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  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (38)

     

    (retrouvez l'intégralité des textes et documents de cette visite, sous sa forme de feuilleton ou bien sous sa forme d'Album)

     

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    Le jardin (III) : les stèles et leurs Histoires...

     

     

    Aujourd'hui : Les quatre stèles (I/V)

    (Les "quatre stèles" seront, finalement, cinq).



    Nous allons maintenant redescendre de quelques pas.
    En effet, Maurras a fait ajouter quelque chose d'autre dans cet ensemble cohérent des Fastes et de Gérard.
    Il s'en explique :


    "M'étant ainsi mis en règle avec la suite des mémorables de notre communauté, je n'ai pas craint de les doubler de quelque souvenirs un peu particuliers : il y a place pour tout si les mesures sont gardées".



    Ce quelque chose, ce sont quatre stèles (la cinquième sera rajoutée plus tard, et un peu plus loin) :

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    1 : la première, à l'ouest - donc à gauche - évoque Mistral :


    "Le 11 Août 1891, Mistral inaugura sur la façade de notre Mairie l'inscription provençale qui commémore Gérard Tenque et que le poète avait daigné récrire de sa belle main".

     

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  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (39)

     

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    Aujourd'hui : Les quatre stèles (II/V et III/V)

     

    1. La deuxième stèle...

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    2 : la deuxième salue les grandes amitiés de sa vie :


    "Après Maurice Barrès, les fondateurs de l'Action Française dont Léon Daudet, Jacques Bainville, Lucien Moreau, Robert de Boisfleury, Maurice Pujo furent reçus dans ce jardin par Madame Maurras et par ses deux fils"

     

    2. La troisième...

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    3 : la troisième rappelle la visite, en 1845 ou 1846 du Prince de Joinville.


    Le grand-père de Maurras (Garnier, père de sa mère) était marin (d'où la première vocation de Maurras) et naviguait avec l'Amiral de Joinville, fils de Louis-Philippe, qui lui rendit un jour visite au Chemin de Paradis...

     

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  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (40)

     

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    Aujourd'hui : Les quatre stèles (IV/V et V/V)

     

    1. La quatrième stèle

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    L'étoile "à sept rayons", choisie par Mistral comme emblème du Félibrige

     

    Elle rappelle "une innocente soirée de poésie vécue le 9 septembre 1943" :


    "Dans la soirée du 9 Septembre 1943... les rédacteurs de Latinité, félibres qui venaient de Maillane, Paris, Lyon, Orléans, les Charentes, le Vivarais, Avignon, Montpellier, Nîmes, Arles, Marseille et le Nizard ont rencontré leurs camarades de Martigues et répandu les vers éternels de Mistral sur une pierre neuve, au flanc de la vieille maison."

    Ce fut le dernier des 9 Septembre que Maurras devait passer en liberté !


    "Quelles belles heures nocturnes !" écrit-il, évoquant d'une façon particulièrement émouvante la récitation de ces vers "où le meilleur de nous subsiste quand le matériel disparaît tout entier".

     

    2. La cinquième et dernière, qui ne figurait pas dans le programme initial 

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    La Prud'hommie des pêcheurs de Martigues, qui fait face au théâtre

    Enfin, nous ferons un ultime arrêt devant une cinquième stèle, rajoutée plus tard, et qui ne se trouve pas, pour cette raison, dans la partie du jardin que nous venons de visiter : elle est apposée directement sur l'angle de la maison, côté ouest, et fait suite, ou réponse, "à l'infâme verdict du 27 Janvier 1945".

    On y lit "la lettre historique écrite, à l'automne de 1944, par le Président du Conseil de nos Prud'hommes Pêcheurs" :

    Communauté des Patrons-Pêcheurs de Martigues.

    Martigues, le 16 Octobre 1944.

    Nous, Conseil des Prud'hommes pêcheurs des quartiers maritimes de Martigues, représentant 700 pêcheurs, attestons que notre concitoyen Charles Maurras a, depuis toujours et jusqu'à son incarcération, faisant abstraction de toute opinion politique, fait entendre sa grande voix pour la défense des intérêts de notre corporation.
    Par la presse, il a attaqué les trusts et les autres grands profiteurs, ainsi que certaines administrations qui voulaient nous brimer.

    Pour le Conseil des Prud'hommes, le Président Dimille.

    Nous écrivons ici "elle est", mais cette stèle a  mystérieusement disparu. Pourtant, les deux plaques étaient bien là, côte à côte, comme en témoigne cette photo où l'on voit François Davin qui les montre aux membres d'un groupe auquel il explique et fait visiter la "partie architecturée" du jardin, telle que l'a voulue et réalisée Charles Maurras.

