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Rechercher : qu'est-ce que le Système

  • Vers l'aristocratie ouvrière, par Frédéric Poretti-Winkler.

    3834054413.45.jpgC’est dans un contexte de conflits et dans le but de la paix sociale que la rédaction des droits et devoirs par profession sera rédigé.

    La codification des corporations représenta à l’époque une grande avancée sociale et une conquête ouvrière…

    Ces organismes à la fois économiques et politiques, gérant l’organisation sociale dans la cité, représentaient un barrage aux gros entrepreneurs et aussi garantissaient les droits des ouvriers.

    frédéric winkler.jpgIl existait déjà de grandes industries qui employaient de nombreux ouvriers et celles-ci étaient tenues par de riches propriétaires bourgeois :
    « Toujours tisserons drap de soie,
    Jamais m’en serons mieux vêtues,
    Toujours serons pauvres et nues,
    Et toujours aurons faim et soif… » (Chrestien de Troyes 1170/1175)
    La terre de France voit s’élever les Cathédrales comme des champignons, symbolisant la richesse urbaine de l’époque. Les seigneurs féodaux et les villes organisent leur gouvernement à partir des cadres corporatifs présents, pour l’administration fiscale, militaire et électorale. C’est surtout dans les villes que les corporations jouent un rôle de premier plan, dans l’organisation politique et sociale, véritable chef d’œuvre économique des bourgeoisies du moyen-age. Imaginons comment une telle organisation pouvait tenir avec les difficultés qui pouvaient surgir ; guerres, pénuries, conflits sociaux…Les corporations sont des personnes féodales avec leurs droits et devoirs, blasons et gens d’armes. Les règles s’installaient et malgré quelques petites divergences, une harmonie s’établissait. On voit des seigneurs créer des communautés de travailleurs.L’abbé de St Denis(1175) garantie l’organisation de ses bouchers. Les rois auront toujours le soucis des travailleurs et seront qualifiés par eux de prince besogneux (Henri Ier,Philippe Ier,StLouis,Louis le Gros).Sous le règne de Philippe Auguste, la capitale compte 30 métiers organisés. Il laissa le gouvernement de Paris aux bourgeois pendant l’expédition en Terre Sainte. On trouve bien là, l’alliance peuple et Roi, chère à la vieille France. « Le bon roi Philippe »criaient les classes artisanales. Saint Louis, outre le fait d’organiser les métiers, voulut organiser la garde, l’approvisionnement des villes(le guet fut réorganisé en 1254) et tenu par des gens de métier…L’extension du marché international et la rigueur corporative fait apparaître le contrôle technique et cela pas seulement dans le domaine industriel des grandes entreprises mais dans le monde artisanal, agricole et littéraire(l’université parisienne, les ménestrels) .Les corporations jouèrent un rôle d’émancipation et les caractères analogiques avec l’université sont criants(bacheliers, doctorat, maîtrise de métier…).Quelle richesse alors dans les sciences d’art et métiers et quel gâchis quand on compare avec aujourd’hui. Mais encore une fois, attention, l’ancienne France n’avait rien d’uniforme mais un enchevêtrement de droits divers, de coutumes locales, un véritable canevas riche de multiples organisations complexes suivant les lieux…On est loin du gaufrier étouffant d’aujourd’hui… « Il y a, indéniablement, montée sociale des travailleurs manuels…le Registre de 1292 qui signale des cotes appréciables pour plusieurs valets…Autre indications :des maçons et des tailleurs de pierre qui travaillaient au couvent des Augustins dans les dernières années du XIIIème siècle étaient payés 20 deniers par jour ouvrable, leurs aides 14 deniers ; des travailleurs de l’habillement gagnaient de 24 à 36 deniers ; mais il semble que le salaire moyen de beaucoup de compagnons fût d’environ 18 deniers. Or, en 1312…un mouton valait 6 sous huit deniers (80deniers), un pourceau 14 sous 7 deniers (175 deniers).N’allons pas conclure à d’exceptionnelles conditions de vie : il y a des métiers dont nous ignorons les salaires…»
    De là l’extension des corporations malgré quelques zones de « franches aires » maintenant leurs privilèges en dehors du cadre corporatif. Cette multiplication, toujours à l’ombre du roi, permet aussi l’obtention de pouvoir comme l’élection des chefs de métier. En 1338, à Rouen, « les filassiers sont invités à se dire d’accord avec un règlement fait, sur leur demande, par le maire et ses pairs…»Entre le XIIIème et le XIVème siècle, le pouvoir qu’exerçait les capitouls de Toulouse sur les métiers, passe aux mains des jurés de ceux-ci.

