme ?

     

    Par  Mathieu Bock-Côté

    TRAVAUX DIVERS - Largeur +.jpgDans cette tribune du Journal de Montréal [25.12] Mathieu Bock-Côté invite les sociétés occidentales à « assumer ce qu’on pourrait appeler les marqueurs identitaires les plus profonds de notre civilisation », notamment le christianisme et particulièrement l'héritage catholique. L'Eglise catholique elle-même ne nous y invite plus avec autant de netteté. Volens nolens, cet héritage demeure pourtant un marqueur fondamental de notre identité.  LFAR  

     

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    Dans un monde menacé par un islam politique particulièrement militant, certains esprits anachroniques sentent encore le besoin de sonner la charge contre le catholicisme, comme s’il fallait enfin en finir avec lui. C’est le cas d’une Femen qui s’est jetée sur la crèche du Vatican lundi matin pour s’emparer de la statue de l’Enfant Jésus en dénonçant le travers sexiste du catholicisme. Le procès est entendu : l’Église catholique est encore assignée au mauvais rôle, et les médias, globalement, aiment l’y maintenir, comme si elle représentait une survivance anachronique dans le monde moderne. Il faut lutter contre le catholicisme comme s’il demeurait le principal obstacle avant l’avènement d’un nouveau monde pour de bon délivré de la tradition. Chaque fois qu’on l’humiliera, on applaudira, d’autant plus que l’orthodoxie diversitaire aime mettre toutes « les religions » dans le même sac dès qu’il est question de l’émancipation féminine, ce qui permet de ne pas réfléchir à la question bien particulière de l’islam.

    Il est difficile de ne pas mettre en relation cette intervention des Femen avec l’absurde censure d’un film de Noël dans une école française quand les enseignants ont compris qu’il n’était pas sans lien avec les origines de cette fête et se sont empressés de l’arrêter en plein milieu. Pour reprendre l’explication loufoque rapportée par les journalistes qui ont rendu publique cette histoire, « il ne s'agit pas d'un film sur une légende de Noël mais sur l'histoire de la nativité ». On se demandera si celui qui a dit ça est complètement bête ou simplement de mauvaise foi. La scène est quand même d’une invraisemblable stupidité. On veut bien croire que la fête de Noël est aujourd’hui déchristianisée, au point même d’être neutralisée dans de plus vastes « fêtes de fin d’année », mais il n’en demeure pas moins que si l’histoire a ses droits, on conviendra au moins de ses origines chrétiennes. Faut-il désormais censurer toute mention des racines chrétiennes de l’Occident pour ne pas froisser les tenants de l’orthodoxie diversitaire et les représentants les plus intransigeants des religions non-chrétiennes ? Les Américains, sans se tromper, parlent depuis des années d’une guerre contre Noël.

    Plusieurs l’ont noté, le remplacement du traditionnel Joyeux Noël par Joyeuses Fêtes s’inscrit, consciemment ou inconsciemment, dans ce processus de déchristianisation de la culture. En 2009, les commerçants du Plateau Mont-Royal, à Montréal, avaient cru trouver la formule la plus inclusive qui soit pour ne vexer personne en souhaitant « Joyeux Décembre ». La formule était incroyablement ridicule mais montrait jusqu’où peut aller la censure du réel pour ne pas heurter les sensibilités minoritaires exacerbées qui hurlent à la discrimination dès qu’on redécouvre que toutes les religions n’ont pas laissé la même empreinte sur notre civilisation. Il y a dans le monde occidental un zèle déconstructeur qui pousse à vouloir éradiquer toutes les traces du christianisme, comme si on espérait un jour le chasser du décor et l’effacer de la vie publique : la diversité pourrait alors s’exprimer et le christianisme serait privé de ses derniers privilèges. On a pu le constater il y a quelques semaines encore avec l’affaire de la croix de Ploërmel, qu’on a prétendu condamner au nom de la laïcité alors qu’il s’agissait surtout de pousser plus loin la neutralisation de l’identité historique de la France. Un jour pour ne plus heurter personne, faudra-t-il changer de calendrier ?

    Sommes-nous encore dans un monde au moins partiellement chrétien ? Telle est la question. Il ne s’agit pas de savoir si nous croyons personnellement à la religion catholique, mais si nous assumons ce que Pierre Manent appelle la « marque chrétienne » de notre civilisation – c’est-à-dire que le catholicisme a servi de matrice civilisationnelle au monde occidental et qu’on ne peut nous y arracher complètement sans mutiler notre propre identité. On oublie aussi qu’on peut parfaitement assumer cette marque chrétienne et l’idée de laïcité, aussi fondamentale que nécessaire – les deux ne sont contradictoires que pour ceux qui peinent à réconcilier les différentes facettes d’une même civilisation. Il faut une certaine excentricité intellectuelle, en fait, aujourd’hui, pour croire que c’est le catholicisme qui menace la laïcité et qui cherche à occuper de nombreuses manières l’espace public en y faisant sentir de manière de plus en plus agressive sa présence.

    Une question essentielle surgit : comment maintenir vivant un patrimoine de civilisation marqué par le christianisme quand la foi qui l’alimentait est morte, ou du moins, complètement déculturée et pratiquée sérieusement seulement dans les marges ? Il faut, pour cela, amener la philosophie politique à réfléchir aux conditions mêmes de possibilité de notre civilisation. Il ne s’agit plus seulement de réfléchir au régime politique de la cité mais à la conception de l’homme sur laquelle elle repose – sur son anthropologie, pour le dire autrement. Cela implique aussi de dégager notre compréhension du politique d’un présentisme asséchant en renouant avec une conception historique de la communauté politique, qui fasse droit à la part sacrée de l’appartenance à la cité. En d’autres mots, on peut ressaisir le christianisme à travers un patriotisme de civilisation qui n’impose à personne quelque foi que ce soit mais qui réinscrit le politique dans l’histoire en se tenant loin de la tentation de la table-rase. L’art politique a davantage à voir avec l’histoire qu’avec la gestion.

    On y revient alors : ce n’est pas en déconstruisant elles-mêmes leur propre socle de civilisation que les sociétés occidentales sauront vraiment se montrer à la hauteur des exigences de l’hospitalité. Au contraire, plus elles se renient et moins ceux qui les rejoignent peuvent vraiment les aimer. La haine de soi ne fait rêver personne, le nihilisme non plus. Il ne s’agit pas de fantasmer sur je ne sais quelle reconfessionnalisation de l’État ou d’idéaliser de quelque manière que ce soit la parole du Pape ou d’autres officiels du monde catholique mais simplement d’assumer ce qu’on pourrait appeler les marqueurs identitaires les plus profonds de notre civilisation : la cité ne saurait être une simple structure juridique sans épaisseur historique et culturelle. Elle plonge ses racines dans le cœur de l’homme et ne saurait se fermer aux besoins fondamentaux de l’âme humaine. Mais pour plusieurs, aujourd’hui, cette simple évidence passe étrangement pour un scandale.   

    Mathieu Bock-Côté

    Mathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (VLB éditeur, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (Boréal, 2012) de La dénationalisation tranquille (Boréal, 2007), de Le multiculturalisme comme religion politique (éd. du Cerf, 2016) et de Le Nouveau Régime (Boréal, 2017).

  • Mathieu Bock-Côté : « La nouvelle censure de l'extrême gauche racialiste »

    Le 23 avril dernier, des militants proches du Parti des indigènes de la République donnaient une conférence à l'université de Nanterre, en plein blocage 

     

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    Mathieu Bock-Côté s'alarme des nouvelles réductions de la liberté d'expression au nom de l'idéologie diversitaire [Le Figaro, 2.08]. Au Québec, plusieurs spectacles ont été annulés en raison de l'« appropriation culturelle » dont ils feraient preuve. Analyse, comme toujours, brillante, juste, qui va au fond des choses.   LFAR

     

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    L'été 2018, à Montréal, aura été celui de la censure, et sa principale victime, Robert Lepage, un dramaturge québécois, dont deux pièces ont été annulées coup sur coup. La première, SLAV, se voulait un hommage aux victimes de l'oppression et tournait autour de chants d'esclaves, alors que la seconde, Kanata, renversait le regard historique traditionnellement posé sur le Canada, en privilégiant celui des Amérindiens par rapport aux Blancs.

    Lepage reconduisait, avec un génie dramaturgique indéniable, une lecture culpabilisante de l'histoire occidentale. Mais, sans le savoir, il était en retard sur la radicalisation du multiculturalisme. La controverse, chaque fois, s'est présentée de la même façon : un groupuscule prétendant représenter une communauté « minoritaire » a surgi pour accuser la pièce de se rendre coupable d'appropriation culturelle, c'est-à-dire d'une forme de pillage symbolique propre à la domination néocoloniale que subiraient les populations « racisées ». Dans un tel contexte, la peur de paraître raciste gagne alors l'espace public et un réflexe d'autocensure s'empare des esprits. Telle est la loi du politiquement correct.

