GUERRE DE CIVILISATION, par François Marcilhac
Alors que François Hollande, apprenant l’attentat terroriste commis vendredi 26 juin à côté de Grenoble contre une usine chimique, n’a su qu’ânonner « la nécessité de porter des valeurs et de ne pas céder à la peur, jamais »,...
... Manuel Valls, face à cette première décapitation sur le sol français — les islamistes franchissant, par cet acte culturel, un cran symbolique supplémentaire dans la guerre qu’ils mènent sur notre vieille terre chrétienne contre tout ce qu’elle représente —, a préféré, et à juste titre, parler dimanche 28 [1] de « guerre de civilisation », indisposant du reste plus son propre camp qu’une droite qui a vu dans ce propos un hommage du vice socialiste à la vertu sarkozyste. Il a eu d’ailleurs entièrement raison d’ajouter aussitôt, de peur de ne pas être compris, qu’il ne s’agit pas d’« une guerre entre l’Occident et l’islam » et qu’il n’est pas devenu un disciple d’Hutington. L’Occident, en effet, du moins en ce sens-là, loin d’être une réalité géopolitique, n’est qu’une arme idéologique de destruction massive des Etats-Unis dont la barbarie apparemment plus douce est pareillement dirigée contre la civilisation incarnée par nos vieilles nations européennes... Un « Occident » dont, néanmoins, la politique actuelle du gouvernement français favorise les entreprises, qu’il s’agisse, entre autres exemples, de son opposition à la Russie ou de sa soumission, via l’Europe, dans les négociations sur le traité transatlantique.
La France, chrétienne en son essence, n’est pas en guerre contre l’islam, encore moins contre ses propres ressortissants musulmans, mais, comme l’affirme Aymeric Chauprade, contre le « totalitarisme islamique » et ceux « qui vivent à l’extérieur ou chez nous, profitent d’ailleurs des largesses de notre État-providence tout en étant hostiles à ce que nous sommes, à nos valeurs, à notre civilisation. » [2] Nous ne sommes évidemment pas les seuls menacés et cette guerre est mondiale, comme l’a montré, le même jour, l’attentat commis en Tunisie et visant principalement des touristes. C’est que de nombreux pays européens ont pratiqué et continuent de pratiquer la même politique, qui risque même d’aller s’aggravant sous des prétextes compassionnels, après avoir déstabilisé, à la demande de l’« Occident », une Afrique du Nord et un Proche et Moyen Orient qui n’en demandaient pas tant ! Oui, la cause des attentats est bien « à rechercher dans la mise en place d’une politique étrangère déplorable [...], dans une immigration incontrôlée et incontrôlable, dans une justice complaisante ainsi que dans la destruction de tous les repères traditionnels de notre société. » [3]
Le terme de civilisation a un mérite : celui d’obliger à nommer les choses et à ne plus se contenter de la vaine opposition entre des « valeurs républicaines » et un « terrorisme » également hors-sol. Notre civilisation, c’est tout ce que nous sommes depuis plusieurs millénaires, même lorsque certaines de nos valeurs sont devenues folles, et cette barbarie a un visage, celui d’un fanatisme qui se réclame d’une religion et par rapport auquel les fidèles de cette même religion doivent impérativement et clairement se positionner en cessant de prétendre qu’ils sont les premières victimes. Ainsi, le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) a osé relativiser l’horreur de l’attentat en affirmant dans un communiqué que « le vrai danger réside du côté de ceux qui utilisent ces événements pour déverser leur haine contre une partie de la population qui est, de fait, celle qui paye le plus lourd tribut face au terrorisme. » Le Gouvernement peut-il encore considérer comme interlocuteur crédible un « collectif » qui ose prétendre que le danger n’est pas le djihadisme mais une « islamophobie » largement fantasmée et qui, fort heureusement du reste, ne compte encore aucune victime, décapitée ou non ? La désinformation à laquelle s’emploie le CCIF a-t-il pour objectif le désarmement moral de la nation ? Inutile de dire à qui profiterait celui-ci...
Qu’importe qu’on ne puisse savoir si les propos de Manuel Valls, qui rompent avec l’éternel refrain sur LA République, expriment la conviction, toute neuve, d’une France qu’on ne peut réduire à une idéologie ou à un régime politique, ou ne sont qu’éléments de langage concoctés par ses communicants. Il avait déjà évoqué une attaque contre « l’essence même de la France » pour commenter la tentative d’attentat contre deux églises de Villejuif. L’essentiel, en effet, n’est pas que le Premier ministre soit sincère mais qu’il se soit cru obligé de parler ainsi. Que lui, ou ses communicants, comprennent qu’il se suffit plus d’évoquer les « valeurs de la république » sous forme d’incantation magique pour mobiliser les Français contre une entreprise barbare qui menace l’existence même de la nation. Ne rêvons pas ! Nous n’en avons pas fini d’en souper, de ces valeurs, et Valls sera le premier à nous les resservir lorsqu’il s’agira de politique politicienne. Mais c’est un fait : sous ce mot de « civilisation », ambigu, peut-être, mais dont l’ambiguïté même a pour mérite de sortir de la référence plavlovienne à la République, c’est de nouveau la France en son être qui perce, ou tout du moins, l’aveu que le recours à une idéologie — la République, la laïcité — ne peut plus suffire à vaincre dans une guerre cruciale.