    La Mairie communiste a-t-elle voulu faire disparaître le témoignage courageux des pêcheurs et du petit peuple de Martigue, qui reconnaossait un "ami" en la personne du grand Maurras ?...

    Bizarre, bizarre...

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  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (41)

     

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    Aujourd'hui : 13 juillet 1934...

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    ...la Duchesse de Guise est reçue par Charles Maurras en son Jardin de Ferrières.


    Elle est l'épouse de celui qui aurait été Jean III, s'il avait régné, le Duc de Guise, père du Comte de Paris, Henri VI (le grand-père du Prince Jean).


    La Loi d'exil en vigueur à l'époque (elle ne sera abrogée qu'en 1950) empêchait de recevoir le Prince en personne, et son héritier, mais, ne s'appliquait qu'à eux, et non aux autres membres de la Famille : c'est ce qui explique que Maurras a pu inviter, et recevoir, la Duchesse, mais seule, et sans son mari...

    C'est elle que Maurras et Daudet, et la foule présente à Notre Dame de Paris, virent entrer dans la cathédrale, le jour où l'on y célébra les obsèques de Philippe VIII... Dans notre Album Maîtres et témoins (III) : Léon Daudet, voir la photo :

    La Reine de France aux obsèques de Philippe VIII

     

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  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (42)

     

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    Aujourd'hui : Maurras, intimement lié à sa mère...(I et II)

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    Avant de poursuivre cette visite, un moment de méditation devant le lieu qui renferme le coeur de Maurras (son corps étant à Roquevaire, dans le caveau familial, avec son père, sa mère et son frère).


    Maurras a en effet souhaité que son coeur reposât dans ce jardin qui s'est souvenu.


    Il se trouve dans un coffret à bijoux de sa mère...

     

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    ...déposé dans une cassette de cyprès, le tout déposé dans un "petit logis de pierre", sur lequel cour une lame de marbre avec deux inscriptions :

    - un vers d'Euripide, pour lequel Moréas a proposé la taduction :


    Hélas, que le soleil est beau !


    - en dessous, les vers de Mistral :


    "La mar, bello plano esmougudo / Dou paradis es l'avengudo..."
    (La mer, belle plaine émue, / du Paradis est l'avenue...)

     

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  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (43)

     

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    Mélanges, souvenirs, explications...

     

     

    Aujourd'hui : Maurras l'Académicien...

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    Le costume complet (chapeau, pantalon, épée)... faisait partie - avec sa bibliothèque - des trésors que renfermait "la maison"...

    Sentant que les choses ne se passeraient pas aussi pacifiquement que prévu, après la donation de la Bastide à la Mairie, Nicole Maurras remit le tout à l'Académie française, en la personne d'Hélène Carrère d'Encausse, le mercredi 19 février 2020.

    Vous aurez une petite idée de l'ensemble dans notre Catégorie Documents pour servir à une histoire de l'URP  enconsultant la note suivante : Documents pour servir à illustrer une histoire de l'URP (3)...

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    Maurras reçoit son épée d'Académicien... Photo "Excelsior", Roger-Viollet

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    L'épée d'académicien (détail)

    Elle a été fabriquée, comme celle de Bainville, par Mellerio dits Meller, le plus ancien joaillier du monde
    Charles Maurras a été élu à l’Académie française le 9 juin 1938.
    Financée par une souscription nationale, son épée lui fut offerte le 4 mars 1939, salle Wagram, par Charles Trochu, président du conseil municipal de Paris.
    Conçue par Maxime Real del Sarte, sa poignée représente Sainte Geneviève protégeant de ses mains un écu fleurdelysé posé à la proue d’une nef d’où se détache le chapiteau de pierre dit "bucrâne" qui orne la terrasse de la maison du Chemin de Paradis.
    Les vagues évoquent la vocation de marin à laquelle Charles Maurras dut renoncer lorsque, adolescent, il devint fortement mal-entendant; elles battent contre un mur de pierres surmonté de merlons", semblables à ceux du mur grec de Saint Blaise, site archéologique proche de Martigues qui inspira profondément Maurras.
    La bastide du Chemin de Paradis, maison de famille de Charles Maurras, gardée par deux cyprès d’émeraudes, est encadrée par les armes de Provence et de Martigues, et surmontée d’un ciel où brille une Grande Ourse de diamants.
    Sur le revers se trouve le château de Versailles, flanqué des armes de France et de Versailles, et surmonté du bouclier d’Orion.
    Le fourreau de l’épée se termine par une petite amphore grecque.

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  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (44)

     

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    Aujourd'hui : 1952 : sous la Coupole, l'hommage de Jules Romain

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    1952 : Maurras vient de s'éteindre. Sous la Coupole, Jules Romain, devant toute l'Académie, lui rend un bel hommage...

