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  • Passionnant entretien de Péroncel-Hugoz dans le mensuel islamo-gauchiste marocain Din wa Dunia (Religion & Monde)

     

    « L'Etat est par définition un monstre froid, seule peut l'humaniser une famille royale digne. »

    JEAN-PIERRE PÉRONCEL-HUGOZ Journaliste, écrivain et essayiste de renom, membre de la Société des rédacteurs du journal Le Monde et ancien correspondant du célèbre quotidien français en Egypte, en Algérie et au Liban, Jean-Pierre Péroncel-Hugoz, 77 ans, partage aujourd'hui sa vie entre la France et le Maroc. Ce grand connaisseur du monde arabo-musulman et du Maroc est l'auteur de nombreux essais sur les pays du Sud et a édité quelques 70 ouvrages d'auteurs tiers autour notamment de l'histoire de France et des anciennes colonies européennes. Rencontre avec une encyclopédie vivante.

    PROPOS RECUEILLIS PAR JAOUAD MDIDECHDÎN WA DUNIA N°21-22 • AOÛT-SEPTEMBRE 2017

    Untitled_Page_2 - Copie.jpgDepuis Le Radeau de Mahomet, paru en 1983, et jusqu'à présent, dans vos écrits, on ressent une certaine peur de l'Islam, comme d'ailleurs chez d'autres intellectuels occidentaux. Cette religion est-elle si dangereuse que cela ?

    D'abord, permettez-moi de préciser qu'à mon sens, l'Islam n'est pas seulement une religion mais aussi une idéologie, un droit, une vision du monde, une façon de vivre, en somme un tout difficile à scinder. Par ailleurs si, depuis un quart de siècle, la grande majorité des attentats meurtriers commis à travers la planète étaient le fait, par exemple, de bouddhistes ou d'esquimaux, même si tous les membres de ces catégories n'étaient pas des terroristes, les gens auraient tous plus ou moins peur des Esquimaux ou des Bouddhistes... La peur est une réaction spontanée qui ne se commande pas. On peut seulement la nier et c'est ce que font bon nombre d'élites occidentales au nom du « pas d'Islamalgame ! », mais la méfiance demeure au fond d'eux-mêmes contre l'ensemble de l'Oumma. Certains Européens, qui n'osent parler que de « terrorisme », sans le définir, doivent avoir honte de leur pusillanimité quand ils entendent l'écrivain algérien Boualem Sansal fulminer contre les « djihadistes » ou le roi du Maroc, dans son discours du 20 août 2016, dénier la qualité même de musulmans aux auteurs de crimes anti-chrétiens, en France ou ailleurs.

    En dehors des tueries, une autre raison nourrit de longue date craintes et doutes à l'égard de l'Islam : c'est le sort discriminatoire que celui-ci réserve en général aux non-mahométans, même reconnus comme « Gens du Livre », à l'instar des chrétiens d'Orient. Pour les chrétiens du Maroc, cette dhimmitude, car c'est de ce statut inférieur qu'il s'agit, n'existe pas dans la mesure où ces chrétiens ne sont pas autochtones, ont le statut d'étrangers et seraient sans doute défendus, si besoin était, par leurs pays d'origine. Néanmoins, tout chrétien, croyant ou pas, qui veut, en terre islamique, Maroc inclus, épouser une musulmane, est obligé de se convertir d'abord à l'Islam ! Imaginez qu'une telle contrainte existe dans un Etat chrétien, et aussitôt on défilerait un peu partout contre cet Etat qu'on accuserait d'être « anti-musulman ».

    Pourtant vous travaillez au Maroc. L'Islam marocain vous fait-il moins peur ?

    En effet, je travaille au Maroc depuis plus de 10 ans, et auparavant j'y vins pour des dizaines de reportages sous le règne de Hassan II. Je me sens davantage en sécurité ici qu'en France, où la police est plus laxiste. Ce fut un peu la même situation dans d'autres nations mahométanes, comme l'Egypte, où j'ai longtemps travaillé pour Le Monde. L'art de vivre, l'hygiène de vie des Arabo-turco-persans me conviennent mieux que l'american way of life. Leur confiance en Dieu, leur optimisme foncier, leur patience dans l'adversité m'impressionnent ; étant en outre originaire d'un continent où règnent aujourd'hui l'incroyance et la confusion des genres, j'apprécie les sociétés où demeure en vigueur la loi naturelle, c'est-à-dire tout simplement que les hommes y sont des hommes et les femmes des femmes. Last but not least, les sociétés musulmanes, contrairement aux sociétés occidentales, continuent d'honorer les notions de décence et de pudeur — Lhya, hchouma, âoura —, valeurs auxquelles je reste attaché. Ce contexte m'a permis de vivre jusqu'ici en harmonie parmi des musulmans. Du moment qu'on admet l'existence d'Orientaux occidentalisés, il faut reconnaître qu'il y a également des Occidentaux orientalisés, qui ne sont pas toujours islamisés pour autant. Je peux très bien comprendre, cependant, que la jeune convertie russe, Isabelle Eberhardt (1)jadis, se soit bien sentie « dans l'ombre chaude de l'Islam » ...

    Cependant, il existe une haute civilisation musulmane, avec ses grands hommes. Et de tout temps, il y a eu du fondamentalisme, même au sein des deux autres religions monothéistes, non ?

    boumédienne-hassan ii.jpgMême mes pires détracteurs, je crois, reconnaissent que je n'ai cessé, tout au long de mes reportages et de mes livres, de décrire les réussites historiques des cultures islamiques, de l'Indus au Sénégal via le Nil ou la Moulouya, sans m'interdire pour autant de critiquer ce qui me paraissait devoir l'être car, selon le mot de Beaumarchais, « sans la liberté de blâmer, il n'est point d'éloge flatteur ». Hélas, cette civilisation musulmane a peu à peu décliné jusqu'à ne plus vivre que de ses souvenirs ; et si elle est en train de renaître à présent, je crains que ce ne soit sous une forme politico-religieuse radicale qui a déjà commis de nombreux dégâts...Quant aux autres « fondamentalismes », ils font bien pâle figure de nos jours, sauf peut-être, il est vrai, sous forme d'interventions militaires euro-américaines en pays d'Islam. Et c'est d'ailleurs pour cela que, tel le philosophe français indépendant Michel Onfray, j'ai toujours été hostile aux expéditions occidentales, notamment françaises, à l'étranger, sauf ponctuellement lorsqu'il s'agit uniquement de sauver nos ressortissants. La comparaison entre les attentats islamistes aveugles et nos bombardements anti-djihadistes qui tuent également des civils au Levant, en Libye ou en Afrique noire, n'est pas du tout infondée. Il faut laisser les Musulmans vider entre eux leurs querelles, tout en leur proposant évidemment nos bons offices diplomatiques.

