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  • Histoire & Actualité • Mazarin président ! La morale n’a rien à voir avec la politique

     

    Une chronique de Jean-Paul Brighelli

    [Bonnet d'âne & Causeur 22.03]

    Le style et la lucidité Brighelli. La verdeur, l'expression directe, souvent familière, qui la rend proche, attrayante, convaincante. A quoi s'ajoute une sorte de bon sens, comme sorti du vieux fond populaire, au temps où il existait encore : L'on est d'emblée d'accord avec Brighelli. A noter, pour nous qui sommes royalistes, que Camille Pascal [voir ci-dessus] comme Jean-Paul Brighelli, sont l'un et l'autre amenés à se référer à l'Ancien Régime dès lors qu'il s'agit de droite Justice ou de compétence politique ... Lafautearousseau

         

    2704624286.jpgLes solides élans de vertu de la France contemporaine me sidèrent un peu. On veut, paraît-il, des hommes politiques intègres. Curieux discours, qui met en avant certaines qualités qui ne sont pas essentiellement politiques, mais morales. Mais qu’est-ce que la morale a à faire avec la politique ?

    Relisez Machiavel, relisez Gabriel Naudé, puis posez-vous la question : qu’est-ce qui est prioritaire, en politique ? Celui qui a acheté le veston, ou les qualités de l’homme à l’intérieur du veston ? Je ne doute pas que le Canard enchaîné, qui dispose manifestement d’un dossier très complet tombé du ciel, ait encore sous le coude la facture insensée du fournisseur des caleçons de Fillon — il a eu jadis celle des chaussettes cardinalices de Balladur. Et alors ? On distille des sous-entendus sur les mœurs de tel autre — mais qu’en avez-vous à faire ? On sort des histoires sur le chauffeur de l’un et le garde du corps de l’autre — et puis ?

    Plutôt que d’exiger un politique « propre » — une exigence portée par nombre d’électeurs qui ne le sont guère —, je préférerais que l’on exigeât (c’est chouette, l’imparfait du subjonctif, ça vous fait immédiatement passer pour un réactionnaire aux yeux des imbéciles) des hommes politiques compétents — prioritairement. Des hommes d’Etat, y compris de sexe féminin, à l’aventure.

    Mais ça, évidemment, c’est plus rare. Chez les politiques comme chez leurs électeurs.

    J’ai un peu travaillé sur le XVIIème siècle, particulièrement sur les années 1648-1658, autour de la Fronde et de la Guerre de Trente ans. Et j’en ai tiré une grande admiration pour les politiques de l’époque — Retz, conspirateur-né qui avait distribué des dizaines de milliers d’écus d’aumônes pour soulever le peuple des gueux, Condé, « né capitaine », qui n’hésita jamais à trahir son royal cousin et à diriger contre lui les armées de l’ennemi espagnol, et surtout Mazarin, qui sut résister à la Fronde, et signer les traités de Westphalie et la Paix des Pyrénées. C’est lui, juste derrière Louis XIV dont il contrôle l’embrassade avec son homologue espagnol, Philippe IV.

    Mettons les événements en balance. Mazarin était d’une origine obscure, il n’avait pas un sou vaillant quand il arriva à Rome, il coucha avec qui il fallait — hommes et femmes, disent les pamphlétaires de l’époque —, il fit même semblant d’entrer dans les ordres (tout en s’en gardant bien, lui qui avait des choses de la religion une vision essentiellement utilitaire, ce qui lui permit d’être nommé cardinal à 39 ans, et peut-être après d’épouser la Reine de France, Anne d’Autriche), il s’affecta à lui-même les revenus de 21 des plus grosses abbayes de France, et mourut en laissant une énorme fortune (il était probablement l’homme le plus riche de France, peut-être d’Europe) acquise par des procédés absolument délictueux, même selon les normes de l’époque. Et alors ? 

    Il avait acquis à la France les Trois évêchés (Metz, Toul, Verdun), Sedan et toute la Haute-Alsace, sans compter des villes éparses dans l’Est et dans le Piémont. Et aussi l’Artois, Gravelines, Thionville, tout le Roussillon (l’Espagne jusque là s’étendait au-delà de la forteresse de Salses, qui se situe à 30 kilomètres au nord de Perpignan), le Vallespir, le Conflent et le Capcir — et tout l’est de la Cerdagne. Désormais, c’étaient les Pyrénées qui formeraient la frontière. Il avait marié son filleul Louis XIV à sa cousine germaine Marie-Thérèse, et avait exigé une dot si considérable que l’Espagne ne put jamais la fournir, ce qui permit plus tard à Louis XIV d’installer un Bourbon sur le trône à Madrid — ils y sont encore. Et à part l’intermède napoléonien, nous n’avons plus jamais eu de guerre avec l’Espagne, ce qui n’est pas rien quand on pense que cela faisait plus d’un siècle que nous nous entre-tuions sur tous les champs de bataille européens. Ah oui, et il a légué Turenne et Colbert au roi, qui en fit grand usage. Parce qu’en plus, il savait s’entourer de gens compétents — et pas de sous-fifres anxieux d’être élus ou réélus.

    Chef d’un pays catholique, il sut s’associer aux puritains de Cromwell pour écraser Condé passé à l’ennemi, à la bataille des Dunes. Mais il poussa le roi à se réconcilier avec ledit Condé, qui lui gagna par la suite un petit paquet de batailles. Et il salua la restauration de Charles II en Angleterre — contre les puritains alliés de la veille. On n’avait pas encore inventé le mot de Real Politik, mais l’idée était déjà là.
    Et se sentant mourir, il eut l’habileté suprême de faire semblant de léguer son immense fortune au roi, qui fort obligeamment refusa le cadeau, car il ne sied guère à un souverain de devoir son aisance à un particulier. Dumas a tout raconté en détail dans le Vicomte de Bragelonne. Du coup, cela lui permit de doter très richement ses nièces, qui n’étaient pas non plus des premiers prix de vertu. La belle affaire !

    Bref, un type très faisandé, et le plus grand Premier ministre que nous eûmes jamais — si grand que Louis XIV, à sa mort, renonça à le remplacer.

    Voilà un homme politique selon mon cœur. Doué, intrigant, parti d’en bas et arrivé en haut, promettant tout sans jamais tenir, amateur d’arts et de musique — c’est grâce à lui que l’opéra est entré en France. Attaqué comme jamais homme politique d’aujourd’hui ne le fut (on compte près de 5000 « Mazarinades », ces terrifiants pamphlets écrits contre lui et l’accusant de tous les péchés capitaux), et survivant toujours. Italien de surcroît — Giulio Mazarini, un immigré ! —, mais éminemment français : imaginez un Algérien dans la même situation, et vous aurez une idée de ce que l’on pensait et disait de lui, y compris le fait qu’il aurait eu le « vice italien », qui était puni de mort à l’époque. Il a même eu l’idée de faire élever Philippe, le frère cadet du roi, selon des mœurs assez peu viriles, afin qu’il n’ait jamais l’idée de comploter contre son frère, comme l’avait fait Gaston contre Louis XIII. Tout en le mariant quand même à la sœur du roi d’Angleterre, pour préserver l’avenir.

    Bref, une ordure d’un immense talent. Sans lui, le Rivesaltes et le Maury seraient des vins espagnols. Un désastre.

    Evidemment, tout cela se passait à une époque où la France dominait l’Europe. Maintenant que nous sommes un renvoi en bas de page de l’historiographie allemande, nous nous soucions plus de morale  que de grandeur —c’est tout ce que l’on nous laisse.

    bruno-le-roux-demission-fekl-660x400.jpgQue la présente campagne présidentielle se consacre depuis deux mois à l’exposé de vétilles en dit long sur la façon dont la société du spectacle camoufle le politique sous des falbalas, et d’acteurs que nous fûmes (le passé simple aussi fait de moi un homme de droite) nous transforme en marchandises. Parce c’est de politique qu’il s’agit — et personne n’en parle. On frappe sur des casseroles, on s’invective sur des frais de transport (ça avait commencé il y a vingt ans à propos des « frais de bouche » de Chirac à l’Hôtel de ville de Paris), on met en examen pour des broutilles — alors qu’on devrait inculper tous ceux qui ont miné la France depuis trente ans, par exemple dans l’Education nationale — et qui persistent et signent.

    Allez, votez en fonction des programmes, en fonction de capacités réelles des candidats, en fonction de vos convictions politiques. Sinon la prochaine fois je vous raconte la vie de l’abbé Dubois — dont on fait les pipes.  • 

    Jean-Paul Brighelli
    Enseignant et essayiste, anime le blog Bonnet d'âne hébergé par Causeur

  • François, pape philanthrope

     

    Par François Marcilhac 

     

    3466611312.jpgLe milliardaire et «  philanthrope  » George Soros semble avoir trouvé dans le pape François un concurrent redoutable en matière de surenchère immigrationniste. Car si les vingt et une mesures, qui peuvent être tirées du message papal publié le 21 août dernier, pour la journée mondiale du migrant et du réfugié du 14 janvier 2018, semblent pour un grand nombre d’entre elles démarquées du plan en six points que Soros, financier actif du village planétaire, a édicté en septembre 2015, toutefois, celui-ci semble plus raisonnable que le pape puisqu’il reconnaît tout de même que le placement des réfugiés doit s’effectuer non seulement «  là où ils le souhaitent  » mais également «  là où ils sont désirés  », et «  à un rythme adapté aux capacités européennes d’absorption  ». Foin de détails aussi bassement matérialistes pour le pape  : l’accueil des migrants et réfugiés ne doit prendre en compte ni les capacités économiques des pays hôtes, ou plutôt des pays cibles, ni leurs capacités culturelles d’absorption de masses humaines dont le mode de vie est souvent à l’opposé du nôtre. Qu’importe  ? Il s’agit d’«  accueillir, protéger, promouvoir et intégrer  » les migrants, par ailleurs non distingués des réfugiés, et qui, de ce fait, n’ont que des droits et aucun devoir, puisqu’ils incarneraient l’humanité souffrante.

    L’Action française et l’Église

    L’Action française n’a évidemment pas à se prononcer sur la compatibilité des propos du pape avec la théologie catholique. Mouvement laïque, accueillant en son sein pour leur seule qualité de citoyens des Français de toutes confessions et religions, ou simplement athées ou agnostiques, elle a néanmoins toujours observé que la physique politique qu’elle enseigne, et qui est conforme à l’ordre naturel, rejoint par cela même la doctrine sociale de l’Église. Sur ce point, elle ne fut jamais prise en défaut  : c’est pourquoi, si elle eut à subir, pour un temps, les foudres disciplinaires du Vatican, jamais elle ne fut condamnée sur le plan doctrinal. Maurras, lui-même agnostique, s’est toujours émerveillé de cet accord, du reste fondé dans le thomisme, entre les principes politiques, dégagés inductivement, et l’enseignement de l’Église. On est toutefois en droit de se demander si François ne méjuge pas sa qualité de pape pour celle de simple philanthrope en prenant ainsi fait et cause pour l’idéologie immigrationniste. Comme le remarque sur son site Metablog l’abbé de Tanoüarn, dans un article judicieusement intitulé «  Qu’est-ce qu’un Christ humanitaire  ?  »  : «  comme pasteur universel, la responsabilité du pape n’est pas “le développement humain intégral”, mais le salut des âmes  », ajoutant que la papauté moderne «  connaît la même tentation que la papauté médiévale d’Innocent III à Boniface VIII, cette confusion du spirituel et du temporel  », à savoir «  la même “temporalisation du royaume de Dieuque déplorait Jacques Maritain dans Le Paysan de la Garonne et la même volonté d’atteler le successeur de Pierre à un projet temporel universel, dont il serait la clé de voûte  ».

    Nous l’avions déjà observé pour l’Église de France en analysant, il y a juste un an, la calamiteuse lettre du Conseil permanent de la Conférence des évêques de France «  aux habitants de notre pays  »  : la sécularisation du message évangélique fait le lit de l’idéologie mondialiste en faisant du village planétaire le village-témoin, ici-bas, de la Jérusalem céleste. Ne rajoutons pas aux malheurs du monde en appelant amour du prochain la compromission avec la fausse générosité de l’oligarchie internationale, qui favorise de dramatiques déplacements de population pour en finir avec les nations. Et «  de même que l’on ne doit pas confondre l’hospitalité et l’immigrationnisme, de même il ne faut pas confondre l’universalisme chrétien respectueux de chaque identité et le mondialisme qui les détruit  » (abbé de Tanoüarn, Minute du 30 août 2017). Ne pensons pas non plus révolutionner le cœur de l’homme en opposant, en lui, le chrétien au citoyen, via l’opposition de la «  centralité de la personne humaine  » et des devoirs de l’État  : prétendre que la sécurité personnelle passe avant la sécurité nationale n’a évidemment aucun sens.

    Pas de sécurité sans cadre politique

    Laurent Dandrieu n’a pas eu de mal à montrer qu’«  il n’existe aucune sécurité personnelle qui puisse exister en dehors de cadres politiques, juridiques et légaux qui en sont le rempart  »  ; «  par ailleurs, le principe de la centralité de la personne humaine oblige à considérer, aussi, que les citoyens des nations occidentales ont un droit évident à la sécurité nationale  » (Le Figaro du 22 août 2017). Ce que rappelle également le philosophe chrétien Rémi Brague, par ailleurs grand spécialiste de l’islam, qui ajoute que l’État doit «  empêcher que les migrants se conduisent, comme on dit, “comme en pays conquis”, qu’ils importent en Europe les conflits qui les opposaient entre eux  », précisant  : «  une parabole  », comme celle du bon Samaritain, «  s’adresse à “moi  »  ; «  elle m’invite à réfléchir sur ma propre personne singulière, ce qu’elle est, ce qu’elle doit faire  »  ; «  un État n’est pas une personne  » (Le Figaro du 1er septembre). Non pas opposition, mais différence d’ordre. C’est pourquoi, d’ailleurs, un État ne connaît que des ennemis publics (hostes) et les personnes privées des ennemis privés (inimici), dont, en bons chrétiens, elles doivent s’efforcer de pardonner les offenses. Mais en tant que citoyen, on doit aussi savoir combattre avec détermination les ennemis (hostes) de sa patrie, même si cela doit toujours se faire sans haine  : «  le sang de nos ennemis est toujours le sang des hommes  », rappelait Louis XV, le soir de Fontenoy  ; le «  sang impur  » est une notion républicaine  : elle n’est pas française.

    Ne jetons pas, enfin, aux orties l’identité pluriséculaire des sociétés européennes au profit d’un multiculturalisme qui provoque déjà chez nous ses effets multiconflictualistes. Il faudrait, selon le message papal, «  favoriser, dans tous les cas, la culture de la rencontre  »  : mais comment croire, sans un angélisme particulièrement aveugle, que favoriser une «  intégration  » opposée à l’assimilation, c’est se placer «  sur le plan des opportunités d’enrichissement interculturel général  »  ? Chaque jour nous apporte, en Europe, le témoignage du contraire. Non, tendre à une société multiculturelle généralisée ne rapprochera pas les hommes entre eux  ! Il fut un temps où le cardinal Bergoglio était plus lucide  : «  Qu’est-ce qui fait qu’un certain nombre de personnes forment un peuple  ? En premier lieu, une loi naturelle, et un héritage. En second lieu, un facteur psychologique  : l’homme se fait homme dans l’amour de ses semblables. […] Le “naturel” croît en “culturel”, en “éthique”. Et de là, en politique, dans le cadre de la patrie, qui “est ce qui donne l’identité”.  » (Cité in F. Rouvillois, La Clameur de la Terre, JC Godefroy, 2016, p. 65-66) Comme le rappelait Maurras dans Pour un jeune Français, la cohésion de la nation suppose qu’on s’accorde sur un bien vraiment commun à tous les citoyens. «  En d’autres termes, il faudra, là encore, quitter la dispute du Vrai et du Beau pour la connaissance de l’humble Bien positif. Car ce Bien ne sera pas l’absolu, mais celui du peuple français.  » Seul ce bien commun national qui, loin d’être contraire au bien humain, l’incarne, sera notre guide sur la question des prétendus «  migrants  » – concept idéologique dont la fonction est de cacher des réalités différentes pour mieux organiser la soumission des nations à un ordre supranational.  

