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LAFAUTEAROUSSEAU - Page 1513

  • Alain de Benoist : « De saint Thomas d’Aquin au pape François, l’Église a toujours dénoncé le règne de l’argent »

     

    A l'heure de la visite du pape François aux Etats-Unis, dont celui-ci ne manquera pas de critiquer le consumérisme et où il serait étonnant qu'il ne dénonce pas le règne de l'argent, l'un des piliers de la société américaine et moderne, sinon le plus fondamental, la réflexion d'Alain de Benoist sur ces sujets nous paraît opportune et juste. Sans remonter plus avant dans le cours de l'histoire des idées, rappelons que la critique de l'Argent-Roi est au cœur de l'Avenir de l'Intelligence de Maurras, l'un de ses maîtres-livres; au cœur, aussi, de la politique et de l'anthropologie d'un Pierre Boutang. Alain de Benoist nous rappelle ici, à juste titre, que cette critique est beaucoup plus ancienne; qu'elle s'enracine dans une certaine sagesse éternelle, ou philosophia perennis; et que, en ce sens, elle s'oppose radicalement à la modernité. Nous partageons ces analyses.  LFAR   

     

    1530443371.jpgLa sagesse chinoise nous dit que si l’argent peut être un bon serviteur, il sera toujours un mauvais maître. Tout ne dépend-il pas en réalité de l’usage qu’on en fait ? Et d’ailleurs, tout le monde n’en a-t-il pas besoin ?

    On a aussi besoin tous les jours de papier toilette, mais on ne le sacralise pas pour autant ! Ceux qui s’imaginent que l’argent est « neutre » sont les mêmes qui croient que la langue n’est qu’un moyen de communication (alors qu’elle est avant tout porteuse d’une conception du monde) et que la technique est bonne ou mauvaise selon l’usage qu’on en fait (alors que, quel que soit cet usage, elle implique un rapport au monde qui lui est propre).

    Pris dans son essence, l’argent peut être défini comme l’équivalent universel. Il est ce qui permet de réduire toutes les qualités à une quantité, c’est-à-dire à un prix. Il est ce qui montre en quoi toute chose peut être regardée comme semblable à n’importe quelle autre. L’argent, d’autre part, est une médiation sociale, où la liberté individuelle s’identifie à l’objectivation des relations d’échange (l’individu se projette dans la prestation monétaire), comme l’a bien montré Georg Simmel dans sa Philosophie de l’argent. La monnaie elle-même n’est jamais seulement une monnaie. L’euro, par exemple, est aussi une forme subtile de gouvernance permettant d’équarrir le salariat en liquidant les acquis sociaux.

    La condamnation de l’argent court tout au long de l’histoire européenne, depuis la critique aristotélicienne de la chrématistique, c’est-à-dire de l’accumulation de la monnaie pour elle-même, jusqu’au pape François qui, dans La Joie de l’Évangile (2013), dénonçait le « fétichisme de l’argent » et la « dictature de l’économie sans visage ». Thomas d’Aquin n’écrivait-il pas déjà que « le négoce, envisagé en lui-même, a quelque chose de honteux » (Somme théologique) ?

    Mais le « règne de l’argent », qu’est-ce que cela signifie exactement ?

    Le règne de l’argent, c’est la transformation de toute chose en son équivalent monétaire, c’est-à-dire en son prix. C’est aussi la substitution de richesses marchandes et artificielles aux richesses premières offertes par la nature. C’est enfin la mise en place d’un monde où toutes les finalités pratiques sont considérées comme interchangeables, et qui se détache des finalités pour s’investir dans la rationalisation des moyens. Tout cela s’opérant au nom des « lois du marché ».

    Le marché au sens moderne du terme n’a évidemment rien à voir avec les anciens marchés de village. Il désigne un système supposé autorégulateur et autorégulé, mais en réalité institué dans l’Histoire, qui tend à devenir aujourd’hui le paradigme de toutes les activités humaines, publiques et privées : marché du mariage, marché politique, marché de la santé, etc.

    Les fondateurs du libéralisme (Adam Smith, Quesnay, Mandeville, etc.) affirment tous que le marché est la forme naturelle de l’échange car l’homme est fondamentalement un Homo œconomicus, naturellement toujours porté à rechercher son utilité (son meilleur intérêt matériel), en d’autres termes un agent autonome et rationnel dont tous les actes obéissent à la logique marchande. La vertu sociale se trouve ainsi disqualifiée, les vices privés étant censés faire le bonheur public (c’est le thème de l’« harmonisation naturelle des intérêts » sous l’effet de la « main invisible » de la « concurrence libre et non faussée », nouvel avatar de la Providence). Rien ne doit plus entraver la recherche du profit. L’activité économique justifie la cupidité et devient la raison même de la vie.

    Partant de là, il est aisé de comprendre comment le capitalisme a pénétré tous les aspects de la vie pour les soumettre à la règle du « toujours plus » : l’illimitation de la marchandise répond à celle de désirs immédiatement transformés en besoins. L’argent sert à produire des marchandises qui produisent encore plus d’argent. La valeur d’échange prend le pas sur la valeur d’usage, et la « loi du marché » s’impose partout : marché des joueurs de football, marché de l’art contemporain, marché immobilier, marché du travail, marché des organes, des cellules souches, des embryons, des mères porteuses, etc. Et les paysans, successivement transformés en « agriculteurs », puis en « producteurs agricoles », ne sont pas les derniers à être victimes de cette loi du profit qui ne leur laisse que la liberté de crever.

    Hier surtout industriel, le capitalisme est devenu aujourd’hui fondamentalement financier ? Est-ce la raison pour laquelle nous sommes en train de passer, pour reprendre les mots du Vatican, d’une économie de marché à une société de marché ?

