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Actualité France - Page 336

  • La bonne question ...

    Figarovox 18.06.2017

     

    Lire aussi dans Lafautearousseau ... 

    La sécession de la plèbe

    La fin pure et simple du cycle démocratique ?

    Abstention record aux législatives ou la sécession de la Plèbe

  • Lever de rideau

     

    par Louis-Joseph Delanglade

     

    Voici donc élue la Chambre qui devrait permettre au gouvernement voulu par M. Macron de bénéficier d’une grande liberté d’action.

    Les choses sérieuses vont donc commencer. Pourtant la longue période d’électoralisme débridé qui s’achève (des primaires aux législatives) mérite qu’on en fasse le bilan. En commençant par l’essentiel : un non-politicien, peu connu malgré ses fonctions ministérielles il y a encore deux ans, a pu en une année non pas accéder au pouvoir mais plutôt s’emparer du pouvoir politique. Cela laisse supposer qu’il est des périodes où la faillite conjuguée des « élites », des pratiques et des idéologies du pays légal républicain constitue une occasion à saisir. Il en fut d’ailleurs ainsi en 1958 lorsque De Gaulle, qui avait quand même préparé son affaire, entama le processus de transmutation de la IVème en Vème République. Ce qui distingue M. Macron, c’est qu’il a utilisé le mécanisme démocratique lui-même. Mieux : il a en quelque sorte fait triompher les institutions de la Vème contre de vieux partis sclérosés et inutiles ne rêvant que de conforter davantage leur rente de situation et donné ainsi à la France ce qu’elle attend toujours, un chef. Même si, par nature, cela ne saurait ni durer ni garantir une politique du bien commun, on sait désormais que tout est encore possible dans ce vieux pays.  

    Reconnaissons aussi à M. Macron quelques qualités. Notre nouveau président est un homme cultivé, plutôt brillant, dont le comportement en tant que chef d’Etat rompt totalement avec la vulgarité et l’inconsistance de ses prédécesseurs immédiats. Que celui qui, de facto, représente la France considère que sa fonction l’oblige à une certaine tenue n’est pas pour déplaire. Reconnaissons encore que certaines des premières mesures sérieuses évoquées (création d’un Centre national de contre-terrorisme, intégration au droit commun des mesures d’urgence, restriction du libre-échangisme au niveau européen, etc.) semblent aller dans le bon sens - comme le montre, a contrario, l’inquiétude qu’elles provoquent dans les médias, y compris étrangers, qui les taxent déjà de « liberticides ».  

    On ne reprochera donc pas à M. Macron d’être ce qu’il est devenu. On aimerait au contraire qu’il mît à profit sa fonction pour défendre au mieux l’intérêt national. Si l’on s’en tient aux axes de sa campagne (libéralisme, mondialisme, immigrationnisme, etc.) on peut avoir des doutes fondés et de sérieuses inquiétudes. A l’inverse, on peut aussi se dire que l’oubli des engagements électoraux est une pratique courante en France ou encore que les événements et/ou tout simplement le passage de candidat à chef de l’Etat pourraient bien induire de grandes transformations dans le personnage. Le syndrome de Becket en quelque sorte. 

  • La fin pure et simple du cycle démocratique ?

     

    1164797400.2.jpgCe qui est frappant au terme des législatives, c'est de voir à quel point la démocratie française est devenue un problème pour elle-même. Pour ses propres croyants ou pratiquants : politiciens, journalistes et intellectuels du conformisme. 

    Entre 1870 et 1914, la France a vécu sous le règne de la reine Revanche ; entre 1914 et 1918, ce fut la monarchie de la Guerre. Les législatives conclues hier se sont déroulées sous le signe de la reine Abstention qui ronge la démocratie française au cœur. 

    La lassitude démocratique gagne du terrain chez les Français depuis plusieurs décennies. Peut-être, en fait, est-elle un sentiment de toujours. Mais plus encore depuis que, à cause du quinquennat, les législatives se font dans la foulée de la présidentielle ; et plus encore depuis que l'on a eu la bonne idée des primaires, à cause desquelles la France vient de vivre au moins une pleine année d'élections. 

    Des abstentions qui se sont montées hier à 58% mettent le Système en question dans son principe même. Les sondeurs nous disent que seul un tiers des jeunes de 18 à 34 ans a voté ; et que, par contre, les deux tiers des Français âgés, eux, votent. De sorte que, avec le temps, l’abstention ne peut que croître et embellir, transformant la démocratie française en gérontocratie minoritaire. Faut-il rendre le vote obligatoire ? La question vient d’être posée. De droit, le vote deviendrait ainsi contrainte et obligation…      

    Bainville qualifiait l’électeur de « pauvre souverain d’un jour ». Peut-être ledit électeur a-t-il pris aujourd’hui conscience des illusions de cette souveraineté. Peut-être sommes-nous à la fin pure et simple du cycle démocratique. Du moins tel que la France, née royaume, l’a vécu - plutôt mal - depuis la funeste année 1789. 

  • Société • Le robot présidentiel

     

    images0W5IPI1E cc - Copie.jpgLe président de la République a visité le salon des startup françaises, VivaTech, jeudi dernier après-midi, Porte de Versailles. Il s'agissait de soutenir les entreprises travaillant dans le numérique et les nouvelles technologies. On veut bien.

