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Rechercher : Rémi Hugues. histoire & action française. Rétrospective : 2018 année Maurras

  • Mini-dossier sur la crise (2/5) : L'Europe ou le chaos, par Hilaire de Crémiers.

                Avant-hier, nous avons réagi aux propos tenus le matin même, sur France inter, par Bernard Guetta, et nous posions la question: "Les marchés" nous mènent-ils à plus d'Europe ?

                Nous laissons maintenant la parole a Hilaire de Crémiers -aujourd'hui- et à François Reloujac, après-demain. Leurs deux textes, que nous reproduisons intégralement ici, sont parus dans le numéro 85 (mai 2010) de Politique Magazine.

                Voici L'Europe ou le chaos, par Hilaire de Crémiers.

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    L’Europe ou le chaos...

     

                Il ne semble plus possible d’arrêter la tempête…Les dettes souveraines posent inéluctablement la question de la souveraineté des États.

     

                Le compte à rebours a commencé. Question de semaines, de mois ? peut-être de jours ? Impossible de le dire au moment où ces lignes sont écrites. Quand elles seront lues, début mai, peut-être en effet la Grèce sera-t-elle tout simplement en défaut de paiement. Voilà deux ans déjà que dans les analyses de Politique magazine le risque sur les dettes souveraines est signalé1 et voilà quelques mois qu’à chaque parution il est dit que ce risque s’aggrave. Interdisant concrètement les prétentions d’un volontarisme politique qui n’a plus les moyens institutionnels, pratiques, financiers, monétaires même, en tout cas humains, d’assurer les objectifs d’une quelconque politique souveraine de salut national. Et pour quelque pays que ce soit dans la zone euro. Les discours politiques, les prospectives économiques, les plans et « re-plans » sont réduits à l’états de mots.

     

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    La dette grecque

     

                La Grèce va donc succomber sous le poids de sa dette. À l’heure où s’écrivent ces lignes, le directeur général du Fonds monétaire international (FMI), Dominique Strauss-Kahn, et le président de la Banque centrale européenne (BCE), Jean-Claude Trichet, sont à Berlin pour convaincre Angela Merkel, la chancelière allemande, d’accepter le plan d’aide à la Grèce, concocté par l’Union européenne, la BCE et le FMI. Le montant de ce plan ne cesse tous les jours d’être réévalué à la hausse. À l’heure d’aujourd’hui, il faudrait 45 milliards d’euros pour couvrir les seuls besoins des jours, des semaines, des mois qui viennent, et de toute façon au moins la moitié avant le 19 mai, prochaine échéance grecque ; mais sur les trois ans qui s’annoncent de plus en plus tragiques, les chiffres doublent, triplent, voire quadruplent. Alors ?

     

                Le FMI est prêt à verser 15 milliards quasi tout de suite pour entraîner la décision des chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne, mais aussi et surtout l’adhésion des hommes politiques et des représentants de chacune des nations qui devront voter ou plus exactement entériner un tel plan… En pure perte ?... Même s’il est affirmé et répété haut et fort qu’il ne s’agit que de prêts et qui, placés à 5%, rapporteront gros aux États prêteurs ! Il y a de mauvaises blagues, même dites par de savants économistes, qui ne passent pas ! La plupart des hommes politiques français qui se sont enferrés dans l’Europe telle qu’elle a été fabriquée, se trouvent coincés, droite gauche confondues. Même un Fillon qui, il y a 15 ans, comme son maître Seguin, était contre l’Europe de Maastricht, a rallié et complètement. Aujourd’hui, c’est la carte forcée. Et que peut dire le Parti socialiste sur cette affaire ? Rien !

     

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    Jean-Claude Trichet : l'euro l'obéit plus !

     

                Le nouveau ministre du Budget, François Baroin, a expliqué doctement aux parlementaires français, mercredi 28 avril, que l’euro était notre monnaie nationale et qu’il n’y avait donc plus qu’une seule solution, aider la Grèce, sinon notre monnaie succomberait. Voilà la situation ! Et de fait. Donc, l’État français, donc les parlementaires français sont dans l’obligation d’apporter la quote-part de la France, estimée pour l’heure à 6,3 milliards pour commencer. Et Baroin d’ajouter pour être plus convaincant : ce sera de plus une très bonne affaire, un prêt juteux, comme celui fait aux banques en 2008 ! Il faut le faire… Mais voilà cinquante ans que la classe dirigeante française est gavée d’européisme : l’Europe était, est encore leur seule politique.

     

                Mais si Trichet et Strauss-Kahn – deux Français complètement engagés, y compris dans leur honneur de hauts responsables – ont couru à Berlin, c’est que les Allemands sont moins crédules ! L’Europe fut pour eux d’abord une très bonne affaire allemande. L’Allemagne, grâce à l’Europe, a retrouvé toute sa stature. Les parlementaires allemands ont beaucoup de mal à marcher dans une opération perdante ; d’autant plus que la quote-part prévue est la plus importante : 8,6 milliards immédiatement. Les Allemands n’atermoient pas seulement pour des raisons électorales, au motif que des élections régionales auront lieu le 9 mai. Dès le début, ils savaient fort bien qu’ils n’iraient pas au secours d’un pays en faillite. C’était le sens qu’il convenait de prêter aux propos ambigus de Wolfgang Schaüble, le ministre des Finances de la République fédérale : « Les Allemands ne peuvent pas payer pour les erreurs des Grecs ». Le ministre des Affaires étrangères, Guido Westerwelle a, quant à lui, carrément déclaré : « L’Allemagne n’est pas prête à faire un chèque en blanc à la Grèce ». Le « oui » d’apparence de la Chancelière aux injonctions européennes et aux objurgations de Sarkozy ces derniers temps n’étaient que pour couvrir un « non » fondamental. D’où ses réticences et ses contradictions. Et il est plus que vraisemblable, malgré tout ce qui se dit aujourd’hui, que c’est ce « non » fondamental qui va éclater dans les prochains jours – et peut-être même encore après un premier « oui » des parlementaires –, au prétexte ou au motif que les Grecs ne se seront pas assez engagés dans une politique de rigueur. Dans l’imbroglio actuel, chacun cherchera à faire porter la responsabilité de l’échec et de la crise à l’autre ?

     

    L’enclenchement

     

                Les Grecs auront dans un premier temps tous les torts. D’autant plus que le peuple grec n’est pas prêt du tout à accepter, à supporter les remèdes que les experts lui mijotent. De l’Europe, de l’Allemagne et du FMI, les Grecs déclarent déjà qu’ils n’ont rien à faire. Ce sont leurs hommes politiques qui y ont cru, pas eux ! Voilà des réflexions qui vont s’entendre bientôt dans toutes les nations d’Europe. Inutile de reprocher aux Grecs leur tricherie : tout le monde a triché pour entrer dans l’euro, sauf peut-être justement les Allemands. Tout simplement parce que c’était leur monnaie.

               

                Les responsables politiques et financiers européens sont angoissés. Ils ont raison de l’être. Ils s’imaginent encore qu’ils vont calmer le jeu terrible, implacable, qui se joue contre l’euro et la zone euro. En vain. Les marchés anticipent la crise, et la spéculation qui s’en est donnée à cœur joie, refusera dorénavant le risque. Les investisseurs, même habituels, se déroberont. L’enclenchement est inéluctable. Ça durera ce que ça durera. La déroute financière est là. La dette grecque est désormais cataloguée comme « pourrie ». Et Strauss-Kahn et Trichet de déclarer que les agences de notation n’ont pas à faire la loi. Il fallait s’en rendre compte avant ! Et Standard & Poor’s se moque bien de leurs appréciations : elle garde les siennes. Elle a dégradé la note souveraine du Portugal de A+ à A- et voici le tour de l’Espagne. La panique s’empare des bourses européennes. L’Italie, l’Irlande, la France suivent. Qui arrêtera la tempête ? Les taux obligataires, surtout à court terme, vont tellement monter que les dettes ne seront bientôt plus négociables. L’effet domino va jouer d’autant plus que les institutions financières et les banques européennes sont largement exposées sur ces dettes souveraines ; rien que pour la dette grecque, 31 milliards en Allemagne, 51 milliards en France, à première vue ! Autant d’actifs, dits toxiques, pour demain.

     

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    Dominique Strauss-Kahn tente de convaincre Angela Merkel.....

     

                Voilà pourquoi ils sont quelques-uns à tout faire pour sauver la Grèce. Le président du Conseil européen, Herman van Rompuy, réunit un sommet des pays de la zone euro le 10 mai. Mais n’est-ce pas déjà trop tard ? Et que peut faire ce Conseil ? L’Europe n’est plus qu’un champ de ruines. Les Anglo-saxons, d’ailleurs, s’en amusent et spéculent à fond sur cette ruine. Les nations européennes ne pourront plus que reprendre, autant que faire se peut, la direction de leurs intérêts. La réalité s’imposera. Il n’y aura plus de plans de sauvetage. Les plus clairvoyants envisagent déjà ce que l’on appelle élégamment une restructuration de la dette grecque, autrement dit, une annulation, sinon totale, partielle, c’est-à-dire encore une sortie prochaine de la zone euro… et ensuite ?

     

                La réalité politique, économique et sociale des peuples, trop longtemps niée par les idéologues, explose aujourd’hui à la face des dirigeants. Et cela au moment où une Belgique, elle-même explosée par des idéologies partisanes mortifères, doit prendre la direction de l’Europe. Le chaos, voilà le beau résultat des politique menées toutes ces dernières décennies. Ce à quoi on assiste en France, à tous les niveaux, ne rend que plus éloquente une leçon qu’il faudra bien un jour se décider d’entendre. ■

     

    1 Le numéro 3 de Politique magazine de novembre 2002 avait pour titre de couverture : Crise, année zéro ? et le numéro 55 de septembre 2007 : Finance contre économie ? soit un an avant la crise de 2008.

     

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  • ”Homme et femme il les créa...” : Pour y voir plus clair sur le sujet, Jean-François Mattéi et la théorie du ”genre”....

                                                   Dans la livraiMATTEI.jpgson de La Dizaine de Magistro du 18 juin 2011, Jean-François Mattéi a proposé le texte suivant, qui a le grand mérite d'éclairer rélellement le sujet : on appréciera la concision de bon aloi de cette réflexion, dont, par ailleurs, et ce qui ne gâche rien, l'humour n'est pas exclu...

             Profitons-en pour signaler, puisque l'on parle de Jean-François Mattéi, que nous allons envoyer, incessammment sous peu le PDF de la vingtaine d'extraits que nous avons selectionnés de son Regard vide, Essai sur l'épuisement de la culture européenne.

              Il dit, dans cet Essai, un grand nombre de choses tout à fait essentielles sur la crise qui affecte notre civilisation – et, bien-sûr, pas seulement la France – dans ce qu’elle a de plus profond. Et fait bien comprendre qu'il serait illusoire et vain de tenter une quelconque restauration du Politique, en France, si la Civilisation qui est la nôtre était condamnée à s’éteindre et si ce qu'il a justement nommé la barbarie du monde moderne devait l’emporter pour longtemps....   

               " Dieu créa l’homme à son image ... homme et femme, il les créa " (Gn 1, 27) ; " le jour où Dieu créa l’homme, à la ressemblance de Dieu il le fit, homme et femme il les créa : il les bénit et les appela du nom d’homme le jour où ils furent créés " (Gn 5, 1-2).  

            On ne comprend pas la vague de fond des gender studies américaines, qui monte à l’assaut des rives françaises, si l’on se contente d’y voir un avatar du féminisme. Il s’agit en effet moins de libérer la femme de son oppression biologique que de destituer l’homme de son piédestal ontologique dans un retournement inattendu.

            Le "genre" ne concerne pas en effet l’homme en tant que mâle, sexué selon le système hétérogamétique XY dont la biologie montre la nécessité, mais l’homme en tant qu’humanité, voué à une essence dont l’éthique affirme la dignité. Pour le dire brièvement, la théorie du genre veut en finir avec l’humanisme occidental depuis la Renaissance afin d’abolir toute forme d’universalité. Le diagnostic de Michel Foucault sera ainsi corroboré : l’ "homme" est bien, en Occident, une "invention récente" dont le visage de sable s’efface peu à peu "comme à la limite de la mer".      

            Les travaux sur le genre partent d’un postulat radical : la différence entre l’homme et la femme relève d’un genre social sans rapport avec le genre sexuel, dans la mesure où le comportement humain dépend du seul contexte culturel. S’il y a une différence biologique des sexes, elle n’a aucune incidence anthropologique, encore moins éthique, de sorte que l’hétérosexualité n’est pas une pratique orientée par la nature, mais l’effet d’un déterminisme culturel qui a imposé ses normes oppressives. On s’attaque en conséquence à la différence entre le masculin et le féminin en annulant, avec leur identité propre, leur inclusion dans la catégorie de l’humain. Monique Wittig, la "lesbienne radicale" qui refuse d’être une "femme" et qui prétend ne pas avoir de "vagin", énonce l’impératif catégorique du temps : "il faut détruire politiquement, philosophiquement et symboliquement les catégories d’ "homme" et de "femme" (La pensée straight, p. 13). Et cette destruction s’impose parce qu’ "il n’y pas de sexe", qu’il soit masculin ou féminin, car c’est "l’oppression qui crée le sexe et non l’inverse" (p. 36). Si le genre grammatical n’existait pas, le sexe biologique se réduirait à une différence physique anodine.

            On avance donc, dans un énoncé purement performatif, que les différences entre le féminin et le masculin sont les effets pervers de la construction sociale. Il faut donc déconstruire celle-ci. Mais on ne se demande à aucun moment pourquoi les sociétés humaines ont toujours distingué les hommes et les femmes, ni sur quel fond l’édifice grammatical, culturel et politique prend appui. Comment expliquer que tous les groupes sociaux se soient ordonnés selon les "oppositions binaires et hiérarchiques" de l’hétérosexualité, comme le reconnaît Judith Butler ? Loin de s’inquiéter de cette permanence, la neutralité du genre se contente de dissocier le biologique de l’anthropologique, ou, si l’on préfère, la nature de la culture, afin d’évacuer la fonction tyrannique du sexe.  

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            Cette stratégie de déconstruction ne se réduit pas à la négation de l’hétérosexualité. Les gender studies, au même titre que les queer studies ou les multicultural studies, ont le souci de miner, par un travail de sape inlassable, les formes d’universel dégagées par la pensée européenne. Judith Butler n’hésite pas à soutenir que "le sexe qui n’en est pas", c’est-à-dire le genre, constitue "une critique de la représentation occidentale et de la métaphysique de la substance qui structure l’idée même de sujet" (Trouble dans le genre, p. 73). On se débarrasse, d’un coup de plume, du sexe, de l’homme, de la femme et du sujet pris dans la forme de l’humanité. Ce qui entraîne par une série de contrecoups, la destruction de l’humanisme, imposé aux autres cultures par l’impérialisme occidental, et, plus encore, la destruction de la république, de l’État et de la rationalité. La déconstruction, apportée aux USA par la French Theory avant qu’elle nous revienne comme un boomerang, a pour fin ultime de ruiner le logocentrisme identifié par Derrida à l’eurocentrisme, en d’autres termes à la raison universelle. Elle se fonde pour cela sur la confusion des genres, entre l’homme et la femme, mais aussi entre la réalité et la virtualité. C’est ce que laissait entendre la critique de l’hétérosexualité par Foucault au profit de l’homosexualité qui permettrait de "rouvrir des virtualités relationnelles et affectives" (Dits et Écrits). C’est pour sacrifier à ces virtualités qu’un couple canadien décidait récemment de ne pas révéler aux gens le sexe de leur bébé de quelques mois, prénommé Storm, afin qu’il puisse le choisir librement par la suite.

