UA-147560259-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

LAFAUTEAROUSSEAU - Page 1423

  • Paris, samedi 21 novembre 2015 : Colloque d’Action française « Immigration, stop ou encore ? »

     

    Le Centre Royaliste d’Action Française annonce ce colloque et vient de donner un premier détail des intervenants prévus - dont il a été dit qu'ils  « apporteront un éclairage pertinent sur la question de l’immigration. ».

    Nous reprenons ici ce détail, en effet intéressant.

    PARTICIPANTS (Avec une participation supplémentaire)

    Renaud Camus

    Auteur du concept du « Grand remplacement », Renaud Camus est un écrivain polyvalent. Sa plume vogue entre prose traditionnelle (comme ses romans, ses écrits de voyages, ses récits ou encore son Journal), écrits expérimentaux, écrits sur l’art et la culture, et essais polémiques et politiques. C’est aussi un homme plein de ressources : études de droit, licence de lettres, diplôme de l’IEP de Paris, et maitrise de philosophie, il a crée en 2002 le parti de l’In-nocence.

    Nicolas Dhuicq

    Nicolas Dhuicq, psychiatre de formation, est député de la 1ère circonscription de l’Aube depuis juin 2007, et maire de Brienne-le-Château depuis 2001. Membre des Républicains, il fait partie du Collectif parlementaire de la Droite populaire. En 2012, il soutient la candidature de Jean François Copé pour la présidence de l’UMP, et vote contre le Pacte budgétaire européen. Depuis 2013, il s’est activement engagé dans la lutte contre le terrorisme, et n’a pas hésité à comparer l’environnement homoparental à l’absence d’environnement parental chez les djihadistes. Sa dernière intervention à l’Assemblée Nationale concerne la lutte anti-tabac qui selon lui serait un facteur de départ des jeunes français au Djihâd.

    Jean-Paul Gourévitch

    Auteur de nombreux ouvrages consacrés à l’Afrique et aux aspects sociaux et économiques de l’immigration en France, Jean-Paul Gourévitch intervient dans des colloques et conférences de tous les bords politiques. Il n’a de cesse de travailler sur la littérature de jeunesse, l’Afrique, l’islamisme radical et les migrations. Il tient une tribune régulière sur planet.fr, et a publié, depuis 1966, plus d’une soixantaine d’ouvrages. Le dernier en date, Les Migrations pour les Nuls, a fait l’objet de débats houleux dans les médias.

    Eric Letty

    Éditorialiste au magazine Monde&Vie, Eric Letty est l’auteur d’articles catholiques et français, comme lui. Son dernier édito, datant du 24 septembre, accuse les gouvernements européens de trier les migrants du Moyen Orient : les chrétiens d’orient sont clairement écartés du processus d’immigration. En mars 2015 il signe avec Guillaume de Prémare un essai intitulé “Résistance au meilleur des mondes”, et s’inscrit ainsi au nombre de ceux qui dénoncent et luttent contre la réalisation de l’utopie d’Aldous Huxley. La Manif pour tous est, selon lui, une voie de sortie qu’il faut défendre.

    Raphaël Liogier

    Sociologue et philosophe, Raphaël Liogier est professeur à l’IEP d’Aix-en-Provence, où il dirige depuis 2006 l’Observatoire du religieux. Il étudie toutes les formes de « croyance », notamment le bouddhisme, et s’est intéressé dans ses écrits à la notion de pensée unique à travers Bourdieu, et à la peur de l’islamisation avec son ouvrage Le Mythe de l’islamisation, essai sur une obsession collective, paru en 2012.

    Julien Rochedy

    Bonapartiste dans l’âme, Julien Rochedy entre au FN en 2006. Il est alors diplômé d’une licence de sciences politiques et d’un master de relations internationales. Il a quitté la présidence du FNJ et a cessé ses activités au sein du parti à la fin de l’année 2014, notamment à cause de l’inaction du FN lors de l’ébranlement de l’UMP et de la perte de ses électeurs, mais aussi à cause de « l’ascension » de Florian Philippot au sein du FN et de la nouvelle vague de militants supporters de ce dernier.

    Guillaume de Tanoüarn

    Le père Guillaume de Tanoüarn est ordonné prêtre en 1989. Philosophe, co-fondateur et membre de l’Institut Bon Pasteur, il a fondé et dirigé les revues Pacte et Certitudes, qui est aujourd’hui connue sous le nom d’Objections. Maurrassien dans l’âme, il est à la fois directeur du Centre Saint Paul, membre du webmédia Nouvelles de France, rédacteur en chef de Monde&Vie, et professeur de théologie au séminaire Saint Vincent de Paul à Courtalain.

    Karim Ouchikh

    Né dans le Val de Marne, Karim Ouchikh, a été un temps adhérent du Parti Socialiste, et maire-adjoint d’une mairie de gauche pendant 13 ans. Il a quitté le PS pour le RIF et a participé ensuite à la création du SIEL dont il est maintenant président. Ancien musulman converti au catholicisme, il est à la fois administrateur national du Rassemblement Bleu Marine, conseiller de Marine Le Pen à la Culture et à la Francophonie et conseiller municipal de Gonesse. Dans une interview donnée au journal Riposte Laïque en 2012, il affirmait déjà que l’Islam et les dérives communautaires étaient un danger pour l’identité chrétienne de la France. Aujourd’hui, c’est aux Chrétiens d’Orient qu’il apporte son soutien, particulièrement à la communauté Assyro-Chaldéenne du Val d’Oise.

    Lieu, horaire, programme et inscriptions

    Espace Cléry

    17 rue de Cléry, 75002 Paris

    M° Bourse ou Grands Boulevards

    Samedi 21 novembre 2015 - 14 h 00 - 19 h 00

    PAF : 10€ (tarif normal) 5€ (tarif lycées, étudiants et chômeurs)

    Inscription : contact@actionfrancaise.net

    Après le colloque les participants sont cordialement invités à un buffet dînatoire dans les locaux de l’Action française, en présence des cadres et des militants du mouvement !

    Rendez-vous dès 19:30 au 10, rue Croix des Petits Champs, dans le 1er arrondissement, au métro Palais Royal - Musée du Louvre. P.A.F. : 6 euros en cas de réservation avant le 16 novembre, à contact@actionfrancaise.net ; 10 euros sur place.

    Lafautearousseau conseille à ses lecteurs de réserver leur après-midi du samedi 21 novembre, de participer, de partager l'information autour de soi ! 

     

  • Parlons un peu du pouvoir posthume d'Hitler…

    2015 : palais niçois « nazifié » pour les besoins d’un film

     

    par Péroncel-Hugoz

    Irrité par les incessantes références au chef nazi, en Occident, Péroncel-Hugoz attaque à belles dents ce sujet délicat…

     

    peroncel-hugoz 2.jpgLa scène se situe, en cet automne 2015, autour d’une bonne table r'batie où un notable allemand de passage avait réuni deux ou trois de ses relations locales pour évoquer la situation générale au Maroc et ailleurs, sur fond de déferlement migratoire en Méditerranée. 

    D’emblée, notre hôte berlinois laissa tomber que, quels que soient les sentiments de ses compatriotes, y compris les plus hostiles, ils ne pourraient qu’accepter les nouveaux arrivants « vu le déficit démographique d’une nation où pas mal de femmes refusent d’enfanter et où celles qui veulent être mère, n’ont guère plus d’un enfant ou deux…». 

    Un des convives objecta : « Pourquoi Berlin n’encourage-t-il pas la natalité du peuple allemand, par des mesures financières et sociales, comme cela a marché en Suède ou en France ? ». 

    L’invitant bondit alors sur son siège : « Vous n’y pensez pas! Des politiciens, des associations, des médias crieraient aussitôt très fort au nazisme, ameutant la Terre entière… Oui, Hitler était nataliste, et donc le lien serait fait. Et la chancelière Merkel ne veut pas entendre parler de ça ! » 

    Un essayiste présent rappela que, ces dernières années encore, compétitions sportives ou manifestations culturelles ont été annulées ou déplacées, au pays de Goethe et Nietzsche, car les organisateurs n’avaient pas remarqué que ces événements seraient tombés le jour de l’anniversaire de la naissance du dictateur national-socialiste ou de sa prise de pouvoir ou de son suicide … 

    A ce train, où on prend sans cesse Hitler comme contre-exemple, ne risque-t-on pas un jour de diaboliser, d’anathémiser les végétariens puisque Hitler-comme Platon, Léonard de Vinci, Lamartine, Abraham Lincoln, Nietzsche, Gandhi, Brigitte Bardot, Marguerite Yourcenar, Sophie d’Espagne, etc. etc.- ne mangeait pas de viande. Le Führer était aussi un fan de montagne ; accusera-t-on un jour les alpinistes d’avoir des goûts nazis ? … Idem pour les possesseurs de chiens, etc. 

    J’intervins alors afin d’indiquer que cette psychose avait cours aussi en France, en Belgique, en Italie pour des histoires de coïncidence chronologique ou de télescopage spontané entre notre époque et des faits vieux d’au moins 70 ans : ainsi à Drancy, en banlieue parisienne, un Tunisien de 20 ans a été récemment condamné à trois mois de prison ferme et à 500 € pour avoir été vu mimant le salut hitlérien, bras levé, en passant devant un ancien camp de rétention de la Seconde Guerre mondiale par où avaient transité notamment des Juifs en partance pour l’Allemagne nationale-socialiste. 