    Paru dans l'Action Française 2000 du 7 Septembre 2017.

     

    A lire aussi dans Lafautearousseau ...

    En deux mots : Désolés, Saint-Père, nous ne sommes pas d'accord

  • Géorgie : GPA et trafic d’enfants, par Guillaume Staub.

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

    Ne nous leur­rons pas, le mariage pour tous fut une porte ouverte à la PMA, PMA qui elle– même nous com­man­de­ra d’au­to­ri­ser la GPA ou le prin­cipe des mères por­teuses. Mais qu’est-ce que la GPA si ce n’est une cho­si­fi­ca­tion de l’en­fant ? C’est-à-dire la réduc­tion d’une per­sonne à un bien dont d’autres peuvent dis­po­ser pour assou­vir leurs dési­rs, une nou­velle sorte d’es­cla­vage. Quelle dif­fé­rence entre la mère qui por­te­ra en elle un enfant pour autrui et les mar­chés d’es­claves ? Un ven­deur, un ache­teur, un mar­ché. La fina­li­té de l’acte ?

    Ne nous leurrons pas, le mariage pour tous fut une porte ouverte à la PMA, PMA qui elle– même nous commandera d’autoriser la GPA ou le principe des mères porteuses. Mais qu’est-ce que la GPA si ce n’est une chosification de l’enfant ? C’est-à-dire la réduction d’une personne à un bien dont d’autres peuvent disposer pour assouvir leurs désirs, une nouvelle sorte d’esclavage. Quelle différence entre la mère qui portera en elle un enfant pour autrui et les marchés d’esclaves ? Un vendeur, un acheteur, un marché. La finalité de l’acte ?

    Guillaume Staub.jpgJe ne vois guère de dif­fé­rence et m’é­tonne que l’Homme blanc si friand de repen­tance ne s’of­fusque pas d’ins­tau­rer ce nou­vel escla­vage. Disons-le tout net, la GPA n’i­ra pas sans tra­fic d’en­fants. Com­ment pou­vons-nous en être aus­si sûrs ? Nous n’a­vons qu’à regar­der les pays euro­péens qui pra­tiquent déjà léga­le­ment la GPA rému­né­rée : la Géor­gie, la Rus­sie, l’U­kraine et l’Al­ba­nie. 

    En Géor­gie, le 25 août, la ministre de la Jus­tice Tea Tsu­lu­kia­nia intro­duit les nou­veaux amen­de­ments qui restreignent la loi sur les mères por­teuses. Désor­mais, les parents d’intention, « impli­quant à nou­veau une femme et un homme seule­ment », doivent avoir vécu ensemble depuis au moins un an avant d’entamer les pro­cé­dures de GPA. Marié ou non, le couple, confron­té ou non à des pro­blèmes d’infertilité́, qui sou­haite réel­le­ment avoir et éle­ver un enfant doit s’engager à l’éduqueret « ne pas prendre l’enfant en Géor­gie pour vio­ler ensuite ses droits » 

    Nous ne nous arrê­te­rons pas sur la médio­cri­té́ de ces res­tric­tions si peu contrai­gnantes – marié ou non, confron­té ou non à des pro­blèmes d’in­fer­ti­li­té́, une seule année de vie com­mune, etc -, mais sur ce qu’elles signi­fient. Ces dif­fé­ren­tes­dé­ci­sions visent à empê­cher – ou du moins à limi­ter – le tra­fic d’en­fants ou la traite des nour­ris­sons. Par­lons clai­re­ment. Si ces amen­de­ments furent faits c’est parce que ce tra­fic existe et est ren­du pos­sible par la légis­la­tion à tra­vers la notion même de GPA rému­né­rée. Trois choses. Pre­miè­re­ment, la GPA en elle-même fait de l’en­fant un bien, un objet. Deuxiè­me­ment, il est donc natu­rel qu’elle puisse être­ré­mu­né­rée, tout bien peut être l’ob­jet d’un mar­ché. Troi­siè­me­ment, tout mar­ché n’est contrô­lable qu’à un cer­tain degré et engendre des réseaux paral­lèles non sur­veillés. Qu’im­porte les amen­de­ments votés, la Géor­gie s’est enga­gée­dans une voie sans issue où la misère humaine sera exploi­téeet les enfants ven­dus sur les mar­chés. La GPA accep­tée, aucune digue phi­lo­so­phique ne peut empê­cher les pires dérives. Que pen­ser de ces enfants com­man­dés avant le confi­ne­ment et qui ne purent être livrés à leurs « parents » d’a­dop­tion ? Ils subissent le même sort que les autres mar­chan­dises, c’est-à-dire qu’ils sont sto­ckés en atten­dant de pou­voir être livrés ; la situa­tion de ces bébés est­par­ti­cu­liè­re­ment dra­ma­tique en Ukraine où ils sont réunis dans des pou­pon­nières impro­vi­sées par les agences de GPA. Ces bébés passent leurs pre­mières semaines en iso­le­ment, quel trau­ma­tisme cela peut géné­rer et quelle abo­mi­na­tion est pré­sente sous nos yeux. Même dans les cas où les com­man­di­taires viennent récep­tion­ner l’enfant, l’enfant est tou­jours sépa­ré de sa mère de nais­sance, déli­bé­ré­ment expo­sé au risque bien connu de la bles­sure d’abandon, un choc trau­ma­tique majeur qui, s’il est révé­lé́ par les cir­cons­tances pré­sentes, existe dans toutes les GPA (Infochrétienne.com). Et que dire des com­mandes qui seront aban­don­nées pour diverses rai­sons ? Nous nous rap­pe­lons de ce fait sor­dide qui eut lieu en 2014. Un couple d’Aus­tra­liens com­mande une enfant en Thaï­lande, mal­heu­reu­se­ment celle-ci était tri­so­mique et souf­frait de pro­blèmes car­diaques ; ce même couple renon­ça­donc à la prendre, aban­don­nant la com­mande, et prirent sa sœur qui était en par­faite san­té́. Quand la qua­li­té n’est pas au ren­dez-vous, on exige un échange ou un rem­bour­se­ment. L’ob­ser­va­tion des hor­reurs qui se pro­duisent dans les pays où la GPA rému­né­rée est légale doit être un de nos prin­ci­paux argu­ments dans notre lutte contre cette pra­tique inique qui s’op­pose fon­da­men­ta­le­ment à la digni­té́ de l’Homme.

  • Entretien avec Pierre-André Taguieff, deuxième partie : la posture « islamo-gauchiste » à l'université, par Hadrien Brac

    Pierre-André Taguieff 

    Les déclarations de Frédérique Vidal sur l'« islamo-gauchisme » à l'université ont créé la polémique. À travers un entretien en trois parties, « Marianne » donne la parole à Pierre-André Taguieff qui a travaillé à forger le terme au début des années 2000. Dans cette deuxième partie, le philosophe et politologue décrit les manifestations de la posture « islamo-gauchiste » à l'université.

    L'« islamo-gauchisme » gangrène-t-il l'université ? Marianne se propose de revenir aux sources de ce débat à travers un entretien fleuve avec Pierre-André Taguieff. Au début des années 2000, alors que la deuxième Intifada éclatait, le philosophe s'est attelé à conceptualiser « l'islamo-gauchisme. » Après en avoir donné sa définition, il détaille dans cette deuxième partie les manifestations de la posture « islamo-gauchiste » à l'université et les départements les plus affectés à ses yeux.

    À LIRE : Première partie de l'entretien : qu'est-ce que l'islamo-gauchisme ?

    Marianne :Pour que nos lecteurs s’en fassent une idée, avez-vous des exemples précis de manifestations de l’islamo-gauchisme à l’université ?

    Pierre-André Taguieff : Il faut distinguer analytiquement la question des contenus des enseignements de celle des pratiques de censure, d’intolérance, de refus du pluralisme et de la discussion libre. L’un des indices de la posture islamo-gauchiste est la dénonciation véhémente de la laïcité, réduite à une expression du « racisme anti-musulmans » ou de l’islamophobie et dénoncée comme l’arme principale des « dominants » et du « racisme d’État » ou du « racisme républicain ». Pour les militants du pseudo-antiracisme décolonial, l’« islamophobie » représente la principale forme du racisme existant dans les démocraties occidentales. On ne s’étonne donc pas de rencontrer les indigénistes Saïd Bouamama et Houria Bouteldja, aux côtés de Tariq Ramadan, participant à la « Journée internationale contre l’islamophobie » organisée le 13 décembre 2014 à l’université Paris 8-Saint-Denis.

    Autre exemple : la conférence d’Alain Finkielkraut à Sciences Po Paris le 23 avril 2019, dénoncée notamment par un petit collectif d’étudiants gauchistes, « Sciences Po en lutte – Institut Clément Méric », se réclamant de l’« antiracisme politique » cher aux idéologues décoloniaux, n’a pu avoir lieu qu’en étant déplacée avec l’aide et sous la protection de la police. Pour les associations d’extrême gauche comme pour les diverses mouvances islamistes, Finkielkraut est un « raciste », un « sioniste » et un « islamophobe ».

    Dans les milieux universitaires, depuis le milieu des années 2000, un certain nombre d’enseignants relaient les thèmes et les thèses des Indigènes de la République, tels Olivier Le Cour Grandmaison (université Paris-Saclay) ou Nacira Guénif-Souilamas (Paris 8). Cette dernière présente ainsi ses recherches dans un libre codirigé par Le Cour Grandmaison, Racismes de France ( 2020) : « Elle s’attache aux questions croisées de genre, ethnicité, race, inégalités selon une perspective située, féministe et décoloniale, dans les espaces euraméricains, européen et les Suds. »

     

    « Depuis le milieu des années 2000, un certain nombre d’enseignants relaient les thèmes et les thèses des Indigènes de la République. » 

     

    Le terrorisme intellectuel exercé dans certaines universités par les milieux décoloniaux peut être illustré par l’affaire Dorin. Le sociologue Stéphane Dorin, enseignant-chercheur à l’université de Limoges et membre du Gresco (laboratoire de recherches sociologiques), a été exclu le 30 novembre 2018 de son laboratoire pour s’être élevé contre la tenue, dans son université, d’un « séminaire d’études décoloniales » où la porte-parole du Parti des Indigènes de la République, Houria Bouteldja, devait être l’invitée-vedette. Le sociologue, violemment attaqué par les militants décoloniaux locaux et soumis à des pressions d’un certain nombre de ses collègues, n’a pas été soutenu par la présidence de son université. La faillite des instances internes au monde académique a contraint Stéphane Dorin à faire appel au Tribunal administratif de Limoges qui, le 8 février dernier, a ordonné à l’université de Limoges de le réintégrer dans son laboratoire.

    Y a-t-il des disciplines qu’il faut ranger dans leur ensemble comme appartenant à l’islamo-gauchisme ? Par exemple, l’ensemble des « cultural studies », des études postcoloniales ou sur un plan plus politique du décolonialisme sont-ils à ranger dans la catégorie de l’islamo-gauchisme ? Qu’est-ce qui distingue ces différents termes ?

    Dans leur ensemble, non. Il y a tout d’abord des secteurs ou des départements de l’enseignement supérieur particulièrement affectés par l’endoctrinement islamo-gauchiste qui met au premier plan la question de l’islamophobie et des « discriminations systémiques » censées toucher particulièrement les musulmans, en tant que minorité dominée et « racisée » : la sociologie, la science politique, la littérature comparée, les départements d’anglais, etc.

    Il y a ensuite l’ensemble des « Studies » à l’américaine (« Gender Studies », « Queer Studies », « Postcolonial Studies », « Cultural Studies », etc.), qui sont le plus souvent des modes d’institutionnalisation de courants idéologiques d’extrême gauche ralliés au décolonialisme, dont le projet est de « décoloniser » les sciences sociales, c’est-à-dire, en clair, de les détruire. L’objectif final est de désoccidentaliser le savoir, comme si c’était là l’unique voie de la libération ou de l’émancipation. Tous ces courants idéologiques illustrent un processus en cours de refonte de l’utopie révolutionnaire. Sur tout cela, je renvoie à mon livre L’Imposture décoloniale.

     

    « L’objectif final est de désoccidentaliser le savoir. » 

     

    Quelle est la place réelle des études postcoloniales dans les sciences sociales aujourd’hui ? S’agit-il encore de tendances minoritaires ?

    Pour répondre à cette question, il faudrait pouvoir se fonder sur une enquête impartiale, qui reste à réaliser. « Postcolonial » est un terme dont le sens est flou et la référence variable. C’est pourquoi il est difficile de définir les frontières des « études postcoloniales », qui n’ont pas de méthodologie propre et dont les spécialistes labélisés jouent la carte d’une interdisciplinarité brouillonne. On observe la diffusion d’une vulgate postcoloniale dans le champ tout entier des sciences sociales, mais aussi dans les départements de littérature. Certains d’historiens, par exemple, travaillent en s’inspirant des approches postcoloniales, sans nécessairement se rattacher eux-mêmes à tel ou tel courant du post colonialisme.

    Source : https://www.marianne.net/

    Ces courants sont identifiés par des grappes de noms de Pères fondateurs (le plus célèbre étant Edward Said), qui sont à l’origine de traditions para-religieuses n’ayant rien à voir avec les normes de la recherche scientifique. Mais surtout, le drapeau du « postcolonial » permet la création de niches idéologiques dans certains départements de l’enseignement supérieur. Leurs membres forment des communautés sectaires qui font du prosélytisme tout en diffamant ceux qui les critiquent, traités d’« islamophobes », de « réactionnaires », etc. Ils ont un comportement de militants et de conquérants, imposant leurs thèmes et leurs thèses dans le champ de la lutte pour les postes. C’est pourquoi les jeunes chercheurs sont souvent attirés par le postcolonial.

  • Le Sud global contre l’occident ?

    carte sud global


     

    La guerre en Ukraine, déclenchée il y a presque deux ans, a largement rebattu les cartes de la géopolitique mondiale. L’occident, sûr de son bon droit et de sa supériorité morale, a eu la surprise de constater que « le reste du monde » n’était pas acquis à sa croisade anti-russe. Il a pris acte, bien à regret et sans être encore allé au bout de sa réflexion, du fait que les pays de son ancienne sphère d’influence voulaient agir et penser par eux-mêmes.

    Ce reste du monde, qualification condescendante et obsolète, est appelé dorénavant « sud global », en attendant mieux. Car en effet, les pays concernés par cette appellation ne se situent pas tous au sud du globe. Qu’est-ce donc que ce sud global qui contrarie les plans de l’empire américain et de ses vassaux ?

    Qu’est-ce que le Sud global ?

    1A.pngLa réponse n’est pas si complexe. Les pays concernés constituent l’Afrique, l’Asie, y compris le Proche-Orient, et l’Amérique du Sud. Il conviendrait d’y rajouter la Russie et la Chine mais, en tant que co-adversaires numéros un de l’empire, ils jouissent d’un statut spécial, si l’on peut dire.

    Il convient toutefois d’apporter des nuances géographiques à ce découpage un peu simpliste. De l’Asie il faut retirer le Japon, la Corée du sud, Taiwan et les Philippines, alliés traditionnels des Etats-Unis. En Europe il faudrait peut-être rajouter les rebelles hongrois et maintenant slovaques, voire serbes, même si l’attrait des chèques européens à venir tempère parfois leurs ardeurs. Mais beaucoup d’observateurs considèrent que puisqu’ils sont en Europe ils ne font pas partie du sud global. Soit, mais tout se discute.

    Quoi qu’il en soit, cela fait beaucoup de monde en lice pour contrer ou contenir les velléités bellicistes de l’occident. Pour autant, il ne faudrait surtout pas croire que ce sud global soit homogène et allié pour une résistance contre l’occident. L’exemple le plus frappant est celui de l’Inde. Le pays le plus peuplé du monde et dont le poids géopolitique et économique est croissant, est en effet dans une configuration singulière : membre des BRICS comme la Chine, tout en étant son adversaire sur bien des sujets, ami des Russes mais aussi des Américains, membre de l’alliance militaire anglo-saxonne Aukus dans le Pacifique, mais premier acheteur d’armes de la Russie, on peut dire que le premier ministre Modi cultive le paradoxe. La conclusion est ambivalente : jamais l’Inde ne se proclamera ennemi de l’occident mais jamais elle ne livrera d’armes à l’Ukraine ni ne sanctionnera la Russie et c’est en cela qu’elle est membre du sud global.

