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  • CINEMA • DVD : L’ouvrier qui fit tomber le communisme ... Par Raphaël de Gislain

     

    Sorti dans les salles françaises en novembre dernier, L’homme du peuple, d’Andrzej Wajda, vient d’être édité en DVD. Un portrait warholien du leader Lech Walesa, fondateur de Solidarnosc, à l’origine de l’effondrement du communisme…

    D’Andrzej Wajda, comment ne pas se souvenir de Katyń, ce récit poignant du massacre soviétique de 1940 maquillé en crime nazi, qui coûta la vie au père du cinéaste. Depuis son premier film Génération sorti au début des années cinquante, les œuvres d’Andrzej Wajda ont toujours été des lectures personnelles, engagées, dissidentes, des grandes pages de l’histoire polonaise contemporaine. Comme si la fiction devait rendre au réel sa part de vérité lorsqu’on la lui confisque.

    Après l’Homme de marbre puis l’Homme de fer, le réalisateur referme avec l’Homme du peuple une trilogie entamée il y a près de quarante ans. Le geste, d’une ampleur rare, accule l’idéologie stalinienne jusque dans ses derniers retranchements ; il lui valut l’exil dans les années 80. Entreprise méthodique de démythification du communisme, L’Homme du peuple brosse le portrait de Lech Wałęsa, modeste électricien des chantiers navals de Gdańsk qui fonda le mouvement Solidarność, principal syndicat ouvrier – soutenu par l’église –, dont les coups de boutoir finiront par abattre le régime rouge sang.

    L’engrenage est connu : augmentation radicale des prix dès 1970, émeutes, chars, grèves, loi martiale… et un jour, le pouvoir qui tremble. Comment naît la révolte ? Qui peut la conduire ? Wajda y répond par le souffle de l’image, prenant fait et cause pour l’homme dont il fut un proche, quitte à laisser ses échecs dans l’ombre. Vaste puzzle bariolé ou s’entremêlent fiction, documentaire, images d’archives en noir et blanc ou en couleur, l’auteur déroule une bobine étonnamment fluide, ponctuée par des morceaux de rock contestataire qui font vibrer la voix du peuple. Mais l’esthétique pop de l’ensemble ne parvient pas assez à relancer la dramaturgie qui manque de relief, et, surtout, à faire oublier l’égocentrisme poltron du leader politique, héros dont la suffisance finit par lasser. Lumière dans la nuit polonaise, Wajda ne manque pas de rendre hommage à Jean-Paul II en rappelant son rôle majeur dans la libération du pays. Une belle leçon d’espoir malgré tout… 

    L’homme du peuple d’Andrzej Wajda, Condor, DVD, 20€
    En bonus, l’intervention de Lech Walesa à l’Assemblée nationale en juin 2014

    Politique magazine

     

  • Une Union européenne en décomposition, par François Reloujac

     

    Il ne se passe pas un jour sans que les médias n’évoquent le « Grexit » (la sortie de la Grèce de l’euro), les tribulations du gouvernement français face à une Commission européenne qui la somme de respecter ses engagements financiers et la « politique non conventionnelle » suivie par la BCE. Le point commun à tous ces sujets ? La décomposition avancée de l’Europe. 

    Les débats autour de la situation en Grèce montrent à quel point l’absence de solidarité entre les états européens – assumée par les divers gouvernements et alimentée par les médias – est patente. On a beaucoup glosé sur le manque d’honnêteté des Grecs lorsqu’ils sont entrés dans la zone euro et sur la façon dont les partis successivement au pouvoir ont utilisé la monnaie unique en vertu de leurs intérêts partisans jusqu’au moment où le peuple s’est révolté, pour l’instant uniquement dans les urnes. On a beaucoup moins fait allusion aux décisions européennes qui ont nui (l’euro fort), ou nuisent encore (l’embargo russe décrété dans le cadre de la crise ukrainienne), à l’économie grecque. Mais depuis qu’un gouvernement improbable est sorti des urnes, menaçant l’establishment politique, l’Union européenne a décidé de jouer la politique du pire. Le 10 mars dernier, le commissaire Dijsselbloem déclarait ainsi cyniquement que « s’il y a une pression sur la liquidité de l’état grec, cela pourrait accélérer la mise en œuvre des réformes » imposées par la « Troïka », quoiqu’elles aient déjà montré leur nocivité absolue.  

    En fait la Commission européenne a peur. Peur que l’exemple grec ne devienne contagieux, à commencer par l’Espagne prochainement. Il faut donc, par tous les moyens, acculer le gouvernement Tsipras à l’échec. Tout le monde s’y met, hors de Grèce. Des chaînes de télévision qui rediffusent d’anciens reportages sur l’actuel ministre grec de l’économie en détournant le sens de ses positions. Jusqu’aux journaux les plus importants qui déforment sciemment les mesures proposées par le gouvernement grec, notamment pour lutter contre la fraude fiscale. Le but est toujours le même : déconsidérer ce gouvernement aux yeux de l’opinion publique européenne et pousser le pays vers la sortie de l’UE Même la Banque centrale européenne s’y est mise en imposant à la Grèce des mesures spéciales qui vont au-delà de ce que prévoit le respect des traités. 

