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Rechercher : Rémi Hugues. histoire & action française. Rétrospective : 2018 année Maurras

  • Littérature - Idées • Tiouttchev poète et contre-révolutionnaire

     

    Par Marc Froidefont 

    Un article qui nous fait découvrir un grand auteur russe pratiquement inconnu en France. Poète et contre-révolutionnaire. Et qui nous renseigne aussi sur la Russie. Sur son âme, sa profondeur.  LFAR

     

    I-Miniature-17255-marc-froidefont.net.htm.jpgLes éditions Interférences viennent de publier un livre, intitulé sobrement Poèmes, et qui est un recueil de quelques poésies de Fiodor Tiouttchev, élégamment traduites par Sophie Benech. Cet ouvrage est remarquable. 

    En tant que livre, on ne peut que féliciter les éditions Interférences pour le soin apporté à la présentation, à la mise en page, à la beauté même du papier utilisé. Remarquable aussi en tant que texte, chacun sait, ou du moins devine, les difficultés qu’il y a à traduire la poésie russe ; les précédents traducteurs de Tiouttchev, tant Paul Garde que François Cornillot avaient déjà averti leurs lecteurs des difficultés d’une telle entreprise. Remarquable, enfin et surtout, est l’idée même d’éditer un livre de Tiouttchev, car, comme l’écrit Sophie Benech dans son avant-propos : « Le nom de Fiodor Tiouttchev est peu connu des lecteurs français, pour ne pas dire totalement inconnu ».

    Le poète

    Cette ignorance du public français est regrettable, car de l’avis même des écrivains et des poètes russes, Tiouttchev (1803-1873) est l’un des plus importants d’entre eux. Tolstoï a été jusqu’à affirmer que « sans lui, on ne peut pas vivre … ». Une telle appréciation est largement partagée, Paul Garde rappelle que Dostoïevski  l’appelait « notre grand poète » et que Tourguéniev disait : « On ne discute pas Tiouttchev, celui qui ne le sent pas ne fait que montrer qu’il ne sent pas la poésie elle-même ». Il est vrai que Tiouttchev n’a jamais cherché la célébrité. Né dans une famille noble, Tiouttchev entre à 19 ans dans la carrière diplomatique, il est en poste pendant de très longues années à Munich, retourne enfin en Russie où il est nommé responsable de la censure au ministère des affaires étrangères. Il a écrit de nombreux poèmes, souvent courts, mais n’a pas cherché ni à les faire connaître ni à les publier. Ce sont d’autres poètes qui ont édité quelques-unes de ses poésies, l’auteur lui-même ne parlant que peu de son œuvre. La renommée de Tiouttchev a donc été relativement tardive et d’abord limitée à un public restreint. Aujourd’hui il est, en Russie, assez connu, certaines de ses poésies ont été accompagnées de musique, et d’autres sont particulièrement célèbres parce qu’elles expriment certains aspects de la nature humaine, mais aussi de la Russie.

    Remercions donc les éditions Interférences de contribuer à faire connaître la poésie de Tiouttchev et félicitons-la du choix qu’elle a fait parmi les poèmes. On peut ainsi lire une nouvelle traduction de Larmes humaines :

    « Larmes humaines, ô larmes des hommes, / Vous coulez au matin et au soir de la vie … / Vous coulez inconnues, vous coulez innombrables, / Vous coulez invisibles et intarissables, / Vous coulez comme coulent les ruisseaux de pluie, / Dans la profonde nuit, à la fin de l’automne. »

    Certes, ce livre contient moins de poèmes que les traductions précédentes de Paul Garde et de François Cornillot, mais si le but est de faire connaître Tiouttchev, l’ensemble est appréciable, et l’on peut même découvrir dans ce recueil une poésie qui n’était pas encore traduite, à savoir celle consacrée à Cicéron.

    Si Tiouttchev a été un grand poète, il a été surtout apprécié en son temps pour ses engagements en faveur de la politique russe, en tant que cette dernière défendait la chrétienté, contre tout ce qui venait de l’influence révolutionnaire. Sophie Benech reconnaît que Tiouttchev était même plus connu en tant qu’écrivain politique qu’en tant que poète : « De fait, ses interlocuteurs, qui font tous partie du grand monde, le connaissent plus pour ses prises de position et ses écrits slavophiles et absolutistes que pour ses vers lyriques ». Le livre édité par les éditions Interférences n’aborde pas cet aspect de l’oeuvre de Tiouttchev, les traducteurs antérieurs non plus, François Cornillot ayant privilégié les poésies se rapportant à la nature, ou plutôt aux éléments de la nature, comme l’eau, l’arbre etc. voyant dans l’évocation de la nature, la présence d’une transcendance, et quant à Paul Garde, tout ce qui est politique a été mis par lui de côté, au prétexte, à notre avis discutable, que les poésies politiques ou de circonstance sont « bien inférieures aux autres ».

    Le penseur contre-révolutionnaire

    Si donc le livre Poèmes de Tiouttchev publié par les éditions Interférences a le mérite d’attirer l’attention du public français sur une partie de l’oeuvre du poète russe, il ne sera peut-être pas inutile, dans les quelques lignes qui suivent, de présenter, brièvement, l’autre aspect de l’oeuvre de Tiouttchev, à savoir ses idées politiques et philosophiques. Tiouttchev a écrit la plupart de ses poésies en langue russe, il a cependant rédigé ses textes politiques dans une langue française pure et élégante, telle qu’on la pratiquait dans les milieux russes cultivés du XIX° siècle. On peut les lire aujourd’hui dans le tome 3 des Oeuvres Complètes de Tiouttchev, éditées à Moscou.

    Par sa position de diplomate russe à Munich, ville dans laquelle il a été en poste pendant vingt-deux ans, Tiouttchev était bien placé pour connaître les événements européens tant politiques que philosophiques. Il a connu personnellement Schelling et d’autres écrivains allemands, notamment Heine avec lequel il fut assez proche, mais c’est surtout à la culture française que Tiouttchev était sensible. François Cornillot, que nous avons cité plus haut comme traducteur, a aussi écrit une thèse volumineuse sur notre poète russe, dans laquelle il note qu’à Munich « On se tenait au courant de tout ce qui se publiait à Paris, on lisait surtout les journaux de Paris […] ». Ce n’est pourtant qu’à son retour définitif en Russie, que Tiouttchev développe ses analyses politiques.

    Il existait alors, si nous nous permettons de schématiser, deux grands courants chez les penseurs russes, ceux qui souhaitaient que la Russie s’inspirât de l’Occident, et ceux qui, à l’inverse, voulaient que la Russie restât elle-même, et fût fière de sa propre culture et de sa religion orthodoxe. Ce deuxième courant regroupait ceux que l’on nommait les slavophiles, dont la figure la plus célèbre a été Khomiakov. Il est à noter que, d’une certaine manière, cette division se retrouvait dans la politique du gouvernement russe, hésitant entre la défense des intérêts de la Russie et une influence non négligeable de l’Occident.

    Tiouttchev se range résolument dans le camp des slavophiles et exalte les valeurs de la Russie en tant qu’empire chrétien :

    « La Russie est avant tout l’empire chrétien : le peuple russe est chrétien non seulement par l’orthodoxie de ses croyances, mais encore par quelque chose de plus intime encore que la croyance. Il l’est par cette faculté de renoncement et de sacrifice qui fait comme le fond de sa nature morale. »

    Le poison de la Révolution

    Contemporain de la Révolution française de 1848, Tiouttchev en dénonce les effets, lesquels ne concernent pas seulement la France, mais l’Europe entière. C’est tout l’Occident qui est contaminé par le poison révolutionnaire : « la Révolution est la maladie qui dévore l’Occident ». Cette révolution cependant n’est que la suite de celle de 1789, c’est donc de cette dernière qu’il importe de montrer le principe, si l’on veut comprendre ses suites au siècle suivant. La Révolution française de 1789 n’est pas seulement un événement politique au sens où il ne s’agirait que d’un changement de régime, elle est bien plus que cela : elle est une insurrection contre la religion.

    « La Révolution est avant tout anti-chrétienne. L’esprit anti-chrétien est l’âme de la Révolution ; c’est là son caractère essentiel. Les formes qu’elle a successivement revêtues, les mots d’ordre qu’elle a tour à tour adoptés, tout, jusqu’à ses violences et ses crimes, n’a été qu’accessoire ou accidentel ; mais ce qui ne l’est pas, c’est le principe anti-chrétien qui l’anime […] ». La Révolution est donc un événement capital dans l’histoire de l’humanité : « Ce qui fait de la première révolution française une date à jamais mémorable dans l’histoire du monde, c’est qu’elle a inauguré pour ainsi dire l’avènement de l’idée anti-chrétienne aux gouvernements de la société politique

    Comment se caractérise cet anti-christianisme ? C’est bien sûr le refus de toute transcendance divine, mais Tiouttchev décrit cela d’une manière saisissante, en empruntant un mot fort employé dans la philosophie de son époque, d’abord par Fichte, puis par Stirner, un mot dont l’usage et les ravages n’ont fait que grandir jusqu’à nos jours, un mot pourtant tout simple : le moi.

    « Le moi humain, ne voulant relever que de lui-même, ne reconnaissant, n’acceptant d’autre loi que celle de son bon plaisir, le moi humain, en un mot, se substituant à Dieu, ce n’est certainement pas là une chose nouvelle parmi les hommes, mais ce qui l’était, c’est cet absolutisme du moi humain érigé en droit politique et social et aspirant à ce titre à prendre possession de la société. C’est cette nouveauté-là qui est appelée la Révolution française. »

    Tiouttchev ne manque pas de fustiger certaines caractéristiques de la mentalité révolutionnaire. L’idée de souveraineté du peuple tout d’abord, laquelle n’est que le corollaire du triomphe du moi, car qu’est-ce que le moi, sinon « cette molécule constitutive de la démocratie moderne » ? La souveraineté du peuple n’est rien d’autre que « celle du moi multiplié par le nombre ». Autre caractéristique de la mentalité révolutionnaire : la prétendue neutralité religieuse de l’État républicain, neutralité qui n’est qu’un mensonge : « Rétablissons donc la vérité des faits. L’État moderne ne proscrit les religions d’État que parce qu’il a la sienne, et cette religion, c’est la Révolution ».

    Selon Tiouttchev, tout l’Occident est corrompu ou va être corrompu par l’idéologie révolutionnaire ; si la France a une grande part de responsabilité, l’Allemagne n’est pas en reste, une philosophie destructive y a « complètement dissous toutes les croyances chrétiennes et développé, dans ce néant de toute foi, le sentiment révolutionnaire par excellence : l’orgueil de l’esprit, si bien qu’à l’heure qu’il est, nulle part peut-être cette plaie du siècle n’est si profonde et plus envenimée qu’en Allemagne ».

    La Russie chrétienne

    Face à cette débâcle, à cet Occident où l’on voit « la civilisation se suicidant de ses propres mains », que faire ? Avoir confiance en la Russie, ou plus exactement dans la mission qu’a la Russie, et cette mission est de sauvegarder la chrétienté. Il s’ensuit qu’entre les idées révolutionnaires venant de l’Occident et la chrétienté russe, il ne peut qu’y avoir conflit. Tiouttchev le dit sans aucun détour :

    « Depuis longtemps il n’y a plus en Europe que deux puissances réelles : la Révolution et la Russie. Ces deux puissances sont maintenant en présence, et demain peut-être, elles seront aux prises. Entre l’une et l’autre il n’y a ni traité, ni transaction possibles. La vie de l’une est la mort de l’autre. De l’issue de la lutte engagée entre elles, la plus grande des luttes dont le monde ait été témoin, dépend pour des siècles tout l’avenir politique et religieux de l’humanité. »

    Que la Russie ait confiance en sa mission, cela implique qu ‘elle soit forte politiquement et militairement, et l’expression de cette puissance doit d’abord être la reconquête par les chrétiens de Constantinople, vœu qui était aussi celui de Joseph de Maistre.

    Tiouttchev espère l’union des deux Églises, la latine et l’orientale, et il va de soi qu’en tant que russe et orthodoxe, cette union est comprise comme le retour de l’Église de Rome vers l’orthodoxie.

    Les événements ont durement éprouvé les idées de Tiouttchev. De son vivant, comme beaucoup d’autres Russes, il a été fort dépité quand, lors de la guerre entre les Russes et les Turcs, le gouvernement russe a finalement laissé Constantinople aux Turcs. Plus tard, l’issue de la guerre entre Napoléon III et la Russie a été aussi amèrement vécue. Qu’eût pensé Tiouttchev s’il avait pu voir les événements de 1917 et l’emprise du communisme en Russie? Sans doute eût-il vu là une épreuve, une douloureuse épreuve. Il est aisé de voir cependant que si Tiouttchev s’est trompé pour ce qui est de l’histoire immédiate, ce qu’il a écrit de son temps n’est pourtant pas sans intérêt pour le nôtre. Le triomphe de l’individualisme, ce que Tiouttchev appelait le moi, est patent en Occident, tout autant que sa décadence spirituelle, bien que les prémices d’un renouveau puissent çà et là apparaître. En Russie, ce renouveau est d’une certaine manière déjà là, ou du moins en marche, puisque le pouvoir politique semble s’appuyer de plus en plus sur la chrétienté. Tiouttchev avait donc raison de croire en la Russie. Une de ses poésies les plus célèbres l’exprime, voici la traduction littérale qu’en donne Sophie Benech :

    « La Russie ne se comprend pas par l’intelligence / Ni ne se comprend à l’aune commune / Elle possède un statut propre / La Russie, on ne peut que croire en elle. »   

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    Domaine natal du poète à Ovstoug

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  • Un nouveau Régime ? par Hilaire de Crémiers

    (Voici l'analyse politique d'Hilaire de Crémiers, parue dans le numéro de juin de Politique magazine)

    « L’ affaire » dont tout le monde parle, ne peut qu’inciter à une nouvelle réflexion politique. Car ce sont les principes mêmes du régime qui sont remis en cause.