    GREVE et CONFLITS
    Loin d'avoir tout inventer, comme nous essayons de le démontrer notre temps semble découvrir aujourd'hui ce qui hier était monnaie courante. La grève existait déjà sous Saint-Louis.Les organisations ouvrières s’organisent avec leurs Saints et fêtes chômés, leurs blasons avec privilèges et devoirs, leurs justice, police et coutumes.Quelques conflits naissent des rivalités entre maîtres et ouvriers car les premiers cherchent à se distinguer des seconds, nous sommes dans les temps dits classiques ou la bourgeoisie s’affirme, loin de l’humilité du Moyen-âge…
    _Maçons et ouvriers du bâtiment à Paris, 1660-62,
    _les papetiers en Auvergne, 1664 les garçons boulangers à Bordeaux, 1666-67 à Lyon…
    _Guerres et disettes en 1694.
    Plus tard il est important d’étudier les problèmes économiques liés aux temps de colères sociales comme l’inflation du système de Law de 1719 à 1721 et la déflation de 1724…
    Les artisans prennent l’habitude de se regrouper par profession et par rue (voir les noms de rues dans Paris…) présent. Un trafic intense se développe en Occident et l’aisance nouvelle permet à un marchand de St Omer de faire construire à lui seul, une Eglise…
    L’ascension des humbles se poursuit et certaines fois les consommateurs se liguent contre le monopole d’une corporation comme en 1267 à Pontoise avec les boulangers.
    _A Paris en 1250, les valets protestent contre les maîtres des foulons.
    C’est à la suite de ces divers conflits que St Louis demandera à Etienne Boileau de codifier les us et coutumes des métiers, jusqu’ici orales dans un livre. Cela n’empêchera pas d’autres conflits comme les tisserands contre les drapiers à Paris en 1270
    _ les valets contre les maîtres foulons en 1277-79.
    Frederic PORETTI - Winkler (Les Communautés de Métier, à suivre)

  • L’Occident mort de peur : que n’a-t-on pas sacrifié à notre affolement devant le Covid-19? par Jérôme Blanchet-Gravel.

    Le 20 avril à Madrid, Madame Sara Maria Dineiro Carrera réagit après la minute de silence consacrée à son mari, un chirurgien décédé du Covid-19 à l'hôpital La Paz © Manu Fernandez/AP/SIPA Numéro de reportage: AP22448814_000016

    Source : https://www.causeur.fr/

    Déni de la mort: après le déclin, la fin de l’Occident?

    La crise du Covid-19 n’aura pas seulement fait ressurgir les frontières dans une civilisation où elles étaient souvent présentées somme le dernier vestige de la xénophobie. C’est notre rapport conflictuel à la mort qui est remonté à la surface qui doit être vu ailleurs dans le monde comme le principal signe de notre déroute ! Jamais les Occidentaux n’avaient manifesté une crainte aussi intensément révélatrice de leur mal-être collectif. 

    2.jpgLes esprits religieux n’ont pas manqué de voir une faillite spirituelle dans notre hantise diffusée sur tous les écrans du monde. Et si certains d’entre eux avaient raison cette fois ?

    Tout d’un coup, la plus riche et puissante civilisation de la planète est apparue fragile, chétive, traumatisée par une réalité pourtant inhérente à la vie. Le roi de l’univers s’est présenté nu comme un ver au balcon doré de sa désillusion. 

    Mesures quasi-maladives

    Le malaise a notamment pris la forme de mesures de confinement presque maladives, quoique nécessaires dans la perspective individualiste et à court terme qui est la nôtre.

    Comme l’a soulevé le philosophe Robert Redeker, l’Homo occidentalis aura choisi le suicide économique au lieu d’affronter la réalité de sa finitude. « La mise entre parenthèses de la liberté et les destructions imposées à l’économie signent la pathologie de ce retour du refoulé », écrivait-il dans Marianne le 21 avril dernier. 