    La « politique non conventionnelle » de la BCE 

    Et ce n’est pas uniquement vis-à-vis de la Grèce que la BCE trahit l’esprit des traités. En lançant son programme d’« assouplissement quantitatif », permettant aux banques centrales nationales de racheter, aux financiers qui les détiennent, les titres d’état déjà émis – ce qui leur permet d’en acquérir de nouveaux – elle détourne l’interdiction de financer les déficits publics. Or cette politique, censée relancer la croissance, risque de ne déboucher que sur une accélération de la spéculation financière. Ainsi, la Bundesbank, qui ne peut racheter que des titres publics allemands, n’en trouve pas sur le marché. Les banques qui les détiennent ne veulent pas s’en séparer. D’une part parce qu’elles n’ont pas besoin de liquidités supplémentaires pour financer de nouveaux emprunts allemands (l’Allemagne n’a pas l’intention de lancer autant de nouvelles émissions) et, d’autre part, parce qu’elles y perdraient : elles ne pourraient placer les liquidités obtenues et inutiles que sur les marchés financiers… à un taux négatif ! Alors, à quoi sert ce plan qui a peu de chances de casser le phénomène déflationniste qui s’amorce ? Certains observateurs, de plus en plus nombreux, se demandent si l’unique objectif de la BCE n’est pas de préparer les opérateurs financiers internationaux à affronter le risque d’une implosion de la monnaie unique. En poussant le cours de l’euro à la baisse, on répartit dans le temps les conséquences des moins-values sur les titres obligataires et on permet au détenteurs de titres à risques de moins-value de s’en défaire… tout en leur laissant la possibilité de conserver les titres (allemands ?) qui pourraient à l’inverse bénéficier à terme d’une plus-value. C’est bien pourquoi le plan mis en place par Mario Draghi, avec la bénédiction d’Angela Merkel, n’est pas un plan européen. Il est un plan commun à tous les pays européens. 

    La France déboussolée 

    L’exemple grec et la politique de la BCE sont suffisants pour montrer dans quel état de décomposition avancée se trouve l’Europe. Il est donc inutile d’examiner en détail la situation économique de la France et ses discussions de marchand de tapis avec l’Union européenne – et le commissaire Moscovici – qui en découlent. Force est cependant de constater qu’au-delà des effets oratoires auxquels ces discussions donnent lieu, la Commission européenne est plus indulgente avec la France, qui pèse 20 % de l’économie européenne, qu’avec la Grèce qui n’en pèse que 3 %. La « morale » y trouve peut-être son compte. La sécurité économique et l’avenir des peuples sûrement pas. En même temps, on peut se demander ce qui reste de la souveraineté nationale, lorsque le budget du pays est soumis à des contraintes externes insupportables. Ces contraintes ne permettent même pas de masquer l’hypocrisie qui règne en maître dans le système économique français. Ainsi, par exemple, on a beaucoup parlé des quelques mesures emblématiques de la loi Macron dont la portée économique semble moins importante que l’émotion politique qu’elles ont suscitée. Mais personne ne s’est préoccupé de la portée des dizaines de mesures pointillistes qui y sont contenues pour réformer le code du travail. En réalité, ces mesures dictées par des considérations dogmatiques ont toutes été calibrées pour qu’aucune ne puisse donner lieu à une contestation publique. Mais quel sera l’effet exact de leur combinaison ? Aucune « étude d’impact » n’a été établie. Et il faut rappeler que cette loi est passée à l’Assemblée nationale sans vote des députés ! 

    Que reste-t-il de la « démocratie » quand un gouvernement élu (la Grèce) se voit interdire par une administration apatride (la Commission européenne) de mettre en œuvre le programme pour lequel il a été élu ? Quand le budget d’un autre (la France) est soumis à des contraintes qui transforment le Parlement en simple chambre d’enregistrement et quand la politique de la Banque centrale est faite dans l’intérêt des financiers internationaux au mépris des peuples ? Voilà où conduisent les « valeurs européennes »… 

     

  • André Malraux : « Le monde moderne porte en lui-même, comme un cancer, son absence d'âme »

     

    « Pour remède à la désagrégation du monde moderne, M. Massis propose le retour au catholicisme romain. Il nous en montre les avantages, et nous les montre nombreux, car, sa foi écartée, il a un goût très vif de la philosophie architecturale. Il serait vain d'opposer des inconvénients à ces avantages : M. Massis sait fort bien que nul ne va à la foi par raison. Le monde moderne porte en lui-même, comme un cancer, son absence d'âme. Il ne s'en délivrera pas : elle est impliquée par sa propre loi. Et il en sera ainsi jusqu'à ce qu'un appel collectif de l'âme torde les hommes; ce jour-là vacillera sans doute ce monde dans lequel nous vivons. Mais il est aujourd'hui indifférent à de telles questions : ceux qui cherchent le sens des destinées sont précisément ceux qui ne les dirigent pas. Les deux nécessités qui gouvernent les hommes sont, pour de longues années encore, celles de l'esprit et des passions : la connaissance et l'argent; celle-ci, avec son cortège de drames, celle-là, avec son drame unique contre lequel toute proposition est vaine : la lutte persistante de l'absolu et de l'humain, lorsque l'idée de l'absolu est devenue sans force, et que la passion de l'Homme s'est éteinte sans trouver un nouvel objet d'amour. » 

     

    André Malraux 

    Nouvelle Revue Française - Juin 1927

     

  • Consultez les archives de Lafautearousseau, voyez nos « grands auteurs », retrouvez leurs réflexions ...