     

    La République est fondée sur la vertu. Le mérite individuel en est la loi fondamentale. C’était, ce sont encore, en France, les « grands » principes, appris des « grands » auteurs, qui se répètent dans les « grands » discours et qui s’enseignent dans toutes les « grandes » institutions. 

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    Concupiscent ?.... 

    Les Français qui ne sont pas tous des sots, savent bien qu’il y a les mots et la chose ; et les mots sont loin d’être en adéquation avec la chose. L’histoire républicaine est un long tissu de scandales qui sont autant de défis à la vertu, le plus corrompu osant s’offrir comme le plus méritant. Mais il n’empêche que l’idée apprise domine les esprits, même encore aujourd’hui, de telle sorte que tous les vainqueurs électoraux – et c’est vrai singulièrement en France en raison de cette éducation spéciale à la chose politique – se croient toujours comme auréolés d’une sorte de gloire vertueuse qui manifeste et authentifie leurs mérites essentiels. Cela se vérifie à tous les niveaux mais plus encore quand il s’agit du sommet de l’État. Des Giscard, des Mitterrand, des Chirac, des Sarkozy, parce qu’ils ont obtenu 52 ou 53 % des voix des votants, ont aussitôt conçu le plus sincèrement et le plus narcissiquement du monde cette idée simple et forte qu’ils étaient les meilleurs. Il suffit de les voir et de les écouter. Sur ce point, ils sont tous inaccessibles au doute. L’heureux élu est persuadé d’être, du coup, le plus intelligent, le plus doué, peut-être le plus retors mais en l’occurrence pour le bien qui se confond avec sa personne, et en tout cas le plus apte à exercer la fonction. Voilà ce qu’ils pensent. C’est leur mérite qui, dans leur esprit, est justement couronné ; et ce mérite leur donne le droit de commander aux autres et de disposer du sort, voire de la vie de leurs compatriotes. Intime et inébranlable conviction qui les autorise aussi à s’affranchir des règles ordinaires, pourvu que l’apparence soit sauve. Dieu seul sait ce qu’il leur a fallu faire pour parvenir là où ils sont parvenus. Et pour y rester.

     

    La théorie des « meilleurs »

    On dira que c’est partout pareil. En Europe, en Asie, en Amérique… et en Afrique donc ! Soit. Cependant c’est en France que le discours a été le plus fondamentalement, le plus rationnellement théorisé, même si les excès n’y sont pas nécessairement les pires, les satrapes de tous les pays se faisant facilement concurrence dans ce genre d’exercices. Les Français croient volontiers ce qu’on leur enseigne et leur répète à longueur de temps en la matière, en dépit des innombrables affaires et des ténébreuses pratiques qui leur prouvent régulièrement le contraire. Jusqu’où ne va pas la crédulité ? Eh bien, il n’y a pas à hésiter à l’affirmer : c’est cette théorie même du pouvoir qui est inepte. Radicalement inepte. Peut-être admissible, tolérable, même efficace, pour des raisons historiques, en certains pays, en certains États, elle est absurde en France. Comme l’expérience le montre amplement. La seule, première et grande réforme constitutionnelle que la France doit faire, c’est sur ce point précis : trancher avec cette conception du pouvoir suprême. Et c’est possible.

     

    « L’affaire » révélatrice

    Voilà un homme qui passait pour extrêmement doué, charmeur et aux yeux de tous par conséquent essentiellement bon. Ses mérites véritables ou supposés, sans cesse loués, avaient été les meilleurs agents de ses succès électoraux comme de ses ambitions politiques que chacun, même l’adversaire, trouvait justifiées. Il avait été ministre – ministre de gauche ! – qualifié d’excellent et disculpé, en raison de ses capacités reconnues et de sa valeur personnelle, de tous les soupçons de prévarication dont il avait pu être accusé au cours de sa carrière, en cela semblable à tant d’autres depuis les origines de la République. Combien d’affaires jamais élucidées ?

    Il avait été nommé directeur du Fonds monétaire international, toujours en raison de ses mérites et de ses compétences, si incontestables que tout le monde convenait, y compris le président de la République française, son adversaire théorique, que nul n’était mieux placé que lui pour remplir cette fonction. En raison précisément de ce qu’il était.

    Et pour cette même raison de ce qu’était sa personne, depuis plus d’un an, le monde politique et médiatique trouvait normal, donc légitime, qu’il puisse revendiquer la première place en France. 

    Il était fait pour devenir, pour être président de la République. 

    À ses côtés, les plus nobles et les plus justes ambitions pensaient à s’effacer devant sa candidature. L’évidence était là. Aux dires des sondages, le pays même, presque dans son ensemble, semblait approuver cette préférence.

    Homme d’argent, homme de sexe, cela se savait, mais qu’importait ! 

    La République se retrouvait en lui et lui reconnaissait ce mérite républicain, cette vertu non moins républicaine qui suffisait à justifier la prétention.

    Et patatras ! La révélation fut cruelle. Surtout pour les hommes du système. Ce n’était pas tant la femme de chambre que la définition même de la République qui était chiffonnée, forcée, violée, profanée. Où est la liberté dans une répugnante agression ? Où est l’égalité dans une relation violemment imposée ? Où est la fraternité dans le mépris que supposent de tels actes ? Où la vertu ? Où le mérite ? Où la République, cette République pourtant déjà si intimement assimilée à l’homme qui avait toutes les chances d’en devenir le président, l’incarnation même du régime ? La sélection républicaine ne l’avait-elle pas déjà… sélectionné ? Alors ? 

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    Qui dirigera le FMI ? Cette question a été sûrement agitée dans les coulisses du G8 de Deauville...

     

     

    Une autre solution

    Quelle démonstration a contrario ! Qui ne comprendrait maintenant que ce système de sélection pour la plus haute fonction nationale peut et doit être remis en cause ? Il est voué à l’échec ; il le sera de plus en plus. Cet homme ou un autre, une autre, la réalité n’en changerait pas pour autant. Le président de 2012 n’arrivera à rien qu’à empirer les affaires de la France, quel que soit son mérite ou sa vertu. La question n’est pas là ; le système est inapproprié : nul, par ce mode de sélection défectueux, n’est en situation de remplir correctement la fonction de chef de l’État. Le système a donné le sentiment de marcher pendant tant d’années par un jeu d’illusions successives, mais avec l’usure du temps il est fini. « L’affaire » aura été une illustration supplémentaire de sa perversité.

    Cette « affaire » ne contient-elle pas, d’ailleurs, un aveu ? 

    N’est-ce pas l’homme lui-même qui, par une sorte « d’acte manqué », parfaitement réussi, comme les plus fins observateurs le notent, a, d’une certaine manière, contrarié le destin ? Voulait- il vraiment de cette présidence française ? Voulait-il même encore de la direction du FMI ? Tout ce qu’il dit et écrit depuis l’incident est fait pour laisser la plus excellente image ; il le fait à dessein, car mieux qu’un autre il sait ce que les meilleurs experts savent, à savoir que les peuples et les marchés, étrangement mais profondément conjurés et sans même s’en douter, sont sur le point de réduire à néant la politique qu’avec tout un réseau de financiers et de politiques, surtout français, il a mené au cours de ces dernières années pour sauver la zone euro et le système monétaire international. Aucun homme politique, aucun financier n’est de taille aujourd’hui à affronter la situation qui se crée peu à peu et de manière irréversible. Comment arriver à se défausser ? Terrible question, surtout si l’on veut rester comme celui qui… Oui, encore et toujours, le meilleur, le parfait et, en quelque sorte, le plus méritant et, pourquoi pas, le plus vertueux des dirigeants ! Cela au moment précis où tout commence à s’effondrer.

    Esquive consciente, inconsciente, devant une responsabilité trop lourde et qui lui permettra de se refaçonner une innocence. Il lui sera plus facile de prouver qu’il a été méconnu dans sa vertu profonde qui va bien au-delà des sinistres équivoques de « l’affaire » dont d’autres, bien sûr, ont profité ! Mais oui !

     

    Un autre régime ?

    Ainsi il aura échappé aux lendemains tragiques qu’au plus profond de lui-même il se refusait à assumer, au prix certes d’un déshonneur… mais dans l’espoir d’une réhabilitation qui se conjuguerait avec un regret universel de ce qu’il fut et de ce qu’il aurait pu être… Est-ce trop inventer ? Tout va si vite. Comme celui de Deauville, les sommets internationaux vont se succéder sous la pression terrible de nécessités de plus en plus prégnantes… et jusqu’où ? Les lecteurs de Politique magazine se souviendront qu’ils auront été avertis.

    Crise financière, crise institutionnelle, crise de régime, tout est là demain que compliquent encore les catastrophes naturelles. Il importe assez peu de savoir si Strauss-Kahn sauvera son image. La seule question qui vaille la peine d’être posée, est de savoir si le système dont nous vivons et qui va à sa perte, mérite d’être maintenu. La réponse devient de plus en plus clairement : non. Aucun candidat ne saura transformer sa mécanique. Ce n’est pas une question d’hommes, c’est une question d’institutions.

    Il faut à la France un autre régime. Celui qu’elle a connu pendant mille ans, évidemment modernisé, comme il a toujours su le faire, en s’adaptant aux temps, vrai nouveau régime où la responsabilité politique au sommet de l’État est totalement assumée, en vertu d’une charge historique dont la légitimité tient au service rendu et non à quelques concours de discours et de votations. L’exercice de la fonction suprême en charge du bien commun exige le temps, la vision et la stabilité dans le progrès. A l’heure où, comme le souligne excellemment un Jean-Christophe Fromantin, maire de Neuilly, dans un essai remarquable intitulé Mon village dans un monde global (François Bourin éditeur, 160 p., 19 €), il convient pour tirer notre pays de son marasme de renouer avec un fort sentiment d’appartenance et de mieux ancrer dans ses propres territoires les réelles capacités de notre pays afin de mieux affronter le développement inéluctable de la mondialisation et s’en faire même un atout, il apparaît qu’une ambition française ne peut plus se concevoir qu’avec la plus tenace et la plus intelligente des politiques dans le long terme. Aucun parti politique, aucun homme, aucune femme, si remarquable, si vertueux, si supérieur aux autres soit-il, n’est à la hauteur de l’enjeu. Leur échec est programmé. Ce n’est pas eux dont la France a besoin. Puissent un jour les Français au bout de l’épreuve accepter de retrouver leur histoire en retrouvant leur dynastie. ■

  • La mort du Politique ?

     

    Par Yves Morel 

    Partis. Cinquante ans après 1968, le constat s’impose : il n’y a plus rien ni dans l’ordre de la politique, ni dans l’ordre de la pensée. Le temps des idéologies contestatrices aboutit au règne de la pensée unique.

     

    « Appelons de nos vœux les sceptiques, s’ils doivent éteindre les fanatismes », écrivait Raymond Aron à la fin de L’Opium des intellectuels, en 1968. Admirable témoignage de sagesse en un monde alors dominé par les idéologies, les utopies, les contestations, les critiques exacerbées de tout y compris des critiques elles-mêmes, exténué par les surenchérissements révolutionnaires dans tous les  domaines. Il n’était alors question que de révolution, non seulement en politique et au sein de la hiérarchie sociale, mais dans la morale, les modes de vie, le langage, l’art et la littérature. L’heure était à la subversion générale et à l’édification du socialisme, dont on débattait inlassablement pour savoir s’il devait être social-démocrate à la scandinave, communiste à la soviétique, communiste à la chinoise, révolutionnaire mais non communiste, libertaire, étatiste ou autogestionnaire. Et, comme nous avions alors le sentiment que les « Trente Glorieuses » allaient durer indéfiniment, on annonçait l’avènement d’une « civilisation des loisirs », stade ultime de la société de consommation.

    La puissance du phénomène idéologique était telle que l’épreuve de la dure réalité, à partir du milieu des années 1970, ne l’entama pas. Ainsi, en 1981, au moment où nous nous débattions dans ce qu’on appelait alors « la crise », nos compatriotes crurent, que parce qu’ils venaient de porter Mitterrand et le PS au pouvoir, ils allaient sortir de la période de difficultés des années Giscard-Barre grâce à la mise en œuvre du canulardesque « socialisme à la française ».

    L’avènement de la pensée unique

    On sait ce qu’il advint de ce « socialisme à la française », qui se changea, à partir de 1984, en social-libéralisme, puis en libéralisme tout court, le PS s’alignant sur le nouvel ordre économique mondial sans frontières, fondé sur les seules lois du marché – et de la spéculation. Simultanément, le pouvoir socialiste organisa une véritable révolution culturelle tout ensemble droit-de-l’hommiste, universaliste, hostile aux nations, polyethnique, pluriculturelle, moralement relativiste, individualiste, hédoniste, sur laquelle la droite la plus bête du monde s’aligna, jetant par-dessus bord ses idées et jurant ses grands dieux qu’elle professait les mêmes « valeurs » que ses adversaires. L’idéologie devenait pensée unique et conditionnait toute la société, s’érigeant en justification et en supplément d’âme de l’ordre existant. Un ordre économique mondial indifférencié, individualiste, libéral, fondé sur des principes prétendument humanistes et universels, considérés comme les seules valeurs en dehors de celles du marché, tel se présente notre monde actuel, et tel est l’aboutissement, en France, du « grand mouvement » de mai 1968, si cher à notre président de la République.