    Dans son livre récent, Ce que l’argent ne saurait acheter, Michael Sandel s’interroge sur une société où tout ce qui échappait auparavant aux « lois du marché » (la terre, l’art, la culture, le sport, la socialité élémentaire) leur est désormais soumis. « Devons-nous admettre, écrit-il, que l’on paie des chômeurs pour qu’ils fassent la queue à notre place, que la Sécurité sociale paie les fumeurs ou les personnes en surpoids pour qu’ils se prennent en main, que les enfants reçoivent de l’argent de l’école quand ils ont de bons résultats scolaires, que les prisonniers puissent payer pour avoir de meilleures cellules ? Voilà quelques-unes des questions bizarres, mais fondamentales, auxquelles nous soumet l’extension du marché. » Sandel montre ensuite que, lorsque l’argent régit toutes les transactions sociales, les incitations monétaires peuvent avoir l’effet inverse de celui escompté, car l’argent érode la valeur des biens auxquels il permet d’accéder (payer un enfant pour qu’il aille à l’école porte atteinte à la notion même de l’éducation).

    Une société qui n’est plus affaire que de contrats juridiques et d’échanges marchands n’est tout simplement pas viable, car les contrats et les échanges ne se suffisent jamais à eux-mêmes et ne sauraient donc fonder une société. Le système de l’argent périra par l’argent, ce dont on pourrait bien s’apercevoir bientôt.

    Entretien réalisé par Nicolas Gauthier - Boulevard Voltaire

  • Aux « envahisseurs » : Allez vous battre pour défendre vos pays comme des hommes, au lieu de les fuir !

    Par Academos 

    academos.jpgOn célèbre depuis l'an passé le triste centenaire de la Guerre de 14, qui fut à la fois une page glorieuse  et héroïque et, hélas, une monstrueuse boucherie; le premier acte du suicide de l'Europe, qui devait reprendre vingt ans après, en 1939...

    Mais, qu'ont fait les Français, en 14 ? Et, avec eux, les Belges, les Anglais et tous nos alliés : ont-ils fui la guerre, pour se réfugier en Corée, en Uruguay ou bien je ne sais où ? Non, ils sont restés, et se sont tombés par centaines de milliers, pour leur patrie et leur liberté. Un million et demi de morts : quasiment toutes les familles de France ont eu un ou plusieurs tués dans ce conflit atroce et glorieux; dans la mienne, le jeune Français qui était mon oncle Georges, Camelot du Roi, est allé mourir, à l'âge de vingt ans, dans l'une des forêts des Ardennes, à la frontière belge : il est mort pour la France, et n'est pas allé pleurer dans un autre continent, pour y vivre de la générosité des autres.

    Or, vous, c'est ce que vous faites : on vous voit chaque soir à la télé, pleins de vie et d'énergie - mais aussi de hargne... - soudainement nourris, ma foi (rien à voir avec les images des malheureux rescapés des sinistres Camps, faméliques et décharnés...); et l'on apprend que chacun d'entre vous coûtera à la collectivité 1.000 euros par mois (en attendant la femme et les enfants, qui viendront vous rejoindre bientôt...), dont 200 au titre de la scandaleuse AME. Les Français pauvres, mal-logés ou qui meurent dans la rue, chaque hiver, passent après (ou pas du tout, du reste...), mais, vous, vous êtes prioritaires, et, pour vous, se déploie une frénésie d'aides en tous genres qui fait rêver !

    Quant aux responsables politiques et aux journaleux immigrationnistes qui nous bourrent le crâne trente heures sur vingt-quatre et dix jours sur sept, qu'ils se remémorent la sentence latine : Caveant consules ! car les Français ordinaires commencent à en avoir assez. Vraiment assez et franchement marre...  • 

     

  • PAS PLUS MAIS MIEUX

     

    par Louis-Joseph Delanglade

     

    Alors que le chaos migratoire se propage dans les Balkans, on peut se demander qui contrôle quoi que ce soit dans lEurope de Schengen - dont lincurie est manifeste. Devant la montée de la grogne des opinions publiques et les désaccords de fond au niveau le plus élevé, un sommet européen « extraordinaire » est prévu ce mercredi 23 pour faire accepter le principe des quotas dans la répartition des « réfugiés ». Ce sommet permettra sans doute de trouver un de ces compromis boiteux et dilatoires dont lU.E. a le secret : tout est possible, rien nest réglé. Mais on envisage aussi daider Turquie, Liban et Jordanie à gérer leurs camps de réfugiés, de créer aux frontières extérieures de lUnion des centres de tri pour repérer les migrants économiques et dorganiser le retour de ces derniers dans leurs pays. On voudrait donc parquer, discriminer, exclure. Beau et humaniste programme - mais scepticisme de rigueur : dommage, car on pourrait sen inspirer pour traiter le problème de limmigration en général.

     

    Le vrai problème en effet, en tout cas pour la France, est que cet afflux, hélas trop prévisible, dimmigrés proche-orientaux, survient après des dizaines dannées dune immigration folle qui a vu sinstaller, de façon régulière ou clandestine, des millions d’étrangers extra-européens pas forcément désirables - même si ce nest pas le cas de tous, il faut le reconnaître. Certains ont été naturalisés, beaucoup ont eu de nombreux enfants, nés ici et bénéficiant donc du droit du sol, mais qui doivent être comptabilisés si on veut vraiment prendre en compte les réalités. Du coup, même sils « valent » beaucoup mieux que la plupart de leurs prédécesseurs, ces vingt-quatre mille Syriens sont un peu la goutte deauLe vase est plein. Une première condition à toute immigration réussie est en effet quelle soit quantitativement acceptable : les bornes ont été franchies, non possumus.