    Injustement condamné en 1945 pour "intelligence avec l'ennemi" ("la seule forme d'intelligence qu'il n'ait jamais eue", devait déclarer François Mauriac), Charles Maurras était, à partir de ce jour-là, automatiquement exclu de l'Académie (voir l'Éphéméride du 28 janvier).

    • Celle-ci se grandit une première fois le 1er février 1945, en l'excluant - puisqu'elle ne pouvait s'opposer à la force brute... - mais en refusant de le radier et de lui élire un remplaçant, déclarant simplement son siège vacant. Elle attendit sa mort pour élire son successeur (ce sera le duc de Lévis Mirepoix, le 29 janvier 1953, voir l'Éphéméride du 29 janvier).

    • L'Académie se grandit encore, une seconde fois, ce 20 novembre 1952, lorsque, quatre jours à peine après la mort de Maurras, Jules Romains (ci-dessous), devant tous les académiciens debout, lui rendit un hommage solennel (seul Claudel se discrédita lui-même, en restant ostensiblement assis...).

    Jules Romain déclara, entre autre :


    "...Il a exercé une réelle influence sur la pensée de notre pays, précisément à une époque où la France en avait besoin pour se ressaisir elle-même..." 

     

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  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (45)

     

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    Aujourd'hui : Maurras en "son" étang...

     

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    Image inattendue, d'un Maurras inattendu : une baignade dans l'Étang de Berre...

    C'est l'image qu'a choisi Pierre Boutang, le disciple fidèle, l'ami de toujours, pour illustrer son monumental Maurras, la destinée et l'oeuvre.

    C'est l'occasion de rappeler un souvenir d'enfance de Charles Maurras sur cet étang...

    Il a raconté dans l'une des Quatre nuits de Provence comment, en 1885, au soir d’une journée de plage sur les bords de l’étang de Berre avec frère et ami, une tempête d’une rare violence menaça de faire sombrer leur barque et de les noyer; ils ne durent leur salut qu’au sang-froid de Charles, qui en imposa ce jour-là à son compagnon, fils de marin pourtant :


    "Je dévouais à nous défendre tout ce qu’il fallait pour tenir, pour durer et persévérer. C’était fort peu, sans doute, car il y avait peu à faire, mais enfin le poing adhérait à la rame... Nous n’avions mérité qu’un éloge : nous n’avions pas quitté le bateau et nous le ramenions sans avoir perdu un agrès..."

     

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  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (46)

     

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    Aujourd'hui : Prologue des Quatre nuits de Provence...

     

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    "La journée va finir sans flammes, j’ai prié qu’on n’allumât point.
    Que le soir monte avec ses fumées incertaines : le détail, l’accident, l’inutile y seront noyés, il me restera l’essentiel.
    Ai-je rien demandé d’autre à la vie ?

    Donc, çà et là, dans ses transparences divines, traversées de soudaines opacités, le Soir léger et pur se rend, peu à peu, à la Nuit. Sur la pente gauche du ciel, le croissant couleur de perle s’élève, glisse, coule à l’autre versant, pareil aux concessions d’une rêverie fatiguée qui se replie sans hâte et ne faiblit pas sans honneur. Cette face souffrante pourrait décliner en silence. Mais l’accent de sa flamme morte insiste, de très haut, et m’impose, en quelque manière, le ressouvenir du refrain d’un beau chant entendu, il y a de longues années, et qui n’a rien perdu de sa force sur ma pensée. Ses délices renaissent, leur voix remplit mon ciel, devenu tout entier musical et sonore :

    Va, mon ami, va,
    La lune se lève !
    Va, mon ami, va.
    La lune s’en va !


    L’astre, étonné, a fait une halte apparente. Ma veille est suspendue aussi, mais non le cours de mes pensées qui se précipitent, et les petits flots qu’elles roulent valent en nombre et en vertu les parcelles étincelantes dont l’éther est criblé.

    Le glissement lunaire reprend. J’ai quitté la fenêtre d’où je le regardais, et m’éveille sur ma terrasse provençale, un peu scandalisé du temps que je dissipe à subir la révolution nocturne des songes : car je les reconnais pour de simples échos du passé.

    Qu’on leur pardonne, ainsi qu’à moi ! Ces hôtes anciens d’une mémoire minutieuse et tenace ont d’abord été convoqués, s’il m’en souvient, comme les témoins du mouvement originaire de ma pensée : ils comparaissent devant moi pour m’aider à écrire un Mémorial intellectuel. Mais je vois bien qu’ils se moquent des témoignages et ne sont animés d’aucun désir étranger à leur joie de vivre ou plutôt de survivre.

