Médias • TV : Taubira chez Ruquier…
La production de l’émission aurait dû afficher un message d’avertissement : « Attention, Christian Taubira va s’exprimer. Prévoyez, chers téléspectateurs, une médicamentation ad hoc. Le visionnage de cette séquence d’1h30 est déconseillée aux personnes souffrants de problèmes cardiaques et d’hypertension. » Parce qu’à la fin de sa prestation, sachez-le, on éprouve un véritable mal-être…
Ce n’est pas tant qu’elle s’exprime mal, la démissionnaire de la Justice. Ce n’est pas tant qu’elle a une voix nasillarde, l’ancienne député de la Guyane. Ce n’est pas tant qu’elle se livre à l’invective, l’ex-candidate du Parti radical de gauche. Simplement, elle s’écoute parler pendant d’interminables minutes. Des dizaines et des dizaines de minutes. Ce serait fascinant – du point de vue psychologique – si ce n’était pas aussi long. Et encore ! Un psychologue aurait sans doute jeté l’éponge et prié gentiment mais sûrement la bonne dame de revenir à un autre moment en lui indiquant la sortie.
C’est que Christiane Taubira est à l’aise dans son fauteuil d’invité. Elle n’a face à elle ni adversaire, ni avocat du diable. Tout le monde lui est favorable, de Laurent Ruquier à Yann Moix, qui n’a de cesse de louer son « être », en passant par le théâtral Philippe Torreton, acteur engagé – à gauche, évidemment -, qui prononce un grotesque panégyrique de son livre, Murmures à la jeunesse.
Mais plus que d’assurer la promotion de cet ouvrage, Taubira est venue défendre son bilan au ministère de la Justice. Un bilan que toute la droite – et une partie de la gauche – juge, au minimum, catastrophique. Dans cet exercice, elle brille, exposant toutes les mesures prises, ses réformes et ses projets de lois. Pour un non-initié, l’inventaire semble admirable. Cela fait en tout cas de l’effet sur les chroniqueurs qui, possédant visiblement très peu de connaissances juridiques, ne lui opposent même pas un début de contradiction. Christiane Taubira est en roue libre. La question du mariage pour tous est éludée.
Reconnaissons quand même à Yann Moix le mérite d’émettre des réserves sur le style oratoire de l’ancienne ministre. Une ex-ministre qui n’a pas vraiment l’esprit de synthèse comme ne le prouve que trop l’ensemble de son intervention. Agaçant cette façon de formuler la même idée en la déclinant de trois ou quatre manières différentes. De quoi regretter la richesse du français.
Ces faibles critiques permettent néanmoins de mettre en lumière la personnalité de Christiane Taubira. Que d’égo ! Que de ratiocinage ! Que de bruits avec sa bouche ! C’en est presque indécent. Malheur à Moix ou Salamé s’ils lui opposent une toute petite objection. L’un et l’autre se font moucher dès qu’ils prennent la parole. Dans leurs petits souliers, les deux chroniqueurs. Au premier, elle déclare même, à la fin d’un entretien qu’elle a monopolisé : « Vous pouvez être un peu moins narcissique, pour une fois, ce soir ? S’il y a bien quelqu’un de respectueux, pardonnez-moi, c’est moi. » A cet instant, Christiane Taubira ne touchait plus terre !
Et pourtant, la matière pour la faire redescendre ne manquait pas. Ne serait-ce que cet article du Canard enchaîné rapportant les propos d’un ancien collaborateur : « On navigue au jour le jour, en roue libre, aucune décision n’est prise, les gens bossent comme des chiens, quinze heures par jour, mais sans consigne, sans direction et sans que rien ne soit tranché. Quant à Taubira, elle vibrionne, s’absente de plus en plus et, quand elle est là, elle hurle sur tout le monde… » Loin des murmures, donc. Ce samedi soir [6.02}, on s’en est rendu compte… •
Comment, lorsqu’on est chef de l’État, échapper à la singularité de la fonction ? Comment faire pour demeurer un « président normal » ? Telle est l’une des questions que pose l’affaire Jacqueline Sauvage, du nom de cette sexagénaire condamnée par deux cours d’assises successives pour le meurtre de son mari, mais graciée le 31 janvier dernier par le président Hollande.
Le président de la République a la fibre républicaine (ce n’est pas forcément un compliment dans ma bouche), dit-on avec une certaine raison, et la dernière preuve en date (mais non l’ultime) est cette mesure de « remise gracieuse » de la peine de Mme Sauvage, mesure « mi-chèvre mi-chou » qui n’est pas exactement une grâce en tant que telle, et qui, à bien y regarder, dépend encore de la bonne volonté d’une Justice qui en a souvent le nom sans en avoir le sens véritable.



Le 5 juin 2015, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a refusé de condamner la France, à raison de l’arrêt du Conseil d’Etat qui autorisait la mise à mort de Vincent Lambert. Cette décision est lourde de conséquences, qui ne sont pas toutes négatives. Sur les dix-sept juges composant la grande Chambre, cinq, exprimant une opinion dissidente, ont dit l’essentiel. D’abord que cet arrêt enlevait à la Cour le droit de se prévaloir de son titre « Droits de l’homme » et d’être « la conscience de l’Europe ». Ensuite, de façon très pragmatique mais très exacte « nous ne comprenons pas… pourquoi le transfert de Vincent Lambert dans une clinique spécialisée (la mission de Santé Bethel où l’on pourrait s’occuper de lui et donc soulager l’Hôpital universitaire de Reims) a été bloqué par les autorités ».