     

    Il est vrai que lEurope est coupable. Coupable d’être tout à la fois une maison de retraite (à cause du vieillissement de sa population) et une armée du salut (à cause de son humanitarisme compassionnel psychotique). Il est peut-être écrit que certaines des nations qui la composent, en pleine décadence, sont entrées en agonie. Peut-être; mais peut-être seulement, car un sursaut et une renaissance ne peuvent être totalement exclus. Ce dont on doit être sûr, cest que cela ne passera pas par lUnion, mais se fera contre elle. Car, sur le plan politique, le problème de lEurope, cest« lEurope » - le même nom désignant abusivement deux réalités bien différentes : celle-ci, vaste marché économique, sans âme, dans lequel ne peut se reconnaître aucun pays, ni aucun Européen; celle-là, façonnée par les millénaires de lHistoire et dont il est facile de dire qui en est et qui nen est pas.

     

    Ce nest pas plus dEurope quil faut, cest mieux dEurope : une Europe qui commence par saimer elle-même, à travers ses diversités culturelles et nationales au lieu de bader les « barbares ». Une Europe sûre de ce quelle est et qui nen accueillera que mieux les immigrés quelle voudra bien accueillir. 

     

  • Algérie : « Monsieur Frère » et l'Odjak des janissaires [1]

     

    Une analyse de Bernard Lugan

    La stabilité de l'Algérie est-elle compromise ? Quiconque se soucie de l'avenir de la France, de sa propre stabilité, ne peut manquer de se poser, dans toute son ampleur, cette inquiétante question. Elle nous concerne directement pour toutes sortes de raisons qu'il est sans-doute inutile de rappeler ici. On en pressent de façon très immédiate toute la gravité. Samedi 19 septembre, Bernard Lugan, grand spécialiste de l'Afrique, a publié sur son blog une note qui traite de la question du pouvoir en Algérie, de la succession de Bouteflika, des manœuvres qui sans-doute la préparent, des incertitudes qu'elle réserve. On lira cette note avec attention en attendant la suite que Bernard Lugan a annoncée. Malgré les apparences, nous ne nous sommes peut-être éloignés de la question des migrants que par anticipation. LFAR

     

    46878456-jpeg_preview_large.jpgEn Algérie, les récents limogeages opérés à la tête de l'armée et des services spéciaux ont une explication: le pays n'est plus gouverné par le président Abdelaziz Bouteflika, mais par Saïd, son frère.

    Enseveli sous de très graves affaires de corruption, ce dernier sait qu'il ira dormir en prison au lendemain de la mort clinique de son aîné s'il ne s'est pas auparavant taillé un pouvoir à sa main. Or le temps presse puisque, depuis sa réélection le 17 avril 2015, Abdelaziz Bouteflika n'a assisté à aucune  cérémonie officielle en raison de son état de santé...
     
    Voilà pourquoi le général "Toufik" Mediene qui avait osé dénoncer les trafics de "Monsieur frère" vient d'être remplacé à la tête de la DRS (le contre-espionnage) par le général Bachir Tartag. Quand des nominations officielles à des postes importants sont décidées, elles sont normalement annoncées par l'APS (Algérie Presse Service), l'agence de presse officielle; dans le cas présent, ce fut par d'obscurs canaux...remontant directement à Saïd Bouteflika.
     
    Ce remplacement intervient après plusieurs autres, dont ceux du général M'Henna Djebbar, chef de la direction de la sécurité de l'Armée, du général Rachid Laalali, chef de la DSE (Direction de la sécurité extérieure), du général Ahmed Bousteila, chef de la gendarmerie etc. Tous au profit du général Ahmed Gaïd Salah, chef d'Etat-major et vice-ministre de la Défense, né en 1940.
     
    L'alliance avec l'Etat-major a donc permis à Saïd Bouteflika d'écarter le très puissant général Mediene. Est-elle pour autant un gage de survie? Il est permis d'en douter.
    Si parmi les hauts cadres de l'Odjak, ceux qui ont des comptes à rendre à la Justice devraient lui rester fidèles, la loyauté des autres est incertaine. Lesquels parmi les généraux, notamment chez les nouvellement promus, voudront en effet apparaître liés aux profiteurs du régime quand la rue grondera dans un dramatique contexte économique et social aggravé par l'effondrement du prix des hydrocarbures[2]?
     
    Dans la course contre la montre engagée par Saïd Bouteflika, trois grandes hypothèses se dégagent:
     
    1. Saïd Bouteflika et l'Etat-major s'entendent pour installer un homme de paille au pouvoir.
     
    2. L'Odjak se refait une "vertu" à bon compte en donnant la tête de Saïd Bouteflika au peuple avant de placer l'un des siens aux commandes.
     
    3. Prenant tout le monde de vitesse, "Monsieur frère" s'empare directement du pouvoir...
     
    Une situation à suivre, mais qui interdit de fonder une politique sécuritaire régionale sur l'Algérie. 
     
    Le blog de Bernard Lugan
     
  • L'image du jour • Vous voyez bien qu'il n'y avait pas besoin que la France sorte de Schengen : L'Allemagne l'a fait !

    Source : Figarovox

  • Loisirs • Culture • Traditions ...

  • Famille de France • Les parachutistes reçus par le duc et la duchesse de Vendôme au Domaine Royal de Dreux

     

    Samedi 12 septembre 2015, LLAARR le duc et la duchesse de Vendôme ont ouvert les portes du Domaine Royal de Dreux et de la Chapelle Saint-Louis aux anciens paras de la région Centre pour une messe en hommage à Saint-Michel, leur saint patron et à leurs camarades morts pour la France.