            On aurait tort alors de regretter que le genre, à défaut du sexe, fasse une entrée remarquée à Sciences Po et dans les programmes des lycées. L’humanité future est désormais en marche vers un monde sans oppression qui, délivré du sexe, sera bon chic bon genre. Quand ce dernier aura définitivement neutralisé les identités et les différences, l’homme nouveau pourra partager le soulagement de Swann : "Dire que j’ai gâché des années de ma vie, que j’ai voulu mourir, que j’ai eu mon plus grand amour, pour une femme qui ne me plaisait pas, qui n’était pas mon genre !"

  • A qui profite le crime ? par François Reloujac

    (Voici l'analyse économique de François Reloujac, publiée dans le numéro de juin de Politique magazine. On a appris hier, en soirée, que Christine Lagrde était nommée Directrice générale du FMI, première femme à occuper ce poste...)

    Le scandale provoqué par Dominique Strauss-Kahn semble avoir donné de nombreuses arrière-pensées à diverses personnalités : 

    Nicolas Sarkozy, Martine Aubry, François Hollande, Marine Le Pen ou Christine Lagarde en France, ou les banquiers et économistes, John Lipsky, Grigori Martchenko, Augustin Carstens, Trevor Manuel, Kemal Dervis ailleurs dans le monde. Il paraît cependant plus important ici d’ouvrir des pistes de réflexion sur les conséquences économiques et politiques, directes et indirectes, de la démission de l’ancien directeur général du FMI. 

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     "...Une semaine à peine après la démission de DSK, Christine Lagarde était la favorite de l’ensemble des gouvernements européens. Ministre français de l’économie et des finances, ayant accompli une grande partie de sa carrière aux États-Unis, cette femme de caractère semblait avoir tous les atouts… sauf celui d’être une économiste !..."

            Force est de reconnaître que l’image de la France en a été ternie. Et même si, comme d’aucuns l’espèrent, c’était une Française qui lui succédait à la tête de cette organisation internationale, il lui faudrait beaucoup d’efforts pour restaurer cette image écornée. En fait, ce scandale pourrait mettre un terme, du moins aujourd’hui dans les esprits et demain dans les faits, au partage des pouvoirs au sein du FMI et de la Banque mondiale entre les États-Unis et l’Europe. Il ne paraît plus invraisemblable que dans un avenir proche l’une des deux organisations soit présidée par un représentant des pays émergents ou que les États-Unis ne revendiquent les deux postes. Cependant, même si les Américains pourraient avoir une telle prétention, il leur faudra convaincre leurs partenaires et tenir compte du rééquilibrage des sources de financement du FMI, réalisé par DSK, et qui a conduit la Chine à en devenir le deuxième contributeur. De plus, les États-Unis ont un deuxième handicap qui est en fait aussi un aiguillon : le jour même où le scandale a éclaté, ils étaient en état virtuel de cessation des paiements. Car c’est aussi en ce milieu du mois de Mai que le déficit américain a dépassé le seuil de 14 290 milliards de dollars fixé par le Congrès comme limite ultime d’endettement à ne pas dépasser. Si le gouvernement Obama n’arrive pas à obtenir du Congrès qu’il accepte de repousser cette limite, il ne pourra plus payer ses fonctionnaires à partir du mois d’août prochain. 

            Et, si le Congrès donne cette autorisation, à qui le gouvernement américain empruntera-t-il à un taux raisonnable ? Les agences de notation commencent en effet à envisager de leur ôter leur fameux « triple A ». Devront-ils se tourner vers le FMI ? Il faut désormais constater que l’institution prête aujourd’hui presque exclusivement aux pays européens qui ont vécu au-delà de leurs moyens depuis des décennies : Grèce, Irlande, Islande, Portugal, Hongrie, Lettonie, Roumanie… Si les États-Unis doivent demain être concurrents de l’Europe pour aller chercher des fonds à des taux acceptables, mieux vaut que ce ne soit pas un Européen qui soit à la tête du FMI. Et si c’en est un, mieux vaut qu’il soit en situation de faiblesse relative ou que cet Européen soit très américanisé. Une semaine à peine après la démission de DSK, Christine Lagarde était la favorite de l’ensemble des gouvernements européens. Ministre français de l’économie et des finances, ayant accompli une grande partie de sa carrière aux États-Unis, cette femme de caractère semblait avoir tous les atouts… sauf celui d’être une économiste ! Il faut surtout espérer maintenant, pour le FMI bien sûr, mais pour la France surtout, que le procureur général de la Cour de justice de la République ne sera pas suivi et que cette brillante avocate internationale ne sera pas mise en examen pour « abus d’autorité » dans l’affaire Tapie. De même, il faut espérer qu’elle ne sera pas mise en examen pour « prise illégale d’intérêts » dans l’affaire Applicatour… La crédibilité de la France y aurait plus à perdre que celle du FMI.

     Les solutions keynésiennes de DSK

            Mais il y a un autre aspect de la question. Dans un monde où le mot « libéralisme » sert souvent d’étendard et où les penseurs économiques poussent à des politiques monétaristes, Dominique Strauss-Kahn faisait entendre une voix différente et avait, depuis le début de la crise, poussé à des solutions keynésiennes. Faisant voler en éclat le consensus monétariste, il a poussé les États à adopter des plans de relance massifs qui ont permis de gagner du temps à défaut de constituer de véritables solutions. Ces plans de relance, le Directeur général du FMI a pesé de tout son poids pour qu’ils soient généralisés dans tous les pays du monde et qu’ils soient concomitants. En effet, la théorie keynésienne s’inscrit dans un espace économique fermé… qu’en bon « mondialiste », DSK étend aux limites de la planète ! Hélas, ces plans de relance massifs ont, faut-il le rappeler, accru de façon considérable l’endettement des États. Peu à peu on entend dire que, comme pour Athènes, « retarder sans cesse le jour où l’on reconnaîtra ces difficultés n’améliorera en rien la situation de la Grèce : au contraire, cela ne fera que rendre plus douloureuse encore l’inéluctable restructuration de la dette » (Martin Wolf, Le Monde,17 mai 2011). Plus la bulle des dettes d’État sera grosse, plus son explosion sera douloureuse. Car nulle autre voie ne semble ouverte, ni celle de l’inflation interdite par la Banque centrale européenne de Jean-Claude Trichet, ni la relance géographiquement circonscrite à cause du dogme du libre échange. Or, pas plus l’Europe que les États-Unis, nul ne peut plus « se permettre de continuer à jeter l’argent par les fenêtres en priant pour que la croissance revienne miraculeusement » (D. Roubini et S. Mihm, Les Échos, 23 mai 2011).

     En cause, la survie de l’union monétaire européenne

            D’un point de vue plus politique et, en revenant uniquement sur le terrain européen, Dominique Strauss-Kahn est celui qui avait réussi à convaincre les Allemands de soutenir la Grèce en échange d’un plan d’austérité drastique. Si les conséquences du plan d’austérité sont de plus en plus mal supportées par les Grecs, le Premier ministre athénien lui doit cependant sa survie actuelle. 

     

    christine lagarde,fmi,dsk

     

            D’ailleurs, depuis le départ du patron du FMI, les dissensions qui existaient depuis longtemps parmi les ministres grecs, s’étalent désormais au grand jour. Du côté de Berlin, le départ de DSK donne de nouvelles forces à tous ceux qui sont hostiles à un effort supplémentaire de solidarité. « L’ Allemagne semble désormais convaincue – comme le sont depuis longtemps les marchés – de l’inéluctabilité d’un rééchelonnement ordonné et préventif de la dette grecque », confiait aux Échos Laurent Cohen-Tanugi. Or, au-delà de la situation grecque, ce qui est en cause c’est bien la survie même de l’union monétaire européenne dans sa forme actuelle. Dans sa réflexion du 18 mai, l’avocat de l’euro poursuivait : « L’idée d’un découplage durable entre les économies les plus solides de la zone – Allemagne, France, Autriche, Pays-Bas – et celles de sa périphérie sud s’installe peu à peu, conduisant soit à l’implosion de l’Union économique et monétaire, soit à la mise sous tutelle financière de fait des secondes par les premières, politiquement inacceptable et contraire à l’esprit européen ». Quel que soit le successeur de Dominique Strauss-Kahn, il ne faudra rien en attendre sur ce point. 

            Aujourd’hui, la Chine est le deuxième pourvoyeur de fonds du FMI ; or, comme tous les Asiatiques, ils pensent que le FMI en a trop fait pour les Européens. Surtout, ils constatent qu’il a été beaucoup plus sévère avec eux lorsqu’il était venu à leur secours à la fin des années 1990.

            Lorsque, par référendum, les Islandais ont refusé de venir au secours des créanciers britanniques et hollandais de leurs trois banques nationales – qui avaient voulu se faire aussi grosses que le bœuf – malgré la pression inouïe des spéculateurs, de la Commission européenne et du FMI, les gouvernements du Vieux Continent ont été frappés de stupeur. Pour la première fois, un peuple entier se rebellait contre la politique d’austérité imposée par un gouvernement qui avait cédé à la pression extérieure alors qu’il n’avait pas été élu pour cela. Dans le même registre, la Grèce cristallise toutes les solutions imaginables pour sortir de la crise et la pression s’y fait de plus en plus forte pour que l’État cède des biens publics. Mais qui a aujourd’hui les moyens d’acheter l’aéroport d’Athènes après avoir acheté le port du Pirée si ce n’est la Chine ! Certains vont même jusqu’à imaginer que, comme l’Église orthodoxe n’est pas séparée de l’État, le gouvernement grec pourrait envisager de céder les biens de l’Église ; ils sont évalués à plus de 700 milliards d’euros. Après avoir poussé les populations à emprunter « pour soutenir la croissance », après avoir financé les investissements publics à crédit, les hommes politiques qui ne respectent plus rien, en dehors de la pêche aux voix, sont acculés à imaginer porter atteinte à ce qui constitue l’âme même des peuples qu’ils sont censés servir. Il y a longtemps qu’ils avaient oublié que leur mission principale, leur raison d’être, est la défense du bien public ; ils ne cherchent plus désormais qu’à trouver les moyens de financer leurs prébendes. ■

  • Hé oh, la gauche !

     

    par Hilaire de Crémiers

     

    157e493dd19d0d2ee135205f081739f9_Hilaire.jpgQuand Macron annonce qu’il veut sortir du vieux clivage gauche-droite, il ne fait que répéter une très vieille antienne que Bayrou a reprise en son temps. Mais alors il faut aller jusqu’au bout… et renier un régime qui ne vit que de la lutte des partis. Chiche !

    La France attend l’homme fort. Les sondages, d’ailleurs, confirment, chez les Français, le dégoût du régime et l’attente d’une solution énergique ; pour certains, elle est même militaire, voire monarchique : un chef, un seul, en qui il soit possible d’avoir confiance et qui remette de l’ordre. Cette aspiration est aussi simple qu’essentielle. Il n’est pas besoin d’être grand clerc ni expert en matières politiques pour comprendre cet appel que lance l’âme française aujourd’hui, comme elle le fit déjà dans le passé, de siècle en siècle, chaque fois que le pays traversait une période d’anarchie, subissait l’invasion, allait de désastre en désastre et ne se reconnaissait pas dans de faux chefs qui profitaient de la situation pour s’emparer du pouvoir et pour en abuser. Oui, il est rassurant de penser que 85 % des Français ne font plus confiance aux hommes politiques, aux partis, aux syndicats, aux médias, en un mot au système ; ce mot que tout le monde comprend et emploie tant il est significatif. Nous n’avons plus d’État, nous n’avons qu’un système.

    La république oligarchique

    Certes, ces Français qui protestent en leur for intérieur, ne sont jamais entendus ; cependant, ce sont eux qui font marcher la France effectivement, qui font tourner ses usines, ses commerces, son agriculture, qui livrent des produits remarquables à l’exportation dont le gouvernement peut encore se flatter – avions, navires, sous-marins de haute performance –, qui lui donnent une armée, une gendarmerie, une police qui, en dépit des méfiances et des inepties du régime, effectuent leur service au mieux de leur possibilité. Un général Soubelet qui se fait démettre de ses fonctions, est un cas typique. Dans aucune instance officielle ces Français, en tant que tels, ne sont représentés ou ne peuvent faire valoir leurs justes demandes. Politiquement ils n’existent pas. Partis et syndicats se sont emparés de tous les leviers de pouvoir, de la représentation et des organes de décision.

    On fait croire au peuple que l’élection est un choix ; c’est évidemment archi-faux ; c’est au mieux un exutoire, on dirait maintenant un défouloir. Et, en ce moment, en Europe comme en Amérique, en Autriche dernièrement, irrités par l’incurie de leurs gouvernants, les peuples s’essayent à récuser les élites officielles. Mais ces réactions sont toujours précaires et nul ne sait où elles mènent vraiment. Le jeu électoral, surtout en France, est tel qu’il n’est en fin de compte réservé qu’aux seuls dignitaires du régime ou à ceux qui y font allégeance. Le Conseil constitutionnel, d’ailleurs, contrairement aux principes démocratiques, vient de valider la réforme électorale qui privilégie les candidats du système. Il est impossible d’en sortir. Des coups de boutoir sans doute et tant mieux, mais, comme l’expérience l’a prouvé à toutes les générations, le régime finit toujours par l’emporter. C’est la seule chose qu’il sache fort bien faire : se défendre.

    Quel est donc ce régime qui permet à un Hollande de devenir chef de l’État ? Voilà la vraie question qu’il faut se poser. Quelle est cette moulinette qui transforme les opinions profondes des Français en bouillies électorales dont se nourrissent indéfiniment les partis du système ? Et qui donnent au final une représentation faussée ? Il y a au cœur du problème français une question d’institutions. Chacun le sait fort bien mais personne ne veut le voir ni le dire.

    Cependant, le rejet en est si total que les médias en dissimulent la violence. On feint de croire à l’importance de révoltes gauchardes, comme Nuit debout, qui s’essayent à récupérer l’insupportable malaise français, alors que la Manif pour tous, les Veilleurs, toutes les vraies révoltes du pays réel ont été constamment occultées et vilipendées. Alain Finkielkraut a appris à ses dépens la sordide réalité de cette chienlit. On met en scène les moindres revendications catégorielles – en ce moment les intermittents du spectacle, les cheminots – sans même attacher le moindre regard aux usagers des transports qui pâtissent tous les jours ni à ceux qui triment à longueur de journées pour tenter de survivre.