    D’autres pays sont dans une posture plus affirmée : l’Arabie Saoudite, proche de la Russie et de plus en plus en plus indépendante de l’Amérique, l’Egypte, dans une situation similaire, tout comme le Brésil ou les Emirats Arabes Unis. Ces pays sont d’ailleurs membres des BRICS, anciens ou récents, alliance disparate mais toutefois très désireuse de changer les règles du jeu international, notamment financières.

    Les anciennes colonies de l’Afrique francophone sont également en mouvement vers plus d’autonomie stratégique tout comme de nombreux pays d’Amérique latine.

    IL ne faut pas s’y tromper : c’est un mouvement qui éloigne ces pays de l’occident mais ce n’est pas une croisade anti-occidentale ni même anti-américaine. Trop d’intérêts communs unissent, par exemple, les pays du Proche-Orient à l’Amérique pour que la rupture soit violente. Il s’agit plutôt d’une prise de distance, d’une volonté d’indépendance affirmée et du refus de participer aux errements stratégiques de l’Amérique. Les agressions contre l’Irak et la Libye, l’abandon de l’Afghanistan sont dans toutes les mémoires et l’empire n’a aucune chance de convaincre ce sud global d’accompagner son offensive contre la Russie et la Chine.

    Malgré son hétérogénéité, le sud a la même analyse : libre à l’Amérique de partir en guerre militaire contre la Russie ou économique contre la Chine, nous ne sommes pas concernés. Si l’Europe, même si c’est contraire à ses intérêts, veut suivre, c’est son affaire, pas la nôtre. Ce sud veut échanger avec qui bon lui semble, à commencer par la Chine, et s’entendre avec la Russie, même si ce n’est pas occidentalo-compatible.

    Certains vont cependant plus loin que d’autres : le Niger, le Burkina-Faso, le Mali ou la Centrafrique sont résolument anti-occidentaux ce qui n’est pas le cas du Sénégal, de la Côte d’Ivoire ou du Bénin. On le voit, ce sud global est une simplification commode qui abrite de multiples nuances.

    Il ne faut donc pas majorer son influence : il ne s’agit pas d’une marche irrésistible vers une nouvelle hégémonie qui se substituerait à celle de l’empire américain.

    Vers un monde multipolaire

    Mais tout cela est révélateur du grand basculement géopolitique mondial que l’on peut observer depuis que la Russie a envahi l’Ukraine. Ce mouvement, qui ne fait que commencer, devrait ainsi avoir une conséquence majeure : la fin inéluctable du monde unipolaire issu de la chute de l’Union soviétique au profit d’un monde multipolaire où de multiples forces s’exerceront ensemble ou en sens contraire.

    Certains, à Washington, et notamment chez les néo-conservateurs, voient venir ce scenario avec inquiétude. C’est pourquoi l’Amérique tente d’alerter le monde sur la dangerosité supposée de ce monde multipolaire. Et si c’était le contraire ? Car enfin, combien de guerres ont été déclenchées par un empire sûr de sa supériorité militaire et donc de son impunité ? Citons ainsi les guerres illégales contre la Serbie, l’Afghanistan, l’Irak et la Libye. Ajoutons les guerres indirectes provoquées ou entretenues en Tchétchénie, en Bosnie, en Croatie, au Kosovo, en Géorgie ou en Syrie. Notons au passage que cette brillante liste s’est interrompue avec la présidence de Donald Trump.

    Joe Biden s’est ensuite installé aux commandes et l’on peut rajouter l’Ukraine au palmarès américain. Certes la guerre russe est tout aussi illégale que les précédentes, mais elle serait terminée depuis longtemps si l’Amérique, après l’avoir largement provoquée, ne s’escrimait pas à la faire durer. Combien de morts en plus pour une défaite ukrainienne inéluctable ? D’un conflit qui aurait pu être court et régional, l’Amérique en a fait une guerre longue et de haute intensité. L’armée russe en sortira renforcée avec une expérience bien plus éprouvée que celle des forces de l’OTAN.

    Ce monde multipolaire qui vient n’empêchera évidemment pas des conflits régionaux d’éclater car la confrontation est au cœur de la nature humaine. Mais il permettra sans doute d’éviter leur extension périlleuse et interdira des guerres fabriquées de toutes pièces, comme en Irak, guerre absurde, symbole tragique et grotesque de la tyrannie américaine.

    Si l’Ukraine a été le déclencheur visible de ce vaste basculement géopolitique, la relance sanglante du conflit israélo-palestinien peut l’accélérer. En effet, La violence de la réaction israélienne après les attentats terroristes du Hamas a indisposé nombre de pays du sud global, en particulier les pays arabes. Les timides appels à la retenue des Etats-Unis n’ont convaincu personne et pour cause, les demandes de cessez-le-feu déposés à l’ONU par plusieurs pays se sont systématiquement heurtées au véto américain. Biden a levé un sourcil pour condamner les attaques des colons israéliens en Cisjordanie mais rien de concret ne s’est passé. Ce soutien inconditionnel, malgré des milliers de morts civils, assorti de surcroît d’importantes livraisons d’armes, aura des conséquences.

    En face, l’Iran a fait preuve d’une retenue qui n’était pas écrite à l’avance. Israël a maintenant le mauvais rôle et son indéfectible allié américain également par la même occasion.

    L’Amérique est dorénavant bien embarrassée par ces deux dossiers brûlants : la défaite à venir de l’Ukraine, donc de l’OTAN, et le jusqu’au boutisme israélien.

    Cette fois, l’Empire vacille.

  • Mythes immigrationnistes : Jacques Dupâquier contre ”l’entreprise subversive”….

            Mardi, nous avons donné l'émission consacrée par Canal Académie à Jacques Dupâquier, après son décès.

            Voici aujourd'hui l'intégralité de l'excellent texte de Dupâquier publié dans Renaissance catholique, suivi d'un court entretien au cours duquel il répond aux questions d'un journaliste de RC.

            On y verra justement dénoncés les mythes immigrationnistes et l'entreprise subversive à laquelle nous sommes confrontés.

            L'importance et la qualité des arguments et de l'étude de Dupâquier commandent qu'on leur donne la plus large diffusion possible. Voilà pourquoi nous réunissons en un seul PDF le texte que vous allez lire ci-après et le débat qui l'a prolongé....

    Dossier : Qu’est-ce qu’être Français ?

     Naissance d’un peuple : l’histoire démographique de la France, par Jacques Dupâquier, de l’Institut (30 janvier 1922 – 23 juillet 2010)

     

            Que n’a-t-on daubé sur le mythe de nos ancêtres les Gaulois ! Et combien de bruyantes protestations la commémoration du prétendu “mythe” de Clovis et du baptême de la France n’a-t-elle pas soulevées cette année ! Or les vraies questions que posent la naissance du peuple français et son histoire démographique dépassent largement le cadre de cette polémique. Le vrai scandale tient au fait que toute l’histoire du peuplement de la France est présentée par de pseudo-scientifiques (mais de vrais partisans d’une France multiculturelle) d’une manière abominablement tendancieuse.

            La négation de l’identité culturelle et des lointaines implantations de la nation française repose au moins sur quatre idées reçues.

            La première idée est que notre territoire aurait été peuplé depuis deux millions d’années par des vagues successives qui en auraient entièrement brassé et métissé la population. Nous serions donc tous des étrangers ou des descendants d’étrangers.

            La deuxième idée est que la France aurait une longue tradition d’accueil des immigrés, qu’elle serait historiquement multiculturelle, que la nation serait d’origine récente, et remonterait non à Clovis, non à Saint Louis, non à Jeanne d’Arc ; mais à la Révolution, non à Bouvines, mais à Valmy (victoire qui, vous le savez, est quant à elle, un vrai mythe).

            Troisième idée : la France ne serait pas plus submergée aujourd’hui par les étrangers qu’elle ne le fut auparavant.

            Enfin quatrième idée : depuis vingt ans se développerait un processus permanent de rapprochement entre la structure de la population nationale et celle de la population étrangère.

    Sommaire

    ·         1. Le mythe des origines

    ·         2. Le mythe du brassage

    ·         3. Le mythe de la banalité

    ·         4. Le mythe de l’intégration

    ·         Débat

     

            Ayant dirigé la publication d’une Histoire de la population française (PUF), je crois avoir acquis quelques lumières sur le peuplement de la France. Je vais aujourd’hui essayer d’y reconnaître la part des continuités et celle des discontinuités, celle des convergences et celle des divergences, en analysant les idées reçues dont je viens de vous parler, idées qui sont le fondement d’une entreprise subversive. Je vous parlerai donc du mythe des origines, du mythe des vagues migratoires, du mythe de l’apport des étrangers à la formation française, enfin des problèmes actuels de l’immigration, de la confusion des mots et du trucage des chiffres.

     1. Le mythe des origines

            Je ne m’attarderai pas ici sur les mythes encore très répandus concernant l’origine de l’homme et le peuplement du monde. On n’en est plus évidemment en cette fin du XXe siècle à l’image simpliste que l’homme descend du singe, mais on a introduit dans l’histoire de l’espèce humaine une vision évolutionniste et déterministe qui gomme les divergences et les discontinuités. Un schéma bien connu, reproduit de multiples fois, qui figure encore au Musée de l’Homme, présente l’évolution des hominidés comme un processus continu depuis les lémuriens jusqu’à l’homme d’aujourd’hui. On voit à gauche un petit ramapithèque ; ce ramapithèque, quelques décimètres plus loin, se redresse, il grandit, et le volume de son crâne augmente, sans que l’on sache très bien pourquoi ni comment. Dans cette nouvelle Genèse, l’australopithèque engendre le pithécanthrope, le pithécanthrope engendre le néanderthalien, le néanderthalien engendre le “sapiens-sapiens”, c’est-à-dire nous-mêmes ; c’est la version revue et corrigée des mythes transformistes du siècle dernier.

            Ce qui est très gênant pour les inventeurs de ce schéma, c’est que l’on n’ait jamais trouvé de chaînon intermédiaire. Par exemple, il n’y a pas trace d’espèce intermédiaire entre l’homme de Néanderthal et l’homme de Cro-Magnon. Chacun des rameaux successifs est né d’une souche unique, résultant probablement d’une mutation isolée, en somme d’un Adam et d’une Eve, et il a éliminé ses prédécesseurs soit violemment (on le soupçonne en ce qui concerne la fin des néanderthaliens), soit par reproduction différentielle, car la nouvelle espèce était plus douée.

            En outre, évidemment, il est difficile de parler d’homme tant qu’il n’existe pas de preuve d’une activité intellectuelle : il ne suffit pas de savoir casser des cailloux pour faire un homme, plusieurs espèces animales (et de singes en particulier) sont très capables de fabriquer des outils. De l’aveu de nombreux spécialistes, c’est l’apparition de sépultures chez certains néanderthaliens qui aurait signé l’acte de baptême de l’homme en tant qu’être pensant ayant la faculté de prévoir.

            Il en est de même pour l’histoire du peuplement du monde. Sur les cartes et dans les manuels, on présente l’occupation des continents comme une sorte de grande tache d’huile : l’humanité se serait répandue sur la planète à partir du berceau africain.

            Or, en réalité, le peuplement du monde ne s’est nullement opéré par déversement de masses excédentaires, mais par injection de très petits groupes d’hommes dans des espaces favorables, des espaces nourriciers où ils se sont multipliés sur place. C’est ce qui s’est passé en particulier pour le peuplement de l’Amérique. N’imaginons pas en effet des millions d’Asiatiques franchissant le détroit de Béring et peuplant progressivement le nouveau monde. Non : un groupe très réduit —peut-être douze à trente personnes, comme en témoigne la pauvreté du patrimoine génétique des Indiens a dû se glisser il y a 40 000 ans (à une époque où le détroit de Béring était asséché en raison des glaciations) le long de la côte, entre le glacier de l’Alaska et le Pacifique ; il est arrivé en Californie et, en quelques siècles, par une progression géométrique à la Malthus, cette population a atteint un million, puis une dizaine de millions.

            Autre exemple : le Canada français, occupé par des gens qui avaient les mêmes comportements, le même système de valeurs que le peuple français, a été peuplé par environ 5 000 personnes qui, en l’espace de 300 ans, ont produit entre neuf et onze millions d’individus (si l’on compte les Canadiens habitant actuellement les Etats-Unis).

            C’est probablement ce qui s’est passé dans le cas de la France. A l’époque du paléolithique, la population totale de la France, autant qu’on puisse l’évaluer en analysant les espaces occupés et les genres de vie, n’a jamais dû dépasser 20 000 à 50 000 personnes. Quelque chose de nouveau s’est produit à partir du 6e millénaire av. JC : de petits groupes d’hommes, porteurs de techniques nouvelles —celles de l’agriculture, de l’élevage, de la poterie et d’autres encore—, se sont infiltrés dans cet espace presque vide et se sont multipliés sur place. Les uns sont venus par la voie maritime à partir du 6 e millénaire (la Corse ayant été touchée la première), les autres sont venus par la voie continentale à partir du Danube, l’est de la France ayant été concerné à partir de 4000 av. JC. En somme le peuplement s’est fait partout par multiplication sur place et reproduction différentielle.

            Et ensuite ? L’idée la plus courante est que l’apport des Gaulois, des Romains ou des Francs aurait été extrêmement important, et c’est vrai qu’il l’a été sur les plans politique, linguistique et culturel. Mais, sur le plan du nombre, sur le plan démographique, je soutiens qu’il a représenté peu de chose : des équilibres se sont partout établis entre les vainqueurs et les vaincus, les contributions démographiques étant toujours à l’avantage de ces derniers.

            Prenons l’exemple des Gaulois. J’ai dit plus haut que l’essor du peuplement de la France avait commencé vers 6000 av. JC, et qu’à partir du 43e siècle av. JC (au milieu du 5e millénaire), les techniques de l’agriculture et de l’élevage avaient gagné l’ensemble du territoire. Or la multiplication sur place a fait que, vers 2700 av. JC (c’est-à-dire à l’époque des dolmens et des menhirs), autant qu’on puisse en juger d’après les méthodes de la paléodémographie, la population de la France actuelle —je raisonne toujours dans le cadre des frontières actuelles, qui évidemment n’ont aucun sens pour l’époque— atteignait probablement déjà environ un million d’habitants. En 1800 av. JC, 900 ans plus tard, il y avait déjà, sur notre territoire, au moins quatre millions d’habitants.

            Cet essor démographique s’est trouvé interrompu par les invasions indo-européennes dont nous ne savons pas grand chose, sinon qu’elles ont provoqué sur le moment des dévastations épouvantables. Si bien que, vers 1250 —c’est-à-dire du 13e siècle av. JC, à la fin des invasions indo-européennes— bien loin d’avoir été augmentée par ces nouveaux envahisseurs, la population de la France était retombée à un million et demi d’habitants environ. Puis l’essor reprit. Avant l’arrivée des Gaulois, il y avait sur le territoire actuel de la France environ cinq millions d’habitants, selon les estimations du Dr Biraben.

            Les Gaulois n’arrivent pas d’un seul coup. Ils s’infiltrent ; ils forment de petites bandes issues de l’Europe centrale, où ils s’étaient, eux aussi, multipliés sur place au cours du millénaire précédent. Ils s’implantent successivement à partir du 8e siècle av. JC, ce sont donc des envahisseurs relativement récents. Combien étaient-ils ? Évidemment nous n’avons aucun recensement, aucun moyen de le savoir directement, mais il y a lieu de penser que le total des guerriers qui, en cinq siècles, sont entrés en Gaule, n’a pas dû dépasser 200 000 ou 300 000, c’est-à-dire qu’à la suite de la conquête, l’élément gaulois représentait probablement moins de 10% de la population ! Mais 10% qui comptaient, puisqu’ils ont réussi à imposer au vieux fond indigène de la population française la langue, les mœurs, la domination sociale et politique.