    Lors de cette messe, les anciens soldats, certains le revers du veston couvert de médailles, ont souhaité rendre un hommage  particulier au Prince François d'Orléans  mort pour la France le 11 octobre 1960 à Imzouagh, en Algérie, en allant se recueillir devant son tombeau et en lui offrant l'honneur de leurs drapeaux,  avant de se rendre en cortège au monument aux morts du centre-ville de Dreux . 

    Avant de partir, les anciens bérets rouges ont proposé au prince de poser avec eux pour une photo de groupe des anciens combattants pour la France, un honneur que le prince a souhaité saluer en se joignant à eux coiffé de son béret du 7e régiment des chasseurs d'Arras .

    (Texte: La Couronne / Photo: Jean Cardoso)

    On retrouvera les diverses phases de cette cérémonie grâce au reportage photographique qui en a été donné par la Mairie de Dreux. Et que nous mettons en ligne en totalité. 

    Nous ajouterons, enfin, pour l'information de nos lecteurs, que le prince Jean est colonel de réserve de l'Armée française. 

     

    Reportage photographique

    Pour accéder à la totalité du reportage, cliquer sur l'une quelconque des photographies ci-après.  

     

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     Saint Michel Régionale, samedi 12 septembre 2015, à Dreux, organisée par l'Union Nationale des Parachustistes et la Section 281 "Lieutenant Antoine De la Batie".

     

  • SOCIETE • Robert Ménard : « Toute opinion non conforme n’est plus une opinion mais un délit »

     

    Comme Michel Houellebecq, Robert Ménard n'a pas peur de l'idéologie dominante. Il n'estime pas ces gens, ni ne   recherche leur estime. C'est en somme ce qu'il vient d'exposer dans un entretien paru dans Boulevard Voltaire - que nous reprenons ici en toute sympathie et amitié d'esprit. LFAR

    Deux députés socialistes ont annoncé leur intention de saisir le président de la République pour demander votre révocation. Votre réaction ?

    Je les trouve un peu mous en ce moment. S’ils veulent être dignes des « grands ancêtres », Fouquier-Tinville, l’homme de la Terreur de 1793 ou Beria, le ministre de l’Intérieur de Staline, ils devraient demander qu’on me déchoie de mes droits civiques, qu’on m’envoie en rééducation dans un camp aux îles Kerguelen. A minima, mon arrestation par le RAID. Juste ma révocation, c’est léger.

    Il semble que ce manque de vigueur entraîne une faible mobilisation. Seulement 3.000 signatures à leur pétition. Alors que la vidéo qu’ils me reprochent a été vue, elle, tous hébergeurs confondus, par plus de 500.000 personnes ! Bref : peut mieux faire.

    Cela étant, de quoi m’accusent-ils ? D’être dans l’illégalité ? Balivernes ! Un maire a parfaitement le droit d’aller avec la police municipale dans un immeuble et de dire à des squatteurs sa façon de penser. Sur ce point comme dans tant d’autres affaires, on assiste à une inversion radicale des faits et de leur présentation. Est-il normal que des gens entrés en France illégalement, entrés dans des appartements illégalement, bénéficiant illégalement de l’eau et de l’électricité, voient cette situation légalisée ou en cours de légalisation par le président de l’OPHLM, par ailleurs président de la communauté d’agglomération, et par l’État ?

    Ce n’est pas la première fois que l’on réclame pareille sanction à votre égard.

    Et sans doute pas la dernière. Pour une raison très simple : ces députés socialistes, inconnus du grand public national, se payent grâce à moi un peu de notoriété. Ils sont parmi les premiers à m’accuser de vouloir faire le buzz, mais ils en veulent leur part.

    Cela étant, leur démarche obéit à un autre but que celui de faire parler d’eux. Ils veulent criminaliser mon action, comme d’ailleurs celle de tous ceux qui ne pensent pas comme eux. Ils savent que leur demande de révocation sera vaine, cette fois comme les précédentes. Mais, ce faisant, ils déplacent le débat. D’un sujet politique, propre à l’espace public, ils veulent faire un dossier judiciaire. Pour faire simple : avec eux, toute opinion non conforme n’est plus une opinion mais un délit.

    Derrière leurs masques d’élus en costume-cravate, il ne faut pas se tromper : ces gens ne sont ni des démocrates ni des républicains. Ils veulent faire peur à toute vraie opposition. L’avis de la majorité du peuple, ils s’en fichent ! Ce sont des hommes de guerre civile.

    Par ailleurs, Télérama et d’autres s’insurgent contre le fait que vous soyez invité sur des plateaux de télé : vous en êtes choqué ? 

    Je le prends comme un hommage. C’est qu’ils me jugent pas trop mauvais et que ça les dérange. Après, choqué… Ils sont tellement prévisibles. Ils se ressemblent tellement, tous, avec leurs préjugés qui nourrissent leur mépris. Demander une telle interdiction, c’est une défaite de la pensée.

    Le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve vous a personnellement attaqué hier au Sénat. Toujours à propos de la vidéo de votre visite aux réfugiés syriens, il a parlé de « comportement abject ». Une réponse ?

    Cette attaque confirme tout ce que je viens de vous dire. Bernard Cazeneuve, impuissant notoire pour ce qui est des actes contre la délinquance, condamne verbalement un élu qui lui reproche de ne pas faire son travail de ministre de l’Intérieur. Il a de la chance, beaucoup de chance, que les Français ignorent à quel point l’État est démissionnaire face à la délinquance. Le journal municipal aura l’occasion, bientôt, de mettre M. Cazeneuve face à ses responsabilités pour ce qui est de Béziers. Quand on connaît la réalité et qu’on voit le ministre parader sous les ors du Sénat, on pourrait à bon droit être partagé entre la colère et le dégoût. Pour ma part, cela me fixe le devoir de ne pas changer de cap. 

      

     

  • MEDIAS • Libération, ONPC : l'honneur fait à Michel Onfray !