    S'accuser soi-même d'insensibilité à la diversité

    slav-1024x655.jpgAinsi, les militants anti-SLAV ont-ils soutenu qu'il était absolument illégitime qu'une Blanche  puisse reprendre des chants composés par et pour des Noirs. Cet argumentaire prônant un principe d'étanchéité ethnique et réhabilitant la race comme catégorie politique est typique de l'extrême gauche racialiste qui entend légitimer par là un authentique racisme anti-Blancs. Il confirme l'américanisation mentale de la société québécoise, poussée à plaquer sur sa réalité une grille de lecture qui lui est totalement étrangère.

    Dans le deuxième cas, les militants amérindiens réclamèrent non seulement d'être consultés à propos du spectacle, mais de participer à sa confection. Certains se demandèrent si, dans cette logique, il fallait accorder un droit de veto aux groupes minoritaires lorsqu'une œuvre prétend traiter de son histoire ou de sa réalité. Chose certaine, l'espace public est aujourd'hui patrouillé par des milices identitaires toujours prêtes à s'indigner dès lors qu'on questionne l'image qu'elles prétendent projeter de leur «communauté».

    Malgré les passions soulevées par le débat, la classe politique, dans son immense majorité, s'est montrée très discrète, à l'exception du chef du Parti québécois, Jean-François Lisée, qui a dénoncé vigoureusement la situation. Du côté des artistes, rares sont ceux qui ont dénoncé la censure, et les dirigeants du Festival international de jazz de Montréal et du Théâtre du Nouveau Monde, qui devaient accueillir SLAV, se sont même excusés d'avoir heurté la communauté noire montréalaise et de ne pas avoir tenu compte suffisamment de ses préoccupations.

    Ils s'accusèrent ainsi d'insensibilité à la diversité et auraient mérité leur mauvais sort. Plusieurs éditorialistes ont repris ce créneau. Sans endosser la censure, ils dénoncèrent la représentation médiatique insuffisante des minorités, qui serait à l'origine de leur colère légitime. Croyant se placer au-dessus du débat, ils ont repris le discours d'autoflagellation qui s'alimente à une terrible haine de soi. On peut voir dans cette lâcheté une forme de déclaration d'allégeance implicite au nouveau régime multiculturaliste, dont on ne contestera plus les dogmes et dont on reprend le langage.

    Cette querelle est absolument typique de la décomposition de l'espace public en contexte diversitaire, qui met en scène la grande revanche contre la civilisation occidentale, dont on dénonce pêle-mêle la « blanchité », la « binarité », le caractère « hétéropatriarcal » et ainsi de suite. L'heure serait venue de la décolonisation de la vie publique, ce qui supposerait d'abord la censure de la perspective majoritaire, nécessaire à la multiplication des paroles minoritaires.

    L'œuvre d'art n'a plus d'autonomie propre

    Les doléances s'accumulent publiquement avec la multiplication des catégories les plus improbables de dominés, comme on l'a vu avec l'emballement récent, dans le monde anglo-saxon, autour d'une pétition pour que Netflix suspende la diffusion d'Insatiable , une série annoncée pour le mois d'août accusée de «grossophobie». Pour sauvegarder l'estime de soi des différentes identités engendrées par la société diversitaire, leurs représentants autoproclamés seront en droit de déterminer en quels termes on devra parler d'elles. Celui qui prend la pose victimaire s'assure un privilège moral dans la vie publique.

    L'œuvre d'art n'a plus d'autonomie propre: elle n'a de valeur qu'à travers la mission idéologique qu'on lui prête. Fait-elle la promotion de la diversité, de l'inclusion, des migrants, de la fluidité des identités sexuelles et ainsi de suite ? Si elle peut être mise au service de la bonne cause, et pour peu qu'elle soit autorisée par les comités diversitaires consacrés, elle sera célébrée, et probablement même financée.

    Le Conseil des arts du Canada (CAC), d'ailleurs, a ainsi précisé que ceux qui veulent réaliser une œuvre d'art concernant les populations amérindiennes devront manifester publiquement leur respect à leur endroit, sans quoi leur demande de financement ne sera pas considérée. Comme l'a expliqué il y a quelques mois le directeur du CAC, « ce qu'on dit, c'est que, quand la proposition vient d'artistes qui sont blancs, il faut qu'on ait une preuve, une démonstration que, dans leur démarche artistique, les artistes qui proposent quelque chose soient en lien, en discussion, soient en consultation avec les autochtones ». On comprend jusqu'où mènera la généralisation de ce principe, qui consiste à réintroduire le délit de blasphème au nom du respect de la diversité.

    On en tirera une leçon d'ordre général, valable pour les deux côtés de l'Atlantique : la question de la liberté d'expression pose directement celle du régime dans lequel nous vivons. Quelles sont les conditions d'entrée dans l'espace public ? Qui est autorisé à se prononcer sur les questions d'intérêt général ou particulier ? Faut-il élargir ou rétrécir les paramètres de l'espace public ? La tendance lourde, aujourd'hui, est à leur rétrécissement. Tout pousse à une forme nouvelle de censure, qui justifie même l'ostracisation médiatique des mal-pensants et leur disqualification morale. Tôt ou tard, il faudra, pour assurer la revitalisation démocratique de nos sociétés, entreprendre la restauration des conditions nécessaires à la liberté d'expression et à une délibération publique délivrée du chantage des groupuscules fanatisés qui réclament le droit de faire taire ceux qui ne chantent pas leurs vertus. 

    Mathieu Bock-Côté        

    XVM7713ddbc-9f4e-11e6-abb9-e8c5dc8d0059-120x186.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Son dernier livre, Le multiculturalisme comme religion politiquevient de paraître aux éditions du Cerf [2016].

  • Villiers-le-Bel : En voilà assez !.....

     

    688d2e842cfd21efae5c5170490bdafd.jpgDepuis l’élection de Nicolas SARKOZY à la présidence de la République, c’est la première fois qu’une banlieue « brûle », que la République « brûle ». Comme en 2005, avec quelques degrés de violence en plus, elle vient à nouveau de « brûler » à Villiers le Bel. Le scandale est évident, les faits sont considérables. Cela a été dit partout. Mais quels sont les fondements, les tenants et les aboutissants politiques de cette crise ?  

    Il ne serait ni exact ni honnête d’en conclure que l’action du nouveau Chef de l'Etat dans ce domaine, après six mois de présidence, n’a rien changé à rien. 

    Il a posé le problème de l’immigration, de l’identité nationale, de la délinquance qui lui est liée, en des termes nouveaux, jusqu’à présent inédits à la tête de l'état. Ils ont été approuvés par 53% des 85% de Français qui ont voté à la présidentielle. Leur retentissement dans le long terme peut être considérable … ou nul, selon ce qu’on en fera, selon ce que nous en ferons.

    Deux questions se posent néanmoins :

    1. Ce « discours » était-il assez clair, allait-il suffisamment au fond des choses pour être opératif ? C'est-à-dire pour produire un résultat ?

    2. Au-delà de ses gouvernants, le peuple français lui-même, en tout cas une partie du peuple français, n’est-il pas aussi hautement responsable de cette situation explosive ? Il ne sert à rien de s’en prendre toujours exclusivement aux gouvernants. Ils ne peuvent pas tout quand la société civile – ou ce que l’on continue à appeler ainsi contre toute apparence - est elle-même une cause de la situation par manque de réaction, par sympathie pour les casseurs (qui sont désormais aussi des tueurs), ou même organisation systématique de toutes sortes d’actions de soutien, voire d’encadrement, de prise en main, d’utilisation idéologique ou politicienne du phénomène dit des « banlieues » ?

    I. POUR UN « DISCOURS » CLAIR SUR IMMIGRATION & IDENTITE NATIONALE

    Sans des principes simples, clairement exprimés, l’on ne pourra jamais maîtriser un tel problème.

    1. Il est faux d’exclure la naissance, l’hérédité, la biologie, la géographie, l’Histoire, les mœurs, les racines culturelles et religieuses, de la définition du peuple français comme de tout autre, définition sans laquelle, faute de réalité, ce peuple lui-même s’évanouit. Au reste, pourquoi ces notions – qui sont à la base de toute vie – seraient-elles en elles-mêmes honteuses et proscrites ? Avons-nous peur des réalités de notre naissance, de notre nature, de notre vie et de notre mort d’hommes réels ? Ces notions sont pernicieuses si elles sont vécues dans un esprit de haine et de conflits. Mais elles sont salutaires si elles définissent et construisent une communauté. En tout cas, elles correspondent aux simples réalités de la vie. Au reste, le communautarisme abstrait de ceux qui prétendent définir un peuple par une idéologie – fût-ce celle des Droits de l’Homme et de la Démocratie – peut être tout aussi totalitaire et meurtrier qu’un autre, sinon plus. 1789, 1793, 1917, 1933 : toute l’histoire moderne en est la preuve terrible.

    2. Le peuple français ne peut donc être défini – comme le discours officiel a trop tendance à le faire, y compris les nouveaux responsables – par un commun attachement aux « valeurs républicaines » (Droits de l’Homme / Démocratie) qui ferait de tout être humain un citoyen français potentiel, un Français de droit … Une telle définition, exclusivement abstraite, ouvre tout simplement la France à tous les vents de l’univers. Elle ne définit pas le peuple français, elle le dissout. Ni les Français d’origine ni les nouveaux arrivants ne savent plus qui ni ce qu’ils sont.