    La CGT, entre autres, ne représente plus rien, mais c’est elle qui fait la loi. Elle publie une affiche qui insulte les forces de l’ordre ; le gouvernement ne proteste même pas. L’Unef n’est qu’une misérable officine où se concoctent les carrières des futurs élus de la gauche qui y apprennent tout à la fois et « le baratin » à servir pour réussir dans le système et la manière de rafler les mises, y compris financières ; telle était déjà l’Unef dans les années 60 qui a donné les apparatchiks actuels du parti socialiste, telle elle est encore aujourd’hui. Toute cette engeance qui ne vit que de la société et qui s’est installée au chaud dans de belles places garanties et bien payées, s’adonne au jeu de la révolution permanente, mais qui ne va jamais jusqu’à les remettre en cause eux-mêmes… évidemment ! Il n’est pire conservatisme que celui des stipendiés de la révolution totalitaire !

    La fin du régime ?

    L’État n’est plus qu’une administration sans âme dont la lourdeur pèse d’un poids accablant sur le pays : 57 % de la richesse produite est accaparée par un monstre qui ne remplit plus les hautes fonctions régaliennes, mais qui se mêle de tout avec des ministères et des secrétariats d’État aux appellations grotesques. Plus aucune autorité ne se dégage des institutions. Le chef de l’État n’est plus rien qu’un sujet de dérision et qui s’imagine encore être quelqu’un ; quand il s’exprime en public, comme dans sa dernière « prestation » télévisée, il est toujours pitoyable, incapable de s’élever à la hauteur de son rang ; on dirait d’un maquignon content de lui et qui discute du bout de gras. Avec toutes les dernières aventures législatives où l’incohérence le dispute à la pitrerie, de la déchéance de nationalité à la loi El Khomri, il devient de plus en plus légitime de se demander à quoi servent les parlementaires quand on sait comment sont fabriquées et votées les lois ?

    Chacun ne pense plus qu’à son élection ou sa réélection. Stéphane Le Foll lance au service de son chef de parti son dérisoire « Hé oh la gauche ! ». Valls répand la manne de l’État sur la jeunesse pour acquérir ses voix, RSA et bourses à volonté, puis il saupoudrera de subventions et d’augmentations les catégories que la gauche voudrait récupérer. Déjà on annonce, sur un seul chiffre mensuel, la baisse du chômage. On parle de libéraliser le cannabis. Macron fonde En marche pour se mettre à part et se définir comme au-dessus des partis.

    Dans cette atmosphère délétère, on oublie l’état d’urgence qui sera pourtant prolongé ; les forces de l’ordre sont harcelées, moquées, épuisées. Les risques n’ont pas diminué : les attentats, les vagues migratoires que nul au niveau de l’État n’envisage vraiment dans leur ampleur, la crise économique et sociale, peut-être bientôt financière et monétaire. Qui sait ce qui restera de l’Europe dans un mois, dans deux mois ? L’Angleterre ? La Grèce ? L’Allemagne elle-même ? Une question se pose, de plus en plus évidente : la France peut-elle survivre avec un tel régime ? 

  • Eadem semper ! Par Hilaire de Crémiers

     

    H D C - Copie.jpgToujours les mêmes choses… jusqu’à la lassitude. La superstructure politicienne empêche toute appréhension de l’intérêt national. Les Français, qui en souffrent, se reconnaissent de moins en moins dans le régime. Avec raison. 

    Les partis se mettent en ordre de marche. Comme des armées. Pour la bataille qui se prépare, la grande, la présidentielle de 2017, comme si c’était l’ultime, le tout ou le rien. Une fois de plus ! Ce mois de juin les voit en pleine effervescence, avant la halte de l’été, en vue des universités de la rentrée, préliminaires des prochains affrontements de la fin de l’année, les élections régionales qui seront déterminantes pour les stratégies à venir, tant à l’intérieur mêmes des partis qu’entre les partis eux-mêmes. Les candidats à la candidature à la charge suprême se profilent, se projettent sur scène, s’investissent eux-mêmes de leur mission. Certains pensent déjà au tour d’après et se mettent en lice pour 2022. Les principaux protagonistes et finalistes sont connus, archi-connus ; c’est du répétitif et, pourtant, ils jouent leur va-tout : Marine Le Pen, Alain Juppé, Nicolas Sarkozy, Hollande... Dès maintenant, Fillon ne compte plus. Hollande y croit de plus en plus, à la condition – qu’il prépare minutieusement – d’être le seul candidat à gauche : soit jouant le match au deuxième tour – et, donc, dans son esprit le gagnant – contre Marine Le Pen qui se veut, elle, la seule, vraie et totale opposante ; soit – autre scénario qui plairait à l’actuel chef de l’État – rejouant le match, en retour, à cinq ans d’intervalle, contre son adversaire personnel, l’ancien chef de l’État, Sarkozy qui, lui, rumine  sa revanche qu’il espère encore prendre, mais le pourra-t-il ? Président contre président, à celui qui sera le plus républicain ! 

    Comment ça fonctionne 

    Juppé qui, quant à lui, se veut à part – et donc dans son esprit au-dessus –, se pense gagnant à tout coup, ce qui le confirme dans sa superbe assurance. Chacun évalue ses chances selon sa martingale électorale. Fabuleux, non ? Enthousiasmant, non ? Redites et vieux trucs, direz-vous ? Vous aurez raison : les discours sont toujours calibrés aux mêmes normes, union de la gauche républicaine pour le haut motif qu’il s’agit de gagner, union de la droite républicaine… et du centre non moins républicain – ça fait si bien ! –, union nationale dans le ni gauche, ni droite, mais, néanmoins, pour le salut de la République qui, elle, ne vit que de l’opposition gauche-droite, allez comprendre ! 

    Désabusés des « valeurs de la république » 

    Depuis déjà un certain temps des enquêtes révèlent que les Français ne croient plus, mais plus du tout, aux hommes politiques – et sous le nom d’hommes, comme disait l’autre, j’embrasse aussi les femmes. 80 % ne leur font plus confiance ; aux partis politiques, non plus ; aux syndicats et aux syndicalistes, non plus. Plus intéressant encore : 60 % des Français se disent désabusés des incantations républicaines, du mot « République » invoqué à chaque instant et de ce qu’on leur présente comme « les valeurs » de la République. Il y a vraiment de quoi ! Ces Français-là ne sont donc pas représentés et sont vraisemblablement gouvernés au rebours de leurs idées. Comment est-ce possible ? C’est ainsi ! Et depuis très longtemps ! Quand vient le temps de voter, les peuples, les pauvres peuples livrés aux partis tout-puissants et tous complices, votent selon ce qu’on leur dit de voter. Un pays catholique, comme l’Irlande vient de voter ainsi pour le prétendu mariage unisexe. Les partis unanimes et la propagande officielle, nationale et internationale, ont fonctionné à sens unique. Et l’Église catholique qui s’aveugle toujours sur les questions politiques, n’a pas été à la hauteur. Un lobby arrive à faire passer les lois qui lui conviennent ; il n’est pas le seul, d’ailleurs. C’est ainsi que ça marche. C’est ce qu’on appelle « la démocratie » qui n’a, au fond, rien de démocratique quand on sait comment elle fonctionne au vrai, et qui fait le malheur spirituel, moral, politique, social du peuple manipulé. Nous sommes peu à le comprendre et surtout à le dire. Et, pourtant, telle est la vérité. Et heureusement, aujourd’hui, il est plus de gens qu’on ne le pense, à le pressentir. 

    Qu’on y songe seulement : 66 000 militants socialistes ont voté pour leurs motions A,B,C,D sur les 135 000 qui seraient à jour de leur cotisation, soit à peine 54 %. 60 % de ces 54 % ont voté pour la motion A qui permet à Jean-Christophe Cambadélis de garder son poste de premier secrétaire et de diriger le congrès du parti à Poitiers, soit à peine 40 000 personnes – et quelles sont-elles ? Or ce vote détermine la ligne du parti, qui détermine la ligne du président de la République qui se veut le candidat du parti socialiste ! C’est ça, la politique ! La politique française ! La France est dirigée par une petite bande de militants – de quelle valeur au juste ? – qui servent de faire-valoir à quelques centaines de cadres qui, eux, ne sont que des rusés et qui s’ouvrent ainsi une carrière politique rémunérée de haut vol. Tel est le régime. Du côté dit maintenant des Républicains, c’est du pareil au même. Les militants servent le parti dont se servent les dirigeants. Pour eux ! Il faut bien gagner, n’est-ce pas ? L’appétit du pouvoir est la seule véritable justification d’un tel fonctionnement. Changer les noms, faire des programmes électoraux, relèvent d’une communication qui est chargée d’attirer le chaland, l’électeur. Ça ne se situe pas très haut. Et la France n’est plus qu’un procédé de la rhétorique politicienne. Panthéoniser fait partie de la panoplie du Président qui exalte ainsi « les valeurs » dont il attend le retour électoral. Ah, les discours ! Ils s’imaginent ainsi être eux-mêmes de grands hommes et ils attendent les hommages de la patrie reconnaissante. 

    La réalité les rattrape 

    Sortir du marigot où ils sont plongés toute la journée, voilà leur rêve ! Pilleurs d’État (éditions Max Milo), tel est le titre du dernier ouvrage de Philippe Pascot, ancien ami de Manuel Valls : pas de titre plus exact pour faire le tour de notre système politique. D’autant plus que l’homme est parfaitement correct et ne tombe jamais dans le trop facile « tous pourris ». Non, mais il les peint tels qu’ils sont ; le portrait de Manuel Valls dit tout. 

    Comment, dans ces conditions, s’occuper vraiment de la France ? Ils ne voient même pas le gouffre qui s’ouvre sous leurs pieds ou, pour reprendre l’image d’Agnès Verdier-Molinié, le mur sur lequel ils se précipitent. On va dans le mur (éditions Albin Michel) détaille la situation aberrante de notre pauvre pays surchargé de taxes, d’impôts, de superstructures, de lois et de règlements, de régimes différents et surtout de dettes telles qu’elles empêchent tout avenir. 

    Et cet État incapable, livré à des partis sectaires, prétend s’occuper de l’éducation des enfants, sans doute pour mieux les déstructurer, des familles pour mieux les détruire , des patrimoines pour mieux les engloutir,  d’économie et de dialogue social pour mieux les emberlificoter, les idéologiser et en écraser les entreprises, de santé pour mieux l’arracher aux médecins et aux familles, de décentralisation pour mieux prendre en main les territoires et les épuiser. Même les lois qui s’avèrent nécessaires sur le fond, sont polluées par le préjugé partisan. 

    Tout souffre de cette sottise idéologique et surtout les grandes fonctions de l’État : la justice, la défense, la sécurité intérieure et les finances nationales. Faudra-t-il attendre un grave incident sur les comptes publics ou sur notre système de défense et de sécurité – peut-être les deux à la fois – pour que les Français réalisent soudain l’effroyable gabegie et la désastreuse impéritie de leur régime politique ? 

  • Philippe de Villiers au Figaro : L'Amérique veut abattre Poutine pour installer son modèle de société en Russie

    philippe-de-villiers-rencontre-poutine_0.jpg

    Les propos de Philippe de Villiers au long de cet intéressant entretien dans le Figaro* concordent avec nos propres positions en matière de politique étrangère ou de de politique française. Il élargit sa réflexion en posant la question de la survie de notre civilisation. D'accord ou pas d'accord, on lira ces lignes comme une contribution à un débat essentiel  ♦   Lafautearousseau    

    LE FIGARO. - Alors que le Puy du Fou va être décliné en Russie, Vladimir Poutine vous a accordé jeudi un long tête-à-tête au Palais des tsars. Quel était l’objet de l'entretien ?

    Philippe de VILLIERS - L’objet de notre encontre était la signature du protocole portant sur la création du Puy du Fou Tsargrad en Russie. Le choix de la Russie s'est orienté vers le Puy du Fou pour mettre en valeur le patrimoine historique de la Russie et l'âme russe. Vladimir Poutine souhaitait, en me recevant, souligner le grand intérêt qu’il porte à cette déclinaison de plusieurs parcs historiques en Russie. J'ai été frappé par le charisme de l‘homme d’Etat, sa hauteur de vue, son attention pour les échanges culturels. J’ai été très impressionné par sa détermination à garder la Russie ouverte au reste du monde. C’est sans doute pour cette raison que cet entretien a pris, à ses yeux, une valeur synodique. Il m'a répété que la Russie était accueillante aux investisseurs étrangers et français. Pour le Puy du Fou, le projet russe est d'une grande importance car il va agréger à cette œuvre commune les plus grands artistes russes. Tout Ie monde en France connaît le Bolchoï ou le théâtre Mariinsky. Nous allons avoir les plus grands pianistes, danseurs, architectes, de ce pays de haute culture et de grande sensibilité.

    Avez-vous parlé de la guerre en Ukraine et des sanctions européennes qui frappent la Russie ?

    J’ai dit à Vladimir Poutine que le Puy du Fou venait poser devant lui un acte de paix. En effet, ai-je ajouté, les sanctions sont des actes de guerre, Ies coopérations sont des actes de paix. Tous les esprits pacifiques qui aiment l'Europe et la Russie veulent secrètement sortir de l'engrenage car ils savent que les sanctions sont des humiliations qui provoquent les peuples qui ont encore une fierté. C'est le cas de la Russie. Poutine a répondu : « J’accueille votre arrivée en Russie comme un signe de la nécessaire désescalade. »  J'ai souligné auprès de lui que, selon moi, l'avenir de l'Europe ne doit pas s’écrire sur le continent américain, mais sur le continent européen. L'Europe ne peut pas se faire sans la Russie' Il a cité l’expression du général de Gaulle « l'Europe de l'Atlantique à l’Oural », une Europe de forme confédérale qui respecte les souverainetés.

    Vous avez déclaré sur Europe 1 : « Ce qui manque à la France, c’est un Vladimir Poutine ». Qu’entendiez-vous par là ?

    Je n’ai fait que répéter ce que j'entends tous les jours autour de moi en France dans les milieux populaires, cette phrase qui revient dans la bouche des gens de bon sens : « Il faudrait aujourd’hui en France un gars comme Poutine à la place de Hollande ! » C'est-à-dire un chef d’Etat patriote, visionnaire et qui prend des décisions.

    Quel regard portez-vous sur sa conception de la démocratie et des droits de l'homme ?