     

    Par Philippe Bilger 

    Philippe Bilger estime, dans l'excellente tribune qui suit, que le dossier à charge consacré à Michel Onfray par Libération honore davantage cet intellectuel qu'il ne le disqualifie. En réalité, la réflexion de Philippe Bilger tendrait plutôt à démontrer l'insignifiance de Laurent Joffrin, personnage peu sympathique, suffisant, et en fin de compte relativement négligeable. Mais, dans le Figaro magazine de cette semaine, Eric Zemmour écrit une lettre remarquée « à Michel Onfray, mon nouvel ami ». Et ainsi se forme, par delà leurs différences, parfois leurs oppositions, leurs personnalités contrastées, une pléiade d'intellectuels que réunit leur refus du formatage que voudrait imposer le Système. Et que réunit aussi, malgré tout, leur commun attachement à un certain nombre de réalités historiques, culturelles, charnelles aujourd'hui menacées. Certes le dit Système tient encore les principaux leviers de commande. Mais face aux crises qui s'avancent et aux oppositions qui se forment, il n'a, comme on dit dans le langage populaire, qu'à bien se tenir ! LFAR  

     

    6830bcccdd66568bec1c72c800487f2b lfar.jpgLibération a publié « Nos réponses à Michel Onfray » sur « Migrants, FN, Médias » et a consacré quatre pages - en sélectionnant des extraits d'un entretien paru le 10 septembre dans Le Figaro - à lui répliquer, à le contredire.

    En page 2, en gras et en caractères immenses, cette affirmation: « Comment Michel Onfray fait le jeu du FN ».

    C'est Laurent Joffrin qui a assumé la lourde et ingrate charge de cet exercice et, comme c'était prévisible, il a donné encore plus de force et de vigueur à l'argumentation prétendument choquante de ce philosophe.

    Si Michel Onfray était vaniteux, il pourrait s'enorgueillir de cet hommage pervers qui fait parler de lui et le place, à nouveau, au centre d'un débat qu'il n'a pourtant pas initié.

    Je suis persuadé que le quotidien du 15 septembre a été énormément vendu, ce qui autorise l'interprétation évidente que la personnalité, les propos et l'aura de Michel Onfray ont beaucoup plus attiré les lecteurs que « Nos réponses » de Libération. L'absurdité du procès que sa pertinence.

    Il est vrai que sont navrantes cette page 2 présentant comme une certitude ce qui est tout au plus une élucubration indécente, et les deux pages suivantes où Laurent Joffrin s'essouffle à demeurer à la hauteur, même critique, même partiale, de convictions face auxquelles il rend les armes en croyant les vaincre.

    Aucune de ses répliques n'est décisive et on a de la peine pour lui, tant il cherche désespérément à trouver des motifs pour instiller de la contradiction à l'égard de propos à la limpidité rude, âpre et sans fard.

    On est obligé de s'interroger sur les causes d'un tel masochisme médiatique, entraînant Libération dans un gouffre de banalité idéologique: Michel Onfray, avec lequel on est en désaccord, fait forcément le jeu du FN !

    Je savais qu'un jour la pensée convenue se servirait de cette pique qui n'a plus le moindre effet corrosif tant c'est devenu un poncif que de «sortir» le FN quand on est dépassé et que l'impuissance vous guette. Je ne peux pas ne pas voir dans cette étrange entreprise menée par un quotidien vantant pourtant sa liberté et son anticonformisme la manifestation d'une connivence, entre le pouvoir et lui-même. Il n'est pas indifférent en effet que le journal prenne la relève du Premier ministre qui s'était ridiculisé en enjoignant à Michel Onfray d'avoir tort avec BHL et avec la gauche plutôt que raison avec Alain de Benoist.

    Il n'est pas anodin non plus que dans le corps de l'une de ses piètres rectifications, Laurent Joffrin cite, pour le soutenir, BHL dont le comportement boutefeu, notamment pour la honteuse catastrophe libyenne avec ses suites terrifiantes, avait été dénoncé par Onfray de manière plus que cinglante.

    On a donc à l'évidence, dans ces quatre pages, la mise en oeuvre d'un processus moins destiné à battre en brèche les affirmations d'Onfray qu'à donner un signal complaisant et soumis à ceux qui ne supportent pas ses éclats et son insupportable sincérité et lucidité.

    Comment ce pouvoir et ceux qui le servent pourraient-ils admettre d'être ainsi déboussolés ? Comment un homme, dont le destin et les constances intellectuelles ont manifesté qu'il avait le droit de blâmer la gauche de ne plus l'être, se permet-il en même temps des fulgurances, des provocations et des évidences dont les esprits libres, de droite et de gauche, font leur miel ?

    Il y a dans cette alliance entre une légitime dénonciation, selon Onfray, et une adhésion courageuse à la vérité du réel, quoi qu'il en coûte, une logique, une rectitude, non pas une contradiction mais une concordance, impossibles à accepter pour des dogmatiques et des idéologues préférant se crever les yeux et l'esprit en faisant silence plutôt que d'observer, réagir, protester et cibler les responsabilités.

    Michel Onfray est un intolérable mystère pour les sentiers battus et les tiédeurs d'aujourd'hui, il a l'aplomb de ne rien renier de ce qu'il a été et de ne pas s'excuser en permanence de ce qu'il a l'audace - parce que le déplorable est de devoir considérer qu'il y a en effet un risque - de nommer, de décliner et de pourfendre.

    Quand Laurent Joffrin, sans enthousiasme ni élan, défend les médias dont Onfray souligne le caractère manipulateur, parfois, et la criminalisation qu'ils opèrent de toute réflexion profonde, notamment sur les migrants, il adopte une posture qui serait comique si elle ne prêtait pas à conséquence au quotidien, pour l'information, la politique et la société.