     

    Grands auteurs ou acteurs de l'Histoire s'enrichit, chaque semaine, en principe le vendredi, de pensées et réflexions particulièrement pertinentes. Vingt-sept Français, neuf grands esprits européens, anglais, allemand, espagnol, russe et tchèque. et trois non-européens, Edgar Poe, le Dalaï Lama et le pape François. Bien d'autres grands auteurs éclectiques et profonds sont à venir. « Du bonheur d'être réac ? » C'est, entre autres, en termes très simples et dans des sens divers, ce qui les rassemble. N'hésitez pas à consulter cette bibliothèque qui s'étoffe et se construit !

    Accès : Icône en page d'accueil, colonne de droite. 

     

    Déjà cités : Edgar Poe, le Dalaï Lama, Tocqueville, Baudelaire, Vaclav Havel, Claude Lévy-Strauss, Charles Péguy, Dostoïevski, Goethe, Anouilh, Malraux, Unamuno, la Satire Ménippée, George Steiner, Shakespeare, Frédéric II, Jacques Perret, Georges Bernanos, Anatole France, Auguste Comte, Balzac, Racine, Pierre Manent, Louis XIV, Charles Maurras, Alexandre Soljenitsyne, le Pape François, Wintson Churchill, Alfred de Musset, Michel Houellebecq, Jean Giraudoux, Gustave Thibon, Choderlos de Laclos, Jacques Ellul, Simone Weil, Jacques Bainville, Albert Schweitzer interpelant Charles De Gaulle.

  • La Semaine de MAGISTRO, une tribune d'information civique et politique

    1584417371_2.jpgQuoi que disent les appareils, les hommes et leurs discours dits de droite, dits de gauche ou d'ailleurs, ... partageons les fondamentaux !

    MAGISTRO vous invite à lire : 

    Du côté des "élites"

    •  Eric ZEMMOUR  Journaliste politique, écrivain   Changer le peuple ou changer de gauche ?
    •  Xavier GUILHOU   Directeur du Cabinet XAG Conseil (pilotage des crises, intelligence stratégique)  Géopolitique des frontières mentales 
    •  Philippe BILGER     Magistrat honoraire, Président de l'Institut de la parole     Le problème, c'est l'homme, pas la loi !
    •  Maxime TANDONNET  Haut fonctionnaire, ancien conseiller à la Présidence de la République   Contre les primaires
    •  Ivan RIOUFOL    Journaliste politique     Ceci n’est pas un choc de civilisations…

    En France

    •  Henri HUDE   Philosophe   Après les élections de mars 2015
    •  Jean-Marie FAUGERE   Officier, général d'armée (2S)   VIGIPIRATE, questionnement légitime sur le rôle des armées ?
    •  Françoise THIBAUT     Professeur des universités     Le Musée FRANCE flotte sur sa dette

    Transmettez, faites suivre ... 

  • Républicain, moi-même ! Pour Causeur, République, un mot-valise, vide de sens, qui épuise le citoyen ?

    Gare à la leguénisation des esprits ! (Photo ZIHNIOGLU KAMIL/SIPA)

     

    L'auteur des lignes qui suivent, bien troussées et pleines d'esprit, est Daoud Boughezala, rédacteur en chef de Causeur. Sans-doute ne partage-t-il pas la critique que nous faisons ici du régime républicain à la française. Mais il s'agace de l'usage immodéré de cette invocation à la République et à ses valeurs qui s'est emparé de la totalité de la classe politique. Il est ainsi de la cohorte de ceux que désormais le mot agace. Le mot, puis, parfois, aussi la chose. Elle-même. Comme si la République était en danger, comme si elle était une forteresse assiégée de toutes parts ! Alors que - n'étant plus au temps ni des Ligues ni du Komintern - rien d'extérieur ne la menace et qu'elle n'a plus grand chose d'autre à redouter que de s'effondrer sur elle-même ... Nous partageons d'ailleurs à cet égard l'avis de Houllebecq qui dit qu'en pareil cas, nous n'aurons rien à regretter ... Lafautearousseau

    Le grognard du gouvernement a encore frappé. Interrogé ce matin sur Sud Radio, le secrétaire d’Etat aux relations avec le Parlement s’en est vivement pris à l’UMP. Pour une fois, ce ne sont pas les frondeurs socialistes qui sont l’objet de son courroux social-démocrate n’admettant pas d’autre ligne à la gauche du vallsisme. Non, la pomme de discorde entre cet ex-strauss kahnien et ses adversaires de droite porte sur une simple expression, en l’occurrence « Les Républicains », nouveau nom que Nicolas Sarkozy voudrait proposer à l’UMP. Verdict du ministre : « C’est évidemment un abus de pouvoir. Non pas qu’il n’y ait pas une droite qui ne soit pas républicaine, moi personnellement je sais faire la différence entre des idées d’extrême-droite et la droite » mais « ce qui est vrai – on l’a vu avec cette affaire du ni-ni -, c’est qu’elle n’est pas toujours au clair », a-t-il expliqué en désignant la droite avec la répétition du sujet si chère à François Hollande. Et la sentence de tomber : « Donc il y a à mon avis un abus de position que de vouloir se réclamer républicain de la part de l’UMP ». Certes, on ne sache pas que la hargne de l’ancien médecin, très engagé dans la lutte contre l’obésité, ait fait dégrossir les scores mirobolants du Front national, mais seule l’intention compte…