            Au milieu du 3e siècle av. JC, arrivent les Belges. Ce ne sont pas des Germains, comme on se l’était imaginé, mais une nouvelle vague celtique, qui débouche par le nord, avec des conséquences absolument redoutables : un grand dérangement de la population gauloise de la mer du Nord aux Pyrénées, et l’installation d’une ethnie relativement différente au nord de la Seine et de la Somme. Puis, vers 120 av. JC, les Romains occupent la Narbonnaise : là aussi, les colons romains ne seront jamais que très minoritaires. En fait, cette immense transformation, cette acculturation de notre pays par les Gaulois, puis par les Romains n’a pas de base réellement démographique, c’est toujours le vieux fond ethnique issu du néolithique qui domine.

            Quelques siècles plus tard, ce sont les grandes invasions germaniques. Là aussi, contrairement à une certaine vision apocalyptique de l’histoire, il ne s’agit pas de déversements massifs. D’abord, elles sont plus préccoces que l’on ne le croit souvent. L’Empire romain ne s’est pas effondré d’un seul coup. Tout a commencé au début du IIIe siècle, lorsque les premières incursions barbares ont contraint les Romains à abandonner le limes, c’est-à-dire la frontière fortifiée du Rhin en aval de Xanten vers 257. C’est alors que de petits groupes ethniques très réduits, les futurs Francs, ont commencé à s’avancer dans un territoire abandonné, et à se multiplier sur place.

            Mais, jusqu’en 378, toutes les autres tentatives des Germains, très nombreux au-delà du Rhin, pour pénétrer dans l’Empire romain échoueront complètement. Les envahisseurs sont chaque fois massacrés, ou réduits en esclavage, ou encore installés comme colons sur d’anciennes terres. Ce sont les fameux Lètes, les barbares vaincus, transformés en auxiliaires de l’armée romaine ou en colons. Quelle est la population germanique qui s’est trouvée ainsi installée par les Romains eux-mêmes sur le territoire de l’Empire ? C’est difficile à dire : 4 à 7 % probablement (ce qui représente un apport plus considérable que celui des invasions proprement dites), mais, dans le nord de la Gaule, beaucoup plus : dans la Belgique actuelle et dans la Flandre, qui ont été dévastées au IVe siècle, peut-être 12 à 21% de la population sont dès ce moment d’origine germanique.

            La grande catastrophe, c’est 406. Dans la nuit du 31 décembre 405 au 1er janvier 406, les Barbares franchissent le Rhin gelé, près de Mayence, et c’est alors une véritable ruée qui implique trois peuples germaniques représentant chacun quelques dizaines de milliers d’individus : les Vandales, les Alains et les Quades (qu’on appellera plus tard par erreur les Suèves). Cette invasion ne modifie que très peu, cependant, la démographie de la Gaule. Car ces envahisseurs n’ont fait que traverser son territoire, en saccageant tout sur leur passage. La plupart sont passés en Espagne, certains sont allés jusqu’en Afrique : seule une partie des Alains a été installée dans les pays de la Loire par Egidius (nous en avons quelques traces dans la toponymie, avec des villes ou des villages comme Alaincourt).

            Les Francs n’ont pas participé à cette ruée de 406. Ils restent toujours dans le territoire qu’ils avaient occupé pacifiquement. Ils n’en continuent pas moins à progresser, en même temps d’ailleurs que s’accroît leur nombre. En 475, ils prennent Metz et Toul. En 486, la victoire de Clovis à Soissons leur ouvre le cœur du bassin Parisien et inaugure la grande aventure que nous commémorons cette année.

            Quel impact auront eu, au total, les invasions barbares en Gaule ? L’effet démographique a été surtout de destruction et non pas de peuplement, à trois exceptions près.

            La première de ces exceptions est celle des Francs eux-mêmes, car le territoire qu’ils avaient occupé en deux siècles sur la rive gauche du Rhin avait été préalablement complètement dévasté. S’avançant dans un territoire vide, ils l’ont peuplé et y ont imposé leur langue. Nous pouvons suivre d’une manière approximative ce peuplement franc par la limite linguistique entre les langues romanes et les langues tudesques. C’est elle qui sépare aujourd’hui la Belgique en deux : la Wallonie et la Flandre. Au sud, nous la retrouvons en Lorraine où nous trouvons, par exemple à quelques kilomètres de distance Audun-le-Tiche (c’est-à-dire le tudesque) et Audun-le-Roman. L’apport numérique des Francs est cependant là encore limité : peut-être 50 000 à 100 000 personnes, face à une population gallo-romaine qui avait atteint sept à huit millions d’habitants sur le territoire actuel de la France.

            La seconde implantation sérieuse a été celle des Alamans qui ont occupé l’Alsace et l’ont germanisée, probablement aussi parce que le territoire avait été préalablement dévasté. Le troisième élément, très important, a été celui des Bretons, réfugiés en Armorique lors de l’occupation de la Grande-Bretagne par les Anglo-Saxons, et qui se sont mêlés au vieux fond ethnique des Bretons de Bretagne, qui n’avaient jamais été complètement romanisés.

            Pour le reste, c’est difficile à dire. On a l’impression que l’implantation des Burgondes a été relativement importante, encore que ce soit surtout une implantation de chefs, d’aristocrates, à en juger par la toponymie.

            Au contraire, les Wisigoths ont laissé très peu de traces. Il est à peu près certain que la fermeture des églises ariennes, après les victoires de Clovis, a contribué à faire repartir en Espagne la quasi-totalité des Wisigoths à partir de 531.

     2. Le mythe du brassage

            Un de mes collègues, parmi les plus honorables, soutient qu’« il suffit d’évoquer le mélange des peuples venus du sud, du nord et de l’est pendant deux millénaires et les traînées de soldatesques qui ont occupé et souillé ce pays pour comprendre que les Français d’aujourd’hui, souvent si orgueilleux de leurs racines, sont tous issus d’une multitude de peuples qui se sont mêlés aussi souvent qu’entrégorgés ». Or, à mon avis, les apports extérieurs, entre 650 et 1950, ont été faibles.

            L’apport des Arabes ? Néant : on a essayé de prouver le contraire, mais en vain.

            L’apport des Normands ? Extrêmement faible, la plupart d’entre eux étant venus sans femmes. On n’a d’ailleurs pas trouvé de sépultures vikings sur notre territoire. Les Normands n’ont laissé, semble-t-il, de traces ethniques importantes que dans le pays de Caux d’une part et dans le Cotentin de l’autre, où l’on retrouve des traits nordiques dans la population. Plus tard, les Anglais laisseront quelques traces pendant la guerre de Cent Ans, ce dont témoignent quelques noms de famille normands : les patronymes Langlais ou Langlois, et le patronyme Godon (God Damn) dont on désignait les Anglais ; ceci reste évidemment tout à fait minoritaire. De même pour rester dans le domaine de la géographie des noms de famille, les Navarre et les Castille que l’on trouve relativement nombreux dans l’Ouest de la France, là où du Guesclin fit campagne : il s’agit probablement des descendants des mercenaires que le connétable avait recrutés en Espagne.

            Essayons de quantifier tout cela. Personne n’ose plus, comme le faisait jadis Mathorez, auteur d’un livre sur les étrangers en France, soutenir que, “si le royaume n’avait continuellement reçu des étrangers qui se fondaient dans le sein de la population, on eût promptement observé dans le nombre des sujets du roi un fléchissement considérable”.

            Affirmation gratuite : la France était au contraire un monde plein. Elle était plutôt même en état de surpression démographique, et, pour un étranger venu en France au Moyen Age ou aux Temps Modernes, dix Français au moins ont émigré. Notre pays est resté terre d’émigration jusqu’à la crise de la dénatalité au début du XIXe siècle.

            Qui sont les immigrés dont parle Mathorez ? Ils font beaucoup de bruit, ils occupent le devant de la scène. Ce sont les épouses royales, en particulier celles des Bourbons : Marie de Médicis, Anne d’Autriche, Marie-Thérèse d’Espagne, Marie Leczinska, Marie-Antoinette, avec leur entourage évidemment, soit quelques dizaines de personnes. Ce sont de grands serviteurs de l’Etat recrutés souvent à cette occasion : Mazarin, Maurice de Saxe, Necker. Ce sont des financiers, des marchands, des techniciens, les Martel, originaires des îles anglo-normandes (celles-ci étaient alors françaises, au moins de culture et de langue), les Mallet, les Van Robais, on n’en finirait pas d’énumérer les cas particuliers. Ce sont les artistes et les écrivains, qu’à partir de la Renaissance, François Ier et Henri II font venir en France pour y faire pénétrer les goûts et les techniques nouvelles. Des musiciens aussi : Lully, Gluck au XVIIIe siècle ; et des savants, dont quelques-uns resteront, comme les Cassini, tandis que d’autres partiront, comme Christian Huyghens.

            Le mouvement s’inversera ensuite. A partir du XVIIIe siècle, bien au contraire, c’est en effet l’Europe qui se met à l’heure de la France. Ce sont les Français qui fournissent à l’étranger des peintres, des intellectuels, des artistes, etc.

            Au total combien d’étrangers a pu compter la France d’Ancien Régime ? C’est difficile à dire mais, d’après les estimations de Jean-Pierre Poussou, jamais plus de 70 000 ou 80 000 à la fois, et la plupart n’ont pas laissé de descendance, les milieux en question se reproduisant peu.

            La trace principale qu’ils ont laissée dans la population française, c’est la famille royale elle-même puisque la plupart des reines étaient d’origine étrangère.

            Et le peuple français ? Il est très sédentaire, attaché à sa terre, un peu comme le sont les Chinois, ce qui tient probablement à l’ancienneté de la petite propriété en France. Les recherches récentes ont remis en cause l’importance historique de l’esclavage et du servage. Non, tous les travailleurs de la terre n’étaient pas des esclaves à l’époque gauloise ! Non, tous les paysans n’étaient pas des serfs au Moyen Age ! L’origine de la petite propriété se perd dans la nuit des temps. Or la petite propriété ancre l’homme à sa terre.

            Cette population très sédentaire était animée d’une mobilité à court rayon : les jeunes gens allaient se marier dans les villes ou les villages voisins, car il n’était pas toujours possible de trouver un conjoint sur place, l’Église interdisant les mariages consanguins, sauf dispense. Ce phénomène a engendré non une véritable mobilité, non de véritables migrations, non des échanges de population d’une province à l’autre, mais une sorte de mouvement brownien, avec brassage des familles dans un rayon d’une dizaine de kilomètres.

            Les villes, qui auraient pu jouer un rôle dans la redistribution de la population n’y contribuaient guère, car elles étaient mortifères. Les conditions d’hygiène y étaient déplorables, la mortalité effroyable : elle dépassait de très loin la natalité. Jusqu’en 1914, les villes n’ont donc pu maintenir leur population et a fortiori la développer que grâce à l’apport des campagnes. Elles ont été comme des “trous noirs” qui ont absorbé l’excédent des campagnes. Se trouvant dans un état de surpression démographique, ces dernières ont en revanche reçu très peu d’éléments étrangers.

            Nous avons fait des observations très intéressantes sur un échantillon de 3000 familles, que nous avons reconstituées. L’une de ces familles était installée dans le Pas-de-Calais : les Tramecourt. Au début de l’époque où nous les avons étudiés, ils étaient divisés en trois branches, vivant toutes dans un rayon de 25 km autour du village de Tramecourt. Au cours du XIXe siècle, ces Tramecourt, s’étant prolétarisés mais aussi multipliés, ont commencé à essaimer. Beaucoup sont partis à Paris, d’autres sont allés jusqu’à Lyon ou jusqu’en Touraine. Nous avons suivi le destin de ces branches : or presque toutes se sont éteintes. Au cours d’un déjeuner que nous avons offert en 1989, j’ai pu ainsi conclure : “Le Tramecourt ne se repique pas.”

            Effectivement après 200 ans d’émigration, durant lesquels un bon tiers des Tramecourt avait quitté le Pas-de-Calais, nous trouvons encore 80 % des Tramecourt établis dans leur aire d’origine, cette fois dans un rayon de 50 km.

            Pour le XIXe siècle, l’importance du rôle des étrangers dans la formation de la population française est difficile à préciser. Il est vrai que parallèlement au début de la dénatalité française, il y a eu un apport étranger. Mais celui-ci a surtout été un apport de voisinage : des Belges dans le Nord, des Italiens dans le Sud-Est. En 1851 on comptera ainsi environ 380 000 étrangers en France. L’immigration massive est donc bel et bien un phénomène contemporain.

     3. Le mythe de la banalité migratoire

            L’histoire démographique de la première moitié du XXe siècle est souvent invoquée à l’appui de l’idée que la vague migratoire actuelle n’est en rien différente de celle que notre pays a connu et assimilé avant-guerre : “Contrairement à beaucoup d’affirmations colportées dans des buts polémiques, souvent pour exciter les passions et aviver les extrémismes, peut-on lire aussi sous la plume de l’un des pseudo-spécialistes qui “font” l’opinion, il est sûr que la France actuelle n’est pas plus submergée par les étrangers qu’elle ne le fut auparavant. La part de la population étrangère en France n’a pas dépassé la limite de 7% au cours du dernier quart de siècle, c’est-à-dire le niveau qui était celui de 1931”.

            Il faut d’abord remarquer que ce niveau de 1931 représentait déjà lui-même la cote maximale des années d’avant-guerre, avec 2 891 000 étrangers (ce qui, compte tenu des insuffisances du recensement, donne en gros trois millions d’étrangers en 1931). Mais il faut souligner surtout que l’impact de cette immigration sur le peuplement a été beaucoup plus limité qu’on ne le dit généralement. En effet ces étrangers étaient en grande partie célibataires, ils avaient une mortalité plus forte que les Français (en particulier parce qu’ils s’installaient dans les villes), et ils se mariaient difficilement. La proportion des retours était forte. Je n’ose pas préciser, mais à mon avis, elle atteignait au moins 50 %. C’est dire que l’immigration étrangère en France jusqu’en 1950 n’a pas été une immigration d’établissement mais une immigration de travail : on s’installait alors en France pour se constituer un pécule, et on retournait vivre dans son pays d’origine.

            Au total, l’apport des étrangers à la population française (c’est-à-dire la somme des étrangers et des descendants d’étrangers naturalisés) est passée probablement de deux millions en 1914 à quatre millions en 1950. Aussi l’affirmation qui figure encore dans des ouvrages de vulgarisation comme le Quid, et selon laquelle “18 millions de Français, soit plus du tiers de la population, nés entre 1880 et 1980, descendraient d’immigrants à la première, deuxième ou troisième génération”, ne tient pas debout. J’ai essayé d’en trouver l’origine et j’ai découvert qu’elle avait été lancée pour la première fois par Bernard Stasi dans son livre L’Immigration, une chance pour la France. Il cite comme référence le ministère de l’Intérieur et la Direction de la population et des migrations, mais c’est une invention. Aucune statistique officielle de ce type n’a jamais été fournie par l’une ou l’autre de ces institutions.

            Enfin, et peut-être surtout, il y a entre l’immigration d’avant-guerre et celle que nous connaissons une différence essentielle : l’origine des étrangers qui s’installent sur notre territoire. Au début du siècle, toute la population étrangère en France était d’origine européenne. Au recensement de 1891, on n’avait trouvé que 813 Africains sur le territoire. En 1975, après la vague d’immigration des années 1960, la part de l’Europe avait baissé, mais elle était encore de 61 %, tandis que celle de l’Afrique augmentait, et dépassait 34 %. En 1990, la part des Européens dans la population étrangère est tombée à 40,3 % et celle des Africains est montée à 45,8 %, c’est-à-dire que plus de la moitié de la population étrangère vient du tiers monde et plus spécialement d’Afrique. Avec toutes les difficultés culturelles rendant illusoire le mythe de l’intégration.