    Autre exemple de ces références présentes aux fantômes et fantasmes d’un passé sulfureux certes mais révolu : au début de cet automne, à Nice, capitale de la Côte d’Azur, un beau matin, branlebas de combat, cris, mouvement de foule, panique même au sein d’un groupe de touristes. Que se passait-il ? Eh bien tout simplement, une immense croix gammée noire sur fond rouge venait d’être déployée sur trois étages, en façade de l’ancien palais des Rois-de-Sardaigne. La préfecture des Alpes-Maritimes dut aussitôt faire claironner, afin d’apaiser les esprits, que ce drapeau honni faisait partie du décor installé à Nice pour le tournage d’un film historique … Ouf ! L’émotion retomba et le tournage put commencer sans drame. 

    Il reste qu’on venait d’avoir encore là un exemple, parmi d’autres, du pouvoir posthume du chancelier Hitler. Il serait temps que l’Europe occidentale tourne enfin la page et cesse d’envenimer ce prurit psychologique qui l’empêche de réfléchir à son propre avenir. Comme dit le proverbe marocain, « Li fat mat », le passé est mort. 

    Péroncel-Hugoz - Le 360

     

  • Quand M. Météo se fait virer de la télévision...

     

    par Jean-Philippe Chauvin 

     

    arton8470-7b8cd.jpgJadis, au temps de la IIIe République, il fallait être bon républicain pour espérer monter dans l'échelle des carrières militaires ou judiciaires, exception faite des périodes de guerre où d'autres valeurs, moins « politiques », reprenaient leur antique place... Cette même République, dans les années 1880, n'avait pas hésité à suspendre l'inamovibilité des juges durant plusieurs mois pour républicaniser la Justice, c'est-à-dire l'épurer des éléments connus pour leur fidélité monarchique ou impériale ! Aujourd'hui, plus besoin de lois d'exception ou de soupçon de dissidence politique pour être mis à la porte d'une chaîne de télévision publique : il suffit juste de ne pas être dans la « ligne » de l'idéologie dominante, y compris sur le plan... climatique !

    Ainsi, un présentateur de bulletins météorologiques, dont on aurait pu penser qu'il n'était pas d'un grand danger pour l'ordre établi et la République hollandiste, est licencié pour avoir commis un livre de tendance « climatosceptique » et connaître un certain succès de librairie. Pourtant, ce monsieur n'a rien d'un Zemmour ou d'un Onfray, têtes de Turcs favorites des milieux de la bien-pensance, et il n'a rien écrit sur l'identité, la nation ou le déclin. De plus, il était jadis apprécié par ceux qui le condamnent aujourd'hui pour avoir été la première personnalité de la télévision à avoir annoncé publiquement son mariage avec son compagnon, juste après le vote de la loi Taubira ! Jusqu'à cet été, tout allait bien, et, diplômé d'un master II en Développement Durable (oxymore...) à l'université de Paris-Dauphine, il avait ainsi couvert pour des chaînes de télévision de grandes conférences sur le climat, de Bali à Copenhague, entre autres, sans susciter de critiques particulières. 

    Mais il a failli gâcher la fête, cette fameuse COP 21 dont M. Hollande veut faire un moment fort de son quinquennat, à la veille des élections régionales, et le symbole de son « activisme politique sur l'Environnement » (sic!) : en publiant ce livre intitulé « Climat investigation », qui reprend des antiennes déjà entendues ailleurs et qui développe des thèses qui me semblent, personnellement, peu convaincantes, M. Philippe Verdier a fait usage de sa liberté d'expression et a apporté sa pierre aux nécessaires débat et prise de conscience sur les enjeux climatiques, même si la sienne était plus brute que polie. Son licenciement par la direction de la chaîne sur laquelle il officiait jusqu'à ses derniers mois est un véritable camouflet pour ceux qui, comme moi, sont attachés à cette liberté d'expression qui, pour choquante qu'elle puisse être parfois, me semble indispensable à la respiration d'une nation. 

    Je le répète : je ne suis pas d'accord avec les propos de M. Verdier et je crois y déceler quelques lourdes erreurs sur la question climatique. Je combats ses thèses et je milite pour une écologie véritable et politique, mais je dénonce son licenciement qui m'apparaît comme une redoutable mise en garde à l'égard de tous ceux qui ne penseraient pas comme le veulent ce gouvernement et ce président. Car ce que l'on reproche à ce journaliste, c'est de ne pas penser « climatiquement correct », c'est d'avoir une autre opinion que celle qui prévaut aujourd'hui en haut lieu, de façon d'ailleurs assez hypocrite : qui croit que ce gouvernement se préoccupe vraiment de l'avenir du climat et des conséquences environnementales de la société de consommation qu'il continue de défendre à travers sa politique économique ? 

    M. Verdier paye pour les autres, diraient certains, et ce n'est sans doute pas faux : c'est aussi, au-delà même de la motivation première (même pas assumée par la direction de France Télévisions) de sa mise à l'écart, un avertissement sans frais à ceux qui oseraient douter de la volonté de M. Hollande, ou à ceux qui verraient dans ses déclarations quelques ruses d'abord politiciennes. La tête de M. Verdier est jetée comme un os à ronger à quelques institutions ou partis qui se proclament écologistes sans l'être autrement que médiatiquement et électoralement... Dans le même temps, ce même gouvernement fait savoir, par la voix de son préfet en Loire-Atlantique, que vont bientôt reprendre les travaux en vue de la construction de l'aéroport à Notre-Dame-des-Landes : de qui se moque-t-on ? La promotion du bitume et du kérozène au détriment d'une des dernières zones humides de l'Ouest alors que la COP 21 se veut la promotion d'un modèle énergétique moins polluant : n'y a-t-il pas là une terrible contradiction ou une fâcheuse hypocrisie, ou les deux à la fois ? 

    Dans l'affaire Verdier, il y a deux victimes, au-delà de l'intéressé lui-même : la liberté d'expression et l'écologie véritable. Décidément, de cette République-là, il n'y a rien à croire ni à espérer... 

    Le blog de Jean-Philippe CHAUVIN

     

  • Jean Sévillia : « La France catholique n'a pas dit son dernier mot »

     

    Par Jean-Christophe Buisson

    Une interview où Jean Sévillia fait un point fort intéressant sur le poids, l'importance, le positionnement, les orientations, en bref sur la situation des catholiques de France et leur avenir. Un sujet qui concerne actuellement plus que jamais le domaine proprement politique. LFAR    

    Historien, essayiste et journaliste, Jean Sévillia publie un superbe album illustré qui constitue, par le texte et par l'image, un état des lieux du catholicisme en France aujourd'hui. Cette interview a été donnée au Figaro magazine.

    La France catholique : le titre du livre que vous publiez n'est-il pas provocateur ?

    Tel n'est pas son objectif, en tout cas. Evoquer la France catholique, c'est rappeler les faits. En premier lieu en ce qui concerne la population française. S'il est interdit aux organismes publics de procéder à des statistiques sur l'appartenance religieuse, de nombreuses études opérées par des instituts de sondage fournissent des indications fiables. Selon une récente enquête, 56 % des Français se déclarent catholiques, 8 % musulmans, 1,4 % protestants, 1,4 % orthodoxes, 1,3 % bouddhistes et 0,8 % juifs, 27 % des sondés se présentant comme sans religion. 56 % de catholiques déclarés, c'est ce qu'on appelle une majorité. En chiffres, on sait que le pays compte 44 millions de baptisés, ce qui fait, sur 65 millions d'habitants, les deux tiers de la population. Sous l'influence d'une laïcité exacerbée qui voudrait effacer le fait religieux de l'espace public, sous l'incidence, également, du grand nombre de questions intérieures et extérieures touchant à l'islam ou aux musulmans et qui finissent par accaparer les débats, on en viendrait à oublier, et pour certains à occulter, que le catholicisme reste la religion d'origine ou de référence de la majeure partie de la population française.

    Mais une religion qui est de moins en moins pratiquée…

    Certes. Au début des années 1960, environ 90 % des Français se présentaient comme catholiques, dont 35 % de pratiquants réguliers ou occasionnels ; au début des années 1970, les pourcentages étaient encore de 82 % de catholiques déclarés et de 20 % de pratiquants. Aujourd'hui, les catholiques pratiquants représentent entre 4,5 et 6 % de la population. Ce recul spectaculaire tient à des causes multiples: disparition de la vieille société rurale, bouleversements socioculturels des années 1960-1970, sécularisation du monde occidental. D'une société qui, en dépit de la laïcité officielle et de la séparation de l'Eglise et de l'Etat, était héritière d'une société de chrétienté, nous sommes passés à une société du libre choix religieux, dans un contexte d'incroyance généralisée. Néanmoins, en 2015, la France compte 3 millions de catholiques pratiquants réguliers et 10 millions de pratiquants occasionnels, soit 13 millions de personnes. S'il s'agit d'une minorité, cette minorité est numériquement la première minorité de France. Quant au long terme, les projections montrent qu'en 2045, le pays comptera entre 33 et 37 millions de baptisés, ce qui sera encore une masse considérable.

    Mais la France catholique, c'est aussi une culture ?