    Daniel Cohn-Bendit, libéral libertaire, chantre de l’Europe fédérale, adulateur du capitalisme sans patrie ni frontières ni complexe, contempteur de toute morale, prompt à persifler la gauche « ringarde » comme la droite conservatrice, plus enclin à la promotion du mariage homosexuel et de la GPA qu’à la défense des victimes ou des laissés pour compte du marché – ces ratés, ces inadaptés, souvent vieux et aigris –, est le roi de la fête. Très controversé et critiqué à vingt-trois ans, il fait figure de miroir moral de notre société à soixante-treize.

    Plus de grandes causes, désormais, plus de grandes idées ou d’idéaux. La politique, aujourd’hui, en France comme en Europe et en Amérique du Nord, se ramène à la gestion du nouvel ordre économique qui ne connaît d’autre principe que la loi du marché et d’autres valeurs que celles cotées en Bourse. Depuis longtemps, nos compatriotes ont répudié les valeurs fondatrices de notre civilisation : la religion chrétienne, la famille, l’amour de la terre natale, le respect de notre culture et de notre identité, bref, tout ce que d’aucuns considèrent comme les vieilles lunes de la vieille droite. Mais ils ont également pris la mesure de la vanité du socialisme qu’ils avaient tant chéri. Ne leur restent que leurs yeux pour pleurer et leur fameux « héritage » des « Lumières » et de la Révolution : les droits de l’homme et la démocratie, à quoi ils s’accrochent, comme l’y invitent en permanence leur École, leurs médias et leur intelligentsia. Aussi, nos hommes et femmes politiques, et les plumitifs et discoureurs d’émissions télévisées exaltent-ils sans arrêt « les valeurs de la République », car, en dehors de ces mots creux, plus rien n’existe. Ils vont même jusqu’à se chamailler pour la propriété de ces mots : rappelons-nous que toute la gauche, il y a trois ans, a essayé de faire interdire à l’UMP, par voie de justice, l’appellation « Les Républicains », alors qu’en 1977, personne n’avait vu d’inconvénient à ce que les giscardiens décidassent de ACTU-8.jpgs’appeler « parti républicain », cependant que leurs élus allaient devenir des « députés républicains » ; ceux de notre actuelle droite se voient imposer, quant à eux, le label de « députés Les Républicains » ou LR. En s’appelant « Les Républicains », la droite commettait le crime de paraître dénier aux autres leur légitimité républicaine. Cela dit, ses adversaires ont indirectement raison en ceci que cette appellation ne veut pas dire grand-chose.

    La désaffection des Français à l’égard de la politique

    Cette insignifiance, ce vide intellectuel, moral et politique, caractérisent d’ailleurs les dénominations de la plupart des partis actuels : le Front national va devenir le « Rassemblement national », cependant que Florian Philippot fonde, pour le concurrencer, une formation dénommée « Les Patriotes » ; à l’autre extrémité de l’éventail politique, on trouve « le Parti de Gauche », inclus dans « La France insoumise ». Tous ces gens semblent vouloir rivaliser de fadeur, d’inconsistance, et, finalement, de médiocrité.

    Il est vrai que la désaffection de l’électorat à l’égard de grandes idées qui se sont fracassées contre le réel – le socialisme sous ses diverses formes – ou qu’il a rejetées depuis longtemps au point de les avoir complètement oubliées – les valeurs de la civilisation chrétienne, l’amour de la patrie, l’attachement à une société organique forte et naturellement solidaire – les oblige à se tenir « au plus près des gens », comme ils aiment à dire, et de leurs préoccupations concrètes. D’où ces appellations sans prétention qui paraissent vouloir dire qu’on se bat pour la défense des intérêts concrets des Français, et non pour des chimères… avec le succès que l’on constate : lors du deuxième tour de la présidentielle de 2017, seuls 43% des électeurs inscrits ont daigné voter ; et ce chiffre a encore régressé à 42,65% au second tour des législatives qui ont suivi. Les Français ne croient plus du tout en la politique, ni aux idées. 

    Des politiciens sans conviction et terre à terre

    actu10-768x513.jpgDès lors, nos politiciens n’ont de cesse de vouloir démontrer leur souci de relever notre pays et de redresser sa situation économique et financière dans l’intérêt de ses habitants. Et, grands seigneurs, ils acceptent le concours des bonnes volontés de tous bords. Foin des convictions, faisons-les rentrer dans le champ privé de la conscience individuelle, et attelons-nous à la grande œuvre de reconstruction. C’est ce que disait Sarkozy lorsqu’au tout début de son quinquennat, il invitait des socialistes de cœur à se joindre à lui pour opérer cette dernière tout en conservant leurs convictions propres. C’est ce que fait Macron, grand bénéficiaire de la désaffectation des Français pour les vieux partis, et dont la LREM et le gouvernement mêlent gens de gauche et de droite.

    L’échec prévisible de Macron

    Notre président se pose en nouveau Napoléon appelé à moderniser notre pays afin de restaurer sa grandeur et sa prospérité. Mais il ne restaurera rien du tout, pour la simple raison dirimante qu’il ne peut s’affranchir des contraintes du monde où il évolue, et dont il est d’ailleurs l’un des plus beaux fleurons, comme le montre tout son parcours de haut fonctionnaire, puis de banquier. Son rôle historique ne peut être autre chose que celui d’adaptateur de notre pays à l’ordre économique mondial. C’est parce qu’ils l’ont cru capable de l’assumer que les chefs de gouvernement occidentaux l’ont encensé peu après son entrée à l’Élysée. Et ils entendent bien qu’il n’en sorte pas. Ainsi, Angela Merkel, comblée par l’arrivée d’un président capable enfin de réformer la France pour la plier aux exigences budgétaires de l’Europe, regimbe lorsque Macron prétend, en outre, donner un nouveau souffle à la construction européenne, notamment dans le sens d’une plus grande solidarité entre ses membres. C’est que, pour elle comme pour la plupart des dirigeants européens, l’Europe n’est qu’une zone de libre-échange, et pour les pays du sud et de l’est de notre sous-continent, une manne et un filet de sécurité. Macron, en l’occurrence, s’attache à un idéal auquel plus personne ne croit, et s’accroche à cette lubie française consistant à considérer l’Europe comme le moyen pour la France de recouvrer sa puissance en en prenant la tête et ce, alors qu’elle a en perdu le leadership depuis plus de deux décennies. Sa volonté de relancer l’Europe est vouée à l’échec. Quant à sa volonté de transformer la France pour la sauver, elle n’aura d’autre résultat que de la soumettre encore un peu plus aux lois du marché. Telle est la fonction objective et indépassable de toutes ses réformes en cours ou annoncées, qu’il s’agisse de celles du Code du Travail, de celle de la SNCF ou de celle des retraites. Macron l’avoue d’ailleurs quelquefois à mots couverts. Ainsi, en 2016, alors ministre de l’Économie, il récusait le protectionnisme préconisé par Philippot, durant un débat l’opposant à celui-ci, et préconisait implicitement la soumission au libre-échange total en essayant d’y tirer notre épingle du jeu, mais en sachant très bien les dommages qu’il infligeait à notre économie. Se rêvant en moderne Bonaparte, Macron n’est que le président d’une France qui rentre dans le rang de la mondialisation et, toujours plus, abdique sa souveraineté et sacrifie l’intérêt national et les droits sociaux des Français. Et il tire avantage de l’absence d’une opposition qui ne saurait être crédible, dans la mesure où elle s’étaie sur le rejet des fondements mêmes de notre civilisation et l’enracinement obsessionnel en une conception de l’homme et du monde foncièrement matérialiste et, par là même, de nature à priver nos compatriotes de l’élan spirituel nécessaire à l’affrontement des grands défis de l’histoire.

    La situation politique actuelle nous montre avec éclat que, privée de transcendance, la politique devient impuissante lors des grandes épreuves. Car, dès lors que les idéologies ont fait faillite, elle s’amenuise jusqu’à s’identifier à la simple gestion de l’existant. À cet égard, notre avachissement politique actuel est riche d’enseignements.  

     

    Jean-Luc Mélenchon : l'opposition au système qui renforce le système. Politique magazine

    Jean-Luc Mélenchon : l’opposition au système qui renforce le système.  

     Yves Morel

    Docteur ès-lettres, écrivain, spécialiste de l'histoire de l'enseignement en France, collaborateur de la Nouvelle Revue universelle 
  • 5G: «Ne compter que sur la technologie est aussi dangereux que de rompre avec elle», par Paul Sugy.

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    Le philosophe Olivier Rey, chercheur au CNRS, prône un équilibre entre la course technologique des nations et une société plus conviviale, donc moins connectée.

    Objet d’un vif débat de société, la 5G cristallise l’opposition déjà ancienne entre les partisans d’un progrès technologique débridé et ceux qu’un accroissement exponentiel de notre puissance numérique inquiète. Pour gagner du temps, de nombreux indécis appellent à un moratoire, en attendant le rapport que rendra l’Anses au printemps 2021. Mais, pour le philosophe Olivier Rey, le débat est en réalité miné par de fausses promesses et des postures hypocrites de part et d’autre.

    1.jpgCeux qui affectent la prudence ne pourfendent la 5G que pour mieux encenser la génération précédente (4G), tandis qu’en face, l’alternative est caricaturée: c’est ça… ou le retour de la lampe à huile. Il faudrait cependant être bien naïf, estime-t-il, pour juger que le paradigme technologiste ne bouleversera pas en profondeur notre rapport au monde. Ainsi propose-t-il une troisième voie, médiane: celle d’un délicat équilibre entre la course technologique nécessaire aux nations pour conserver leur puissance et protéger leurs citoyens, et la demande légitime d’une société plus conviviale, donc moins connectée, où se réfugieront ceux que cette course effrénée épuise.

     

    La 5G est au cœur d’un débat de société virulent. Elle suscite le soutien résolu de nombreux acteurs économiques, mais aussi les craintes d’une frange importante de l’opinion. Au-delà des inquiétudes sur la santé, se dessine le refus d’une fuite en avant technologique effrénée. Alors, faut-il avoir peur de la 5G? Et est-il bien raisonnable de vouloir «arrêter le progrès» ?

    Olivier REY. – L’âge d’or que les Anciens plaçaient dans le passé, les Modernes l’ont situé dans l’avenir, et ils ont beaucoup compté sur le progrès scientifique et technique pour l’atteindre. Mais l’ambiance générale, aujourd’hui, s’est assombrie : l’emprise technologique croissante sur le monde est désormais, de façon générale, moins perçue comme promesse de salut que comme menace sur le devenir de la terre et de ses habitants. L’état critique de la situation est reconnu par les champions même du progressisme: Emmanuel Macron ne dit pas que la 5G améliorera nos vies, il dit qu’elle est nécessaire pour relever les «défis que nous avons sur tous les secteurs», indispensable pour affronter «la complexité des problèmes contemporains». Autrement dit, seules la poursuite et l’accélération de l’innovation technologique («on doit aller plus loin plus fort») peuvent nous permettre de surmonter les difficultés que deux siècles d’innovation technologique nous ont léguées. La 5G est l’un des sujets autour desquels le débat, entre les partisans de l’innovation à outrance et ceux qui estiment que cette fuite en avant est mortifère, est susceptible de se cristalliser.

    Le progrès technologique répond à des enjeux géostratégiques. Abandonner la course reviendrait à renoncer définitivement à être une puissance mondiale, alors que la concurrence internationale devient de plus en plus âpre. A-t-on dès lors vraiment le choix?

    Depuis la Révolution industrielle, la puissance se trouve de plus en plus rigoureusement indexée au degré de développement technologique. En conséquence, tout groupe humain qui se laisse distancer dans la compétition technologique court le danger d’être dominé ou asservi par les groupes qui font la course en tête. Par le passé, des peuples qui vivaient tranquillement chez eux se sont trouvés brutalement colonisés par des Européens, simplement parce que ceux-ci disposaient, grâce à leur avance technique, d’armes beaucoup plus efficaces. Si la Chine s’est lancée avec tant de frénésie dans la course technologique, c’est pour laver les affronts qu’elle a subis durant le «siècle de l’humiliation» (1850-1950). Aussi, bon gré mal gré, sommes-nous désormais obligés d’entretenir le mouvement, sous peine d’être écrasés. Même les amish, qui ne refusent pas la technique mais, face à tout nouveau dispositif disponible, se demandent si son adoption serait bénéfique ou non à leur vie communautaire et, sur ce fondement, ont repoussé la plupart des technologies modernes, même les amish donc, dépendent de ces technologies, à travers la police et l’armée américaines qui assurent leur sécurité. Sans une telle protection, la durée de vie d’une communauté amish serait quasi nulle.

    Certains élus écologistes défendent au contraire une posture hostile, par principe, à toute innovation, semblant juger que la technologie est mauvaise, et même, presque peccamineuse. Faut-il «moraliser» à ce point notre rapport à l’industrie et à la technique?