    Vladimir Poutine est un chef d'État élu avec 63% des suffrages, de manière démocratique. Et j'ai pu mesurer son immense popularité, que ce soit à Moscou ou en Crimée, durant les jours passés là-bas. Quant à la question des droits de l’homme, Vladimir Poutine a exprimé des réticences devant les excentricités des Femen et la propagande de l'homosexualité. C'est la raison pour laquelle tous les chefs d'État occidentaux ont refusé d'aller aux Jeux olympiques de Sotchi. C’était absurde ! Le président Poutine ne veut pas donner la Russie aux Femen et à l’OTAN, on le comprend ! L'Amérique ne se comporte pas d'une manière raisonnable. Elle veut « otaniser » le monde entier et met le feu partout ! Ce qu'elle désire, ce n'est pas seulement l’Ukraine dans l’OTAN, c'est aussi abattre Poutine pour prendre la Rassie et y installer son idéologie multiculturaliste, mondialiste et consumériste. Elle veut imposer son modèle de société, en particulier aux pays enracinés qui lui résistent.

    Que répondez-vous à ceux qui estiment que vous jouez le jeu de propagande russe ?

    Une députée socialiste a dit que j'agissais contre l’Europe. Je lui réponds que j'agis pour la paix et l’amitié franco-russe mais que, hélas, l’Europe aujourd’hui n'agit pas pour elle-même, mais pour la politique américaine, sous l’impulsion de José Manuel  Barroso, Herman Van Rompuy et François Hollande. L'Europe est devenue la cinquante et unième étoile du drapeau américain. J'accuse l'Amérique de chercher la guerre partout dans le monde parce qu’elle y voit la seule solution d'écluser sa dette monstrueuse due au mondialisme de ses dirigeants.

    Konstantin Malofeev, votre partenaire dans la création des déclinaisons russes du Puy du Fou, est visé par des sanctions de l'Union européenne, notamment parce que Kiev le considère comme le banquier de la rébellion séparatiste qui a pris le Pouvoir à Donetsk. 

    Je connais Konstantin Malofeev depuis pusieurs années. II est devenu pour moi un ami. J'ai une totale confiance en lui et je sais parfaitement quel genre d'homme il est. C’est un chef d'entreprise de haute réputation en Russie et qui consacre aujourd’hui sa fortune à des œuvres humanitaires et caritatives. J'ai visité sa fondation et ses écoles. Certains partis, néonazis ukrainiens qui, aujourd'hui,  mènent la danse, l’accusent sans aucun élément de preuve de financer la rébellion prorusse à Donetsk. C'est absolument faux. Konstantin Malofeev dépense son argent à créer une chaine humanitaire en Russie pour distribuer des médicaments et préparer des hôpitaux de campagne pour les nombreux Russes réfugiés qui ont fui l’Ukraine. C'est cet acte de solidarité que les dirigeants européens appellent soutien aux séparatistes. Konstantin est très connu en Russie pour sa générosité en faveur des familles réfugiées, mais aussi des enfants orphelins. On lui reproche aussi d'aimer les tsars et de préférer Nicolas II à Staline. Décidément, il y a encore des nostalgiques de la terreur soviétique !

    Vous êtes officiellement retiré de la vie politique et vous vous consacrez à l'écriture de votre prochain livre sur Jeanne d'Arc. Vos propos sont néanmoins très politiques. La tentation du retour vous titille-t-elle ?

    Tout ce que je vous dis relève de la survie de notre civilisation. II n'y a pas besoin pour mener ce combat d'aller quémander un picotin électoral. Ma notoriété me permet de dire ce que j'ai le devoir de 'dire. Mais la politique active aujourd’hui me donne la nausée comme à beaucoup de Français. Le milieu politique, qui a perdu le goût et le sens des idées, le goût et le sens de la France, est devenu un cloaque irrespirable. C'est un combat de petits coqs sur un tas de fumier. Je n'ai pas envie de retourner dans cette basse-cour. Laissons les coqs chanter. Vive l'amitié franco-russe ! 

    * Le Figaro, 18 août 2014 - Propos recueillis par Alexandre DEVECCHIO

  • Retour sur la mort du Maire de Signes. D'accord avec... Christian Vanneste : ”La mort d'un Maire... ou celle de la confi

    Ce n'est pas la première fois que nous relayons un article du toujours très intéressant blog de Christian Vanneste (http://www.christianvanneste.fr/), l'un de nos "amis" sur facebook, qui intervient sur notre page à chaque fois qu'il le souhaite : par exemple, le samedi où les portes de Benjamin Griveaux ont été enfoncées, à l'aide d'un gros engin de chantier, très bizarrement laissé sur place, Christian Vanneste avait publié un commentaire sur notre page pour exprimer son grand étonnement devant une telle négligence; la question fut d'ailleurs posée par d'autres : un tel "oubli" était-il vraiment... un "oubli" ?

     

    La mort du Maire de Signes, dans le Var, Jean-Mathieu Michel, a fait passer dans la moiteur de l’été, l’onde émotionnelle dont nos médias sont friands. Dans le village, la douleur était sincère car l’élu était connu et apprécié, depuis son élection en 1983. En s’éloignant, le sentiment a fait place à la posture. Le mandat de maire a particulièrement été encensé. Le Président du Sénat était présent aux funérailles. Le Président de la République, pourtant en vacances à proximité, n’avait pas fait le déplacement, mais promettait dans un message une réponse ferme aux incivilités. « Ferme » et « incivilités » ? Un robot n’aurait su mieux dire… Quant à Lecornu, le petit arriviste devenu ministre en trahissant la famille politique qui lui avait permis d’entamer sa carrière, il présente un Projet de Loi visant à « mieux sécuriser le parcours des élus et des maires ». On se doute que chez un carriériste, l’idée de la sécurité du parcours est préoccupante.

    La mort du Maire de Signes, dans le Var, Jean-Mathieu Michel, a fait passer dans la moiteur de l’été, l’onde émotionnelle dont nos médias sont friands. Dans le village, la douleur était sincère car l’élu était connu et apprécié, depuis son élection en 1983. En s’éloignant, le sentiment a fait place à la posture. Le mandat de maire a particulièrement été encensé. Le Président du Sénat était présent aux funérailles. Le Président de la République, pourtant en vacances à proximité, n’avait pas fait le déplacement, mais promettait dans un message une réponse ferme aux incivilités. « Ferme » et « incivilités » ? Un robot n’aurait su mieux dire… Quant à Lecornu, le petit arriviste devenu ministre en trahissant la famille politique qui lui avait permis d’entamer sa carrière, il présente un Projet de Loi visant à « mieux sécuriser le parcours des élus et des maires ». On se doute que chez un carriériste, l’idée de la sécurité du parcours est préoccupante.

    L’euphémisme du mot « incivilités » trahit l’inconsistance de la pensée politique qui règne en haut de l’Etat. La réduction du drame survenu dans la petite commune varoise à la question du respect dû aux élus ne mesure pas l’ampleur du problème. Le conducteur qui a causé la mort n’a manifestement pas volontairement renversé Monsieur Michel, et assure même ignorer qu’il s’agissait du Maire. Il a été laissé en liberté sous contrôle judiciaire. Certains souhaitaient une incarcération en raison de l’émotion provoquée et de la personnalité de la victime. D’autres soulignent la dégradation du statut des maires. Les agressions à l’encontre des élus ont augmenté de 9% l’année dernière. Une fois de plus, un événement crée un tourbillon de réactions centré sur le contexte des faits et partant ensuite dans toutes les directions : justice expéditive, loi qui va résoudre la difficulté, appel à la restauration du civisme, pensées et paroles en vue des prochaines municipales.

    L’affaire est beaucoup plus grave, car elle dépasse la question des élus, et celle du civisme. Elle traduit sans doute l’effacement des conditions mêmes d’une démocratie libérale. Celle-ci repose sur trois piliers : en bas, la responsabilité des membres de la Cité, pas seulement en tant que citoyens, mais aussi comme acteurs privés ; en haut, l’autorité légitime de ceux qui détiennent du pouvoir ; entre eux, la confiance. 179 000 délits de fuite ont été constatés sur les routes françaises en 2017. C’est l’infraction qui y est la plus répandue (29%) et en constante augmentation depuis le début du siècle. Il y a là un refus de répondre de ses actes, d’être responsable. C’est sans doute l’élément le plus significatif du drame de Signes. Un maçon qui na jamais eu affaire à la police entend se débarrasser sans frais, de gravats et va les déposer, ni vu, ni connu, sur une décharge sauvage. Une personne, qu’il dit ne pas avoir identifiée, le surprend, le menace de poursuites et donc d’une amende. Lorsque le Maire lui demande d’attendre la police municipale, il veut partir, et effectue la manoeuvre mortelle. L’élu n’était pas seul et ce sont les témoins qui l’accompagnaient qui ont accrédité ces faits. Petits calculs, impulsivité et refus d’être mis devant ses responsabilités : cet homme de 23 ans est-il un adulte responsable capable d’être un citoyen ? Evidemment, non ! Mais « l’éducation » qui est diffusée aujourd’hui par de multiples canaux, les modèles sociaux qui sont proposés sont-il de nature à former des personnes responsables, des citoyens « vertueux » comme Montesquieu pensait qu’ils étaient nécessaires à l’instauration d’une République ? Le nomadisme familial et professionnel est facilité sinon encouragé. L’engagement dans le mariage ou devant la naissance, le respect de la déontologie professionnelle, le service du pays paraissent de vieilles lunes dont les partisans doivent être considérés avec compassion, puisque c’est la capacité de refaire sa vie, le droit de la femme d’avorter, la roublardise en affaires, la volonté de s’expatrier qui sont aujourd’hui les valeurs de l’individu-roi. La transgression est regardée avec envie et admiration par le microcosme médiatique. Jetez par-dessus bord vie matrimoniale et éthique du métier, et toutes les espérances vous sont offertes…. On se contentera de temps à autre de « sortir » un héros, si possible victime ou marginal, pour compenser.

    Les « modèles » devraient notamment être fournis par ceux qui détiennent du pouvoir, les élus, les dépositaires d’une autorité administrative ou judiciaire, les chefs d’entreprise. Or, il n’y a pas de jour sans qu’une information vienne insinuer un doute sur la légitimité morale de ceux qui devraient être des modèles. La chute orchestrée de François Fillon, sans proportion avec les faits, devait entraîner une grande lessive politique. La présence au ministère de l’Intérieur de Castaner, celle de Richard Ferrand au perchoir de l’Assemblée Nationale éveillent le doute. Ces socialistes sauvés des eaux par le camarade « Macron » doivent-ils leur étonnante promotion à autre chose que l’immensité de la dette envers leur bienfaiteur ? Ce puissant protecteur devant qui tous les pouvoirs se couchent, de l’Assemblée aux salles de rédaction en passant par les palais de justice, est-il lui-même respectable ? Il faut écouter Montebourg, Marleix, et Frédéric Pierucci, cet ancien dirigeant d’Alstom, emprisonné aux Etats-Unis, pour être atterré par le silence des médias sur la responsabilité de celui qui est devenu président de la République dans le dépeçage d’Alstom, la vente de l’entreprise à GE, puis la cession discrète des trois entités créées pour maintenir le regard de l’Etat français, notamment sur le nucléaire, sur les turbines qui équipent nos sous-marins et nos centrales ! Montebourg emploie le mot de trahison à l’encontre de M. Patrick Kron, ce polytechnicien qui aurait préféré son sauvetage personnel plus un parachute doré, à l’intérêt du pays, et est néanmoins décoré de la Légion d’honneur…. comme Elton Jones. Aurait-il dû prononcer un autre nom ?

    Alain Peyrefitte faisait de la confiance la clef des sociétés libérales. Montesquieu voyait dans la crainte celle du despotisme. Lorsque Macron et Castaner parlent de réponses fermes  à tous propos on commence à voir de quel côté la France bascule.

  • Le « décolonialisme », une stratégie hégémonique : l'appel de 80 intellectuels.

    Source : https://www.lepoint.fr/

    Ils sont philosophes, historiens, professeurs… Ils dénoncent des mouvances qui, sous couvert de lutte pour l'émancipation, réactivent l'idée de « race ».

    C'est au rythme de plusieurs événements universitaires et culturels par mois que se multiplient les initiatives militantes portées par le mouvement « décolonial » et ses relais associatifs (1). Ces différents groupes sont accueillis dans les plus prestigieux établissements universitaires (2), salles de spectacle et musées (3).

    Ainsi en est-il, par exemple, du séminaire « Genre, nation et laïcité » accueilli par la Maison des sciences de l'homme début octobre, dont la présentation regorge de références racialistes : « colonialité du genre », « féminisme blanc », « racisation », « pouvoir racial genré » (comprendre : le pouvoir exercé par les « Blancs », de manière systématiquement et volontairement préjudiciable aux individus qu'ils appellent « racisés »).

    Or, tout en se présentant comme progressistes (antiracistes, décolonisateurs, féministes…), ces mouvances se livrent depuis plusieurs années à un détournement des combats pour l'émancipation individuelle et la liberté, au profit d'objectifs qui leur sont opposés et qui attaquent frontalement l'universalisme républicain : racialisme, différentialisme, ségrégationnisme (selon la couleur de la peau, le sexe, la pratique religieuse). Ils vont ainsi jusqu'à invoquer le féminisme pour légitimer le port du voile, la laïcité pour légitimer leurs revendications religieuses et l'universalisme pour légitimer le communautarisme. Enfin, ils dénoncent, contre toute évidence, le « racisme d'Etat » qui sévirait en France : un Etat auquel ils demandent en même temps - et dont d'ailleurs ils obtiennent - bienveillance et soutien financier par le biais de subventions publiques.

     

    La stratégie des militants combattants « décoloniaux » et de leurs relais complaisants consiste à faire passer leur idéologie pour vérité scientifique et à discréditer leurs opposants en les taxant de racisme et d'islamophobie. D'où leur refus fréquent de tout débat contradictoire, et même sa diabolisation. D'où, également, l'utilisation de méthodes relevant d'un terrorisme intellectuel qui rappelle ce que le stalinisme avait naguère fait subir aux intellectuels européens les plus clairvoyants.

    C'est ainsi qu'après les tentatives d'ostracisation d'historiens (Olivier Pétré-Grenouilleau, Virginie Chaillou-Atrous, Sylvain Gouguenheim, Georges Bensoussan), de philosophes (Marcel Gauchet, Pierre-André Taguieff), de politistes (Laurent Bouvet, Josepha Laroche), de sociologues (Nathalie Heinich, Stéphane Dorin), d'économistes (Jérôme Maucourant), de géographes et démographes (Michèle Tribalat, Christophe Guilluy), d'écrivains et essayistes (Kamel Daoud, Pascal Bruckner, Mohamed Louizi), ce sont à présent les spécialistes de littérature et de théâtre Alexandre Gefen et Isabelle Barbéris qui font l'objet de cabales visant à les discréditer. Dans le domaine culturel, l'acharnement se reporte sur des artistes parmi les plus reconnus pour les punir d'avoir tenu un discours universaliste critiquant le différentialisme et le racialisme.