    N’étant plus rien que ce qu’ils sont et ne voulant rien d’autre, ils marchent et ils parlent, ils pleurent et ils rient sur le théâtre intérieur sans autre objet que de reparaître tels qu’ils furent, non sans se retourner de temps en temps, pour me dire qu’il ne m’est pas permis de les laisser mourir.

    Pas plus que moi, ils ne s’étonnent de leur étrange résistance aux forces de ruine. Ils sont fidèles, étant vivaces, et me remplissent à mon tour de l’horreur d’un oubli qui doit les coucher avec moi. C’est pour cela que je redis à mes homuncules si vifs, en les dévisageant et en les nommant un par un :

    Va, mon ami, va.



    Un seul point me surprend, le charme que je trouve au jeu de mes ombres heureuses.

    Mais rien n’en délivre mon cœur, il est le prisonnier de ces figurines d’enfance que durant un demi-siècle je me suis montrées, racontées et presque chantonnées, à moi, il est vrai, pour moi seul…


    Va, mon ami, va,


    La lune s’en va !

    Qu’elle aille ! Seulement ne la suivez pas, vous autres, vieux amis, condamnés à passer comme elle ! Restez, attendez, revenez, pour revivre et briller, pour me baigner encore, pendant ces quelques nuits, d’un rayon du jour éternel."

     

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  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (47)

     

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    Aujourd'hui : Destin contrarié

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    Comme son grand-père maternel, Garnier, qui a reçu chez lui, au Chemin de Paradis, le Prince de Joinville, fils du Roi Louis-Philippe, sous les ordres duquel il naviguait, Maurras aurait voulu être marin. Et dans la marine de guerre...

    C'était un petit garçon plein de vie et d'énergie, aux antipodes de l'image que l'on a trop souvent d'un Maurras vieux monsieur austère. Vocation contrariée, et même plus : empêchée, à partir du moment où il était devenu, non pas sourd, comme on le dit souvent, mais fortement malentendant...

     

    Maurras a fait de cette vocation contrariée, et de la perte de ses rêves d'enfant, le thème d'un de ses poèmes, en partie cryptée (mais en partie seulement, car plusieurs passages sont parfaitement clairs, et évoquent cet appel irrésistible de la mer et du grand large que ressentent tous les marins...)  Destinée :


    Tu naquis le jour de la lune,
    Et sous le signe des combats,
    Le soleil n'en finissait pas
    De se lever sur ta lagune

    Le vent d'ouest au seuil béant
    De ta maison sur le rivage
    Vint moduler son cri sauvage
    Et les appels de l'océan.

    Mais tu n'as pas quitté ton île
    Ni fait bataille sur la mer :
    Jamais la gloire du vrai fer
    N'a brillé dans ta main débile.

    Tu ne peux être matelot
    Que d'imaginaires espaces
    Où, plus qu'ailleurs, l'aube fugace
    Est longue à naître sous le flot,

    Darde au zénith la flamme torse
    Des volontés de ton destin :
    Dans les angoisses du Matin
    Quelle Nuit lente use ta force !

     

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  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (48)

     

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    Aujourd'hui : D'un amoureux de Martigues...

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    ...dont le texte pourrait presque, en quelque sorte, être présenté comme une introduction aux Trente beautés de Martigues, texte qu'on lira dans les deux livraisons suivantes, d'abord en français puis en provençal...

     

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  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (49)

     

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    Aujourd'hui : Les trente beautés de Martigues ( en français)

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    (Ce texte est paru en septembre 1888 dans la Revue félibréenne, puis dans l'Armana Prouvençau pour l'année 1890; il a enfin été repris en 1915 dans L'Étang de Berre et ses différentes rééditions, dont celle des Œuvres capitales)



    Aux félibres de Paris.

    Savez-vous ce que me rappellent vos causeries, savez-vous ce qu'elles me disent et me retracent ? Puisque nous sommes ici pour parler de nos pays d'origine, je puis bien vous le dire : c'est Martigues que je vois dans ces moments-là, quelques disques de terre entourés par la mer, trois petites îles qui font la chaîne au couchant de l'étang de Berre, avec un ruban de maisons qui flotte sur les deux rives ; on dirait qu'elles sont là pour amarrer au continent les trois perles que l'eau emporterait, ou qu'elle engloutirait.

    J'aime mon village mieux que ton village, nous chante Félix Gras. Je le crois bien, que je l'aime ! Et tous mes compatriotes sont comme moi. Nos hommes de mer en savent quelque chose. Autrefois, qu'un vaisseau sortît de Marseille et qu'un des nôtres y commandât, avec le meilleur vent, la mer juste assez émue pour le charrier tout doucement à Cette (1), à Barcelone ou à Majorque, croyez-vous que notre capitaine pût s'éloigner ainsi ? Ah ! mais non ! Là-bas, miroitaient les trois clochers de la patrie ; vite un coup de barre sur Bouc (2), vite, le canot à la mer pour le mener jusqu'à Martigues, et embrasser une dernière fois les places vives de son cœur !