    Ce qu'on reproche à ce philosophe est la liberté de sa pensée et de son expression. Pensant juste, il dit ce qu'il pense. Rien de plus mais c'est beaucoup aujourd'hui. C'est un honneur fait à Michel Onfray que ce numéro pour détourner de lui. Mais qui lui donne raison. 

     

    Philippe Bilger est magistrat honoraire et président de l'Institut de la parole. Son dernier livre Ordre et Désordres vient de paraître aux éditions Le Passeur. Retrouvez-le sur son blog Justice au singulier.

     

  • Retour à l'actualité, demain lundi ...

  • Loisirs • Culture • Traditions ...

  • LITTERATURE & SOCIETE • La rentrée littéraire vue par Proudhon

     

    Une tribune de Sébastien Lapaque * 

    Sébastien Lapaque déplore avec Proudhon la marchandisation des livres et des biens culturels en cette période de rentrée littéraire. Pour ceux d'entre nous qui sont d'Action française, l'ont été - mais, en quelque manière, on le reste toujours - ou y sont passés, Sébastien Lapaque n'est pas un inconnu. Nous l'avons côtoyé à l'Action française dans sa jeunesse turbulente qui, heureusement, ne semble pas l'avoir quitté. Il déplore, ici, avec Proudhon, la marchandisation des œuvres de l'esprit et le déclin ou l'éclipse, de la grande littérature. Il a évidemment raison. Avec Proudhon, avec Bernanos, son maître et le nôtre. Et avec Maurras qui rangeait, lui aussi, Proudhon parmi ses maîtres et qui a écrit, au début du siècle dernier, le livre définitif qui explique, prévoit, non sans quelque espoir d'aventure et de renaissance, cet asservissement de l'Esprit que Lapaque déplore ici en cherchant les moyens d'en rire. L'Avenir de l'intelligence, en la matière, avait tout dit. C'était en 1905.  LFAR     

     

    L'autre soir, boulevard Haussmann à Paris, j'ai croisé Clitandre, non loin de l'immeuble où Marcel Proust, reclus dans sa chambre tapissée de liège, mena contre la mort son marathon pour retrouver le Temps, prouvant que la littérature n'était pas l'écriture d'une histoire, mais l'histoire d'une écriture. Clitandre est un écrivain à la mode, reconnu, célébré ; il est membre d'un prestigieux prix littéraire. Lorsque je lui ai demandé quel livre il voulait faire couronner cette année, il m'a parlé du dernier roman d'un auteur vedette de la maison d'édition dans laquelle il publie ses propres ouvrages. Plus tard, c'est la voix d'Argyre que j'ai entendu couler dans les enceintes du taxi qui me conduisait chez moi. Argyre est chef du service culture d'une grande radio : elle était invitée chez un confrère pour évoquer la rentrée littéraire. Au journaliste qui voulait savoir si elle avait lu chacun des 589 romans publiés à la fin du mois d'août et comment elle faisait pour distinguer l'excellent du tout-venant dans cette gigantesque pile de livres, Argyre a répondu que non, elle ne lisait par tout, qu'elle commençait par les incontournables — les « poids lourds » qu'un critique doit lire — et qu'ensuite elle se laissait guider par les attachées de presse dont elle connaissait d'expérience le bon goût. « La machine est bien huilée », me suis-je dit. Je l'ai vérifié quelques jours plus tard, en découvrant qu'une phrase de Télèphe, rédacteur en chef d'un magazine et littérateur négligeable, avait été retenue dans un encart publicitaire de son propre éditeur pour vendre au « gros public » un roman aussi insignifiant que les siens dont il avait fait l'éloge auparavant.

    Lorsqu'on a envie de pleurer du monde, il convient d'inventer le moyen d'en rire. C'est dans un volume oublié de Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) que j'ai trouvé certaines consolations aux noirceurs morales de notre siècle en miettes. Les Majorats littéraires est un livre que le fameux polémiste, économiste, philosophe et sociologue franc-comtois a fait paraître à Bruxelles en 1862. Rien de mieux qu'un auteur anarchiste pour comprendre les causes profondes du désordre établi. Dans Les Majorats littéraires, Proudhon s'intéresse à la question de la propriété intellectuelle, mais aussi, dans une vigoureuse deuxième partie, à « la décadence de la littérature sous l'influence du mercenarisme ». En lisant Proudhon, j'ai repensé à Clitandre et à ses amitiés, à Argyre et à ses poids lourds, à Télèphe et à son gros public.

    « L'art de vendre un manuscrit, d'exploiter une réputation, d'ailleurs surfaite, de pressurer la curiosité et l'engouement du public, l'agiotage littéraire, pour le nommer par son nom, a été poussé de nos jours à un degré inouï. D'abord, il n'y a plus de critiques: les gens de lettres forment une caste ; tout ce qui est écrit dans les journaux et les revues devient complice de la spéculation. L'homme qui se respecte, ne voulant ni contribuer à la réclame, ni se faire dénonciateur de la médiocrité, prend le parti du silence. La place est au charlatanisme. » Proudhon l'explique un peu plus loin dans son pamphlet: la littérature est l'expression de la société. Dans un monde où nous ne croyons plus à rien parce que nous sommes tous à vendre et que tout est à vendre — comme le produit des champs et les articles manufacturés sortis des usines —, les lettres et les arts ne font pas exception.