    L’opposition entre un président de la République qui soutient l’innovation pour l’innovation – «oui, la France va prendre le tournant de la 5G parce que c’est le tournant de l’innovation» -, et des élus sous étiquette écologiste qui mettent en doute l’opportunité d’une telle décision n’est, comme un texte récent du groupe Pièces et main d’œuvre (PMO) (blog de réflexion sur les rapports entre société et technologie, ndlr) l’a relevé, qu’«un jeu de rôles bien réparti et mis en scène». Emmanuel Macron défend sa position en présentant ceux qui s’y opposent comme des primitivistes: en substance, nous avons le choix entre lui et la lampe à huile. En face, ceux qui se disent écologistes ne sont pas fâchés d’une telle rhétorique, qui les fait passer pour d’intransigeants critiques de la technologie, alors qu’ils en sont de zélés accompagnateurs. Dans un récent débat qui l’opposait à Cédric O, secrétaire d’État au numérique, Julien Bayou, secrétaire national d’EELV, fustigeait le mépris dont, selon lui, le président de la République aurait fait preuve «à l’égard de bon nombre de personnes qui malheureusement n’ont pas accès à la 4G». Réclamer la fibre en zone rurale ainsi que la 4G pour toutes et tous me semble assez loin de la condamnation par principe de la technologie. En réalité, en réclamant un «moratoire» de quelques mois sur la 5G, les Verts ne font que mettre en scène leur «différence» par rapport à Macron dans l’espoir de capter un électorat qu’ils lui disputent.

    En résumant la question à une opposition duale entre progressistes et défenseurs du «modèle amish», le chef de l’État a-t-il caricaturé le débat? Existe-t-il une voie médiane? Peut-on se méfier de certaines innovations technologiques sans prôner pour autant le retour à l’âge de pierre?

    J’ai évoqué les dangers auxquels un groupe humain «en retard» dans le développement technologique s’expose, par rapport à ceux qui disposent de toute la puissance que ce développement confère. Cela étant, les efforts de chacun pour bien figurer dans la compétition risquent aussi, dans une montée aux extrêmes, de ruiner la terre et de conduire à un désastre général. Dans les termes de René Girard: «Chacun se croit victorieux dans un univers où tout le monde est en pleine défaite et déroute.» Telle est donc notre situation: contraints de continuer la course, tout en redoutant que les choses tournent mal. Face à cela, on aimerait trouver, comme vous le dites, une voie médiane – courir, mais pas trop. À emprunter cette voie on risque, malheureusement, de moins cumuler les avantages que les inconvénients: confronté à des concurrents qui se livrent à fond, celui qui trottine se trouve vite irrémédiablement distancé, tout en s’étant malgré tout trop éloigné de son foyer pour y trouver encore abri.

    Un autre type de conciliation serait imaginable: non pas un moyen terme, mais la coexistence de deux attitudes contraires au sein d’un même État. Pendant que certains continueraient la course technologique, afin de conjurer le risque d’écrasement par des concurrents trop puissants, la possibilité serait ménagée à d’autres de vivre de façon plus «conviviale», au sens qu’Ivan Illich donnait à ce terme (par convivial, il faut ici entendre ce qui est proportionné aux facultés naturelles de l’homme, est à leur mesure, en contraste avec des dispositifs surpuissants qui humilient ces mêmes facultés). Au lieu d’une confrontation entre les «technologistes» et les «conviviaux», une forme de coopération s’établirait entre les deux – les premiers étant les garants de la sécurité de tous tant que la dynamique actuelle se poursuit, les seconds constituant, du fait de l’autonomie supérieure de leurs modes de vie, un socle extrêmement précieux en cas de crise générale, sans compter la sauvegarde de facultés humaines fondamentales. Je suis conscient de ce qu’une telle proposition a d’utopique, pour toutes sortes de raisons. Reste que par rapport à l’utopie d’un salut par l’innovation à tous crins, ou celle d’un abandon général de la technologie, je trouve la mienne plus sensée.

    Jugez-vous que la technique est neutre, ou pensez-vous au contraire que les nouveaux paradigmes technologiques que nous sommes en train d’inventer vont profondément redéfinir notre rapport au monde et à nous-mêmes?

    Lorsqu’une nouvelle technologie apparaît, on ne voit d’abord que ce qu’elle ajoute aux possibilités existantes. Cependant, au fur et à mesure que cette technologie se diffuse, le monde se reconfigure en fonction d’elle, et retire la possibilité de vivre sans y avoir recours. Dans un premier temps par exemple, le téléphone portable a permis à ceux qui le souhaitaient de joindre un interlocuteur ou d’être joint par lui, où qu’ils se trouvent. Mais rapidement, il est devenu obligatoire d’avoir un téléphone portable, sous peine de marginalisation sociale. Or il est clair que pareille prothèse modifie le rapport au monde, aux autres, à soi-même – quel que soit par ailleurs le contenu des propos échangés par cet appareil. On nous dit qu’avec la 5G, la quantité de données circulant pourra être multipliée par 100 ou 1 000: il faudrait être singulièrement niais pour penser que la forme même de nos existences ne se trouvera pas profondément affectée par ce changement d’ordre de grandeur dans les flux de data, destiné à répondre aux nouveaux usages que les sectateurs du numérique anticipent. La numérisation tous azimuts est indispensable pour tenir son rang dans la compétition mondiale, assurent les progressistes.

    Cependant, tandis que les nations relèvent des «défis», leurs populations risquent, à force de ne plus savoir rien faire sans assistance numérique, de régresser. La 5G ne fera pas qu’accélérer le débit des données, elle accélérera aussi la baisse déjà avérée des capacités physiques (qui, chez les jeunes, ont décru d’un quart en quarante ans, selon une étude relayée par la Fédération française de cardiologie), et des capacités intellectuelles (le QI moyen baisse depuis vingt ans). Les cadres de la Silicon Valley le savent, qui essaient de protéger leurs enfants en les envoyant dans des écoles sans écrans, pendant que les firmes qui les emploient promeuvent le numérique partout, tout le temps.

    Quels éléments de discernement aimeriez-vous proposer à ceux qui, ingénieurs, entrepreneurs, investisseurs, politiques, prennent leur part dans ces décisions qui, même lorsqu’elles sont le fait d’initiatives privées, façonnent notre monde commun?

    Tout laisse penser que le XXIsiècle sera chaotique. Pas des petites secousses, des ébranlements de grande ampleur. À quoi devrons-nous faire face? Quelles seront nos conditions de vie? Nul ne le sait. Mais justement: dans cette incertitude, il me paraît peu judicieux de mettre tous ses œufs dans le seul panier technologique. Si rompre avec la technologie est dangereux, ne compter que sur elle l’est tout autant. Dès lors, les promoteurs de la société numérique devraient, pour leur bien même, veiller à préserver la possibilité de vivre sans s’en remettre aux dispositifs dont ils s’emploient à mailler le monde. Ils ne devraient pas pratiquer la politique de la terre brûlée, qui condamne à la mort sociale quiconque ne suit pas le mouvement. Dans Les Mots, Sartre remarque que «dans nos sociétés en mouvement, les retards donnent parfois de l’avance». Comme le lion de la fable est bien aise de trouver le rat capable de le débarrasser, avec ses solides petites dents de rongeur, du filet qui le paralyse, il se pourrait que les adeptes de la énième G regrettent un jour de ne plus trouver, à l’entour, un être humain sachant encore se débrouiller sans G aucune.  

     

    Olivier Rey

    Chercheur au CNRS, Olivier Reya enseigné les mathématiquesà l’École Polytechnique et est aujourd’huimembre de l’Institut d’histoire et de philosophie des sciences et des techniques (CNRS-Université Paris1 Panthéon-Sorbonne). Olivier Rey est l’auteur de nombreux essais et romans salués par la critique, comme Quand le monde s’est fait nombre (Stock, coll.«Les Essais», 2016). Son dernier ouvrage, Leurre et malheur du transhumanisme (Desclée de Brouwer,2018), a obtenu le prix Jacques-Ellul 2019.

    Source : https://www.lefigaro.fr/vox/

  • Dans votre quotidien cette semaine...

    LAFAUTEAROUSSEAU sans inscription.jpg= Le sujet d'actualité du lundi de Louis-Joseph Delanglade, qui exprime notre position sur les sujets importants du moment, et fixe la position de notre quotidien, sera suivi du Grain de sel de Scipion : L'humanisme qui tue... Puis, nous continuerons à évoquer d'autres sujets de l'actualité immédiate : la suppression des Départements (Hollande est "contre", évidemment, clientélisme oblige : on imagine la quantité invraisemblable de postes que la sur-administration permet aux Partis de distribuer (avec ses 243 Sous-Préfectures, plus de 110 Préfectures avec les "maritimes" et les "policières" etc...); le forum de Davos, vitrine de l'Argent-Roi qui régente le monde, et nous, les royalistes, seuls et authentiques révolutionnaires, qui voulons remettre l'Argent à sa place...;  Valls en chute libre dans les sondages, pris au piège de la tenaille infernale dans laquelle s'est enfermé le PS, élu par les nouveaux électeurs qu'il s'est lui-même choisis,  des immigrés très souvent antisémites (par "solidarité palestiniennne"); François-les-gallipettes, subissant une "vacherie diplomatique" d'anthologie, entendue par tous, du Pape François à qui il offrait...une vie de Saint François d'Assise... 

    etre esclave.JPG
    = Mardi, ce sera la nouvelle "patte de Catoneo", consacrée à la Traite et à la Repentance : Jim Crow, Wazza ?
     
    A l'origine de cette réflexion, un livre : Etre esclave. Afrique-Amériques, XVème-XIXème siècle, (Edition La Découverte, 2013); et une émission de France Culture, qui pendant une heure, le lundi 20 janvier, a laissé parler Eric Mesnard et Catherine Coquery-Vidrovitch au sujet de l'esclavage...
     
    Un bon coup de patte, bien senti et bien envoyé, à celles et ceux qui veulent nous voir battre notre coulpe à tout propos et sur tous sujets... 
     
     
     
     
     
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    airbus A 380.JPG= Mercredi ce sera la continuation de la Suite économique de François Reloujac, qui  prend pour sujet, cette fois-ci, 2014 : Turbulences à venir... :

    Pour survivre dans la bataille avec Boeing, Airbus est obligé de vendre à perte...

     Un contexte international compliqué, où le faible cours du dollar influe directement sur les mauvais chiffres de l'exportation française, des expatriations par dizaines de milliers...

    Cette nouvelle année s'annonce mal si aucune bonne résolution n'est prise par le gouvernement... 


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    boutang reprendre le pouvoir.JPG= Jeudi, on écoutera l'enregistrement de la conférence sur Pierre Boutang, et son Reprendre le Pouvoir, prononcée par François Marcilhac lors du dernier Camp Maxime Real del Sarte (Camp de formation pour les jeunes, organisé chaque été).

    C'est un très utile travail de bonne vulgarisation qui a été réalisé là, et qui permettra à beaucoup, sans aucun doute, de mieux appréhender cet auteur - difficile, il ne faut pas le cacher - et d'y trouver de solides arguments sur lesquels on peut fonder une action sérieuse et profonde...

    Et, pour aller dans le sens de cet exposé, nous en profiterons pour redonner les liens vers les deux Grands Textes de Pierre Boutang que nous proposons en permanence dans notre Catégorie Grands Textes (le n° 3, extrait de la Postface de Reprendre le Pouvoir; et le n° 33 Qui sera le Prince ?); ainsi que - une nouvelle fois - le lien vers ce document rarissime : la vidéo de la conférence de Pierre Boutang, L'horizon politique : le Prince chrétien, donnée à Marseille, le 31 mars 1988...

    La formation doctrinale sur des bases sûres et solides, voilà bien ce dont on ne peut en aucun cas faire l'économie, et ce qui est bien la première et la plus saine façon d'agir et de militer...

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    A LA ROSE PHOTO.jpgEnfin, vendredi, on reviendra une fois de plus sur la façon dont certains journalistes traitent l'information et, surtout, parlent différement des gens impliqués dans telle ou telle affaire selon leur patronyme...

    On sait ce qui est arrivé à Nicolas Bernard-Buss, comment il a été traité par certains humoristes (?) comme Stéphane Guillon : on verra, vendredi, que lorsque les délinquants sont d'une certaine origine géographique, les pires actes sont simplement "une idée idiote", là où, s'il s'était agi d'un Stéphane ou d'un Nicolas, le même journaliste aurait hurlé au retour menaçant de la bête immonde...

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    =Et, bien sûr, on réagira "en temps réel" à l'actualité immédiate, et on parlera de tout ce dont on ne sait pas encore que l'actualité nous amènera à évoquer... Et toutes les notes précédentes seront accompagnées de notes plus courtes, plus ramassées, permettant de réagir et de donner notre sentiment face à tel propos, tel fait, tel article qui feront la "une" de la semaine à venir... 

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    capture d'ecran blog.jpg= On aura aussi, comme d'habitude le samedi, notre note en deux parties :

    1. D'abord, une revue des Blogs, de Facebook, des magazines  et d'ailleurs;

    2. Et, ensuite, on donnera les liens que des lecteurs ont envoyés :

    N'hésitez pas à nous faire parvenir des liens sur des sujets qui vous ont paru importants...   

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    stade de france.JPGOn aura, évidemment, les Ephémérides, car c'est "tout cela, tous ceux-là, aussi, la France" : de la mort de Charlemagne à l'inauguration du Stade de France... en passant par : la mort de Charles IV et la fin des "Capétiens directs", après 340 ans...; l'ouverture des négociations du Traité d'Utrecht; la Grande Chartreuse détruite par un incendie; la

  • Mehdi Nemmouche, l'assassin islamiste ”présumé” de Bruxelles, arrêté à Marseille : scandaleux journaleux...