     

    La méthode est éprouvée : ces intellectuels « non conformes » sont mis sous surveillance par des ennemis du débat qui guettent le moindre prétexte pour les isoler et les discréditer. Leurs idées sont noyées dans des polémiques diffamatoires, des propos sont sortis de leur contexte, des cibles infamantes (association à l'extrême droite, « phobies » en tout genre) sont collées sur leur dos par voie de pétitions, parfois relayées dans les médias pour dresser leur procès en racisme… Parallèlement au harcèlement sur les réseaux sociaux, utilisés pour diffuser la calomnie, ces « anti-Lumières » encombrent de leurs vindictes les tribunaux de la République.

    Nos institutions culturelles, universitaires, scientifiques (sans compter nos collèges et lycées, fortement touchés) sont désormais ciblées par des attaques qui, sous couvert de dénoncer les discriminations d'origine « coloniale », cherchent à miner les principes de liberté d'expression et d'universalité hérités des Lumières. Colloques, expositions, spectacles, films, livres « décoloniaux » réactivant l'idée de « race » ne cessent d'exploiter la culpabilité des uns et d'exacerber le ressentiment des autres, nourrissant les haines interethniques et les divisions. C'est dans cette perspective que s'inscrit la stratégie d'entrisme des militants décolonialistes dans l'enseignement supérieur (universités ; écoles supérieures du professorat et de l'éducation ; écoles nationales de journalisme) et dans la culture.

    La situation est alarmante. Le pluralisme intellectuel que les chantres du « décolonialisme » cherchent à neutraliser est une condition essentielle au bon fonctionnement de notre démocratie. De surcroît, l'accueil de cette idéologie à l'université s'est fait au prix d'un renoncement à l'exigence pluriséculaire de qualité qui lui valait son prestige.

     

    Nous appelons les autorités publiques, les responsables d'institutions culturelles, universitaires, scientifiques et de recherche, mais aussi la magistrature, au ressaisissement. Les critères élémentaires de scientificité doivent être respectés. Les débats doivent être contradictoires. Les autorités et les institutions dont ils sont responsables ne doivent plus être utilisées contre la République. Il leur appartient, à tous et à chacun, de faire en sorte que cesse définitivement le détournement indigne des valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité qui fondent notre démocratie§

    1. Par exemple : Parti des Indigènes de la République, Collectif contre l'islamophobie en France, Marche des femmes pour la dignité, Marches de la dignité, Camp décolonial, Conseil représentatif des associations noires, Conseil représentatif des Français d'outre-mer, Brigade antinégrophobie, Décoloniser les arts, Les Indivisibles (Rokhaya Diallo), Front de mères, collectif MWASI, collectif Non MiXte.s racisé.e.s, Boycott désinvestissement sanctions, Coordination contre le racisme et l'islamophobie, Mamans toutes égales, Cercle des enseignant.e.s laïques, Les Irrécupérables, Réseau classe/genre/race.

    2. Par exemple : Collège de France, Institut d'études politiques, Ecole normale supérieure, CNRS, EHESS, université Paris-VIII Vincennes-Saint-Denis, université Paris-VII Diderot, université Panthéon-Sorbonne Paris-I, université Lumière-Lyon-II, université Toulouse-Jean-Jaurès.

     

    3. Par exemple : Philharmonie de Paris, Musée du Louvre, Centre dramatique national de Rouen, Mémorial de l'abolition de l'esclavage, Philharmonie de Paris, musée du Louvre, musée national Eugène-Delacroix, scène nationale de l'Aquarium.

     

    Les signataires

    Waleed Al-Husseini, essayiste -Jean-Claude Allard, ancien directeur de recherche à l'Iris -Pierre Avril, professeur émérite de l'université Panthéon-Assas -Vida Azimi, directrice de recherche au CNRS - Elisabeth Badinter, philosophe -Clément Bénech, romancier -Michel Blay, historien et philosophe des sciences -Françoise Bonardel, philosophe -Stéphane Breton, ethnologue et cinéaste -Virgil Brill, photographe -Jean-Marie Brohm, sociologue - Marie-Laure Brossier, élue de BagnoletSarah Cattan, journaliste -Philippe de Lara, philosophe -Maxime Decout, maître de conférences et essayiste -Bernard de La Villardière, journaliste -Jacques de Saint-Victor, professeur des universités et critique littéraire -Aurore Després, maître de conférences -Christophe de Voogd, historien et essayiste -Philippe d'Iribarne, directeur de recherche au CNRS -Arthur Dreyfus, écrivain, enseignant en cinéma -David Duquesne, infirmier -Zineb El Rhazaoui, journaliste -Patrice Franceschi, aventurier et écrivain -Jean-Louis Fabiani, sociologue -Alain Finkielkraut, philosophe et académicien -Renée Fregosi, philosophe et politologue -Jasmine Getz, universitaire -Jacques Gilbert, professeur des universités -Marc Goldschmit, philosophe -Philippe Gumplowicz, professeur des universités -Claude Habib, professeure des universités et essayiste -Noémie Halioua, journaliste -Marc Hersant, professeur des universités -Marie Ibn Arabi, professeure agrégée de philosophie -Pierre Jourde, écrivain -Gaston Kelman, écrivain -Alexandra Lavastine, philosophe -Françoise Lavocat, professeure de littérature comparée -Barbara Lefebvre, enseignante et essayiste -Jean-Pierre Le Goff, sociologue -Damien Le Guay, philosophe -Noëlle Lenoir, avocate au barreau de Paris -Anne-Marie Le Pourhiet, professeure de droit public -Laurent Loty, chercheur au CNRS -Catherine Louveau, professeure émérite -Yves Mamou, journaliste -Laurence Marchand-Taillade, présidente de forces laïques -Jean-Claude Michéa, philosophe -Isabelle Mity, professeure agrégée -Yves Michaud, philosophe -Franck Neveu, professeur des universités en linguistique -Pierre Nora, historien et académicien -Fabien Ollier, directeur des éditions QS ? -Mona Ozouf, historienne et philosophe -Patrick Pelloux, médecin - René Pommier, universitaire et essayiste -Céline Pina, essayiste -Monique Plaza, docteure en psychologie -Michaël Prazan, cinéaste, écrivain -Charles Ramond, professeur des universités et philosophe -Philippe Raynaud, professeur des universités et politologue - Dany Robert-Dufour, professeur des universités, philosophe -Robert Redeker, philosophe -Anne Richardot, maître de conférences des universités -Pierre Rigoulot, essayiste - Jean-Pierre Sakoun, président du Comité Laïcité République - Philippe San Marco, essayiste -Boualem Sansal, écrivain -Jean-Paul Sermain, professeur des universités en littérature française -Dominique Schnapper, politologue -Jean-Eric Schoettl, juriste -Patrick Sommier, homme de théâtre -Véronique Taquin, professeure et écrivaine -Jacques Tarnero, chercheur et essayiste -Carine Trévisan, professeure des universités en littérature -Michèle Tribalat, chercheuse démographe - Caroline Valentin, avocate et éditorialiste -André Versaille, écrivain et éditeur -Ibn Warraq, écrivain -Aude Weill Raynal, avocate -Yves Charles Zarka, professeur des universités en philosophie.

  • Projet de loi bioéthique : la « vive préoccupation » des évêques de France, par Jean-Marie Dumont.

    Source : https://www.famillechretienne.fr/

    Partout en France, les évêques de France lancent l’alerte alors que le gouvernement entend faire adopter en quelques jours par l’Assemblée d’ici fin juillet le projet de loi de bioéthique.

    Rarement les évêques de France auront été aussi unis pour dire « non ! » De la Bretagne à l’Alsace, de Lille à Toulouse, de Grenoble à Brest, les responsables de l’Église catholique en France expriment haut et fort leur opposition au projet de loi de bioéthique que le gouvernement entend faire adopter en deuxième lecture par l’Assemblée nationale en plein cœur de l’été et ce avec des restrictions drastiques apportées à la liberté de parole (25 heures de temps programmé).

    « Projet injuste, inégalitaire et dangereux », « loi injuste et violente », « monstruosité » du projet d’autoriser les chimères homme-animal, « conséquences mortifères », « principes mensongers »… les prélats ne mâchent pas leurs mots pour dénoncer le mal et alerter les Français. Venant des autorités de l’Église de France toujours soucieuses du dialogue, c’est le signe que l’heure est vraiment très grave. « Au nom de ma responsabilité confiée par le Christ, au nom de ma conscience d’homme, je ne pouvais pas me taire devant tel un projet de société », déclare ainsi Mgr Thierry Brac de la Perrière, évêque de Nevers, dans un texte à la tonalité particulièrement dramatique.

    Des questions majeures « camouflées » fin juillet

    Le premier point qui scandalise les évêques concerne le calendrier d’examen de la loi. Inscrit de manière impromptue à l’ordre du jour d’une session extraordinaire qui s’est ouverte le 1er juillet, celui-ci est prévu du 27 au 31 juillet. Ces dates sont probablement les moins aptes de toute l’année à permettre une discussion approfondie, sur des enjeux graves qui concernent toute la société. « Les débats nécessaires en seront forcément amoindris voire tus », regrette Mgr Dominique Blanchet, évêque de Belfort-Montbeliard, dans un long communiqué exprimant les raisons de sa « vive préoccupation au sujet des conséquences » de ce projet. « Comment se fait-il que des questions aussi fondamentales puissent être ainsi traitées en plein cœur de l’été, de manière camouflée, au milieu d’une crise sanitaire, économique et sociale sans précédent ? », demande pour sa part Mgr Sylvain Bataille, évêque de Saint-Étienne, dans une Lettre ouverte aux parlementaires de la Loire. « Est-ce vraiment la nécessité du moment ? » « En plein cœur de l’été, alors que la page de la crise sanitaire est loin d’être tournée, déplore Mgr Francis Bestion, évêque de Tulle, et que se prépare une crise économique et sociale d’une ampleur, semble-t-il, inédite, voilà qu’une ligne rouge est sur le point d’être franchie. » « On peut être étonné et même trouver indécent cette précipitation au moment où les Françaises et les Français ont bien d’autres sujets de préoccupation », fait aussi remarquer l’évêque de Grenoble et Vienne, Mgr Guy de Kérimel. « Pourquoi vouloir lui donner la priorité et le faire passer en catimini en profitant du contexte sanitaire et des vacances d’été pour éviter toute forme de débat ? » La Conférence des évêques de France (CEF) a elle-même dénoncé lundi « la volonté d’adoption en urgence d’une loi injuste et inégalitaire ».

    Une loi « folle et violente »

    La deuxième série de critiques formulées par les évêques concerne le fond du projet de loi. « Sous couvert de prétendues avancées sociétales, il porte en germe de grandes violences, faites aux plus faibles d’entre nous et aux générations à venir », note Mgr Thierry Brac de La Perrière, évêque de Nevers dans un communiqué intitulé « une loi folle et violente » qui décrypte avec une grande précision l’esprit du texte. Il y dénonce non seulement le projet de faire « naître délibérément des enfants sans père », mais aussi le mépris de l’enfant à naître, la sacralisation du « projet parental qui donne droit de vie et de mort sur l’enfant » (notamment en lien avec la « recherche sur l’embryon », à laquelle ils peuvent être « donnés », avant d’être supprimés) ou l’invocation de l’égalité sans lien avec la réalité. « Les mots prennent la place de la réalité. La réalité peut être changée par le choix des mots », dénonce-t-il. « Ce texte porte gravement atteinte à l’inviolabilité de la vie humaine », déclare pour sa part Mgr Jean Legrez, archevêque d’Albi, selon lequel il « bafoue à la fois l’égalité, la fraternité et la dignité humaine : par les projets d’extension du tri des embryons, par le bouleversement des relations généalogiques, par l’intention de fabriquer des embryons chimères homme-animal… » « Nous devons dire que les lois de bioéthique, telles qu’elles nous sont proposées, contreviennent au respect de la condition humaine », affirme tout simplement Mgr Robert Le Gall, archevêque de Toulouse. « Faut-il que la conscience de nos contemporains soit à ce point anesthésiée pour ne plus savoir prendre la mesure de la gravité de telles transgressions destructrices de la dignité de la personne humaine, à commencer par la plus vulnérable ? », demande Mgr Marc Aillet, évêque de Bayonne, évoquant un projet « considérablement aggravé » lors de son passage en commission spéciale Bioéthique du 29 juin au 3 juillet dernier. Au détour d’une phrase, cet évêque laisse d’ailleurs entendre que les ajouts très contestés apportés par cette commission (notamment l’élargissement du tri des embryons lors du diagnostic pré-implantatoire et l’autorisation de la « FIV-ROPA ») pourraient constituer une tactique visant à faire passer plus facilement la « PMA sans père » lors du vote en plénière fin juillet, donnant à celle-ci une allure plus « modérée » et « acceptable » que les « excès » introduits en Commission.

    « Une autre bioéthique que celle de l’actuel projet »

    Si un nombre important d’évêques réagissent ainsi de manière forte et personnelle, la grande majorité des diocèses français diffuse par ailleurs les éléments de communication officiels de la Conférence des évêques de France : le communiqué dénonçant un projet « injuste, inégalitaire et dangereux », la vidéo de la conférence de presse du 20 juillet de Mgr Pierre d’Ornellas expliquant les positions de l’Église sur les lois de bioéthique, et une tribune de cinq évêques membres du groupe de travail « Bioéthique » de la Conférence des évêques de France demandant à « élaborer une autre bioéthique que celle de l’actuel projet de loi. » La Conférence épiscopale elle-même, qui fait actuellement de la bioéthique la une de son site internet, a ouvert une page « Loi bioéthique : les évêques de France se mobilisent », qui relaie leurs prises de position sur ce sujet. Autant d’éléments destinés à exprimer une protestation publique contre ce projet et à provoquer un « réveil des consciences » au sein de la société

  • Le plus gros bobard de la fin du XXe siècle, par Serge Halimi & Pierre Rimbert.

    Il y a vingt ans, le 24 mars 1999, treize États membres de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN), dont les États-Unis, la France et l’Allemagne, bombardaient la République fédérale de Yougoslavie. Cette guerre dura soixante-dix-huit jours et se nourrit de bobards médiatiques destinés à aligner l’opinion des populations occidentales sur celle des états-majors. 

    1.jpgLes Serbes commettent un « génocide », « jouent au football avec des têtes coupées, dépècent des cadavres, arrachent les fœtus des femmes enceintes tuées et les font griller », prétendit le ministre de la défense allemand, le social-démocrate Rudolf Scharping, dont les propos furent repris par les médias ; ils ont tué « de 100 000 à 500 000 personnes » (TF1, 20 avril 1999), incinéré leurs victimes dans des « fourneaux, du genre de ceux utilisés à Auschwitz » (The Daily Mirror, 7 juillet). Une à une, ces fausses informations seront taillées en pièces — mais après la fin du conflit —, notamment par l’enquête du journaliste américain Daniel Pearl (The Wall Street Journal, 31 décembre 1999). Tout comme se dégonflera l’une des plus retentissantes manipulations de la fin du XXe siècle : le plan Potkova (« fer à cheval »), un document censé prouver que les Serbes avaient programmé l’« épuration ethnique » du Kosovo. Sa diffusion par l’Allemagne, en avril 1999, servit de prétexte à l’intensification des bombardements. Loin d’être des internautes paranoïaques, les principaux désinformateurs furent les gouvernements occidentaux, l’OTAN ainsi que les organes de presse les plus respectés (1).