     4. Le mythe de l’intégration

            La quatrième idée —celle selon laquelle nous assisterions depuis vingt ans à un processus de rapprochement entre la structure de la population nationale et celle de la population étrangère— repose sur la confusion des mots et le trucage des chiffres. Il y a une confusion dans les médias et dans l’opinion publique entre la notion d’étranger et la notion d’immigré. Le mot “étranger” définit un état juridique. Mais l’attribution de la nationalité française à un certain nombre d’étrangers ne les a pas métamorphosés en Français d’un seul coup. Si, officiellement, le nombre des étrangers n’augmente pas, c’est parce qu’il y a compensation entre le flux physique de l’immigration légale (sans les clandestins, que par définition on ne peut pas compter) et le flux juridique de sortie, c’est-à-dire la transformation d’un certain nombre de ces étrangers en Français. Non pas seulement par les naturalisations, mais par les francisations, c’est-à-dire l’attribution automatique de la nationalité française à la naissance (notion qui échappe au comptage statistique et sur laquelle on ne peut faire que des évaluations), ou à la majorité légale.

            Ainsi le terme d’étranger ne permet pas de saisir correctement les réalités. Le terme d’immigré non plus, car beaucoup d’étrangers sont nés en France. Au recensement de 1990, qui remonte déjà à six ans (et l’on n’est pas prêt apparemment à en faire un nouveau), 4 200 000 immigrés ont été dénombrés. Il s’agit des personnes nées hors du territoire métropolitain. Il faudrait leur ajouter 1 700 000 Français de naissance, auxquels on refuse l’appellation d’immigrés, bien que beaucoup soient d’origine étrangère. La Direction de la population et des migrations ne classe en effet comme immigrés que les étrangers nés à l’étranger.

            Il est vrai qu’il est difficile d’assimiler étrangers et immigrés, puisque parmi les Français immigrés, il y a plusieurs centaines de milliers de pieds-noirs et aussi beaucoup de Français originaires des Dom-Tom. Mais le résultat est qu’il y a un permanent décalage entre la perception que les Français ont de la présence étrangère en France (qui leur semble, à juste titre, en expansion) et les chiffres sur lesquels raisonnent les gouvernants.

            Beaucoup plus utile pour cerner le phénomène est la notion de “population des ménages dont la personne de référence est étrangère”. Ainsi de jeunes enfants qui ont reçu la nationalité française à la naissance, mais qui vivent dans une famille originaire du Sénégal ou du Bénin, figurent dans cette catégorie. Sur ces bases, on arrivait, lors du recensement de 1990, à un total de 4 345 000 personnes, dont 895 000 vivant dans des foyers algériens, 807 000 dans des foyers portugais, 629 000 dans des foyers marocains, 242 000 dans des foyers tunisiens, 206 000 dans des foyers turcs, 182 000 dans des foyers d’Afrique Noire.

            Mais, pour mesurer l’apport de la population étrangère, il faudrait y ajouter les ménages des naturalisés, soit 2 198 000 personnes. Donc, 6 542 000 personnes vivent dans des foyers dont la personne de référence, c’est-à-dire le chef de ménage, est d’origine étrangère (sans parler des clandestins). Ceci représente 11,8 % de la population des ménages et, en Ile-de-France, 20,3 %.

            Enfin la qualité des statistiques est toujours sujette à caution. Par exemple, pour l’année 1990, l’écart entre les données du ministère de l’Intérieur (qui prennent en compte les titulaires d’une autorisation de séjour), et les données du recensement pour les plus de 18 ans, atteint 31,4% (43,4% chez les Tunisiens), ce qui est énorme et ne peut pas s’expliquer par quelque négligence dans la comptabilité des autorisations de séjour. Les statistiques du ministère de l’Intérieur donnent en gros un tiers d’étrangers de plus que le nombre officiellement recensé. Cela ne peut pas être négligé lorsque l’on raisonne sur les données du recensement.

            Il y a d’autres motifs d’interrogation : au recensement de 1990, par exemple on a posé la question : où étiez-vous en 1982 ? Chez les Turcs, le nombre de ceux qui ont répondu : “J’étais en France en 1982” dépassait le total des Turcs recensés en 1982. Or, il en est bien mort quelques-uns entre temps, et d’autres sont repartis dans leur pays.

            Dans ce flou statistique, comment soutenir que la structure de la population étrangère se rapproche de celle des Français de souche ? Pour une appréciation correcte, il faudrait distinguer la population étrangère d’origine européenne, dont les comportements et la natalité se rapprochent effectivement beaucoup de ceux des Français, et la population du tiers-monde, surtout la population africaine, qui s’en écarte. C’est ce que refusent de faire les statisticiens des organismes officiels.

            Bien loin de se stabiliser, la population étrangère ou d’origine étrangère s’est donc gonflée au cours des trente dernières années, à un rythme sans précédent dans notre histoire. Sur le critère que nous avons introduit précédemment (le nombre des personnes vivant en 1990 dans des ménages dont le chef est d’origine étrangère), compte tenu du nombre des clandestins qu’on peut évaluer à 500 000, et du solde migratoire des années 1990/95, on peut estimer aujourd’hui à huit millions environ le nombre de personnes qui sont étrangères ou d’origine étrangère, donc ressenties comme étrangères par la population autochtone.

    Comment la situation va-t-elle évoluer ?

            Une première projection a été faite en 1980 à l’Institut national d’études démographiques, par Hervé Le Bras. Elle a abouti à la curieuse conclusion que, si l’immigration était stoppée et si la fécondité des étrangères s’alignait instantanément celle des Françaises, la population étrangère tomberait de moitié avant 2015. Ces résultats étonnants furent officialisés dans un rapport du Haut Comité de la Population et ont abouti aux deux recommandations suivantes :

    • il faut favoriser le regroupement familial des émigrés, c’est un impératif non seulement humanitaire mais proprement démographique, pour maintenir la population française ;
    • il faut écarter toute politique contraignante de retour des émigrés dans leur pays d’origine.

            Or tous ces calculs étaient faux, comme l’ont démontré Philippe Bourcier de Carbon et Pierre Chaunu dans un article paru en 1986 et intitulé “Un génocide statistique : on recherche 1 880 000 étrangers disparus dans l’ordinateur de l’INED” ! L’erreur était en effet de cet ordre, et résultait d’une erreur de décimale (sur la mortalité), dont personne ne s’était aperçu sur le moment, alors que le bon sens aurait dû suffire à la détecter. Le plus curieux c’est que cette révélation n’a eu aucun effet, ni sur la brillante carrière de l’intéressé qui continue à sévir dans les médias, ni sur la politique officielle qui n’a été infléchie que très tardivement.

            Le problème qui se pose maintenant est de prévoir l’avenir de cette immigration-invasion. Sur le plan quantitatif, c’est une équation à quatre inconnues. Le flot africain va-t-il se tarir (il a notablement diminué ces deux dernières années) ? Ne va-t-il pas être relayé par un flot turc si la Turquie entrait dans l’Union Européenne, ce qui impliquerait la libre circulation des personnes et interdit toute politique de contrôle ? L’immigration clandestine ne va-t-elle pas prendre une dimension monstrueuse avec des millions de “sans-papiers”, puisque c’est une stratégie qui réussit bien ? Enfin la fécondité des étrangères va-t-elle s’aligner sur la fécondité des Françaises, quand et à quel rythme ?

            Sur le plan qualitatif, le problème essentiel est de savoir dans quelle mesure les enfants de ces étrangers vont dépasser le stade de l’insertion pour atteindre celui de l’intégration et de l’assimilation, comme cela s’est passé pour les populations arrivées jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale. La concentration de ces allogènes dans certaines régions de France et dans certaines villes comme Marseille ou Roubaix ne porte pas à l’optimisme.

                                                             ------------------------------

     Débat

    Q : Quelles traces avons-nous de l’arrivée des Gaulois au VIIIe siècle avant Jésus-Christ ?

    Jacques Dupâquier : Ce sont d’abord des traces techniques : les Gaulois sont arrivés avec le fer. Mais ils avaient aussi des modes de sépulture à eux : il n’y a aucune confusion possible avec les sépultures du peuple précédent. C’est pourquoi on suit très bien l’implantation des bandes gauloises. On s’est aperçu à ce propos que ce n’était pas à proprement parler une invasion, mais une suite d’incursions successives, qui ont abouti à la domination complète des Gaulois sur les anciens peuples.

    Q : Vous dites que l’apport arabe fut faible : pourquoi y a-t-il tant de gens au teint sombre dans le sud de la France et de Mor, Moret, Moreau, Morel dans les noms de famille ?

    Jacques Dupâquier : On ne peut nier la présence de populations au teint sombre dans le sud de la France, mais la fréquence du patronyme Moret ne prouve rien. C’est vrai qu’il y a dans les Alpes des gens au teint très sombre, mais ce sont des vestiges de populations primitives. C’est justement parce qu’elles avaient le teint sombre qu’on les a surnommées, par analogie, Moret.

    Q : Vous n’avez pas beaucoup parlé des Normands qui ont joué un rôle politique important, notamment sous le règne des premiers Capétiens.

    Jacques Dupâquier : Leur apport ethnique a été faible, comme le prouve le fait qu’ils n’ont pas pu imposer leur langue. Ceux qui se sont installés en France ont pris des femmes sur place. Du point de vue ethnique, ils n’ont pas laissé beaucoup de traces, si ce n’est dans le nord du Cotentin (où l’on a une fréquence très élevée de grands blonds aux yeux bleus) et dans le pays de Caux. On a étudié tout cela au XIXe siècle, mais aujourd’hui il n’est pas très « politiquement correct » d’évoquer ces questions. Les Normands ont joué un rôle très important du point de vue politique, culturel et social (qui me semble majeur), mais pas du point de vue ethnique. Ils ont tenu dans l’histoire de la France une place hors de proportion avec leur importance numérique. Probablement, un bon nombre de Vikings sont repartis en Scandinavie.

    Q : L’émigration espagnole est-elle toujours aussi importante ?

    Jacques Dupâquier : Le nombre exact d’Espagnols recensés en France en 1975 était de 497 000. Au recensement de 1990, il n’en restait plus que 216 000. Ils ne représentent plus que 6 % du total de la population étrangère, non qu’ils soient repartis, mais parce que beaucoup ont acquis la nationalité française.

    Q : Quel fut l’impact des épidémies et des famines sur les périodes de régression démographique ?

    Jacques Dupâquier : C’est une grande question. C’est sur ce thème que j’ai commencé ma carrière scientifique. Je travaillais sur la population française à l’époque de Louis XIV en recherchant à travers les dénombrements, les traces des catastrophes de la fin du règne, des années de misère. Or, à ma stupéfaction —j’étudiais 14 300 paroisses, pour lesquelles j’avais retrouvé en moyenne cinq dénombrements de feux —on ne voyait rien, ou pas grand chose, par exemple, de la grande mortalité de 1693-94 qui avait fait deux millions de morts, c’est-à-dire environ 10 % de la population française : les traces étaient totalement effacées au bout de huit ans. Pourquoi ? Grâce au système d’auto-régulation de ces populations qui avaient une forte fécondité. Dès l’époque de Louis XIV, les Françaises se mariaient en moyenne à 24 ans, ce qui était beaucoup pour l’époque ; la fécondité était donc tardive, et la reproduction amputée d’un tiers.

            De plus, à peu près 10 % des femmes restaient célibataires. Après une grande catastrophe, beaucoup de foyers étaient brisés. Les veuves se remariaient, soit avec un veuf, soit avec un célibataire ; et, surtout, beaucoup de jeunes trouvaient une occasion de s’établir. C’était difficile d’entrer dans la vie à cette époque : il fallait avoir une terre, il fallait fonder un foyer au sens matériel du terme pour s’établir. Les jeunes gens constituaient une sorte d’armée de réserve, des masses de candidats à l’établissement : après les grandes catastrophes, beaucoup de couples âgés étaient remplacés par des couples jeunes, si bien qu’après chaque hécatombe il y avait plus de naissances qu’auparavant. Et la population se rétablissait, par effet autorégulateur.

            En 1750 la population française n’avait pas beaucoup progressé par rapport à l’époque de Saint Louis. Dans les limites actuelles, la France de saint Louis avait peut-être 20 000 000 d’habitants. En 1740, dans les limites actuelles, il y en avait 24 600 000 environ, peut-être 25 000 000, ce qui n’était pas un grand progrès. Entre temps, le pays avait connu la guerre de Cent Ans, les guerres de Religion, la peste, et tout ce qui s’ensuit. Or toujours le peuplement s’était rétabli.

    Q : Est-il exact que la Révolution française et les guerres de l’Empire ont fait plus de morts que la guerre de 1914-18 ?

    Jacques Dupâquier : La Révolution et l’Empire ont fait 1 500 000 morts et la guerre de 1914-18 : 1 350 000 morts. Mais les guerres de la Révolution et de l’Empire sont intervenues dans une France qui était encore dynamique ; bien entendu cela a porté un coup très dur à la démographie française, mais la population a continué à augmenter. Tandis que c’est seulement en 1950 que la France a retrouvé sa population de 1914, à territoire égal, c’est-à-dire avec l’Alsace-Lorraine.

    La guerre de 1914-18 a représenté finalement un coût beaucoup plus élevé dans une France de quarante millions d’habitants que les 1 500 000 morts de la Révolution et de l’Empire dans une France de trente millions.

    Q : Revenons à la crise démographique actuelle : quel devrait être le taux de natalité des femmes françaises pour permettre un retour à un équilibre démographique ? Y a-t-il un nombre idéal d’habitants pour la France ? Jean Boissonnat parle d’un choc démographique majeur, avec la perspective d’une diminution de quatre millions d’actifs entre 2015 et 2035. Etes-vous d’accord avec cette prévision ? Plus généralement que pensez-vous de la crise démographique actuelle ?

    Jacques Dupâquier : La France est en crise démographique depuis très longtemps. Cette crise est née au XIXe siècle, et elle s’est aggravée dans la première moitié du XXe siècle. Alors que tous les pays d’Europe connaissaient ce que l’on appelle la “transition démographique”, c’est-à-dire une chute de la mortalité dégageant des excédents pendant très longtemps avant que la fécondité ne tombe à son tour, en France, la natalité et la mortalité ont baissé ensemble. Si bien que la population française, entre le Premier Empire et la Libération, sur 150 ans, n’a augmenté que du fait de l’allongement de la vie humaine. Il y avait moins de naissances entre les deux guerres, en moyenne, qu’il n’y en avait à l’époque d’Henri IV. La crise démographique n’est donc pas d’aujourd’hui. Puis vint le baby-boom —qui n’a pas été propre à la France, puisque toute l’Europe occidentale et les Etats-Unis l’ont connu— mais qui a été en France plus fort qu’ailleurs, probablement à cause du Code de la famille, et des avantages considérables qu’il a apportés aux parents. Puis brusquement, en 1964 (une année où il ne s’est rien passé, je vous le fais remarquer), la fécondité a commencé à fléchir dans tous les pays européens au-dessous du taux de reproduction, c’est-à-dire du niveau qui permet le remplacement des générations.

            Jusqu’à une époque récente, on peut dire que sept femmes françaises engendraient six filles pour la génération d’après. Aujourd’hui c’est moins : six femmes engendrent cinq filles pour la génération suivante. Ce n’est pas très encore visible sur les statistiques de la natalité, parce que les générations du baby-boom sont à l’âge de la reproduction ; même si chaque femme n’est pas très féconde, ces générations comptent aujourd’hui beaucoup de mères : multipliez le nombre de femmes en état d’être mères, cela donne beaucoup de naissances, et comme ces générations sont peu exposées à la mortalité, puisque celle-ci a régressé d’une manière spectaculaire, elles fournissent peu de décès. Nous avons donc eu, en 1995, 720 000 naissances et 520 000 décès. Des démographes de mauvaise foi, comme Hervé Le Bras, s’en servent pour nier la réalité de la crise. Mais la structure de la population est déjà perturbée : nous avons une pyramide des âges en as de pique.

            Bien qu’elles représentent 20 % de la population française, les personnes du troisième âge ne gonflent pas encore démesurément le sommet de la pyramide, puisqu’elles sont issues des générations peu nombreuses nées avant 1945. A la base, peu d’enfants, puisque nous avons en moyenne 720 000 naissances au lieu de 875 000 au sommet du baby-boom. Le centre de la pyramide est renflé : là sont les générations des actifs.