    De là viennent, peut-être, les sornettes que l'on a racontées sur nous. Les Marseillais chansonnèrent nos capitaines, qui n'en furent que plus fiers. Sur cet article-là, vous serez avec nous, Félibres, puisque le Félibrige consiste à maintenir l'amour du pays.

    Et si je vous disais notre histoire, si ancienne, qu'elle a commencé près de deux mille ans avant que naquît notre vieux croisé Gérard Tenque (3), le fondateur des Moines hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem. Si je vous déployais notre bannière qui, du temps du roi de France Henri III, en quinze cent quatre-vingt-trois, arborait les trois couleurs de nos quartiers, qui sont le bleu, le blanc et l'écarlate, alors que le drapeau français n'avait pas encore usé ses grands plis liliaux, où seraient-ils, les insensés pour me soutenir que Martigues n'est pas dans le train du progrès !

    Ah ! toutes ses beautés, si j'en faisais le dénombrement et le compte, vous seriez ici jusqu'à demain. Pour vous faire plaisir, mettons que Martigues soit seulement doté de trente beautés. Le plus joli morceau de la création, qui est la femme, n'en a pas davantage.

    Je prouve tout ce que je dis.

    La première beauté de mon Martigues, c'est l'Étang de Berre, qui, le matin, blanchit et qui le soir s'azure, quand je regarde de ma maison ; l'Étang qui, de ses mille langues vertes, lèche amoureusement le sable des calanques et ronge les rochers où l'on pêche le rouget.

    La seconde, c'est l'étang de Caronte, qui le rejoint à la grand'mer. Les tartanes et les autres barques y font gonfler leurs larges voiles aux angelots joufflus.

    La troisième, ce sont nos collines nues, qui se gonflent comme mamelles et qu'embaume l'arôme chaud des thyms, des fenouils, des romarins et des sarriettes.

    La quatrième, ses champs de pierres plantés d'oliviers, où vient l'odeur du sel, dans la brise.

    La cinquième, cette petite chapelle de la Bonne Mère, si haut perchée, sur laquelle un boulet anglais est venu s'aplatir, qui sait quand ?, et que les ex-voto des pauvres gens étoilent comme des fleurs d'amour.

    La sixième, nous avons le mistral pour balayeur municipal.

    La septième, nous avons pour fosse d'égout la grande mer.

    La huitième, le Saint-Christ, qui est à l'entrée d'un canal et dont, le soir, une lanterne rouge ensanglante les jambes rompues.

    La neuvième, les grandes arrivées de caïques, en hiver, à coups de rame, pleins de grands diables aux cabans qui ruissellent de pluie et d'eau de mer.

    La dixième, les vastes corbeilles où remue le poisson comme du vif-argent ; qui peut dire combien il y a de bouillabaisses, là dedans !

    La onzième, les monceaux de sel, aux salines, qui attendent le chaland, et les douaniers, qui font un peu moins que d'attendre, les fainéants !

    La douzième, le coup d'aile des goélands qui raye le ciel.

    La treizième, la cabriole des mulets hors de l'eau, dès qu'ils sentent le grain.

    La quatorzième beauté, c'est le galbe parisien des vagons (4), de notre chemin de fer (5), ce qui fait voir une fois de plus que personne ne nous a jamais fait notre part.

    La quinzième, c'est, pour Noël, l'anguille qui se mange entre deux chandelles.

    La seizième, les pénitents qui, sous le grand soleil, vont à la Sainte-Terre (il y a deux lieues de mauvais chemin), les blancs devant, les bleus derrière, pour chanter messe à Sainte-Croix.

    La dix-septième, c'est, le jour de Pâques, la tartane de la Vierge, celle qui a le plus pêché de tout l'an, qui se fleurit comme une mariée.

    La dix-huitième, nos pêches de nuit, quand l'étang, couvert de flambeaux, est un ciel qui répond aux splendeurs de là-haut, limpide, doux et clair.

    La dix-neuvième, nos joutes colorées, le port comblé de bâtiments, de pavillons, et les beaux jeunes gens, au chant des tambourins et des flûtes, qui partent demi-nus, debout à l'arrière, et donnent et reçoivent des coups de lance comme des héros de Toloza (6).

    La vingtième beauté de Martigues, c'est bien sûr notre poutargue. Pour manger sa pareille, il faut aller jusque là-haut, chez les Russes pâles (7).