    3. Une définition du peuple français par la naissance, l’hérédité, la géographie, l’Histoire, les mœurs, les racines culturelles et religieuses est indispensable à l’existence et à l’équilibre de la communauté nationale, y compris aux éventuels nouveaux arrivants qui viendront s’y agréger. Cette définition est simple. Elle n’est pas idéologique. Elle a d’ailleurs été donnée par le général DE GAULLE il y a quelques cinquante ans : « Nous sommes, avant tout, un peuple européen, de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne ». (5 mars 1959 – Alain PEYREFITTE – « C’était DE GAULLE » - FAYARD 1994) Serions-nous le seul peuple de la planète qui se dénierait à lui-même le droit que l’on reconnaît à tous les autres, de vouloir être et rester ce qu’il est ? Ce que l’Histoire l’a fait ? Et de décider librement, souverainement, du nombre, de la qualification, de la provenance de ceux qu’il reçoit chez lui ?    

    4. Cette volonté, éminemment politique, de régler librement, souverainement, le flux des étrangers souhaitant travailler ou s’installer chez nous, voire devenir Français, nous devons l’affirmer clairement, pour que l’opinion française tout entière, tout comme les candidats à la venue en France, en soient pleinement informés, pleinement conscients, et se le tiennent pour dit. Ces derniers doivent pouvoir vivre dignement et librement en France, pourvu, toutefois, qu’ils en respectent l’ordre et les lois. Mais il doit être clair que, dans le cas contraire, leur séjour en France serait immédiatement interrompu et que, pour ceux d’entre eux qui auraient acquis, d’une façon ou d’une autre, la nationalité française, celle-ci leur serait immédiatement retirée ainsi que leur faculté à résider en France. Il est très vraisemblable qu’une telle sanction serait plus dissuasive pour les casseurs et insulteurs de la France – dont pourtant ils vivent et où ils continuent d’arriver par milliers – que l’action des Forces de l’Ordre, des tribunaux et des prisons où ils entrent et dont ils sortent, d’ailleurs, aux frais de la France, comme de moulins dérisoires….

    II. LA RESPONSABILITE DE LA « SOCIETE CIVILE »

    Y-a-t-il encore, au sens plein, une société civile en France ? En tout cas, ce qu’il en reste n’est pas exempt de responsabilité dans la situation qu’elle vit.

    Il faut bien constater en effet que la volonté supposée des gouvernants – en cette matière comme en d’autres - se heurte ou se heurterait – malgré l’accord d’une forte majorité de Français – à une résistance organisée de toute une partie de la société.

    Énumérons les principales catégories – mais c’est tout un arsenal :

     - Les médias, en premier lieu. Sur tous les plateaux de télévision, toutes les antennes, au mieux, l’on fait balance égale entre les casseurs ou leurs multiples amis et les pouvoirs publics, l’autorité, les forces de l’ordre, les victimes, les honnêtes gens. Les casseurs vitupèrent librement, à longueur de temps, en plein écran, sur toutes les chaînes… Leurs amis les soutiennent… Les journalistes « comprennent » … Les personnalités d’opposition, aussi, naturellement … C’est en soi-même, un ensemble explosif.

    . Les associations ad hoc qui organisent, dès qu’il le faut, interventions télé ou radio, marches plus ou moins silencieuses, pétitions, appels au peuple pour toujours plus d’argent, plus de moyens, plus de liberté pour l’immigration etc.…

    . Les autorités religieuses, évêques en tête, du moins une partie d’entre eux, qui confondent le sens de la charité avec le laxisme et la mise en œuvre des conditions d’un plus grand désordre social.. (DE GAULLE avait aussi dit à Alain PEYREFITTE : «  Vous savez, PEYREFITTE, l'Église de France, ce n’est pas le patriotisme qui l’étouffe »).    

    . L’éducation nationale qui, par ses propres désordres, par sa participation à l’utopie d’un monde, d’un homme « plat » et déstructuré, par l’échec scolaire que ses multiples errements ont généralisé, contribue à l’aggravation des désordres…

    . Le jargon spécifique forgé depuis quelques années pour faire écran aux réalités et que ces jours-ci tout un chacun utilise à grande échelle : « les jeunes » ou mieux « les jeunes en colère » ; « l’incompréhension entre les jeunes et les policiers », comme s’il s’agissait d’un conflit entre « potes » .. Et puis, systématiquement, « les quartiers » comme on dit, en d’autres lieux « les territoires ».. Que veut-on ? De quoi parle-t-on ?

    Question plus vaste : il y a aussi la dissolution, la démission des familles ; la banalisation de la violence, partout répandue, à commencer à la télé, violence qui contraste – ou les compense ? – avec les prétentions « soft » de notre société ; il y a aussi les jeux politiciens, eux aussi meurtriers, où l’on voit l’opposition, par démagogie et soif de pouvoir, « comprendre » les casseurs, absoudre les tueurs ..

    La question des banlieues pose en fait la question des fondements de notre système politique et social. Si Nicolas SARKOZY veut vraiment s’y affronter, il lui faudra plus que des discours et beaucoup plus qu’une rupture – qui reste encore à démontrer – avec la mollesse des années CHIRAC ….

  • En Français s'il vous plaît !

    Aujourd'hui, dans l'excellente rubrique "Dire... , Ne pas dire..." du site de l'Académie française  : un petit historique, à propos des anglicismes...

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    (chronique publiée les lundis, mercredis et vendredis; suggestions et commentaires de lecteurs bienvenus !...)

    Anglicismes et autres emprunts (sommaire)

    Il est excessif de parler d’une invasion de la langue française par les mots anglais. Les emprunts à l’anglais sont un phénomène ancien. Pour en donner quelques exemples :

    — avant 1700 : ajourner, boulingrin, contredanse, gentleman, gentry, groom, lord, lord-maire, paquebot, yard, yeoman ;

    — entre 1700 et 1800 : anesthésie, balbuzard, bas-bleu, gin, méthodisme, pickpocket, stick ;

    — entre 1800 et 1850 : autobiographie, bifteck, cold-cream, job, mess, pickles, silicium, sinécure, speech, steamer ;

    — entre 1850 et 1900 : base-ball, building, dribbleur, goal, lift, lunch, spinnaker, visualiser ;

    — entre 1900 et 1920 : autocar, chewing-gum, crawl, vamp, vitamine ;

    — entre 1920 et 1940 : break, bulldozer, chips, covalence, dévaluer, holding, ionosphère, mescaline, méson, oscar, show, technicolor ;

    — entre 1940 et 1960 : baffle, diariste, jet, marketing, offshore, pergélisol, permafrost, pop, sexy, station service ;

    — après 1960 : audit, codon, cutter, jogging, kart, patch, patchwork, permissif, pesticide.

    Aux emprunts proprement dits, il convient d’ajouter les emprunts sémantiques (qui consistent à donner une nouvelle acception, anglaise en l’occurrence, à des mots français existants comme conventionnel ou négocier), les réintroductions de termes anciennement empruntés au français par l’anglais (comme chalenge, coach), et les calques (traductions terme à terme de l’anglais comme guerre froide, cols blancs et cols bleus, homme de la rue...).

    Cette extension des emprunts à l’anglais, qui a connu une accélération depuis une cinquantaine d’années, tient au fait que l’anglais est aussi la langue de la première puissance économique, politique et militaire, et l’instrument de communication de larges domaines spécialisés des sciences et des techniques, de l’économie et des finances, du sport, etc. À cela s’ajoute que l’on concède généralement à l’anglais une concision expressive et imagée qui, si elle peut nuire parfois à la précision (surtout dans l’anglo-américain très pauvre qui sert ordinairement de langue internationale commune), s’accorde au rythme précipité de la vie moderne. Langue mondiale d’usage pratique, l’anglais (principalement l’anglo-américain) exerce une forte pression sur toutes les autres langues. Si Étiemble a popularisé, dans son livre Parlez-vous franglais ? paru en 1964, le terme qu’il avait créé en 1959, on rencontre à la même époque japlish « mélange de japonais et d’anglais », puis spanglish « espagnol et anglais », gerglish « allemand et anglais », russglish, chinglish, etc. Dans tous les pays, des inquiétudes se sont manifestées, parfois avec véhémence, des voix ont proclamé que la langue nationale était en danger. Qu’en est-il vraiment ?

    Un Dictionnaire des anglicismes de 1990 en enregistre moins de 3000, dont près de la moitié sont d’ores et déjà vieillis. Les anglicismes d’usage, donc, représenteraient environ 2,5 % du vocabulaire courant qui comprend 60 000 mots. Un Dictionnaire des mots anglais du français de 1998, plus vaste, évalue les emprunts de l’anglais à 4 ou 5 % du lexique français courant. Si l’on considère les fréquences d’emploi de ces anglicismes, on constate que beaucoup appartiennent à des domaines spécialisés ou semi-spécialisés et sont donc assez peu fréquents dans la langue courante. Quant aux termes purement techniques d’origine anglaise en usage en France, leur pourcentage est du même ordre.