            Hélas ! tout le monde vieillit : les générations du baby-boom vont atteindre l’âge de la retraite à partir de 2006. Actuellement, 550 000 personnes par an franchissent ce cap, fixé autoritairement à soixante ans. D’un seul coup, on va passer à 825 000 : c’est-à-dire que la pyramide des âges, qui a la forme d’un as de pique, va prendre la forme d’une toupie. La proportion des plus de soixante ans va ainsi passer progressivement de 20 à 26-28 % vers 2020. Dans peu d’années, le nombre des plus de soixante ans va dépasser le nombre des moins de vingt ans. On y est presque. Dans le premier quart du XXIe siècle, on va donc se trouver dans une situation très grave, puisque la population active sera constituée par les enfants du baby-krach et la population des retraités par les enfants du baby-boom. C’est-à-dire que les retraites des grosses générations du baby-boom seront payées par les maigres générations du baby-krach. Dans vingt ans, on ne pourra éviter une crise aux conséquences sociales inouïes. Elle va d’abord faire exploser notre système de protection sociale, ensuite ouvrir toute une période de conflits entre générations, qui ne seront certainement pas gais !

    Seul espoir : s’il y avait une reprise de la natalité maintenant on peut espérer qu’à partir de 2035 à peu près, il y aurait une amélioration de la situation et que l’on arriverait à sortir de cette crise. Ainsi, les jeunes générations ne vivraient pas toute leur existence dans la crise démographique et sociale qui va s’ouvrir. Mais il y a urgence. Il ne s’agit pas d’obliger les femmes à avoir des enfants, mais simplement de leur permettre d’avoir les enfants qu’elles désirent au fond d’elles-mêmes. Lorsque l’on interroge les femmes en âge d’avoir des enfants sur la dimension idéale de la famille, on constate que, pour dix femmes, cela représente en moyenne vingt-trois enfants. C’est plus qu’il n’en faut pour remplacer une population. Il faudrait, pour assurer l’avenir, que dix femmes aient vingt-et-un enfants. Elles disent vouloir en avoir vingt-trois, mais les contraintes de la vie moderne, celles de la société de consommation, du standing, la pression insidieuse exercée par la société sur les ménages, font que les femmes doivent travailler pour payer les traites et qu’elles ne peuvent pas à la fois travailler et élever des enfants.

    Q : La facilité des transports jointe à l’instabilité régnant dans le tiers monde et à cette crise démographique que vous nous décrivez en France et en Europe ne rendent-elles pas inévitable une immigration chaotique dans les années à venir ?

    Jacques Dupâquier : Je ne sais pas. C’est probablement une question de volonté politique. Les lois Pasqua ont eu un impact probable, moins peut-être par leur contenu que par le signe qu’elles ont donné à un certain nombre de candidats à l’immigration que l’on ne serait pas automatiquement accueilli chez nous, que l’on ne bénéficierait pas automatiquement de tous les avantages sociaux qui ont été accordés aux Français. Il est à craindre, cependant, que l’affaire des sans-papiers de Saint-Bernard ait l’effet psychologique inverse.

     

    Mettez-vous à la place des populations du tiers-monde : pour elles, il ne peut pas y avoir de meilleur investissement qu’un voyage en France : une fois installé en France, même si l’on est au chômage, même si l’on traîne sans papiers, on bénéficiera de prestations qui dépasseront de beaucoup le niveau de vie de ceux qui continueront à s’échiner dans leur village natal. Et une fois installé, on fera venir non pas un parent ou deux, mais sept, huit, dix, par divers moyens. Il y a des villages qui se cotisent pour payer le voyage d’un jeune homme en France ! Ce ne sont pas les facilités de transport qui font l’immigration (les transports restent chers), c’est la masse des franchissements de frontières, qui dépasse certainement cent millions chaque année. Les frontières terrestres deviennen

  • Société & Actualité • Nul n’osera décapiter la République

     

    Par Aristide Leucate

     

    3266751844.jpgPlus que quelques jours et nous serons fixés sur les deux outsiders qui auront réussi à accéder au second tour de l’élection présidentielle. Il ne sera proposé ici aucun pronostic, tant les imprévus et autres surprises peuvent toujours survenir, en application de cet aphorisme, souvent vérifié, selon lequel « lorsque vous avez éliminé l’impossible, ce qui reste, si improbable soit-il, est nécessairement la vérité » (Arthur Conan Doyle). Toutefois, pouvons-nous, sans risque de nous tromper, prophétiser que quel que soit l’heureux élu, rien ne changera positivement pour la France et les Français.

    Commençons par observer que les onze candidats revendiquent ne pas faire partie du « Système » et se présentent même comme « anti-Système ». Il ne s’agit, rien de moins, que d’un effet d’annonce apophatique (ou, si l’on préfère, un discours récurrent centré sur le déni) dont le but est prosaïquement d’attirer le chaland dans les mailles piégeuses de son filet électoraliste. Le plus troublant, en apparence, réside dans le fait qu’aucun d’entre eux ne semble partager une définition commune de ce qu’ils dénoncent…

    À chacun son système

    L’on n’est guère avancé, sauf à considérer avec Alain de Benoist que « les choses s’éclairent si on ajoute un adjectif ». En effet, « les maurrassiens s’en prennent au système démocratique, les antilibéraux au système capitaliste, les écologistes au système productiviste, les tenants de la théorie du genre au système familial ». Cependant, poursuit-il, « si le mot Système est vague, cela correspond aussi à son caractère intrinsèquement englobant ». Et de poursuivre : « Une critique anti-Système est toujours une critique globale. Elle peut viser le couple droite-gauche, le système des partis, la classe politique dans son ensemble, ou encore ce qu’on appelle l’Establishment, la Caste, la Nouvelle Classe, les élites, etc. Dans tous les cas, on s’en prend à un tout dont les parties font système. » (Monde & Vie, mars 2017) S’emmurant, plus que jamais, dans une logique d’enchérissement permanent, le Système démo-représentatif n’est jamais à court d’imagination ; partant, nos onze concurrents renforcent la résilience du Système qu’ils vitupèrent, démontrant, par là même, qu’ils en font partie. C’est dire que l’on ne doit raisonnablement rien attendre du futur gouvernement du quinquennat à venir.

    Nécessité de la monarchie

    Le régime républicain perdurera, aucun des candidats en lice n’ayant prévu de rappeler un prince dynastique sur le trône vacant. L’enjeu n’est pas que de principe – il n’a même, d’ailleurs, rien à voir avec un quelconque principe –, attendu précisément que la preuve a été maintes fois administrée, notamment par la République elle-même, que cette dernière était proprement nocive à la France. Le maître de l’Action française, Charles Maurras, a écrit une multitude de belles et fortes pages s’attachant à démonter l’écheveau républicain de façon à démontrer la nécessité politique et vitale de la monarchie : « Dans l’état présent des nations, les royaumes, les empires, les républiques se plaignent tous du gaspillage financier : ce gaspillage sort de la confusion générale du Parlement et du Souverain. […] La Monarchie existe par sa propre force, sua mole stat. Elle n’a pas besoin de consulter à chaque instant un prétendu souverain électeur. […] Précisément parce que son principe ne l’oblige pas à harceler les gens, à aller les sommer constamment de la trouver belle. La République est une religion. La Monarchie est une famille. Celle-ci n’a besoin que d’être trouvée acceptable. Celle-là exige que l’on suive ses rites, ses dogmes, ses prêtres, ses partis. » (Mes idées politiques, 1937) Contre la démesure sans fin des partis, ferments de stériles divisions, la monarchie a pour elle la vertu rare de la tempérance.

    La souveraineté sauve

    Il ne s’agit point d’une clause de style, mais de la claire et haute conscience du souci primordial de la politique qu’avait génialement entrevu Pierre Boutang dans Reprendre le pouvoir : le salut. « Il y a souci lorsqu’émerge une possibilité de perdre ou de sauver », soulignait-il. Ce souci est inhérent à l’exercice du pouvoir dont « la nature […] est de sauver » ; « celui qui sauve – les autres et les pauvres, le peuple, donc –, celui qui est en situation de garder sauf, exerce un pouvoir légitime devant quoi les clercs, les “intellectuels” n’ont pas plus à se prosterner qu’à prendre des airs dégoutés », précise Boutang. Dans sa quête du « secret » politique, le même remarquait judicieusement que cet acte de sauver avait quelque cousinage étymologique avec le mot salut : « ancienne monnaie (salus nummarius) ainsi nommée parce que sa légende portait “salus populi suprema lex esto” ». De première part, l’on voit combien est irréductible le lien entre le pouvoir et le peuple et que ce lien ne peut être soumis aux caprices et humeurs, par définition inconstants et variables, de la seule volonté, même et surtout générale. De seconde part, comment rester aveugle à cette homologie entre ce salus nummarius et la prérogative régalienne, héritée de Jean II le Bon, de battre monnaie, soit après le droit de lever l’ost (l’armée) et celui de rendre justice, le signe le plus tangible, le plus visible, sinon le plus éclatant de la souveraineté ? Patiemment, la monarchie française a fini par comprendre qu’en aliénant ce souverain bien, elle se condamnait à la servitude.

    Que n’a commis, pourtant, la République en se donnant sans retenue, ni solide contrepartie, et avec une imprudence consommée, à l’oligopole de Bruxelles ? Ce faisant, elle a considérablement alourdi les autres malheurs français, là où la monarchie, sans probablement les éviter, les aurait assurément tempérés. Parmi les candidats animés de la farouche volonté de s’extirper de l’hydre européo-mondialiste, combien parviendront réellement à leurs fins ? L’invocation des mânes gaulliennes risque, indubitablement, de s’avérer inopérante. Le temps manquera, des pesanteurs de toutes sortes se feront irrémédiablement sentir, sans parler des obstacles qui se multiplieront comme les pains christiques.

    L’État a perdu le peuple

    Mais en perdant le pouvoir, l’État a aussi perdu le peuple. Celui-ci est devenu parfaitement abêt, gâté par une société d’abondance où le principe de plaisir – analysé par Zygmunt Bauman comme le « le fait d’avoir des sensations, voire même d’en espérer de nouvelles, que l’on a tendance à vivre comme un plaisir » –, s’est substitué à l’éthique de la responsabilité, pour parler comme Max Weber. La constance avec laquelle, scrutins après scrutins, nos contemporains – bien que progressivement gagnés par une lassitude confinant à la lucidité – pérennisent, volens nolens, le système démocratique sans jamais s’émanciper de son Église républicaine, est un indicateur fiable de l’état de liquéfaction avancée de la société actuelle. Le naturaliste américain Henry-David Thoreau ne cessait de s’étonner de cette « bien étrange époque que celle ou les empires, les royaumes et les républiques viennent mendier à la porte d’un simple particulier et s’installer à ses côtés pour débiter leurs doléances » : « je ne peux pas prendre un journal sans trouver quelque lamentable gouvernement, aux abois et en fin de course, qui vient intercéder auprès de moi, lecteur, afin que je vote pour lui qui m’importune autant qu’un mendiant italien » (Essais, 2007). À méditer…   

  • Allons-nous vers une révolution économique et monétaire ?, par François Schwerer.

    Nous sommes entrés dans une économie de la dette où tous, nations, entreprises et individus, pourraient vivre à crédit. Ou ne s'agit-il pas de passer à une monnaie électronique universelle, plus sûr moyen de contrôle jamais inventé ?

    6.jpgÀ la faveur de la crise sanitaire qui occupe les médias et inquiète les esprits, les divers gouvernements ont pris des mesures économiques et financières qui laisse augurer d’un changement en profondeur de tout le système monétaire mondial. Dans la partie qui se joue sous nos yeux, si le président français se préoccupe d’abord de la « déconstruction » du système actuel, ces homologues américains, allemands, russes et chinois avancent leurs pions tout comme les géants du commerce électronique et des communications.

    La crise des subprimes n’a-t-elle été qu’une répétition générale ?

    La crise économique de 2007/2008 a commencé aux Etats-Unis avec l’éclatement de la « bulle » des subprimes. On a beaucoup glosé sur ses causes et ses conséquences mais on a souvent laissé dans l’ombre l’enchaînement technique des événements. Or, dans le déroulé du processus trois éléments principaux sont à prendre en considération : une utilisation inconsidérée des crédits par des emprunteurs qui n’avaient pas les moyens de les rembourser, un taux variable de ces crédits présentés comme particulièrement bas pour être attractifs (et augmentant brutalement au bout de deux ou trois ans) et un équilibre provisoirement assuré par une augmentation non justifiée par la réalité économique de la valeur des actifs servant de garantie aux opérations. En un mot, l’enrichissement individuel n’était plus recherché dans la production économique mais dans la spéculation financière.

    Le système a explosé parce qu’il existe une incompatibilité entre l’augmentation des taux d’intérêt et celle des actifs financiers. Si les taux augmentent la valeur des actifs diminue (et inversement) ; dès lors l’augmentation des taux des crédits devaient fatalement conduire à une baisse de la valeur des actifs donnés en garantie. Les emprunteurs ne pouvant rembourser leurs dettes, les prêteurs se sont retrouvés à la tête d’actifs dévalorisés. Plutôt que de venir en aide aux petits emprunteurs imprudents et d’assainir le marché immobilier, les pouvoirs publics ont œuvré pour sauver les prêteurs en inondant les marchés de liquidités et pour restaurer artificiellement la valeur des actifs confisqués du fait du jeu des garanties.

    Si ces mesures ont donné l’apparence d’un redémarrage du système économique, elles ont créé les conditions d’une nouvelle crise beaucoup plus grave. En effet, les emprunteurs ne sont plus des particuliers dont l’horizon se limitait à se loger mais des États voulant maintenir des systèmes sociaux fondés sur un mécanisme de Ponzi[1] et des groupes financiers multinationaux qui veulent dominer le marché mondial. Les taux d’intérêt sont maintenus artificiellement bas par des banques centrales qui accompagnent le système et la valeur des actifs donnés en garantie s’envole au gré des échanges boursiers spéculatifs.

    Les économistes en vue expliquent que ce nouveau système est sans risque puisque l’on a changé le paradigme financier ; les taux ne sont pas destinés à augmenter, ils sont durablement maintenus bas par un consensus politique mondial. Cependant, ils font le pari que d’une part il n’y aura pas d’accident sur le marché boursier international, lequel viendrait ruiner brutalement la confiance dans la valeur des actifs donnés en garantie, et que d’autre part aucun État ne sera jamais tenté d’augmenter les taux d’intérêt.

    La pensée économique est fondamentalement viciée

    Intellectuellement, force est de constater le vice de la pensée économique contemporaine qui affirme que plus les liquidités sont abondantes, plus le crédit est bon marché et plus la croissance économique réelle est élevée. Il justifie que l’on soit passé d’une économie de capitaux à une économie d’endettement et que l’on ait appliqué aux « marchés » du crédit les mêmes règles qu’aux marchés des produits et services. Mais le marché du crédit ne fonctionne pas comme celui des biens et services. Sur le marché des crédits, « l’offre et la demande augmentent en même temps. Les prêts sont perçus comme sûrs puisqu’ils sont garantis par une richesse qui s’apprécie. Ce n’est pas le cas dans la production industrielle, par exemple : lorsque l’offre augmente plus que la demande, il se produit un ajustement des prix à la baisse. Pourquoi ? Parce que la demande est indépendante de l’offre. Au contraire, en matière de crédit, offre et demande vont dans le même sens parce que toutes deux sont attirées par un facteur commun qui est la perspective de hausse de la valeur des actifs, ce qui empêche le taux d’intérêt, régulateur du crédit, d’atteindre un équilibre. […] Le crédit est fait pour les promesses d’enrichissement futur, et elles sont les mêmes pour le prêteur comme pour l’emprunteur. D’où l’effet de boule-de-neige » [2].