    Il lui a été présenté un robot humanoïde, porteur d'une inscription anglaise explicative, accrochée à son enveloppe de plastique. Et sous l'œil des caméras, Macron lui a serré la main. Ou plutôt, ils se sont serré la main, le robot ayant été programmé pour le faire ... Poignée de main, comme avec Trump, Poutine, Angela Merkel, Mohamed VI, et tout un chacun.

    Macron n'aurait pas dû, car le robot n'est pas une personne, ni même une quelconque créature naturelle. Il est une machine, indéfiniment reproductible à l'identique, et, sauf dérision ou regrettable confusion, l'on ne serre pas la main aux machines. Du moins pas encore.

    sans-titre.pngLes lecteurs qui auront regardé, et surtout écouté, l'entretien de Gustave Thibon avec Jacques Chancel, publié ici même il y a deux samedis, auront peut-être retenu le propos de Thibon auquel ce petit épisode du robot présidentiel nous fait penser.

    Thibon explique à Chancel qu'il n'y a pas dans tout l'univers, ni même depuis son commencement, deux feuilles, deux brins d'herbe, qui soient identiques. Comme il en est des personnes, à travers l'espace et le temps, les siècles de siècles  : il n'en existe pas deux de semblables ; toutes, quoique intégrées à leur espèce, sont uniques, différenciées. De même qu’il n’y a pas deux commodes de Boulle qui soient les mêmes et que Monnet a peint sans-doute des milliers de nénuphars, tous différents. Tout ce qui est fabriqué de main d’homme est unique, comme nous le sommes.

    Nous ne disons pas que dans la société démocratique de masse où nous vivons, en attendant d’en sortir, il faut proscrire les machines, ne pas produire en série, ne pas construire des robots …

    De là à leur serrer la main, il y a un abîme. Le passage d'un monde à un autre.

    Bernanos a écrit jadis « La France contre les robots », un livre qui dénonce avec beaucoup d'avance le monde où nous sommes. Emmanuel Macron qui a des lettres, ne semble pas l’avoir lu. 

    Voir aussi dans Lafautearousseau  ...

    Pour retrouver Thibon

  • Histoire & Société • Abstention record aux législatives ou la sécession de la Plèbe

     

    Par Jean-Claude Barreau

    C'est là une courte et très intéressante tribune : Avec un taux d'abstention record lors des législatives, Jean-Claude Barreau constate que cette élection marque la fracture divisant désormais les Français en deux classes sociales antagonistes [Figarovov, 14.06]. L'observation est d'importance. Elle a été faite à l'identique, y compris ici même, par de nombreux éditorialistes, de Christophe Guilluy à Mathieu Slama. Et le phénomène est d'importance, porteur de menaces et de contradiction pour le régime en place.  LFAR

     

    Les-mercredis-de-Jean-Claude-Barreau_reference.jpgEn l'an 494 avant Jésus Christ, les citoyens pauvres de Rome s'estimant bafoués, quittèrent tous la ville et se retirèrent sur la colline de l'Aventin. Cet épisode est connu sous le nom de « Sécession de la plèbe ».

    Les Patriciens furent obligés de faire des concessions. Ainsi furent créés les « Tribuns de la plèbe », inviolables et sacrés, chargés de défendre le peuple. L'histoire romaine (que l'on n'apprend plus) est riche d'enseignements mais aujourd'hui, seuls les plus âgés ont entendu parler au collège de la « Sécession de la plèbe ». C'est bien dommage car c'est exactement ce qui vient de se passer (...).

    Le patriciat c'est-à-dire la petite moitié de Français gagnant plus de 3000 euros par mois a acclamé Macron. La plèbe, c'est à dire l'autre moitié gagnant en moyenne 1500 euros, la France périphérique de Christophe Guilly, délaissée par l'État, menacée dans son identité par une immigration trop nombreuse et que l'oligarchie au nom du « droit à la différence » se refuse à assimiler (Alain Juppé a déclaré en mars dans le Figaro que « l'Assimilation était une folie »), victime désignée des « Plans Sociaux », s'est abstenue.

    Abstention non encore hostile, résignée à laisser sa chance à Macron, mais qui pourrait le devenir.

    C'est la première fois que l'électorat est ainsi séparé en deux, les « gagnants en Marche » « les perdants sur L'Aventin ».

    Dans la précédente élection, le Président avait des partisans et des opposants à la fois dans le patriciat et dans la plèbe. Pour la première fois le partage électoral est complètement un partage de classe lourd de menaces.   

    Jean-Claude Barreau

    jcb.jpg

    Jean-Claude Barreau, né en 1933 à Paris, est un essayiste français. Ancien conseiller sur l'immigration de François Mitterrand puis de Charles Pasqua et de Jean-Louis Debré, il a récemment publié Sans la nation le chaos (éd. du Toucan, 2012) ; L'Église va-t-elle disparaître ? (éd. du Seuil, 2013) et Liberté, égalité, immigration ? (éd. L'Artilleur, 2016).

  • Dégagisme ?

    François Bayrou, « miraculé du “dégagisme”» ... En sursis ?

     

    Par Mathieu Bock-Côté

    C'est du Québec et dans le Journal de Montréal [13.06] que Mathieu Bock-Côté tourne son regard vers la France ; celle des législatives. Regard toujours lucide qui va au fond des choses. A l'essentiel.  LFAR 

     

    2760774407.2.jpgTournons un instant notre regard vers la France.

    Emmanuel Macron, le nouveau président de la République, a confirmé son succès du mois dernier en remportant le premier tour des élections législatives visant à former l’Assemblée nationale.