    Parmi eux, Le Monde, un quotidien dont les prises de position éditoriales servent alors de référence au reste de la galaxie médiatique française. Sa rédaction, dirigée par Edwy Plenel, admet avoir « fait le choix de l’intervention (2)  ». En première page de l’édition du 8 avril 1999, un article de Daniel Vernet annonce : « Ce plan “Fer à cheval” qui programmait la déportation des Kosovars ». Le journaliste reprend les informations dévoilées la veille par le ministre des affaires étrangères allemand, l’écologiste Joschka Fischer. Ce « plan du gouvernement de Belgrade détaillant la politique de nettoyage ethnique appliquée au Kosovo (…) porte le nom de code de plan “Fer à cheval”, sans doute pour symboliser la prise en tenaille des populations albanaises », écrit Vernet, pour qui la chose « paraît faire peu de doutes ».

    Deux jours plus tard, le quotidien récidive sur toute la largeur de sa « une » : « Comment [Slobodan] Milošević a préparé l’épuration ethnique ». « Le plan serbe “Potkova” programmait l’exode forcé des Kosovars dès octobre 1998. Il a continué d’être appliqué pendant les négociations de Rambouillet. » Le Monde évoque un « document d’origine militaire serbe » et reprend à nouveau les allégations des officiels allemands, au point de reproduire l’intégralité d’une note de synthèse — ce qu’on appellerait aujourd’hui les « éléments de langage » — distribuée aux journalistes par l’inspecteur général de l’armée allemande. Berlin entend alors justifier auprès d’une opinion plutôt pacifiste la première guerre menée par la Bundeswehr depuis 1945, de surcroît contre un pays occupé cinquante ans plus tôt par la Wehrmacht.

    2.jpgOr ce plan est un faux : il n’émane pas des autorités serbes, mais a été fabriqué à partir d’éléments compilés par les services secrets bulgares, puis transmis aux Allemands par ce pays, qui fait alors du zèle pour rentrer dans l’OTAN. Le pot aux roses sera révélé le 10 janvier 2000 par l’hebdomadaire Der Spiegel et confirmé douze ans plus tard par l’ancienne ministre des affaires étrangères bulgare. A posteriori, le document aurait dû inspirer d’autant plus de méfiance que « fer à cheval » se dit potkovica en serbe, et non potkova, ainsi que le remarqua dès le 15 avril 1999 le député allemand Gregor Gysi devant le Bundestag. En mars 2000, le général de brigade allemand Heinz Loquai exprime dans un livre ses « doutes sur l’existence d’un tel document » ; son enquête oblige M. Scharping à admettre qu’il ne dispose pas d’une copie du « plan » original. Au même moment, le porte-parole du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie qualifie les éléments du prétendu plan de « matériel peu probant » (Hamburger Abendblatt, 24 mars 2000) ; et la procureure Carla Del Ponte n’y fera même pas référence dans l’acte d’accusation de Milošević en 1999 puis en 2001.

    « La guerre, avait expliqué Plenel peu après le début des bombardements, c’est le défi le plus fou pour le journalisme. C’est là qu’il prouve ou non sa crédibilité, sa fiabilité (3).  » L’investigateur n’est jamais revenu sur ce grand écart avec « l’amour des petits faits vrais » qu’il proclame dans son livre pamphlet en faveur de l’intervention de l’OTAN (4). Le Monde évoquera à nouveau le faux, mais comme s’il l’avait toujours considéré avec prudence : « “Fer à cheval” reste un document fort controversé, dont la validité n’a jamais été prouvée » (16 février 2002). Spécialistes des Balkans, les journalistes Jean-Arnault Dérens et Laurent Geslin qualifient pour leur part le plan Potkova d’« archétype des fake news diffusées par les armées occidentales, repris par tous les grands journaux européens (5)  ».

    La célébration d’un anniversaire n’aurait pas justifié à elle seule qu’on revienne sur cette affaire. Mais certaines de ses conséquences pèsent encore sur la vie internationale. Pour ce qui fut sa première guerre depuis sa naissance en 1949, l’OTAN choisit d’attaquer un État qui n’avait menacé aucun de ses membres. Elle prétexta un motif humanitaire et agit sans mandat des Nations unies. Un tel précédent servit les États-Unis en 2003 au moment de leur invasion de l’Irak, là encore aidée par une campagne de désinformation massive. Quelques années plus tard, la proclamation par le Kosovo de son indépendance, en février 2008, mettrait à mal le principe de l’intangibilité des frontières. Et la Russie se fonderait sur cette indépendance lorsque, en août 2008, elle reconnaîtrait celles de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, deux territoires qui s’étaient détachés de la Géorgie. Puis en mars 2014 quand elle annexerait la Crimée.

    La guerre du Kosovo ayant été conduite par une majorité de gouvernements « de gauche », et appuyée par la plupart des partis conservateurs, nul n’avait intérêt à ce qu’on revienne sur les falsifications officielles. Et on comprend sans peine que les journalistes les plus obsédés par la question des fake news préfèrent eux aussi regarder ailleurs.

    Serge Halimi & Pierre Rimbert

    (1Cf. Serge Halimi, Henri Maler, Mathias Reymond et Dominique Vidal, L’opinion, ça se travaille… Les médias, les « guerres justes » et les « justes causes », Agone, Marseille, 2014.

    (2Pierre Georges, directeur adjoint de la rédaction du Monde, entretien accordé à Marianne, Paris, 12 avril 1999.

    (3Cité dans Daniel Junqua, La Lettre, n° 32, Paris, avril 1999, et reproduit sur Acrimed.org, novembre 2000.

    (4Edwy Plenel, L’Épreuve, Stock, Paris, 1999.

    (5La Revue du crieur, n° 12, Paris, février 2019.

    Source : https://www.monde-diplomatique.fr/

  • Le bal des prétendants, par Christophe Boutin.

    Ils sont nombreux, ils sont plein d’idées, ils ont un slogan, ils font un petit tour, les médias les testent, l’Élysée les toise, ils repartiront.

    L’une après l’autre, les mêmes unes sur papier glacé ornent les devantures des derniers kiosques à journaux parisiens, les rayons des Relay des gares et les façades des tabacs de province.

    3.jpgL’une après l’autre se succèdent les mêmes photographies d’hommes et de femmes, prises de trois-quarts en plan américain, dans cette belle lumière qui leur donne l’air de penseurs – celle-là même avec laquelle Yann-Arthus Bertrand a si bien su mettre en valeur les bœufs charolais. L’une après l’autre elles sont ornées de titres agençant sous des formes diverses les trois mêmes éléments, Candidat, Droite et 2022 qui forment la basse soutenue de cet ostinato politique.

    Feuilletons un instant l’album de cette famille rassemblée malgré elle. Il y a François Baroin, gendre idéal sur lequel l’âge ne semble pas avoir de prise, que l’on presse d’être candidat mais qui s’y refuse encore, sans que l’on comprenne bien si c’est parce que sa compagne ne supporte pas la décoration de l’Élysée revue par Brigitte Macron ou parce qu’il n’a pas envie de prendre des coups. Il y a le Vendéen, Bruno Retailleau, qui entend bien être en 2022 ce que n’a pas pu être François Fillon en 2017, l’homme qui récupère les électeurs enfuis chez Marine Le Pen sans pour autant faire peur à ceux du centre. Il y a le président des Hauts-de-France, Xavier Bertrand, annonçant à qui veut l’entendre qu’il est le seul, grâce à ses réseaux, à pouvoir sauver la France de l’extrême gauche de Jean-Luc Mélenchon et de l’extrême droite de Marine Le Pen. Il y a Valérie Pécresse qui, dirigeant l’Île-de-France, se sent d’autant plus naturellement des ambitions nationales que certains prophètes évoquent l’arrivée d’une femme au pouvoir suprême. Il y a Laurent Wauquiez, qui a dû laisser la direction du parti sous la pression et semble s’être décidé à abandonner sa parka rouge pour relancer sa carrière. Il y a Michel Barnier, toujours persuadé qu’il méritait la présidence de la commission européenne, et qui accepterait celle de la République française comme lot de consolation. Il y a François-Xavier Bellamy, Versaillais chimiquement pur, qui croit pouvoir faire bouger les choses au Parlement européen. Il y a les petits nouveaux révélés par la crise sanitaire, le pragmatique maire de Cannes David Lisnard, le parisien Philippe Juvin, qui se dit que la droite aurait bien besoin de ses compétences d’anesthésiste-réanimateur. Il y toujours quelque part dans l’ombre Nicolas Sarkozy, juridiquement mort le soir, en pleine santé politique le lendemain, l’homme du karcher dont certains craignent le ralliement à Emmanuel Macron. Et puis il y a les autres, tous les autres, les nouveaux, les « hors-système », dont on teste les noms, au cas où. Il y a le brav’ général de Villiers, ancien chef d’état-major des armées qui tente de faire croire qu’il peut remettre de l’ordre dans les banlieues parce qu’il a connu le temps du service national. Il y a Éric Zemmour, le polémiste et écrivain talentueux à qui certains ne pardonnent pas de faire s’envoler les ventes et les taux d’audience, et qu’ils aimeraient bien entraîner sur le terrain politique pour qu’il connaisse enfin une défaite.

    Mais à quoi ça sert ?

    Une semaine, rarement plus, telle semble être la durée du quart d’heure warholien accordé par les médias à ces potentiels futurs opposants de la « droite républicaine » – l’expression totalement démonétisée ressort parfois sous la plume de pigistes fatigués – qui pourraient menacer le jupitérien hôte de l’Élysée en 2022. Pourquoi ces incessants changements, pourquoi ce kaléidoscope mêlant les seconds couteaux de toujours à d’improbables nouveaux venus ? À cela, il y a sans doute plusieurs explications.

    La première, et peut-être la plus évidente, est qu’il n’y a pas de candidat de droite désigné… et qu’on ne sait même pas comment le désigner. Christian Jacob, qui dirige le parti, croit dur comme fer à l’émergence de « candidats naturels » s’imposant comme des évidences, mais on est loin encore de De Gaulle ou Jeanne d’Arc. Pas question pour lui en tout cas de ces machines à perdre que seraient les primaires, ce à quoi souscrit pleinement un Xavier Bertrand qui veut croire que sa victoire aux régionales traduira l’attente de tout un peuple. Mais Gérard Larcher ou Bruno Retailleau considèrent, eux, que sans primaires une multiplication des candidatures serait catastrophique pour passer l’obstacle du premier tour. Des primaires, donc, mais lesquelles ? Internes à LR, comme pour Retailleau, qui n’a pas oublié comment François Fillon a bénéficié de l’écart entre les vœux des caciques du parti et ceux des militants ? Ouvertes au centre, et plus si affinités, comme pour Valérie Pécresse, qui se souvient elle aussi très bien de 2016 mais prétend juste anticiper ainsi les ralliements du second tour ?

    Primaires ou pas, il semble clair en tout cas que la personnalité de l’intéressé comptera au moins autant que son programme tant ces derniers se ressemblent. Tous sont en effet composés de trois éléments : un tiers régalien d’abord (sécurité et défense), pour tenter de faire revenir les électeurs partis depuis longtemps chez Marine Le Pen et de rassurer les indispensables résidents des Ehpad qui constituent une part non négligeable de cet électorat ; un tiers sociétal ensuite (vivre-ensemble et création artistique), pour que les centristes et quelques socialistes acceptent de venir voter LR lors d’un éventuel second tour ; un tiers économique enfin (Union européenne et mondialisation heureuse), pour confirmer qu’il n’y aura pas de changement en la matière aux pouvoirs qui soutiendront leur candidature.

    Car ce qu’ont sans doute compris la plupart de ces politiques, c’est la nouvelle donne pour arriver au pouvoir suprême. Il fallait autrefois mettre la main sur un parti, contrôler ses militants et, surtout, ses finances, mais le candidat désigné n’était pas toujours celui espéré – on se souviendra de l’échec inattendu du « meilleur d’entre nous » qui devait quitter Bordeaux pour l’Élysée. Mais en 2017 l’« écurie présidentielle » ne dépendait plus du contrôle d’un parti mais du soutien direct à un candidat. Emmanuel Macron l’a amplement démontré, être élu suppose maintenant de réussir un recueil de fonds à l’américaine pour sa campagne et de bénéficier de l’appui de médias qui veillent à promouvoir l’Élu et à détruire en vol ceux qui pourraient contrarier son arrivée au pouvoir. On comprend dès lors que soient présentés aussi facilement aux Français ces multiples candidats « en rupture de partis » ou « indépendants ».

    Mais pourquoi on en parle ?

    Mais d’où vient que ces candidatures d’opposants à l’actuel hôte de l’Élysée soient si facilement évoquées ? En dehors de la nécessité affichée de préserver le pluralisme démocratique, cela relève d’abord de la simple prudence : un accident démocratique est vite arrivé, les Français pouvant avoir envie de changer d’air après les années de confinement, et Emmanuel Macron, comme François Hollande, pourrait ne pas se représenter, ou, comme Lionel Jospin, ne pas être présent au second tour. Cela permet ensuite d’évaluer l’impact de ces candidats sur l’opinion, non pas tant, on l’a dit, celui de leur programme que celui de leur image, comme pour n’importe quel produit. Cela permet enfin de favoriser leur compréhension des enjeux : en les amenant au crash-test des sondages où ils restent dix points derrière Emmanuel Macron et Marine le Pen, on leur fait clairement comprendre qu’ils ne sont rien par eux-mêmes, et à qui ils devront être redevables s’ils sont retenus après ce casting.

    Quant à l’ouverture dudit casting, elle résulte de la nécessité de disposer d’un panel suffisant de profils différents pour pouvoir répondre dans l’urgence aux besoins du moment. Certes, cette situation de remplacement de l’hôte élyséen supposerait sans doute de jouer sur le « dépassement des clivages », surfant sur l’idée d’une Union nationale nécessaire pour sortir de la crise – une thématique effectivement plus difficile à défendre pour le maître des horloges qui aura été au cœur du réacteur en surchauffe. Mais une telle thématique peut avoir à s’adapter à des évènements plus ou moins prévisibles (troubles intérieurs, rapports à l’Union européenne, crise financière…), supposant alors pour prétendre y répondre des acteurs différents, dont l’image, résumée à un slogan (la proximité, l’autorité, la compétence, l’ouverture…), permettra d’oublier la trop évidente similitude des décisions qu’ils prendront avec celles de leurs prédécesseurs. Car c’est ainsi que la démocratie est grande.

     

    Illustration : Xavier Bertrand contemple avec inquiétude les sondages que lui présente un de ses partisans. Non seulement il est loin derrière Macron et Le Pen, mais en plus il ne réunit que les plus bourgeois.