    Estimez-vous qu'aucune cohabitation n'est possible entre Islam et laïcité française ? La démocratie en Europe est-elle si fragile ?

    Cette « cohabitation », d'ailleurs pas toujours harmonieuse, existe de facto et certains Etats européens ont fourni de grands efforts pour donner de la place aux musulmans venus s'installer chez eux. Deux des principales villes d'Europe, Londres et Rotterdam, ont des maires musulmans. En France, la liste est longue des musulmans occupant ou ayant occupé des positions de premier plan dans maints domaines : le benjamin du premier gouvernement de la présidence Macron est un jeune Marocain spécialiste du numérique ; l'acteur le plus populaire en France, et le mieux rémunéré, est aussi marocain. Le principal prix littéraire parisien est allé deux fois à des Marocains, etc. Quand on pense qu'en Egypte, le plus brillant diplomate du monde arabe au 20e  siècle, Boutros Boutros-Ghali, n'a jamais pu être ministre des Affaires étrangères à part entière, à cause de sa qualité de chrétien indigène ! Quant à la fameuse démocratie, dont Churchill disait qu'elle est « le pire des systèmes, à l'exception de tous les autres », je me demande si beaucoup de musulmans ont envie de la voir s'installer en Islam, du moins sous sa forme européenne actuelle. Car il faut avoir à l'esprit que la démocratie signifie la primauté des lois conçues par les hommes sur la loi divine, à laquelle l'immense majorité des croyants mahométans paraissent prioritairement attachés. Au Maroc par exemple, tout le monde sait que le peuple n'a aucune considération pour les politiciens et pour la plupart des partis politiques, et bien des Marocains ne craignent pas de dire qu'il vaudrait mieux augmenter les pouvoirs de Sa Majesté chérifienne plutôt que de les diminuer.

    Vous êtes un monarchiste invétéré : la royauté apporterait-elle, à votre avis, plus de sécurité, de liberté, de bonheur que la république ?

    Je suis royaliste comme on respire, à la fois de conviction, de tradition et de raison, mais je le suis pour .la France, comme le furent Lyautey ou De Gaulle. Car pour les autres nations cela n'est pas mon affaire, même si j'aime à voir fonctionner la monarchie exécutive marocaine de manière tellement plus efficace, plus moderne et en même temps plus authentique que la république algérienne voisine, où je fus correspondant du Monde sous la dictature militaire de Houari Boumédiène (2). L'Etat est, par définition, un « monstre froid ». Seule peut l'humaniser une famille royale, incarnant la pérennité nationale, et à condition, bien sûr, que cette famille soit digne. Sous le monarque marocain actuel, l'affection populaire qui s'élève vers lui semble parfois, du moins pour les observateurs occidentaux, franchir la limite du rationnel. Mohamed VI, en effet, malgré ses efforts et sa bonne volonté, n'a pas encore réussi à régler les deux principaux problèmes qui se posent au Maroc depuis des décennies : les karyane ou bidonvilles d'une part ; l'imbroglio saharien, d'autre part, dû surtout, il est vrai, à la jalousie de l'Algérie pour les progrès d'un Maroc pourtant moins riche qu'elle.

    Au sujet du match République-Royauté, feu l'opposant marxiste à Hassan II, Abraham Serfaty, répondait que « l'Histoire avait prouvé la supériorité des républiques ». Eh bien non justement, car, comme disait Lénine « les faits sont têtus », et le 20e siècle, sans remonter plus loin, a vu les plus grands crimes contre les peuples, être le fait, comme par hasard, de deux républiques, celle d'Hitler et celle de Staline...

    Existe-t-il, selon vous, un point faible pouvant expliquer, du moins en partie, les problématiques liées actuellement à l'Islam ?

    J'ai parfois l'impression que nombre de musulmans, adossés à leur certitude coranique d'être « la meilleure des communautés » et à leur dogme égocentrique selon lequel seuls les fidèles de Mahomet pourront entrer au Paradis, se trouvent ainsi dispensés d'être soumis à la critique ou à l'autocritique. En 1987, je rencontrai en France un opposant alors quasi inconnu au régime tunisien, le docteur Moncef Marzouki, qui me séduisit par l'audace critique d'un texte intitulé Arabes si vous parliez ... Je le publiai et ce fut un succès à Paris, Bruxelles ou Genève. Ce livre est une charge puissante et argumentée, par un Arabe contre les Arabes, trop enclins à trouver ailleurs que chez eux, par exemple chez les anciens colonisateurs européens, des responsables à leurs maux contemporains. En 2011, par un retournement politique inattendu, Si Moncef devint le chef de l'Etat tunisien. En accord avec lui, je décidai de republier sans y changer un mot Arabes si vous parliez..., à Casablanca cette fois-ci. Ce texte, qui repose sur l'idée que « l’autocritique est l'autre nom de la maturité », fut cette fois un échec éditorial, surtout en Tunisie... Disons quand même, à la décharge des musulmans, que les menaces des djihadistes contre ceux des « vrais croyants » qui seraient tentés par l'autocritique, peuvent expliquer les silences actuels de l'Oumm (3). En juin 1992, au Caire, Farag Foda, musulman modéré et éminent acteur de la société civile (4), osa réprouver publiquement les traitements discriminatoires dont sont traditionnellement victimes les Coptes, chrétiens autochtones. Très vite, Foda fut abattu devant son domicile par un commando djihadiste (5), après avoir été qualifié, rien que ça, d’ « ennemi de l'Islam », simplement pour avoir pointé une situation scandaleuse, mais que personne, parmi les musulmans de l'époque, n'avait jusqu'alors osé dénoncer en public.

