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Défense nationale - Page 15

  • Et si l'on profitait de l'élection de Trump pour en finir avec l'Otan ?

     

    Mur-bleu gds.jpgDonald - le cauchemar de la cléricature médiatique - vient juste d'annoncer la première mesure qu'il prendra, dès son entrée en fonction le 20 janvier : il retirera les Etats-Unis du Traité commercial Trans-Pacifique (TPP), signé en 2015 par douze pays de la région Asie-Pacifique, mais sans la Chine. À la place, il veut négocier des traités « bilatéraux ».

    Mais il a déjà parlé, aussi, des bases états-uniennes dans le monde entier, déclarant que les pays hôtes de ces bases devaient contribuer plus largement aux dépenses de ces dites bases, faute de quoi... il les fermerait ! « America first ! », en langue états-unienne, cela se dit aussi « My money first ! », comme le disait une autre grande personnalité anglo-saxonne, Margaret Thatcher...

    La visite illico - le jeudi 17 novembre ! - de Shinzo Abe auprès du nouveau « président élu » était à cet égard révélatrice de la frousse immense que ce propos avait provoqué, et de la servilité (ou de la dépendance, c'est tout un) de certains, à l'égard des Etats-Unis...

    Jusque-là, et s'il ne s'agissait que de cela, nous autres, Français et Européens ne serions pas concernés. Mais Donald a également étendu son propos iconoclaste à.… l'Otan, qu'il a qualifié - à juste titre - d’ « obsolète »  et contre laquelle il s'est littéralement déchaîné. Et, là, nous sommes directement concernés ; et la chose est d'importance, méritant que l'on s'y arrête.

    Donald s’est plaint également que les Etats-Unis investissaient « une part disproportionnée » d’argent dans l’OTAN par rapport à celle investie par les autres pays membres, et qu’il n’hésiterait pas à dissoudre l’alliance.

    « Nous les protégeons, nous leur apportons une protection militaire et bien d’autres choses encore, et ils arnaquent les Etats-Unis. Et, vous savez ce que nous faisons contre cela ? Rien », a-t-il par exemple déclaré lors de son meeting politique du 2 avril, dans le Wisconsin.

    Barack Obama avait, alors, évidemment protesté, car il est, lui, le maître du « chien » (l'Europe), qu'il tient solidement en laisse. Néanmoins, la position de Donald a été appuyée par beaucoup, notamment par un Justin Raimondo, écrivain et rédacteur en chef du site internet Antiwar, qui a noté qu’avec son idée « d’abandonner l’ancienne version de l’OTAN pour la remplacer par une sorte d’opération multilatérale anti-terroriste… Donald Trump met sur la table une question qui n’a pas été évoquée depuis l’époque de Bob Taft » (Bob Taft a été le gouverneur républicain de l'Etat de l'Ohio de 1999 à 2007).

    Et Bernie Sanders, candidat malheureux à l’investiture démocrate, s’est également plusieurs fois exprimé contre l'élargissement de l'OTAN en Europe, notamment aux frontières de la Russie, suggérant qu’une nouvelle coalition, qui inclurait la Russie et les pays de la Ligue arabe, devrait être créée pour faire face aux enjeux sécuritaires contemporains. 

    On sait, enfin, que Donald n'a jamais fait mystère de son désir de « parler » avec Poutine : en clair, de s'allier de fait avec lui, sur le terrain, contre le terrorisme islamiste et pour régler l'affaire syrienne et liquider DAECH. 

    François Fillon, non plus, n'a pas caché que, s'il était élu, lui aussi « parlerait » avec Poutine, afin d'éviter une « réconciliation USA-Russie par-dessus notre tête », ce qui achèverait définitivement de nous éliminer de la région. 

    On le voit : en se gardant bien sûr de tout optimisme excessif et de toute naïveté béate, des fenêtres de tir peuvent très bien s'ouvrir, très bientôt - à la fois en Europe et au Moyen-Orient, pour commencer - pour une diplomatie française qui ressusciterait de ses cendres, et qui retrouverait la place qui est la sienne, elle qui « manque » cruellement, aujourd'hui, à tout le monde, et partout... 

  • Histoire & Actualité • Aux armes, citoyens dentistes ! C’était écrit ...

     

    par Jérôme Leroy

    Si la réalité dépasse parfois la fiction, c'est que la fiction précède souvent la réalité. La littérature prévoit l'avenir. Cette chronique le prouve. Avec le talent, la plume, l'humour, l'érudition, la sagacité alerte de Jérôme Leroy. [Causeur, 11.11] Si la « littérature prévoit l'avenir », il arrive parfois - pour le meilleur ou pour le pire - qu'elle contribue à le former. Ainsi s'il advenait qu'un nouveau patriotisme « devienne dangereusement révolutionnaire ». S'il venait à l'idée de « la Garde nationale voulue par Hollande » de le chasser de Paris « et qu’il soit obligé de se réfugier à Versailles pour les derniers mois de son mandat. » Comme au temps de la Commune de Paris ... Et même, imaginons qu'il vienne à l'idée de ladite Garde Nationale, avec quelques autres, voire beaucoup d'autres, de retourner ses nouvelles armes contre les hommes du Système ? Contre le Système lui-même ? La littérature permet de rêver. Parfois, aussi, de faire l'Histoire. Ainsi, pour en finir avec les guerres des partis religieux, le Parti des Politiques, avait-il demandé en 1594 « un Roi qui donnera ordre à tout ». Ils l'exprimèrent dans la Satire Ménippée et ce fut le règne réparateur d'Henri IV.   Lafautearousseau     

     

    4141331940.jpg« La Garde nationale de Buchy était venue s’adjoindre au corps des pompiers, dont Binet était le capitaine. Il portait ce jour-là un col encore plus haut que de coutume, et, sanglé dans sa tunique, il avait le buste si roide et immobile que toute la partie vitale de sa personne semblait être descendue dans ses deux jambes, qui se levaient en cadence, à pas marqués, d’un seul mouvement. » Aurait-on déjà favorablement répondu dans nos cantons à la création de la Garde nationale qui « concourt, le cas échéant par la force des armes, à la défense de la patrie et à la sécurité de la population et du territoire » annoncée au Journal officiel du 14 octobre 2016 ? Non, puisqu’il s’agit ici d’une scène de Madame Bovary.

    L’appellation « Garde nationale » a en effet un genre très XIXe. On la croise chez un Balzac réfractaire à l’uniforme, arrêté à son domicile en 1836 par un « ignare dentiste » qui cumule son « affreuse profession » et « la fonction atroce de sergent major ». Balzac aurait pu avoir honte, surtout s’il avait pris connaissance de l’enthousiasme civique et connecté de Razzy Hammadi, député de Seine-Saint-Denis : « J’ai candidaté via mon smartphone. J’attends une réponse de la part de la réserve pour savoir où mon profil pourrait être utile. Tous les citoyens et citoyennes sont appelés à se mobiliser. » Flaubert, en revanche, est aussi bon patriote qu’Hammadi : il est prêt à rejoindre la Garde nationale après le désastre de 1870 comme il l’écrit à sa nièce Caroline : « Si le siège de Paris a lieu, je suis très résolu à ficher mon camp avec un fusil sur le dos. »

    gn-pleinevie.fr_.jpgCette idée-là me donne presque de la gaieté. À vrai dire, il n’en fera rien, à la différence de Jules Vallès qui, quelques mois plus tard, rejoint la Garde nationale parisienne qui avait pris fait et cause pour la Commune comme il l’écrit dans Le Cri du peuple : « Gardes nationaux de Paris, le monde vous regarde, et nous qui aimons la patrie et la République, nous vous acclamons ! Votre drapeau est vraiment aujourd’hui le clocher de la ville en deuil, autour duquel tous doivent se presser, sans regarder s’il y a au bout un lambeau de toile bleue ou un bonnet rouge. » La Garde nationale qui existait depuis la Révolution sera dissoute en 1871 suite à cet événement. C’est qu’il arrive parfois que le patriotisme devienne dangereusement révolutionnaire. Et il ne manquerait plus que la Garde nationale voulue par Hollande le chasse de Paris et qu’il soit obligé de se réfugier à Versailles pour les derniers mois de son mandat. 

    Jérôme Leroy
    Ecrivain et rédacteur en chef culture de Causeur

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  • Sécurité et défense : sur une conférence du général Jean-Marie Faugère

     

    par PM 

    Quelles sont les perspectives de sécurité et de défense dans la France d’aujourd’hui ? Le 11 octobre dernier, le général d’armée (2s) Jean-Marie Faugère, ancien inspecteur général des armées, donnait une conférence aux « Mardis de Politique magazine ». En voici un résumé pris sur le vif.