    1.jpg

    Source : https://www.politiquemagazine.fr/

  • Théo le Noir, Théo le Blanc, par Jean Messiha.

    Sur cette photo prise le 7 février 2017 à l’hôpital Robert Ballanger à Aulnay-sous-Bois, le président François Hollande rend visite à Théo Luhaka. Celui-ci a été opéré après son arrestation. Il revendiquait qu’un policier lui a causé de graves blessures anales et un traumatisme crânien avec sa matraque © Arnaud Journois / LE PARISIEN / AFP

    Le sort de Théo blessé par un flic blanc continuera à être évoqué. Théo assassiné par un migrant noir sera bien vite oublié

    À quelques années d’intervalle, deux Théo ont fait l’actualité. L’un dans une affaire de « violence policière » qui date de février 2017, l’autre dans un crime atroce qui l’a frappé il y a quelques jours.

    6.jpgCes deux Théo sont tous les deux Français. Ou plutôt l’était pour le second, puisqu’il est mort. Mais ils ne sont pas de la même couleur. L’un est Noir, l’autre était Blanc.

    « Vous vous intéressez à la couleur des gens maintenant ? », pourrait-on me reprocher. Je vais me gêner, tiens ! Le « Camp du Bien » dans son ensemble ne fait qu’en parler depuis des lustres et sans vergogne. Alors pourquoi ne pas me mettre au niveau des gens « bien » ?

    Reprenons.

    En février 2017, à Aulnay-sous-Bois, ville du département de la Seine-Saint-Denis, autrefois banlieue industrielle et ouvrière majoritairement française, aujourd’hui commune largement arabo-afro-musulmane et fortement racaillisée, un contrôle de police dérape.

    Théo Luhaka, jeune d’origine congolaise et membre d’une famille d’escrocs aux subventions publiques en faveur des quartiers, s’embrouille avec les forces de l’ordre en intervenant dans un contrôle de stups qui ne le visait pas. Il veut jouer au défenseur de ses « frères » ciblés par les keufs. Mal lui en prend. Sans doute énervés, les policiers interpellent rudement Théo, tandis que lui-même oppose une résistance butée. Au cours de l’altercation, il reçoit un coup de matraque très mal placé qui lui blesse le canal anal. Il dit qu’il en garde comme séquelle de l’incontinence. 

    Hollande se déplace au chevet de Théo

    Très vite, cette affaire provoque un emballement médiatique dopé par la visite de François Hollande au chevet de Théo.

    La thèse développée par les médias de façon directe est subliminale : « des flics blancs racistes ont violé avec une matraque un jeune et gentil Black qui ne faisait de mal à personne ». Violence policière typique et typée pour presque tous les médias télé, radio, numérique et presse.

    On aura droit à l’« affaire Théo » pendant des semaines avec une interrogation profonde sur la brutalité des forces de l’ordre à l’égard des minorités. Seule la campagne électorale va mettre entre parenthèse cette saoulerie médiatique pour ce qui, au regard des faits, n’aurait dû être qu’un fait divers. « Fait divers », vous savez ce terme qui couvre des meurtres atroces, des violences inouïes, une sauvagerie quotidienne… Curieusement pourtant, quand les flics sont impliqués dans un incident ou un drame rarissime, ce ne sont jamais des faits divers mais des évènements nationaux révélateurs de vrais phénomènes systémiques !

    Et la saga Théo va rebondir. Les médias nationaux, qui n’accordent en général aucun intérêt aux suites judiciaires d’affaires pourtant gravissimes lorsqu’elles n’ont pas un côté emblématique, vont suivre la procédure judiciaire pas à pas. « Le Défenseur des Droits », institution qui devrait ajouter « des minorités, des migrants illégaux et des racailles » à son fronton afin de refléter sa véritable vocation, instrumentalise hardiment le cas Théo Luhaka pour s’en prendre à nos forces de l’ordre.

    Une invraisemblable embrouille liée à une facture Bouygues Telecom

    Mieux : quand Théo sort un album complètement naze en février 2021, toute la presse s’en saisit pour rappeler les malheurs de ce jeune homme. Le Mouv’, station musicale totalement « blackbeurisée » du groupe Radio France, lui accorde une interview victimaire à souhait. 

    Pensez-vous ! Il faut bien que nous ayons aussi nos avatars de George Floyd, se disent les Blancs français repentants qui n’ont franchement pas grand-chose à se mettre sous la dent. Et pour cause : nos policiers et gendarmes mais aussi le peuple historique font preuve d’une retenue remarquable et probablement unique au monde face à la racaillisation de masse et à la violence ethnique très majoritairement anti-blanche de notre société.   

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    Passons à présent à l’autre Théo qui vient de faire l’actualité il y a quelques jours. Ce Théo-là a été sauvagement poignardé par Ousmane Diallo, Sénégalais de 62 ans dont le titre de séjour arrivait à expiration fin juillet 2021. Immigré au casier judiciaire épais comme un bottin, il a pourtant vu sa carte de résident régulièrement renouvelée pendant plus de 20 ans ! Une invraisemblable embrouille liée à une facture de téléphone que conteste Diallo éclate dans la boutique Bouygues Telecom à Claye-Souilly (77) où va se produire ce drame. Éconduit par deux jeunes vendeurs de la boutique, Dany et Théo, le type revient avec un couteau et les frappe. Fatalement pour Théo, jeune bachelier de 18 ans, qui est tué sur le coup. La photo de Théo va furtivement apparaitre dans quelques médias qui en parlent 2-3 jours. Puis tout retombe. Théo est très vite oublié.

    On ne s’intéresse ni à sa vie, ni à sa famille, ni à son entourage. On ne vous fera pas des interviews de ses potes ou de ses voisins qui vanteraient sa gentillesse, son aide aux personnes âgées, etc. Non. Ça, c’est réservé aux terroristes islamiques.    

    Par contre, ce qui obsède BFM TV c’est… Mohammed, qui a participé à l’arrestation de ce forcené avec trois autres personnes, dont un agent de la BRI et un agent pénitentiaire. Mais ces derniers étant blancs, ils n’intéressaient pas BFM TV. C’est tout comme si ce média voulait démontrer qu’il ne faut pas voir dans ce drame une conséquence de notre folie migratoire puisque Mohammed, oui Mohammed, donc un immigré, a été un héros. Mais oui, mais oui, un héros. Ils étaient quatre dont trois Blancs mais le héros c’est uniquement le Maghrébin !

    Théo restera une statistique. Un de ces innombrables Français de souche européenne victime de la criminalité immigrée. Je corrige : pas immigrée au sens large. Les immigrations qui sont sur le podium de la violence terroriste ou simplement criminelle viennent du continent africain, du Moyen-Orient et de l’Asie islamique. Je n’y vois aucune explication génétique ou systémique. Mais c’est juste la réalité. 

    Les statistiques ethniques interdites en France

    Aux États-Unis qui nous « GeorgeFloydisent » depuis des mois, les statistiques ethniques sur la criminalité, officielles là-bas, nous livrent des chiffres saisissants.

    Selon les chiffres du FBI, voici le profil des 392 562 personnes arrêtées pour « violent crime » en 2019, 146 734 étaient noires, soit 37,4% du total des personnes arrêtées. Pour mémoire, les Noirs ne représentent que 14% de la population américaine. Florilège des justifications donnés par les « progressistes » à ces chiffres : « c’est la faute à l’esclavage » (qui n’a jamais existé dans les États du Nord et a été aboli il y a 150 ans dans ceux du Sud), « c’est la faute au racisme des Blancs qui poussent les Noirs au crime ». Soit. Mais dans ce cas, pourquoi les Asiatiques, qui sont 5,5% de la population ne représentent que 1,5% des crimes violents ? Les Blancs seraient sélectivement racistes ? Ben voyons !

    La société américaine est très violente car elle est très armée, très inégalitaire mais aussi parce qu’elle met face-à-face Blancs et Noirs dans une difficile cohabitation de masse. En France, nous sommes peu armés et bien moins inégalitaires. Mais nous avons aussi le face-à-face, cher à Gérard Collomb, entre la population européenne, de souche ou immigrée assimilée et la masse grandissante de l’immigration du continent africain et d’autres zones du tiers-monde, le tout dans un contexte d’islamisation profonde. Le sort de Théo le Noir blessé par un flic blanc continuera régulièrement à être évoqué. Théo le Blanc assassiné par un migrant noir sera bien vite oublié. Le premier est un symbole. Le second est un fait divers gênant qu’il faut bien vite glisser sous le tapis.

    Cet épisode tragique, comme tant d’autres avant lui, m’a convaincu de la nécessité de faire des statistiques ethniques sur tous les sujets qui nous préoccupent. Je ne pense pas qu’elles doivent être permanentes. Faisons une bonne fois pour toutes un bilan de 50 ans d’immigration et tirons-en des conclusions.  

    Les « progressistes » voudront se pencher sur les inégalités et les discriminations. Dont acte, mais la majorité des Français veut des données par origines sur le chômage, le décrochage scolaire, le recours aux minimas sociaux, aux HLM, le harcèlement de rue des femmes, les transferts de fonds hors de France et bien sur le couple délinquance/criminalité. Nous verrons bien si certaines immigrations nous enrichissent tant que cela. Nous verrons bien aussi si elles contribuent pacifiquement au vivre-ensemble.

     

    Economiste et haut fonctionnaire. Président de l’Institut Apollon.
     
  • Communiqué de presse de « Créer son école - Educ'France ».

    Sur la déci­sion du Conseil Consti­tu­tion­nel de ce jour rela­tive à la loi confor­tant le res­pect des prin­cipes de la Répu­blique. Une déci­sion du Conseil consti­tu­tion­nel qui doit ouvrir une nou­velle ère pour la liber­té d’enseignement.

    Les faits

    Par sa déci­sion n° 2021 – 823 DC ren­due aujourd’­hui, le Conseil consti­tu­tion­nel a esti­mé que l’ins­truc­tion en famille (IEF) n’a­vait pas valeur constitutionnelle.

    Ce fai­sant, il a dis­so­cié défi­ni­ti­ve­ment la liber­té de faire l’école à la mai­son du champ de la liber­té d’enseignement. Nous ne pou­vons qu’en prendre acte et adap­ter sans tar­der notre stra­té­gie de sou­tien à ces pré­cieuses libertés.

     Nous invi­tons les jour­na­listes à notre confé­rence de presse du lun­di 30 août pro­chain à 14 heures à Paris XIème

     Les direc­teurs d’é­coles, les familles qui ins­truisent à la mai­son et ceux qui réflé­chissent à créer leur école sont invi­tés à un FACEBOOK LIVE le ven­dre­di 27 août à 18 heures, pour poser toutes leurs ques­tions juri­diques et concrètes leur per­met­tant de prendre des déci­sions éclairées.

    Les pré­ci­sions seront sur le site « www.creer-son-ecole.com » et « www.educfrance.org » et les réseaux sociaux associés.

    Vali­dées par le juge consti­tu­tion­nel, les nou­velles dis­po­si­tions légis­la­tives concer­nant l’é­du­ca­tion dans la loi confor­tant le res­pect des prin­cipes de la Répu­blique auront des effets à la fois immé­diats et concrets.

    A par­tir de la ren­trée de sep­tembre, l’Ins­truc­tion en Famille ne sera plus un droit. Elle sera donc inter­dite, sauf déro­ga­tions très res­tric­tives. Pour en béné­fi­cier, il fau­dra deman­der une auto­ri­sa­tion à l’administration et rem­plir l’un des 4 motifs suivants :

    « 1° L’état de san­té de l’enfant ou son handicap ;

    « 2° La pra­tique d’activités spor­tives ou artis­tiques intensives ;

    « 3° L’itinérance de la famille en France ou l’éloignement géo­gra­phique de tout éta­blis­se­ment sco­laire public ;

    « 4° L’existence d’une situa­tion propre à l’enfant moti­vant le pro­jet édu­ca­tif, sous réserve que les per­sonnes qui en sont res­pon­sables jus­ti­fient de la capa­ci­té de la ou des per­sonnes char­gées d’instruire l’enfant à assu­rer l’instruction en famille dans le res­pect de l’intérêt supé­rieur de l’enfant. Dans ce cas, la demande d’autorisation com­porte une pré­sen­ta­tion écrite du pro­jet édu­ca­tif, l’engagement d’assurer cette ins­truc­tion majo­ri­tai­re­ment en langue fran­çaise ain­si que les pièces jus­ti­fiant de la capa­ci­té à assu­rer l’instruction en famille ».

    L’au­to­ri­sa­tion par l’ad­mi­nis­tra­tion ne sera valable que pour une année.

    Par déro­ga­tion cepen­dant, à titre tran­si­toire, les enfants pra­ti­quant actuel­le­ment l’IEF pour­ront conti­nuer pen­dant deux ans l’é­cole à la mai­son, même s’ils n’entrent pas dans ces 4 cas res­tric­tifs, à condi­tion que les contrôles effec­tués aient été posi­tifs en 2020 – 2021.

    Cette même loi confor­tant le res­pect des prin­cipes de la Répu­blique pré­voit, pour les éta­blis­se­ments pri­vés hors contrat, une répres­sion pénale aggra­vée pour les peines déjà exis­tantes à l’en­contre des direc­teurs d’é­ta­blis­se­ment et la fer­me­ture admi­nis­tra­tive des éta­blis­se­ments, déci­dée par le pré­fet, y com­pris pour non-res­pect de la mise en demeure ; jus­qu’a­lors un éta­blis­se­ment hors contrat ne pou­vait être fer­mé que par un juge !

    Le Conseil consti­tu­tion­nel ne s’est pas pro­non­cé sur ces nou­velles dis­po­si­tions, qui pour­ront donc être contes­tées par voie de QPC (ques­tions prio­ri­taires de consti­tu­tion­na­li­té) lors de leur mise en application.

    Notre posi­tion

    L’association « Créer son école-Educ’France » s’est enga­gée clai­re­ment dès le 2 octobre 2020 en faveur du main­tien de la liber­té de l’instruction en famille.

    Elle a mobi­li­sé une coa­li­tion d’acteurs inédite au ser­vice de la défense de cette liber­té qui peut se révé­ler pré­cieuse pour chaque enfant. Autour d’elle se sont mobi­li­sés des familles, des juristes et des uni­ver­si­taires, des hommes et des femmes poli­tiques de sen­si­bi­li­tés diverses. Des anciens élèves qui ont fait l’école à la mai­son, des experts, rodés aux ques­tions de res­pect des droits fon­da­men­taux de la per­sonne, et en tout pre­mier lieu des droits des enfants.

    Il n’est pas ques­tion pour nous de renon­cer à notre sou­tien réso­lu à la liber­té d’en­sei­gne­ment mais il va fal­loir inno­ver, nous adap­ter vite et trou­ver les moyens de conti­nuer à ser­vir les droits des enfants.