    Son parti, La République en marche, qui n’existait pas il y a deux ans, a remporté une victoire écrasante.

    Effondrement

    Ce qui ressort surtout de cette élection, c’est l’effondrement des grands partis de gauche et de droite.

    Le Parti socialiste, la force dominante à gauche depuis le début des années 1970, sera condamné à une députation rachitique. Les républicains, qui représentent la droite, s’effondrent aussi. Quant au Front national, il sera condamné à une députation insignifiante.

    Évidemment, il ne faut pas confondre les apparences avec la réalité. Si une partie de la classe politique est renversée, l’idéologie dominante demeurera la même.

    La France de Macron chantera la gloire de la mondialisation, de l’Union européenne et de la «diversité», même si le nouveau président le fait avec un talent indéniable.

    Il n’en demeure pas moins qu’une partie significative de la population a voulu renverser la table et congédier les politiciens auxquels elle est habituée.

    Dégagez! On veut voir de nouveaux visages, en finir avec les oppositions habituelles. C’était le cri de colère de ces élections.

    Tout cela s’accompagne d’un parfum de révolte. On parle ainsi de dégagisme.

    Québec

    Le dégagisme s’est fait sentir ces dernières années.

    Il n’est pas étranger à la victoire de Trump et à celle du Brexit. Il vient de servir Emmanuel Macron, qui se réclame du progressisme.

    Autrement dit, le dégagisme peut servir aussi bien la gauche que la droite. Il peut servir de rampe de lancement à n’importe qui et à n’importe quoi. Il témoigne de l’exaspération populaire devant une classe politique aussi insignifiante qu’impuissante.

    Et il n’est pas interdit de penser que le dégagisme frappe aussi le Québec.  

    Mathieu Bock-Côté    

    XVM7713ddbc-9f4e-11e6-abb9-e8c5dc8d0059-120x186.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Son dernier livre, Le multiculturalisme comme religion politique, vient de paraître aux éditions du Cerf.

  • Valeurs actuelles se trompe : ce ne sont pas les pleins pouvoirs qui sont un danger mais la politique qui sera menée !

     

    Valeurs actuelles - 15-21 juin 2017

  • Du dégagisme macronien à la Monarchie royale ?

     

    Par Jean-Philippe Chauvin

     

    1345578492.5.jpgA la fin des années 1980, lors d'une campagne cantonale à laquelle la Fédération Royaliste de Bretagne participait par la présentation de trois candidats (dont moi-même en Ille-et-Vilaine), nous placardions une affiche sur laquelle était dit, en lettres capitales : « Pourquoi élisez-vous toujours les mêmes ? ».

    Trente ans après, il semble que les électeurs nous aient soudain pris au mot en exécutant, électoralement parlant, nombre de notables des anciens grands partis : les Républicains, donnés faciles vainqueurs durant les années précédant 2017 et jusqu'aux premiers jours du printemps, sont déroutés tandis que les Socialistes, qui avaient une très large majorité dans la Chambre issue de 2012, semblent condamnés à disparaître, au moins pour un temps, à la ressemblance du PASOK grec dans les années 2010... 

    Ainsi, le mouvement de « dégagisme », annoncé en ses discours par M. Mélenchon, bat son plein mais pas forcément au profit de ceux qui l'espéraient ou l'avaient théorisé : le Front National et la France Insoumise eux aussi souffrent de ce grand courant d'air qui ressemble désormais à une véritable tempête et Éole a pris le visage de M. Macron, nouveau « maître des horloges », au moins pour un temps... Bien sûr, l'abstention est forte et dépasse le nombre d'électeurs déplacés, mais que pèse-t-elle ? Cela fait des années qu'elle prospère, en particulier aux élections européennes, et cela n'a jamais rien changé, ni même influé sur les décisions prises au Parlement européen : dans un système de démocratie représentative, elle « n'existe pas », politiquement parlant, puisqu'elle est la « non-participation », ou le « retrait » (volontaire ou distrait) de la scène politique. Il n'est pas dit que, dans une Monarchie active, elle ne soit pas, d'une manière ou d'une autre, prise en compte, par exemple par un certain nombre de sièges vides dans l'assemblée concernée par le vote du moment ou par une tribune offerte, dans le cadre des débats parlementaires, à des acteurs minoritaires ou marginaux de la vie politique : il n'est pas interdit de faire preuve d'imagination en politique, et la Monarchie pourrait ouvrir de nouvelles voies de réflexion et d'action en ce domaine comme en bien d'autres. Aujourd'hui, en République, l'abstention nourrit le discours de l'opposition sans pour autant la rejoindre ou la légitimer...En somme, c'est un avertissement sans exigence ! 

    La vague macroniste, dont il faudra mesurer l'ampleur véritable au soir du second tour, est surtout révélatrice d'un besoin de renouvellement et de l'élan présidentiel qui ressemble bien à un état de grâce comme, dans le même temps, à une exigence de réussite : c'est aussi le vote pluriel de toutes les espérances, au-delà du grand système partisan qui, jusqu'aux derniers temps, dominait le monde politique et, d'une certaine manière, encageait le « pays réel ». La fin d'un ancien « pays légal » n'est pas pour autant la fin du « pays légal » lui-même, mais sa mutation, et une nouvelle identité de celui-ci, peut-être plus enraciné dans un « pays réel », ici principalement identifié à des classes moyennes et supérieures, mondialisées et connectées, qui ne sont pas forcément tout le « pays réel », mais sa pointe urbaine et progressiste, avec tous les risques que cela comporte pour les autres catégories d'icelui. Pierre Debray, le théoricien royaliste des années 1960-80, y verrait sans doute le triomphe d'une forme avancée de la bureau-technocratie (qu'il dénonçait) alliée au monde de la libre-entreprise, voire du Travail (qu'il comprenait et, pour la dernière catégorie, soutenait). 