    1. Le Système fait vivre la France sur un volcan : nous le disons régulièrement dans ces colonnes, à temps et à contre-temps, en posant toujours la même question : combien sont-ils, après des décennies d'une immigration insensée et la braderie permanente de la nationalité française, imprudemment accordée à des masses de gens toujours aussi nombreuses, ces "jeunes" radicalisés, terroristes "dormants" pour l'instant mais prêts à passer à l'acte à tous moments ? La réponse est facile à donner : ils sont des dizaines, des centaines, voire des milliers et peut-être des dizaines de milliers le moment venu, l'effet d'entraînement jouant alors à plein. 

    mehdi-nemmouche-.jpg

    François Hollande admet le chiffre de 700 "français" (!) partis djihader en Syrie. Le juge Trévidic déclare, lui, qu'il y a "des dizaines de Mohammed Mehra potentiels". La quasi certitude est que, chez ces "français légaux", français "de plastique" mais non "de coeur et d'esprit", la contagion et l'excitation aidant, c'est par milliers, voire par dizaine de milliers, qu'il faut compter. Nous ne jouons pas à faire peur, ni à nous faire peur : libre à ceux qui préfèrent, tels les autruches, enfoncer leur cou le plus profondément possible dans la terre; nous préférons, nous, voir la réalité en face : les 1.500 zones de non-droit et/ou dangereuses (chiffre lui-même sous-évalué...) recensées sur toute la France par les services de sécurité regorgent d'assassins potentiels et de terroristes faciles à recruter. Ces zones, où circulent de nombreux "jeunes" - français "de plastique" par la grâce du Système - passés souvent par la case prison, où ils ont été "radicalisés", sont autant de poudrières prêtes à sauter à tout moment...

    2. Ce premier rappel étant fait, passons au second, qui s'impose, lui aussi : pour ce qui est de Mehdi Nemmouche, l'assassin "présumé" de Bruxelles - selon la terminologie d'usage... - on aura de nouveau apprécié le scandaleux comportement de trop de nos journalistes, dans les rangs desquels se trouvent de très nombreux bobos/gauchos/trotskos, qui confondent carte de presse et carte de parti...

    Dès que l'on a appris les quatre assassinats de Bruxelles, "on" nous a dit que, bien évidemment, "la piste d'extrême-droite" n'était pas à exclure. Et d'une. Puis, lorsqu'on a appris, dimanche matin, que le tueur était arrêté, "on" nous a claironné, presque joyeusement pour certains et certaines, qu'il était "français". Si les télés permanentes (BFM et i-Télé) d'abord, les grandes chaînes ensuite, ne l'ont pas dit mille fois, qu'il était "français", c'est qu'elles l'ont dit deux mille fois...

    Et, puis, et puis..., il a bien fallu se rendre à l'évidence. "On" a d'abord publié la photo (voir plus haut) qui ne laissait guère de doute; mais il a fallu attendre, ce dimanche, jusqu'à 15 heures - sur BFM, par exemple - le point presse du procureur pour qu'on ait, enfin, le non de ce bon français, lâche assassin qui partait probablement, son forfait accompli, se réfugier chez lui, en Algérie : Mehdi Nemmouche...

    Ca, c'est du bon travail de jounaleux bobo/gaucho/trotsko ! De la bonne vieille langue de bois, et du bon petit politiquement correct, à vomir...

    Sans compter le long temps de parole - renouvelé - donné à l'avocate du pauvre chou, qui n'a pas tari d'éloges sur lui, sur sa "gentiilesse" (sic ! les victimes apprécieront...), sur son "intelligence" (re sic ! comme dit Zemmour, "...avec vous, la banlieue c'est Normale-Sup !..."), sur le fait que ses passages répétés en prison n'ont rien arrangé (comme dirait Molière : "le pauvre homme !"...) et autres insanités du même acabit.

    On le savait, mais on vient d'en avoir encore un lamentable exemple : il y a bien quelque chose de pourri dans notre "paysage audio visuel", comme disent les jargonautes... 

    Quant à la sécurité nationale, et pour terminer par ce sujet : aux grands maux, les grands remèdes ! Le Système ayant truffé le territoire de terroristes en puissance, il faut, maintenant, déminer le dit territoire. Cela ne peut passer que par un changement de politique et par un changement de lois.

    * Changer de politique, c'est-à-dire cesser de faire entrer en France, chaque année, 200.000 personnes, venant en majorité d'Afrique du Nord ou sub-saharienne. De toute évidence, depuis les calamiteux "décrets Chirac" sur le regroupement familial, l"entrée massive et continue de populations par trop différentes de nous a formé, sur tout le territoire national, un terreau favorable, un vivier naturel pourrait-on dire, au radicalisme islamiste; il faut arrêter ces flots de nouveaux-venus inassimilables, et engager, au contraire, une action ferme de retour dans leur pays d'origine de ceux qui n'ont rien à faire chez nous... Facile à dire, mais ce sera plus difficile à faire : le Système a créé, là, à la France, qui ne manque déjà pas de grosses difficultés, un très gros problème supplémentaire...

    * Et puis, aussi et surtout, changer de lois, c'est-à-dire nous doter de l'arsenal législatif qui permettra la déchéance massive de nationalité et l'expulsion immédiate du territoire de toute personne qui, de près ou de loin, sera mêlée, de quelque manière que ce soit, à quelque acte de terrorisme ou de délinquance que ce soit.

    Il y en a qui ne voudraient pas de cela ? Soit, mais, alors, qu'ils ne viennent pas se lamenter, demain, si... et quand...

  • Dans votre quotidien, cette semaine...

                    LAFAUTEAROUSSEAU sans inscription.jpg                             "Le pouvoir de corrompre"...  Pierre de Meuse analysera la sinistre affaire de mœurs qui secoue le Royaume Uni, avec les révélations sur Sir Jimmy Savile, personnage médiatique de premier plan aujourd'hui décédé, objet de nombreuses plaintes pour pédophilie.

          Pour ce qui est de l'étranger, après l'article de Jorge Soley Climent sur la situation critique en Catalogne, Pascual Albert, de Valence (Espagne), ami de longue date de notre famille de pensée, nous livrera ses réflexions sur le devenir de l'Espagne, et de ses grandes régions historiques : L'Espagne, à la croisée des chemins. C'est pour bientôt !

          A propos du "mariage gay", et suite à une réflexion inexacte d'un député socialiste, on reviendra sur cette "majorité" minoritaire des socialistes, et à ces élections du Sytème qui souffrent d'une double tare : leur manque de représentativité, et leur insincérité...  

            Toujours à propos du "mariage gay", et après les propos du Cardinal Vingt-Trois - impeccable sur le sujet, depuis le début... - on écoutera l'opinion d'Hilaire de Crémiers sur "La leçon du Grand Rabbin Gilles Bernheim".

           On continuera à Lire Jacques Bainvillevendredi : une très originale réflexion sur le Kosovo; ou, comment la religion et la spiritualité (en l'occurrence, orthodoxe) peuvent fournir à un peuple opprimé et envahi une armature morale et mentale telle qu'il parvient, même plusieurs siècles après, à se retrouver lui-même et à revivre... ; puis, pour la semaine suivante, un éloge de "M. Georges Mandel" qui dit exactement la même chose que ce que vous pourrez lire bientôt dans notre prochain Album Léon Daudet (en préparation...); et qui montrera aux ignorants que l'Action française toute entière entretenait les meilleures relations avec bon nombre de personnalités de la communauté juive -et non des moindres, de Joseph Kessel à Georges Mandel - l'antisémitisme de peau ayant toujours été rejeté, dénoncé et combattu en tant que tel par le royalisme français.

             Et on gardera le samedi dorénavant, comme on en a pris l'habitude maintenant - autre nouveauté de l'année... - pour une sorte de revue des Blogs, de Facebook et d'ailleurs : cette semaine, le droit à... ne pas émigrer, par Benoït XVI (le Blog Zenit, le monde vu de Rome); le mouvement ASSAWRA qui écrit à François Hollande, qui s'est fait le caniche de Benyamin Netanyahu; Fabrice Madouas qui parle des libéralités de Manuel Vallls en matière d'immigration (sur le Blog de Valeurs actuelles); Jérôme Besnard qui présente (dans Le Monde) les "rebelles et contre-révolutionnaires"; l'ouverture du compte Twitter et Facebook de Famille et Liberté...

             On aura, évidemment, les Ephémérides, car c'est "tout cela, tous ceux-là, aussi, la France" : de la consécration de l'Abbaye de Saint-Martin du Canigou à la mort de Charles de Gaulle, en passant par la mort de Lescure, le Roussillon qui devient français, l'inauguration du Musée du Louvre et la mort de Charles X; avec Marie Curie et Alphonse Laveran, François Couperin et Gabriel Fauré, Guillaume Apollinaire et Albert Camus...

            Notre rubrique Activités France entière (mise à jour quotidiennement) a pris son rythme de croisière et propose en permanence une trentaine d'activités diverses : "sitôt reçu, sitôt publié", elle est à votre disposition pour annoncer et répercuter tout ce qui se fait chez vous, "sans nostalgie ni folklore", pour un royalisme intelligent. Lafautearousseau se veut la "maison commune" de toutes les bonnes volontés royalistes, fidèles à la Maison de France.

            Bienvenue à nos 36 nouveaux "Amis", cette semaine, sur notre Page Facebook Lafautearousseau Royaliste : elle a accueilli son 1.515ème "ami", et nous nous sommes fixés comme objectif, pour commencer, d'avoir 5.000 "amis": il nous faut annoncer, rendre compte, expliquer... à toujours plus de gens, et cette Page est l'un des moyens d'y arriver. Aidez-nous donc à la développer, en vous inscrivant vous-mêmes, en lui suscitant des "amis", en la faisant connaître autour de vous.

              Et, bien sûr, on réagira "en temps réel" (comme on dit dans le jargon) à l'actualité immédiate, et on parlera de tout ce dont on ne sait pas encore que l'actualité nous amènera à évoquer.   

            Bonne lecture, et bonne semaine sur votre quotidien ! 

  • Dans votre quotidien, cette semaine...

                       LAFAUTEAROUSSEAU sans inscription.jpg                   On a beaucoup parlé de lui (entre autres...) lors de notre premier Café politique, marquant  l'ouverture de notre Enqête sur la République, avec Gérard Leclerc : on lira l'analyse de Pierre de Meuse sur Rousseau sans illusions.

           Pour ce qui est de l'étranger, après l'article de Jorge Soley Climent sur la situation crtitique en Catalogne, Pascual Albert, de Valence  (Espagne), ami de longue date de notre famille de pensée, nous livrera ses propres réflexions sur le devenir de l'Espagne, et de ses grandes régions historiques : L'Espagne, à la croisée des chemins. C'est pour bientôt !

            Cette semaine, Champsaur traitera de la laïcité. Le plan de l’exposé est, comme toujours, de remonter aux données historiques, seule approche incontestable, loin des polémiques; et quand on cherche on découvre beaucoup sur l’origine des mots et leur vie pendant 2.000 ans... 

           On pourra Lire Jacques Bainvillevendredi : reporté deux fois, à cause de l'abondance des sujets, on commencera par les réflexions Coups d'Etat du Dix-Huit Brumaire et du Deux Décembre, en attendant, pour la semaine d'après, une très originale réflexion sur le Kosovo; ou, comment la religion et la spiritualité (en l'occurrence, orthodoxe) peuvent fournir à un peuple opprimé et envahi une armature morale et mentale telle qu'il parvient, même plusieurs siècles après, à se retrouver lui-même et à revivre... ; puis, pour la semaine suivante, un éloge de "M. Georges Mandel" qui dit exactement la même chose que ce que vous pourrez lire bientôt dans notre prochain Album Léon Daudet (dont vous apprenez, ainsi, incidemment, qu'il est en préparation...); et qui montrera aux ignorants que l'Action française toute entière entretenait les meilleures relations avec bon nombre de personnalités de la communauté juive -et non des moindres, de Joseph Kessel à Georges Mandel - l'antisémitisme de peau ayant toujours été rejeté, dénoncé et combattu en tant que tel par le royalisme français.

             Et on gardera le samedi dorénavant, comme on en a pris l'habitude maintenant - autre nouveauté de l'année... - pour une sorte de revue des Blogs, de Facebook et d'ailleurs : cette semaine, la guérilla contre l'inutile "ayraultport" de Notre-Dame-des-Landes (Blog de Patrice de Plunkett); Reynald Sécher a reçu le Prix des Droits de l'Homme (Lettre de Vendée chouannerie); Islam : et si Ménard posait "la" bonne question (Blog de Robert Ménard); quatre mythes sur les Croisades réfutés dans Itinerarium; et un artricle de la Revue parlementaire qui appuie le projet de reconstruction de Saint Cloud (Blog de Laurent Bouvet) ...

             On aura, évidemment, les Ephémérides, car c'est "tout cela, tous ceux-là, aussi, la France" : du martyre de Saint Quentin à la mort de Claude Lévi-Strauss, en passant par la consécration de la première église de Vézelay et la dédicace de Saint-Hilaire de Poitiers; la naissance de Boileau; la naissance de Jean Cottereau, dit Jean Chouan; l'échafaud pour "Brissot la guerre" comme pour Olympe de Gouges; la naissance de Folco de Baroncelli Javon, aux origines de la Camargue moderne; le Mystère II, premier avion français à franchir le mur du son; le deuxième tir réussi (après l'échec du premier) pour Ariane V; et d'autres choses encore...

            Notre rubrique Activités France entière (mise à jour quotidiennement) a pris son rythme de croisière et propose en permanence une trentaine d'activités diverses : "sitôt reçu, sitôt publié", elle est à votre disposition pour annoncer et répercuter tout ce qui se fait chez vous, "sans nostalgie ni folklore", pour un royalisme intelligent. Lafautearousseau se veut la "maison commune" de toutes les bonnes volontés royalistes, fidèles à la Maison de France.

