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«Insécurité : le grand secret», par Vincent Trémolet de Villers.

Source : https://www.lefigaro.fr/vox

Beauvau contre Vendôme, Vendôme versus Beauvau… Au-delà du jeu traditionnel entre les ministères de l’Intérieur et de la Justice, c’est notre rapport au réel qui est en jeu. L’insécurité est-elle un sentiment ou une réalité ? Les chiffres, les faits glaçants disent à eux seuls l’explosion de la délinquance, mais il se trouvera toujours un chercheur pour avancer que l’explosion nocturne de mortiers comme les lynchages en bande sont surtout des constructions médiatiques.

Au-delà des chiffres, pourtant, il y a des usages. Ils réconcilient ceux qui croient à l’«ensauvagement» et ceux qui disent ne pas y croire. Appelons-les «stratégies d’évitement». Elles consistent à éviter certaines rues à certaines heures, certaines tenues (pour les femmes) dans certains quartiers, certaines écoles pour les enfants, certains trottoirs trop inquiétants, certains wagons trop bruyants. Elles reposent sur une pratique soutenue du digicode, du transport particulier, quand ce n’est pas celle d’un sport de combat. Elles participent d’une partition invisible, celle-là même que François Hollande dans ses confidences à Gérard Davet et Fabrice Lhomme disait craindre. Elles illustrent les mots terribles de Gérard Collomb, prédécesseur de Gérald Darmanin, lors de son départ de la Place Beauvau : «Aujourd’hui on vit côte à côte, je crains que demain on vive face à face.» C’est ce «face à face» qui doit nous préoccuper beaucoup plus que les chicayas entre Gérald Darmanin et Éric Dupond-Moretti.

Quand ce ne sont plus seulement des policiers mais des pompiers, des médecins qui sont interdits de séjour dans des centaines de quartiers, quand des bandes pillent impunément les boutiques des Champs-Élysées, quand on risque un coup de couteau gare du Nord au milieu de l’après-midi, la restauration de l’autorité devrait être l’urgence absolue. Las, la rhétorique victimaire, le soupçon des «violences policières» agissent comme des gaz incapacitants. Nos gouvernants tempêtent, légifèrent, pinaillent sur une réalité crieuse parce qu’ils craignent, plus que tout, de l’affronter.

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