    Explication de texte. L’UMP refusant de faire barrage au Front national par tous les moyens, y compris d’appeler à voter pour un candidat de gauche au second tour, le parti post-gaulliste ne peut se prévaloir de l’épithète de « républicain ». Clair comme de l’eau de roche : pour avoir droit au label AOC, encore faut-il respecter le sacrosaint « pacte républicain » et passer avec succès l’inspection des troupes qu’impose le brigadier chef Le Guen. Qu’un parti socialiste, dont le slogan était encore « pas un canton pour le FN » en 2011 puisse poser en arbitre des élégances républicaines surprendra les naïfs. Mais quoi, comme son n+1 Valls, Jean-Marie Le Guen a toute légitimité pour distribuer les bons points et décider qui est républicain et qui ne l’est pas. Je me répète ? C’est que vous n’avez pas saisi l’axiome de base du leguénisme : la République, c’est moi !

    Le piquant de cette affaire, c’est que Sarkozy n’a évidemment pas choisi ce label par hasard. Las de s’entendre amalgamés à l’intérieur du monstre « UMPS », ses militants le pressaient de changer de nom, afin d’échapper aux imprécations verbales de Marine Le Pen. Voilà pour le flanc droit du parti, que l’association avec le PS insupporte. Mais Sarkozy, qui n’a rien d’un idéologue et tout du parfait opportuniste, avait également pour souci de satisfaire son hémisphère gauche en apposant un brevet de républicanisme au logo de l’UMP. La République comme ADN, nom et prénom, avec comme supplément d’âme un clin d’œil à l’Amérique, que demander de plus ? « Je suis républicain parce que je le dis » : horreur, malheur, le principe élémentaire du leguénisme a infusé à droite !

    République, république, république : une telle avalanche de mot-valise vide de sens finit par épuiser ce qu’il reste de citoyens. Pendant ce temps, un petit parti qui monte, qui monte, qui monte capitalise sur le projet d’une république sociale, à la laïcité intransigeante, malgré ses casseroles et son passé de cancre de la classe politique. Sarkozy et Le Guen auront beau faire tourner les tables en tous sens, j’en connais une qui a le front de se définir comme la seule femme politique républicaine, nationale et sociale. Diable, le leguénisme aurait-il contaminé le FN ? 

    Daoud Boughezala

  • La pensée française et le sentiment de la fin d'un monde ... Par Mathieu Bock-Côté*

     

    Nous avons déjà cité Matthieu Bock-Côté, figure, nous dit-on,  de la vie intellectuelle québécoise, attaché, comme nous-mêmes, à la cause de la diversité des peuples. Il ne s'oppose dans le texte qu'on va lire à aucun des trois auteurs dont il traite. Simplement, il donne quelques raisons de bon sens de ne pas perdre confiance avant l'heure dans le devenir de notre civilisation, si malade soit-elle. Pourquoi ne pas l'en remercier ?  Lafautearousseau   

    La formule avait quelque chose de crépusculaire sans pour autant être morbide. Michel Onfray, au terme d'un entretien avec François-Xavier Bellamy récemment paru dans Le Figaro, a annoncé la fin de notre civilisation. Il l'a fait sans drame mais avec une forme de droiture antique teintée de mélancolie. Notre monde tombe. Il importe moins de le sauver que de se tenir droit, de ne pas flancher. La formule frappe: « Le bateau coule, restez élégant. Mourez debout ». C'est ce qu'on pourrait appeler la dignité des vieux Romains. Onfray, et cela rajoute une noblesse tragique à son propos, se rallie finalement à cette civilisation au moment de sa perte.

    Les mauvais esprits pourraient voir dans cette déclaration une pose littéraire. N'est-il pas commode de disserter sur la fin d'un monde en philosophe, et peut-être aussi en esthète. Ne faut-il pas pleurer, secrètement peut-être, la civilisation dont nous sommes les héritiers ? On rétorquera qu'il y a peut-être là une forme de lucidité supérieure, qui n'est pas sans grandeur, à la différence de ceux qui sont incapables de penser le déclin et ne veulent voir dans ses symptômes que des évolutions n'agaçant que les grincheux professionnels. Elle vaut mieux aussi qu'une fascination morbide devant notre déclin.

    Une chose est certaine : le sentiment de la fin d'un monde traverse aujourd'hui la pensée française. D'un livre à l'autre, Houellebecq y revient, avec le sentiment que la civilisation occidentale rêve tout simplement de s'abolir, qu'elle n'est plus capable d'assumer le fardeau de l'histoire. Éric Zemmour, quant à lui, a cru voir dans les quarante dernières années un suicide français, même si certains ont dit son livre qu'il faisait le récit d'un assassinat. On a assimilé cette inquiétude, il y a quelques années, au déclinisme, comme s'il suffisait de changer de perspective pour apercevoir une France radieuse. Encore heureux qu'on n'ait pas parlé de déclinophobie.

