République, République, vous avez dit République ?
Par Jean-Philippe Chauvin
Je n’écris pas beaucoup en ce début d’année, ce qui ne m’empêche pas, Dieu merci, de lire, d’écouter et de discuter politique, entre autres. En fait, je suis surtout en train de corriger des devoirs d’histoire-géographie de Seconde au milieu d’une actualité qui tourne à la rubrique nécrologique permanente : après Delpech, Galabru et Courrèges, c’est au tour de David Bowie de monter au Ciel… « Sale temps pour les saltimbanques », pourraient soupirer Audiard ou Gainsbourg s’ils étaient encore là pour le faire. Nécrologie, et commémorations, ces dernières semblant ne plus devoir cesser en cette République qui, a défaut d’une véritable mémoire, s’invente une histoire et une légitimité, au risque de se brouiller un peu plus avec les réalités et avec les sentiments d’un pays réel qui se sent, sans doute, délaissé ou méprisé.
Ainsi, je suis agacé par la véritable sacralisation (qui n’est pas vraiment récente, à bien y regarder) d’une République dont on vante les valeurs sans interroger les fondements, philosophiques comme historiques, même si je constate aussi que nombre de personnes entendent « France » quand les officiels prononcent, rituellement, le mot « République », comme si les deux se confondaient forcément et comme s’il n’y avait de valeurs civiques que dans ce régime qui se drape dans la toge de Marianne, y cachant parfois quelques poignards destinés au César du moment, fût-il « normal »…
Je me souviens de l’embarras de nos gouvernants quand une attaque terroriste ayant endeuillé le Danemark au printemps, ceux-ci reprenaient le discours officiel de janvier 2015 sur les « valeurs » en évitant, parfois bien maladroitement, de rajouter le qualificatif de « républicaines » pour un pays qui est et reste, envers et contre tout, un Royaume qui n’a guère de leçons de civisme et de démocratie à recevoir de quiconque, comme nombre de pays scandinaves et la Belgique voisine, mais aussi l’Espagne, le Royaume-Uni et le Luxembourg, souvent membres d’une Union européenne fondée sur des principes démocratiques reconnus à défaut d’être toujours respectés par les institutions d’icelle.
Bien sûr, on peut aussi entendre le mot République au sens latin du terme qui signifie « la chose publique » ou « le bien commun », et, dans ce cas, un monarchiste, même s’il est « réactionnaire » ou maurrassien, et encore plus s’il se réfère aux monarchiens de 1789 ou aux catholiques sociaux du XIXe siècle, peut reprendre le terme sans barguigner, dans le sens qu’a développé, en son XVIe siècle, le juriste Jean Bodin, « théoricien » de la Monarchie absolue… Mais, le plus souvent, nos gouvernants ne (re)connaissent pas cette généalogie politique du mot et se contentent d’y mettre ce qui peut s’apparenter à « leur » conception du Pouvoir et de sa légitimation, et de n’y voir qu’un régime politique défini, à la façon d’Anatole France (qui a compris bien des choses), que comme « l’absence de roi »…
Cette République-là, à la merci des grands féodaux et de leurs partis, est justement celle que je dénonce et combats, et pour laquelle je n’ai pas de mots assez durs, non par haine d’elle-même, mais bien au contraire, par amour de la Chose publique, du Bien commun, de la nation française et de ses particularités et diversités… Cette République qui oublie les petits et les pauvres, cette République qui méprise les provinces et les villages, cette République qui parle de valeurs mais pense d’abord Bourse et compétitivité, cette République qui se verdit le temps d’une COP 21 et bétonne le jour d’après, de Notre-Dame-des-Landes (ce n’est pas fait !) aux entours de nos bourgs ruraux (la « rurbanisation », disent-ils, mais qui est une véritable artificialisation inutile des terres quand les centres-bourgs ont tant de maisons disponibles à remplir et à restaurer)… Cette République qui inscrit dans la pierre de ses bâtiments officiels la liberté comme pour être bien sûre qu’elle ne bouge plus de ses frontons et dans le cœur des gens, et qu’elle ne menace plus son règne… Si Bernanos, cet amoureux passionné de la liberté, était royaliste, ce n’est ni un hasard ni une surprise, comme l’a rappelé si souvent son disciple le plus fervent, Sébastien Lapaque, mais la simple constatation que la République enfermait la liberté dans ses textes et son Journal officiel, ce que moquaient aussi les Camelots du roi qui n’hésitaient pas, dans leurs chants joyeux, à clamer qu’ils « se foutaient de ses lois »…