    Il y a aussi un autre facteur qui a sans doute contribué au succès de M. Macron et de ses candidats : c'est le besoin de « passer à autre chose », de se rassurer et de retrouver une certaine quiétude (mais n'est-elle pas, aussi, une manière de fuir un réel inquiétant plutôt que de l'affronter et de le surmonter ?) après le temps des attentats et devant les craintes suscitées par une mondialisation dont beaucoup rêvent qu'elle redevienne ce qu'elle apparaissait hier, cette domination de « notre monde » sur ceux des autres ? En somme, la volonté de croire que la croissance reviendrait conforter un mode de vie auquel nos sociétés contemporaines occidentales se sont accoutumées, au risque, d'ailleurs, de perdre toute mesure environnementale et tout esprit de tradition, fut-il « critique » : la « croyssance » (selon la belle perle d'un élève peut-être plus révélatrice que beaucoup de vérités orthographiques) est une sorte d'espérance matérialiste qui trouve, qu'on le regrette ou pas, un vaste écho dans les générations contemporaines et M. Macron l'a bien compris, qui en est issu et s'adresse à elles avec des mots qu'elles comprennent, au moins pour les plus jeunes et les plus aisées. 

    La donne a changé en quelques semaines, et, pour ceux qui pensent la politique concrète, il faut bien en tenir compte, ce qui ne signifie pas se contenter de quelques constats mais réfléchir à partir de ses nouvelles réalités à leurs conséquences et aux moyens de préserver ce qui doit l'être, de critiquer « ce qui nous tue » et de préparer « l'avenir que tout esprit bien-né souhaite à sa patrie » : si les royalistes oublient cette règle simple que Maurras avait qualifié d'empirisme organisateur, ils ne seront rien d'autres que les témoins effarés d'une cathédrale effondrée. Or, la Monarchie, dont M. Macron connaît les avantages et qu'il mime au lieu de la rétablir en ses formes traditionnelles et dynastiques, est plus que jamais nécessaire même si elle apparaît malheureusement trop lointaine au regard de nos contemporains. Nécessaire parce qu'elle enracine profondément la magistrature suprême au lieu de la laisser soumise sans défense aux vents violents des temps et aux aléas de la mondialisation et de l’Économie sauvage, et parce qu'elle permet que la verticalité du Pouvoir d’État n'empêche pas l'existence de pouvoirs horizontaux, du moment comme des communautés naturelles et professionnelles : « Sub rege, rei publicae* » , disait-on au Moyen âge, et la Monarchie réalise ce que la République, par essence centralisatrice, n'autorise pas. 

    Oublier que la Monarchie n'est pas qu’un simple moment de « verticalité » et d'arbitrage mais qu'elle est, d'abord et toujours, « le temps long » de la continuité sans la rigidité, celui de la « verticalité incarnée en une suite familiale », c'est commettre une erreur qui, à terme, pourrait être mortelle pour notre pays et sa pérennité : c'est une erreur qu'il faut dénoncer, et corriger... 

    * Une formule que l'on peut traduire par « Sous le patronage du roi, les libertés publiques, ou les républiques communales, sociales, professionnelles »...

    Le blog de Jean-Philippe Chauvin

  • Élections Législatives : la Berezina des vieux partis politiques

     

    Par Jean-Baptiste Forray    

    Jean-Baptiste FORRAY, auteur de La République des apparatchiks (Fayard, 2017), analyse ici avec humour, réalisme et lucidité, les raisons d'un naufrage [Figarovox, 12.06].  Le triomphe de La République en marche aux législatives risque d'entraîner la disparition des vieux partis politiques. Comme dirait Houellebecq, « nous n'aurons rien à regretter ». LFAR

     

    Réduits à de simples syndicats d'intérêts électoraux, le PS et Les Républicains ont oublié de penser, précipitant leur chute.

    C'est la chute finale ! Aux législatives, une débandade historique attend le PS et Les Républicains. Une Bérézina qui jette une lumière crue sur l'incurie des vieux partis, privés de chef, de militants et de projet. Au sommet de leurs organigrammes, se déploie l'empire du vide. Pour acheter la paix sociale, leurs hiérarques lèvent des armées mexicaines. Le nec plus ultra ? La direction du PS, qui se compose de 75 secrétaires nationaux et secrétaires nationaux adjoints aux intitulés parfois aussi flous que ronflants: « Préparation de l'avenir », « Croissance bleue », « Mobilisation des acteurs de quartier »… Les Républicains, aux dernières nouvelles, recensent 58 secrétaires nationaux, 20 délégués nationaux et 12 délégués classiques.