            Bienvenue à nos 32 nouveaux "Amis", cette semaine, sur notre Page Facebook Lafautearousseau Royaliste : elle a accueilli son 1.479ème "ami", et nous nous sommes fixés comme objectif, pour commencer, d'avoir 5.000 "amis": il nous faut annoncer, rendre compte, expliquer... à toujours plus de gens, et cette Page est l'un des moyens d'y arriver. Aidez-nous donc à la développer, en vous inscrivant vous-mêmes, en lui suscitant des "amis", en la faisant connaître autour de vous.

              Et, bien sûr, on réagira "en temps réel" (comme on dit dans le jargon) à l'actualité immédiate, et on parlera de tout ce dont on ne sait pas encore que l'actualité nous amènera à évoquer.   

            Bonne lecture, et bonne semaine sur votre quotidien ! 

  • ”Jeudi noir”, ”Dalo”, ”Abbé Pierre” : ces associations ”mal-généreuses” qui se trompent et qui nous trompent...

    immigration jeudi noir.jpg

     Où est "l'humain", là ? Où est ce qu'on appelle, au choix, l'humanité ou l'humanisme ? Ces pauvres malheureux sont ballotés et manipulés par deux calculs également misérables :

    * le calcul sordide de ceux qui veulent se faire du fric, et toujours plus de fric, en exploitant une main d'oeuvre bon marché, qui accepte des conditions de travail indignes et dégradantes, parcequ'elle est misérable : là, les immigrés sont considérés comme de "la chair à profit"...

    * le calcul idéologique de ceux qui veulent diluer une vieille nation historique qui, malgré tout, résiste encore et toujours à leur entreprise de Révolution (on se demande bien parfois comment !); en délocalisant par centaines de milliers, par millions, ces populations, les gauchos/bobos/trotskos pensent se trouver une masse de remplacement à l'ex classe ouvrière, et faire disparaître les traits caractéristiques de la France, "peuple européen, de race blanche, de culture grecque et latine, et de religion chrétienne" (pour reprendre le juste propos de De Gaulle). En la remplaçant par "un agrégat inconstitué de peuples désunis", selon la formule de Mirabeau...

            Que le calcul soit économique ou politique, de toutes façons les deux se rejoignent : et, entre autres, dans le mépris de ces malheureux, que l'on met hypocritement en avant, alors que c'est pour se servir d'eux qu'on les fait venir...

            La seule politique humaine - et efficace... - est d'aider ces pauvres gens chez eux, et pas de les déraciner, ajoutant ainsi un traumatisme et un problème supplémmentaire à ceux qu'ils affrontent déjà. On n'a rien à leur offrir ici : ni travail, ni logement, ni avenir vrai et décent.

            Délocaliser ainsi des masses, comme on le fait depuis 1975, est une erreur économique et humaine; et c'est une horreur morale, même si "la morale" n'est pas, "és-qualité", du ressort de ce Blog...

            Poussés par la misère, ils sont des centaines de milliers, des millions à s'être trompés (ou à accepter de se laisser tromper...), en croyant au "mirage européen"; à avoir été trompés par ceux - dont nous parlions plus haut - qui leur ont fait miroiter ce mirage. Maintenant que le mal est fait, il faut le réparer. Ces personnes font partie du "troisième tiers" de l'immigration : à côté du premier tiers de ceux qui  se comportent correctement, et qui n'ont donc rien à redouter; et à côté du deuxième tiers de ceux qui se tiennent mal, et qui doivent être déchus de la nationalité française et expulsés sans faiblesse. Pour ces centaines de milliers, ces millions de malheureux, qui ont cédé au mirage européen, il n'y a qu'une seule solution raisonnable et humaine : l'aide au retour au pays, leur permettre de retrouver leurs racines, de s'épanouir chez eux, plutôt que d'être parqués ici dans des ghettos aux taudis insalubres, sans perspectives réelles de formation, de travail, d'avenir, de bonheur personnel...

            Cette politique d'aide raisonnée au retour s'étalera forcément sur plusieurs années; elle devra évidemment être menée dans le respect des personnes et leur dignité : mais elle est, justement, la seule politique qui redonnera à toutes ces personnes leur dignité et une vie, même modeste, peut-être pauvre, mais au moins décente, chez eux; et non ces conditions inhumaines et déplorables dans lesquelles les associations que nous citons (et d'autres...) les maintiennent, croyant par là faire acte de générosité ou de charité, alors qu'elles ne font que perpétuer des structures et un état de fait vicié à la base. On a délocalisé la pauvreté d'Afrique ? Mais déplacer un problème, cela n'a jamais été le résoudre, c'est l'aggraver au contraire, en ajoutant aux problèmes premiers ceux liés au déracinement, à l'adaptation - difficile souvent, impossible, parfois... - à d'autres moeurs, d'autres us et coutumes, d'autres façons de vivre tout simplement...

            Un dirigeant de l'une de ces associations dont nous parlons dans notre titre disait, sur France info : "Je connais une famille qui dort sous la tente depuis deux ans". Si cela est vrai, il est clair que cette famille serait mieux à Bamako, à Dakar ou n'importe où ailleurs, en Afrique, mais "chez elle". Rendre ses enfants à l'Afrique qui en a besoin; leur permettre de "vivre et travailler au pays" en les aidant à y retourner, et à s'y faire une place : voilà une politique bien plus généreuse, bien plus charitable, et surtout bien plsu intelligente que l'agitation brouillonne d'associations qui pratiquent en parole le mot de générosité, mais dont l'action aboutit, dans les faits, à un désastre humain, dont ceux que l'on prétend aider sont les premières victimes...

            Il est urgent de remettre les idées à l'endroit, et de créer un électrochoc salutaire pour certains... 

    PS : il faut savoir que ce point devue est partagé par de nombreuses personnes, "à gauche", où il y a beaucoup de gens sensés, réalistes, raisonnables... : Hubert Védrine, par exemple, écrit ceci (La mêlée mondiale, Fayard, février 2012, page 471) :

    dalo,jeudi noir,abbé pierre"...En fait, l’immigration peut être une chance dans certaines conditions. Elle est presque toujours un problème. Mais elle est souvent une tragédie pour les personnes et déstabilisante pour les pays. Aussi, quand les élites dénoncent le repliement sur soi, la fermeture, la « haine des autres » censée être ressentie par les populations,etc., elles se retrouvent dans la même posture moralisatrice et impuissante que sur la mondialisation, l’Europe ou l’euro. Les élites devraient réaliser qu’elles ont perdu le pouvoir d’intimider ou même de convaincre par leurs sermons non seulement les classes défavorisées, depuis longtemps, mais aussi, maintenant , les classes moyennes..."

  • Le point de vue d’un spécialiste : La Libye, de la dictature à l’anarchie

            Ce point de vue est celui de Pascal NARI, dont nous lisions, déjà, les analyses, remarquablement informées et toujours pertinentes, il y a des années, dans Aspects de la France. Les Provençaux qui lisent lafautearousseau, et quelques autres, se souviendront qu’il fut, aussi, invité par l’Union Royaliste Provençale, à prendre la parole au Rassemblement Royaliste des Baux de Provence, non plus sous son nom de plume, mais sous le sien propre, et ils n’auront pas oublié sa connaissance approfondie des questions touchant au monde islamique et, corrélativement, à l’immigration en France et en Europe. Sa compétence, son expérience personnelle, riche et étendue, son érudition et sa sagesse en faisaient un intervenant réellement qualifié.

            Voici que, dans le numéro 2833 d’Action française 2000, nous lisons, de lui, un article qui fait le point sur l’évolution de la situation en Libye. Sa conclusion : « Quel immense gâchis », confirme la position que nous avons prise, ici-même, sur les prétendus printemps arabes et sur l’absurde politique que la France y a menée et qu’elle poursuit, d’ailleurs, contre tout réalisme, en Syrie.

            Nous publions ces lignes éclairantes. Ce nous est, aussi, l’occasion de saluer et de rendre hommage à Pascal NARI et à la qualité de  ses travaux.

    oOo 

    La chute du colonel Kadhafi n’aura pas suffi à pacifier la Libye, loin s’en faut. Privé de gouvernement, le pays semble plus que jamais livré aux passions tribales.

    Ce qui se passe actuellement en Libye, à quelques encablures de l’Europe, dans un pays situé entre l’Égypte et la Tunisie, sur le point de passer sous le contrôle des islamistes, est réellement inquiétant, et ce n’est là qu’un euphémisme.

    On aurait pu penser que le sujet, en raison du rôle déterminant joué par la France dans le renversement du colonel Kadhafi, serait abordé au cours de la campagne électorale. Il n’en est rien. Personne n’en parle, et pour cause : tout le monde, ou presque, a applaudi l’intervention franco-britannique sous couvert d’une interprétation très flexible de la résolution onusienne. Et, probablement, personne ne voudra en assumer les conséquences. Pas même BHL, disparu des écrans et des ondes !

    Messianisme illusoire

    L’objectif était de préserver la population civile libyenne, surtout les habitants de Benghazi, de la répression des forces du dictateur et d’instaurer la démocratie dans le pays. On oubliait que la "démocratie" n’était, ne pouvait jamais être, l’aboutissement d’une révolution sanglante, surtout imposée par des forces étrangères. On ignorait le passé et les structures sociales du pays.

    Les forces d’intervention occidentales se sont, heureusement dégagées et ne sont plus présentes. Le chaos a remplacé la guerre et le sang coule partout. On évalue à plus de 30 000 le nombre de victimes des règlements de comptes entre factions rivales depuis la chute de la dictature. Les prisons sont pleines, on ne sait exactement plus de qui, et la torture y est la règle. Human Rights Watrch, une ONG humanitaire américaine à l’indignation un peu moins sélective qu’Amnesty Intenrational, la dénonce avec force, tout comme Médecins sans frontière, qui a décidé de suspendre ses activités dans le pays.

    À Benghazi, "capitale" de la révolution, la foule a envahi et dévasté le siège du CNT, gouvernement théorique du pays. Son vice-président a été contraint à démissionner et aurait pris la fuite. L’insécurité est totale. À Tripoli, capitale supposée de la Libye, les milices se battent entre elles. Les quartiers changent de main d’un jour à l’autre. Ailleurs dans le pays, un dangereux morcellement tribal s’installe. Les services publics cessent de fonctionner. L’émigration massive vers l’Europe ne va pas tarder à reprendre. On a même observé, ici ou là, la réapparition de slogans en faveur de Kadhafi, dont les partisans auraient pris, au moins pendant quelques heures, le contrôle d’une cité d’importance, Beni Oualid, située à 170 kilomètres de la capitale. Les "autorités" ont déclaré qu’il s’agissait d’un différend tribal. Rien n’est moins sûr.

    Réserve occidentale

    Que peut-il se passer désormais ? Une nouvelle intervention de forces internationales pour rétablir l’ordre et l’autorité est totalement exclue. Elle serait d’ailleurs aussi désastreuse que celle des forces des "coalitions" en Irak et en Afghanistan. Dans le climat économique et politique actuel, tout le monde préfère, à Paris, à Londres, à Washington comme à Rome, que l’on parle le moins possible de la situation libyenne.

    Un CNT fantoche

    Les élections promises et la mise en œuvre d’une constitution "démocratique" viennent d’être officiellement ajournées. Personne n’a protesté à Paris ni ailleurs. Auprès de qui protesterait-on ? Il n’y a pratiquement plus d’autorité et le CNT est de plus en plus une fiction. La Libye risque donc de se tribaliser, de retourner un siècle en arrière, de devenir une seconde Somalie, terreau de l’islamisme radical et de tous les excès. Une centaine de tribus et de nombreux clans pourraient se partager le territoire et se disputer ses richesses. À une dictature certes exécrable, mais qui maintenait la sécurité et l’unité du pays, assurait les services publics et était même susceptible d’évoluer, pourrait succéder une anarchie tribale sanglante, exportatrice du terrorisme islamiste et menaçante pour l’Europe. Quel immense gâchis !

    Pascal Nari

  • Du krach boursier chinois au chaos mondial

     

    Une analyse d'Yves de Kerdrel

    Ces justes réflexions d'Yves de Kerdrel confirment - à l'autre bout de l'échiquier politique, au moins théorique -  l'analyse alarmiste de Jacques Atali que nous avons publiée vendredi dernier. Kerdrel rappelle à juste titre que le Chinois est joueur et qu'il saura plus ou moins s'accommoder de ses pertes. Ce n'est pas là, en principe, la psychologie française ni européenne. Il pointe aussi les lourdes conséquences sociales et politiques, voire géostratégiques, qui peuvent résulter de cette situation. Nous dirons quant à nous qu'après avoir longtemps eu peur que la Chine s'éveille, les nations développées, dont la France, ont sans-doute été bien légères de placer tout à coup en elle, tant de confiance, de se faire sur elle tant d'illusions. L'idéologie libre-échangiste et ultralibérale de nos milieux politico-économiques, l'appétence très court termiste des dirigeants d'entreprise pour des profits industriels et commerciaux accrus par des importations à bas prix, l'illusion que la Chine pouvait devenir sans dommages l'atelier du monde, les délocalisations massives qui s'en sont suivies, et, peut-être, au fond des choses, une certaine lassitude envers le travail, la facilité consistant à le transférer, tout cela compose, face à la situation présente, un tableau que l'on ne peut observer sans beaucoup d'esprit critique. Les désillusions peuvent être très grandes et les conséquences très graves. Il serait à souhaiter que nos sociétés en reviennent en matière d'activité et d'espace écomiques à des notions plus sages et, en un sens, plus modestement réalistes.  LFAR               

     

    1038351-investisseurs-pas-confiance-retour-proche.jpgLe lecteur me pardonnera, je l'espère, de lui assombrir ces belles journées d'été. Au-delà du drame humain qui se joue à Tianjin, je voudrais livrer quelques réflexions sur les conséquences du krach boursier qui frappe l'ensemble des marchés chinois depuis le mois d'avril. En l'espace de quelques semaines, ce sont près de 4 000 milliards de dollars de valeur qui sont partis en fumée. Comme pour l'heure cette déroute boursière est circonscrite à la Chine, et que, de surcroît, le régime communiste abreuve la terre entière de communiqués lénifiants pour assurer que la situation est sous contrôle, personne n'y prête plus grande attention, surtout dans la torpeur de l'été. Pire que cela, certains groupes occidentaux continuent même d'investir massivement en Chine.