    Que faire ? La question peut sembler simpliste, exagérément prosaïque, mais elle ouvre pourtant un vaste champ de possibilités à quiconque ne se résigne pas à être le témoin d'une triste agonie. Dans L'écriture du monde et La croix et le croissant, deux livres magnifiques, François Taillandier se l'est posée, en méditant sur la fin de Rome et la naissance de l'Europe chrétienne. « Les hommes véritablement utiles sèment ce qu'ils ne verront pas fructifier. L'arbre qu'ils ont planté donnera de l'ombre à leurs descendants, ils le savent, et se résignent de gaieté de cœur, ayant labouré et semé, de n'être plus là quand viendra le temps des moissons ».

    Autrement dit, la cité qui meurt n'emporte pas tout avec elle. Sa part la plus précieuse peut être conservée par des hommes renonçant au prestige social et politique pour conserver dans les marges de la cité certains trésors précieux. Encore faut-il avoir une certaine idée de la transcendance pour transmettre au fil du temps ce que l'on croit sacré. Mais cette réponse exige aussi une forme de renoncement civique: l'homme de savoir n'entend plus féconder le monde commun des principes fondamentaux et des œuvres vitales. Il entend les mettre à l'abri de la destruction pour qu'un jour, ils contribuent à une renaissance.

    Il y a une grandeur admirable dans ce choix. Mais le commun des mortels peut-il vraiment se satisfaire de cette stratégie de l'arche ? Chose certaine, on sent la politique ordinaire de plus en plus traversée par cette angoisse existentielle, que peinent à traduire les partis, lorsqu'ils ne se contentent pas d'y voir une peur irrationnelle. Certains évoquent l'insécurité culturelle, d'autres se désolent de l'identité malheureuse ou d'un pays qui se morcelle. En fait, c'est l'existence même du monde commun qui semble compromis. De mille manières, on souhaite se déprendre de l'alternance devenue aliénante entre sociaux-libéraux et libéraux-sociaux.

    À sa manière, le peuple appelle au secours. Il sent bien qu'il fera les frais de cet effondrement. Il a le sentiment intime de ce déclin historique. Si ce terme n'était pas aujourd'hui à peu près proscrit, il parlerait peut-être même de décadence. Il cherche alors l'homme providentiel ou se laisse tenter par la révolte populiste. À travers cela, il espère qu'une volonté immense puisse renverser le cours des choses. Il entend moins du politique qu'il n'adoucisse le déclin de nos sociétés qu'il ne restaure les cadres politiques et culturels sans lesquels la cité n'est plus protectrice, sans lesquels, en fait, elle se retourne contre l'homme.

    On en revient au point de départ. C'est une chose de craindre la fin de la civilisation occidentale. C'en est une autre de la décréter inéluctable. Mais la chute du communisme nous rappelle qu'un monde trop en contradiction avec les aspirations profondes de l'homme peut s'affaisser sans prévenir. Après coup, chacun dira avoir prophétisé la chute. Mais avant qu'elle ne survienne, qui s'y serait vraiment risqué ? Ne peut-on dire la même chose de la société actuelle qui déracine les peuples, brouille les repères de civilisation, enraye les mécanismes de la transmission culturelle et condamne le politique à l'impuissance ?

    Il se pourrait que le vieux monde fasse encore valoir ses droits. 

     

    * Mathieu Bock-Côté est sociologue. Il est chargé de cours à HEC Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal ainsi qu'à la radio de Radio-Canada. Il est l'auteur de plusieurs livres, parmi lesquels « Exercices politiques » (VLB, 2013), « Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois » (Boréal, 2012) et «L a dénationalisation tranquille: mémoire, identité et multiculturalisme dans le Québec post-référendaire » (Boréal, 2007).

    FigaroVox

  • Des institutions à l’encan, par Hilaire de Crémiers

     

    H D C - Copie.jpgLes élections donnent lieu à des commentaires infinis et la plupart sans intérêt. Car la vraie question est de savoir si la guerre électoraliste et partisane est bonne pour la France. 

    A quoi servent les élections ? Dans le cadre actuel de nos institutions, à exacerber la lutte des partis. Tel est le résultat le plus évident des élections dites départementales qui viennent de se dérouler. 

    Soit, la plupart des départements sont repassés à droite, mais qui ne voit ce qui se passe au vrai, au-delà de ce basculement. Il ne s’agit plus de représenter les Français, leurs territoires, leurs intérêts ; mais alors plus du tout ! D’ailleurs, dans l’état présent du projet de loi sur la nouvelle organisation des territoires de la République, il est impossible de rien prévoir : le texte est illisible comme maintenant toutes les lois, tant elles sont mal rédigées, et, de fait, personne, sauf les quelques élus spécialisés, n’a lu ce salmigondis technocratique et démagogique dont les tours et les détours compliquent encore plus les échelons et les compétences de l’imbroglio territorial français.   