Le professeur d’histoire que je suis n’a guère de chances, en étudiant les siècles passés, de devenir partisan d’une République née dans la Terreur des années 1792-94, et qui s’est tant de fois déshonorée, à l’intérieur comme à l’extérieur, préférant ses « coquins » et ses « valeurs » plutôt que la justice sociale (une formule qu’elle n’a même pas inventée puisque c’est… le roi Louis XVI qui l’a valorisée le premier !) et les libertés concrètes. Je me souviens, dans mon adolescence, avoir pleuré de l’aveuglement et de la lâcheté de la IIIème République face aux totalitarismes, de son hypocrisie profonde et bien pensante, tout comme je me souviens aussi de mes éclats de rire quand je lisais « La bande des Ayacks », ce roman de jeunesse qui s’en prenait à une société des adultes qui fleurait fort le monde des officiels de la République et qui « nous » vengeait de cette dernière… Est-ce un hasard, en définitive, si j’ai découvert la Résistance, celle des années sombres de l’Occupation allemande, dans les livres du colonel Rémy, ce résistant aux idées catholiques et royalistes (il sera abonné jusqu’à sa mort, en 1984, à l’hebdomadaire monarchiste Aspects de la France…) ? Mes deux premiers livres reliés cuir (de couleur bleu) étaient frappés de la croix de Lorraine et signés de Rémy, et, sans le comprendre alors, ils ont sans doute préparé le terrain à mon engagement royaliste ! D’ailleurs, dans ceux-ci, je n’ai pas souvenir d’avoir vu évoquées les valeurs républicaines dont on nous rabat les oreilles en tous lieux tandis que notre République déroule le tapis rouge aux dignitaires saoudiens d’un régime féodal et obscurantiste qui salit le nom de Monarchie… •
On le sait depuis toujours : la liberté ne s’use que si l’on ne s’en sert pas
La réplique scrupuleuse d’un chef-d’oeuvre du Caravage a retrouvé la place de l’original, probablement vandalisé puis détruit.
Après l'agression de pompiers dans le quartier des Jardins de l'Empereur à Ajaccio, la Corse a connu plusieurs jours de tension...
« Le terrorisme ne détruira pas la République ; c'est la République qui le détruira » ; « La riposte de la République sera totale » ; « Les associations qui s'en prennent aux valeurs de la République seront dissoutes »... Du président François Hollande au Premier ministre, Manuel Valls, en passant par le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, les propos martiaux de nos dirigeants politiques, réagissant à la tuerie de masse du 13 novembre, ont été salués unanimement. Tout juste quelques rares observateurs ont-ils pu faire remarquer qu'ainsi placés sous les auspices de la République, ils avaient l'immense avantage d'exonérer ceux qui les prononcent de toute forme de responsabilité dans ces tragiques évènements. Événements dont la nation en deuil pourrait légitimement tenir rigueur à ses représentants...
Après le premier tour des élections régionales, nous avons assisté à un retour du Front républicain face au FN. Quel est le sens politique de ce front contre front ?
La politique comme champ de ruines ou espace de renouveau possible ? La tambouille électorale considérée comme un des beaux arts ou l'expression d'un peuple qui utilise enfin son droit de vote autrement que comme gadget plus ou moins utile ? Chacun aura compris que les régionales, cette année, sont beaucoup plus que les régionales. Le découpage des apprentis sorciers n'a pas tenu une seconde devant le brutal retour à la réalité.


Un livre vient de paraître dont la pertinence politique est aujourd’hui d’une absolue évidence. Accessible à tous. Le moment est venu de dire ce que j’ai vu (Albin Michel) de Philippe de Villiers éclaire de l’intérieur le drame français. Comment se fait-il que la France, l’un des pays les plus puissants au monde, soit arrivé à ce point de décrépitude en quelques décennies ?
Il y a pire que nos ennemis terroristes : le reniement de soi. C’est en sachant pourquoi nous nous battons que vous vaincrons les barbares.