    La vingt et unième, nos prud'hommes si honorés, qu'on a fait ce proverbe : «  Que toute barbe d'homme s'incline, le prudhomme va parler.  » C'est le reste dernier de ces consuls puissants qui, par toutes les pêcheries du Midi, furent renommés, à preuve Calendal à Estérelle, vantant son aïeul :
    — Qui a été consul de Martigues.

    La vingt-deuxième beauté de Martigues, c'est la marmaille qui nage entre les quais, dans le costume d'Adam, montrant de petits culs bronzés au commissaire qui jure et qui sacre.

    La vingt-troisième, les quatre ponts jetés d'île en île, d'où les badauds regardent la tour de Bouc en aspirant leurs calumets.

    La vingt-quatrième, c'est le sang cramoisi de ces pêcheurs et de leurs brunes filles.

    La vingt-cinquième, c'est la fontaine de Ferrière, où les filles vont, le soir, puiser l'eau fraîche avec des brocs et bavardent tant qu'elles peuvent, et se font chatouiller par leurs amoureux.

    La vingt-sixième, c'est la grand'rue qui passe sur les ponts chargés d'hommes et qui charrie, au soir, comme un ruisseau d'amour, les centaines de couples enivrés.

    La vingt-septième, c'est cette folle de lune, qui jette dans nos lagunes tant de bijoux diamantins et fait courir sur l'eau ses blancs frémissements.

    La vingt-huitième, c'est la douzaine de moulins qui attendent Alphonse Daudet et où les lapins se rassemblent dans la solitude.

    Élégante et monstrueuse, la vingt-neuvième beauté, c'est la haute fleur qui éclate et s'ouvre au milieu des poignards (8), une fois, dit-on, tous les cent ans ; il ne lui faut pas cinq semaines pour élever son candélabre au ciel émerveillé.

    La trentième… Sainte bonne Mère, nous y sommes ! Et je ne vous ai rien dit de ses trois églises, non plus que de ses trois curés et de ses trois congrégations de filles !

    Il faut savoir qu'à Martigues nous allons volontiers par trois ; mais que nul ne s'en raille, parce que le nombre trois est sacré dans toutes les religions et les philosophies. Je n'ai rien dit, pauvre de moi, ni de nos salles vertes, ni des feux que l'on fait pour sainte Madeleine ! Mais si j'ai voulu abréger ce mauvais portrait des beautés de mon pays, messieurs les Félibres, c'est pour vous dire :

    — Allez le voir, car vous ne pourrez pas finir le compte que j'ai commencé.

    Notes :

    1. La graphie actuelle « Sète » ne sera adoptée qu'en 1927.

    2. Le port de Bouc, embouchure de l'étang de Caronte canalisé, qui sert de station sur la Méditerranée aux bâtiments de Martigues, situé à cinq kilomètres, sur la mer intérieure de Berre.

    3. « L'an du Saint-Christ 1040 », dit l'inscription provençale de l'hôtel de ville, en l'honneur de Gérard Tenque.

    4. Graphie en usage à l'époque. (n.d.é.)

    5. Ils avaient alors deux étages, comme dans les trains de la banlieue parisienne.

    6. Poème épique de Félix Gras, composé en 1882.

    7. Ils fabriquent leur caviar de manière très différente, mais comme nous avec des œufs de poisson.

    8. Nos paysans donnent ce nom aux belles plantes hérissées de piquants et recourbées en forme de glaives barbares que l'on appelle vulgairement aloès. En réalité c'est l'agave d'Amérique, qui depuis le XVIe siècle s'est répandue sur tous les rivages de la Méditerranée ; on la retrouve également sur les pentes du vieux Monaco et sur la montée de l'Acropole d'Athènes.

     

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  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (50)

     

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    Aujourd'hui : Les trente beautés de Martigues (en provençal) Li Trento Bèuta dou Martegue

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    I felibre de Paris.

    Sabès ço que me rememoron vòsti parladuro, sabès ço que me dison e me retrason ? D'abord que sian eici pèr charra de nòstis endré, pode bèn vous lou dire. Es lou Martegue que vese en aquéli moumen, quàuqui roudelet de terro encenturado pèr la lono, tres iscleto que se tènon e s'enfielon au tremount de l'Estang de Berro, em'un un ribanet d'oustau que floto sus li dos ribo. Dirias que soun aqui pèr amarra au countinènt tres perleto que l'aigo empourtarié vo manjarié.

    Ame moun vilage mai que toun vilage ! nous canto Fèlis Gras. Va crese que l'ame ! E tóuti li Martegau coume iéu. Nòstis ome de mar n'en sabon quaucarèn. Autre-tèms, s'un veissèu sourtié de Marsiho, qu'un Martegau ié coumandèsse, emé lou meiour vènt, la mar tout-bèu-just proun esmougudo pèr carreja plan-plan à Ceto, à Barcilouno vo à Maiorco, cresès-ti que lou Martegau s'aliuen-chavo coume acò ? Pas mai ! Eilalin miraiavon li tres clouchié de soun endré, e zóu ! un cop de barro en Bou, e zóu ! lou barquet à la mar pèr l'adurre enjusqu'au Martegue ounte beisavo un darrié cop li plaço vivo de soun cor !