    Alors RDV aux jour­na­listes le 30 août à 14 heures à Paris pour la confé­rence de presse de ren­trée qui don­ne­ra les chiffres de créa­tion d’é­cole, les ten­dances et ana­ly­se­ra les défis juri­diques et pra­tiques qui se posent après cette déci­sion. Et le 27 août à 18h pour le Face­book live de questions/réponses concrètes pour les familles, les créa­teurs et direc­teurs d’école.

    Ren­dez-vous le 30 Août 2021 pour la Confé­rence de Presse de « Créer son École ». Réser­vez votre place à liberte@educfrance.org

    CONTACT PRESSE

    • Anne Cof­fi­nier : 06 34 38 90 30 anne@educfrance.org
    • Axelle Girard : 07 63 62 73 92 liberte@educfrance.org

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

  • La France réaffirme son rang de première puissance militaire européenne, par Ludo­vic Lavaucelle.

    « Il y a des décen­nies où rien ne se passe ; et il y a des semaines où des décen­nies se pro­duisent » aurait dit Lénine. La der­nière semaine de sep­tembre fai­sait par­tie de ces der­nières, selon Aris Rous­si­nos, ancien repor­ter de guerre grec pour le jour­nal en ligne Unherd (voir l’article en lien ci-des­sous). L’annonce d’un pacte de défense fran­co-grec fin sep­tembre, assor­ti d’un contrat d’achats de trois fré­gates de défense et d’intervention (FDI) plus une en option (pour près de 3 mil­liards d’euros), illustre la rapide évo­lu­tion du théâtre sécu­ri­taire en Europe.

    Le Minis­tère grec de la Défense a fina­le­ment choi­si la France (face à l’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas et les Etats-Unis) pour ren­for­cer la marine grecque après une décen­nie d’austérité. Ces quelques fré­gates de nou­velle géné­ra­tion changent véri­ta­ble­ment la donne en Mer Egée, grâce au savoir-faire fran­çais. Les Grecs sont aus­si sus­cep­tibles d’acheter à la France plu­sieurs cor­vettes de classe Gowind. Si l’on ajoute les 24 chas­seurs Rafale récem­ment acquis, la France est deve­nue leur pre­mier four­nis­seur d’armes alors que le risque d’un conflit ouvert avec la Tur­quie paraît de plus en plus élevé.

    Comme pour l’accord « AUKUS » entre puis­sances anglo-saxonnes dans le Paci­fique, l’importance de ce contrat réside plus dans l’alliance qu’il sous-tend que dans la valeur des équi­pe­ments qu’il délivre. Le « par­te­na­riat de défense et d’assistance com­mune » pré­voit qu’en cas d’agression sur le ter­ri­toire d’un des alliés, l’autre vien­dra à son aide, y com­pris par les armes ». Fran­çais et Grecs font déjà par­tie de l’OTAN comme la Tur­quie d’ailleurs… Or, quand les manœuvres turques en Mer Égée ont failli dégé­né­rer en conflit ouvert l’année der­nière, la France est le seul pays euro­péen et le seul membre de l’OTAN, à avoir sou­te­nu la Grèce. L’accord annon­cé for­ma­lise donc cette rela­tion stratégique.

    Le Pré­sident Macron a dit lors de la signa­ture que les Euro­péens ne devaient plus être naïfs face à la mon­tée de puis­sances agres­sives mais prendre leurs res­pon­sa­bi­li­tés pour se faire res­pec­ter… Le Pre­mier Ministre grec a ren­ché­ri en affir­mant que cette alliance allait au-delà des obli­ga­tions en tant que membres de l’OTAN comme de l’Union Euro­péenne. Elle consti­tue, selon lui, un pre­mier pas vers une auto­no­mie de défense européenne.

    Pas ques­tion donc, pour Emma­nuel Macron, de rem­pla­cer l’OTAN mais de faire mon­ter un pôle euro­péen qui serait auto-suf­fi­sant. Une telle stra­té­gie per­met d’aller dans le sens de la vision amé­ri­caine tout en met­tant l’Allemagne au pied du mur… La pre­mière éco­no­mie euro­péenne ne jure que par l’OTAN mais reste aux abon­nés absents quand il s’agit de sou­te­nir une auto­no­mie de défense euro­péenne. Paris a donc vu un « angle d’attaque » effi­cace pour s’affirmer comme le nou­veau patron mili­taire en Europe.

    Cette alliance ren­for­cée est visi­ble­ment approu­vée par Joe Biden, sans doute heu­reux de trou­ver un moyen peu oné­reux de com­pen­ser la perte pour la France du « contrat du siècle » avec la marine aus­tra­lienne. Les auto­ri­tés grecques ont répé­té que l’OTAN res­tait au cœur de leur stra­té­gie de défense. Quel contraste avec la Tur­quie ! Dans le même temps, Erdo­gan ren­con­trait Pou­tine à Sot­chi pour dis­cu­ter d’un ren­for­ce­ment de leur coopé­ra­tion mili­taire. Les Turcs veulent ache­ter plus de mis­siles sol-air S‑400 et lan­cer un pro­gramme de déve­lop­pe­ment avec les Russes pour de nou­veaux navires de com­bat, des moteurs à réac­tion et des sous-marins…

    Les rela­tions entre Washing­ton et Anka­ra sont deve­nues gla­ciales. La Grèce est en passe de rem­pla­cer la Tur­quie comme par­te­naire des Amé­ri­cains dans la région. La base aéro­na­vale de Sou­da en Crète est ouverte aux forces US. Les Grecs leur ont aus­si accor­dé l’accès aux bases aériennes en Thes­sa­lie et au port d’Alexandropouli en Thrace. Mesut Hak­ki Casin, le conseiller défense d’Erdogan, menace ouver­te­ment d’attaquer les Amé­ri­cains res­tant en Syrie et d’attaquer en Thrace. Les Turcs se sentent mena­cés d’encerclement. D’une part, les Grecs ren­forcent leurs capa­ci­tés mili­taires. D’autre part, les Amé­ri­cains ont construit une alliance au Moyen-Orient dont les membres sont hos­tiles à Anka­ra (Ara­bie Saou­dite, Egypte, Israël, Emi­rats Arabes Unis).

    Washing­ton semble donc favo­rable à lais­ser Paris for­mer une sorte de sous-divi­sion de l’OTAN dans cette région sen­sible. Le Pré­sident Macron a pris à contre-pieds l’Allemagne et les pays de l’Est qui cher­chaient à res­ter direc­te­ment sous pro­tec­tion U.S. C’est cohé­rent avec la stra­té­gie amé­ri­caine de se concen­trer sur la menace chi­noise. D’ailleurs, les Amé­ri­cains lais­se­raient bien aux Bri­tan­niques le par­rai­nage d’une alliance avec les Scan­di­naves et les Pays Baltes – quand ils auront refor­mé leur armée…

    En appa­rence, l’alliance fran­co-grecque per­met de sau­ver l’OTAN et donc l’hégémonie amé­ri­caine tout en affir­mant la pri­mau­té mili­taire fran­çaise en Europe. C’est pour­tant, dit Rous­si­nos, une pre­mière étape majeure vers une obso­les­cence de l’alliance for­gée pen­dant la Guerre Froide.

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

  • Obsession du blasphème et nouvelles sacralités, par Ingrid Riocreux.

    La presse satirique apparaît à la Révolution française. Elle s'emploie bien sûr à détruire ce qui est sacré, Dieu et le roi. Le pli est pris, la caricature révèlera les antagonismes et les journaux se multiplieront, jusqu'à Charlie Hebdo. Qui tire sur de vieilles ambulances, comme l'Église, avant de s'attaquer au tank musulman.

    11.jpgContradiction ? Incohérence ? Observant, dans un récent article, les réactions politiques à l’assassinat de Samuel Paty par Abdoullakh Anzorov, j’exprimais la crainte que « notre courageux collègue » fût mort pour rien, car déjà les propos des uns et des autres enrobaient, évitaient, contournaient les faits. Pourtant, lorsque les enseignants d’un collège du Var refusent unanimement de rebaptiser leur établissement « Collège Samuel Paty », je les approuve. Moi aussi, j’aurais opposé mon refus à cette initiative, non par peur (même si ce choix, en effet, mettait clairement une cible dans le dos de tous les enseignants de l’établissement), mais plutôt parce que j’aurais eu l’impression d’apporter une collaboration coupable au malentendu résultant d’un état d’esprit largement formé par les médias qui, sous prétexte d’autoriser à rire du sacré, imposent en réalité une sacralité de substitution, comme nous allons le montrer.

    Alors, que fut le « courage » de Samuel Paty ? Et toute gêne face à ce que permet la liberté d’expression doit-elle être comprise comme un appel à la limiter par une reconnaissance d’un prétendu délit de blasphème ?

    Souvenons-nous, c’était en 2011 : l’œuvre d’Andres Serrano intitulée Piss Christ est exposée à Avignon, suscitant manifestations et réactions véhémentes de la part des catholiques ; la même année, une pièce de Roméo Castellucci intitulée Sur le concept du visage du Fils de Dieu fait scandale à Paris. Et un refrain s’impose : « ils n’oseraient pas s’en prendre à l’islam ». L’horrible attentat perpétré par les frères Kouachi contre la rédaction de Charlie Hebdo le 7 janvier 2015 a définitivement relégué dans le passé ce procès en lâcheté. « Ils » ont osé s’en prendre à l’islam et ils l’ont payé de leur vie. Par suite, si Samuel Paty avait voulu éviter toute prise de risque, il aurait choisi d’aborder le sujet de la liberté d’expression face au fait religieux à travers l’une des deux œuvres que je viens de mentionner et il aurait appelé ses élèves à réfléchir sur la désapprobation des chrétiens et ses moyens d’expression. Sa prise de risque a été double : d’abord, il a montré des caricatures de Mahomet à des jeunes qui (et c’est un phénomène que tous les professeurs constatent) ont beaucoup de difficultés à distinguer l’exposé pédagogique d’une position de l’adhésion à cette position ; ensuite il a choisi, en connaissance de cause, l’exemple d’une religion qui dans sa forme rigoriste – laquelle a le vent en poupe – venge le blasphème par la mort.

    Obligation de sourire et liberté limitée

    L’Église catholique ne prévoit aucune sanction pour le blasphème dans son droit canon ; infraction au deuxième commandement de Dieu, il est, au même titre que les autres fautes, un péché que le croyant est appelé à confesser et pour lequel il doit faire réparation et pénitence, mais ne risque ni l’excommunication ni, cela va de soi, la mort ! Certes, Jésus Christ condamne fermement le blasphème contre le Saint-Esprit, mais qui peut le commettre, sinon un chrétien ? Cela prouve, et c’est ce que nous voulons montrer ici, que le blasphème, outrage verbal au divin, est une faute d’initiés qui suppose la reconnaissance du caractère sacré de sa cible et que, par conséquent, aucun délit de blasphème ne saurait être reconnu par un État. Si Jésus et Mahomet ne sont pour le caricaturiste que des fous ou des gourous manipulateurs, son dessin ne s’en prend pas au sacré ; au contraire, il prétend dénoncer une supercherie. Le pauvre capitaine Haddock qui s’attire la réprobation des Hindous en suggérant de pousser puis en essayant d’enjamber une vache sacrée qui entrave la chaussée, ne commet pas de sacrilège (outrage au divin par les actes) : il veut juste pousser une vache ! En caricaturant Jésus ou Mahomet, en enjambant une vache sacrée, l’athée ne commet ni blasphème ni sacrilège, mais il offense gravement les adeptes d’une religion : ce distinguo est fondamental.

    Il ne s’agit donc absolument pas de savoir s’il faudrait reconnaître un délit de blasphème, mais de rappeler que la liberté d’expression autorise les offenses aux croyants. Cela étant posé, je trouve très agaçant que la défense de la liberté d’expression se double d’une obligation de sourire aux offenses qui nous sont faites. Si l’on peut glorifier la liberté d’expression, personne n’est obligé d’apprécier tout ce qu’elle autorise puisque, par définition, elle rend possibles la critique, la moquerie, la dérision, autant de choses peu agréables, que nul n’est tenu d’accueillir avec joie quand il en est la cible (ou quand elles prennent pour cible ce qui lui est cher). On peut défendre la liberté d’expression mais s’insurger contre la représentation insultante d’une personne pour nous sacrée. Un Dieu qui commande de tuer me paraît peu digne de vénération mais on peut bien, sans sortir une arme, faire savoir que l’on est froissé ; sur ces matières, c’est même un puissant devoir moral. Manifestations autorisées, événements à visée contestataire : la loi permet d’exprimer sa désapprobation face à une œuvre qui nous révulse. Chacun est à sa place et sait ce qu’il risque : l’auteur d’un dessin offensant peut s’attendre à des expressions de colère et ceux qui réagissent ainsi savent ce qu’ils encourent si, de la manifestation, ils passent à la dégradation ou à la violence. C’est à l’État de garantir, par ses lois et ses forces de police, la sécurité et la liberté d’expression des offenseurs et des offensés.

    Caricatures condamnées

    Mais on assiste actuellement à une très pernicieuse subversion lexicale. Les caricatures réalisées par Charlie Hebdo sont passées du statut d’occurrence de la liberté d’expression au statut de symbole de cette liberté. Les hommages à Samuel Paty ont tourné à la glorification des images qu’il avait présentées à ses élèves ; or, si le seul fait de les montrer justifiait, aux yeux de son assassin, qu’on le mît à mort, le professeur ne les avait présentées que pour illustrer, sans jugement de valeur, ce que permet la liberté d’expression. Ce malentendu a donné l’impression à beaucoup de gens qu’honorer Samuel Paty revenait à approuver les caricatures. En effet, par un ironique paradoxe, il est devenu suspect de critiquer ces dessins, qui ont acquis une forme de sacralité. Le symbole de la critique devient incritiquable ; le symbole de la liberté d’expression se mue en arme pour la limiter. Une nouvelle sacralité se substitue à celle des religions, avec ses procès en blasphème qui ne disent pas leur nom.

    De fait, la sacralisation des caricatures de Charlie Hebdo sert de paravent à des démissions graves. Nous l’avons vu tout récemment : en janvier dernier, Xavier Gorce, caricaturiste au Monde, publie un dessin qui s’attire les critiques d’associations appartenant à la mouvance LGBT(etc.), lesquelles le jugent « transphobe ». La rédaction du quotidien ayant présenté ses excuses aux offensés, le caricaturiste, outré, démissionne. Offenser les chrétiens et les musulmans relève de la liberté d’expression ; offenser les transgenres est sacrilège. La cancel culture impose les nouvelles bornes de la liberté d’expression et, avec ses groupuscules d’excités fanatiques qui se mordent entre eux quand ils ne jouent pas la comédie de l’intersectionnalité, elle pourrait bien être autant à craindre pour la vie du débat public que les barbus à longs couteaux. Nos institutions, nos universités, notre presse sauront-elles protéger la liberté d’expression contre ceux qui la portent en étendard pour mieux l’anéantir ?

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    Source : https://www.politiquemagazine.fr/