Les récents propos de Marion Maréchal-Le Pen, qui ne comprend pas « cette obsession pour la République » et, condamnant la tendance qui « voudrait que la République efface la France », affirme que « la République ne prime pas sur la France », constituent une divine surprise. Sommes-nous à un tournant, provoqué par la véritable indigestion que la « République » commence de provoquer chez les Français, et que seuls ne ressentent pas quelques ringards confits en dévotion ? Une indigestion qui n’est que la révélation d’une imposture : celle d’une religion de substitution ayant cru trouver dans la mondialisation un nouveau ressort pour faire disparaître définitivement un peuple français réel, trop réel. Nos compatriotes se réveillent et, avec eux, le meilleur de l’élite politique. Tant mieux ! •
[1] au Grand Rendez-vous d’Europe 1, Le Monde et i-Télé
[2] Entretien donné à Boulevard Voltaire ce 29 juin.
[3] Communiqué de l’Action française du 27 juin
[4] Entretien à la revue Charles
Commentaires
Avis partagé sur la perte du sens des mots. « L’occident » ? De quoi s’agit il ? Ce n’est pas la vocation de la France d’accrocher sa diplomatie au vaisseau amiral des anglo-américains. Ni ne partager ce projet fou de redessiner le M O.
Revenons à ce problème philosophique, qui a commencé ? L’œuf ou la poule ? Dans son dernier opuscule, Mathieu Guidère (qui n’est pas un oracle mais a l’avantage de travailler en arabe, et de bien connaître le monde arabo-musulman) nous dit dans « Etat du monde arabe » (photographie d’aujourd’hui), « … Pendant plusieurs siècles l’Irak a été le centre du pouvoir musulman et Bagdad le symbole de la puissance arabe. C’est pourquoi il est impossible de comprendre l’ampleur du choc que représente l’invasion américaine en 2003 … ».
Par nature la salaf ne connaît pas de frontières. Où qu’il soit à la surface du globe, un musulman a l’islam comme référence socio religieuse. La responsabilité américaine est écrasante. Chaque musulman s’est senti agressé, sentiment amplifié par le montage dément des armes de destruction massive.
Un remarquable papier de Gilles Varange dans la dernière livraison de la Nouvelle Revue Universelle (N° 40) sur le désastre que représente l’imperium américain.
Que peut on attendre d’un médiocre apparatchik de Solférino qui place l’île Boubon dans le Pacifique ? Résonnant comme une onomatopée dans sa cervelle vide il anone « guerre des civilisations ». Faisant sans doute vaguement référence à Huntington. Sans savoir que cette théorie fumeuse (les civilisations supplantent les Etats), fut progressivement démontée aussi vite que l’engouement universitaire avait enflé. De la même encre que la fin de l’Histoire selon Fukushima. Et propulsée dans les mêmes chemins, Foreign Affairs du Council on Foreign Relations de monsieur Brezinski.
Le même Mathieu Guidère a jeté un froid sur un plateau de télé quand il a affirmé que l’assassinat en Isère n’avait rien d’un acte terroriste, mais était une simple mise en scène sordide d’un assassin fou qui réglait un contentieux avec son patron. Pas de même nature que les assassinats de Toulouse ou de Charlie Hebdo. Qu’importe ! Seul compte le tintamarre médiatique dont des politiciens à bout de souffle tentent de tirer parti.
Le défi pour notre pays est total, mais nous n’irons nulle part si nous continuons à accepter une description qui relève du déni de réalité dans tous les compartiments du jeu (la liste est longue). Sans considération particulière pour Malek Boutih, ce qu’il vient de dire est frappé au coin du bon sens, et j’ajoute que chaque jeune musulman cultive la haine de la France. Echec de l’assimilation comme Michèle Tribalat le rappelle à nouveau, Dieu merci en prêchant de moins en moins dans le désert. Serons nous enfin entendus si nous revenons à des recensements ethno religieux.
Et je me permettrais de conseiller au catalan d’adoption qui parle au nom de la France, de s’inspirer de ce que dit depuis longtemps, Henri Boulad s.j.
Père jésuite Henri Boulad, égyptien d’Alexandrie (http://www.dreuz.info/2014/11/08/islamisme-et-islam-le-pere-henri-boulad-repond-a-la-lettre-ouverte-des-120-erudits-musulmans-qui-accusent-letat-islamique-davoir-sali-lislam/)