    C'est un patrimoine de 100 000 édifices religieux, dont 150 cathédrales et 45 000 églises paroissiales. C'est un enracinement bimillénaire qui s'observe dans la toponymie (4 400 communes portent un nom de saint), dans le calendrier civil où les six plus grandes fêtes chrétiennes sont des jours fériés, dans les traditions populaires, de la crèche de l'Avent aux œufs de Pâques. C'est tout un héritage artistique, littéraire et musical. C'est un héritage intellectuel et philosophique: tous les grands penseurs français, même s'ils n'étaient pas chrétiens, ont eu à se situer par rapport au catholicisme, ce qui revenait à reconnaître la place centrale de celui-ci dans notre histoire. La France catholique, ce sont encore les principes de base qui fondent le pacte social: la dignité de la personne humaine, l'égalité entre l'homme et la femme, la solidarité envers les petits et les pauvres, le souci de la justice ou le sens du pardon ont pu être laïcisés, ils expriment une anthropologie tirée des Evangiles. C'est en ce sens que la formule du général de Gaulle selon laquelle «la République est laïque, la France est chrétienne» conserve toute sa pertinence. C'est en ce sens également que les sociologues Hervé Le Bras et Emmanuel Todd ont pu parler récemment d'un «catholicisme zombie», signifiant par là qu'en dépit de la baisse de la pratique religieuse,

    Quel est le poids des catholiques dans la société ?

    Il est énorme, mais il s'exerce de façon discrète. Dans le domaine de l'enseignement, par exemple, une famille française sur deux confie son enfant à un moment ou à un autre de son parcours scolaire à l'enseignement catholique. Même quand les motivations des parents ne sont pas d'ordre religieux, et même quand les établissements fréquentés n'ont qu'une faible identité confessionnelle, les élèves ont un contact, le temps de leur scolarité, avec l'univers catholique. Dans le domaine de l'aide sociale, du caritatif et de l'humanitaire, tant en France que pour les missions françaises à l'étranger, si l'on supprimait d'un trait les associations catholiques, ce serait une perte immense, si nombreux sont les catholiques engagés dans ces secteurs. L'éducation chrétienne, en général, prédispose au bénévolat. Rappelons, par exemple, qu'avec 125 000 membres le scoutisme catholique, toutes tendances confondues, est un des principaux mouvements de jeunesse français.

    Et sur le plan politique, que représentent les catholiques ?

    Politiquement, ils sont divisés. Ce n'est pas nouveau, cela date du XIXe siècle. Il existe des catholiques de gauche, du centre et de droite. Mais, au cours des deux dernières décennies, les équilibres se sont modifiés. Nous avons assisté à la quasi-disparition des chrétiens de gauche, emportés par leurs désillusions consécutives à la présidence de François Mitterrand. Puis à la droitisation du curseur chez les catholiques pratiquants, dont les trois quarts ont voté pour Nicolas Sarkozy au second tour de l'élection présidentielle de 2012. Mais le peuple catholique n'est pas différent du commun des mortels: ce qui prédomine chez lui, c'est une méfiance à l'égard des partis et des hommes politiques actuels, accusés de se préoccuper d'enjeux politiciens ou d'objectifs à court terme, et non des vrais problèmes qui engagent notre avenir. L'opposition au mariage homosexuel, toutefois, a manifesté une capacité de mobilisation des réseaux catholiques qui a surpris tout le monde, y compris les organisateurs des grandes manifestations de 2012-2013. Cette mobilisation, qui a dépassé les clivages traditionnels, marque l'entrée dans l'arène d'une nouvelle génération catholique qui sait être une minorité agissante.

    Qu'est-ce que le pontificat du pape François change pour les catholiques français ?

    Méfions-nous des fausses oppositions entretenues, non sans arrière-pensées, par le système médiatique. La majorité des forces vives du catholicisme français, que ce soit dans le clergé ou chez les laïcs, n'a eu aucun problème, au contraire, avec les pontificats précédents. Le témoignage public de la foi chrétienne par les processions ou les pèlerinages, pratiques qui sont en plein renouveau, l'exigence de formation religieuse ou d'approfondissement spirituel, qui caractérisent la nouvelle génération, sont des legs de Jean-Paul II et de Benoît XVI. Mais l'appel à la radicalité évangélique à laquelle invite François n'a rien pour déplaire à cette nouvelle génération.

    Comment se présente l'avenir pour le catholicisme français ?

    Les évolutions démographiques et sociologiques sont lentes mais implacables. A court et moyen terme, nous allons vers une Eglise de France plus resserrée, plus citadine, où les divisions internes n'auront pas disparu mais se seront déplacées. Dans la mesure où le catholicisme populaire a fondu, le risque est celui de l'entre-soi. La contrepartie de cette homogénéité sociale et culturelle, c'est une vraie cohérence et une garantie de durée. Sur le long terme, si l'on considère le dynamisme de ces mouvements, de ces paroisses et de ces communautés, sans parler de leur vitalité intellectuelle et spirituelle, on peut dire que la France catholique n'a pas dit son dernier mot. 

    Jean-Christophe Buisson 

    france catho.jpg

    La France catholique, de Jean Sévillia, Michel Lafon, 29,95 €.   

     

  • Migrants : ce que dit (vraiment) le Pape

       Photo: Sipa 

    Une analyse de Frédéric Rouvillois 

    Frédéric Rouvillois analyse ici - pour Causeur -  l'actuel problème des migrants du point de vue de la logique et de la spiritualité chrétiennes. Lesquelles n'ignorent ni la charité que l'on doit aux autres ni celle qu'on se doit à soi-même et à la communauté politique à laquelle on appartient. Cette analyse conduit à proposer en quelque sorte une ligne de crête, conciliant l'une et l'autre exigence, fussent-elles ou sembler être contradictoires. Les lignes de crête, on le sait, ne sont pas de celles que l'on tient le plus aisément. Peut-être même ne sont-elles compréhensibles et tenables que par quelques uns. Nous ne les critiquerons pas. Toutefois, comme nous limitons notre réflexion au domaine politique, nous ne manquerons pas de signaler que les gestes, paroles ou écrits de l'Eglise et du Pape dans l'interprétation qui en sera inévitablement donnée par notre Système politico-médiatique, constituent pour la France et l'Europe un risque supplémentaire considérable dont ces autorités pourraient sans-doute avoir un plus grand souci. Dont elles pourraient traiter avec davantage de prudence. D'un point de vue politique, notre position inchangée est qu'un accueil massif de migrants - s'ajoutant au très grand nombre de ceux que nous avons déjà reçus depuis des décennies - met à l'évidence en péril les sociétés européennes. Dont celle qui nous concerne le plus, la nôtre. Lafautearousseau    

     

    frederic-rouvillois.jpgLe Pape François qui, le 6 septembre 2015, du balcon de Saint-Pierre, demandait à chaque paroisse catholique d’accueillir une famille de réfugiés et suppliait l’Occident d’ouvrir ses portes à la masse des migrants, ne serait-il qu’un doux illuminé ? Un utopiste prêt à tout sacrifier, et notamment les frontières, les Etats et les peuples, au rêve d’une improbable fraternité universelle ? C’est évidemment ce que certains voudraient faire croire, soit pour le lui reprocher, soit pour l’en applaudir. Et c’est en effet ce que ses interventions, astucieusement sorties de leur contexte, semblent parfois laisser croire.

    Pourtant, si François peut être considéré comme révolutionnaire, il ne l’est pas plus que le christianisme lui-même, ni que la sainteté. Et pas plus que le christianisme, il n’entend répudier le « réalisme politique », dont il s’est même explicitement réclamé dans son encyclique Laudato si'*. Réalisme politique qui le conduit à des positions moins stéréotypées, moins simplistes et surtout moins émotionnelles que celles que l’on présente, la réalité ainsi prise en compte n’étant jamais toute d’une pièce, mais constituée d’éléments complexes.

    Et c’est justement ce que l’on constate à propos du problème des migrants, le Pape, et l’Église, s’efforçant de concilier deux impératifs apparemment incompatibles dans le creuset d’un même réalisme évangélique.

    Le première impératif, aime ton prochain comme toi-même, conduit à ouvrir les bras à l’autre. Et en l’occurrence, à refuser l’engrenage de la terreur qui conduit des millions de personnes, créatures de Dieu et faites à son image, à quitter leurs maisons et à demander l’hospitalité. Ceux-là, en tant que chrétien, je ne puis les laisser à la porte, sauf à ressembler au mauvais riche que son égoïsme condamne irrémédiablement au tourment éternel. À l’égard de mes frères souffrants, un devoir s’impose sans discussion, celui que le Pape rappelait à Rome le 6 septembre : « être le plus prochain des plus petits et des plus abandonnés ». Concrètement, ce précepte justifie une pratique de l’accueil qui ne distingue pas entre une migration politique et une migration économique – distinction  moralement contestable, celui qui s’enfuit avec sa famille pour ne pas mourir de faim n’ayant pas moins le droit d’être accueilli que celui qui émigre parce qu’il estime que sa liberté d’expression ou son droit de vote étaient violés dans son pays d’origine. En somme, l’opposition à  la « culture de mort » suggère une politique d’ouverture et de charité.