     

    4146061327.jpg« La situation que connaît la France, à la suite des attentats de 2015 et 2016 était largement prévisible, car l’évolution de la jeunesse de nos banlieues travaillée par l’islam radical est connue depuis plus de vingt ans. On aurait pu au moins s’y préparer.

    Nous assistons au renoncement de l’Etat depuis trente-ans.

    Le monde politique ne travaille pas à son niveau, et délaisse ses responsabilités à une haute administration qui ne s’intéresse jamais aux finalités des choses, mais à leur simple gestion quotidienne, à échéances électorales. Nos responsables n’ont aucune vision tournée vers l’avenir et n’appuient leurs politiques, notamment en matière de défense et de sécurité,  sur aucunes études prospectives.

    Identifier l’ennemi

    Qui est l’ennemi aujourd’hui ? Laissons de côté, ici, la Russie dont on fait un épouvantail ; elle ne menace en rien nos sociétés européennes dans le court terme. De même, la Chine la Corée du Nord, un conflit indo-pakistanais laisseraient aux avant-postes les USA, bien avant de nous toucher. En revanche, sur notre pourtour européen, l’arc de crise islamiste est un péril qui monte et qui s’appelle l’islam radical. Voilà la vraie menace.

    Toute la politique de défense et de sécurité depuis la publication de Livres blancs – 1994, 2008 puis 2013 – est définie par les recommandations d’experts qui les rédigent sans porter, au sens juridique, la responsabilité de leurs erreurs d’analyse. Certes, le Président de la République avalise leurs propositions. Mais, ces exercices manquent de sincérité et, s’ils décrivent bien la menace, ils ne cessent de prôner, à contre-courant, des réductions d’effectifs, de crédits et de contrats opérationnels.

    Il fallait, dans l’urgence et l’incertitude une réponse militaire à un terrorisme trop vite qualifié de « militarisé » : voilà ce que l’on a argué alors que ce n’est pas foncièrement, sur le territoire national et à ce stade d’attentats, un problème qui réclame un traitement de la part des armées.

    Si, effectivement, on a affaire à un « ennemi de l’intérieur » – acception récusée par nos responsables politiques -, les auteurs individuels de ces actes restent des criminels de droit commun.

    Le continuum sécurité-défense

    La première réponse doit être celle des services de renseignement, des unités de police et de gendarmerie et, in fine, de la justice. Quand ces moyens sont dépassés, il est normal qu’on recoure à l’armée. Cependant, il n’y a pas, aujourd’hui, de cadre juridique associé à cet engagement ni de cadre d’emploi qui soit foncièrement différent de ceux de simples « super-vigiles ».

    Quand on engage l’armée sur le terrain, il faut lui désigner un ennemi clairement identifié. Sinon, on créé des ambiguïtés dans les missions, dans les rôles et dans les responsabilités d’intervention entre les forces de l’ordre et l’armée, car nous n’avons pas assez réfléchi au cadre juridique et à leur doctrine d’emploi respective.

    Quand vous regardez les professions de foi politiques sur les thèmes de défense, les candidats ne s’intéressent qu’à la politique des moyens sans aller plus loin dans la réflexion comme la finalité et le rôle de l’armée sur le terrain national en tant que dernier recours. Car, il faut penser à des scénarios plus extrêmes, désormais très crédibles où l’armée tiendrait un tel rôle.

    Quand vous êtes un militaire, vous ne pouvez pas dire qu’on peut se satisfaire de la situation. Sur le plan matériel, nous ne sommes pas à la hauteur d’une armée moderne.

    La notion de continuum sécurité-défense largement mise en avant dans les discours,  entretient la confusion chez nos concitoyens entre militaires (des armées) et forces de l’ordre, et l’on pense que le travail des uns peut devenir le travail des autres. Or, le fait de faire intervenir l’armée devrait marquer une rupture. Il y a une confusion des responsabilités. Il faut établir une vraie doctrine d’emploi.

    Quel rôle pour l’armée ?

    Que l’armée reste le dernier recours, et non un moyen pour combler les défaillances numériques des forces de l’ordre. Tout cela n’est pas très sain.

    Dans la perspective d’événements encore plus graves, les armées, sur le territoire national, ne peuvent pas être mises à disposition des préfets par voie de réquisition ou de demandes de concours, mais doivent être employées de façon centralisée par le commandement militaire sous l’autorité d’emploi du Premier ministre. On ne peut plus laisser les préfets donner des missions floues ou indéfinies.

    Dans cette lutte anti-terroriste, l’action de nos services de renseignement doit être améliorée. Face à un problème, la seule réponse de la haute-administration est, en général, de réorganiser. On n’est pas devant un problème d’organisation mais devant un besoin de faire évoluer l’état d’esprit des responsables des administrations : les hommes à la tête de ces organismes coopèrent mal et se croient trop souvent concurrents sur le terrain.

    Concernant l’armée de terre, sur 66 000 hommes projetables (en 2017, 77.000 h.) seuls les 20 régiments d’infanterie constituant 16 000 hommes sont adaptés à un engagement de type Sentinelle : entre les opérations extérieures et le territoire national, les vrais professionnels du combat sont donc déjà tous employés ! Voilà la situation des armées.

    On tient tout un discours sur la réserve et la garde nationale : le plan annoncé le 12 octobre dernier ne consiste en fait qu’à regrouper sous ce « label » les réservistes militaires de armées et de la gendarmerie et les réservistes civils de la police. Cette évolution plus médiatique que révolutionnaire a le grand mérite de préserver la réserve militaire au sein de l’armée et, semble-t-il de promouvoir de réels efforts en sa faveur ; reste à voir la doctrine d’emploi qui lui sera attribuée sur le territoire national et les moyens associés.

    Quant au rétablissement de la conscription, aucune administration n’est capable aujourd’hui d’incorporer 700 000 potentiels conscrits qui constituent désormais l’effectif d’une classe d’âge.

    Revenir à la source du problème

    Cela étant, au regard des grandes « boucheries » de l’histoire, au siècle dernier notamment, permises par le modèle de la conscription, il est assez sain de revenir aujourd’hui à des armées de métier si tant est qu’elles aient les moyens nécessaires à la protection de la nation et de la population.

    Il y a certes un problème de formation militaire pour nos élites et un service militaire pourrait s’avérer utile pour elles. Mais pour que le reste de la jeunesse apprenne à se lever le matin et à se raser, l’armée n’est pas la solution ; il ne fallait pas détruire les familles et démolir l’Éducation nationale : il faut revenir à la source du problème.

    Puisque nous sommes en guerre aujourd’hui, il faut passer à la vitesse supérieure dans le domaine des moyens. De la totalité de la dépense publique annuelle, l’État en dépense 3,1% pour l’armée et 57% pour les prestations à caractère social !

    Dans le domaine de la décision politique, avant de décider d’une intervention militaire par exemple, on pourrait définir un cercle d’experts – dont des militaires, les premiers concernés – pour éclairer les options à retenir par le Président de la République.

    Or, apparemment, ce dernier, pour se faire conseiller, ne fait pas appel à un expert de la zone d’opération concernée ! De même, il n’y a pas de Conseil de Sécurité à l’américaine pour donner de l’impulsion aux administrations gestionnaires et contrôler leur efficacité. » 

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  • La défense, une volonté politique

     

    par Jean-Marie Faugère 

    Dans un monde en mutation où les foyers de tensions se multiplient, les armées européennes se trouvent dans une situation de grande fragilité, comme elles le furent rarement dans leur histoire. à la France appartient le rôle historique de prendre l’initiative d’une restauration effective de nos capacités opérationnelles.

     

    Jean-Marie-Faugère-600x339.jpgL’actualité des engagements de nos armées, qu’elles soient déployées sur des théâtres extérieurs ou en intervention sur le sol métropolitain (opération Sentinelle), les soumet à une pression croissante dans l’exécution de missions toutes aussi différentes les unes que les autres. Pression qui ne saurait diminuer, sauf à considérer que la lutte contre l’état islamique trouverait un terme heureux auquel nul ne croit. Ou que le désordre mondial en expansion s’évanouirait miraculeusement !

    Nos forces militaires sont ainsi engagées dans un quotidien que les gouvernements successifs n’ont pas su, ou pas voulu, envisager. Pas plus qu’ils n’ont su, ou voulu, anticiper les crises à venir. Mais l’un était prévisible et les autres auraient dû faire l’objet d’une analyse prospective sans tabous. Car nos armées sont aujourd’hui contraintes de se préparer pour des crises, des guerres ou des affrontements jusque sur le sol national, qui leur demandent une adaptation permanente à un environnement de plus en plus hostile.