    Pour la matière grise, mieux vaut aller chercher ailleurs. En dehors d'une poignée de communiqués et de vagues notes, la production, dans ces partis zombies, flirte dangereusement avec le zéro. Bien sûr, le PS attire encore une brochette d'intellos : Matthias Fekl, Emmanuel Maurel et Guillaume Bachelay chez les quadras. Mais qui, parmi leurs camarades solfériniens, lit encore Jaurès ? Qui ose se plonger dans les abysses de Marx ? Le parti de Blum et Mitterrand traverse une éclipse intellectuelle. Dans les couloirs de la rue de Solferino, on ne trouve plus guère de Michel Rocard apte à résumer la controverse idéologique entre Lénine et le pape de la social-démocratie, Karl Kautsky ou à remonter aux sources du réformisme d'Édouard Bernstein. Qu'elle est loin, la gauche joyeuse des années 1970 ! Le PS ressemblait, alors, à une ruche bourdonnante, à des lieues de la politique professionnelle. Près de cent commissions d'études et de réflexion carburaient à plein régime. Au sein du « groupe des experts », les profs de droit côtoyaient les économistes, les scientifiques, les avocats. Aujourd'hui, c'est le désert… La commission internationale, l'appel aux spécialistes des sciences sociales, tout cela a été bazardé. Les professionnels de la profession politique qui tiennent la boutique n'en ont cure.

    Les idées ne gouvernent définitivement plus ce monde. Victimes de l'indigence de leurs apparatchiks, Les Républicains sous-traitent leur production intellectuelle à des think tanks. Lors des « rendez-vous du projet », ces laboratoires d'idées tiennent le haut du pavé. À la tribune, se relaient l'Institut Montaigne, l'Institut de l'entreprise, la Fondation Concorde et l'IFRAP. Dans la salle, personne ne bouge un cil. Les « rendez-vous du projet » se déroulent en pleine semaine, le mercredi matin. L'assistance se limite à une escouade de cheveux blancs et d'apparatchiks rivés sur leur smartphone. Le carré médias est, pour ainsi dire, vide.

    Le choc des ambitions a depuis longtemps anéanti l'ambition affichée de l'UMP : s'affirmer, non comme un parti unique, mais comme la confédération des droites. Démocrates-chrétiens, gaullistes et libéraux devaient s'unir sans se renier. Un vœu pieux. Toutes ces composantes ont été noyées dans un gloubi-boulga indigeste. Le premier parti de droite a changé trois fois de nom en moins de quinze ans. Il a oublié son histoire en cours de route..

    Dans le même temps, la formation des derniers militants est laissée en jachère. Le PS propose bien quelques sessions du type « comment animer une réunion de section » ou « Comment prendre la parole quand on n'a rien à dire ? », traduit méchamment l'ancien rédacteur en chef de la Revue socialiste Laurent Bouvet.

    Les partis ne savent plus à quel saint se vouer. Afin de raccrocher les wagons de la société civile, l'UMP de Jean-François Copé proposait du coaching pour retrouver un emploi. Le PS surfe sur la vague de l'économie du partage. Sa fondation Jean Jaurès, dans un rapport, évoque des prêts de livre. Elle préconise aussi des cours du soir ainsi que… des gardes d'enfant. À quand le ménage et le repassage ? 

    Jean-Baptiste Forray           

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    Journaliste, Jean-Baptiste FORRAY est l'auteur de La République des apparatchiks

  • Mieux que la morale, l'indépendance de nos politiques !

     

    Par Mathieu Slama    

    Mathieu Slama appelle ici [Figarovox 2.06] à l'indépendance de nos dirigeants vis-à-vis des milieux financiers, au moment où, face à l'exaspération croissante de l'opinion publique et à la multiplication des affaires politico-judiciaires, le nouveau gouvernement projette de faire voter une loi dite de moralisation de la vie politique.  L'analyse est parfaite - comme en général les analyses de Mathieu Slama - mais son appel est plutôt un vœu pieux, comme il l'écrit lui-même, du domaine de l'espérance. L'indépendance du Chef de l'Etat - au moins lui ! - requiert un autre régime.  LFAR  

     

    3724_2016-06-22_16-49-56_Slama .jpg - Copie.pngIl semble loin le temps où Machiavel écrivait, à propos des princes, qu'ils pouvaient acquérir et conserver le pouvoir à la condition de donner l'apparence de la vertu, tout en usant des vices et ruses nécessaires à la prise et la conservation du pouvoir.

    Donner l'apparence de la vertu seulement, « car les hommes, en général, jugent plus par leurs yeux que par leurs mains, tous étant à portée de voir, et peu de toucher. Tout le monde voit ce que vous paraissez ; peu connaissent à fond ce que vous êtes, et ce petit nombre n'osera point s'élever contre l'opinion de la majorité. » (Le Prince, chapitre 18)

    Tous les grands penseurs du politique, Machiavel, Hobbes, Max Weber ou Carl Schmitt pour n'en citer que quelques-uns, ont établi une distinction nette entre la sphère politique et la sphère morale. Machiavel soulignait par exemple qu'un ministre qui ne songerait qu'à lui-même et à ses propres intérêts dans ses actions ne méritait pas la confiance du Prince, tout simplement parce qu'il n'était pas en mesure de servir l'intérêt du Prince et donc de l'État. Mais dans le même temps, Machiavel précisait que le Prince devait couvrir de richesse et d'attention son ministre pour « le conserver toujours fidèle » (chapitre 22).

    Nous vivons cependant une époque singulière. La colère du peuple français face aux écarts et aux fautes morales des hommes politiques - en particulier pour tout ce qui a trait à l'argent - ne doit pas être prise à la légère. Cette colère s'inscrit dans un contexte particulier que personne ne peut ignorer : l'accroissement des inégalités et l'aggravation de l'écart entre les plus riches et les plus pauvres, soulignées encore récemment dans un rapport publié par l'Observatoire des inégalités.