    Dans l’édition en cours du Dictionnaire de l’Académie française, sur un total actuel de 38897 mots répertoriés, 686 sont d’origine anglaise (soit 1,76 %), dont 51 anglo-américains seulement. À titre de comparaisons, on trouve 753 mots d’origine italienne (soit 1,93 %), 253 mots venus de l’espagnol (0,65 %) et 224 de l’arabe (0,58 %). Pour affiner encore les statistiques, disons que 48 mots proviennent du russe, 87 du néerlandais, 41 du persan, 26 du japonais et 31 du tupi-guarani ! Sur l’ensemble des mots d’origine étrangère répertoriés dans le Dictionnaire de l’Académie, l’anglais ne représente donc que 25,18 % des importations, et est devancé par l’italien, qui vient en tête avec 27,42 %.

    Il est en outre à noter que l’on ne considère ordinairement que le lexique pour parler d’une « invasion » de l’anglais. Mais il convient également de veiller à ce que ne soient touchés ni le système phonologique, ni la morphologie, ni la syntaxe, ce à quoi s’emploie l’Académie française. Ainsi suit-elle attentivement l’évolution de certains abus tels que la propension à multiplier les tournures passives, les constructions en apposition et les nominalisations.

    Comment se comporter vis-à-vis des emprunts ? La question n’est pas neuve : au XVIe siècle, déjà, certains s’inquiétaient des italianismes — quelques centaines de mots italiens introduits en français.

    Certains emprunts contribuent à la vie de la langue, quand le français n’a pas d’équivalent tout prêt ni les moyens d’en fabriquer un qui soit commode, quand ils répondent à un besoin, et quand leur sens est tout à fait clair. C’est ainsi que Nodier, cité par Littré, remarquait que « Confortable est un anglicisme très-intelligible et très-nécessaire à notre langue, où il n’a pas d’équivalent. »

    D’autres sont nuisibles, quand ils sont dus à une recherche de la facilité qui ne fait qu’introduire la confusion : on emploie un anglicisme vague pour ne pas se donner la peine de chercher le terme français existant parmi plusieurs synonymes ou quasi-synonymes. C’est le cas, entre autres, de finaliser, performant, collaboratif, dédié à (dans le sens de « consacré à ») ou, pire encore, de cool, speed, fun, etc.

    D’autres enfin sont inutiles ou évitables, comme la plupart de ceux qui relèvent d’une mode, ceux par exemple qui ont été introduits au XIXe siècle par les « snobs » et les « sportsmen » ou ceux qui, aujourd’hui, sont proposés par des personnes férues de « high tech » ou qui se veulent très « hype » : emprunts « de luxe » en quelque sorte, qui permettent de se distinguer, de paraître très au fait, alors que le français dispose déjà de termes équivalents. Ainsi feedback pour retourspeech pour discourscustomiser pour personnaliser ou news pour informations. On remarquera qu’il en va heureusement de ces anglicismes comme de toutes les modes, et qu’ils n’ont parfois qu’une vie éphémère : plus personne ne dit speaker (à la radio), lift (pour ascenseur), ou starter, tea gown, etc., plus récemment des termes comme pitch ou soirées afterwork, un temps très en vogue, semblent passer de mode. De même, on ne dit plus computer mais ordinateursoftware mais logiciel, et on opte pour la vidéo à la demande, l’accès sans fil à l’internet, le biocarburant, le voyagiste, le covoiturage, le monospace, la navette, le passe, etc. ; cette évolution a été permise grâce au travail de terminologie et de néologie mené par le dispositif de terminologie et de néologie auquel participe l’Académie française.

    Il y a donc un tri à opérer. L’Académie française s’y consacre, par son Dictionnaire et ses mises en garde, et par le rôle qu’elle tient dans les commissions officielles de terminologie et de néologie des différents ministères et au sein de la Commission générale (voir l’article Terminologie). Elle contribue à la publication régulière d’équivalents français, répertoriés dans la base de données France Terme, accessible aux professionnels et au grand public.

  • Un blasphème signé Picasso, par Jean Charpentier.

    Quand Staline meurt, Picasso dessine son portrait sans respecter les canons du réalisme soviétique. C'est un crime de lèse-socialisme, un pur blasphème aux yeux des communistes de base. Maurice Thorez réussira à transformer l'indignation en “procès de Moscou” à la parisienne, pour consolider son pouvoir et affirmer son stalinisme.

    Il y a bien longtemps qu’en France le blasphème n’est plus poursuivi en justice. Tout au plus trouverons nous une loi sur le sacrilège sous la Restauration, vite abrogée sous la Monarchie de Juillet. Il a fallu la publication de caricatures de Mahomet dans une gazette danoise, repris par un journal français au satirisme fatigué, pour que le feu de l’indignation reprenne. Il y eut des morts. Un visage dessiné sur du papier et c’est le monde qui s’embrase. Avait-on jamais vu cela sous nos contrées pétries de modernisme et de tolérance ? Les plus anciens d’entre nous pourraient toutefois se souvenir d’un épisode, moins sanglant, certes (les morts furent politiques), mais qui en dit long sur le seuil de tolérance en matière de portrait peu orthodoxe dans certains milieux.

     

    La contre-société communiste ne supporte aucune déviance.

     

    Le 5 mars 1953, le monde retient son souffle. La radio de Moscou annonce officiellement le décès de Joseph Staline. L’univers communiste vacille. À Paris, dans la banlieue rouge, l’émotion est à son comble. Le « petit père des peuples », « le guide génial de la révolution » n’est plus. Véritable dieu vivant, le culte de Staline avait atteint des sommets lors de la célébration de son soixante-dixième anniversaire en 1949. Des milliers de cadeaux, des plus modestes aux plus coûteux, avaient été envoyés par les camarades français. Poèmes, louanges, messages d’adoration avaient accompagné les vœux des 700 000 membres du Parti. Le parti français est stalinien. Il le revendique bien haut. Son « patron », Maurice Thorez, sait en tirer la leçon politique quand il écrit en 1950 : « Nous ne sommes pas un parti comme les autres […] Retenez l’enseignement de Staline : le Parti est un corps vivant, et comme tout corps vivant il renouvelle sa substance. » Voilà une transsubstantiation qui sonne comme un avertissement, le métabolisme politique sait éliminer ses mauvaises cellules. Avec un tel corps, une doctrine d’airain, un dieu vivant, les certitudes des communistes français sont bien plantées dans cette « contre société » qui ne supporte aucune déviance, de quelques natures qu’elles soient. La même année, Paul Éluard publie ces vers :

    Staline dans le cœur des hommes
    Sous sa forme mortelle avec des cheveux gris
    Brûlant d’un feu sanguin dans la vigne des hommes
    Staline récompense les meilleurs des hommes
    Et rend à leurs travaux la vertu du plaisir
    Car travailler pour vivre est agir sur la vie
    Car la vie et les hommes ont élu Staline
    Pour figurer sur terre leurs espoirs sans bornes.

    Pablo commet l’irréparable

    Le 5 mars 1953, au carrefour de Châteaudun à Paris, la façade du siège du Parti est recouverte d’un portrait géant crêpé de noir. L’Humanité et toute la presse communiste est au diapason du deuil. Louis Aragon, figure tutélaire du communisme de plume, vient de prendre la direction des Lettres françaises revue qui réunit depuis la Résistance les écrivains les plus proches du Parti. Sans être une revue « officielle », elle est un maillon du dispositif de presse destiné à occuper le terrain intellectuel. Pour saluer le grand disparu, Aragon fait appel à Pablo Picasso pour illustrer d’un portrait la une de la revue. Picasso, artiste mondialement célèbre, ne fait pas mystère de sa proximité d’idée avec l’URSS. Il apporte son soutien au Mouvement pour la Paix destiné à réunir les artistes et les intellectuels occidentaux autour de l’Union soviétique. L’artiste dessine pour l’occasion sa désormais célèbre colombe de la Paix qui illustre les affiches de propagande. À l’appel d’Aragon, Picasso s’exécute et, le jour dit, un portrait de Staline orne les Lettres françaises. C’est la catastrophe. Le dessin de Picasso n’a rien des portraits officiels du guide de la révolution. Tous les canons du réalisme socialiste prônés six ans plus tôt par Jdanov sont brisés. À la place du visage impassible du maréchal de l’URSS, les lecteurs voient une sorte de dessin rapide représentant un Staline jeune, aux traits noirs et gris, la face barrée d’une grosse moustache sombre et coiffée d’une couronne de cheveux clairs. Un esprit chagrin pourrait voir là une caricature ; le maître se serait-il laissé aller à une fantaisie picturale ? le blasphème est bien là ! Les courriers de protestation affluent tant à la rédaction qu’au bureau politique. La condamnation du portrait est unanime et sans appel. Aragon doit faire son autocritique publique. Pour ce grand bourgeois du communisme, l’humiliation est rude. La vengeance ne sera que plus redoutable.