    Et Hollande ose parler de « choc de simplification » et le gouvernement a appelé les électeurs à voter alors que la loi est en cours d’élaboration et de remaniement. C’est littéralement grotesque, mais peu leur chaut. Car la seule chose qui les occupe et les préoccupe, c’est la lutte des partis. Voilà leur unique passion. La mécanique institutionnelle est telle que la Ve République est maintenant pire que la IVe et la IIIe ; et faut-il évoquer les précédentes qui s’achevèrent dans l’épuisement des factions ? Mourantes, toutes s’en sont remises à un pouvoir personnel : encore faut-il qu’il y ait une personne. 

    La France livrée aux partis 

    La Ve République en est là. Sous son nom règnent non pas des hommes d’état, mais de médiocres politiciens. Les partis se partagent la France, du Conseil constitutionnel jusqu’à la moindre commission culturelle, sociale, administrative. Le département est un lieu de pouvoir qui n’échappe pas à la mainmise des partis. Serait-il possible un jour de choisir des représentants en fonction d’autres critères que l’étiquette d’un parti, la compétence, le dévouement par exemple ? 

    Ainsi n’a-t-il été question dans les commentaires, avant, pendant et après le dernier scrutin départemental, que de savoir quel parti l’avait emporté, jusque dans le moindre canton. Non pas les personnes, mais le parti. Car c’est le parti qui « empoche », qui « rafle » les cantons, les départements. Il en était déjà ainsi en 2014 aux élections municipales : les villes, les communes, les moindres villages sont quasi dans l’obligation d’appartenir à un parti. Bientôt, en fin 2015, il en sera de même aux élections régionales – et de manière vraisemblablement plus violente avec le scrutin de liste à la proportionnelle et la prime majoritaire. 

    Sortir un jour du système 

    Tout n’est donc plus politiquement que calcul en vue des présidentielles. Les états-majors partisans, après chaque scrutin, font leur compte en public et sur les plateaux de télévision : les déclarations, les altercations ne roulent que sur les villes prises, les départements conquis, les régions emportées ou conservées ; on parle de bastions, de résistances, de percées, d’alliances, de ruptures, de stratégies, de contournements. Chaque camp mobilise, explique, se fait pédagogue auprès des troupes rétives, calcule, suppute, crie enfin victoire : ils ont tous gagné ! C’est dérisoire ! 

    Comment se fait-il que les Français supportent un tel régime et s’habituent à de telles mascarades ? Car une telle analyse relève du simple bon sens. La malfaisance est éclatante et personne n’ose la dénoncer. Il est pourtant d’une évidence aveuglante que nos institutions sont totalement corrompues par le régime des partis, ce régime qui fut toujours, à toutes les époques, même sous l’Ancien Régime, le vice des Français et qui ne leur valut que des malheurs et des revers. Tous les grands hommes de France l’ont réprouvé. La grandeur française, les renouveaux français ne furent possibles qu’en rupture avec un tel régime. Pas un Français sérieux et quelque peu éduqué qui ne le sache.    

    Il faut noter, d’ailleurs, que ce qui fait si peur aux partis dits de gouvernement dans l’incontestable montée du Front national, ce n’est pas le fait qu’un troisième larron viendrait réclamer des places et un jour pourrait accéder à son tour au pouvoir. C’est qu’il est clair, pour tout analyste objectif, que derrière le vote FN, il y a, en fait, non pas tant un vote d’adhésion à Marine Le Pen, à des personnes ou à un programme, qu’un rejet profond de la classe politique existante, de ses pompes et de ses œuvres, comme, d’une manière générale, de la classe dirigeante qui s’acoquine avec le système, journalistes, financiers, conseillers, hommes d’affaires formant l’entourage des hommes de pouvoir. 

    L’implacable logique de parti 

    Un nombre de plus en plus grand de Français – en fait une majorité comme l’ont révélé les enquêtes – n’a plus confiance en ses dirigeants. Un certain nombre d’entre eux, en raison du langage du FN sur quelques sujets cruciaux, accordent leur bulletin à cette formation politique qui tranche avec les autres. En réalité, il est facile de déceler sous ce vote un refus du régime des partis ; et le paradoxe de la situation tient au fait que plus le FN engrange ce genre de voix, plus il se croit obliger, pour rassurer, de se montrer « normal » et donc « républicain », c’est-à-dire adepte du régime que les Français qui votent pour lui, récusent. La fureur d’un Valls s’explique par la compréhension qu’il a du phénomène : d’où ses injures. La défaite électorale le met tout à coup en présence d’une France qu’il croyait disparue. 

    Il a raison de s’inquiéter. Toutefois, malgré la stratégie de ses dirigeants, le FN s’illusionne s’il croit que le système lui laissera une place. Toutes les expériences passées prouvent le contraire. 

    L’implacable logique de parti entraîne Sarkozy sur les pas de Valls. Mais c’est pour lui une grave erreur, car l’UMP compte dans ses rangs nombre de militants qui ne demandent qu’à sortir des visées de parti. Il apparaît, de plus en plus, qu’au-delà des divisions partisanes de droite comme de gauche, comme le disent et le montrent des Guilluy, des Zemmour, des Bercoff, des Delsol et comme le démontre l’analyse des chiffres électoraux, les Français se retrouvent sur des sentiments communs de frustration, de trahison, de destruction de leur être et de leur nation. 