    D'aqui vènon, bessai, li martegalado que se conton sus nautre. Li Marsihés cansounejèron nòsti capitàni, que n'en fuguéron que mai fièr. E pèr acó-d'aqui sarés emé nautre, Felibre, d'abord que voste Felibrige es lou mantenamen de l'amour dóu païs.

    Ah ! se vous disiéu nosto istóri, tant enciano qu'a belèu acoumença peraqui dous milo an avans que nasquèsse noste vièi crousa Gerard Tenco, lou foundatour di Mounge Espitalié de Sant Jan de Jerusalèn ! Se vouliéu desplega nosto bandiero que, dóu tèms dóu rèi de Franço Enri lou tresen, en quinge cènt vue-tanto-tres, enauravo li tres coulour de nósti quartié, que soun lou blu, lou blanc e l'escarlato, basto que lou drapèu francés noun avié encaro gausi si grand ple blanquinèu, mounte sarien li darnagas pèr ausa m'afourti que lou Martegue n'es pas dins lou trin dóu prougrès ?

    Ah ! tóuti si bèuta, se n'en fasiéu dedu e conte, sarias eici fin-qu'à deman. Pèr vous faire plesi, meten que lou Martegue siegue soulamen prouvesi de trento bèuta. Lou plus poulit moussèu de la creacioun, qu'es la femo, n'en a pas mai.

    Prove tout ço que dise.

    La bèuta proumiero de moun Martegue, es l'Estang de Berro que, de matin, blanquejo e de vèspre bluiejo se regarde de moun oustau ; l'estang qu'émé si verdo lengo amourousido lipo la sablo di calanco e rouigo li roucas ounte se pesco lou rouget.

    La segoundo, es l'Estang de Carounto que lou religo à la grand mar. Aqui tartano e beto fan regounfla si làrguis velo is ange boufarèu.

    La tresenco, es si colo nuso que reboumbellon coume mamèu e qu'embaimon li càudi sentour di ferigoulo, di fenoui, di roumanin, di pebre-d'ai.

    La quatrenco, es li clapeirolo e si plant d'óulivié ounte vèn l'óudour de la sau, dins l'aureto.

    La cinquenco, aquelo capeleto de la Bono-Maire qu'es quihado tant aut, ounte un boulet anglés es vengu s'esquicha, qu saup quand ?, e qu'estellon, coume di floureto d'amour, lis es-voto di pauri gènt.

    La sieisenco, avèn loti mistrau pèr escoubaire municipau.

    La setenco, avèn per pouciéu la grando mar.

    La vuechenco, lou Sant-Crist qu'es à l'intrado d'un canau e que, lou sèr, un lume rouginèu ensaunousis si cambo routo.

    La nòuvenco, lis gràndis arribado de caïque, d'ivér, a cop de remo, plen d'ome endemounia, que si sauto-en-barco regoulon de pluejo e d'aigo de mar.

    La desenco, li vàsti gorbo ounte boulego loti bèu pèis coume d'argènt vièu ; qu pôu dire quant n'i'a de bouï-abaisso, aqui dedins !

    La voungenco, li moulounas de sau, i salino, qu'espèron lou chaland, émé li douanié, fasènt un pau mens que d'espera, li feniantas !

    La dougenco, lou cop d'alo di gabian que rego lou cèu.

    La tregenco, li cabriola di muge en foro de la mar, tre que sènton lou gran.

    La quatourgenco bèuta, es lou flame parisen di vagoun de noste camin de fèrri, ço que fai vèire uno fes de mai qu'au nostre degun fai sa part.

    La quingenco, es, pèr Nouvè, l'anguielo que se manjo entre dos candèlo.

    La segenco, li penitènt au souleias que van en Santo-Terro (i'a dos lègo de marrit camin), li blanc davans, li blu darrié, pèr canta messo à Santo-Crous.

    La des-e-setenco, es, loti jour de Pasco, la tartano de la Vierge, aquelo qu'a lou mai pesca de l'an, qu'es flourido coume uno nóvio.

    La des-e-vuechenco, nòsti pesco de niue, que l'estang cubert de fasquié es un cèu respoundènt i trelus d'amoundaut, siau e clarinèu.

    La des-e-nouvenco, nòsti targo acoulourido, lou port clafi de bastimèn, de pavaioun, e li bèu drole, au cant di tambourin e di flahut, que parton mitanus, e, dre sus la tintèuno, dounon, e reçaupon li cop de lanço, coume d'eros de Tolosa.