    En fait, le vice fondamental de la pensée économique est de considérer que la sphère économique et financière obéit à des lois mathématiques que l’on peut piloter grâce à des algorithmes et que la science maîtrise. Il occulte le fait qu’elle est en réalité une « science humaine » c’est-à-dire une sphère qui dépend de décisions individuelles multiples elles-mêmes influencées par des considérations psychologiques, des équilibres sociologiques et des intérêts politiques. C’est le même vice qui conduit les conseillers de Joe Biden à expliquer que dans la théorie monétaire moderne, le niveau du crédit n’est pas un problème pour un État qui contrôle sa monnaie… tant que le phénomène inflationniste est contenu !

    Nos hommes politiques en profitent pour communiquer sur le fait que, la science économique ayant fait des progrès et le monde étant plus uni qu’autrefois, nous savons désormais comment surmonter toutes les difficultés. La preuve ? Nous sommes sortis de la crise des subprimes ! On peut donc continuer à vivre à crédit, à consommer sans travailler, à bénéficier de soins gratuits, à distribuer des subventions sans augmenter les impôts. Et, en même temps, à « offrir » aux épargnants des taux d’intérêt négatifs !

    Le système actuel est-il pérenne ?

    On peut non seulement en douter, mais encore on peut penser que nos hommes politiques aussi en doutent. Chacun sent bien que les réactions humaines peuvent être imprévisibles et donc que le système économique n’est pas un moteur bien réglé qui peut tourner indéfiniment sans qu’aucune usure ne vienne le gripper. Chacun sait bien que les épargnants ne vont pas voir leur pouvoir d’achat s’éroder sans rendre les banques dans leur ensemble responsables de ce qu’ils considèrent comme un vol. Chacun comprend que la « croissance » derrière laquelle on court depuis des années et la reprise économique sans cesse retardée ne vont pas d’un coup de baguette magique annuler les montagnes de dettes accumulées. Alors comment expliquer une telle attitude qui, à première vue, paraît suicidaire ?

    Les géants de l’Internet d’abord et certains chefs d’État ensuite commencent à lever un coin du voile sur la révolution monétaire qu’ils appellent de leurs vœux : la monnaie électronique. Si la Chine et la Russie veulent une monnaie électronique garantie par l’État, si Madame Merkel veut une monnaie électronique garantie officiellement par l’Union européenne, il semble que les États-Unis soient plus tentés par une monnaie électronique dont la solidité technique soit garantie par la qualité des programmes informatiques qui la soutiendraient et la solidité économique par le caractère universel de son usage.

    Pour passer en douceur vers ce nouveau système, on apprivoise les agents économiques en faisant circuler électroniquement la monnaie fiduciaire [3] actuelle tout en les poussant à se méfier des banques qui ne sont plus capables d’en garantir ni la valeur ni la circulation universelle. Et pour imposer le nouveau système de référence, les États se livrent à une lutte sans merci dans laquelle ils cherchent à montrer que celui qu’ils veulent construire est le plus sûr. C’est pourquoi les États-Unis mettent en avant leur aura dans les logiciels informatiques et la présence internationale de leurs groupes de sociétés tandis que la Chine s’appuie sur sa capacité de production en tant qu’usine du monde et sur son emprise sur les matières premières.

    Une fois le système bancaire discrédité et le montant des dettes devenu insupportable, il faudra pour assainir la situation passer à une nouvelle forme de monnaie dont l’objet principal sera d’assurer un « lien social » entre tous mais dont la fonction de réserve de valeur aura totalement disparu. En présentant le projet chinois de « monnaie numérique », le Wall Street Journal a, cependant, le 20 avril 2021, souligné ceci : « On s’attend à ce qu’elle donne au gouvernement chinois de nouveaux outils importants pour surveiller à la fois son économie et sa population. […] La monnaie elle-même est programmable. Pékin a testé des dates d’expiration pour encourager les utilisateurs à dépenser rapidement lorsque l’économie a besoin d’un coup de pouce. Cette monnaie est également traçable, ce qui ajoute un nouvel outil à l’arsenal de la surveillance d’État ». Le système américain concurrent donnerait ces outils aux officines de marketing pour permettre de mieux cibler les clients potentiels. En l’état actuel des choses, on ne voit pas bien une monnaie numérique européenne pouvoir s’immiscer d’une façon quelconque dans ce jeu des puissances économiques mondiales.

     

    [1] Système de cavalerie financière dans lequel les nouveaux entrants financent les sortants.

    [2] M. Aglietta, « Capitalisme et désordres financiers », in Géopolitique, n° 102, juillet 2008, p. 24.

    [3] F. Schwerer, « De la circulation électronique des monnaies scripturales vers la monnaie électronique universelle », in Actes du Colloque de droit des affaires consacré au « Droit des affaires au XXIe siècle », Deauville, 27 et 28 juin 2000.

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    Source : https://www.politiquemagazine.fr/

  • Ce serait bien!.... Ce serait la Royauté !.....

              Nicolas Sarkozy souhaite rénover les Institutions. Il affirme qu'on "ne peut pas imaginer la France sans un État fort" et il estime que "pour que l'unité soit préservée, il faut qu'il y ait au-dessus de tous les partis un État ayant assez d'autorité pour les dominer".  Comment ne pas souscrire à de tels propos? On fera juste remarquer que, le système étant ce qu'il est, il y a des élections municipales dans un an, puis des cantonales, et des régionales; puis des législatives et une présidentielle dans cinq ans (c'est à dire demain...): et à chaque fois, une possibilité d'alternance, c'est à dire de remise en cause, voire de destruction, de tous les acquis éventuels d'un "bon" mandat (voire de deux....). Comment construire quelque chose de durable dans ces conditions là? 

              Il faudra bien imaginer un jour inscrire l'action politique dans un autre cadre, qui respecte les choix des citoyens mais assure une permanence à la tête de l'État: il en est des élections, vécues à la façon républicaine, comme de ce qui se passait sous les premiers Rois mérovingiens et carolingiens: Jacques Bainville a fort bien expliqué et analysé ce "problème": à la mort de chaque roi, le partage du royaume entre ses différents successeurs anéantissait tous les efforts du règne, et empêchait de facto la stabilisation territoriale du pays et, donc, la constitution de l'unité nationale (il faudra, pour cela, attendre l'élection d'Hugues Capet en 987...). C'est un peu la même chose aujourd'hui avec le système républicain: "mutatis mutandis" le système actuel est un peu frappé de la même paralysie, de la même pesanteur stérilisante....: 

                ... Il ne s'agit pas, bien sûr, de supprimer les élections: si, comme nous le proposons, on confie le poste de Chef de l'État au Chef de la Maison de France, on continuera à voter pour les municipales, les cantonales, les régionales, les législatives...Mais la tête de l'État, son sommet, sera indépendant, libre et libéré de cette mainmise absolue et incapacitante des élections sur la totalité de l'action de l'État. Comme cela se passe dans toutes les royautés européennes (1) -qui s'en félicitent et qui sont en avance sur nous dans de nombreux domaines grâce à cette force qu'ont leur système sur le nôtre- nous souhaitons garder dans notre actuel système ce qui existe et qui est bon et légitime: la représentation nationale, assurée par les différentes élections; mais en l'enrichissant, en le complétant, en le couronnant de ce qui manque à la république -elle est pauvre sur ce point, et très imparfaite...- à savoir la permanence de l'État, a coté et au-dessus des partis.....

              Cette permanence de l'Etat ne peut être assurée au quotidien que par une autorité venue du fond des âges, une autorité indépendante et distincte des partis, qui incarne ce qui ne change pas et ne peut pas changer: les intérêts supérieurs et permanents de la Nation; à côté de ce qui peut changer et doit changer en permanence: les évolutions des politiques au quotidien, variables en fonction des évolutions permanentes des choses et du monde..... Et ,là, on aurait vraiment ce que souhaite Nicolas Sarkozy: on voit bien que son intention est louable, et on voit bien que ce ne sont pas les hommes qui sont mauvais: c'est le système républicain...Prenons donc acte, pour l'instant, d'une bonne volonté affichée, qui ne peut qu'être sympathique. Mais attendons la suite, en faisant valoir nos propositions....

    (1) voir dans la catégorie "République ou Royauté": "Royauté, modernité", "L'exemple des royautés nordiques", "L'exemple espagnol" etc.

  • L'énorme opération en cours contre Benoît XVI (II)

               « Ce pape commence à poser un vrai problème ». C’est Alain JUPPE qui le dit. Comme l’ont fait aussi bien d’autres de ses collègues. Alain JUPPE, ancien Premier Ministre français et, peut-être futur ministrable du prochain gouvernement de Nicolas SARKOZY. Xavier DARCOS, notre ministre de l'Education Nationale, laquelle n'a pourtant de leçons à donner à personne, n'a pas hésité, de son côté, à qualifier les propos supposés du pape, de criminels. Mais à qui Benoît XVI commence-t-il à poser un problème ?

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                Nous pensons, quant à nous, que c’est le « système » français qui « commence » ou plutôt qui continue – à poser un problème. « Système » oligarchique de très petite volée, « système » totalitaire et oppressif, dont Alain JUPPE, dont nous ne méconnaissons pas, au demeurant, les qualités, est l’un des pontifes. Mais les « colonnes du temple » (l’expression est de Jacques CHIRAC) sont ébranlées.

                Ce que Pierre BOUTANG appelait déjà, en son temps, le Semble-Etat, a-t-il encore une cohérence, et même une existence ? Le président de la République qui a, sinon écrit, du moins prononcé le discours du Latran, est-il le même que celui qui s’apprête à prendre pour ministre un homme qui considère que « ce pape (le Souverain Pontife régnant) commence à poser un problème », comme s’il s’agissait d’un membre quelconque du show-biz ou du monde politique, ce qui « commence », d’ailleurs, à être la même chose ?

               Le « système » que nous avons décrit précédemment, existe-t-il d’ailleurs encore vraiment ? Le Semble-Etat est incohérent, ballotté entre sondages, peur de « la rue », hantise d’un effondrement économique de grande ampleur, pressions de tous les corporatismes et lobbies de privilégiés qui le somment de creuser encore une dette pourtant déjà paralysante, harcèlement des médias … Les syndicats, quant à eux, ne représentent plus guère que des appareils et sont, en réalité, si on ne leur reconnaissait une légitimité pourtant très improbable, que des fantômes de la représentation des salariés. Les grands médias sont constitués de coteries uniquement occupées à accroître leur audience, pour faire et défaire les courants dits d’opinion et faire accroire à cette dernière qu’elle pense par elle-même … Les Instituts de formation de l’opinion et de sondages, œuvrent, évidemment, dans le même sens … Que dire de l’Education Nationale, en pleine décomposition culturelle et morale ? Que dire des « associations », souvent composées de marginaux, qui n’ont d’écho que si les médias les relaient ? « Je te tiens, tu me tiens par la barbichette » : tout ce petit monde se tient, comme les éléments d’un château de cartes, somme-toute assez lamentable. Quelle est sa réalité ? Voilà, en effet, ce qui « commence à poser un problème ». 

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                 D’autant plus que ce « système », ainsi constitué, ignore superbement et vit dans un décalage de plus en plus creusé entre son idéologie d’essence très simpliste et l’évolution évidente d’une grande partie de l’intelligence française, souvent composée, d’ailleurs d’hommes – parfois les plus brillants – venus de ce que l’on appelle encore la Gauche … Cette nouvelle Intelligence française en vient à contester de plus en plus et de plus en plus radicalement la tyrannie, l’idéologie, déclinante et nulle, du « système ».

                Et nul doute que cette Intelligence – ne serait-ce que par sentiment naturel de confraternité – penche davantage du côté du grand esprit qu’est le pape Benoît XVI que du côté d’Alain JUPPE, Xavier DARCOS ou David PUJADAS …

     

  • Sur le site de l'URBVM, de la « crise » au retour du politique.

    La situation actuelle de « crise » permanente permet t-elle l’usage rationnel et efficace de la Dictature comme outil, ou la norme en vigueur n’est-elle pas en essence la cause fondamentale de cet état ?

    Errare humanum est, perseverare diabolicum

    Depuis le début de ce siècle, la notion de crise semble s’imposer comme un continuum, voir même comme un réel paradigme. Crise politique et géopolitique avec l’émergence d’une multipolarité et d’enjeux régionaux sur le contrôle des ressources stratégiques. Crise sécuritaire : avec le développement et la montée en puissance des oppositions asymétriques (terrorismes, intifada, nouvelles guerres des partisans…) Crise sanitaire, aujourd’hui avec la psychose d’un corona virus (Covid-19), le tout sur fond de crise climatique aux défis nombreux et souvent abscons. Tout ces phénomènes de « rupture » de la norme admise par les sociétés occidentales sont le signe tangible de la fin du dogmatisme économique-libéral tel que vécu et connu depuis les années 30. Néanmoins cela ne signifie pas pour autant la fin du Libéralisme…

    La notion même de crise désigne une temporalité « autre », par essence temporaire, qui peut être surmontée par différents moyens et selon différents procédés. La « crise » est une menace contre le système c’est à dire le couple de l’Ortung et de l’Ordnung. Au sein de la Démocratie (en tant que système), le moyen optimal de préserver la norme est d’y renoncer en la conservant en dehors des cadres d’application de la loi. Pour ce faire il est nécessaire de recourir à un ensemble d’outils légaux a-normaux mis en place, temporairement et dans le but de contrecarrer la menace. C’est là, le principe initial de la Dictature, et l’histoire foisonne d’exemples d’usages de ce recours.

    Cependant la Dictature, dans son acception première est inscrite au sein d’une temporalité relative à celle de la « crise ». Techniquement il s’agit d’un outil politique (et législatif) permettant la survie de la norme face à sa menace. Une fois le danger écarté il est convenu que la Dictature soit déposée pour que le paradigme normatif initial reprenne l’ascendant sur la politique et procède, si nécessaire, aux corrections utiles afin de prévenir et anticiper les crises de même nature dans un futur proche. Néanmoins, au regard de la situation actuelle, une double problématique se pose :

    La situation actuelle de « crise » permanente permet t-elle l’usage rationnel et efficace de la Dictature comme outil, ou la norme en vigueur n’est-elle pas en essence la cause fondamentale de cet état ?

    Il semble en effet intéressant de s’interroger sur le caractère consubstantiel de l’itérativité des crises survenant au sein du paradigme libéral. Ce faisant, si l’on se penche sur la nature et le type de ces crises, il apparaît qu’elles sont toutes politiques et s’opposent en praxis au dogme Libéral. Dans cette situation la mise en place d’un système de préservation de la norme d’origine reviendrait à conserver dans un temps plus long le paradigme actuel, lui-même à l’origine des « crises » connues.

    De plus ce maintien d’un système non viable, n’aurait que pour seule conséquence l’apparition d’un «état d’exception » permanent, soutenu et dirigé par une Dictature. L’engagement de tels moyens représente donc un risque double : perpétuer un système non viable et générateur de crises de par son incapacité (essentielle) à pouvoir annuler le Politique et dans un second temps, l’usage de la dictature en tant qu’outil politique représente un risque formel de négation postérieure de la norme initiale comme tend à le démontrer les nombreuses occurrences historiques de « conservation » de « l’état d’exception »…

    Deux constats s’imposent donc sur le sujet. Premièrement le système libéral en tant que négation du Politique ne peut en rien s’opposer aux différentes incarnations de ce dernier au sein de son espace propre sans avoir recours à une solution exogène et donc Politique. Deuxièmement l’occurrence des phénomènes disruptifs qui appelle à questionner le retour du paradigme Politique comme solution future, ne semble pas être, au regard de la situation et des perspectives, la solution envisagée par les détenteurs (détracteurs) de la souveraineté. On peut ici conclure sur cette citation, hélas, probante :

    La République gouverne mal mais se défend bien

  • Honte à l’Union européenne, qui n’a pas le courage de commercer en euros avec l’Iran !

     

    Par Marc Rousset   

     

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    L’Union européenne, protectorat de l’Amérique, a fait le bon diagnostic sur le scandale des sanctions américaines à l’égard de l’Iran, mais elle n’a pas la volonté politique d’une Europe puissance des nations pour commercer en euros avec l’Iran et le monde entier. « Il est absurde que l’Europe paie 80 % de sa facture énergétique de 300 milliards d’euros par an au total, en dollars alors que 2 % seulement de notre énergie provient des États-Unis », a déploré M. Juncker, jugeant également « ridicule » que les entreprises européennes achètent des avions européens en dollars plutôt qu’en euros.