    Au sujet de la loi de moralisation de la vie publique (rebaptisée « loi pour la confiance dans notre vie démocratique »), certains ont évoqué un phénomène d'américanisation de la société française, d'autres une tyrannie de la transparence, d'autres encore une confusion entre la morale publique et la morale privée. Tout cela est sans doute vrai et mérite d'être entendu, mais comment être aveugle et sourd face à l'exaspération d'un peuple qui assiste, impuissant, aux manœuvres de ses représentants et à la perpétuation de privilèges auxquels il n'aura jamais accès ?

    Jamais les frontières entre le monde de l'argent et le monde politique n'avaient été aussi poreuses, et c'est là que devrait être le véritable enjeu de cette loi. « La politique de la France ne se fait pas à la corbeille » s'écriait le Général de Gaulle, entendant par-là que la sphère politique ne pouvait être soumise et subordonnée aux forces du marché et de l'argent. Que reste-t-il de cette boutade inquiète, à l'heure où nous avons élu un président de la République qui officia plusieurs années au sein de la banque Rothschild, à l'heure où son entourage est composé, pour ne prendre que quelques exemples, d'un ancien lobbyiste d'un grand groupe du Cac40 ou encore d'un ancien lobbyiste de l'assurance ? Qu'en reste-t-il à l'heure où a été nommée, à la tête du ô combien important ministère du Travail, l'ancienne directrice des ressources humaines du groupe Danone ? N'oublions pas non plus la proximité inquiétante du nouveau ministre de l'Environnement avec les grandes multinationales, alors que son métier consiste, en partie, à imposer des normes environnementales contraignantes aux entreprises privées. Et que dire du Parlement qui est devenu, en l'espace de quelques décennies, le lieu de tous les conflits d'intérêts, où les lobbies des grandes entreprises peuvent dénaturer et défaire intégralement une loi au bénéfice d'intérêts privés ? où beaucoup de parlementaires mènent en parallèle une activité de conseil, leur permettant, par leur statut même, de modifier la loi en fonction d'intérêts purement privés ?

    C'est donc moins de moralisation dont la politique a besoin que d'indépendance. Indépendance vis-à-vis de l'argent, indépendance vis-à-vis des entreprises et donc indépendance vis-à-vis des intérêts privés qui minent la démocratie de l'intérieur. Les démocraties libérales meurent de cette confusion des genres et de leur incapacité à établir une hiérarchie nette et indiscutable entre la sphère politique et la sphère économique.

    Cette inquiétude n'est pas nouvelle. Stendhal se moquait des ambitions démesurées des industriels dans un pamphlet célèbre publié en 1832 (« D'un nouveau complot contre les industriels »), s'en prenant notamment au baron Rothschild et à tous ceux qui mettent « le bien public à la suite de leur bien particulier ». Cette réflexion n'a pas pris une ride. Il reste donc à espérer que les parlementaires honnêtes amenderont, lors des discussions au Parlement, la loi de moralisation en renforçant la lutte contre les conflits d'intérêts et l'encadrement strict des liens entre politiques et entreprises. Quitte à aller contre leurs propres intérêts personnels… 

    « Jamais les frontières entre le monde de l'argent et le monde politique n'avaient été aussi poreuses. » 

    Mathieu Slama        

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    Consultant et analyste politique, Mathieu Slama collabore dans plusieurs médias, notamment Le Figaro et Le Huffington Post, où il intervient particulièrement sur les questions de politique internationale. Il est l'auteur de La guerre des mondes, réflexions sur la croisade de Poutine contre l'Occident, (éd. de Fallois, 2016).   

     

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  • D'accord avec Patrice de Plunkett : « Le pays est à droite » et la droite a voté Macron

     

    Un billet de Patrice de Plunkett

    Il y a certains sujets sur lesquels nous ne sommes pas toujours - ni même souvent - d'accord avec Patrice de Plunkett. Sur la description qu'il donne ici de la droite parlementaire et électorale, il se trouve que nous partageons son analyse critique et excellemment exposée.  LFAR   

     

    3626788268.jpgL'abstentionnisme est majoritaire mais « le pays est à droite » (disent les politologues), et le raz-de-marée s'est produit. Il ébranle jusqu'à des bastions LR comme les Hauts-de-Seine, Paris-XVIe, Chantilly etc. Comme on l'avait dit après le second tour de la présidentielle, la jeune bourgeoisie de droite - bénie par la vieille - est passée en bloc au macronisme.

    Le macronisme a phagocyté aussi d'autres milieux (ceux qui ne se sont pas abstenus par résignation). Mais rien d'étonnant à ce qu'il avale la bourgeoisie de droite : la politique économique et sociale annoncée par M. Macron sera, en moins balourd mais en plus radical, celle que prônait M. Fillon ; pour s'en rendre compte il n'y a qu'à voir l'embarras des candidats LR.

    La droite survivante entrera dans un enfer : rester entre gens qui ne se supportent plus. Quoi de commun entre les amis de M. Solère, libéraux macrophiles, et ceux de M. Wauquiez, libéraux trumpisants ?  Mais LR est abandonné par des électeurs macronisés ; ses élus rescapés seront condamnés à cohabiter en groupe parlementaire. Du moins dans un premier temps... Ensuite on verra. Les LR macrophiles rêvent à un effritement de l'énorme majorité REM, qui leur permettrait de se proposer comme supplétifs à M. Macron. Les LR trumpisants rêvent de créer un Tea Party gaulois avec la moitié marionniste du FN.