    « Un seul juste dans le pèlerinage rachète tout le pèlerinage ! » Est-ce que ce hadith prêté jadis à Mahomet peut s'appliquer à Marzouki ou à Foda ? C'est à leurs coreligionnaires de répondre. Et d'agir. Sinon, les gens d'Al Qaïda, de Boko Haram et de Daech risquent de s'imposer un peu partout...  

     

    1. Ecrivaine suisse (de parents d'origine russe et devenue française par mariage avec Slimane Ehni) née en 1877 et installée en Algérie à partir de 1897, où elle vécut au milieu de la population musulmane. Ses récits de la société algérienne au temps de la colonisation française seront publiés après sa mort, survenue le 21 octobre 1904 durant la crue d'un oued à Aïn Sefra (nord-ouest de l'Algérie).

    2. Houari Boumédiène (1932-1978) : chef de l'État-major général de l'Armée de libération nationale de 1959 à 1962, puis ministre de la défense de Ben Bella, il devient président du Conseil de la Révolution (et chef de l'État) le 20 juin 1965 suite à un coup d'Etat, et président de la république algérienne du 10 décembre 1976 jusqu'à son décès le 27 décembre 1978. Aucune opposition politique n'était autorisée sous son règne, Boumédiène cumulait les fonctions de président, premier ministre, ministre de la Défense et président du FLN, alors parti unique.

    3. Oumma, du mot arabe « oum », mère, la communauté universelle des musulmans.

    4. Farag Foda (1946-1992) : professeur d'agronomie, il était également écrivain, journaliste et militait en faveur des droits humains et de la sécularisation de l'Egypte.

    5. L'assassinat, perpétré le 8 juin 1992, a été revendiqué par le groupe salafiste Gamaa al-Islamiya, en référence à la fatwa d'al-Azhar du 3 juin de la même année, accusant Farag Foda d'être un ennemi de l'islam. Huit des treize accusés sont acquittés et d'autres relâchés en 2012 sur ordre du président Mohamed Morsi.

  • Quelques-unes des publications de Péroncel-Hugoz ...

    Le Radeau de Mahomet publié en 1983 

     

    livres.jpgLe Radeau de Mahomet, Lieu commun, Paris, 1983.

    Assassinat d'un poète (Jean Sénac), Jeanne Laffitte, Marseille, 1983.

    Une croix sur le Liban, Lieu commun, Paris, 1984 (Prix France-Liban).

    Le Fil rouge portugais : voyages à travers les continents, Bartillat, Paris, 2002.

    Benslimane (Maroc), La Croisée-des-Chemins, Casablanca, 2010.

    Le Maroc par le petit bout de la lorgnette, Atelier Fol'Fer, coll.

    « Xénophon », Anet, 2010. Deuxième édition sous le titre 2000 ans

    d'histoires marocaines chez Casa-Express Éditions, Rabat-Paris, 2014.

    Sous sa direction notamment :

    Lettres marocaines et autres écrits de Louis Hubert Lyautey, Bibliothèque arabo-berbère, Casablanca, 2010.

    Rois de France (1837) d'Honoré de Balzac, Afrique Orient, Casablanca, 2017 *.

    Gabriel Dardaud, Trente ans au bord du Nil. Un journaliste dans l'Égypte des derniers rois, Lieu commun, Paris, 1987.

    Malek Chebel, Histoire de la circoncision des origines à nos jours, Le Nadir/Ballant, Paris, 1992.  •

     

    * A NOTER QUE DESORMAIS ROIS DE FRANCE DE BALZAC EST DIFFUSE PAR LA LIBRAIRIE GALLIMARD DE PARIS ET PEUT NOTAMMENT Y ETRE ACHETE EN LIGNE

  • Les islamistes d'Al Nosra chassés du Liban

    Combats dans la région d'Ersal 

     

    Par Antoine de Lacoste

     

    2966618915.2.pngDepuis plusieurs années, une poche islamiste s'était constituée dans la montagne libanaise appelée Antiliban, à cheval sur la frontière syrienne, à quelques kilomètres du beau site antique de Baalbek. De là, le Front al Nosra (rebaptisé depuis Fatah al Cham) se sentait suffisamment sûr de lui pour faire des incursions dans la Plaine de la Bekaa. Il y avait affronté l'armée libanaise, tuant et faisant prisonnier plusieurs de ses soldats. Il faut noter que des éléments de Daesh étaient venus lui prêter main forte ; il décapitera deux soldats libanais...

    Al Nosra avait ainsi pris le contrôle en août 2014 de la petite ville d'Ersal, à majorité sunnite, la mettant en coupe réglée : exécutions de récalcitrants, application de la charia, trafics d'armes et de drogue. La panoplie habituelle des islamistes sunnites.

    Trop faible, l'armée libanaise n'était pas en capacité d'intervenir et l'armée syrienne avait autre chose à faire. Elle n'aurait de toute façon pas été la bienvenue. Après de longues négociations, Al Nosra avait finalement accepté de se retirer dans les montagnes sur la promesse que l'armée libanaise ne l'attaquerait pas.

    Tout a changé il y a quelques jours avec l'intervention du Hezbollah. Libéré de plusieurs fronts en Syrie, en particulier à Alep et à l'Ouest de Damas, il a décidé de reconquérir Ersal afin de garder la main mise sur la Plaine de la Bekaa à majorité chiite.

    La prise de la ville fut aisée car les combattants de Fatah al Cham restés sur place ont refusé le combat et se sont réfugiés dans les montagnes. Mais le Hezbollah était décidé à en finir et a attaqué l'ensemble du réduit islamiste. Dans le même temps l'armée libanaise prenait position dans Ersal pour éviter toute mauvaise surprise. L'aviation syrienne est également intervenue pour fixer les troupes islamistes et faciliter l'intervention du Hezbollah. L'histoire ne dit pas si le Liban a donné son accord pour des bombardements syriens sur son sol, mais le Hezbollah constituant depuis longtemps un Etat dans l'Etat, cela ne change malheureusement plus grand chose pour ce qu'il reste d'Etat libanais.