    La majorité des hommes politiques européens qui parlent du problème du règlement international en euros ne comprennent pas ce qui se passe et les raisons exactes ne sont jamais expliquées d’une façon claire, technique et précise dans les médias. L’une des raisons est qu’en fait, l’euro, monnaie unique, contrairement à ce que l’on nous raconte, n’existe pas !

    L’euro est monnaie unique en apparence seulement car les euros italiens ne peuvent pas dévaluer vis-à-vis des euros français ou allemands mais, en fait, les banques centrales des pays européens sont toujours techniquement indépendantes les unes des autres et présentent toutes les symptômes d’une monnaie propre à chaque pays avec leurs propres réserves physiques en or. Elles pourraient reprendre immédiatement, chacune, leur indépendance vis-à-vis des autres banques centrales. La BCE n’est, en fait, que la consolidation comptable des bilans des différentes banques centrales européennes. La zone euro peut se défaire techniquement en une nuit, si elle explose !

    La preuve en est le « système Target 2 » de règlement entre les banques centrales qui fait qu’aujourd’hui, dans la zone euro, la Bundesbank détient 1.000 milliards d’euros de créances bancaires sur les autres banques centrales alors que la Banque centrale d’Italie est débitrice de 460 milliards d’euros, principalement vis-à-vis de l’Allemagne.

    Et comme il n’y a pas, techniquement, une véritable zone euro, la BCE et l’Union européenne ont été incapables, jusqu’à ce jour, de mettre en place un système européen interbancaire européen indépendant du système international SWIFT (Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication) sous l’emprise de Washington, de la Fed, des banques américaines et du roi dollar. La volonté de mise en place de ce système est en paroles seulement. « Nous devons augmenter l’autonomie et la souveraineté de l’Europe en matière économique, commerciale et financière », a déclaré le ministre des Affaires étrangères allemand Heiko Maas, le mois dernier, à Berlin. Un système interbancaire de paiement européen indépendant, conforme au droit européen, avec l’euro comme moyen de paiement international pour commercer avec le monde entier est urgent.

    L’Europe impuissante face aux sanctions américaines contre l’Iran souhaite mettre en place seulement un système de troc sophistiqué à partir de la vente de pétrole iranien. L’Union européenne sera amenée à créer, comme du temps du rouble dans les pays satellites de l’ancienne URSS, une chambre de compensation sans transactions financières dans la zone euro. Si l’Iran vend du pétrole à l’Espagne, ces euros serviront à régler pour un même montant directement l’exportateur allemand des machines-outils à l’Iran en évitant les transactions en dollars qui pourraient exposer les acheteurs et les vendeurs européens à des sanctions américaines.

    L’impérialisme américain est odieux, scandaleux, inacceptable. Les grands groupes tels que Total, Peugeot, Renault, Airbus, Siemens, suite aux menaces de représailles sur le marché intérieur américain, ont déjà tous renoncé. Mais la malheureuse chambre européenne « croupion » de compensation s’attire, cependant, les foudres du conseiller à la sécurité nationale de la Maison-Blanche John Bolton. Il a osé déclarer :

    « Les États-Unis seront “agressifs et inflexibles” dans l’application des sanctions […] L’Union européenne est forte dans sa rhétorique, mais faible pour l’appliquer. Nous allons surveiller le développement de cette structure qui n’existe pas encore et pour laquelle aucune date de création n’a été fixée. Nous n’avons pas l’intention de permettre à l’Europe ou quiconque d’éviter nos sanctions. »

    Debout, l’Europe puissance des nations anti-Macron à construire !   

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    Économiste
    Ancien haut dirigeant d'entreprise
  • Le Liban s’enfonce dans une crise sans précédent, par Antoine de Lacoste.

    Source : https://www.bvoltaire.fr/

    Le s’effondre. , crise financière, crise bancaire, tout arrive en même temps et, au fond, ce n’est pas une surprise. Le « libanais » était un mirage. Un mirage construit sur un château de cartes qui s’est effondré.

    Aucune issue ne semble pour l’instant possible. L’inflation galopante détruit ce qui reste de pouvoir d’achat, le chômage est devenu massif, la livre libanaise s’effondre et la classe politique reste honteusement passive.

    antoine de lacoste.jpgComment en est-on arrivé là ? L’économie libanaise produit peu et exporte donc peu. Pour financer les importations nécessaires à la vie quotidienne, la Banque centrale libanaise a créé un système totalement artificiel de taux élevés afin d’attirer des capitaux du monde entier. La diaspora libanaise, plus nombreuse que les habitants eux-mêmes, a volontiers souscrit à ce système très rémunérateur et a massivement rapatrié des capitaux pour nourrir les banques du pays.

    Dans le même temps, le Premier ministre sunnite Hariri a entrepris de reconstruire Beyrouth, très endommagée par quinze ans de guerre civile. Son groupe de travaux publics s’est enrichi, tout comme l’Arabie saoudite, principal bénéficiaire de cette reconstruction accélérée, souvent illégale et toujours au cœur des circuits de corruption. La capitale libanaise a été irrémédiablement enlaidie et de très nombreuses charmantes demeures anciennes détruites au profit d’immeubles clinquants et sans âme.

    L’assassinat, dans des conditions restées mystérieuses, d’Hariri n’a pas beaucoup changé la donne. Son fils est devenu Premier ministre à son tour, bénéficiaire d’un système communautariste devenu un boulet.

    Ce système prévoit que la présidence du Liban revient aux chrétiens, le Premier ministre (détenteur du pouvoir effectif) est sunnite et le président de l’Assemblée chiite. Mais au-delà de cette répartition tripartite, de très nombreuses communautés doivent être intégrées dans d’invraisemblables combinaisons gouvernementales qui mettent des mois à se conclure.

    Le pouvoir est ainsi paralysé, aucune réforme structurelle n’est entreprise faute de consensus et chacun ne pense qu’à tirer bénéfice d’un système où l’on pouvait s’enrichir et faire vivre sa communauté sans aucun souci du bien commun.

    Pendant des années le système a fonctionné sur un empilement de dette extérieure grassement rémunérée, dont la classe politique elle-même tirait un profit substantiel.

    Tout le monde s’aveuglait, faisant une confiance totale à Riad Salamé, gouverneur de la Banque du Liban depuis 1993. De génie financier, ce dernier est passé au statut peu enviable de fossoyeur du pays. Car lorsque la confiance s’est érodée et que les sorties de capitaux ont commencé, tout s’est enchaîné à la vitesse de l’éclair. La livre s’est effondrée, l’inflation et le chômage ont explosé. L’élite du pays ne pense qu’à une chose : sauver son argent.

    Les grandes manifestations de l’automne dernier n’y ont, hélas, rien changé. Le Liban sombre dans l’indifférence générale. La moitié de la population atteint le seuil de pauvreté et a maintenant recours au troc pour survivre.

    La , traditionnel appui du Liban, reste passive, tout comme le FMI et l’, mais cela n’étonnera personne.

    En attendant, les jeunes diplômés, souvent chrétiens, ne trouvent pas de travail et ne pensent plus qu’à une chose : partir.

  • Dans le monde, et dans notre Pays légal en folie : la revue de presse de lafautearousseau...

    Jean Messiha dénonce, à bon droit, la soi-disant "justice" du Système - mieux nommée "injustice"...- qui est à deux vitesses : 

    (extrait vidéo 0'53)

    https://twitter.com/AssoApollon/status/1444912034483740675?s=20

    "Pour avoir traité le préfet des Yvelines d’ami des islamistes, le procureur a requis contre moi une amende de 12.000 euros Pour avoir appelé à tuer les Blancs #NickConrad a pris 5000 euros AVEC SURSIS et a été totalement relaxé en appel. Voilà ce qu’est la justice en France !"

    Une seule nuance, mais de taille : pas "en France", cher Jean Messiha, mais "dans le Système"...

    1. Confirmation de ce qui précède : Morandini révèle qu'un homme se présentant comme un "arabe et musulman banlieusard", qui a volé les pompiers et menacé un commissariat, a été libéré après 24h avec un simple "stage de citoyenneté " à effectuer ! : 

    https://twitter.com/morandiniblog/status/1444901860050194437?s=20

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    2. Plus de 420.000 lois, normes, règlements... non pas "en France" mais "dans le Système". Zemmour a raison de dénoncer la sur-taxation des Français, l'inflation stratosphérique des contraintes : mais ce n'est pas un problème lié à "la France" (comme nous le disons aussi à Messiha), cela vient du Système : avec la Royauté, la France était "la flèche du progrès"; le Système en a fait un État obèse, impuissant, paralysant, nocif, toxique... C'est ce Système qu'il faut abattre !

    (extrait vidéo 2'20)

    https://twitter.com/CyrilSlotwinski/status/1444715907692081161?s=20

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    2 BIS. "Inculture" et "caractère vindicatif" : Dans "Les grandes gueules", Éric Zemmour répond à ce pauvre Olivier Véran, qui l'a attaqué, cette fin de semaine, et le remet à sa place, en beauté ! : " Il a été biberonné par 'l'école du vice !"

    (extrait 2'15)

    https://twitter.com/GG_RMC/status/1444940322375618562?s=20

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    4. Macron est venu à Marseille, où il est resté... trois jours ! On était passé du "Trois petits tours et puis s'en vont" au "Trois petits jours et puis s'en va !" Depuis, les problèmes sont-ils réglés ? "Que nenni !", comme disait Zemmour, dans ses Face à l'info :

    https://www.valeursactuelles.com/regions/provence-alpes-cote-dazur/bouches-du-rhone/marseille/faits-divers/marseille-les-policiers-de-la-bac-nord-essuient-des-tirs-de-kalachnikov/

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    5. Pour une fois, Macron a dit quelque chose de bien sur la France et l'Algérie. Du coup, l'Algérie rappelle son ambassadeur à Paris : elle devrait surtout rappeler ses clandestins (plusieurs dizaines de milliers), et ses 2.748 condamnés/emprisonnés ici !...

    https://www.valeursactuelles.com/politique/affaires-des-visas-alger-rappelle-son-ambassadeur-en-france/

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    6. D'accord avec Élisabeth Lévy (sur tweeter) :

    Élisabeth Lévy
    "Pour Ruquier et Salamé, Zemmour est un virus. Une épidémie. Injures qui appartiennent au lexique des vrais fascistes. L'adversaire est un microbe. Et c'est Zemmour qui est d'extrême droite ? On ne veut plus payer pour cette propagande ordurière."

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    7.                                               SACCAGE PARIS

    Paris bobo, Par'Hidalgo, Paris pas beau !

    Les magnifiques Quais de Paris sont classés à l'Unesco : souillés, défigurés par des graffitis ignobles - que Lang et consorts osent appeler "art de rue" !... - la Mairie ne les nettoie même plus : elle se contente de les défigurer encore un peu plus, en les badigeonnant : affligeant !

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    La Mairie ne nettoie plus les réverbères, non plus ! Il faudrait pourtant bien les "dessouiller", eux aussi...

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    Végétaliser Paris ? On coupe un bel arbre sain...

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    ... et on le remplace, ailleurs, par "ça" !!!!

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    De nombreux bancs sont dans un triste état...

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    ... er certains murs ! Au secours !...

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    À DEMAIN !

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  • Dans le monde et dans notre Pays légal en folie : revue de presse et d'actualité de lafautearousseau...

     

    D'accord avec Amaury Navarranne :

    "RAID, GIGN, BRI, hélicoptères, drones, véhicules blindés, engins lanceurs d'eau, 130.000 policiers et gendarmes : quels dirigeants ne se poseraient pas de question quant à devoir déployer de tels moyens pour assurer le calme le jour de la #FêteNationale ? Les nôtres. Déni fou."

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    "Après les émeutes, un président mutique sur un événement central (extrait de l'édito politique de Vincent Trémolet de Villers

    L’ÉDITORIAL DU FIGARO - Dans nombre de villes de France,,es Français sont forcés de vivre un 14 juillet sous couvre-fête.

    Les lampions ne s’allumeront pas, ce sera une fête sous couvre-feu. Un soir de couvre-fête. Dans nombre de villes de France, pas d’enfants éblouis devant les lumières de la nuit, pas de places en fête et en délire, pas de flonflons, ni bistrots de fortune aux couleurs bleu-blanc-rouge. Les bus doivent rentrer au dépôt et les citoyens des villes éteintes rester chez eux. Une tisane et au lit! Le 14 Juillet dessiné par Sempé est un vieux souvenir. Il laisse place à un mauvais roman d’anticipation. La police quadrille le territoire, les pompiers sont en alerte, les maires sur les dents. On nous dira que c’est circonstanciel, que prudence est mère de sûreté, et tout cela n’est pas faux, mais si l’Amérique se barricadait le 4 juillet, si les rues de l’Espagne se vidaient le 12 octobre, nous y verrions un signe des temps. Le signe inquiétant d’un pays incapable de fêter dignement sa fête, d’une nation contrainte de s’exiler de sa propre histoire.

     

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    1. Au Blanc Mesnil :

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    Fabien Gay, directeur de L'Humanité (journal avec beaucoup plus de subventions - venant de nos impôts - que de lecteurs) et sénateur communiste de Seine-Saint-Denis s'indigne et parle de "double peine" pour les habitants.

    Mais, l'a-t-on entendu condamner les émeutes et les émeutiers, les pillages et les pilleurs, les razzias et les razzieurs, et appeler au calme ?... 

     

    1 BIS. Et, partout en France :

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    À cause de la folle politique d'immigration/invasion imposée par le Système depuis Chirac et ses scélérats décrets de 75/76, les Français ne peuvent maintenant plus vivre normalement dans "leur" France, qu'on leur a changée...

    Qui donc, "on" ?

    LE SYSTÈME !

    • NOTRE COMBAT : LE SYSTÈME CHANGE LE PEUPLE, CHANGEONS DE SYSTÈME ! (1/2)

    • NOTRE COMBAT : LE SYSTÈME CHANGE LE PEUPLE, CHANGEONS DE SYSTÈME ! (2/2)

     

    3. La Ligue des Droits de l'Homme ? Il y a belle lurette qu'on la sait partiale, malhonnête, toujours du côté de la désinformation... De Bruno Attal :

    "La @LDH_Fr n’est pas un « observateur indépendant » : le statut d’observateur lui a été refusé par le Tribubal administratif de Poitiers. Son rapport sur #SainteSoline est partial comme à chaque fois. Ils sont à 100 mètres mais ils ont tout vu."

    (extrait vidéo 1'11) :

    https://twitter.com/Bruno_Attal_/status/1679381331006959617?s=20

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    4. De Île de France rassemblée :

    Les Insoumis se sont soustraits à l'hommage rendu aux élus agressés par les émeutiers... Sauf qu'ils ont été filmés. Ils ont essayé de faire disparaître la vidéo ci-dessous. Nous la republions. "Si vous avez honte, c'est votre problème, ça n'est pas le nôtre !"  

    (extrait vidéo 0'46)

    https://twitter.com/IDF_Rassemblee/status/1679098621973635073?s=20

    Question impertinente : qui vote pour des députés LFI ? Mélenchon rafle 80% du "vote musulman" : ceci explique cela...

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    5. Que l'on tourne et retourne le fait dans tous les sens, si la police avait mis le conducteur/assassin hors d'état de nuire, l'enfant innocent serait encore vivant...

    Question subsidiaire : quand libère-t-on Florian, le policier qui a évité "ça" en mettant hors d'état de tuer celui qui a refusé d'obtempérer ?

    LIBERTÉ POUR FLORIAN !

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    Et courageux, en plus : "ça" tue un enfant

    et "ça" prend la fuite !

     

    6. Deux sondages CSA pour CNews :

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    7. En Wallonie... D'accord avec CHEZ NOUS sur le "mauvais signal" envoyé à Molenbeek :

    "Une échevine voilée vient d’être nommée à la ville de #Molenbeek. Le port du #voile pour un mandataire public de ce type n’est pas acceptable ! Chez Nous , c’est clair, net et précis : non au voile #islamique car il s’agit d’une marque de soumission insupportable de la femme."

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    À DEMAIN !

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