    Or, depuis vingt-cinq ans, un vent continu de réformes a affaibli, dans des proportions déraisonnables, non seulement leurs capacités opérationnelles et leur effectif, mais aussi leur fonctionnement quotidien – aussi bien dans la vie en garnison que dans la préparation opérationnelle.

    Restaurer nos capacités

    L’urgence est donc maintenant à la restauration de leurs capacités. Cette initiative, politique, sera-t-elle prise sous la pression des événements dramatiques qui nous ont touchés jusqu’au cœur de la cité ? Les quelques décisions présidentielles de 2015 pourraient le laisser penser. Il manque cependant ce véritable sursaut qui demanderait des efforts importants dans la durée, notamment budgétaires. Mais ce n’est visiblement pas encore une priorité gouvernementale.

    Car l’état islamique ne saurait représenter l’horizon indépassable des menaces à venir. Certes, il est aujourd’hui le principal défi lancé à nos armées. Mais, il serait irresponsable de ne pas envisager la question militaire à plus long terme, avec des échéances qui nous verraient contraints d’intervenir à l’extérieur de nos frontières. Sur celles de l’Union européenne par exemple, mais en Afrique plus sûrement et, pourquoi pas, au Proche-Orient si l’on veut traiter à la source les racines des conflits en gestation.

    Répétons-le : depuis vingt-cinq ans, les armées vivent au jour le jour. Elles naviguent à vue. Soumises aux pressions budgétaires, fruit de l’irénisme des « dividendes de la paix » et de la nécessité de réduire en partie sur leur dos les déficits publics, elles n’ont jamais été en mesure de stabiliser un modèle qui réponde aux nécessités du moment et qui n’obère pas le futur. Les Livres blancs sur la Défense se succèdent au rythme des changements de majorité. Mais les lois de programmation militaire ne sont jamais entièrement exécutées.

    La faute à des lois de finances toujours estropiées dans leur exécution : la Défense offre en effet de faciles variables d’ajustement au budget de l’état. Dans de telles conditions, il lui est impossible de mettre en œuvre une politique cohérente de ressources humaines et une planification stable de réalisation et de renouvellement d’équipements. Manquent, enfin, des procédures adaptées au besoin croissant de réactivité et de disponibilité dû à l’évolution rapide des nouvelles formes de combat et aux natures changeantes des missions.

    Le rôle de la France… et de son gouvernement

    A l’exception des Etats-Unis qui, contrairement aux discours convenus, peuvent se satisfaire de cette faiblesse européenne endémique, le monde occidental ne sait plus quoi défendre. Et encore moins pourquoi il faudrait qu’il réponde à cette obligation. à cet égard, l’état de nos armées n’est pas une singularité au sein d’une Europe qui néglige sa protection en s’en remettant à l’Alliance atlantique. Autrement dit, à un hypothétique retour américain en cas de nécessité.

    C’est bien pourquoi la prise de conscience doit être collective en Europe. Notre avenir commun, notre histoire et notre civilisation la réclament impérieusement. Mais il serait hasardeux d’attendre cette prise de conscience sans la provoquer. à condition que ses responsables cessent de n’avoir pour horizon que le court terme des échéances électorales, cela pourrait être le rôle – historique – de la France. Elle en possède les capacités. Par chance, plus que toutes autres en Europe, nos armées ont conservé, en dépit de leur dégradation, un large spectre de capacités opérationnelles, comme le prouvent la qualité de la tenue de nos troupes en opérations, leurs facultés d’adaptation aux modes d’action d’adversaires variés et leur aptitude à combattre sous toutes les latitudes.

    Les bases saines d’une restauration de capacités opérationnelles sont là. Mais, il ne faut pas méconnaitre qu’un appareil militaire se construit dans la durée : plus de vingt ans pour former des chefs, dix ans pour développer un programme d’armement et au moins autant pour le produire. Ces cycles longs ont besoin de stabilité. Stabilité des ressources financières, stabilité des hommes et des femmes qui encadrent les flux de soldats, marins et aviateurs qu’impose l’impératif de jeunesse des unités combattantes.

    Les mesures arrêtées en 2015 – arrêt de la déflation d’effectif, abondement budgétaire pour modeste qu’il soit, renforcement des capacités de renseignement et de lutte cybernétique – ne s’apparenteront à une politique de restauration de forces et de moyens pour les armées que si elles sont poursuivies – et amplifiées – dans les années qui viennent. Actuellement, le taux d’engagement sur les théâtres extérieurs et leur implication sur le sol national dans des tâches de sécurité – à contre-emploi, il faut le souligner – asphyxient chaque jour davantage les armées, et plus spécialement l’armée de terre, la plus sollicitée, au détriment de leur entraînement et de l’exécution de leurs vraies missions militaires.

    Ces questions de défense et de sécurité seront-elles sérieusement débattues lors de la campagne pour l’élection présidentielle de 2017 ? Nous serons bientôt fixés. Les candidats devront montrer à nos concitoyens que ces domaines, régaliens par essence, sont au cœur de la raison d’état. Il en va de l’avenir de notre Défense. Et on sait que la Constitution française confie pour cet exercice un rôle éminent au président de la République. 

    A noter que le général Faugère donne ce soir, à Paris,  une conférence sur ce même sujet dans le cadre des mardis de Politique magazine  [Voir plus loin] 

    Général d'armée (2s), ancien inspecteur général des armées, spécialiste de défense et de sécurité.

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    Mur-bleu gds.jpgC'est assurément un beau spectacle que de voir notre groupe aéronaval en action, nos Rafales qui décollent pour détruire l'ennemi, et tous ces militaires parfaitement préparés à remplir leur mission : pour la France, toujours et partout ! C'est rassurant, et cela procure une fierté légitime : malgré ce Système misérable qui nous déclasse inexorablement, la France - qui est décidément « une bonne affaire », comme disait Bainville - est bien la puissance qu'il est bon de voir s'affirmer avec une telle maîtrise, pour cette occasion en l'occurrence.

    Mais le pouvoir politique de ce Système mortifère ne donne pas assez de moyens à ces hommes et femmes admirables, qui vouent leur vie à la défense de la Patrie. Pire : les dépenses militaires n'ont cessé de baisser, ces dernières décennies... Pourtant, on trouve toujours des millions,  et des milliards, pour tout et n'importe quoi : loger à l'année de clandestins à l'hôtel; construire une inepties comme cette Canopée inutile aux Halles de Paris, qui bouche le ciel et la vue, et qui prend l'eau; construire des portiques pour une écotaxe qu'on supprime dans l'année... Mais pour l'armée : des miettes !

    En 1960, la France, devenant vraiment une grande puissance militaire - notamment nucléaire - dépensa 5,44% de son PIB pour la Défense : on dépasse à peine les 2% aujourd'hui !

    En 1966 le budget des Armées représentait 4,6 du PIB; en 81 (Mitterand...) : 2,97; en 2002 (Chirac) : 1,6; et en 2012 (Sarkozy) : 1,56 !... « On touche à l'os - écrit Zemmour, exprimant l'opinion de toute personne connaissant le sujet, toutes opinions politiques confondues  - Une baisse supplémentaire rendrait notre armée ridicule... Notre souveraineté n'existera plus quand on n'aura plus d'armée pour la défendre. »

    C'est donc à bon droit que l'on peut plaider pour un budget militaire à 4%, ce qui donnerait 1% à chaque Arme (Air, Terre, Mer) et 1% à la Force nucléaire.

    Et cet effort devrait être maintenu, pour remettre notre Armée en état, au moins pendant une décennie, pour commencer. Après, on avisera...

    Les dépenses militaires de nombreux pays - comme la Chine ou l'Inde, ont augmenté dans des proportions faramineuses; et la puissance militaire - in fine - est, fondamentalement, ce qui créé la puissance tout court, même si, évidemment, elle n'est pas le seul critère à prendre en compte, et que, bien entendu, elle ne peut qu'aller de pair avec la puissance économique... Mais la vraie question est : le Système veut-il sortir la France de l'Histoire ? En la privant des moyens nécessaires à son Indépendance et à sa Défense ? 