    Fougeron, victime expiatoire

    L’affaire aurait pu en rester là. Mais c’est méconnaître les rouages complexes du pouvoir au sein du système communiste. Depuis trois ans, Maurice Thorez est absent. Il est en convalescence en URSS. C’est Auguste Lecœur qui dirige le parti. Celui-ci n’aime guère Aragon. Il avait étrillé la saga du maître intitulée Les Communistes : « Il paraît qu’il est très difficile d’écrire un livre comme celui d’Aragon. Je ne le pense pas ». À Saint-Germain-des-Prés, on n’avait guère apprécié l’avis de ce malotru venu des mines du Nord. Lors de la publication du portrait, nul doute que Lecœur avait encouragé les militants et les sympathisants à manifester leur colère et leur indignation. Mais voilà, Maurice Thorez rentre de Moscou. La mort de Staline lui fait prendre conscience que des guerres de succession vont vite surgir dans tous les partis. L’affaire du portrait lui donne l’occasion de se débarrasser de la jeune garde formée dans la Résistance qui lui reproche son long séjour dans l’Oural, loin de tout front. Thorez fait avancer Aragon en première ligne. Celui-ci s’en prend à l’artiste Fougeron, chef de file du réalisme socialiste français auquel le secrétariat du Parti avait demandé une critique du fameux portrait. Or Fougeron, d’origine modeste, est un proche de Lecœur. Dans une tactique bien éprouvée, les attaques contre l’un rebondissent contre l’autre qui est la cible principale. Aragon, sur les injonctions de Thorez accuse André Fougeron de « tendances ouvriéristes » (un comble !) puis élargit l’accusation à toute la ligne culturelle suivie par le PC depuis l’intérim d’Auguste Lecœur. Fougeron est écarté de toutes les revues du Parti. Marginalisé, le peintre connaîtra une reconnaissance locale dans les années 1960. De son côté, Picasso est très vite « réhabilité » par l’Humanité qui publie une photographie titrée « Picasso rend visite à Maurice Thorez » en une de son numéro du 23 mars 1953.

    Entre-temps, Lecœur est convoqué à Moscou en juillet avec tous les dirigeants communistes pour entendre, dans le plus grand secret, les premières critiques à l’encontre du « culte de la personnalité » de Staline. Le vent tourne à Moscou. De retour, il reste évasif sur l’objet de la rencontre moscovite. Thorez sait que la « déstalinisation » serait la fin de son règne. C’est à ce moment que le secrétariat du bureau commande à Aragon, le 7 décembre 1953, une série d’articles contre Lecœur et sa politique culturelle « ouvriériste ». Par un tir croisé, Gaston Plissonnier, désigné par le clan Thorez, lance les accusations politiques. Trois mois plus tard Lecœur est mis sur la sellette par le comité central, une campagne de presse fait le reste. Il est définitivement exclu en 1955. Entre-temps, la purge a commencé au sein du parti. Thorez a repris les rênes qu’il ne lâchera pas quand intervient le XXe congrès du PCUS où est entendu à huis-clos le fameux « rapport Krouchtchev. » Le parti français restera stalinien.

     

    Illustration : L’immonde dessin sacrilège, œuvre d’un artiste dégénéré, prétendu compagnon des communistes.

    Ci-dessous, le vrai visage du Petit Père des Peuples.

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    Source : https://www.politiquemagazine.fr/

  • Délinquance et insécurité: les Français voient-ils juste ou sont-ils aveuglés par les faits divers?, par Adrien Peltier.

    © AFP 2021 PIERRE ANDRIEU

    Le dernier sondage IFOP sur la délinquance vient de paraître. Près des trois quarts des Français estimeraient ainsi qu’elle augmente. La majorité d’entre eux semblent de surcroît insatisfaits des politiques de sécurité actuelles. Leur perception est-elle tronquée par l’omniprésence de la question, ou est-elle conforme au réel? Décryptage.

    À écouter les Français, la délinquance n’en finirait pas d’augmenter. Cette année, ils seraient ainsi 71% à observer une hausse de l’insécurité, selon l’IFOP. Une inquiétude généralisée qui, selon Laurent Lemasson, docteur en droit public et responsable des publications de l’Institut pour la justice, reflète «correctement» la réalité:

     

    «La sécurité est dans le top 5 des préoccupations des Français depuis bien longtemps et leur perception correspond évidemment à une réalité», avance-t-il avant de préciser: «L’insécurité n’est pas toujours visible dans les chiffres qui ne montrent qu’une partie du phénomène, celui-ci n’étant pas toujours quantifiable.»

     

    A contrario, pour Véronique Le Goaziou, sociologue spécialisée dans les questions liées à la délinquance et chercheuse au CNRS, bien qu’existante, l’insécurité subit un effet de surexposition qui la rend omniprésente dans les esprits.

     

    «Le discours ambiant donne souvent l’impression d’être dans un pays à feu et à sang. Il y a eu quelques événements traumatisants cette année, toutes les rivalités entre bandes, l’histoire de cette fille tuée par ses camarades de classe,… dès lors que ces histoires tournent en boucle, elles contribuent à l’aggravation ou à l’éclosion du sentiment d’insécurité, c’est assez classique», observe-t-elle.

     

    Un avis identique à celui du garde des Sceaux, lequel affirmait en septembre: «L’insécurité, il faut la combattre, le sentiment d'insécurité, c'est plus difficile, car c'est de l'ordre du fantasme». Un sentiment nourri selon lui par «les difficultés économiques», «le Covid» et «certains médias» comme les «chaînes d'infos continues».

    La confiance en la justice entachée

    Le sondage pointe pourtant une réponse insuffisante des pouvoirs publics, qui serait même le cœur du problème de l’insécurité.

    Réalisée pour CNews et Sud Radio auprès d’un échantillon représentatif de 1.013 personnes, l’enquête s’intéresse en effet aux exigences des Français en matière de sécurité et de lutte contre la délinquance.

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    Y transparaît la volonté nette d’un système judiciaire plus strict. À la question «parmi les actions ou mesures suivantes, quelles sont celles qui vous sembleraient les plus efficaces pour lutter contre la délinquance?», les réponses les plus données concernent l’instauration de mesures plus radicales. Près de la moitié des sondés se sont ainsi montrés favorables à la suppression des aides (logement, allocations, etc.) pour les familles de mineurs délinquants multirécidivistes, ainsi qu’à l’expulsion des délinquants étrangers après avoir purgé leur peine.

    Question peines, ils sont aussi 44% à demander l’application systématique des peines d’emprisonnement. Des velléités qui suggèrent le sentiment d’une justice incomplète, ou incapable d’appliquer ses préceptes.

    L’efficacité des forces de l’ordre semble également remise en cause, avec seulement 8% des sondés réclamant avant tout l’augmentation des effectifs de police sur le terrain.

     

    «Le problème est en effet majoritairement du côté de la justice, et l’État en est directement responsable», tacle Laurent Lemasson avant d’asséner: «On observe chez une partie de la magistrature, chez les gardes des Sceaux, notamment depuis Taubira, une préoccupation pour la défense des délinquants. Quand vous entendez leurs déclarations, que vous observez leur politique carcérale, vous avez le sentiment que l’on n’a pas forcément envie de vous protéger.»

     

    Pour Véronique Le Goaziou, ces «poncifs classiques» ne sauraient refléter la réalité: «La justice traine avec elle cette étiquette de laxisme depuis plusieurs années maintenant, mais elle n’est pas une machine qui, dès lors que l’action est commise, va actionner la peine», entend nuancer la sociologue. Aussi, affirme-t-elle que les attentes du public face à la violence correspondent souvent aux propositions politiques du moment, voire aux idées en vogue: «La suppression des aides, par exemple c’est en pleine actualité, ça vient d’être voté au Sénat dans le cadre de la loi séparatisme». L’impression d’une hausse de la délinquance serait donc en partie contextuelle.

    Et dans les faits?

    Il en reste tout de même que, pour 71% des Français sondés par l’IFOP cette année, la violence continuerait de croître. Pourtant, celle-ci a bel et bien diminué, à en croire les chiffres du ministère de l’Intérieur… même si le phénomène s’explique.

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    En effet, en raison de la pandémie et des mesures restrictives, «la plupart des indicateurs de la délinquance enregistrée par les services de police et de gendarmerie reculent fortement en 2020», rapporte la place Beauveau. Seule exception, les viols (+11%) et les violences intrafamiliales (+9%) qui ont augmenté pour la troisième année consécutive. L’apparente accalmie de la violence serait donc à prendre avec nuance.

    Quoi qu’il en soit, la peur des citoyens n’est pas pour autant irrationnelle, notamment en raison de la médiatisation de faits divers parfois très violents, note Véronique Le Goaziou.

     

    «La délinquance et le sentiment d’insécurité peuvent être décorrélés. Les statistiques dont on dispose peuvent mettre en évidence une délinquance qui n’augmente pas, mais, en raison d’un malaise, une explosion de la violence peut être ressentie. Et puis celle-ci a toujours eu un côté spectaculaire qui marque.»

     

    Laurent Lemasson reconnaît, lui aussi, un écart entre les statistiques et le sentiment majoritaire des Français sur la question. En insistant toutefois sur l’incapacité des statistiques à refléter la réalité. Aussi, des faits pas si divers, aux incidences minimes dans les chiffres de la délinquance, nourrissent-ils selon lui durablement un sentiment d’insécurité parfaitement justifié, jusqu’à modifier les comportements de la population: «Il suffit d’un fait, le chauffeur de bus battu à mort à Bayonne pour avoir réclamé le port du masque à des jeunes par exemple, pour que les gens en déduisent qu’il vaut mieux ne pas s’exposer aux mêmes risques. Dans les faits, cela ne se verra pas, il y aura eu un seul mort, mais l’impact est réel». Ainsi, les Français en viennent-ils par exemple à adopter des «procédures d’évitement» des zones dangereuses.