    A suivre !  Pour l'instant, on se permet de sourire devant les retournements de veste. Dans cette bourgeoisie de droite à sincérités successives, en janvier on nous disait de nous taire et de fléchir le genou devant M. Fillon, saint et martyr. En avril on nous annonçait que Mme Le Pen allait "faire encore plus de voix que prévu". En juin on nous déclare que le triomphe de M. Macron était écrit dans les étoiles. C'est la dynamique du bourgeois perpétuel  :  «On ne va jamais plus loin que lorsqu'on ne sait pas où l'on va, a dit un homme politique célèbre. »  (Henry Monnier, Grandeur et décadence de M. Joseph Prudhomme, 1852).  

    Patrice de Plunkett : le blog

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  • Naïveté des adultes ...

     

    « La naïveté grotesque des enfants fait peine à voir, surtout si l’on veut bien la comparer à la maturité sereine qui caractérise les adultes. Par exemple, l’enfant croit au Père Noël. L’adulte non. L’adulte ne croit pas au Père Noël. Il vote. »

     

    Pierre Desproges

  • Macron, président de la société liquide. Le triomphe d’un monde qui ne se refuse rien

     

    Par Arnaud Benedetti

    Qui donne ici [Causeur, 12.06] une analyse vivante, lucide, de fond, du macronisme, analyse brillante et véridique que nous partageons à cette heure, en attente des actes, des faits, des politiques menées, qui permettront de juger sur pièces.  LFAR

     

    Les urnes législatives ont parlé. Selon toute vraisemblance et sauf surprise, le président de la République disposera d’une majorité confortablement absolue à l’Assemblée.

    Un monde jeune et bienveillant

    Ce nouveau monde qui surgit sur les bancs du vieil hémicycle sera jeune, bien sûr ; et aussi bienveillant, c’est-à-dire sympa ! Et puis optimiste, débarrassé des vieilleries qui encombrent nos esprits depuis des lustres – la droite, la gauche, les clivages, et ce je-ne-sais-quoi qui, à force de protéger, nécrose l’irrépressible envie d’initier, de créer, de développer… Il sera aussi souriant, de ce sourire sur commande, presque obligatoire pour saluer l’heureuse société qui, forcément, vient. Il sera enfin fluide, interactif, admiratif, un peu béat, souvent communicant, toujours inclusif.

    Ainsi va le macronisme, cette injonction à être heureux, à croire au présent, au bonheur – un bonheur économique essentiellement, où il y a peu de place pour l’interrogation existentielle, métaphysique et même… historique. Le macronisme aspire par tous les pores de sa peau idéologique les particules de l’immédiateté mondialiste, high-tech, hyper connectée, sociétale. Il en est d’abord le produit ; il n’est même pas constructiviste car le constructivisme, d’essence socialiste, suppose un volontarisme. Le macronisme prend littéralement ce que le grand poète Francis Ponge appelait « le parti pris des choses ».

    Tout surfe sur la vague post-moderne

    Rien de ce que la société sophistiquée des grandes mégalopoles occidentalisées génère ne lui est étranger ; bien au contraire il en épouse toutes les formes avec une gourmandise à peine dissimulée. Le macronisme est l’avatar politique d’une société qui ne se refuse rien, qui ne se pose aucune limite… Tout y surfe sur la vague post-moderne. Le mouvement en est le ressort comme si le nouveau monde s’opposait à l’ancien par une indétermination ontologique de toutes les formes, bien établies elles, qui nous ont précédés : du genre au statut professionnel, de l’identité aux valeurs, tout est relatif, transitoire, précaire évidemment, en transformation perpétuelle. Tout glisse en quelque sorte. Le macronisme est la première traduction politique de cette « société liquide » prophétisée par le sociologue Zygmunt Bauman. La macronisation est d’abord une dépolitisation des anciennes offres politiques ; elle reconvertit par une agrégation de contenus et de personnels les vieilles lignées pour les aspirer dans une version New Age du « catch all party », le parti attrape-tout que nos sciences politiques d’hier enseignaient aux jeunes apprentis politologues… Mais à la différence de cette grande figure des classifications de la sociologie partisane, La République en Marche ne synthétise pas les contradictions.

    Clins d’oeil à Terra Nova

    Elle les absorbe sans souci avéré de cohérence doctrinale. Elle prolifère par captation sans effort systématique de rationalisation ; elle additionne sans travailler forcément à l’interopérabilité des sensibilités. Le « en même temps », formule culte de la novlangue du jeune pouvoir, concentre sémantiquement bien des ambivalences de la formation majoritaire. Il en stocke même toutes les bombes à retardement lorsqu’adviendra, à l’issue de cette récréation électorale, le temps d’exercer effectivement les responsabilités. Au demeurant, cette organisation n’est pas un parti, mais un… mouvement. Ce qui suppose qu’elle est mue par une force motrice dont les ressorts sont des mégas faits de structure : l’immigration dont la traduction politique s’incarne dans l’éloge de la diversité, la mondialisation dont l’horizon institutionnel s’objective dans le fédéralisme européen, la financiarisation de l’économie dont l’ubérisation est le modèle. Les soubassements du macronisme s’adossent ainsi, non pas à une conception volontariste de l’organisation de la cité, mais à une soumission à quelques grandes tectoniques déstructurantes… Lovée dans l’élan de ces anomies macro-historiques, l’habileté macronienne consiste en infra à flairer des sensibilités kaléidoscopiques, à saisir des humeurs souvent contradictoires : le désir de renouvellement et les préoccupations conservatrices des élites, la soif de moralisation et le ressentiment de vieux acteurs politiques en quête d’un ultime rôle en fin de partie, le respect du classicisme qu’illustre sa communication inaugurale et des clins d’œil appuyés à la déconstruction « terra noviste »…