    Mais à ce premier impératif s’en ajoute un second, qui commande de s’aimer soi-même en tant que l’on est une créature de Dieu, et que l’on a par là-même des devoirs envers soi. Benoît XVI soulignait à ce propos que « l’homme aussi possède une nature qu’il doit respecter »**. Or sa nature est d’être un animal social, qui va constituer avec ses proches un groupe particulier, une société dotée de certaines caractéristiques dont procèdera sa propre identité.

    On ne saurait en effet confondre le Peuple de Dieu, composé de tous les hommes en tant qu’ils sont frères, puisqu’issus du même Père céleste, et les peuples humains, qui s’y découpent comme les pièces dans un puzzle, chacune d’entre elles étant dotée de sa propre forme, de sa couleur et de sa place. Tout homme, appartenant au Peuple de Dieu, appartient aussi, simultanément, à un peuple particulier, à une patrie où généralement il est né, à une culture qui l’a modelé, à une terre et à une histoire où il s’enracine.

    Cette réalité, les papes contemporains en ont souligné l’importance dans la construction de l’homme : sans elle, expliquent-ils, l’homme est déraciné, perdu, privé de ce qui le constitue, un être sans ombre et sans épaisseur, victime idéale des nouveaux marchands d’esclaves.

    Or, ce second impératif s’oppose, lui, à ce que les portes soient ouvertes de façon inconsidérée à des masses de plus en plus considérables. Si les identités sont indispensables, on ne peut en effet accepter un processus qui conduit de façon certaine des millions de personnes, séduites par le miroir aux alouettes du consumérisme, à rompre avec leurs racines, et des millions d’autres à subir ce qu’ils ressentent comme une invasion, une dilution de leur identité et une mise à mal de leur culture.

    Mais comment concilier ces deux impératifs ? Le christianisme distingue à cet égard quatre vertus cardinales, la prudence, la tempérance, le courage et la justice : toutes les quatre sont à l’œuvre pour résoudre cette difficulté.

    La justice, qui vise à donner à chacun le sien, pousse à aider ceux qui ont tout perdu et à leur rendre une dignité, celle qui leur appartient en tant que créatures de Dieu ; mais sans pour autant léser ceux qui, ici, souffrent également de la pauvreté sous toutes ses formes.

    La prudence consiste à peser le pour et le contre. Et à constater qu’il faut bien entendu recueillir, au moment présent, ceux qui se noient à quelques encablures des côtes européennes. Il faut les recueillir, tout en faisant comprendre aux autres, à tous les autres, qu’il s’agit d’un cas d’exception, d’un moment transitoire. Bref, qu’il n’y a pas de place ici pour les dizaines de millions qui, un jour peut-être, seraient tentés de venir s’installer en Europe. Pas de place, parce qu’un afflux excessif, à la libanaise, entraînerait à coup sûr un surcroît de misère et, à terme, de violence, voire de guerre civile, les envahis ne pouvant accepter indéfiniment l’injustice de leur propre situation. Même Saint Martin ne donna au pauvre que la moitié de son manteau. La prudence consiste donc, du côté des décideurs, à refermer progressivement mais fermement les frontières, tout en agissant dans les pays d’origine de telle sorte que le flux migratoire finisse par se tarir. Bref, à agir en véritables politiques, qui savent que leur rôle est de traiter les causes du mal, pas simplement ses symptômes les plus visibles.

    La tempérance, elle, consiste accepter de restreindre notre train de vie afin d’aider, là-bas, des populations si misérables que sans cette aide, elles seraient tentées de tout quitter pour venir chez nous. Elle enseigne qu’en perdant un peu en confort matériel, nous pouvons espérer sauver l’essentiel : notre identité spirituelle, et peut-être notre vie.

    Le courage, enfin, est ce qui peut nous conduire, d’une part à ne pas baisser les bras, et de l’autre à ne pas craindre d’intervenir – en prenant une part active à l’éradication des causes du problème. « L’espérance chrétienne est combative », déclarait encore le pape François le 6 septembre. Le christianisme n’est pas une religion de la passivité, et il y a des moments où, au nom de la justice et même de la prudence, le courage commande d’agir. Avant qu’il ne soit trop tard.

    Et les catholiques de France, dans tout ça ? Il leur revient, pour rester fidèles à ce réalisme évangélique, de tenir fermement les deux bouts de la corde sans sacrifier l’un à l’autre – le devoir d’amour d’un côté, qui leur commande d’ouvrir les bras et, de l’autre, le devoir de maintenir la cité conditionnant la réalisation de cet amour, qui les pousse à la vigilance. Ni oublier que tous deux constituent des formes complémentaires de la charité.   

    Frédéric Rouvillois

     

  • Paris, samedi 21 novembre 2015 : Colloque d’Action française « Immigration, stop ou encore ? »

     

    Le Centre Royaliste d’Action Française annonce ce colloque et vient de donner un premier détail des intervenants prévus - dont il a été dit qu'ils  « apporteront un éclairage pertinent sur la question de l’immigration. ».

    Nous reprenons ici ce détail, en effet intéressant.

    PARTICIPANTS

    Renaud Camus

    Auteur du concept du « Grand remplacement », Renaud Camus est un écrivain polyvalent. Sa plume vogue entre prose traditionnelle (comme ses romans, ses écrits de voyages, ses récits ou encore son Journal), écrits expérimentaux, écrits sur l’art et la culture, et essais polémiques et politiques. C’est aussi un homme plein de ressources : études de droit, licence de lettres, diplôme de l’IEP de Paris, et maitrise de philosophie, il a crée en 2002 le parti de l’In-nocence.

    Nicolas Dhuicq

    Nicolas Dhuicq, psychiatre de formation, est député de la 1ère circonscription de l’Aube depuis juin 2007, et maire de Brienne-le-Château depuis 2001. Membre des Républicains, il fait partie du Collectif parlementaire de la Droite populaire. En 2012, il soutient la candidature de Jean François Copé pour la présidence de l’UMP, et vote contre le Pacte budgétaire européen. Depuis 2013, il s’est activement engagé dans la lutte contre le terrorisme, et n’a pas hésité à comparer l’environnement homoparental à l’absence d’environnement parental chez les djihadistes. Sa dernière intervention à l’Assemblée Nationale concerne la lutte anti-tabac qui selon lui serait un facteur de départ des jeunes français au Djihâd.

    Jean-Paul Gourévitch

    Auteur de nombreux ouvrages consacrés à l’Afrique et aux aspects sociaux et économiques de l’immigration en France, Jean-Paul Gourévitch intervient dans des colloques et conférences de tous les bords politiques. Il n’a de cesse de travailler sur la littérature de jeunesse, l’Afrique, l’islamisme radical et les migrations. Il tient une tribune régulière sur planet.fr, et a publié, depuis 1966, plus d’une soixantaine d’ouvrages. Le dernier en date, Les Migrations pour les Nuls, a fait l’objet de débats houleux dans les médias.

    Eric Letty

    Éditorialiste au magazine Monde&Vie, Eric Letty est l’auteur d’articles catholiques et français, comme lui. Son dernier édito, datant du 24 septembre, accuse les gouvernements européens de trier les migrants du Moyen Orient : les chrétiens d’orient sont clairement écartés du processus d’immigration. En mars 2015 il signe avec Guillaume de Prémare un essai intitulé “Résistance au meilleur des mondes”, et s’inscrit ainsi au nombre de ceux qui dénoncent et luttent contre la réalisation de l’utopie d’Aldous Huxley. La Manif pour tous est, selon lui, une voie de sortie qu’il faut défendre.

    Raphaël Liogier

    Sociologue et philosophe, Raphaël Liogier est professeur à l’IEP d’Aix-en-Provence, où il dirige depuis 2006 l’Observatoire du religieux. Il étudie toutes les formes de « croyance », notamment le bouddhisme, et s’est intéressé dans ses écrits à la notion de pensée unique à travers Bourdieu, et à la peur de l’islamisation avec son ouvrage Le Mythe de l’islamisation, essai sur une obsession collective, paru en 2012.

    Julien Rochedy

    Bonapartiste dans l’âme, Julien Rochedy entre au FN en 2006. Il est alors diplômé d’une licence de sciences politiques et d’un master de relations internationales. Il a quitté la présidence du FNJ et a cessé ses activités au sein du parti à la fin de l’année 2014, notamment à cause de l’inaction du FN lors de l’ébranlement de l’UMP et de la perte de ses électeurs, mais aussi à cause de « l’ascension » de Florian Philippot au sein du FN et de la nouvelle vague de militants supporters de ce dernier.

    Guillaume de Tanoüarn

    Le père Guillaume de Tanoüarn est ordonné prêtre en 1989. Philosophe, co-fondateur et membre de l’Institut Bon Pasteur, il a fondé et dirigé les revues Pacte et Certitudes, qui est aujourd’hui connue sous le nom d’Objections. Maurrassien dans l’âme, il est à la fois directeur du Centre Saint Paul, membre du webmédia Nouvelles de France, rédacteur en chef de Monde&Vie, et professeur de théologie au séminaire Saint Vincent de Paul à Courtalain.

    Lieu, horaire, programme et inscriptions

    Espace Cléry

    17 rue de Cléry, 75002 Paris

    M° Bourse ou Grands Boulevards

    Samedi 21 novembre 2015 - 14 h 00 - 19 h 00

    PAF : 10€ (tarif normal) 5€ (tarif lycées, étudiants et chômeurs)

    Inscription : contact@actionfrancaise.net

    Après le colloque les participants sont cordialement invités à un buffet dînatoire dans les locaux de l’Action française, en présence des cadres et des militants du mouvement !