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  • Oser la Défense

     

    par Louis-Joseph Delanglade

     

    Reprenant les propositions des ministres de la Défense allemand et français, M. Juncker, président de la Commission européenne, vient de souhaiter une Défense commune de l’Europe (état-major et ressources militaires communs, fonds d’investissement dans la recherche militaire). Ce nouveau projet de Défense européenne n’est pas sans rappeler la chimérique C.E.D. (Communauté Européenne de Défense), sorte de pilier européen de l’OTAN aux ordres des Etats-Unis, qui a fait long feu dans les années cinquante. Gageons que l’absence d’un pouvoir politique européen, donc d’une politique étrangère commune, devrait être fatale à ce nouvel « espoir ». 

    Quelques jours avant, lors de la récente Université d’été de la Défense, M. Valls s’est montré plus réaliste en affirmant que l’augmentation du budget de la Défense nationale de 1,7 à 2% du PIB, au plus tard en 2025 (selon les recommandations de l’OTAN) constitue un objectif souhaitable et atteignable. On ajoutera qu’il est vital, la Défense nationale étant garante de l’existence même de la nation. Le pouvoir politique, même de gauche, a ainsi fini par admettre que le sous-armement programmé depuis des lustres confine au désarmement, donnant raison au général de Villiers, chef d’état-major des armées pour qui nos forces sont surmenées et usées et leurs moyens matériels insuffisants. On ne peut donc que se féliciter du consensus que révèlent les propos de Mme Adam, présidente socialiste de la commission de la Défense à l'Assemblée nationale, et de son homologue au Sénat, l'ancien premier ministre M. Raffarin 

    Cependant, il conviendrait de ne plus opposer, pour choisir, force nucléaire et forces conventionnelles, et d’investir d’urgence dans les moyens de la guerre asymétrique qui nous menace jusque sur notre territoire. Par ailleurs, pourquoi ne pas être plus exigeant, plus ambitieux ? Pourquoi se caler sur le chiffre et le calendrier de l’OTAN ? Evidemment, un budget encore supérieur (2,5% ?) constituerait un très gros effort financier mais, outre qu’elle fait la guerre (c’est quand même M. Valls, Premier ministre, qui ne cesse de le répéter), la France pourrait y (re)trouver son compte dans d’autres domaines. 

    D’abord, et de façon à peu près certaine, dans le nerf de la guerre lui-même, c’est-à-dire l’argent. Un investissement « militaire » est un investissement souvent productif et rentable car susceptible de retombées industrielles civiles (ce fut le cas dans le domaine nucléaire) et de bénéfices commerciaux très importants (grâce à la vente d’armes sophistiquées). Ensuite, mais ici le conditionnel reste de mise, dans le domaine politique. Nul doute qu’existe un lien entre le recentrage stratégique des Etats-Unis sur la zone Pacifique et les propos de M. Juncker évoqués ci-dessus. Dès lors que l’Union elle-même n’est pas « crédible », la France a l’occasion, en privilégiant son budget Défense, de jouer sa propre carte et de se réaffirmer comme la grande puissance militaire continentale. Le bénéfice serait double au plan européen : rétablir l’équilibre avec une Allemagne forte d’abord de son économie; se montrer plus européenne qu’en s’engageant dans un vain processus de défense intégrée et cornaquée par une OTAN inféodée à Washington.  

    De l’armement comme facteur de prospérité et d’indépendance nationale, mais aussi comme brevet d’européanité… voilà qui ne plaira pas à tout le monde, mais qu’importe. 

  • Défense & Société • Décorations : plutôt victime que soldat

     

    par Jean-Michel Thouvenin

     

    La médaille nationale de reconnaissance aux victimes du terrorisme est une décoration civile et militaire française créée par un décret du 12 juillet 2016.

    Peuvent y prétendre les Français tués, blessés ou séquestrés lors d’actes terroristes commis sur le territoire national ou à l’étranger, ainsi que les étrangers tués, blessés ou séquestrés lors d’actes terroristes commis sur le territoire national ou à l’étranger contre les intérêts de la République française.

    Si nous ne pouvons que saluer une démarche visant à rendre hommage aux victimes du terrorisme, nous sommes en droit de nous interroger en revanche sur le positionnement de cette médaille dans l’ordre protocolaire des décorations françaises. De fait, étant décernée par décret présidentiel, la médaille nationale de reconnaissance aux victimes du terrorisme se porte directement après l’Ordre National du Mérite (elle-même placée derrière l’Ordre de la Légion d’Honneur, l’Ordre de la Libération et la Médaille militaire), ce qui en fait la cinquième décoration dans l’ordre protocolaire.

    Ce positionnement la place donc également, et légalement, avant les croix de guerre et celle de la valeur militaire, qui récompensent, quant à elles, l’octroi d’une citation pour conduite exceptionnelle ou action d’éclat au feu. Elle est naturellement aussi placée bien avant la médaille des blessés militaires…

    C’est là que le bât blesse. Car si les victimes du terrorisme ont droit à toute notre sollicitude, elles ne peuvent en revanche se réclamer d’aucun volontariat dans la lutte contre l’ennemi, et moins encore d’acte de bravoure dans un contexte de guerre. On peut reconnaître une victime, l’assurer de la compassion de la nation, on peut l’indemniser le cas échéant, mais on ne saurait la récompenser.

    Une récompense est faite pour saluer et sanctionner une action volontaire qui a nécessité du courage, de la détermination, de la bravoure. Une victime passive, n’ayant pas été en mesure d’entreprendre quoi ce soit pour lutter contre l’adversaire, ne saurait répondre à ces critères. Il n’y a donc pas lieu de confondre hommage et récompense, respect et mise à l’honneur, compassion et déférence. Il convient de hiérarchiser le mérite, la circonstance des blessures, l’engagement volontaire, avec justice et discernement.

    Mais les dessinateurs trotskistes et obscènes de Charlie Hebdo, qui n’avaient cessé de vomir sur des institutions telles la police, l’armée ou l’Eglise, se sont vu octroyer la Légion d’Honneur à titre posthume, alors que des milliers de combattants, héros ignorés des derniers conflits, n’ont eu droit à aucune reconnaissance de leur vivant, et n’ont été cités que dans l’anonymat des cérémonies du souvenir.

    Partant de ce triste constat, le choix du positionnement de la médaille nationale de reconnaissance aux victimes du terrorisme, décision fleurant un léger parfum de démagogie, n’étonnera plus personne. 

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  • Défense : L’honneur et les honneurs

     

    Par Mathieu Épinay

     

    Le général Puga a quitté cet été les fonctions de chef d’état-major particulier du président de la République et a été nommé grand chancelier de la Légion d’honneur. Pour son départ de l’Elysée, où il était le plus proche conseiller militaire de Sarkozy puis de Hollande, Le Monde lui a consacré sa une et un article sur « Les mystères d’un acteur clé des six dernières années ». Deux pages de citations ou d’anecdotes rapportées au conditionnel par des anonymes. Rien de bien intéressant. En revanche, que ce père de famille nombreuse, catholique, conseille le président socialiste volage et athée, irrite au plus haut point l’auteur de l’article.

    Même si le journaliste du Monde en doute, le rôle positif de Puga « l’Africain » dans les affaires du Sahel est indéniable. Il aura contribué, jusqu’au terme d’une brillante carrière, au succès de nos armes avec une incontestable légitimité opérationnelle. S’il n’a jamais affiché ses convictions, il ne les a pas non plus cachées. Elles ne l’ont pas desservi. Il termine sa carrière avec tous les honneurs, mais dans l’honneur. Ce que les circonstances ne permettent pas toujours : la question de la loyauté reste en effet très liée aux circonstances.

    La discipline qui, comme chacun sait, fait la force des armées, exige du militaire une loyauté sans faille. Dans les régiments, navires de combats ou escadres aériennes, le chef doit s’attacher au bon fonctionnement de son unité, à sa meilleure préparation, au discernement des compétences. Mais il reste au niveau de l’exécution. Cela ne l’empêche pas d’imprimer sa marque et de rendre aux plus jeunes l’amour de leur pays. Il y faut de la prudence et un peu de courage. Mais un officier français peut aujourd’hui enseigner des vérités historiques, ordonner une prise d’arme pour Jeanne d’Arc, s’abonner à Politique magazine ou aller à la messe sans être radié du tableau d’avancement.

    Tout autre est le travail de ceux qui, colonels, capitaines de vaisseau, officiers généraux ont accédé aux niveaux de conception en état-major central, là où les convictions, les appétits et le « déclin du courage » creusent des clivages inattendus. Il ne s’agit plus de faire fonctionner et d’obéir mais d’inventer, de rectifier, d’argumenter, de convaincre ; bref, de s’exposer au risque de déplaire. Les enjeux sont considérables : la vie de nos soldats et le succès des opérations, les milliards de la masse salariale et de la programmation militaire et, par-dessus tout, notre indépendance.