    La vintenco bèuta dóu Martegue, es de segur, nosto poutargo, que pèr n'en tasta la parièro, se fau ana enjusqu'amount, encò di Rùssi palinéu.

    La vint-unenco, nòsti prudome tant ounoura qu'an fa aquéu prouvèrbi : « Que touto barbo d'ome cale, lou prudome vai parla. » Es lou rèsto darrié d'aquéli conse pouderous que, pèr tòuti li pescarié dóu Miejour, fugueron renouma ; à provo Calendau disènt à-n-Esterello, de soun grand :
    — Que fugué conse dòu Martegue.

    La vint-e-dousenco bèuta martegalo, es aquelo marmaio que nado entre li quèi, dins lou vièsti d'Adam, moustran si pichot quiéu brounza au coumessàri foutrejant.

    La vint-e-tresenco, li quatro pont jita d'isclo en isclo, d'ounte li badaire arregardon la tourre d'Embou e fan tuba si cachimbau.

    La vint-e-quatrenco, es lou sang cremesin d'aquéli pescaire e de si brùni fiho.

    La vint-e-cinquenco, es la font de Ferriero, que pèr soun aigo fresco, lou fihan iè vai, de vèspre, emé de bro, e barjo tant que pòu, e se fa coutiga per si calignaire.

    La vint-e-sieisenco, es la grand cariero que passo sus li pont carga d'ome e qu'es, au sèr, un riéu d'amour, carrejant pèr centeno li parèu enchuscla.

    La vint-e-setenco, es aquelo desaviado de luno que jito dins nòsti clar tant de beloio diamantino, e fai courre sus l'aigo si blànqui fernisoun.

    La vint-e-vuechenco, es la dougeno de moulin qu'espèron Anfos Daudet e mounte soulet se recampon li lapin.

    Espetaclouso e mistoulino, la vint-e-nouvenco bèuta es l'auto flour qu'au mitan di pougnard un cop, dison, cade cènt ans cracino e flouris ; mai ié fau basto cinq semano pèr vira lou candelabre au prefouns de l'aire espanta.

    La trentenco… Santa bono Maire, li sian ! E vous ai rèn dit de si tres glèiso, nimai de si tres curat, nimai de si tres coungregacioun de fiho !

    Fau saupre qu'au Martegue s'amo d'ana pèr tres. E que degun s'en trufe, perqué lou noumbre tres es sacra dins tóuti li religioun e li filousoufio. Ai rèn di, paure de iéu, de nósti salo verdo, nimai di fió que fasen pèr Santo Madaleno ! S'ai pas vougu tira de long pèr lou marrit retra di bèuta martegalo, esque, messiés li Felibre, vous vole dire de i'ana vèire, que noun poudrès feni lou comte pèr iéu acoumença.

     

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  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (51)

     

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    Aujourd'hui : "...quand je regarde de ma maison..." (I/II et II/II)

     

    1. L'Étang...

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    "La première beauté de mon Martigues, c'est l'Étang de Berre, qui, le matin, blanchit et qui le soir s'azure, quand je regarde de ma maison; l'Étang qui, de ses mille langues vertes, lèche amoureusement le sable des calanques et ronge les rochers où l'on pêche le rouget..."

     

    2. Le canal de Caronte...

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    Entrée de Bouc, et début du Canal de Caronte

     

    "...La seconde, c'est l'étang de Caronte, qui le rejoint à la grand'mer. Les tartanes et les autres barques y font gonfler leurs larges voiles aux angelots joufflus..."

     

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  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (52)

     

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    Aujourd'hui : "...De la conque de Fos...

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    Fos, on l'a vu sur le Mur des Fastes, tire son nom des "Fosses mariennes", ce gigantesque canal que fit creuser Marius, lequel, nous dit Plutarque, "tira le Rhône jusqu'à la mer".
    Ce canal partait du Rhône proprement dit, là où le fleuve était toujours un fleuve puissant, et le continuait en le suppléant, à partir du moment où il se perdait en divagations et marécages.
    Le consul voulait en effet à tout prix barrer la route maritime et côtière aux barbares, qui auraient pu, sans ce "mur liquide" qu'il leur opposa, se rendre très rapidement à Massalia puis à Rome.
    Marius, en bon général, avait choisi l'endroit où il voulait livrer bataille : près d'Aix, au pied de la montagne qu'on appellera, après son triomphe, la montagne de la Victoire, et qui deviendra par la suite la Sainte Victoire....
    Fos est donc le premier maillon de cette sorte de "route de Marius", dont elle conserve l'histoire en son nom toponymique...

     

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