    Rendez-vous dès 19:30 au 10, rue Croix des Petits Champs, dans le 1er arrondissement, au métro Palais Royal - Musée du Louvre. P.A.F. : 6 euros en cas de réservation avant le 16 novembre, à contact@actionfrancaise.net ; 10 euros sur place.

    Lafautearousseau conseille à ses lecteurs de réserver leur après-midi du samedi 21 novembre, de participer, de partager l'information autour de soi ! 

     

  • Libye, Syrie, Ukraine : le Waterloo de la diplomatie française

    La bataille de Waterloo, 18 juin 1815 - Clément-Auguste Andrieux

     

    L'analyse de Jean-Michel Quatrepoint

    Alors que Nicolas Sarkozy vient de rendre visite à Vladimir Poutine, Jean-Michel Quatrepoint compare, pour Le Figaro deux diplomaties, la française et la russe. Il déplore l'absence de vision de la France sur le dossier syrien. Son analyse, comme toujours parfaitement renseignée, éclaire et corrobore la position qui est la nôtre sur ces sujets, en effet compliqués, comme l'est l'Orient, mais où les intérêts de la France ne sont plus défendus. LFAR. 

     

    PHO1159e20e-cc52-11e3-a4f2-b373f3cdeec9-150x100.jpgNicolas Sarkozy a rendu visite à Vladimir Poutine dans sa datcha proche de Moscou, jeudi 29 octobre, et a prôné le dialogue entre la France et la Russie. Ce virage de celui qui a fait rentrer la France dans le commandement intégré de l'OTAN en 2007 vous surprend-elle ? 

    L'ancien président de la République devrait commencer par reconnaître ses deux erreurs. La première est la guerre de Libye : il est responsable de sa déstabilisation. Deuxièmement, c'est sous son quinquennat que son ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, et le Quai d'Orsay, ont tout fait pour faire partir Bachar el-Assad. Par la suite, François Hollande, Laurent Fabius et le Quai ont aggravé cet échec diplomatique. Ceci dit, Nicolas Sarkozy peut se féliciter de ses relations anciennes avec Vladimir Poutine. Lors de la crise géorgienne, il avait su maintenir le contact avec celui qui était alors Premier ministre, n'hésitant pas, déjà, à se rendre à Moscou. 

    Comment qualifier l'attitude de la France en Syrie ? 

    C'est le Waterloo de la diplomatie française. Nous avons été exclus des dernières négociations. Les autres puissances se moquent de la voix de la France. Nous disposons, au même titre que l'Union européenne, l'Allemagne et l'Italie, d'un strapontin à la conférence de Vienne sur la Syrie ce vendredi. Les vrais décideurs sont en réalité la Russie et les Etats-Unis. Avec la réinsertion de cet Iran que la diplomatie française a tant ostracisé. Car le problème est bien plus complexe que la désignation des bons et des méchants. Si Assad est un dirigeant peu fréquentable, il est loin d'être le seul… 

    D'autres pays avec lesquels la France entretient d'excellentes relations sont également dirigés par des « infréquentables ». Dans cet Orient compliqué, prendre parti unilatéralement avec des idées simplistes comme nous l'avons fait était une erreur. Toute la diplomatie française s'est retrouvée en porte-à-faux ; sa tradition était de parler avec tout le monde et d'être un entre-deux, un médiateur qui facilite la résolution des problèmes de façon équitable. Là, nous avons choisi le camp le plus extrême qui soit puisque nous avons choisi comme alliés l'Arabie saoudite et le Qatar. On a adopté sans nuances la cause qatarie et saoudienne contre l'Iran et la Syrie. Aujourd'hui, l'Arabie saoudite, réaliste, s'asseoit à la même table que les Iraniens et discute avec les gens de Bachar. Nous sommes les dindons de cette farce tragique. 

    Quel bilan dresser de l'action diplomatique de Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères ? 

    Laurent Fabius a tout fait pour faire échouer les négociations sur le nucléaire iranien. Il a une part de responsabilité dans la crise ukrainienne. Il n'a pas veillé à ce que l'accord signé à Maïdan entre les Russes et les Ukrainiens soit respecté. On peut critiquer Fabius, mais la responsabilité incombe largement au Quai d'Orsay. La diplomatie gaullo-mitterandienne a connu son chant du cygne, en 2003, avec Dominique de Villepin. Beaucoup des diplomates du Quai, largement imprégnés par le courant néo-conservateur américain, n'ont pas apprécié le discours du Premier ministre à l'ONU sur la guerre d'Irak. En ce moment, ceux qui sont à la manœuvre sont les néo-conservateurs, qui ont dépassé leurs modèles américains! À vouloir imiter et servir les Américains et les Saoudiens, ils ne se font jamais respecter. 

    Il est par ailleurs absurde de privilégier une relation avec un pays aussi petit sur le plan démographique et culturel que le Qatar, au détriment d'un pays de 80 millions d'habitants tel que l'Iran. Le développement économique de l'Iran comparé à celui du Qatar est sans commune mesure. 

    Il se murmure que Laurent Fabius pourrait être nommé président du Conseil constitutionnel. Ségolène Royal est pressentie pour le remplacer. Ce choix paraît-il approprié ? 

    Mais il y a aujourd'hui un autre candidat pour le Conseil constitutionnel, Lionel Jospin. Et des négociations sont en cours en ce moment entre François Hollande et Jean-Louis Debré. Ségolène Royal était à Moscou en même temps que Nicolas Sarkozy, même si elle n'a pas été reçue par Vladimir Poutine à qui elle portait une invitation pour la Cop21… 

    En réalité, le problème n'est pas le ministre des Affaires étrangères, mais l'administration qui le soutient et le président de la République. C'est ce dernier qui donne l'impulsion diplomatique. Il a choisi de nommer un ambassadeur à Moscou qui, bien que membre de la promotion Voltaire à l'ENA, n'est ni russophone ni russophile. 

    La politique étrangère française se réduit-elle aujourd'hui à la diplomatie du climat ? 

    On a abandonné la diplomatie des droits de l'Homme puisque on a bien vu que tous les pays auxquels nous avons tenté d'apporter la démocratie ont été ravagés (Libye, Syrie…). Et qu'en Egypte, le maréchal Sissi a sauvé le pays des Frères musulmans en faisant peu de cas des droits de l'homme. Il a tout simplement appliqué le principe : pas de liberté pour les ennemis de la liberté. On a l'impression qu'après les droits de l'homme on s'est rabattu sur la diplomatie du développement durable. Il s'agit certes d'un enjeu important, mais on ne saurait limiter notre diplomatie à ce seul aspect des choses. Quant à la politique énergétique, on ferait mieux de valoriser ce qui reste un de nos points forts : le nucléaire. Et de relancer les recherches sur les futures générations de centrales. 

    Quelle est la stratégie de la Russie en Syrie ? 

    La diplomatie russe emmenée par Sergueï Lavrov est réelle, réaliste et réfléchie. Après la crise ukrainienne qui les a mis en difficulté, les Russes ont réussi à se repositionner avec habileté sur la Syrie. 

    À la fin du printemps, les Russes se sont rendu compte que l'armée d'Assad était exsangue. Des 300 000 soldats du départ, il n'en restait plus que 150 000. Cette armée a été minée par les désertions des sunnites, passés dans les rangs de Daech, al Nosra ou de l'Armée syrienne libre, et les morts. Les 250 000 morts dont on nous parle sont dans tous les camps : l'armée régulière, les groupes djihadistes et les civils. Le flux migratoire que l'on connaît en Europe s'est accéléré à partir de juin 2015. Une partie des Syriens favorable au régime craignant alors que Bachar el-Assad soit défait, a choisi de s'exiler. 

    Les Russes ont choisi de ne pas lâcher Assad pour plusieurs raisons. Dans les rangs de Daech, il y a 5 000 Tchétchènes, peuple musulman qui vit au Sud-Ouest de la Russie aux tendances séparatistes et islamistes. Si l'État islamique installe son califat, il y un risque majeur de déstabilisation de tout le Caucase. Ensuite, les Russes perdraient la base navale de Tartous qui leur est essentielle pour assurer leur présence en Méditerranée. Tout comme il était vital pour eux d'avoir une large ouverture sur la mer Noire. L'annexion de la Crimée visait d'abord à récupérer la base navale de Sébastopol. 

    Mais Moscou venait de resigner une concession de trente ans avec l'Ukraine pour sa base navale… 

    Oui, mais les Russes n'avaient plus confiance. L'évolution en Ukraine, le jeu trouble des États-Unis et de certains États européens leur ont donné à penser que cet accord pouvait être rompu du jour au lendemain. Ils ont donc préféré se servir avant d'être éventuellement mis à la porte. Par cet accès à la mer Noire, les Russes conservent une ouverture sur la mer Méditerranée. Il y a également une explication religieuse au soutien affiché à Assad. Bachar et son père ont protégé les minorités religieuses chrétiennes, orthodoxes, comme Saddam Hussein en Irak. Hussein, qui était sunnite - une minorité sunnite dirigeait d'une main de fer l'Irak, à majorité chiite - a préservé le million de chrétiens irakiens. Son ministre des Affaires étrangères, Tarek Aziz était précisément un chrétien. A contrario en Syrie, une minorité alaouite, variante du chiisme, gouverne, avec l'appui des chrétiens (5% de la population), une majorité de sunnites. Mais les Assad, comme Sadam Hussein, venaient du parti Baas, où les influences socialistes et les liens avec l'URSS étaient importants. La Russie de Poutine ne veut pas être exclue d'un Proche-Orient où l'URSS avait des alliés, au premier rang desquels la Syrie. 