    La première conséquence de ce krach boursier est bien sûr pour les investisseurs. À commencer par les actionnaires individuels chinois. Ils sont estimés à 90 millions, appartenant pour l'essentiel à cette classe moyenne qui contribue à la croissance du pays. Une grosse partie de son épargne est désormais partie en fumée. Ce que le Chinois peut accepter, parce qu'il est joueur. En revanche la chute des marchés chinois va entraîner un effet-richesse à l'envers. C'est-à-dire que cette classe moyenne va beaucoup moins dépenser. Ce qui va évidemment affecter une grosse partie de l'industrie locale.

    Déjà les importations de matières premières, notamment le cuivre et le fer, sont au plus bas. Plusieurs usines commencent à tourner au ralenti. Et, bien que le régime communiste tente de camoufler les chiffres, il semblerait que jamais il n'y ait eu autant de chômeurs déclarés que depuis la fin du mois de juin. Cela se justifie aussi par la perte progressive de la compétitivité de la Chine. Un ouvrier chinois est désormais payé plus cher qu'un ouvrier hongrois. Et un ingénieur informaticien à Shanghaï coûte le même prix que son homologue américain. D'où d'importants mouvements de relocalisation qui se produisent depuis quelques mois. C'est ce qui explique que la Banque populaire de Chine a dévalué trois fois la monnaie chinoise, en une semaine, pour un montant total de 5 %. Un geste inédit depuis plus de vingt ans.

    Il n'y a pas besoin d'être grand clerc pour affirmer que ces dévaluations ne résoudront pas les problèmes économiques de la Chine. Le pays a épuisé son modèle de croissance par les exportations sur lequel il s'appuie depuis des décennies. En revanche, les dévaluations vont inévitablement accélérer les sorties de capitaux. De plus, ce changement de parité ne permettra pas d'endiguer la crise de surendettement de l'économie chinoise avec un taux estimé à 240 %, et la crise latente du système bancaire local qui a prêté sans compter aux entreprises chinoises quand le rythme de croissance était supérieur à 10 % et qui va devoir s'adapter d'ici un ou deux ans à un taux de croissance compris entre 3 et 4 %.

    De fait, les Chinois qui avaient accumulé d'importants bons du Trésor américain et même des titres en euros vont être amenés à les liquider dans les semaines qui viennent. Ils auraient d'ailleurs commencé à le faire. Ce qui explique le regain de volatilité sur les places occidentales. Le problème, c'est que ces ventes de panique vont venir interférer en septembre prochain avec le désir de la Réserve fédérale américaine de commencer à remonter ses taux. Dans ces conditions, nous pourrions connaître d'ici peu un véritable krach obligataire annonciateur d'un krach boursier de grande ampleur qui ramènera les actions américaines ou européennes aux niveaux de cours plus en phase avec un monde où il n'existe plus de locomotive économique après dix années de croissance mondiale tirée par la Chine.

    Mais au-delà de ces conséquences purement financières, il faut s'attendre à voir la Chine connaître ses premiers troubles sociaux de grande ampleur, dans la mesure où la croissance économique va ralentir très brutalement. Surtout, le président Xi Jinping, qui avait déclaré il y a moins de deux ans, lors de son accession au pouvoir, « vouloir renforcer le rôle du marché dans l'économie chinoise », risque de connaître des heures difficiles. Le mythe de l'infaillibilité du plénum du Parti communiste pourrait bien s'effondrer. Et dans ce cas, ce serait tout le régime chinois qui serait sur la sellette. Ce n'est peut-être pas un hasard si les Japonais, qui surveillent leurs voisins comme le lait sur le feu, ont commencé à se réarmer de manière inquiétante.

    Sept ans après le krach de l'affaire Lehmann, qui suivait de sept ans celui des valeurs Internet, qui suivait de sept ans le krach des pays d'Amérique du Sud, qui suivait de sept ans le gigantesque krach d'octobre 1987, la loi des cycles pourrait bien frapper à la porte de cette rentrée économique. Encore une crise que François Hollande n'aura pas vue venir !   

    Yves de Kerdrel  -  Figarovox 

     

  • Mieux que la morale, l'indépendance de nos politiques !

     

    Par Mathieu Slama    

    Mathieu Slama appelle ici [Figarovox 2.06] à l'indépendance de nos dirigeants vis-à-vis des milieux financiers, au moment où, face à l'exaspération croissante de l'opinion publique et à la multiplication des affaires politico-judiciaires, le nouveau gouvernement projette de faire voter une loi dite de moralisation de la vie politique.  L'analyse est parfaite - comme en général les analyses de Mathieu Slama - mais son appel est plutôt un vœu pieux, comme il l'écrit lui-même, du domaine de l'espérance. L'indépendance du Chef de l'Etat - au moins lui ! - requiert un autre régime.  LFAR  

     

    3724_2016-06-22_16-49-56_Slama .jpg - Copie.pngIl semble loin le temps où Machiavel écrivait, à propos des princes, qu'ils pouvaient acquérir et conserver le pouvoir à la condition de donner l'apparence de la vertu, tout en usant des vices et ruses nécessaires à la prise et la conservation du pouvoir.

    Donner l'apparence de la vertu seulement, « car les hommes, en général, jugent plus par leurs yeux que par leurs mains, tous étant à portée de voir, et peu de toucher. Tout le monde voit ce que vous paraissez ; peu connaissent à fond ce que vous êtes, et ce petit nombre n'osera point s'élever contre l'opinion de la majorité. » (Le Prince, chapitre 18)

    Tous les grands penseurs du politique, Machiavel, Hobbes, Max Weber ou Carl Schmitt pour n'en citer que quelques-uns, ont établi une distinction nette entre la sphère politique et la sphère morale. Machiavel soulignait par exemple qu'un ministre qui ne songerait qu'à lui-même et à ses propres intérêts dans ses actions ne méritait pas la confiance du Prince, tout simplement parce qu'il n'était pas en mesure de servir l'intérêt du Prince et donc de l'État. Mais dans le même temps, Machiavel précisait que le Prince devait couvrir de richesse et d'attention son ministre pour « le conserver toujours fidèle » (chapitre 22).

    Nous vivons cependant une époque singulière. La colère du peuple français face aux écarts et aux fautes morales des hommes politiques - en particulier pour tout ce qui a trait à l'argent - ne doit pas être prise à la légère. Cette colère s'inscrit dans un contexte particulier que personne ne peut ignorer : l'accroissement des inégalités et l'aggravation de l'écart entre les plus riches et les plus pauvres, soulignées encore récemment dans un rapport publié par l'Observatoire des inégalités.

    Au sujet de la loi de moralisation de la vie publique (rebaptisée « loi pour la confiance dans notre vie démocratique »), certains ont évoqué un phénomène d'américanisation de la société française, d'autres une tyrannie de la transparence, d'autres encore une confusion entre la morale publique et la morale privée. Tout cela est sans doute vrai et mérite d'être entendu, mais comment être aveugle et sourd face à l'exaspération d'un peuple qui assiste, impuissant, aux manœuvres de ses représentants et à la perpétuation de privilèges auxquels il n'aura jamais accès ?

    Jamais les frontières entre le monde de l'argent et le monde politique n'avaient été aussi poreuses, et c'est là que devrait être le véritable enjeu de cette loi. « La politique de la France ne se fait pas à la corbeille » s'écriait le Général de Gaulle, entendant par-là que la sphère politique ne pouvait être soumise et subordonnée aux forces du marché et de l'argent. Que reste-t-il de cette boutade inquiète, à l'heure où nous avons élu un président de la République qui officia plusieurs années au sein de la banque Rothschild, à l'heure où son entourage est composé, pour ne prendre que quelques exemples, d'un ancien lobbyiste d'un grand groupe du Cac40 ou encore d'un ancien lobbyiste de l'assurance ? Qu'en reste-t-il à l'heure où a été nommée, à la tête du ô combien important ministère du Travail, l'ancienne directrice des ressources humaines du groupe Danone ? N'oublions pas non plus la proximité inquiétante du nouveau ministre de l'Environnement avec les grandes multinationales, alors que son métier consiste, en partie, à imposer des normes environnementales contraignantes aux entreprises privées. Et que dire du Parlement qui est devenu, en l'espace de quelques décennies, le lieu de tous les conflits d'intérêts, où les lobbies des grandes entreprises peuvent dénaturer et défaire intégralement une loi au bénéfice d'intérêts privés ? où beaucoup de parlementaires mènent en parallèle une activité de conseil, leur permettant, par leur statut même, de modifier la loi en fonction d'intérêts purement privés ?

    C'est donc moins de moralisation dont la politique a besoin que d'indépendance. Indépendance vis-à-vis de l'argent, indépendance vis-à-vis des entreprises et donc indépendance vis-à-vis des intérêts privés qui minent la démocratie de l'intérieur. Les démocraties libérales meurent de cette confusion des genres et de leur incapacité à établir une hiérarchie nette et indiscutable entre la sphère politique et la sphère économique.

    Cette inquiétude n'est pas nouvelle. Stendhal se moquait des ambitions démesurées des industriels dans un pamphlet célèbre publié en 1832 (« D'un nouveau complot contre les industriels »), s'en prenant notamment au baron Rothschild et à tous ceux qui mettent « le bien public à la suite de leur bien particulier ». Cette réflexion n'a pas pris une ride. Il reste donc à espérer que les parlementaires honnêtes amenderont, lors des discussions au Parlement, la loi de moralisation en renforçant la lutte contre les conflits d'intérêts et l'encadrement strict des liens entre politiques et entreprises. Quitte à aller contre leurs propres intérêts personnels… 

    « Jamais les frontières entre le monde de l'argent et le monde politique n'avaient été aussi poreuses. » 

    Mathieu Slama        

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    Consultant et analyste politique, Mathieu Slama collabore dans plusieurs médias, notamment Le Figaro et Le Huffington Post, où il intervient particulièrement sur les questions de politique internationale. Il est l'auteur de La guerre des mondes, réflexions sur la croisade de Poutine contre l'Occident, (éd. de Fallois, 2016).   

     

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  • Religion & Société • Barbarin: taper sur les cathos, c’est amusant et sans danger

     Le cardinal Barbarin à Lyon, septembre 2016. SIPA

     

    L’ascension du cirque médiatico-judiciaire

    Par Régis de Castelnau

    On sera globalement d'accord avec cet intéressant et courageux billet de Régis de Castelnau [Causeur, 25.05]. L'indécente campagne, tous médias confondus, contre le cardinal Barbarin, rappelle, toutes proportions gardées, les immenses campagnes de même provenance menées naguère contre le pape Benoît XVI. Du Ralliement à la République autoritairement imposé aux Français par Léon XIII [1892], aux sanctions vaticanes contre l'Action française [1926], jusqu'à son immigrationnisme et son mondialisme actuels, l'Eglise Catholique est pourtant allée - sans en tirer aucun profit - de concession en concession au monde moderne, ou postmoderne. Jusqu'à, semble-t-il, avoir tiré un trait sur l'Europe chrétienne, réputée perdue, y compris en haut-lieu par les autorités catholiques les plus conservatrices. Pourquoi attaque-t-on ou défend-on encore l'Eglise ? Sans-doute parce qu'elle est consubstantielle de ce que fut l'Europe chrétienne qu'elle a largement contribué à former et de ce qu'il en reste ; en raison de son ordre interne, qui demeure en grande part étranger au démocratisme, au subjectivisme, au relativisme régnants ; à cause des principes d'ordre moral qu'elle continue d'affirmer à l'opposé de la doxa, parfois avec quelque courage. Sans compter ce qui la définit de supérieur et de transcendant qui fait qu'elle ne peut - sans reniement radical - se prosterner devant le mercantilisme absolu et les idoles matérialistes de la société marchande mondialisée. Celle-là même, pour revenir au cardinal Barbarin, qui n'hésite pas à traîner dans la boue les meilleurs serviteurs de l'Eglise.  LFAR  

     

    DzuWvVmc.jpgLe cardinal Barbarin, prélat pénible, avait fait l’objet l’année dernière d’un joli lynchage, mais qui, surprise, ne fut que médiatique. Parce que la Justice refusa de se laisser instrumentaliser et intimider. Et appliqua le droit. Oui oui, ça arrive. D’où un ferme classement sans suite des plaintes fantaisistes, après une enquête préliminaire fouillée. Malgré les interventions intempestives de membres du gouvernement socialiste, en particulier Manuel Valls, et une campagne de presse acharnée. L’objectif n’était pas de poursuivre et de faire condamner les prêtres ayant commis des abus sexuels. Mais bien de faire un carton sur une autorité ecclésiastique.