    L'issue de la bataille fut favorable : Al Nosra a perdu une cinquantaine d'hommes et les chiites une dizaine (leurs noms et leurs photos figurent toujours dans la presse libanaise chiite afin d'honorer les « martyrs »).

    Mais les islamistes se sont repliés dans un dernier petit réduit montagneux de neuf kilomètres carrés avec quatre prisonniers. Pour les récupérer sains et saufs, le Hezbollah a dû négocier. Un accord semble avoir été trouvé pour que les derniers combattants sunnites soient acheminés vers la Province d'Idleb, au Nord-Ouest de la Syrie. C'est déjà là que se concentrent tous les islamistes syriens (hors Daech) après les multiples redditions des derniers mois.

    C'est un tournant important dans la guerre qui oppose la Syrie aux islamistes. En effet de nombreuses poches d'insurgés sunnites subsistent ici et là dans les montagnes séparant la Syrie du Liban. Ces petits sanctuaires permettaient aux islamistes d'être à l'abri et de recevoir régulièrement des armes et des renforts. La perte de la plus importante de ses poches va probablement en entraîner d'autres.

    La Syrie n'aura plus à craindre des attaques surprises venant des montagnes libanaises et le Liban sera débarrassé de la présence d'Al Nosra sur son sol.  •

  • Ce que dit le Roi du Maroc Mohammed VI : « Il n’y a pas de vierges au Paradis »

     

    A signaler noter que cette intéressante note - signée  est parue le 

    Logo-LExpress-Une-Mouves.jpgLa semaine dernière, le Roi Mohammed VI du Maroc a tenu un discours remarquable sur le terrorisme et l’islamisme en Europe, à l’occasion de l’anniversaire de l’indépendance marocaine.

    Le texte intégral de son discours traduit en anglais est récemment apparu sur le site du Middle East Media Research Institute (MEMRI).

     

    « Nous croyons que le meurtre d’un moine est interdit par la charia, et que le tuer dans une église est un acte impardonnable de stupidité, parce qu’il est un être humain, et un religieux, même s’il n’est pas musulman. (…) Les terroristes qui opèrent au nom de l’islam ne sont pas musulmans », a dit le roi, se référant à l’assassinat du prêtre catholique Jacques Hamel en France le 26 juillet dernier.

    Il a demandé aux Marocains résidant à l’étranger d’adhérer aux valeurs de leur foi, et d’empêcher la montée de l’islamophobie et du racisme en protégeant leur bonne réputation.

    Pas de vierges pour les djihadistes

    Pour la première fois le monarque a également soulevé la question du djihad. Les kamikazes ne sont pas nécessairement motivés par des motifs religieux, mais la promesse de paradis est souvent un motif important. En effet, les musulmans qui se font exploser croient qu’ils acquièrent le statut de martyr, ce qui leur assure – à la différence des musulmans ordinaires – d’aller directement au paradis. Selon certaines interprétations du Coran, ils seraient alors récompensés par 72 houris, c’est à dire des jeunes femmes célestes vierges d’une très grande beauté.

    Dans les bagages de Mohammed Atta, l’un des terroristes qui avaient détourné un avion pour le faire percuter dans les tours du WTC à Manhattan en 2001, on a trouvé un document contenant la note suivante : « Il faut que tu sois gai, heureux, ouvert, tranquille, car tu  commets une action que Dieu aime et qui le satisfait et le jour viendra où tu  seras avec les houris ».

    Depuis quand le djihad consiste-t-il à tuer des innocents ?

    Le roi a évoqué le groupe terroriste Etat islamique (EI), l’accusant d’exploiter le manque de connaissance de l’Islam et de la langue arabe des jeunes musulmans en Europe :

    « Les terroristes qui opèrent au nom de l’islam ne sont pas musulmans. (…) Menés par leur ignorance, ils croient que ce qu’ils font est le djihad. Mais depuis quand le djihad consiste-t-il à tuer des innocents ? (…) Est ce qu’une personne saine d’esprit peut croire que des vierges au Paradis sont la récompense pour le djihad ? Est-il concevable que ceux qui écoutent de la musique seront avalés par la Terre ? Et il y d’autres mensonges de cette sorte. Les terroristes et les extrémistes utilisent tous les moyens possibles pour persuader les jeunes de se joindre à eux et de frapper des sociétés qui défendent les valeurs de liberté, d’ouverture et de tolérance. (…) Nous sommes tous visés. Celui qui croit en ce que j’ai dit est une cible pour le terrorisme ».  

  • Une publication exceptionnelle ... Un entretien qui devrait intéresser les lecteurs de Lafautearousseau ... Et comment !

  • 15 août 2017, « Jour de la vierge » de Salvador Dali

     

    « La Madone de Port Lligat », 1947

    Salvador Dali [1904-1989]

  • Le bouffon des temps tragiques

     

    PAR MATHIEU BOCK-CÔTÉ

    Cette tribune [2.08] - d'une pertinence toujours égale - est l'une de celles que Mathieu Bock-Côté donne sur son blogue du Journal de Montréal. Il aura été, depuis quelque temps déjà, un observateur lucide non seulement des évolutions politiques des pays dits encore occidentaux mais aussi de leur situation sociétale qui n'est pas de moindre importance.  L'esprit de ces chroniques, comme de celles qu'il donne au Figaro, est, au sens de la littérature et de l'histoire des idées, celui d'un antimoderne, même s'il n'est pas sûr qu'il acquiescerait à cette classification. Il s'est en tout cas imposé, selon nous, comme un esprit de première importance. Mathieu Bock-Côté n'est pas tendre ici pour Donald Trump, bien que, comme nous, il ait sans-doute préféré son élection à celle d'Hillary Clinton. Sur ce personnage, chef du plus puissant pays du monde, il nous paraît toutefois lucide.  Ce qui nous rappelle que, de par la nature de ce grand Etat, de ses intérêts, de son système politique et de sa classe dirigeante, les limites de l'alliance américaine doivent être toujours très présentes aux esprits français.  LFAR 

     

    501680460.5.jpgIl peut sembler facile, très facile, et même trop facile, de dire du mal de Donald Trump et de son administration. Hélas, il est difficile d’en dire autre chose !