    Comment les Russes ont-ils procédé ? 

    La prise de Palmyre par Daech en mai a accéléré le cours des choses ; même si cette prise est d'une importance stratégique secondaire, le poids symbolique s'est lourdement fait sentir. Le mouvement diplomatique opéré par le Kremlin a consisté à traiter avec les Saoudiens, avec le discret appui de Washington, et à les amener à rediscuter avec le régime syrien. Le 18 juin dernier, Poutine a reçu à Moscou le prince Mohammed ben Salmane, ministre de la Défense et vice-Premier ministre saoudien. Ils se sont mis d'accord sur une reprise du dialogue avec la Syrie. Les Saoudiens ont posé comme condition que la rencontre avec les Syriens se déroule à Riyad. Ces derniers ont accepté et envoyé leur numéro deux, le patron des services de renseignement, Ali Mamlouk, pour rencontrer Ben Salmane à Riyad. Chacun a vidé son sac. Les Syriens ont reproché aux Saoudiens de ne plus privilégier un comportement collectif — comme au temps où Egypte, Syrie et Arabie saoudite étaient les meneurs de la diplomatie du monde arabe -, d'armer leurs opposants et de briser ce lien qui les unissait en leur préférant les Qataris. Les Saoudiens, de leur côté, ont reproché aux Syriens leur proximité avec le régime iranien. Mais ils s'étaient reparlés ce qui était l'essentiel. 

    Les Russes ont ensuite préparé conjointement une habile stratégie diplomatique, pour se garantir un maximum d'alliés, et une offensive militaire dans la région. Leur but était de dégager l'étau qui enserrait Assad. Par conséquent, ils ont frappé d'abord ceux qui étaient directement à son contact, en l'espèce al Qaïda et al Nosra, et non Daech. Il est logique qu'ils aient frappé en premier lieu ceux qui menaçaient directement le régime syrien. Puis dans un deuxième temps, ils se sont plus largement attaqués à Daech. 

    Les Russes ont-ils une solution de rechange s'ils ne parviennent pas à maintenir Assad au pouvoir ? 

    Effectivement, leur idée initiale est de former un bloc uni - États-Unis, Turquie, Arabie saoudite, régime syrien, Iran - contre Daech. À l'évidence, ils ont expliqué à Assad, lors de sa récente visite à Moscou, qu'à terme il devrait quitter le pouvoir, si c'était la condition d'un accord politique, du maintien de l'intégrité du pays et d'un front uni contre Daech. Mais si ce plan A échoue, leur plan B consiste en une création d'un réduit alaouite sur la bordure méditerranéenne, autour de Lattaquié et Tartous, dont ils protègeraient les frontières contre l'EI. Les Russes soutiendraient le réduit alaouite comme les Américains ont soutenu Israël. 

    Ce qu'il faut souligner c'est que les Russes, bien que touchés par la crise économique, sont encore capables de déployer une stratégie diplomatique de grande ampleur. La Russie compte peu économiquement, c'est l'échec de Poutine ; il n'a pas réussi à reconvertir une économie de rente pétrolière et minière en une économie moderne. Mais diplomatiquement, elle a complètement repris pied sur le champ diplomatique depuis la fin de l'URSS.  •

    Jean-Michel Quatrepoint est journaliste économiste. Il a travaillé entre autres au Monde, à La Tribune et au Nouvel Economiste. Il a écrit de nombreux ouvrages, dont La crise globale en 2008 qui annonçait la crise financière à venir.

    Dans son livre, Le Choc des empires .Etats-Unis, Chine, Allemagne: qui dominera l'économie-monde ? (Le Débat, Gallimard, 2014), il analyse la guerre économique que se livrent les trois grands empires qui règnent en maîtres sur la mondialisation.  

    Entretien réalisé par Eléonore de Vulpillières et Alexandre Devecchio

  • Il s'en dit des choses au Parlement Européen ... dont on se gardera bien de parler !

     

    Mercredi 7 octobre 2015, le Parlement Européen accueillait François Hollande et Angela Merkel.

    Martin Schulz donne la parole à Nigel Farage, chef du Parti pour l'indépendance du Royaume-Uni (UKIP).

     

    Sans préambule, avec une élégance toute britannique et beaucoup de conviction, il va mettre les points sur les « i » sur la situation de l'Union Européenne « totalement dominée par l'Allemagne », selon lui, et sur l’invasion des pays européens par des « migrants » de tout poil !

     

    Cette intervention au parlement européen n’a pas été répercutée par nos médias …

     

    Pourtant, les propos de Nigel Farage étaient aussi radicaux, sinon plus, que ceux de Marine Le Pen et il nous ont semblé beaucoup plus brillants ! Fallait-il occulter que le FN est loin d'être le seul à défendre de telles positions ? Et qu'il n'y a pas qu'en France qu'elles ont cours ? Alors, propos plus dérangeants encore que ceux tenus par la présidente du FN ?

     

    Sans doute. A preuve la tête d'Angela Merckel et celle, constipée, de notre Président …  •  

     

    Transmis par Marc Rousset que nous remercions.

    www.marcrousset.over-blog.com

     

  • Commission européenne et milieux d’affaire : les liens troubles décryptés

     

    par Ludovic Greiling             

    L’évolution des membres de l’ancienne Commission Barroso, qui a laissé sa place il y a un an à la Commission Juncker, montre l’ampleur des liens troubles qui existent entre ceux qui établissent les lois européennes et les instituts d’affaires.

    Ainsi, depuis son départ, l’ex commissaire dédié à la concurrence Nelly Kroes a rejoint Bank of America-Merrill Lynch (la banque américaine qui avait notamment préparé en secret le rachat d’Alstom par General Electric cette année, opération qui avait été approuvée par la Commission).

    L’ancienne commissaire à l’éducation, puis à la culture et enfin à la justice, Viviane Reding, est devenue entre autres membre du conseil d’administration de l’entreprise d’imagerie Agfa Gevaert et de la très puissante fondation mondialiste Bertelsmann.

    (voir le livre de Pierre Hillard sur cette institution http://www.amazon.fr/fondation-Bertelsmann-gouvernance-mondiale/dp/2755403357/ref=asap_bc?ie=UTF8)

    Les étranges postes de Barroso

    Le commissaire Karel de Gucht, qui a lancé discrètement les négociations avec les Etats-Unis pour l’établissement d’un marché transatlantique, a rejoint le conseil d’administration de deux entreprises d’investissement (CVC capital partners et Merit Capital NV) ainsi que celui du géant téléphonique Proximus (ex Belgacom).

    Et l’ancien président de l’exécutif européen José Manuel Barroso, en poste pendant dix ans ? Il a pris pas moins de 22 nouvelles fonctions, dont celles de professeur invité dans un nombre impressionnant d’universités américaines ou d’organisateur des futures réunions du groupe de Bilderberg.

    Il a également pris la présidence de l’Opéra de Madrid ou celle de la fondation des Beaux-Arts de Bruxelles, et il est devenu président de la fondation de l’UEFA pour l’enfance.

    Le monde du football professionnel n’a décidément pas cessé de nous étonner…

    « Les liens étroits entre les commissaires européens et les corporations qu’ils régulent ouvrent grandes les portes à un accaparement par les entreprises et à des conflits d’intérêts », commente Vicky Cann, présidente de Corporate observatory Europe, une association basée à Bruxelles à l’origine de l’étude sur le devenir des anciens commissaires.

    La liste exhaustive et l’évolution des anciens membres de la Commission est disponible ici (en anglais) :

    https://docs.google.com/spreadsheets/d/1unSfaPomgZLlVSumeTv2xxq7eL4QvdwYYy08ng-cPoU/edit#gid=0

  • Loisirs • Culture • Traditions ...

  • LITTERATURE & SOCIETE • Princesse de Clèves, Modiano : qui a peur des écrivains ?

     

    Sébastien Lapaque, dans sa dernière tribune du Figaro pointe l'inculture des hommes politiques qui ne prennent plus le temps de lire. Négligence condamnable autant pour les dirigeants de droite que de gauche.