    Les rappels à l'ordre des hauts parleurs de la Grande Machine valent pour tous. Agiotage, spéculation, charlatanisme, observe Proudhon… On ne saurait mieux dire. Une grande partie des jurés des prix littéraires et des critiques employés dans les « lignes d'étapes de l'armée de la distribution et de l'éloge des marchandises actuelles » (Guy Debord) ne revendiquent ni pour eux-mêmes ni pour les autres la possibilité de préserver la souveraineté de leur conscience ou l'expression leur goût. Au pire, ils ricanent et se rendent complices de la haine d'une littérature désormais tombée en réclame ; au mieux, ils s'intéressent aux livres comme d'autres à la Bourse ou au Pari Mutuel Urbain. Il jaugent les écrivains comme des actions ou des canassons. Leur horizon, ce n'est pas la jubilation que procure l'art de grand style, c'est faire des coups et de trouver le tiercé dans l'ordre. « Quand la littérature devrait s'élever, suivre la marche ascensionnelle des choses, elle dégringole. A genoux devant le veau d'or, l'homme de lettres n'a qu'un souci, c'est de faire valoir au mieux de ses intérêts son capital littéraire, en composant avec les puissances de qui il croit dépendre, et se mutilant ou travestissant volontairement. »

    Pierre-Joseph Proudhon encore une fois.  •

    * Sébastien Lapaque est écrivain. Il est critique littéraire au Figaro.

     

  • CULTURE • Didier Rykner : « La classe politique est devenue inculte ! »

     

    par Raphaël de Gislain

     

    Depuis une dizaine d’années, le site Internet La Tribune de l’art passe au crible le monde de la culture et des musées, prenant le parti du patrimoine et des œuvres, souvent à rebours de l’idéologie dominante. Rencontre avec Didier Rykner, son bouillonnant fondateur…

    Rykner-600x401.jpgPourquoi avoir créé La Tribune de l’art et dans quel contexte l’avez-vous fait ?

    J’ai créé La Tribune de l’art en 2003, parce que je souhaitais lire un journal que je ne trouvais pas, qui n’existait pas, c’est-à-dire un journal d’art ou l’on parle d’expositions que l’on a vues – la plupart des revues d’art commentent des évènements qu’elles n’ont pas vues –, de livres que l’on a lus, etc. J’ai créé ce que je souhaitais avoir en quelque sorte. Après une formation d’ingénieur agronome, je suis passé par Sciences Po et l’école du Louvre mais je ne suis pas devenu conservateur. Le devoir de réserve n’a jamais été tellement mon style… Mon idée était de faire du journalisme sans langue de bois, comme un historien de l’art, en considérant le patrimoine et en prenant le parti de le défendre. Dans ce milieu, cela n’a rien d’une évidence. Pour cela il fallait un média libre et indépendant comme La Tribune de l’art. Culturellement, le contexte était alors meilleur qu’aujourd’hui…

    Existe-t-il encore une véritable critique d’art en France ?

    Il existe encore des critiques d’art, bien sûr, mais le problème est global. De plus en plus de journaux dépendent de groupes puissants comme Arnault, Lagardère, Bouygues, qui ont des intérêts énormes dans diverses activités, dans l’industrie ou le bâtiment, et qui tiennent les deux bouts de la chaîne. Par exemple, Arnault détruit des immeubles de l’ancienne Samaritaine. Comment voulez-vous que les journaux qui lui appartiennent soient critiques ? Dans ce contexte, il n’est alors plus question de défendre l’intérêt du patrimoine… Le phénomène est le même avec les expositions : lorsque les journaux sont partenaires, il ne faut pas attendre qu’ils en livrent une analyse objective… à cela, il faut aussi ajouter le copinage et les renvois d’ascenseurs, plutôt fréquents dans le milieu. Les critiques d’art sont donc de moins en moins nombreux à être indépendants et à pouvoir s’exprimer. Pour ma part, j’ai été boycotté surtout au début, du temps où Donnedieu de Vabres était au ministère de la Culture et Henri Loyrette au Louvre. Actuellement (cela a commencé d’ailleurs du temps d’Henri Loyrette lui même, il faut le reconnaître) je ne suis plus tenu à l’écart, même lorsque je combats les réserves du Louvre à Lens. On met même un point d’honneur à m’inviter…

    Comment voyez-vous évoluer l’articulation entre le monde politique et le monde culturel ? On a l’impression que le premier a totalement asservi le second…

    Il apparaît avec évidence que la classe politique est devenue complètement inculte. Même si une minorité échappe à la règle, les gens qui nous gouvernent, à droite comme à gauche, ne connaissent rien et s’en fichent. Par voie de conséquence, la politique se désintéresse de plus en plus du patrimoine et des musées. Il n’y a qu’à voir l’actuel projet de loi sur le patrimoine. Le ministère donne l’impression de vouloir se débarrasser de biens qui l’encombrent, en transférant la responsabilité aux villes, ce qui va être une catastrophe puisque les maires n’ont eux-mêmes souvent que peu d’intérêt ou peu de compétences pour la sauvegarde de leurs bâtiments… Le problème est donc lié à des hommes politiques a-cculturés qui considèrent que l’histoire de l’art est superflue, alors qu’il s’agit d’une des richesses principales de la France, qui plus est, source de revenus énormes… La culture n’est regardée que pour ces postes prestigieux et les nominations abracadabrantes continuent : on parle de nommer Muriel Mayette, l’ancienne administratrice de la Comédie Française, à la tête de la Villa Médicis, sans aucune légitimité… Regardez avec quelle vitesse le Louvre est actuellement entraîné dans une vertigineuse dérive intellectuelle. Il y aura l’année prochaine au Louvre-Lens une exposition sur le Racing club de Lens – il fallait quand même l’imaginer –, et à Paris dès septembre, trois autres expositions : Les mythes fondateurs d’Hercule à Dark Vador, – qui peut sérieusement penser que Dark Vador incarne « un mythe fondateur » ? –, Une brève histoire de l’avenir, d’après le livre de Jacques Attali, qui n’est tout de même pas connu pour ses compétences en matière d’histoire de l’art et dont on peut déjà craindre le verbiage, et des installations de Claude Lévêque, artiste contemporain qui n’a rien à faire au Louvre. Parallèlement, les rétrospectives Le Nain et Charles Le Brun auront lieu non pas à Paris mais à Lens, sans que l’on se demande s’il y avait là-bas un public pour des rétrospectives nécessairement pointues… Heureusement, à côté, certains musées de province s’en sortent à la force du poignet, avec des moyens parfois réduits. On peut citer le musée de Lyon, le musée de Montpellier, de Rennes, ou encore de Roubaix, qui est à sa façon un exemple, situé dans la ville la plus pauvre de France. Il est la preuve que tout n’est pas une question de budget. Mais la tâche est de plus en plus difficile pour eux.