    Il est enfin des circonstances où les honneurs ne sont plus compatibles avec l’honneur. Ainsi, pour faire « observer ses lois », la République a demandé aux militaires de massacrer des populations en 1793, plus tard de fracturer des sacristies lors des inventaires, de briser des grèves, ou encore, en Algérie, de trahir les engagements qu’on leur avait fait prendre. Ceux qui refusèrent, pour l’honneur, furent congédiés, embastillés ou fusillés. En 1961, condamné à la prison, le lieutenant-colonel Puga, père du général, en était.

    Alors que la France lutte aujourd’hui pour sa survie, il en est encore, au Monde, pour écrire que « la mission incontestablement accomplie » du général Puga a été de « laver le nom du père et rendre à la lignée son honneur ». Le grand chancelier ne répondra pas à cette infamie. 

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  • Général Pinatel : contre l'islamisme, s'allier à la Russie et faire disparaître l'OTAN

     

    Par Alexis Feertchak

    Après le coup d'Etat manqué en Turquie, Erdogan se rapproche de Poutine tandis que Moscou et Washington semblent avoir trouvé un équilibre en Syrie. Le général Pinatel considère [Entretien sur Figarovox le 29.07] que les Etats européens devraient tenir compte de cette nouvelle donne et, contre l'islamisme, s'allier à la Russie et faire disparaître l'OTAN. Une politique qui devrait être, selon nous, celle de la France. Quant à être aussi celle des Européens, voire de l'Europe [?], comme s'il s'agissait d'un bloc unitaire, cela nous paraît être une autre histoire, beaucoup plus improbable et fort aléatoire.  LFAR 

     

    maxresdefault.jpgRecep Erdogan devrait rencontrer Vladimir Poutine en août dans la capitale russe. La Turquie est historiquement la base avancée du Sud de l'Alliance atlantique. Dans quelle mesure la nouvelle alliance entre Moscou et Ankara pourrait perturber l'OTAN ?

    L'OTAN est une organisation issue de la Guerre froide entre l'URSS et l'Occident démocratique. Son maintien et son extension aux anciens pays de la CEI procède de la volonté des Etats-Unis de conserver ouvert le fossé entre l'Europe et la Russie. En effet si l'Europe et la Russie étaient alliées, elles leur contesteraient la primauté mondiale qu'ils ont acquise en 1990 à l'effondrement de l'URSS et qu'ils veulent conserver à tout prix. Mais la menace islamique a changé la donne. Cette menace, présente en Russie depuis les années 1990, s'est étendue à l'Europe en juin 2014 avec la proclamation du Califat par l'irakien Al Bagghadi puis récemment en Turquie quand Erdogan a dû fermer sa frontière à Daech après les attentats commis en France et les pressions que les américains ont du faire sur Ankara pour ne pas perdre le soutien de l'opinion européenne.

    Dans ce contexte d'actes terroristes meurtriers, la déstabilisation du régime syrien et son remplacement par un régime plus favorable aux intérêts américains, européens, saoudiens et qataris passe au second plan face à l'urgence de maîtriser ce nouveau Califat qui menace la stabilité du Moyen-Orient et favorise la montée en puissance des partis nationalistes anti-atlantistes en Europe. Par ailleurs, l'intervention massive et victorieuse de la Russie en septembre 2015 pour soutenir son allié syrien contraste avec les hésitations ou le double jeu des Etats-Unis qui essaient de ménager tout le monde. Ils se condamnent ainsi à une faible efficacité opérationnelle qui, finalement, inquiète leurs alliés traditionnels et les poussent à ménager la Russie. Enfin les liens et les enjeux économiques entre la Russie et la Turquie sont très importants malgré une opposition géopolitique historique .

    Plus que le rapprochement entre Moscou et Ankara, ce qui fragilise cette organisation, ce sont ces récents événements. Ils font la démonstration éclatante aux yeux des Français et des Européens que l'OTAN ne sert à rien face à la menace islamique. En revanche, la guerre efficace que même la Russie contre l'Etat islamique fait penser à de plus en plus de Français et d'hommes politiques que la Russie est notre meilleur allié. Et cette évidence, acquise dans la douleur de nos 234 morts et de nos 671 blessés depuis 2012, devrait non seulement perturber l'Otan mais conduire à sa disparition ou à son européanisation complète car son maintien en l'état ne sert que des intérêts qui ne sont pas ceux de la France.

    Que se passe-t-il aujourd'hui en Syrie ? Russes et Américains semblent se rapprocher ou à tout le moins se coordonner davantage, notamment sur la question du Front Al-Nosra, très présent près d'Alep. Un nouvel équilibre dans la région est-il en train de se constituer ?

    Dès leur intervention en septembre 2015 sur le théâtre syrien, les Russes ont proposé aux Américains de coordonner leurs frappes contre Daech et Al Nostra. Mais les Américains ont refusé car au niveau politique, Obama voulait maintenir la fiction qu'il existait encore un potentiel de forces modérées sur le territoire syrien qui n'avaient pas été absorbées ou qui ne s'étaient pas alliées à Al-Nostra et qui ainsi pourraient prétendre, un jour, à être partie prenante à la table de négociation. C'est clairement une fiction contestée non seulement par la Russie, mais par d'autres voix y compris aux Etats-Unis. Ces experts affirment que les unités qui existent encore en Syrie servent d'interface avec Al Nostra à qui elles revendent les armes qu'elles reçoivent via la CIA. C'est le bombardement d'une de ces bases en Syrie par la Russie, qui a eu l'habileté de prévenir les américains à l'avance pour qu'ils puissent retirer en urgence les agents de la CIA présents, qui a permis ce rapprochement opérationnel. Il est clair qu'un nouvel équilibre est en voie de se constituer au Moyen-Orient. La Russie qui y a été historiquement présente est de retour en force. La Chine, et c'est une nouveauté, y pointe plus que son nez et la France qui y avait une position privilégiée de médiation, l'a perdue par suivisme des Etats-Unis.

    Quelle pourrait être la place de l'Europe dans les relations avec ces deux grands pays que sont la Russie et la Turquie ? Peut-on imaginer un nouvel équilibre sécuritaire aux marches de l'Europe ?

    C'est vrai, nos portes orientales sont verrouillées par la Russie et la Turquie.

    Avec la Russie nos intérêts économiques et stratégiques sont totalement complémentaires. La France a une longue histoire d'amitié avec la Russie que symbolise à Paris le pont Alexandre III et plus récemment l'épopée de l'escadrille Normandie Niemen que le Général de Gaulle avait tenu à envoyer en Russie pour matérialiser notre alliance contre le nazisme. Je rappelle aussi que c'est parce que l'armée allemande était épuisée par trois ans de guerre contre la Russie et la mort de 13 millions de soldats russes et de 5 millions d'allemands que le débarquement de juin 1944 a pu avoir lieu. Ce rappel ne veut en aucun cas minimiser le rôle des Etats-Unis et le sacrifice des 185 924 soldats américains morts sur le sol européen. Mais la volonté des Etats-Unis de restaurer un climat de Guerre froide en Europe qui se développe notamment au travers de l'OTAN ne sert que leurs intérêts et ceux des dirigeants européens qui sont soit des corrompus soit des incapables.

    Avec la Turquie, c'est l'Allemagne qui a des relations historiques comparables aux nôtres avec la Russie. La Turquie et l'Allemagne étaient des alliés au cours des deux guerres mondiales car les Allemands espéraient avec leur aide couper la route du pétrole aux alliés. Les Turcs de leur côté espéraient ainsi récupérer le contrôle du Moyen-Orient et notamment celui de l'Irak et de la Syrie.

    Ce rappel historique met en évidence l'importance du couple franco-allemand pour définir une politique européenne commune face à ces deux puissances et éviter de revenir à des jeux du passé comme a semblé le faire récemment Angela Merkel avec l'affaire des réfugiés en négociant directement avec Erdogan sans se concerter avec ses partenaires européens. 

    Le général (2S) Jean-Bernard Pinatel est expert en géostratégie et en intelligence économique. Il tient le blog Géopolitique - Géostratégie. Il est aussi l'auteur de nombreux ouvrages, dont Carnets de guerres et de crises aux Éditions Lavauzelle en 2014.

    Alexis Feertchak           

  • « Qui est l'ennemi ? » : L'exception Le Drian ...