    Les lecteurs de Lafautearousseau savent bien que nous sommes attentifs aux écrits de Sébastien Lapaque, tant pour des raisons déjà anciennes qui nous relient à sa réflexion et nous donnent le sentiment de lui être proches, que pour son souci de fond - et patriotique - touchant au statut dégradé de la culture, de la littérature, des livres eux-mêmes, et à leur marchandisation, dans notre France contemporaine, notre chère et vieille nation, jadis littéraire. Par là, Lapaque rejoint, pour ce qui est de notre aujourd'hui, l'une des obsessions d'Alain Finkielkraut, mais de quelques autres aussi, et, si nous remontons bien plus loin, aux environs de l'année 1900, l'une des thèses les plus prophétiques de Charles Maurras, développée avec minutie dans son Avenir de l'Intelligence. Au fond, le statut aujourd'hui dégradé, lui aussi, des politiques n'est-il pas, au moins pour partie, fonction de l'aggravation de leur inculture ? Et cette dialectique néfaste produit notre abaissement collectif, ce qui est plus grave. En quoi nous rejoignons parfaitement Sébastien Lapaque.  Lafautearousseau     

     

    Sébastien_Lapaque.jpgQuoi qu'on en dise, ce fut une affaire assez stupéfiante. Il est regrettable que certains l'aient si vite oubliée et pardonnée. Le 26 octobre 2014, après l'annonce, par les jurés suédois du prix Nobel de littérature, de leur choix d'honorer Patrick Modiano, Fleur Pellerin, ministre de la Culture et de la Communication, s'est révélée incapable de citer le titre de l'un de ses romans. Quels titres pourtant ! La Place de l'Etoile, Rue des Boutiques obscures, Dans le café de la jeunesse perdue… A ceux qui l'interrogeaient, la ministre expliqua qu'elle n'avait plus le temps de lire depuis deux ans. Une façon de sous-entendre qu'une fonction sérieuse ne s'accordait pas à des futilités telles que la littérature. Elle avait visiblement oublié Charles de Gaulle lisant Lord Jim de Conrad lors d'un voyage en avion et François Mitterrand savourant Chasses subtiles de Jünger avant ses réunions à l'Elysée.  

    Ce qui est effrayant, c'est que dix-sept jours séparaient les aveux de la ministre de la Culture de l'annonce des jurés suédois. Deux semaines n'avaient donc pas suffi à l'exquise Fleur Pellerin pour envoyer l'un de ses collaborateurs à la librairie Delamain (155, rue Saint Honoré à Paris, en face de son ministère), acheter les éditions de poche de Dora Bruder (144 pages), de Voyage de noces (157 pages) ou de Vestiaire de l'enfance (150 pages) afin de les lire de toute urgence et de découvrir un écrivain dont la reconnaissance internationale honore la France — et surtout perpétue l'idée que le monde continue de se faire de la France : une nation littéraire. Cette technicienne, si prompte à parler d'« offres » et de « contenus », n'avait même pas songé à demander à son chauffeur de glisser un disque dans le lecteur de sa Citröen C6 blindée afin d'entrer dans l'univers soyeux de Patrick Modiano par l'intermédiaire d'un livre-audio tandis qu'elle se rendait à l'aéroport dans une ambiance paisible et climatisée. La preuve que la littérature n'a plus la moindre valeur aux yeux de cette femme bardée de diplômes. Ni d'usage, ni d'échange. 

    Dans La Haine de la littérature (Editions de Minuit, 220 p., 19 €), un livre remarquable de savoir, de précision et d'intelligence, William Marx montre à quelles hauteurs s'est élevée cette passion destructrice au cours de l'histoire. Il faut découvrir la réflexion vagabonde de cet ancien élève de l'Ecole normale supérieure, professeur de littératures comparées à Nanterre. Son livre est féroce et souvent très drôle. Sa lecture achevée, une question se pose cependant. Pourquoi l'érudit subtil, doué pour le commerce des classiques, a-t-il cherché une illustration à sa thèse dans « l'affaire de la Princesse de Clèves », longuement commentée, et non pas dans « l'affaire Modiano », si fraîche, si éloquente, mais évoquée de manière allusive et renvoyée en note ? Pourquoi reproche-t-il à la ministre qui ne lit pas Patrick Modiano sa « maladresse », quand il accuse le président qui s'est moqué de Marie-Madeleine Pioche de La Vergne, comtesse de La Fayette, d'être « populiste » ? 

    Une asymétrie nous chagrine dans cette perspective. On peut bien penser que trop d'années furent arrachées du milieu de notre vie par un César inculte venu de la droite. On l'a partout répété ; on s'en est lamenté. Ce qui est étonnant, c'est d'observer, aujourd'hui, qu'aucun des champions de La Princesse de Clèves, gardiens de l'honneur des belles lettres et du statut littéraire de la chère et vieille nation, ne se scandalise de la voir présentement tombée sous le joug d'un César inculte venu de la gauche, qui confesse ne jamais lire de romans et affiche peu de goût pour le théâtre. Une inculture serait-elle à ce point préférable à une autre ? 

    Les écrivains ne font pas peur qu'aux seuls bourgeois des beaux quartiers. La haine de la littérature dont William Marx propose une typologie convaincante — c'est au nom que l'autorité, de la vérité, de la moralité et de la société qu'on a de tout temps pourchassé les doctes, les lettrés, les poètes — n'a pas établi ses campements sur la seule Rive droite. Il est un anti-littérature et un anti-intellectualisme de gauche au moins aussi détestables que l'anti-littérature et l'anti-intellectualisme de droite. 

    Quand ceux-ci consistent à dire : « Nous possédons probablement dans nos bibliothèques de quoi discuter pour les siècles à venir. C'est pourquoi j'aimerais vous dire: assez pensé, assez tergiversé, retroussons tout simplement nos manches » (comme l'expliqua Christine Lagarde, Ministre de l'Economie et des Finances en 2007), ceux-là reviennent à écrire : «Ne dites plus : Monsieur le Professeur, dites : crève salope ! », (comme le firent quelques agités du Quartier latin en 1968). 

    Lorsqu'on aime les livres, l'encre, le papier, le savoir, la pensée, les poètes mélancoliques et les romanciers aventureux, il n'y a aucune raison d'être plus indulgent à l'égard des uns que des autres. Dans l'instant, la haine des livres est de toutes parts, l'inutilité de la littérature dénoncée sur les deux rives de la Seine, l'opulente et la bohème. D'accord avec William Marx pour penser que l'indifférence, l'ironie et la moquerie à l'égard des écrivains de grand style est une tache de sang intellectuelle que « toute l'eau de la mer ne suffirait pas à laver » (pour reprendre une image frappante de Lautréamont), nous nous permettons d'ajouter, afin que nulle méprise ne subsiste : sur la gauche comme sur la droite du visage. 

    Sébastien Lapaque            

  • BD & SOCIETE • Y’a bon Astérix ! Nos ancêtres les racistes

     

    Un commentaire de Jean-Paul Brighelli  en tous points remarquable par son humour et par sa pertinence

    Disons le tout net : nous avons un sujet de désaccord avec Jean-Paul Brighelli. Essentiellement, c'est sur son attachement en quelque sorte intégral aux Lumières que nous divergeons. Nous croyons plutôt comme Houellebecq que les Lumières sont aujourd'hui éteintes ou en voie de l'être et qu'il convient de sauver d'elles seulement ce qui peut l'être. C'est à dire, pour être très brefs, ce qui ressort encore dans les Lumières - souvent avec éclat - de l'ordre, du goût et de la tradition française à l'exclusion de ce qui y inaugure la déconstruction. de cet ordre et de cette tradition. A cette divergence près qu'il est sans doute honnête de signaler, nous partageons le plus souvent les analyses de Jean-Paul Brighelli. En l'occurrence, sa satire de l'antiracisme nous paraît en tous points justifiée et rondement menée ! Lafautearousseau    

     

    985859-1169345.jpgNous avons donc appris cette semaine, grâce à l’Express qui a relayé des critiques éparses dans le Camp du Bien, que le dernier Astérix était raciste.

    Et que d’ailleurs tous les Astérix étaient racistes. Le grand philosophe Liliam Thuram (né en 1972 après J.C.) explique dans une vidéo qu’enfant, il s’identifiait à Astérix, et ne parvenait pas à se voir en noir — c’est le principe du héros, hé, banane ! Surtout les Noirs d’Astérix : dans le dernier opus, qui est un pur « à la manière d’Uderzo », ils ont encore de grosses lèvres et un nez épaté. Et les « scribes numides », les auteurs précisent en Note qu’on les appelle aujourd’hui « nègres littéraires ».

    « Ghostwriters », en anglais. Rappelez-vous ce roman de Philip Roth, la Tache, où le héros, prof de fac, se fait virer de son université pour avoir traité de « spooks » — zombies, mais aussi « nègres » en argot — deux étudiants-fantômes, jamais vus en cours — mais qui se trouvent être noirs, ce qu’il ignorait. Insensibilité, protestations de la NAACP, il est viré, détruit — alors qu’il est lui-même d’origine noire ; c’est le final twist du roman. Finkielkraut en a fait une très belle analyse dans Un cœur intelligent (2009). Roth, qui sait un peu ce qu’est le racisme, a écrit là son plus beau livre.

    Retour à Astérix. Le Noi’ vigie du bateau pi’ate ne p’ononce pas les R, et de su’c’oît il avoue dans ce de’nier opus qu’il ne sait pas lir’e — pas grand monde savait lire au Ier siècle av. J.C.. Cela émeut les antiracistes proclamés, les mêmes qui exigent, comme Louis-Georges Tin, qui a fait de la revendication antiraciste son fonds de commerce, que Tintin au Congo comporte en Europe comme aux Etats-Unis un insert expliquant qu’il s’agit d’une (vilaine) vision coloniale.

    Il est vrai que Tintin au Congo envoyait la dose, surtout dans la première édition — ce qui amène les blogueurs de l’Obs à se demander s’il ne faudrait pas tout bonnement l’interdire. Et les corrections de l’édition couleur sont touchantes, mais tout aussi révélatrices de la pensée coloniale.