    On observe des collusions de plus en plus fréquentes, via l’art contemporain, entre le marché de l’art et les institutions publiques, comme Versailles ; est-ce un phénomène général ?

    Il est clair qu’il y a un certain nombre d’artistes, toujours les mêmes, comme Lévêque ou Buren, que l’on retrouve partout y compris dans des lieux dévolus à l’art ancien. Le Louvre et Versailles ont ainsi de véritables politiques d’art contemporain, ce qui n’est absolument pas dans leur rôle. Cela a certainement un impact sur la cote des artistes, même si l’on constate qu’elles se dirigent le plus souvent vers des artistes connus, dont la cote est déjà solidement établie. Koons en est un bon exemple.

    Les expositions représentent aujourd’hui un véritable marché destiné aux masses. Les historiens de l’art ne jouent-ils pas un jeu dangereux en y participant et en cautionnant le mythe de l’art pour tous ?
    Il est heureux que les historiens de l’art participent aux grandes expositions ; ainsi, certaines ont-elles de réelles qualités scientifiques. Il est certain que l’on veut aujourd’hui que tout le monde aille au musée, y compris les gens qui ne s’y intéressent pas. On les attire donc avec des choses qui ne sont pas muséales pour les faire venir, ce qui est absurde. C’est par exemple ce que vient de faire le musées des beaux-arts de Lille, cet été, avec une exposition sur Donald et les canards… Le niveau baisse donc et on accompagne cette baisse… Vouloir faire des blockbusters avec des grands noms pour que défilent des centaines de milliers de visiteurs aboutit à un non-sens dans la mesure où plus personne ne profite des œuvres. L’idéologie ambiante est que tout se vaut, que Dark Vador est aussi légitime au Louvre qu’Hercule, qu’il n’y a pas de hiérarchie dans la culture. Il faut toujours un prétexte contemporain et populaire pour prétendument faire aimer l’art ancien. Rabaissé de la sorte, l’art ancien n’est quasiment plus considéré pour ce qu’il est. 

     

     - Politique magazine

  • ACTUALITE • Guy Béart : « La mort, c’est une blague »

     

    par Dominique Jamet

     

    3312863504.jpgDans la lumière noire du soleil de la mort, la véritable stature de Guy Béart apparaît enfin. 

    Tout jeune débutant au début des années cinquante, une seule chanson l’avait propulsé au sommet, L’Eau vive, que l’on apprend encore, paraît-il, dans les écoles. Des dizaines d’autres avaient suivi, sans lui valoir jamais tout à fait la place que méritait son talent. Ombrageux, personnel, indépendant, libre, trop libre, littéraire, trop littéraire, Guy Béart était peu à peu sorti des circuits, aussi bien ceux de la distribution lorsqu’il avait prétendu gérer lui-même son œuvre, que ceux de la complaisance, de la connivence et de la mode. La maladie contre laquelle il luttait depuis de longues années avait achevé de le murer dans la solitude orgueilleuse et un peu amère de sa maison de Garches. Cependant, il fut accompagné jusqu’au bout par la ferveur joyeuse, aujourd’hui endeuillée, de la petite foule des happy few qui, lors de ses trop rares apparitions sur scène ou à l’occasion des fêtes qu’il leur donnait à domicile, reprenaient en chœur un répertoire qu’ils connaissaient par cœur.

    Dans la lumière noire du soleil de la mort, la véritable stature de Guy Béart apparaît enfin, comme on pouvait s’y attendre, et les médias saluent mais un peu tard « le dernier des troubadours », comme ils disent, ou, plus simplement, « un grand parmi les grands », l’égal des deux autres « B » de la chanson à texte d’après-guerre : Georges Brassens et Jacques Brel.

    Sur les piliers et sous les voûtes de l’Arc de Triomphe, à Paris, est gravée la glorieuse liste des victoires et des généraux de la Révolution et de l’Empire. Bal chez Temporel, L’Eau vive, Il n’y a plus d’après, Il y a plus d’un an, Vous, Les couleurs du temps, Qu’on est bien, Laura, Les souliers, À Amsterdam, Les Couleurs du temps, La Vérité, Couleurs vous êtes des larmes, La fille aux yeux mauves, L’espérance folle, Hôtel-Dieu, Demain je recommence… : la liste est longue aussi, et belle, des airs et des textes qui composent à Béart, dans le ciel de la chanson la voûte immatérielle d’un incomparable arc-en-ciel.

    « La mort, c’est une blague », avait écrit Guy Béart. De fait, les hommes meurent mais leur œuvre demeure. Trenet l’avait dit avant lui : « Longtemps, longtemps, longtemps/Après que les poètes ont disparu/Leurs chansons courent encore dans les rues. » Les chansons de Guy Béart voleront longtemps encore de lèvres en lèvres, même quand on ne connaîtra pas le nom de leur auteur. Elles sont immortelles, et il en sourira, là où il est entré avant-hier, dans la grande salle de bal de l’intemporel. 

     

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     Journaliste et écrivain - Boulevard Voltaire*