     

    Il est de toute évidence parmi les ministres d'un gouvernement de bras cassés, celui qui parle le moins, qui s'exhibe le moins, et, en même temps, celui qui aurait tout â la fois, le plus de choses à dire, et probablement - fonction oblige - le plus de choses à taire. Sans-doute est-il aussi le plus compétent et, en tout cas, le plus efficace de cette malencontreuse équipe. Il fait, simplement, son travail. Dans « Qui est l'ennemi ? » Jean-Yves Le Drian réunit le fruit de ses réflexions sur les objectifs de la défense nationale. Un ouvrage qui a éclairé Eric Delbecque [Figarovox 1.06]. D'où l'intéressante recension qui suit.  LFAR

     

    sans-titre.pngLe livre Qui est l'ennemi de Jean-Yves le Drian aux éditions du Cerf est une bonne surprise. On appréhende toujours la parution d'un ouvrage d'un homme ou d'une femme politique. Que craint-on ? Une tentative d'autojustification ou une volonté de surfer sur l'air du temps. L'honnêteté commande de préciser qu'un a priori identique pèse désormais sur les « vitrines littéraires » des grands chefs d'entreprise. L'écrit papier est entré depuis bien des années dans la dynamique classique de la communication d'influence des grands dirigeants, même à l'ère du numérique. Or, ce n'est pas le cas de cette réflexion du ministre de la Défense sur la notion d'ennemi. Il est devenu tellement rare qu'un responsable ministériel fasse «  du fond» que l'on en demeure tout étonné…

    Clairement, on ne trouvera pas dans ses pages une logique intellectuelle dissidente (cela n'aurait d'ailleurs pas vraiment de sens pour un individu qui occupe cette fonction), mais la réaffirmation d'une préoccupation conceptuelle absolument indispensable pour quelqu'un dont la défense de la nation est la mission quotidienne.

    Que rappelle-t-il ? Que la guerre se pense ; ce qui implique de savoir définir l'ennemi ! Une évidence? Certes non dans le présent que les médias nous offrent. Les principes de base méritent désormais d'être récapitulés. Jean-Yves Le Drian parcourt donc à raison l'histoire de la guerre, des conflits classiques d'avant la Révolution française à la guerre totale, en passant par celle - napoléonienne - des nations. Ce qui lui permet de relever la particularité des confrontations contemporaines sans affirmer trop facilement que la lutte contre Daech s'inscrit dans le combat contre la figure du partisan. Au-delà du fait qu'il précise que l'ennemi n'est pas le rival, qu'il incarne un « Autre » radical, et qu'il se définit grandement de nos jours comme l'acteur collectif ou individuel qui agresse le premier, le ministre propose une tentative intéressante de caractérisation de Daech en mettant en lumière quelques faits utiles: ce n'est pas authentiquement un Etat, même si sa structure en présente certains traits ; c'est une idéologie particulièrement belliciste qui n'entend pas cesser ses assauts contre ceux qu'ils nomment les « judéo-croisés » ; c'est un phénomène politico-idéologique entretenant une indiscutable parenté avec la logique totalitaire. On peut d'ailleurs se réjouir que l'auteur n'oublie pas les fondamentaux et s'appuie sur Raymond Aron pour construire son analyse. Cela nous change de l'actuel nivellement des références…

    Un autre intérêt déterminant de ce petit texte consiste à lancer une piste insuffisamment exploitée. Même si des causes conjoncturelles ont pu « créer » Daech, les individus que la galaxie djihadiste recrute comptent au nombre des adversaires structurels des démocraties, et de la France en particulier. Ce qui fonde une réponse armée et lucide (n'espérant pas les convertir aux avantages de la négociation). Le ministre met enfin l'accent sur ce qui devrait nous obséder au plus haut point : vaincre Daech nécessite de comprendre que nous nous situons à l'intérieur d'une colossale guerre de l'information. Cependant, on ne fait pas militairement la guerre à une idéologie : il importe donc de contrer une propagande professionnalisée par une riposte informationnelle déconstruisant le discours des djihadistes. De ce point de vue, il apparaît que notre Etat est parfaitement démuni…

    Dernière chose à remarquer dans ces lignes ministérielles : une évocation de la « contestation de la domination technico-militaire occidentale » via le recours à un livre bien connu des spécialistes, La guerre hors limites, de Qiao Liang et Wang Xiangsui, deux officiers chinois. Ce texte fondamental explique l'émancipation de la guerre de la seule sphère militaire et son extension à de multiples espaces : économique, informationnel, numérique, etc. La référence interpelle car le personnel politique ne descend qu'exceptionnellement dans ce théâtre doctrinal un peu pointu…

    Au final, on termine cette lecture en imaginant un homme consciencieux et honnête, qui formule des interrogations liées mécaniquement à ses responsabilités (sans trop sombrer dans le service après-vente de ses propres actions) et qui n'est guère friand des escarmouches politiciennes et des dérisoires micro-crises médiatiques peuplant nos écrans… Même si l'on ne partage pas l'ensemble des analyses de Jean-Yves Le Drian, cela fait un bien fou et stimule l'esprit.  

    Eric Delbecque    

    Eric Delbecque est directeur du département intelligence stratégique de SIFARIS, chef du pôle intelligence économique de l'IFET et auteur de Idéologie sécuritaire et société de surveillance (Vuibert, 2015).        

  • Livres • L’armée au féminin

     

    par CS

     

    L’armée n’est plus seulement une affaire d’hommes et les femmes ont leur rôle à jouer. C’est la leçon principale qu’il faut retirer du superbe ouvrage réalisé par Jean-Marc Tanguy créateur et animateur du site spécialisé dans la défense « lemamouth.blogspot.fr ». Dans l’Armée au féminin, le journaliste dresse une série de portraits sans complaisance sur ces femmes qui ont choisi la métier des armes beaucoup plus par vocation que par nécessité. Elles suivent en cela les pas de leurs aînées, qui se sont engagées dans la Résistance (FFI notamment), dans la 2e Division blindée de Leclerc (Les fameuses « Rochambelles »), celles qui ont servi dans le service cinématographique des armées, le service de santé des armées, dans l’armée de l’air à l’image de Maryse Bastié etc. les femmes militaires d’aujourd’hui servent dans toutes les armées et toutes les armes : Dans le service de Santé où elles sont les égales des (50% des effectifs), dans l’armée de Terre (11%), dans la Marine (13%), l’armée de l’Air (22%), et même les forces spéciales, etc. Rares restent les domaines où elles ne parviennent plus à exercer. Au fil des reportages en opérations extérieures et ailleurs, le lecteur accompagne Jean-Marc Tanguy auteur de nombreux livres d’histoire militaire, à la rencontre de ces héroïnes du quotidien des armées, de Claire Mérouze, première femme pilote sur Rafale à Anne Cullère, la sous-chef opérations de l’état-major de la marine et femme la plus gradée de la Marine. Ce superbe ouvrage richement illustré se termine en ouvrant une fenêtre et une réflexion sur les armées étrangères. L’on se dit que la femme est vraiment l’avenir de l’homme…

    L’armée au féminin – Ces femmes qui font l’armée française du XXIème siècle, de Jean-Marc Tanguy, éditions Pierre de Taillac, 176 pages, 22,90 euros.

  • Le Prince Jean à Gap pour l’officialisation de son parrainage du 4ème Chasseurs

     

    Le Prince Jean était ces 3, 4 et 5 mai à Gap pour l’officialisation de son parrainage du 4ème Chasseurs. Nommé Colonel de réserve l’été dernier, son parrainage initié il y a 2 ans par le précédent Chef de corps, le Colonel Dirou, a été officialisé par le nouveau Chef de corps le Colonel Fatinet au cours d’une visite du régiment et d’une prise d’armes ce mercredi 4 mai. Le 4ème Chasseurs portant le titre de Clermont Prince, c’est au nom de son frère le Prince François, Comte de Clermont, que le Prince Jean a accepté cette responsabilité.
     
    Prince-dOrléans-au-4e-RCh-e1462380298719-1-300x225.jpgCommencée par une petite course en montagne, la matinée s’est achevée par un déjeuner où le Colonel Fatinet entouré de plusieurs officiers et sous officiers a présenté au Prince le 4ème Chasseurs dans sa configuration de base de défense. Au début de l’après midi le Prince a pu faire le tour du régiment, notamment des outils de simulation pour la préparation des opérations et le tir. Ensuite était signée dans le bureau du Colonel la convention de parrainage, suivie de la prise d’armes au cours de laquelle le Colonel Fatinet a rappelé l’importance de la tradition du régiment tout en montrant que celle-ci devait s’inscrire dans la dynamique d’aujourd’hui. Le choix de la date de parrainage correspondait en effet avec la constitution du Groupement tactique interarmes « Edelweiss » devant être déployé dans la bande sahélo-saharienne pour une mission opérationnelle de 4 mois. La journée s’est achevée par une réception chez le Chef de corps au cours de laquelle le Prince Jean a souligné l’honneur et la fierté d’être ainsi associé à ce prestigieux régiment, continuant ainsi une belle tradition familiale. 
     