    Au fond, que veulent-ils ? Retrouver leur souveraineté, leur patrie, leur nationalité, leur fierté, leurs libertés réelles et, dans un monde dangereux, la sécurité intérieure et extérieure, tout ce dont le régime des partis les a privés. Ils seraient heureux surtout  de se retrouver eux-mêmes. Il leur faudrait un état simple mais fort qui assure les pouvoirs régaliens, de manière concentrée, avec une armée, une justice, une police de plein exercice et une réorganisation de la représentation nationale sur d’autres bases que ce système partisan qui rend impossible toutes les solutions humaines et durables (Lire la plaquette du cercle Vauban : Des Institutions pour la France, 7 € franco de port, Regalia 1, rue de Courcelles 75008, Paris, chèque à l’ordre de Regalia) 

    Comment ne pas y songer ? Cela viendra comme une nécessité le jour où ce régime funeste, devant la catastrophe financière, économique sécuritaire, morale qu’il aura provoquée, sera obligé de céder la place. Il vient un temps où il n’est plus intéressant d’avoir le pouvoir ; ce jour-là les parasites déguerpissent.

     

  • L’Inde et le Rafale : leçons de souveraineté selon Aymeric Chauprade

     

    Nous publions cette fort intéressante analyse d'Aymeric Chauprade, lue sur l'excellent site Realpolitik (on excusera ces superlatifs successifs qui sont en l'occurrence justifiés) parce qu'elle contraste avec le déclinisme ambiant ou, plus grave, avec le french bashing à la mode. Elle les contredit même, valablement, et donne à penser à ce que pourrait être la puissance de la France si elle avait un Etat digne de ce nom. En tout cas, merci à Aymeric Chauprade d'avoir donné cet éclairage à l'événement en question. Lafautearousseau   

     

    Aymeric-Chauprade.jpgLes annonces décisives que M. Modi, Premier ministre indien, a faites à l’Élysée à Paris le 10 avril portent en elles une leçon essentielle. La France n’est grande aux yeux du monde que lorsqu’elle remplit sa mission historique : celle d’une nation souveraine et d’exception.

    Souveraineté diplomatique tout d’abord : c’est en raison de son siège au Conseil de Sécurité aux Nations-Unies que la France peut aujourd’hui proposer à l’Inde son aide pour qu’elle intègre cette instance internationale de règlements des conflits mondiaux; quelle valeur ajoutée aurait eu à offrir la France si elle avait bradé cette position diplomatique majeure à l’Union européenne ? Son domaine maritime propre en Océan Indien en fait un partenaire-clé pour la politique de l”Acting East” de M. Modi dans les domaines de la sécurité maritime, du renseignement et du maintien de la paix.

    Souveraineté culturelle ensuite : La France n’est pas ce pays “moisi” si souvent décrit par tous ceux qui la haïssent tout en bénéficiant de sa générosité, mais au contraire, une nation millénaire dont l’identité culturelle (des monuments historiques au cinéma) séduit au point que l’Inde souhaite engager des partenariats-clés dans ces domaines.

    Souveraineté industrielle enfin : c’est uniquement en raison de l’investissement massif de l’État régalien dans les industries de souveraineté (défense, nucléaire) que notre pays peut se poser en partenaire fiable de l’Inde dans la durée (de l’Ouragan au Rafale en passant par le Mirage 2000) ; l’investissement dans nos filières aéronautique (derrière Dassault Aviation) et nucléaire (avec Areva) est non seulement stratégique mais rentable pour notre économie et nos emplois. C’est pour ne pas avoir consenti de pareils efforts financiers et technologiques que d’autres pays européens, comme l’Allemagne, ne peuvent prétendre à de tels partenariats stratégiques, avant-hier avec le Brésil, hier avec l’Égypte, aujourd’hui avec l’Inde et demain, espérons-le, avec les Émirats arabes unis et la Malaisie.

    Ce n’est pas l’Eurofighter, mais le Rafale, que M. Modi a choisi ; ce n’est pas vers l’Europe de la défense ou l’OTAN que M. Modi s’est tourné pour assurer sa propre défense, mais vers la capacité française à lui transférer la technologie de ses propres systèmes d’armes (aviation de chasse, missiles et sous-marins); ce ne sont pas les usines à charbon allemandes polluantes mais les centrales nucléaires françaises que M. Modi souhaite acquérir pour garantir l’indépendance énergétique de son pays; ce n’est pas un Disneyland apatride mais une nation chargée de monuments historiques que M. Modi a voulu visiter en premier.

    C’est donc une grande leçon de souveraineté que M. Modi est venu nous apporter et la preuve, du même coup, que seul un projet tourné vers l’indépendance nationale, qu’elle soit diplomatique ou technologique, peut de nouveau rendre à la France le rang qu’elle mérite.  

    Realpolitik

  • Sortir de l’impasse par Louis-Joseph Delanglade

     

    « Il faut sen tenir aux faits. Cela ne veut pas dire que nous soyons daccord sur tout » déclare M. Obama lors de sa rencontre avec M. Castro au Panama. Cest bien cet état desprit, empreint de réalisme, qui semble prévaloir dans les négociations avec lIran, négociations dont lenjeu dépasse le seul problème nucléaire et dont le résultat pourrait changer la donne politique dans toute la région. 