    Comme d’habitude, j’étais intervenu pour ma classique dénonciation de ces lynchages médiatico-judiciaires que je n’aime pas trop. Pour être qualifié « d’avocat catholique bien connu », sur Canal+, ce dont je ne me lasse pas.

    On nous annonce aujourd’hui que les « victimes » remettent le couvert, en choisissant, comme par hasard, la procédure de « citation directe » à l’initiative de particuliers. Normalement, c’est le parquet qui diligente les poursuites, mais il existe une particularité en droit pénal français, celle qui « délègue » aux particuliers qui se prétendent victimes la possibilité d’engager des poursuites. C’est une procédure assez rare. En effet la voie normale, après le classement sans suite du parquet, pour ceux qui voulaient continuer à s’acharner, aurait été de saisir un juge d’instruction par le biais d’une plainte avec constitution de partie civile.

    Ainsi ne soit-il pas

    Ah oui, mais non, plutôt que de tomber sur un nouveau bec après une instruction contradictoire, c’est beaucoup plus intéressant d’aller directement à l’audience, de convoquer les médias, de citer des vedettes peoples : en clair, organiser un cirque pour le journal télé et la presse gourmande. Il est probable qu’on y verra, entre autre Flavie Flament chargée par le gouvernement socialiste d’un rapport sur la prescription en matière d’abus sexuels. Sur le plan juridique tout cela ne devrait normalement aller nulle part, et déboucher sur des relaxes. Mais on ne sait jamais, avec une bonne pression médiatique, et comme c’est déjà arrivé, la rigueur juridique pourrait partir en vacances. Et puis de toute façon on va se régaler de voir les mitrés sur le banc d’infamie. Ce qui est quand même l’objectif premier.

     

    Déjà la presse s’est mise au diapason et nous annonce : «Pédophilie: le cardinal Barbarin cité à comparaître en septembre ». Joli, non ? Cela laisse penser tranquillement que monseigneur Barbarin est poursuivi (par le parquet bien sûr) devant le tribunal pour pédophilie. C’est un mensonge, mais si on respecte la déontologie journalistique dans la titraille, on ne va pas s’en sortir. Il y a du papier à vendre et des clics à compter.

    Allez, continuons à taper sur les cathos, c’est amusant, et en plus c’est sans danger. 

    Régis de Castelnau
    avocat

  • Alain de Benoist : Face au prochain krach financier, les États seront impuissants

     

    Alain de Benoist donne ici son analyse de la situation actuelle, économique et financière, de notre univers postmoderne [Boulevard Voltaire - 24.03]. Elle le conduit à envisager la perspective d'un krach voire d'une catastrophe mondiale prévisibles à plus ou moins court terme. Analyse qui concorde parfaitement avec la nôtre, développée depuis plusieurs années dans Lafautearousseau, notamment à travers la réflexion menée par Hilaire de Crémiers dans Politique magazine, ou par Antoine de Crémiers dans différents articles, conférences ou cafés politiques. Conférences et cafés politiques auxquels on pourra se reporter en consultant nos vidéos. LFAR    

     

    1530443371.jpgAucune autorité politique ou financière ne semble avoir tiré les leçons de la grande crise de 2008, qui a failli faire s’écrouler toute l’économie mondiale. Un nouveau krach est-il possible ?

    Il est même probable. Nombre d’économistes s’attendent à une récession générale, à une avalanche de faillites, à un krach obligataire, voire à immense crise d’insolvabilité résultant de l’explosion des dettes accumulées. Certains n’hésitent pas à prédire l’effondrement du dollar, sur fond de retour à la guerre des monnaies et de fragilité grandissante d’un système monétaire dépourvu de tout ancrage extérieur depuis 1971. D’autres n’hésitent pas à parler de désastre historique ou de catastrophe planétaire. L’idée générale est qu’on est assis sur un baril de poudre, la seule question étant de savoir quel sera le détonateur.

    Les signaux d’alarme ne manquent pas : chute du cours des matières premières, ralentissement de l’économie chinoise, effondrement des actions de la Deutsche Bank, pertes enregistrées par les valeurs technologiques, faillites de plusieurs banques régionales italiennes, effondrement de l’industrie manufacturière, etc. Les créances douteuses sont évaluées à mille milliards d’euros dans la seule zone euro. Quant aux produits dérivés, par lesquels s’était propagée la crise des subprimes, ils pèsent aujourd’hui deux millions de milliards de dollars, soit plus de vingt fois le PIB mondial ! Les financiers, qui sont incorrigibles, ont en outre mis au point de nouveaux moyens de contourner les règles qui les gênent (comme le « shadow banking » ou le « trading haute fréquence »). Le krach est en vue, mais tout le monde se goinfre.

    Et cette fois-ci, les États surendettés n’auront plus le moyen de sauver les banques comme ils l’avaient fait il y a huit ans. La dette mondiale atteint aujourd’hui 223.000 milliards de dollars (contre 157.000 en 2008). La dette française, qui a augmenté de plus de 600 milliards d’euros sous Sarkozy, frôle les 100 % du PIB. Il n’y a plus désormais de croissance sans croissance exponentielle de la dette (on paie les dettes au moyen de nouvelles dettes). La spirale de l’endettement crée une économie qui vit au profit exclusif de ceux qui créent la monnaie de la dette.

    Les banques centrales ne sont pourtant pas restées inactives ?

    Pour stimuler l’économie, les banques centrales ont essentiellement eu recours à deux outils : l’assouplissement qualitatif (quantitative easing, QE) et la baisse des taux d’intérêt. Cette stratégie s’est soldée par un échec.

    Les politiques d’assouplissement quantitatif, auxquelles la BCE s’est ralliée fin 2014, ont pour but d’alimenter les institutions financières et les banques en liquidités sous la forme d’achats d’une certaine quantité d’obligations (dettes financières, titres de créances) et d’actifs de long terme, notamment de titres d’État. L’argent ainsi créé est censé contrer les tendances déflationnistes de l’économie. Or, cela n’a pas marché. Les liquidités supplémentaires, loin d’atteindre et d’irriguer l’économie réelle, sont restées circonscrites dans le secteur bancaire et n’ont profité qu’aux détenteurs d’actifs financiers, qui s’en sont servis pour spéculer, ce qui a entraîné la formation de nouvelles bulles (financières, boursières, obligataires et immobilières) représentant autant de menaces.

    L’abaissement des taux d’intérêt, allant jusqu’à l’adoption de taux zéro, voire parfois de taux négatif – ce qui signifie que les banques centrales payent pour prêter aux banques dans l’espoir d’inciter les acteurs économiques à faire circuler l’argent (signalons au passage que, depuis août 2014, la France emprunte elle-même à des taux négatifs) -, n’a pas eu de meilleurs résultats. Il a même paradoxalement abouti à un rationnement du crédit, au détriment notamment des PME, qui représentent près de 60 % de la croissance de la valeur ajoutée dans l’Union européenne. Les taux négatifs sont en outre très défavorables à l’épargne (ils impliquent que sa valeur diminue régulièrement).

    La combinaison de liquidités abondantes et de taux extrêmement bas encourage en fait les États à s’endetter encore plus et suscite une recherche frénétique de profit de la part des investisseurs. Comme la demande d’actifs bien rémunérés dépasse l’offre, le prix du risque baisse. Au moindre incident, les investisseurs ont tendance à vendre en catastrophe. L’effondrement du prix des actifs fait alors boule de neige, contaminant ainsi tous les marchés.

    Le capitalisme mondialisé est-il devenu conjoncturellement fou, ou l’était-il structurellement dès l’origine ?

    Nous sommes devant une crise systémique. Elle vient de ce que la dynamique d’accumulation du capital fonctionne sur des bases fictives de plus en plus précaires, du fait de ses contradictions internes (entre le travail marchandise et le capital marchandise, les forces productives et les moyens de production, le capital variable et le capital constant). Le capitalisme est un mode de production doté de deux formes de richesse : la richesse matérielle et la richesse abstraite (« valeur »), aujourd’hui dominante, qui est exprimée par l’argent et qui repose sur la force de travail. La valorisation du capital a pour but de multiplier cette seconde richesse. Or, ces deux formes de richesse s’écartent toujours davantage l’une de l’autre à mesure qu’augmente la productivité, qui expulse le travail du procès de production (on produit toujours plus avec toujours moins d’hommes), détruisant ainsi sa propre assise.

    La dévalorisation générale de l’argent n’est dès lors plus qu’une question de temps. À terme, c’est tout le problème de la déconnexion progressive du système capitaliste et de la vie humaine qui est posé.  •

    Entretien réalisé par Nicolas Gauthier

    Intellectuel, philosophe et politologue 

    Revue Eléments

     
  • Remplacer le président de la République...

     

    par Jean-Philippe Chauvin 

     

    arton8470-7b8cd.jpgAinsi, selon un sondage de ce début d’année, 74 % des Français ne veulent ni de M. Sarkozy ni de l’actuel président M. Hollande : pourtant, il y a quelques (mal)chances que l’un des deux soit élu ou réélu en 2017… Bienvenue en république d’Absurdie ! Le pays légal a tendance à se reproduire sans discontinuer, dans une tendance (presque) dynastique qui rappelle néanmoins plus l’empire romain que la monarchie capétienne : peut-on s’en satisfaire ? 

    Ma réponse est non, évidemment non ! Certes, je ne suis pas de ceux qui pensent qu’un échec politique doit forcément entraîner une mise à la retraite d’office comme je ne suis pas partisan d’une sorte de jeunisme qui voudrait que tous ceux qui ont dépassé la soixantaine devraient se taire définitivement et laisser la place à de jeunes loups aux dents encore plus longues que leurs prédécesseurs. Mais il me semble que les hommes politiques qui aspirent à exercer la magistrature suprême de l’Etat doivent entendre les doléances des citoyens et savoir, au moins pour un temps, s’extraire de leur bulle médiatique pour revenir aux réalités du moment sans négliger les perspectives de l’avenir. 

    Bien sûr, MM. Sarkozy et Hollande n’écouteront qu’eux-mêmes, persuadés de leur irremplaçable particularité, et, peut-être sinon sans doute, l’un des deux se trouvera confirmé dans cette impression par le verdict du second tour de l’élection présidentielle. Cela changera-t-il pour autant ce désagréable sentiment populaire que le vainqueur n’est là que par défaut, que par le « chantage au pire », comme on a pu le voir, dès 2002 à cette même élection, ou ces semaines dernières lors des élections régionales où les électeurs socialistes se trouvèrent acculés à mener campagne pour des listes de droite qu’ils n’aimaient pas vraiment ? 

    Les Français sont attachés à l’élection du président de la République au suffrage universel direct, c’est indéniable, mais ils en constatent pourtant de plus en plus les effets pervers sans pouvoir, pour l’heure, imaginer autre chose que cette magistrature suprême élective. Le royaliste que je suis le constate et le regrette, mais ne se contente pas de cette constatation et de ce regret : la proposition monarchique me semble le meilleur moyen de neutraliser les petits jeux de clientèles et de féodalités partisanes en arrachant la magistrature suprême à l’élection, fût-elle populaire chez nos concitoyens. Certains y verront un sacrifice de leur possibilité de choix qui, pourtant, est de moins en moins une liberté et un choix réel, si ce n’est entre deux « moins pires » (sic !), et qui ouvre plus à la frustration et à désillusion qu’à la joie et l’espérance… 

    D’autre part, laisser au hasard et à l’hérédité non choisie le soin de désigner le Chef de l’Etat permet l’indépendance de celui-ci et cette possibilité d’arbitrage au-dessus des partis et au-delà des différences et des diversités politiques sans pour autant les nier ou les écraser. Une possibilité d’arbitrage mais aussi de décentralisation (voire de fédéralisation) sans mettre en danger, pour la France, l’unité entre ses multiples parties historiques (et je ne parle pas de la caricature de régions créée par la récente réforme territoriale), le monarque incarnant cette unité à la fois historique et contemporaine, et « centrant » l’Etat sans pour autant centraliser tous les pouvoirs politiques dans le sein parisien. 

    Et les électeurs là-dedans ? Dans une Monarchie active et arbitrale telle que je la souhaite, il n’est pas impossible de leur donner le pouvoir concret, par le suffrage universel direct, de désigner, au-delà des députés et des élus régionaux, les présidents d’assemblée et, pourquoi pas, le premier ministre lui-même sur un programme gouvernemental qu’il lui appartiendra de mettre en œuvre ou, plutôt, sur une ligne d’objectifs qu’il lui reviendra de suivre ou de faire valider par le recours (alors plus fréquent) au référendum. Le roi, quant à lui Chef de l’Etat, fixerait le cap politique à long terme (en particulier dans les domaines sociaux et environnementaux) et aurait charge de représenter l’Etat à l’intérieur comme à l’extérieur, de mener la diplomatie française dans le monde et de négocier (et garantir) la parole de la France au sein des institutions internationales : en somme, à lui l’autorité et l’arbitrage ; aux ministres, députés et élus locaux, la gestion des affaires économiques dans leur cadre d’exercice et de pouvoir ; aux citoyens, les libertés d’expression et de désignation de leurs pouvoirs politiques de proximité et centraux, ainsi que la « démocratie directe » au sein de leurs cadres politiques et sociaux locaux et nationaux, voire européens… C’était, à peu de choses près, l’esprit du programme monarchique du marquis de La Tour du Pin, dès la fin du XIXème siècle : « l’autorité au sommet, les libertés à la base », pourrait-on dire. Un programme toujours d’actualité et de nécessité, ne serait-ce que pour rendre à nos concitoyens le goût de la politique et de l’action, contre le fatalisme et l’indifférence… 

    Blog de Jean-Philippe Chauvin