     

    «Trois choses nourrissent le sentiment d’insécurité», explique Laurent Lemasson: «Il y a d’abord tous ces non-respects des règles de la vie commune et qui marquent une perte de confiance chez les citoyens. Deuxièmement, les violences urbaines, dont on trouve des cas tous les jours dans les journaux, tout comme le fait d’être exposé à certaines "zones de non droit". Enfin, la perception que les autorités ne répondent pas à cette demande de justice et de sécurité.»

     

    Si la délinquance est loin d’être la seule cause d’inquiétude des Français, elle risque néanmoins de peser lourdement dans la campagne présidentielle qui se prépare. Chiffre significatif, la politique sécuritaire d’Emmanuel Macron n’est jugée positive que par 26% des sondés de l’IFOP (contre 41% en avril 2018). Un pourcentage qui accrédite davantage l’idée d’une perte de confiance en la justice.

    Pour la présidentielle 2022, 55% se déclarent même prêts à renoncer à voter pour un candidat proche de leur sensibilité politique mais n’accordant pas assez d’importance à la lutte contre l’insécurité. Là non plus, rien de nouveau selon Véronique Le Goaziou, le débat sur l’insécurité étant «une thématique qui tire à elle tout le débat public et politique depuis les années 70-80». A-t-elle seulement été suffisamment prise au sérieux par les dirigeants? Pour la sociologue, aucun doute, la question a été «maximisée plutôt que minimisée, cette question étant même en tête de leurs préoccupations». Peut-être pas assez au goût des Français alors.

    Source : https://fr.sputniknews.com/

  • Mathieu Bock-Côté: l’invitation au combat anti-woke, par Elisabeth Lévy.

    Mathieu Bock-Côté © Damien Grenon / Photo12 via AFP

    Il publie « La Révolution racialiste »

    Mathieu Bock-Côté est un samouraï, un boxeur et un fin décrypteur de notre époque. Véritable manuel de guérilla à l’usage des universalistes, son dernier livre (La révolution racialiste, Les Presses de la Cité, 2021) recèle de précieuses munitions pour combattre la révolution racialiste. Le temps presse, car en attendant qu’elle dévore ses enfants, elle fait tomber de nombreuses têtes.

    2.jpgMathieu Bock-Côté n’est pas seulement un penseur, c’est un guerrier. Et ça tombe bien, dans la guerre des idées qui fait rage, nous avons furieusement besoin des deux. Pour combattre, il faut comprendre. Bock-Côté ne se contente pas d’élaborer des concepts avec précision et clarté. Il va au contact de ses adversaires, pratique l’agit-prop comme on boxe sur tous les rings où se fabrique l’opinion. Il est particulièrement réjouissant sur les plateaux de télé, où on envie son éloquence, servie par un débit en rafales – lorsqu’il est emporté dans une démonstration, on dirait qu’il n’a plus besoin de respirer.

     

    Le wokisme, exacerbation des revendications des minorités

     

    Confiné à Montréal, au printemps dernier, lorsque les protestations après la mort de George Floyd ont viré au procès planétaire de l’Occident raciste et que le comité Traoré défiait l’État à Paris, le samouraï québécois (ne le traitez jamais de Canadien) fulminait quotidiennement à la lecture d’une presse adhérant avec ostentation à la nouvelle foi. Sa compagne, lassée par ses récriminations, lui a dit : « Arrête de râler et écris un livre ! » Et cela a donné ce manuel de guérilla à l’usage des universalistes, deux cents pages nerveuses, mêlant anecdotes et pistes théoriques pour baliser et décrypter un phénomène à la fois omniprésent et insaisissable. Le tour de force de Bock-Côté, c’est de rendre intelligible l’inexplicable : comment des nations qui se sont promis d’en finir avec le racisme peuvent-elles, non seulement adhérer à une conception raciale de l’humanité et des rapports sociaux, mais encore l’appeler « Progrès » ? De même que le dépérissement de l’État exigeait d’abord sa toute-puissance, l’avènement d’une société post-raciale passe par l’exacerbation fanatique des identités raciales.

    En quelques années, les dingueries hilarantes des livres de Muray sont devenues des sujets de thèses. Et dans la vraie vie, c’est nettement moins drôle, surtout pour les nombreuses victimes de la fièvre épuratrice. Même quand on y échappe, on a le sentiment glaçant de vivre dans le monde d’Orwell où « le mensonge, c’est la Vérité », tandis que le débat public ressemble à une interminable Minute de la Haine.

     

    Le wokisme, fléau américain

     

    Au fil des pages, on découvre les dernières nouvelles du woke, toutes plus effarantes les unes que les autres. Quelques échantillons : la Petite Sirène du port de Copenhague a été affublée de l’inscription « poisson raciste »; le Parlement écossais a discuté (sans le voter) un projet de loi proposant que les propos haineux (racistes et phobes en tout genre), interdits dans l’espace public, le soient aussi en privé, permettant par exemple aux enfants de dénoncer leurs parents; aux États-Unis, des cadres et des étudiants doivent subir un test de dépistage de leurs pensées coupables et, le cas échéant, « des formations pour déconstruire leurs préjugés » – et cela arrive en France, comme à Radio France, où les salariés peuvent suivre des stages pour se délivrer de ce qu’on n’appelle pas encore leur « sexisme systémique », mais cela ne saurait tarder; le Parlement européen a voté une résolution interdisant tout propos qui pourrait « saper ou affaiblir le mouvement Black Lives Matter et en diluer la portée » – propos assimilés à du suprémacisme blanc; une pétition demande le renvoi d’une professeur de New York, parce qu’elle s’était endormie pendant une réunion zoom sur l’antiracisme, « le somnoleur est un dissident qui s’ignore, un traître ronfleur à punir ». Dans un autre registre car « l’absolutisme de la subjectivité » concerne toutes les caractéristiques humaines, l’actrice Anne Hathaway a été attaquée pour avoir joué une « méchante sorcière à trois doigts, représentation vexante pour les personnes victimes d’ectrodactylie dans la vie réelle » (que l’ami Mathieu soit remercié pour nous apprendre un nouveau mot).

     

    Le wokisme contre le mal blanc

     

    Si MBC ne cherche pas à forger un qualificatif français pour désigner le progressisme woke (mot qui signifie « éveillé »), ce n’est pas par paresse sémantique mais, précise-t-il, pour que le langage conserve la trace de l’origine américaine de ce fléau. Il en retrace à grands traits la généalogie, pour en dévoiler la cohérence. Nous assistons bien à une révolution qui, ajoute-t-il, « bascule maintenant dans la terreur » : « Après 1793 en France, 1917 en Russie et 1966 en Chine, la tentation totalitaire […] resurgit dans l’histoire à l’aube des années 2020. Nous ne sommes pas seulement devant des militants radicaux ivres de vertu […], mais face à une idéologie toxique et déjà dominante dans bien des domaines. »

    Derrière ses manifestations variées quoique répétitives, le woke est un bloc. Il part du principe que l’oppression, le racisme, la discrimination, l’exploitation des dominés-racisés-colonisés-esclavisés (vocable nouvellement arrivé dans le paysage) ne sont pas des accidents de l’histoire occidentale, mais sa logique interne, son principe vital. Pour créer un homme nouveau, doté d’un nouvel imaginaire et d’un langage purifié, il faut réécrire tout le passé, en faire apparaître le caractère intégralement criminel. La révolution woke vise donc à « extraire les sociétés occidentales de leur histoire pour les délivrer du mal blanc ». Dans le rôle de Goldstein, de l’ennemi du peuple, du koulak, on trouve toujours la même figure honnie du Blanc, raciste et privilégié par nature, tandis que, face à lui, il y a une cohorte de victimes à qui tout est permis : « Tout comme le racisé ne saurait être raciste, le minoritaire ne saurait être haineux. » Et c’est ainsi que « la haine du réactionnaire passe pour la forme achevée de l’amour de l’humanité. »

     

    Le wokisme, ennemi à combattre

     

     

    Si la branche antifa, « version milicienne de l’idéologie diversitaire » recourt volontiers à la force et à l’émeute pour intimider les récalcitrants, la nouvelle terreur préfère la pression sociale à la violence physique – pourquoi se salir les mains et payer des prisons. Pour le reste, elle utilise les bonnes vieilles méthodes. La délation devient « l’expression militante d’une nouvelle morale publique » et tous les citoyens sont appelés à exprimer bruyamment leur adhésion: « l’organisation de l’enthousiasme »est, selon le mot de Élie Halévy cité par Bock-Côté, une « marque distinctive du totalitarisme ». Le silence est une faute, comme l’ont compris les multinationales américaines. Quant à l’autocritique, elle s’agrémente fréquemment d‘un suicide symbolique, le repenti appelant à sa destitution et à son remplacement par une personnalité « racisée ».