  • Reportage du Dauphiné libéré : Le « 4 » accueille le prince

    Le prince Jean d’Orléans est devenu officiellement hier le parrain du 4e Régiment de chasseurs. Sur la place d’arme Clermont-Prince, il a présidé sa première cérémonie, celle entérinant la création du Groupement tactique désert. Il nous a également accordé un long entretien sur la place de sa famille ou encore sur sa vision de la politique actuelle. Photo Le DL/Vincent OLLIVIER

     

    Le prince Jean d’Orléans, descendant des rois de France, est devenu le parrain du régiment haut­-alpin bien connu sous le nom de “4”

    Visite royale au 4e Régiment de chasseurs

    Son altesse royale Jean d’Orléans, duc de Vendôme, est officiellement depuis hier le parrain du 4e Régiment de chasseurs. La convention de parrainage qui scelle l’engagement du Prince avec le régiment des Alpes du Sud a été signée dans la salle d’honneur du “4” après une genèse assez longue débutée il y a plus de deux ans. Le prince Jean d’Orléans est le fils d’Henri d’Orléans, comte de Paris, chef de famille de la Maison d’Orléans, prétendante au trône de France. Il a répondu aux questions du Dauphiné Libéré.

    Monseigneur, la genèse de votre parrainage du 4e Rch a été longue. Il y a un lien historique entre votre famille et Clermont-Prince. Le régiment vous a été présenté, quel est votre sentiment ?

    3135457778  2.jpg« Je suis très heureux pour de nombreuses raisons. Il y a plusieurs aspects qui ren­trent en ligne de compte : la dimension humaine, les as­pects techniques et opéra­tionnels. Moi qui n’ai fait que mon service militaire, je vois une autre partie de  l’armée d’aujourd’hui. C’est une  bon­ne façon de poursuivre cet engagement dans un  envi­ronnement complexe de no­tre société française à la fois à l’intérieur et  à l’extérieur. J’observe que notre armée est de plus en plus nécessaire et que  même les politiques s’en sont rendu compte en augmentant les effectifs. Le “4” est une entité en pleine dynamique qui doit faire face à de nombreux enjeux. Je suis admiratif de tout ce qui se met en place et de l’évolu­tion entre l’armée que j’ai pu connaître et l’armée d’aujourd’hui. »

    Ce parrainage est-il une responsabilité pour vous, comment va-t-il s’incarner, s’exercer ?

    « Concrètement il y aura certainement  des  événements  liés à la vie du régiment com­me la Saint­-Georges. Le dis­positif  reste  à  déterminer  et préciser.  Peut­-être  dans  les  étapes  d’instruction  ou  mê­me la présence sur le terrain, qui sont des moments privilé­giés  qui  favorisent  les  ren­contres.  Mon  intégration  de la  réserve  citoyenne  donne  un  sens  à  ce  parrainage  et s’inscrit dans les orientations menant à cultiver l’esprit de défense et de le relayer dans des couches qui n’ont pas for­cément  accès  à  toute  cette connaissance. À Dreux, nous travaillons sur la connaissan­ce  de  l’histoire  et  le  témoi­gnage  de  l’engagement  du  4e RCh  peut  être  un  prolon­gement  à  ce  travail.  Nous avons la chance d’avoir une unité de lieu et de temps sur notre domaine qui nous per­met d’évoquer l’environne­ment  historique  et  militaire des  régiments auxquels no­tre famille est attachée. »

    Si vous deviez vous adresser aux soldats du “4” avant leur départ pour l’Afrique, que leur diriez-vous ?

    « D’abord ma fierté d’être le parrain de ce régiment enga­gé  dans  la  défense  de  nos idéaux  et  de  notre  pays.  Il  faut aujourd’hui toucher l’en­nemi  sur  ses  bases.  La  mis­sion que portent  les  sol­dats  du  “4” est  très  im­portante pour  le  pré­sent  et  pour notre  avenir et toutes les promesses por­tées. »

    Nous sommes à un an des élections présidentielles, va-t-on entendre votre voix dans cette effervescence préélectorale, et même cette cacophonie ?

    « Sur les questions politiques, pas plus que ça. D’abord par­ce que je ne suis pas le chef de ma famille. Sur des sujets plus  particuliers,  je  peux  avoir des choses à dire ; mais dans  tout  ce  brouhaha,  ma  voix est inaudible. Je préfère m’exprimer dans l’action plutôt que dans la parole, c’est une qua­lité ou un défaut. Je préfère travailler sur les questions de long terme que de m’arrêter à une élection qui, je l’espère, n’enfoncera pas un peu plus notre pays au regard des dif­ficultés qu’il traverse.

    La monarchie et son rétablissement sont un recours politique possible, comment vous positionnez-vous ? En “militant” de votre propre cause ou en spectateur discret en retrait mais disponible ?

    « Je ne suis pas un “militant”, je suis dans la retenue. J’incarne cette tradition des prin­ces qui ont servi leur pays et je  le  montre  par  un  certain  nombre d’actions que je mè­ne ; et ce parrainage en fait partie. J’ai d’autres flèches à mon arc avec la défense des chrétiens d’Orient. J’étais en Syrie  au  mois  d’avril  avec  l’évêque de Toulon pour un jumelage d’évêchés. J’ai  tout  ce travail  local à Dreux mais aussi  l’édu­cation de mes enfants, ça  fait  beaucoup  de  choses. La question de la monarchie peut  apporter  des  éléments  intéressants.  C’est  le  fait  de ne  pas  s’arrêter  au  moyen  terme et de se projeter sur le long terme, être dans une dy­namique  de  construction. Une  fois  accomplie,  c’est  le  fils  qui  poursuit  cette  cons­truction  puis  le  petit­-fils.  Le pré capétien a grandi petit à petit. On a besoin de référen­tiel  et  de  perspective. Aujourd’hui, le monde politi­que  tel  qu’il  est  n’en  donne plus vraiment. De là à un re­tour  à  la  monarchie ?  Les Français  sont  monarchistes  de cœur, mais pas encore de raison. »

     Avez-vous un lien avec les Hautes-Alpes ?

    « J’ai un lien avec les Alpes, j’ai  vécu  de  7  à  11  ans  tout  près d’Annemasse ; mais hé­las, pas avec la ville de Gap. Je suis heureux de ce parrai­nage avec le 4e RCh qui est dans la tradition de notre fa­mille où les héritiers avaient des  régiments  où  ils  étaient  colonels. Voilà le lien. » 

    Propos recueillis par Alain BARADAT­

     

    Le prince Jean d'Orléans a présidé sa première cérémonie

     

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    La  famille  d'Orléans  a  un lien  historique  avec  le 4e Rch  :  Louis  de  Bourbon  Condé,  comte  de  Clermont, ancêtre du prince, a laissé le nom.  C'est  au  terme  d'une  journée marathon de présen­tation  de  l'unité,  où  le  “par­rain du 4” a visité l'emprise du quartier général Guillaume et fait  la  démonstration  de  ses qualités de tireur au simula­teur de tir aux armes légères (Sittal), qu'il a présidé sa pre­mière cérémonie sur la place d'armes de Clermont­-Prince, celle de la création du grou­pement tactique désert (GTD) baptisé  “Edelweiss”.  Ce GTD, constitué sur l'ossature de Clermont-­Prince renforcée de  deux  sections  du  27e Ba­taillon  de  chasseurs  alpins, d'une section du 2e Régiment étranger  du  génie  et  d'une  équipe du 93e Régiment d'ar­tillerie de montagne, sera dé­ployé  dans  quelques  semai­nes sur la bande sahélo­-saha­rienne pour 4 mois.

    Le chef de corps du “4” s'est adressé  au  prince  Jean  de­vant les troupes : «  Votre fa­mille se trouve donc aujourd'hui encore réunie auprès des soldats de monta­gne,  cavaliers  et  fantassins mais  surtout  chasseurs,  dont  l'action complémentaire  est gage  de  succès.  Quel  beau symbole que cet attachement familial  et  patrimonial  aux  unités de montagne qui se re­trouvent  depuis  leur  profes­sionnalisation  engagées  en  opérations  extérieures  sous un même commandement. » « Merci prince Jean et longue vie  au  groupement  tactique  désert Edelweiss », a conclu le colonel Fatinet.  A.B.