    Nous sommes manifestement devant un pouvoir grotesque. Il a toutefois cela de particulier qu’il s’exerce à la tête de l’empire qui domine notre temps à un moment de l’histoire qui exigerait de grands dirigeants, capables de faire face à une époque tragique.

    Il y a quelque chose de saisissant à lire d’un côté les déboires d’un président fantasque et de l’autre, l’explosion d’une actualité internationale agitée qui laisse deviner des années difficiles.

    Histoire

    C’est le paradoxe de Trump : il prétend incarner un renouveau de la puissance américaine, mais il tourne son pays en ridicule sur la scène mondiale.

    Évidemment, l’Amérique survira à Trump, mais il aura contribué à son affaiblissement. Il en viendra un jour à représenter un dérèglement possible de la démocratie qui, toujours, peut céder aux démagogues, même si ceux-ci jouent souvent sur des inquiétudes populaires légitimes pour se hisser au pouvoir.

    Trump a conquis la Maison-Blanche en prenant au sérieux le sentiment de dépossession d’un grand nombre d’Américains. Il les trahit en se montrant incapable de se hisser à la hauteur de sa nouvelle fonction.

    Il voulait transgresser le politiquement correct, mais il en est venu à piétiner les exigences élémentaires de la décence.

    Revenons-y : l’époque est tragique et nous ne semblons toujours pas l’accepter.

    Revenons au début des années 1990. Après la chute du communisme, le monde occidental se croyait engagé sur le chemin de la paix perpétuelle. Certes, on trouverait encore ici et là des poches de résistance à la modernité.

    Mais le monde serait en voie de s’unir sous la pression du commerce et grâce au génie des droits de l’homme. La révolution technologique ferait de la planète un immense village.

    Les vieux conflits entre les pays, les religions et les civilisations deviendraient tout simplement incompréhensibles.

    Mondialisation

    Tout cela nous semble aujourd’hui terriblement ridicule.

    Qu’on pense seulement à la Russie de Poutine. Elle est dans une quête de puissance classique qui semble incompréhensible à ceux qui ne jurent que par la vie festive.

    Qu’on pense aux migrations massives, surtout celles qui frappent l’Europe : elles annoncent un monde chaotique qui fragilisera comme jamais le vieux monde.

    Qu’on pense aux fantasmes nucléaires de la Corée du Nord.

    Pensons, de manière plus heureuse, cette fois, au Brexit : en votant en sa faveur, les Britanniques ont rappelé que l’indépendance nationale demeure une valeur cardinale. Dans un monde bouillant, les peuples redécouvrent l’importance vitale des frontières.

    Retour à Trump. À certains égards, il représentait une révolte du peuple américain contre les excès de la mondialisation et un désir de réaffirmer une vision plus traditionnelle des États-Unis, plus adéquate pour affronter les temps nouveaux.

    Jusqu’à présent, il a tout gâché en se contentant d’être la caricature de lui-même. Il n’a pas su quoi faire de sa victoire. On ne voit pas comment il pourrait changer de cap.  

    MATHIEU BOCK-CÔTÉ

    Mathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (VLB éditeur, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (Boréal, 2012) de La dénationalisation tranquille (Boréal, 2007), de Le multiculturalisme comme religion politique (éd. du Cerf, 2016) et de Le Nouveau Régime (Boréal, 2017).

  • Oui, l'Europe et la Russie peuvent se réconcilier

     

    Par Laurence Daziano 

    Depuis la fin de la Guerre froide, les relations entre l'Europe et la Russie demeurent tendues. Dans cette tribune publiée par Figarovox [11.08] Laurence Daziano, montre comment dans le contexte international actuel l'intérêt de l'Europe est de retrouver le chemin de l'entente avec Moscou. Lafautearousseau partage ce point de vue. En revanche, nous n'avons pas la même confiance que Laurence Daziano dans la solidité - retrouvée grâce à l'élection d'Emmanuel Macron ? - du couple franco-allemand. Ceci en raison des disparités qui n'ont cessé de se creuser entre les deux partenaires et de fortes oppositions d'intérêt. De même la vision très européenne si ce n'est européiste de Laurence Daziano pour réaliser l'entente euro-russe à juste titre proposée ici, nous paraît irréaliste. Et pas très gaullienne, non plus, comme en témoigne la référence à Jean Monnet. Si ce rapprochement doit évidemment entraîner l'ensemble européen, à commencer par l'Allemagne, peut-être devrait-il revenir à la France d'en prendre l'initiative, d'y avoir un rôle moteur et déclenchant. Une politique euro-russe à la française, d'initiative française, que la rencontre de Versailles, au lieu de n'être qu'un symbole, aurait préfigurée et qui, alors, prendrait un vrai sens. Qu'attend Macron pour aller à Moscou ?    LFAR

     

    Depuis près de dix ans, l'accroissement des tensions géopolitiques fait peser une épée de Damoclès sur l'Union européenne : crise financière de 2008, crise migratoire, conflit ukrainien, Brexit, élection de Donald Trump à la Maison Blanche qui achève de faire diverger les vues de Washington et de Bruxelles sur de nombreux dossiers. Ce retour en force du fait géopolitique s'est également concrétisé dans une montée inédite des tensions entre les Occidentaux et la Russie depuis la fin de la Guerre froide.

    Cependant, une conjonction de trois facteurs pourrait permettre aux Européens de retrouver, positivement, le chemin d'un destin propre, en quelque sorte une « voie gaulliste » entre l'Ouest et l'Est. D'abord, les « révolutions atlantiques » de Washington et Londres redonnent aux Européens la maîtrise de leur propre destin, y compris en termes sécuritaires. Ensuite, l'élection d'Emmanuel Macron à l'Elysée, qui a stoppé la vague populiste en Europe, ainsi que la probable réélection d'Angela Merkel à la chancellerie, en septembre 2017, redonnent à l'Europe le moteur qui lui manquait : un couple franco-allemand solide. Enfin, la Russie, qui est arrivée à garantir ses objectifs stratégiques en Ukraine et en Syrie, comprend désormais qu'une politique extérieure forte doit également reposer sur une croissance économique solide, à la veille des élections présidentielles de 2018.