    Tout comme les corrections de Tintin au pays de l’or noir, où Hergé a transformé les stéréotypes du racisme anti-juif en stérétotypes du racisme anti-musulman (en vingt ans, entre la première et la seconde édition, les Arabes ont désappris à lire — un comble !). Et alors ? Tout cela, c’est l’histoire des idées. Bombarder les livres d’avertissements en tous genres ne pourrait que contribuer à l’invention d’un racisme à l’envers, dont on ne voit que trop les manifestations immondes — j’en ai parlé ici même il y a quelques mois.

    Quant à savoir ce que vaut ce Papyrus de César, vous trouverez une analyse modérée et compétente ici — et un refus d’affubler un album de BD d’étiquettes qui sont autant de poncifs elles-mêmes, voire les manifestations d’un racisme à rebours. Le Corse que je suis ne s’est jamais offusqué des clichés véhiculés par Astérix en Corse, d’autant qu’ils étaient soulignés comme clichés. Le Corse paresseux, ce n’est jamais qu’un rappel du fait que d’après les Romains, maîtres du langage et de l’idéologie à l’époque, les Corses refusaient d’être esclaves et préféraient mourir que de servir un maître qu’ils ne s’étaient pas choisis. Il en est d’autres, dans d’autres civilisations, qui acceptaient le fait d’autant plus aisément qu’ils avaient été mis en esclavage par leurs frères de couleur ou de religion — but that’s another story. 

    Jean-Paul Brighelli (Causeur)

  • Théâtre • Paris : Avant-scène théâtral

     

    par Bruno Stéphane-Chambon

    Des spectacles rares, parfois confidentiels, peuvent devenir des succès de par leur qualité, et l’engouement qu’ils suscitent. Tout d’abord les représentations sont fréquentées par un « Happy Few» puis, pour le plaisir d’un public de plus en plus nombreux renaissent sur les lieux de leur création ou partent en tournée à la rencontre de nouveaux spectateurs.

    C’est ainsi que nous vous informons que Michael Lonsdale revient au Poche-Montparnasse toujours dans : Péguy/Lonsdale entre ciel et terre. Ce montage poétique, mis en scène par Pierre Fesquet, permet au grand acteur qu’est Michael Lonsdale, dans une recherche toute en intériorité, de nous livrer les extraits de l’œuvre ou de lettres écrites par le grand poète orléanais, juste avant son départ pour le front. Une poésie de la terre qui rejoint la poésie mystique, merveilleusement accompagnée à l’accordéon par Thierry Bretonnet qui sait tirer de cet instrument des sonorités rares et bouleversantes.

    Théâtre de Poche Montparnasse
    75, boulevard du Montparnasse Paris 6ème
    Tél : 01 45 44 50 21
    www.theatredepoche-montparnasse.com
    Tous les lundis à 19h du 2 novembre au 25 janvier 2016 !
    Places : 24 €

    Dans ce même théâtre, débute une nouvelle saison avec entre autres :

    Robert Le Diable
    Hommage à Robert Desnos, conçu par et interprété par Marion Bierry, avec Vincent Heden, Sandrine Molaro et Alexandre Bierry.
    Jusqu’au 18 janvier, les lundis à 20h30
    Places : 24 €

    Le Monte Plat d’Harold Pinter, Prix Nobel de littérature, mise en scène de Christophe Gand Avec Jacques Boudet et Maxime Lombard
    A partir du 10 novembre au 10 janvier, du mardi au samedi à 19h, le dimanche à 17h30
    Deux tueurs à gages, attendent l’arrivée de leur prochaine victime.
    Place : 16 €

    Madame Bovary de Gustave Flaubert, Adaptation Paul Emond
    Mise en scène Sandrine MOLARO & Gilles-Vincent KAPPS
    Avec Gilles-Vincent Kapps, Félix Kysyl ou Paul Granier, Sandrine Molaro et David Talbot
    À partir du 12 novembre, du mardi au samedi à 19h, le dimanche 17h30
    L’épopée d’Emma Bovary interprétée et chantée par quatre comédiens.
    Place : 35 €

    L’autre de Florian Zeller
    Mise en scène de Thibault Ameline, avec Jeoffrey Bourdenet, Benjamin Jungers et Carolina Jurczak
    A partir du 1er décembre, du mardi au samedi à 21h, le dimanche à 15h
    Oscar Wilde disait: « Etre un couple, c’est ne faire qu’un. Oui, mais lequel ? »
    Et si c’était l’autre ?


    DAMIEN LUCE

    DamienLuce

     

    Pianiste, compositeur, romancier, dramaturge, comédien, Damien Luce est un personnage protéiforme de grand talent. Au-delà de ses interprétations pianistiques de compositeurs méconnus, il joue aussi Schumann, Mozart ou Chopin. En tant que comédien, il a abordé les plus grands auteurs, Racine, Claudel, Marivaux, Anouilh, Jules Romains, Edward Albee…

    Son activité théâtrale est dense, on se souvient de sa version clownesque de Cyrano de Bergerac, mais il a aussi monté un spectacle raffiné et de goût consacré à Claude Debussy. Cette dernière pièce nous plonge dans l’intimité du compositeur avec un monologue inspiré par la correspondance de Debussy, entrecoupé de musique pour piano. Cette pièce a donné lieu au troisième livre de Damien Luce La Fille de Debussy, qui nous entraîne dans l’univers romantique d’une jeune fille pas comme les autres, qui fut la joie d’un compositeur de génie. (Editions Héloïse d’Ormesson).

    En compagnie de son frère Renan, il décide de monter un duo musical et en confie la mise en scène à Isabelle Nanty. Evocation et voyage dans le temps à la rencontre des voix des grands noms de la chanson française et des mélodies des comédies musicales américaines

    Mais voyage aussi car ce spectacle part en tournée sous le titre de Bobines.

    Avec leur chariot de Thespis, ils parcourront la Suisse, le Belgique dans les provinces du Brabant et de l’Hainaut, mais aussi les beaux départements des Alpes Maritimes, du Gard, de la Drôme, de la Loire, du Tarn et Garonne, de l’Orne, du Finistère, de la Meuse et de la Moselle, de l’Aisne, avec un passage dans le Nord, dans la Cité de la dentelle, Caudry.

    L’Ile de France est à l’honneur avec Sarcelles, Montgeron, Marly-le-Roi et Versailles.

    L’arrivée du grand Tour se déroulera au Café de la Danse à Paris.

    Tous les lieux et dates sont consultables sur le site de l’artiste : www.damienluce.com

     

    Lou Volt dans les doigts dans la prise

     

    LouVolt

     

    Les auteurs des sketchs : Xavier Thibault (Grand orchestre du Splendid) et Eric Toulis (Les Escrocs). Mise en scène d’Yves Carlevaris et Costumes de Françoise Sauvillé.

    Dans un tout autre genre, mais non le moindre, ce spectacle de cabaret, proche des récitals des chansonniers d’hier et d’aujourd’hui, contient tous les ingrédients de ce type de soirée bien parisienne et impertinente. Seule en scène, Lou Volt, qui s’est déjà produite en solo plus de trois cent fois à l’Olympia et au Casino de Paris, s’amuse à créer une émission en duplex depuis Las Vegas, qui lui permet d’être accompagné en virtuel par l’orchestre du Splendid à laquelle elle appartient depuis de nombreuses années en tant que chanteuse. Ce groupe français, créé en 1977 par Xavier Thibault, fils de l’acteur Jean-Marc Thibault, se veut être le successeur de Ray Ventura et ses collégiens. Il est connu pour avoir repris les succès de Duke Ellington, parodier avec humour de grands noms de la chanson française tels que Charles Trenet ou Joe Dassin ou encore reprendre les classiques des années 40 comme Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux ?

    On se souvient aussi de leurs créations endiablées dont la fameuse Salsa du Démon. Avec une trentaine de musiciens dont moult saxophonistes et trompettistes le groupe est toujours sur la route notamment avec la tournée « Âge tendre et tête de bois ».

    Lou Volt, durant ce récital, nous offre de nombreux sketchs et chansons satiriques, loufoques, coquines et parfois salées. Yves Carlevaris, metteur en scène chevronné, à la formation classique mais aussi, très impliqué dans le Music Hall et les spectacles de chansonniers, il fut aussi Directeur du Théâtre de Dix Heures, impose à l’actrice, un rythme soutenu, ponctué de ruptures drolatiques. L’actrice, dotée d’un réel talent et d’un métier qu’elle maîtrise à perfection, joue sans discontinuer dans un feu d’artifice électrique. Si les textes, paraissent un peu osés et sont émaillés d’expressions parfois graveleuses, il ne faut pas s’en offusquer, car ce répertoire, se révèle en filigrane, fortement moraliste et à contrecourant. Tout y passe : le ridicule de la famille recomposée, l’omniprésence de l’ex, la ringardise du porno et l’inanité des personnages politiques, avec en final une diatribe redoutable sur la télévision et l’information, sources d’abrutissement et de cécité face à la vie réelle. Un spectacle jubilatoire, insolent mais plein d’humour et d’énergie.

    Théâtre L’Archipel
    17 Boulevard de Strasbourg – Paris 10ème
    Tel : 01 73 54 79 79
    billetterie@larchipel.net
    Le jeudi, vendredi et samedi à 19h30 en Salle Bleue
    Places : 12 €/ 17 € / 22 €
    Jusqu’au 2 janvier 2016