    EN IMAGES

    DANS

    LE BUREAU

    3135457778  2 a - Copie.jpgLa signature de la convention de parrainage entre le prince Jean d’Orléans et le olonel Jean-Jacques Fatinet, chef de corps du 4e RCh. Photo Le DL/V.O. 

     

     

     

    AU SIMULATEUR DE TIR

    3135457778  2 a.jpgAu Sittal, simulateur de tir aux armes légères, le prince a fait carton plein. Il avait officié dans la cavalerie lors de son service militaire. Avec 100 % de réussite, il a “abattu” tous les ennemis. Le scénario demandait de répondre à une attaque
    de terroristes en milieu urbain. Photo Le DL/V.O.

     

    Reportage repris du Dauphiné Libéré 5.05.2016

  • Europe se déshabille

     

    Par Jean-Louis Faure 

     

    Revenons sur une information économique* passée quasiment inaperçue.

    L’électronique de Défense d’Airbus est rachetée par le fond d’investissement américain KKR.

    Le périmètre de cette activité, qui génère 1 milliard d'euros de chiffre d'affaires environ par an, inclut les capteurs militaires, la guerre électronique, l'avionique et l'optronique, bref tout ce que l’on appelle du terme générique de Haute Technologie ou Techniques Avancées. Domaine où la France est en tête de classement mondial.

    On imagine un instant une opération financière similaire pour acheter des activités aussi stratégiques et sensibles dans l’industrie américaine, et ce que serait la réaction de l’administration : tout serait immédiatement bloqué au nom de la protection du savoir, du secret de Défense Nationale, ou plus largement des intérêts américains.

    Et pour montrer à quel point, notre haute administration et notre monde politique sont déboussolés, souvenons nous des hurlements quand le PDG d’Alstom a dévoilé que la division turbines de son groupe allait être vendue à General Electric. Montebourg à la tribune de l’AN, cette activité transférée chez les Américains signait la fin du monde … C’est le genre de tintamarre qui me parait toujours suspect. Surtout quand se joignent aux roulements de tambours une cohorte d’officines « d’intelligence économique », agitant des arguments peu documentés et peu sérieux. Il s’agissait manifestement d’avoir la peau de Patrick Kron, comme ledit Montebourg s’en était pris à la famille Peugeot. En l’espèce, les liens de GE avec la France sont anciens et d’une grande complicité, quand on connaît la part de cette entreprise américaine dans l’électronique médicale ultramoderne, et aussi dans le co-dévellopement avec SAFRAN (ex-SNECMA) des plus beaux moteurs d’avions gros porteurs, très en avance sur ses concurrents dans le monde.

    Rien de tel ici. KKR n’est rien d’autre qu’un fond d’investissement agissant en prédateur international au profit du complexe militaro-industriel de son pays, les États-Unis d’Amérique. Il faut avoir perdu tout bon sens pour laisser partir ainsi un fleuron de notre haute technologie. Les Allemands sont décidément de plus en plus décevants; mais à leur décharge nous n’avons plus les organisations crédibles en France qui permettraient de sérieusement « leur tirer les oreilles ». Notre ami le député maire souverainiste de Maisons-Laffitte, Jacques Myard vient d’interpeller par question écrite à l’AN, le ministre de la Défense. Que va-t-il répondre entre deux réunions dans sa région ? On espère qu’il est informé … 

    * http://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/aeronautique-defense/airbus-vend-son-electronique-de-defense-au-fonds-kkr-558125.html

  • Politique & Société • Libération de Palmyre : l'angélisme doit laisser place au réalisme

     

    Alors que l'Europe vient d'être frappée par de nouveaux attentats, l'armée syrienne a libéré Palmyre. Pour Hadrien Desuin*, la Russie est notre meilleure alliée avec Damas pour lutter contre Daech en Syrie. Nous partageons son point de vue et son article est remarquable.  LFAR

     

    hadrien-desuin.jpgL'Europe se relève à peine des derniers attentats bruxellois. Comme à chaque tuerie islamiste, la foule allume des bougies. On se recueille, on dessine des cœurs à la craie, les drapeaux sont en berne et on pleure. On se promet que rien ne doit changer et qu'on vivra comme avant. Surtout on veille à ne pas faire d'amalgames, on répète que ce n'est pas çà l'islam. On ne doit pas avoir peur, il faut vivre avec. Et puis on rappelle aux réfractaires que l'Islam est une religion de paix et d'amour. Au bout de quelques jours et de longues minutes de silence, on cible la vraie menace; «l 'islamophobie » est finalement identifiée comme le seul ennemi sérieux à combattre.

    Tandis qu'en Europe on se drape dans le deuil et le déni, la bataille fait rage contre Daech en Syrie. Au moment où ces lignes sont écrites, les forces syriennes appuyées par les milices chiites irano-libanaises ainsi que l'aviation russe, se battent pour reprendre Palmyre aux mains des barbares. A l'heure qu'il est des soldats tombent et donnent leur vie pour nous venger. Quelle aide fournissons-nous à ces hommes qui tentent de libérer des populations civiles asservies par une charia implacable ? Que fait la France pour sauver ce qui reste de ce patrimoine mondial de l'humanité ? Rien. Absolument rien. Nous n'avons rien fait pour sauver Palmyre il y a un peu moins d'un an. Nous ne ferons rien pour libérer Palmyre. En dix mois, nous n'avons rien appris et rien compris.

    Alors que toute la Syrie anti-islamiste s'apprête à remporter une victoire symbolique autant que stratégique contre les hordes djihadistes de Daech, les réactions occidentales risquent de se faire discrètes. Coïncidence heureuse ou rideau de fumée, on annonce une offensive imminente vers Mossoul en Irak. Pas question de remercier la Russie ou l'Iran de leur aide militaire en Syrie. Impossible d'applaudir à cette victoire contre Daech. Depuis le temps qu'on nous répète que Daech et Bachar sont complices, c'est un petit peu compliqué d'expliquer le contraire à présent. La réalité crève les yeux, et on continue à se mettre la tête dans le sable. La Russie est notre meilleure alliée avec Damas pour lutter contre Daech en Syrie. Et nous refusons toujours de nous unir à elle pour frapper Daech. Combien de fois a-t-on répété que la Russie et le régime syrien ne se battaient pas contre Daech mais contre « l'opposition modérée » ? Des milliers de fois sans doute. Cette version officielle a été reprise sans preuve dans les médias en dépit de l'évidence. Cette fois-ci, le récit officiel de la guerre va être difficile à entendre. Il faudra bien admettre que la Russie et la Syrie de Bachar Al-Assad sont en première ligne contre Daech tandis que nous les regardons faire.

    Après plus de cinq ans de guerre civile syrienne, il serait temps de changer de stratégie et de sécher nos larmes. Contre Daech, on ne devrait pas avoir de scrupules à se battre aux côtés des Russes, des Kurdes et de l'armée syrienne. C'est un moindre mal qui doit l'emporter sur toute autre considération. A Palmyre, celui qui ne se bat pas contre Daech est quelque part avec lui.

    La meilleure réponse à apporter aux attentats qui frappent notre continent tous les quatre mois, ce n'est pas de s'agenouiller devant un lumignon ou de s'interroger sur l'état d'urgence. Ce n'est pas de hisser un grand drapeau blanc en haut de la cathédrale de Strasbourg. Ce n'est pas seulement un grand sursaut national contre l'islam radical, infiltré sur notre sol, qui est nécessaire. C'est aussi en Syrie qu'il faut changer d'alliés. On renâcle à se battre aux côtés des russes et des syriens qui sont en première ligne contre Daech au prétexte qu'ils ne sont pas de parfaits démocrates. On préfère encourager contre eux une « rébellion modérée » qui n'en est pas une. Cette vision stratégique a un nom, l'angélisme. A Bruxelles, à Paris comme en Syrie, l'angélisme doit laisser place au réalisme. 

    Hadrien Desuin           

    Ancien élève de l'École spéciale militaire de St-Cyr puis de l'École des officiers de la Gendarmerie nationale, Hadrien Desuin est titulaire d'un master II en relations internationales et stratégie sur la question des Chrétiens d'Orient, de leurs diasporas et la géopolitique de l'Égypte, réalisé au Centre d'Études et de Documentation Économique Juridique et social (CNRS/MAE) au Caire en 2005. Il a dirigé le site Les Conversations françaises de 2010 à 2012. Aujourd'hui il collabore à Causeur et Conflits où il suit l'actualité de la diplomatie française dans le monde.