    En mai dernier, Angela Merkel ne disait pas autre chose en déclarant, au lendemain du sommet du G7 de Taormina : « Les temps où nous pouvions totalement nous reposer sur d'autres sont en partie révolus. Nous, les Européens, nous devons vraiment prendre en main notre propre destin ». L'élection d'Emmanuel Macron a également consacré une nouvelle impulsion en Europe, en lançant des réformes tant attendues par Berlin et en recevant Vladimir Poutine à Versailles pour discuter, à nouveau, avec notre partenaire russe.

    Inversement, la promulgation le 2 août dernier des sanctions américaines contre la Russie a convaincu les Européens qu'il fallait définir une nouvelle voie stratégique. Washington vient de prendre, contre l'avis de Bruxelles, une série de sanctions qui pourraient toucher les entreprises européennes. Ces nouvelles sanctions, contre la Russie notamment, permettraient à Washington de prononcer des amendes, des restrictions bancaires et l'exclusion des appels d'offres outre-Atlantique à l'encontre des sociétés européennes qui participeraient à la construction de pipelines russes ou qui utiliseraient le dollar comme monnaie de transaction avec la Russie. De facto, ces sanctions interdiraient aux entreprises européennes, engagées dans des projets d'infrastructures en Russie, de poursuivre leur activité aux Etats-Unis.

    La France, déjà échaudée par les sanctions contre BNP Paribas, qui avait dû payer 9 milliards d'euros au Trésor américain en 2014 pour échapper à des poursuites judiciaires, a des intérêts à défendre. Washington utilise les sanctions comme une législation extraterritoriale au détriment des entreprises européennes et au profit des intérêts américains. Ces nouvelles sanctions visent de nombreuses entreprises énergétiques européennes ainsi que les projets de gazoduc à l'instar de Nord Stream 2. Financé en partie par Engie, Nord Stream 2 doit acheminer du gaz russe en Europe via l'Allemagne, alors que les Américains projettent d'exporter leur gaz de schiste, à un coût supérieur, en Europe.

    Dans ce contexte, l'Union européenne, sous l'impulsion du couple franco-allemand, devrait retrouver le chemin d'un dialogue franc et constructif avec Moscou, avec qui nous partageons de nombreux intérêts politiques, économiques, commerciaux et énergétiques, et faciliter les initiatives en ce sens.

    Dans un premier temps, la reprise de ce dialogue pourrait se dérouler à l'occasion d'un sommet «E - Russie » qui adopterait une feuille de route autour de projets concrets pour créer, comme l'avait déclaré en son temps Jean Monnet, des solidarités de fait. Ces solidarités « de fait » concerneraient la réalisation des projets énergétiques communs, mais également les coopérations des industries agro-alimentaires et l'industrie spatiale. Dans ce cadre, l'UE devrait être favorable aux coopérations commerciales en cours, comme Nord Stream 2 et Yamal, et non subordonner leur réalisation à des considérations exclusivement politiques.

    Dans un second temps, les relations russo-européennes pourraient être approfondies à l'occasion de la tenue d'une nouvelle Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) qui, en 1975, fut à l'origine de la détente et de la perestroïka. Cette conférence, qui pourrait se tenir à Helsinki comme la première, pourrait aborder la question d'un accord commercial de libre-échange UE - Russie, ainsi que la coopération sécuritaire. Bruxelles et Moscou pourraient signer un nouvel Acte final d'Helsinki, permettant de parachever une détente sécuritaire et l'édification de solidarités concrètes dans un espace géographique commun qui se dresserait de Brest à Vladivostok.  

    Laurence Daziano

    Maître de conférences en économie à Sciences Po, Membre du conseil scientifique de la Fondation pour l'innovation politique (Fondapol).

  • Culture • Loisirs • Traditions

  • Histoire • « Secrets d’Histoire » sur le Régent Philippe d’Orléans

     

    Jeudi 10 août 2017, l’émission « Secrets d’Histoire » sur France 2  était consacrée au Régent Philippe d’Orléans, petit-fils de Louis XIII, neveu de Louis XIV et cousin du futur Louis XV, sur lequel il veilla jusqu’à ses 14 ans. Le régent Philippe d’Orléans fut bien davantage que le débauché oisif et superficiel de la légende. « Secrets d’Histoire » présente un prince étonnamment moderne et pragmatique.  

     

    Source La Couronne

  • Géopolitique • L'Afrique Réelle : le numéro d'août 2017 est paru

     

    Sommaire

    Actualité :

    Mali : la France entre Barkhane et le G5 Sahel

    Dossier Rwanda : Allons-nous enfin savoir qui sont les assassins du président Habyarimana ?

    - Le curieux missile du Kivu

    - Que contient le dossier du juge Herbaut, successeur du juge Trévidic ?

    Livres :

    Sétif, encore et encore...

     

    Editorial de Bernard Lugan

     

    1275257356.jpgFace au chaos libyen qu’ils ont provoqué, s’obstinant à nier le réel et encalminés dans le néocolonialisme démocratique, les « Occidentaux » ont prétendu reconstruire la Libye autour d’un fantomatique gouvernement d’ « Union nationale ». Présidé par M. Fayez Sarraj, ce GUN est en réalité l’otage des milices islamistes de Tripolitaine et des Frères musulmans de Misrata. 

    Face à cette politique « hors sol », la Russie a déroulé un plan reposant sur les rapports de force militaires. Sa conclusion fut le voyage que le général Haftar - l’homme avec lequel la « diplomatie » européenne refusait de parler directement -, effectua à Moscou les 27 et 28 novembre 2016. 

    Du jour au lendemain, les nains politiques de l’UE réalisèrent alors que le « rebelle obstacle à la démocratisation de la Libye » était en réalité le maître de la Cyrénaïque, qu’il disposait de la seule force militaire du pays, qu’il contrôlait 85% de ses réserves de pétrole, 70% de celles de gaz, 5 de ses 6 terminaux pétroliers, 4 de ses 5 raffineries, et qu’il avait l’appui de la confédération tribale de Cyrénaïque ainsi que celui des tribus kadhafistes de Tripolitaine[1].