    En attendant que cette révolution dévore ses enfants, elle fait tomber des têtes à tour de bras. Que ce soit pour la survie de la civilisation occidentale ou pour défendre sa propre liberté, il est urgent de contre-attaquer. Avec Mathieu Bock-Côté et les munitions intellectuelles qu’il fourbit passionnément, on partira à la guerre idéologique les yeux fermés. On se surprend même à penser qu’on pourrait la gagner.

     

    Mathieu Bock-Côté, La Révolution racialiste et autres virus idéologiques, Les Presses de la Cité, 2021.

    La Révolution racialiste, et autres virus idéologiques

    Price: 20,00 €

     

    Elisabeth Lévy
    fondatrice et directrice de la rédaction de Causeur.

    Sources : https://www.causeur.fr/

    https://artofuss.blog/

  • «Les écolos bobos sont notre plus gros problème»: bientôt le réveil de la colère des paysans?, par Fabien Buzzanca.

    © AP Photo / Andreea Alexandru

    Les agriculteurs de France résistent bien à la crise sanitaire, notamment grâce aux circuits courts. Mais les difficultés de la profession demeurent. Président de la Coordination rurale en Auvergne-Rhône-Alpes, Jean-Louis Ogier considère les «écolos bobos» comme le principal problème de sa profession. 

    45.jpg«Pour le moment, le Covid-19 ne nous a pas autant impactés que d’autres secteurs. Bien sûr cela crée des problèmes, mais nous ne constatons pas une vague de dépôts de bilan.» L’agriculture française résiste. C’est ce qu’a expliqué au micro de Sputnik Jean-Louis Ogier, président de la Coordination rurale (CR) en Auvergne-Rhône-Alpes et agriculteur dans le secteur des fruits et légumes.

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    Reste que tout n’est pas rose loin de là. «Nous avons perdu entre 20 et 30% de nos récoltes cette année sur certains secteurs», soulignait récemment Laurent Rouyer, président de la Chambre d'agriculture de Meurthe-et-Moselle, au micro de RCF.

     

    «Tout ce qui est vente directe fonctionne très bien. Cela s’est même développé pendant la crise. C’est évidemment plus compliqué pour tout ce qui passe par la grande distribution», résume Jean-Louis Ogier.

     

    Entre une augmentation des coûts de production liée à la crise sanitaire, des conditions météo difficiles en 2020 et la concurrence des importations étrangères, certaines exploitations accusent le coup. Jean-Luc Lemaître, éleveur de bovins, confiait récemment à France bleu Mayenne: «En blonde, on est plutôt aux alentours de 4,20 euros le kilo. Là, c'est même descendu en dessous des 4 euros. En rouge des prés, en jeunes bovins, on est à 3,70 ou 3,80 euros. La normale tourne autour de 4 euros.»

    Les circuits courts ont le vent en poupe

    Signe de la crise économique qui s’installe, les prix sont en baisse dans la grande distribution. D’après les chiffres rapportés par RMC, «alors que, en 2019 les prix dans les rayons avaient augmenté de 0,9%, ils ont baissé en 2020 de 0,14%». «Une bonne nouvelle pour notre porte-monnaie, mais pas forcément pour les agriculteurs», note la radio qui souligne que le gouvernement a appelé les grandes surfaces à faire preuve de responsabilité dans leurs négociations avec la filière agricole.

    En décembre dernier, Jimmy Guérin, président des Jeunes agriculteurs d’Ille-et-Vilaine, se confiait à 20 Minutes dans le cadre du coup d’envoi de la période de négociations entre agriculteurs et grande distribution: «Les premiers retours que nous avons ne sont pas bons. La grande distribution fait pression pour baisser les prix. On nous a beaucoup dit merci pour avoir nourri la France. Mais un merci, ça ne fait pas vivre une ferme.»

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    Le 18 décembre, son syndicat a organisé une action coup de poing dans plusieurs départements bretons. Des agriculteurs ont notamment investi un magasin Carrefour afin d’en distribuer gratuitement les produits aux clients. Selon les Jeunes agriculteurs, sur les 100 euros de courses que contient un chariot, seuls 6,50 euros reviennent au producteur. «Je peux comprendre votre action, mais ce n’est pas moi qui négocie. Le prix de vente, je peux le faire varier, mais pas le prix d’achat. J’achète à la centrale», a plaidé le directeur du magasin selon 20 Minutes.

    Jean-Louis Ogier rappelle cependant que tout n’est pas négatif. Les changements d’habitudes des consommateurs durant cette crise a modifié la stratégie de la grande distribution:

     

    «Ils ont vu l’importance des circuits courts dans le sillage de cette crise. La grande distribution joue là-dessus désormais. Ils cherchent à mettre en avant des produits français dans les rayons. Bien évidemment, c’est positif pour la profession.»

     

    Plus largement, l’appétit des Français pour les circuits courts a apporté une bouffée d’oxygène à de nombreux agriculteurs.

    C’est notamment le cas du producteur de fromages Pierre Villiers qui a raconté son histoire à TF1. Obligé de jeter des dizaines de litres de lait à la fermeture des marchés alimentaires en avril dernier, il a su rebondir. Le producteur a reçu de nombreux coups de téléphone de fermes et de distributeurs originaires de nombreux territoires français. «Un pizzaiolo s'est même mis à faire des pizzas au neufchâtel», a-t-il relaté devant les caméras de TF1. «Je pensais que j'étais seulement capable de suivre ce que mes parents m'avaient appris. Maintenant, on sait s'adapter, on sait qu'on va pouvoir trouver des solutions en cas de problème», a-t-il poursuivi.

    Même son de cloche du côté de Matthias Canto, éleveur de races à viande de la région de Rennes. Comme le rapporte 20 Minutes, il était présent lors de l’action des Jeunes agriculteurs de Jimmy Guérin. De la vente aux acteurs industriels comme Jean-Rozé ou Bigard, il est passé à la livraison en direct aux marchés et bouchers locaux. «Je m’en tire avec 5 euros du kilo. Avant, j’étais à 4 euros. Vous imaginez la différence sur une bête de 400 kilos», se félicite-t-il.

    Les militants écologistes «ne connaissent ni l’agriculture ni nos métiers»

    Si les négociations de prix restent un des plus importants chevaux de bataille des agriculteurs, ce n’est pas le seul, comme le souligne Jean-Louis Ogier:

     

    «Les écolos bobos sont notre plus gros problème. Ils ressortent sans cesse des alinéas d’arrêtés afin de nous poser des problèmes. C’est n’importe quoi. Si l’on continue comme cela, on ne pourra bientôt plus travailler.»

     

    De très nombreux agriculteurs et syndicats dénoncent depuis plusieurs années un véritable «agribashing». Ils crient leur colère face à ce qu’ils considèrent comme un manque de reconnaissance. Groupe de défense des loups, militants vegans et anti-pesticides, ils sont nombreux à s’en prendre régulièrement aux agriculteurs et éleveurs français.

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    Des dizaines d’intrusions dans des exploitations sont répertoriées chaque année. «Le bilan 2019 des atteintes aux biens commises au préjudice du monde agricole affiche une hausse de +1,5 % (+216 faits) pour un total de 14.498 faits enregistrés (deux atteintes chaque heure)», détaille le ministère de l’Intérieur. Le 10 septembre 2019, des millions de Français découvraient ces «agriculteurs traumatisés et en colère» grâce à un reportage diffusé lors du 20 heures de Gilles Bouleau sur TF1. 

    Le gouvernement a décidé de réagir. Le ministère de l’Intérieur présentait le 13 décembre 2019 la cellule Demeter, du nom de la déesse grecque de l’Agriculture. Le but de cette instance composée de gendarmes? Le «suivi des atteintes au monde agricole».

    D’après Jean-Louis Ogier, il y avait urgence:

     

    «Si l’on continue d’embêter les paysans, qui sont déjà de moins en moins nombreux, l’agriculture risque de se retrouver en sous-production. Le danger est là.»

     

    Selon l’agriculteur, les militants écologistes «ne connaissent ni l’agriculture ni nos métiers». «Quand je suis sorti de l’école dans les années 1960, les désherbants n’existaient pas. À peine les expérimentait-on dans certains coins. On faisait tout à la main. Mais il y avait beaucoup de main-d’œuvre. C’est très loin d’être le cas aujourd’hui.»

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    L’animosité entre écologistes et agriculteurs ne date pas d’hier. Mais elle semble avoir franchi un cap ces dernières années. En mai 2019, la Frapna Drôme, une branche locale de France nature environnement (FNE), recevait «sa première menace de mort en plus de quarante ans d’existence», rapporte Le Monde. Un message qui évoquait «des balles à sangliers pour les loups et les amis des loups».

    Jean-Louis Ogier s’inquiète de ce climat délétère. Ira-t-on vers des affrontements violents?

     

    «Je ne veux pas m’aventurer là-dessus, mais on ne sait pas comment les agriculteurs vont réagir, ni comment ces écolos bobos rêveurs le feront», rétorque le responsable de la section fruits et légumes de la CR.