     

    …sur fond de vieilles recettes

    La République en Marche se nourrit de ces oxymores, refusant de choisir entre eux, les portant par une com’ toute dédiée à l’image mais économe en paroles et soucieuse de mots hyper-contrôlés. Macron donne à voir pour mieux inhiber notre capacité critique. Il sature par la profusion séquentielle de scènes bien léchées, esthétiques, nombreuses un espace médiatique souvent complaisant, un espace public sidéré par une maîtrise de la com’ qui tranche avec la spontanéité revendiquée mais maladroite de ses deux derniers prédécesseurs… Macron assure, donc rassure, dans un exercice qui relève de l’ordre de la représentation du pouvoir, du statut présidentiel. Sa démarche lente, ses choix scéniques et iconographiques nous racontent une histoire qui laisse ainsi pour le moment hors-champ le cortège d’ambiguïtés et de non-dits dont il est le produit. Son astuce est d’articuler une com’ qui tient tout à la fois du marketing et de la propagande, sorte d’hybride dont l’objectif consiste à nous faire accepter, « à l’insu de notre plein gré » , une certaine conception d’une société tout acquise aux oligarchies…

    Le jeune Macron n’invente rien, contrairement aux propos admiratifs de ses hagiographes. Il reproduit avec malice les vieilles recettes d’un des pères fondateurs et théoricien des relations publiques, Edward Bernays, qui voici plus de 80 ans considérait que « la fabrique du consentement » était l’objectif des communicants pour légitimer le pouvoir exclusif des élites. Rien de nouveau sous le soleil… 

    Arnaud Benedetti
    Professeur-associé à la Sorbonne

    A lire dans Lafautearousseau   ...

    « En même temps » …

  • Zemmour : « le multiculturalisme britannique est dans la loi, le nôtre est dans les faits »

     

    BILLET - En quelques mots, quelques phrases, quelques brèves minutes, Zemmour a l'immense talent de caractériser une situation, un événement, de les comparer aux précédents, d'en marquer les filiations et les évolutions, d'en envisager avec lucidité les conséquences. Et de montrer, derrière les apparences, les réalités, qui décevront les naïfs.  En un sens, toutes proportions gardées, Zemmour aura été un peu notre Bainville, « le grand Bainville », comme il dit. Son maître, qui est aussi le nôtre. Cette analyse des deux communautarismes britannique et français, est, une fois de plus, est exemplaire  [RTL, 6.06].   LFAR

     

     

    Résumé RTL par Éric Zemmour et Loïc Farge 

    « Theresa May n’a jamais aussi bien porté son surnom de "Theresa Maybe" (Theresa peut-être) », fait remarquer Éric Zemmour. « Ce n'est qu'un peut-être, mais ce peut-être ira droit au cœur des Français : depuis le temps qu'on subissait les leçons de morale des Anglo-saxons lorsqu'on interdisait le voile à l’école, et leurs sarcasmes lorsqu'on s'horrifiait de voir des burkinis à la plage, et qu'on se faisait traiter de ringard liberticide parce qu'on défendait notre bon vieux système d’assimilation », poursuit Zemmour.

    « Mais notre satisfaction sera de courte durée », avertit-il. Selon lui, « le multiculturalisme britannique est dans la loi, le nôtre est dans les faits ». 

    Éric Zemmour

  • Suivez mon regard ...

     

    Par Pierre Builly

    Commentaire du lundi 12 juin

     

    937767891.jpgDût la chose m'agacer énormément, je trouve les derniers épisodes électoraux assez intéressants et, d'une certaine façon, encourageants.

    D'abord, aux Présidentielles, le choix du seul candidat qui, (avec Mélenchon, peut-être) avait une vraie stature d'homme d'État. Si sympathique que me soit Marine, je crains qu'elle ait montré une absence de niveau qui s'est cruellement montrée.

    Puis l'abstention au 1er tour, qui désole tant les commentateurs ; du fait de la suppression du cumul des mandats et du dégagisme, les électeurs ont subliminalement compris que le Parlement ne sert à rien ; les 400 ou 450 députés macronistes seront priés de voter comme un seul homme et d'obéir à l'Élysée. Ce qui, à mes yeux, est absolument parfait. Sans doute beaucoup, au bout d'un certain temps, rueront dans les brancards et se rendront compte qu'ils ne servent à rien, d'autant moins qu'étant trop nombreux, leur poids relatif sera infime (c'est une grande supériorité sur la proportionnelle qui confie à des micro-partis charnières des armes redoutables).

    À quoi vont servir, pour leurs électeurs, des députés lambda qui ne seront ni maires, ni présidents de conseils départemental ou régional ? À rien de rien...

    Les électeurs perçoivent - c'est bon signe ! - que notre excellente Constitution a confié le pouvoir à un homme... Suivez mon regard. 

    A lire dans Lafautearousseau   ...

    « En même temps » …