    Le 25 juillet 2017, le président Macron a organisé une rencontre entre Fayez Sarraj et le général Haftar, ce dernier voyant ainsi sa stature internationale confortée. Les deux hommes ont conclu un accord non signé et non ratifié. 

    Que peut-il en résulter alors que le général Haftar est le maître de la Cyrénaïque quand Fayez Sarraj ne contrôle même pas Tripoli et vit sous la menace permanente des milices ? 

    Les deux hommes se sont engagés à organiser des élections. Certes, mais la Libye a déjà connu plusieurs scrutins qui n’ont à aucun moment permis d’avancer sur le chemin de la paix. De plus, comme le Conseil des tribus n’a pas été partie prenante à cet accord, si Seif al-Islam Kadhafi n’y est pas associé d’une manière ou d’une autre, il demeurera lettre morte.

    *

    La situation s’aggrave au Mali où, en dépit de l’accord de paix, les groupes armés signataires s’entretuent. Le climat sécuritaire du pays est plus mauvais aujourd’hui qu’il y a quatre ans, quand le président IBK a été élu. A l’insécurité dans le nord, s’ajoute en effet le centre du pays où, pudiquement, les observateurs parlent de « violences communautaires » pour ne pas dire  guerre ethno-tribale, l’islamisme n’étant ici que la surinfection d’une plaie ethnique.

    *

    Les Casques bleus de la mission de paix au Congo (Monusco) ont mis la main sur un missile sol-air récupéré sur une milice du Kivu armée par Kigali. Il porte les mêmes numéros de série et a été fabriqué à la même date (avril 1987), que les deux missiles qui ont abattu l’avion présidentiel rwandais le 6 avril 1994. Ces éléments sont contenus dans un rapport officiel de la Monusco dont le rédacteur demande qu’il soit transmis au P5 (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité) ou au P3 (les trois membres occidentaux du conseil de sécurité), à défaut, aux autorités judiciaires françaises en charge de l’enquête concernant l’attentat du 6 avril 1994. 

    Ce rapport a maintenant plus de 10 mois. Si l’ONU ne l’a pas encore transmis au juge Herbaut, cela démontrerait une fois de plus que certaines puissances ne veulent toujours pas, 22 ans après l’attentat qui fut le déclencheur du génocide du Rwanda, que la vérité soit faite sur son (ses) commanditaire(s).  

     

    [1] Pour tout ce qui concerne les tribus de Libye et leurs alliances, voir de Bernard Lugan Histoire de la Libye des origines à nos jours

     

    Bernard Lugan site officiel

  • Idées & Société • Alain de Benoist : Bataille des idées ? La gauche a perdu, mais la droite n’a pas gagné !

    Manuel Valls déclare que « la gauche a perdu la bataille des idées » 

     

    Publié le 23 juillet 2017 - Actualisé le 13 août 2017 

    Par Alain de Benoist

    Cet entretien donné à Boulevard Voltaire [22.07] dit avec justesse, lucidité et pertinence ce qu'il faut savoir de la situation des idées en France, à l'heure actuelle. Nous partageons cette analyse qui met en lumière a contrario le travail restant à accomplir pour qu'il y ait vraiment bataille des idées et qu'elle conduise à une réelle rupture avec la doxa dominante à droite comme à gauche. La première Action française nommait cela contre-encyclopédie. Peut-être devrions-nous parler aujourd'hui d'une anti-doxa.  LFAR   

     

    3650118671.7.pngManuel Valls déclare que « la gauche a perdu la bataille des idées ». C’est une bonne nouvelle ?

    Quelle bataille ? Il est vrai que la gauche n’a plus rien à dire, mais la bataille des idées dont parle Manuel Valls n’a jamais eu lieu. Non parce que cette gauche devenue muette reste largement hégémonique dans les médias, et qu’elle n’apprécie pas qu’on cherche à la contredire, mais parce que la droite n’avait ni le désir, ni la volonté, ni les moyens de participer à une bataille de ce genre. La droite n’avait tout simplement rien à dire – ou peu s’en faut. Le domaine des idées n’obéit pas au principe des vases communicants. Vous avez vous-même cité François Huguenin : « La droite a refusé le combat des idées car elle n’en a plus. » C’est ce que Pierre-André Taguieff remarquait lui aussi récemment : « La gauche a perdu la bataille des idées, mais la droite ne l’a pas gagnée. »

    On pourrait, ici, faire un parallèle avec la fin du système soviétique. L’URSS ne s’est pas écroulée sous les coups de boutoir du « monde libre » mais sous l’effet de ses propres contradictions internes. Si la gauche n’a plus rien à dire, si elle a perdu son identité en désertant le combat culturel, ce n’est pas que la droite a réfuté ses idées, c’est que ses idées ont épuisé le cycle de leurs virtualités possibles, et surtout qu’elle a délibérément abandonné le socle idéologique qui faisait sa force, et nourrissait son imaginaire, en se ralliant plus ou moins honteusement au libéralisme économique et au système du marché.

    Depuis la Manif pour tous, il y a quand même une indéniable effervescence intellectuelle à droite. Épiphénomène ou lame de fond ?

    Il y a, en effet, quelques ébranlements ici ou là, mais on est loin du compte. Où sont les Taine, les Tocqueville et les Renan du XXIsiècle ? La droite n’aime déjà pas beaucoup les intellectuels, ces coupeurs de cheveux en quatre qui ont la faiblesse de croire que les révolutions culturelles ont des conséquences plus durables que les révolutions politiques. Les partis politiques, eux, pensent que les idées divisent et qu’entretenir le flou est la meilleure manière de rassembler. La droite d’aujourd’hui est idéologiquement déstructurée. Dans le passé, elle s’est laissée gagner par les idées de ses adversaires sans les reconnaître pour ce qu’elles étaient. Elle n’a jamais conçu de stratégie culturelle, car elle ne sait même pas ce que cela veut dire. Elle a cru qu’elle deviendrait « respectable » en multipliant les concessions. Elle cède aujourd’hui plus que jamais aux modes idéologiques qui ont historiquement affaibli toutes ses défenses immunitaires, à commencer par l’universalisme philosophique, l’idéologie des droits de l’homme et l’idéologie du progrès. 

    La recomposition politique à laquelle on assiste actuellement annonce-t-elle aussi une recomposition idéologique ?