     

    Il n’est en tout cas pas optimiste pour l’avenir de la profession, gangrenée par un taux de suicides supérieur de 12,62% au reste de la population: 

     

    «Je plains les jeunes qui vont se lancer dans l’agriculture. Quand je vois les masses d’argent nécessaires pour faire tourner une exploitation, je me dis que c’est impossible avec les prix que l’on nous propose.»

    Source : https://fr.sputniknews.com/

  • Rendre compte de la guerre, entre distance et engagement, par Christophe Boutin.

    Entre genre littéraire et arme politique, le journalisme de guerre, au XXe siècle, consiste à prendre parti pour un camp ou à philosopher sur l'idée même de conflit.

    Les correspondants de guerre doivent à la fois en faire comprendre la stratégie ou les implications géopolitiques et faire sentir ce qu’elle peut avoir de tragique. Dans sa riche introduction à un volume qui leur est consacré, Emmanuel Mattiato évoque la naissance de telles informations, remontant aux campagnes contre le Turc au XVIIe siècle, pour noter qu’au cours des XIXe et surtout XXe siècles « la presse se politise véritablement en se divisant pour la première fois entre droite et gauche, et, grâce aux progrès techniques, fixe dans leur quasi immédiateté (leur actualité) le récit de guerres d’un nouveau genre ».

    Entre sous-genre littéraire et arme politique, de la guerre de Sécession à celle de 70, naît un « mythe moderne » – l’auteur renvoie au personnage de Gédéon Spillet dans L’Île mystérieuse de Jules Verne. Si la guerre est une chose trop sérieuse pour être confiée aux militaires, son compte rendu l’est aussi, même quand le pays n’y est pas directement engagé, ne serait-ce que parce qu’il participe au concert des nations. Armées ou gouvernements font des choix d’accréditation permettant à certains d’aller en première ligne et reléguant les autres à l’arrière, et le premier conflit mondial redéfinira la place d’une propagande essentielle pour maintenir le moral des troupes comme celui de l’arrière dans une même union sacrée. Mais tandis que monte la tension entre démocraties et totalitarismes, la presse politique manifeste sa vitalité dans l’entre-deux-guerres – période que traite cet ouvrage – avec deux opérations militaires relevant d’un colonialisme tardif, l’Espagne dans le Rif et l’Italie en Éthiopie, puis la guerre d’Espagne.

    Après la défaite d’Anoual (1921), l’Espagne reprend la lutte au Maroc, engageant ses troupes indigènes, les regulares, et sa Légion. Teresa de Escoriaza (Christine Lavail) se voit alors confier un reportage sur la situation des hôpitaux de campagne. Elle ira plus loin, se tenant au plus près de toutes les victimes, militaires espagnols comme victimes civiles des exactions des légionnaires, mettant en exergue des cas particuliers pour mieux toucher son public. Ernesto Gimenez Caballero (Manuelle Peloille) rend compte de cette même guerre du Rif autour d’un questionnement sur ce que devrait devenir cette Espagne qui n’a pas su garder ses colonies américaines et qui s’est tenue à l’écart du premier conflit mondial, plongée ici dans une guerre moderne déstabilisante – par la violence de la défaite initiale mais aussi en accentuant l’écart entre troupes métropolitaines et troupes coloniales. Pas question pour lui de grandes figures de héros : mécanisation, massification, ennui et abrutissement seraient la règle pour des soldats présents sans véritablement savoir pourquoi. Manuel Azana enfin (Elvire Diaz) est ici présent pour ses écrits portant sur la Grande Guerre d’une part, sur la guerre civile espagnole d’autre part, proposant une analyse globale de ces conflits qui va au-delà du simple reportage.

    Correspondant ou historien ?

    C’est au sujet de la guerre d’Éthiopie que reviennent les vrais correspondants de guerre, américains (Mauro Canali) ou plus globalement étrangers (Matteo Scianna). On suit des personnalités comme Evelyn Waugh, qui tira de cette expérience son admirable roman Scoop, chef-d’œuvre d’humour (on se souviendra de l’équipement surréaliste avec lequel part le héros), comme Georges L. Steer, représentant du Times qui sera quelques années plus tard, lors du Second conflit mondial, officier des services de propagande dans cette même Éthiopie puis en Birmanie, ou comme le général John M. C. Fuller, sympathisant d’Oswald Mosley venu pour le Daily Mail… Indro Montanelli (Sara Izzo) est lui un soldat du 20e bataillon érythréen qui livre des textes sur la vie quotidienne de cette unité qui n’a jamais été vraiment engagée, sorte de carnet de voyage dans des fortins perdus rappelant plus Le Désert des Tartares de Dino Buzatti que les Orages d’acier de Jünger.

    Olivier Dard fait le lien entre le conflit éthiopien et la Guerre d’Espagne en suivant ces nationalistes français qu’il connaît mieux que personne. Dans l’affaire d’Éthiopie, Gringoire, où officie Henri Béraud, mais aussi L’Action française, avec Jacques Bainville et Henri Massis, s’opposent aux sanctions contre l’Italie et dénoncent la main de l’Angleterre. Mais ils ne se rendent pas sur place, contrairement à Jérôme Tharaud, qui publie Le passant d’Éthiopie, ouvrage dans lequel il s’attache à mettre en perspective l’histoire du pays. Reste que s’il critique le Négus et son armée, c’est la guerre vue de très loin. Quelques années plus tard, avec Cruelle Espagne, le même Tharaud sera cette fois plus impliqué : après avoir évoqué ses rencontres passées avec les dirigeants espagnols pré-républicains, il dénonce l’« immonde tuerie qu’est une guerre civile », mettant en perspective la « terreur rouge » dans le Nord et la répression qui a suivi la prise de Badajoz par les troupes de Franco. Pierre Héricourt, venu de L’Action française, s’engage lui clairement derrière Franco, après avoir rencontré au Maroc des Espagnols fuyant les exactions du camp républicain, et son Pourquoi Franco vaincra sera bientôt complété par Pourquoi Franco a vaincu, puisque, finalement, han pasado… Autre intervenant plus militant ici que simplement correspondant de guerre, Jean Hérold-Paquis, qui sert dans la Bandera Jeanne d’Arc avant de parler au micro de Radio Saragosse. Reste bien sûr à évoquer un Robert Brasillach qui va publier, avec Henri Massis, un ouvrage glorifiant la résistance des Cadets de l’Alcazar, puis avec Maurice Bardèche une Histoire de la guerre d’Espagne. Correspondant de guerre ou, déjà, historien d’un conflit ? L’Espagne présente dans Notre avant-guerre est bien autre chose en tout cas que le simple lieu d’affrontements guerriers.

    Dans le camp opposé, les études présentées concernent essentiellement les « reportrices » (Anne Mathieu) travaillant pour Le Populaire, journal de la SFIO, ou la presse communiste, L’Humanité ou l’hebdomadaire Regards qui dénoncent les exactions des nationalistes et les menaces fascistes en Europe. D’autres femmes écrivains (Alison Palio) vont se mettre en scène en tant que « femmes écrivant » au cœur de cette tourmente avec toujours un accent particulier sur les souffrances des populations civiles espagnoles du côté républicain.

    La distance de l’écrivain

    Reste un cas particulier, celui d’Antoine de Saint-Exupéry (Lola Jordan) rendant compte de ce qu’il voit en Espagne dans Paris-Soir et dans L’Intransigeant. Il part souvent de circonstances particulières – l’arrestation d’un supposé républicain, des bombardements lointains – pour faire saisir au lecteur l’angoisse que génère une guerre civile comme le caractère irréel des combats. Saint-Exupéry renvoie ainsi à des questions sur ce que devient l’homme dans la guerre – rendant compte d’une certaine symétrie des attentes des soldats des deux camps –, tenant « plus de l’écrivain-voyageur que du correspondant de guerre ». Un dernier texte sur Ersnt Jünger (Laila Youssef Sandoval) traite lui aussi compte de cette distance conservée par rapport à la guerre par un tout autre écrivain.

    Le lecteur constatera la diversité de ces comptes rendus qui trouvent tous un débouché journalistique mais qui, en dehors des divergences politiques, montrent surtout combien l’approche du conflit peut différer. Pour beaucoup de correspondants envoyés par une presse de plus en plus politisée dans cette période, la neutralité ou l’objectivité ne sont pas de mise : il s’agit de prendre parti, non pas contre la guerre en soi, mais uniquement contre la manière dont le camp d’en face la mène. De manière symbolique, ensuite, on notera la part belle laissée à l’émotion, avec une personnalisation des situations très éloignée du seul déroulement des opérations militaires. Mais pour d’autres de ces correspondants, la guerre est vite prétexte à une réflexion sur les grandeurs et servitudes de l’état militaire, sur la situation de leur pays, quand ce n’est pas sur la nature de l’homme. En suivant ces récits croisés, on comprend qu’il faille souvent attendre les historiens futurs pour comprendre ce qui s’est vraiment passé…

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     Emmanuel Mattiato, Manuelle Peloille et Olivier Dard,  Correspondants de guerre 1918-1939. Maroc-Éthiopie-Espagne, Presses Universitaires Savoie Mont Blanc 2020 ; 321 p. 25 €

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    Source : https://www.politiquemagazine.fr/