     

    Laccord « définitif » ne devrait pas être signé avant fin juin mais le seul fait quune telle date ait été programmée lors de la réunion de Lausanne sur le nucléaire iranien est déjà un signe. Il faut bien admettre que, quelles que soient leurs motivations, les Etats-Unis dAmérique, puissance impériale encore dominante sans laquelle rien nest possible, donnent limpression de vouloir rebattre les cartes au Proche-Orient. Peut-être exaspéré par lintransigeance israélienne ou la duplicité des royaumes du Golfe, sans doute conforté par une moindre dépendance pétrolière grâce à lexploitation du gaz de schiste, M. Obama souhaite de façon évidente renouer avec lIran, marché potentiel de quatre-vingt millions de consommateurs et contrepoids idéal au bloc arabo-sunnite.  

     

    Bien entendu, cela suppose que les « clients » de l’état perse - Chiites dIrak, du Liban, du Yemen et dailleurs, mais aussi Syrie de M. Assad - bénéficieront, à terme et en tant que tels, du même traitement. Faut-il y voir un paradoxe de la part du pays qui aura le plus œuvré pour mettre à feu et à sang toute une région avec ses interventions militaires répétées en Irak et Afghanistan notamment ? En tout cas, quelle leçon pour nos Fabius, Juppé et consorts, toujours droits dans leurs bottes, imperturbablement accrochés à leur lecture idéologique des événements, prétendant juger du Bien et du Mal, sans considération aucune pour nos intérêts les plus élémentaires ! On ose espérer que notre bien pâlotte diplomatie saura saisir lopportunité qui lui sera ainsi offerte de reconsidérer son modus operandi au Proche-Orient. 

    Alors que perdure le problème posé par lexistence même de lEtat dIsraël et que se durcit lopposition séculaire entre chiites et sunnites, il serait ridicule et dangereux pour la France de prétendre peser de façon décisive sur les événements en cours. En revanche, rien ninterdit à notre diplomatie de se fixer une double ligne de conduite : se tenir à l’écart de toute intervention armée directe dans quelque conflit que ce soit ce qui, jusqu’à présent, naura eu dautre résultat que de nous désigner comme une des cibles privilégiées de lislamo-terrorisme et de favoriser les flux migratoires incontrôlés en Méditerranée; considérer lIran pour ce quil est, cest-à-dire un Etat capable de jouer en faveur dun équilibre régional lui-même propice à la préservation et au développement de nos intérêts commerciaux et énergétiques. 

  • Scandale à France Inter : « Comment vivre et penser sans Radio France ? » demande Solange Bied-Charreton, dans FigaroVox

     

    Une réaction-réflexion aussi humoristique qu'intelligente au scandale de la plus longue des grèves de France Inter, qui pourtant en a fait beaucoup ... Grands prêtres du Bien et du mal, du dogme et de la morale, rien ne les arrête ! Solange Bied-Charreton s'en agace et s'en amuse. Nous aussi. LFAR

    Il y a quelques semaines, on a cru que la grève de Radio France était une bonne idée. Le début de l'année était très chargé et la Matinale de France Inter devenait anxiogène. Contre la guerre de tous contre tous, les djihadistes et le chômage, la solution de la programmation musicale, à la fois humaniste, germanopratine et tournée vers les autres cultures, s'est très vite imposée.

    Quels que soient les sujets évoqués c'était une bénédiction. Il fallait bien que les analyses émotionnelles et spectaculaires, les héroïques appels à la résistance, le découpage des cartes d'exonération de l'impôt, la défense déterminée de la liberté d'expression à sens unique, la découverte tardive et émouvante (janvier 2015) des problèmes d'identité de la jeunesse de banlieue, les demandes d'excuse en direct, la dérision autosatisfaisante à visée didactique qui culmine à ses plus hauts sommets, la téméraire psychiatrisation des déviants et les évocations inquiétantes de la France rance, prennent, elles aussi, des vacances. Dans un monde où tout va si vite, on comprend aisément qu'il faille savoir prendre un peu de recul et interroger ses propres limites. 

    Cette pause cependant, nul n'aurait pu le croire, a plongé une partie non négligeable des auditeurs réguliers de Patrick Cohen, Léa Salamé, Thomas Legrand et de Charline Vanhoenacker dans un grand désespoir. Pendant plus de quinze jours, il n'y eut pas un matin sans que ceux-ci regrettent les aberrations qu'ils professent, les fascistes qu'ils admonestent et les démocrates qu'ils encensent. A ces junkies de l'absurde, il manque une dose indispensable - le premier shoot de la journée est toujours le meilleur - de caféine mentale, de prise de conscience, d'aboiement salvateur. Comment rire sans Inter, comment parodier? Que tweeter d'amusant? La journée n'est pas encore commencée qu'ils n'ont déjà plus d'énergie. De guerre lasse, ils se rendorment lamentablement au son des plus belles jérémiades d'Alex Beaupain. La Réaction est comme l'antifascisme: créativité plagiaire, elle se nourrit sur le dos de l'ennemi. Quand l'ennemi disparaît, elle n'est plus opérante. Un matin sans Inter, c'est un réveillon sans alcool, une nuit de noce sous somnifère. Exiger le retour de sa Matinale, c'est faire un geste utile pour le retour des forces obscures.   

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    Solange Bied-Charreton