    Ce serait une excellente nouvelle, à condition qu’on puisse y croire, mais je doute que la scène politique soit propice à une refondation idéologique. Par nature, elle entretient plutôt la confusion. Il paraîtra sans doute excessif à beaucoup de dire que, lorsqu’on a telle ou telle position politique, on doit savoir aussi comment interpréter les plus récents acquis de la physique théorique ou de la biologique moléculaire. Et pourtant, il n’y a pas de conception du monde qui n’englobe pas tous les domaines de connaissance et de pensée. Mais sans aller si loin, on pourrait au moins exiger qu’en matière anthropologique, on ait un minimum de cohérence. Quelle idée se fait-on de l’homme ? Une idée philosophiquement classique ou une idée idéologiquement moderne ? Celle d’un être politique et social par nature ou celle d’un individu porteur de droits qui ne serait sur terre que pour maximiser son meilleur intérêt ? La société s’explique-t-elle par la sociabilité naturelle de notre espèce ou n’est-elle qu’un agrégat d’atomes individuels régi par le contrat juridique et l’échange marchand ?

    L’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron, qui symbolise la réunification du libéralisme sociétal de gauche et du libéralisme économique de droite, pourrait en principe favoriser une clarification en faisant comprendre une fois pour toutes que le libéralisme est intrinsèquement « progressiste » et non pas conservateur, pour reprendre un mot qui revient à la mode. C’est ce qu’explique très bien Guillaume Bernard : « La combinaison du libéralisme et du conservatisme peut, de prime abord, apparaître séduisante : le libéralisme pour l’économie, le conservatisme pour la société. Mais c’est méconnaître la doctrine libérale, qui s’appuie sur l’individualisme et le subjectivisme. C’est en soi et par soi que chacun détermine son bien. Il n’existe pas de valeur objective, mais uniquement des consensus issus de la rencontre de volontés. Le libéralisme porte en lui la destruction des traditions sociales, alors qu’il n’est nullement nécessaire de s’y adonner pour combattre la spoliation fiscale des familles et des entreprises. » C’est ce qu’il faudrait comprendre si l’on veut gagner la « bataille des idées ». Les Républicains, eux, se veulent les représentants « de la droite et du centre ». Encore un oxymore !  

    Intellectuel, philosophe et politologue

     
     
    Entretien réalisé par Nicolas Gauthier
  • Culture • Loisirs • Traditions

  • Société • Pourquoi Brigitte Macron aurait-elle besoin d'un statut de première dame ?

    D'Yvonne de Gaulle à Valérie Trierweiler : les femmes de l'Élysée

     

    2910916609.3.jpgNi Michèle Auriol, l'épouse du président Vincent Auriol - que les royalistes de l'époque, liaison oblige,  appelaient Tauriol -  ni Germaine Coty, dont René Coty fut veuf au début de son septennat, ni Yvonne De Gaulle, malgré sa réputation de pudibonderie et de raideur, ni Claude Pompidou, la moderne, ni la précieuse Anémone Giscard d'Estaing, ni Danielle Mitterrand, malgré ses pulsions révolutionnaires sud-américaines, ni Bernadette Chirac, l'épouse modèle et trahie, n'eurent besoin de « statut » pour être chacune selon son style, de dignes premières dames. Simplement, selon le cas, elles remplissaient, comme toute épouse,  le rôle de maîtresse de maison, qui accueille, reçoit, bichonne ses invités, ou de femme accompagnant son mari dans ses voyages, dans ses rencontres avec ses homologues où d'autres épouses seront présentes, y tiendront le même rôle. ; les unes et les autres participeront encore à diverses cérémonies où leur présence sera bienvenue, ira de soi. Ainsi, les chefs d'entreprise, les chefs militaires, les hommes de tout rang et toute responsabilité, sont-ils très généralement et très naturellement accompagnés, assistés, de leur femme. Elles n'ont le plus souvent pas de statut.

    Au fond, jusqu'à nos jours, le rôle de première Dame n'était réglé, défini, délimité, que par l'usage et les moeurs.

    Les choses ont connu quelques complications sous Sarkozy où il y eut deux premières dames successives, une rupture, un départ, puis une liaison, un remariage (« Avec Carla, c'est du sérieux »...) et même, une naissance élyséenne. Il n'y eut pas une première dame mais deux, sur fond de crise puis d'idylle sentimentale. La seconde était de grande famille italienne et chanteuse de music-hall. Du pas très sérieux, en vérité ...

    Sous Hollande, jamais marié, complication accrue : il ne pouvait y avoir de première Dame. Fut alors ressuscité le singulier statut de concubine, comme dans la Cité Interdite, où le Fils du Ciel, l'empereur, avait plusieurs épouses et plusieurs concubines. Hollande n'eut pas d'épouse, mais une première concubine qui aspira à devenir première Dame, avant que le président ne lui préfère une seconde concubine, dans ce cas une actrice, qui n'eut ni le temps ni peut-être l'envie, de briguer le rôle tenu jadis par les femmes de président. Qu'elle n'était pas. Sous Hollande, ni Valérie Trierweiler  - qui écrivit un brûlot fort lucratif contre son amant - ni Julie Gayet ne furent premières Dames. Il n'était d'ailleurs pas absolument évident qu'Hollande fût vraiment Président.

    brigitte-trogneux-and-emmanuel-macron-38a2-diaporama.jpgMalgré la disparité assez inhabituelle de leurs âges, Emmanuel et Brigitte Macron forment, à ce qu'il semble, un couple stable et légalement constitué, semblable aux ménages présidentiels d'antan, dont nous avons évoqué certains.

    Les épouses y tenaient leur rôle sans statut. Simplement en tant que telles. En tant qu'épouses.

    Qu'Emmanuel Macron veuille un statut pour son épouse, un statut de Première Dame, témoigne seulement d'une rupture de tradition, d'usage, de moeurs, qui appelle une sorte de compensation par la loi.

    Ainsi le procédural remplace moeurs, usages et traditions et cela est plus grave sans-doute que le président de la République est capable de l'imaginer, le mesurer. Tout simplement, le comprendre. Et ce n'est pas réjouissant du tout.