    Une civilisation abritant des nations aussi troublées est inapte à faire la guerre et à traverser des crises plus importantes

    Nous vivons dans des sociétés privées de leur vitalité. À quoi bon blâmer nos dirigeants pour des phénomènes qu’ils ont encouragés mais dont ils ont perdu le contrôle ? Nos sociétés sont atomisées et désenchantées : ce sont les mêmes que Michel Houellebecq a dépeintes. Nous vivons dans des sociétés rongées par l’anxiété et la dépression, où des millions de gens se droguent légalement pour survivre. Nos pays sont divisés par des intérêts syndicaux, professionnels et de classe que nous pensions avoir réussi à harmoniser. N’en déplaise à la gauche identitaire : les inégalités sont encore économiques avant d’être culturelles ou raciales. 

    Crise spirituelle, crise civilisationnelle 

    Ce grand vide spirituel s’est manifesté de manière assez brutale au Québec. Lorsque la crise a débuté, le Québec a eu l’impression de retrouver son sens de la collectivité, mais le corporatisme et la désertion de milliers de travailleurs de la santé ont vite eu raison de cette euphorie du début. Le Premier ministre québécois, François Legault, a dû plusieurs fois supplier le corps hospitalier de participer à « l’effort de guerre » dans les résidences pour personnes âgées, toujours gravement touchées par le virus. Comme d’autres, les Québécois ont découvert l’état lamentable de leur système d’hébergement des vieillards. À travers les vieux, c’est leur propre fin qu’ils entrevoyaient mais qu’ils ne voulaient plus voir. 

    Une civilisation abritant des nations aussi troublées est inapte à faire la guerre et à traverser des crises plus importantes, ce dont sont plus que jamais conscients les empires de l’Est à commencer par la Chine. D’abord une crise sanitaire, le Covid-19 aura surtout été une crise civilisationnelle à l’Ouest du globe. Depuis déjà plusieurs années, les nations occidentales refusent de sacrifier des hommes dans les conflits armés : chaque mort est vue comme une tragédie à ne jamais répéter. C’est le règne des opérations télécommandées et des drones. 

    La créativité et l’innovation sont hélas loin d’être garantes de la survie des empires qui restent par définition mortels. De rappeler que les sociétés modernes ne savent plus stimuler le sens du devoir est un truisme : seule prévaut la logique des droits et son double, l’individualisme sacré. Combien de personnes la Chine est-elle prête à lâcher sur ses 1.4 milliard d’âmes pour devenir le maître du monde ? Quels pays occidentaux seraient prêts à instaurer ou réinstaurer le service militaire obligatoire ?

    Toujours des droits, jamais des devoirs

    Il faut lire le général chinois à la retraite Qiao Lang pour comprendre notre propre déroute et la manière dont elle est interprétée par Pékin. Dans un entretien récent accordé à la revue chinoise Bauhinia et traduit en français par Conflits, Lang explique que l’élévation du niveau de vie est en train de se retourner contre l’Occident (contre les États-Unis surtout) à travers la désindustrialisation et la délocalisation. Les Occidentaux voudraient continuer à dominer les autres tout en leur déléguant les tâches qu’ils ne veulent plus faire. À quoi bon concevoir de la haute technologie si vous ne voulez plus la produire ? À quoi bon avoir une armée puissante et la bombe nucléaire si votre pays est peuplé de pacifistes ? 

    Au Québec, où les Chinois possèdent d’ailleurs de nombreuses terres agricoles, un mouvement en faveur de l’agriculture locale a été lancé pour revenir à la souveraineté alimentaire alors que la chaîne d’approvisionnement pourrait être rompue. Le hic, c’est que les producteurs ne parviennent plus à embaucher des Québécois acceptant de travailler au champ dans des conditions difficiles. Des centaines de migrants viennent donc chaque année cueillir les fruits et légumes produits localement. Comme quoi les beaux discours patriotiques et écologistes ne suffiront pas à éviter le naufrage.

     
    Jérôme Blanchet-Gravel est essayiste, journaliste et chroniqueur québécois. Spécialiste des idéologies, il est l'auteur de plusieurs essais et a collaboré à différents médias dans les dernières années, tant au Québec qu’en France. Son dernier ouvrage, La Face cachée du multiculturalisme, a été publié en février ...
     
  • Les communautés de métier, diversité, par Frédéric Poretti-Winkler.

    On parle aujourd’hui de reflexe « CORPORATIF » pour indiquer une défense identitaire professionnelle, en général ce terme est devenu péjoratif mais autrefois on entendait : confrérie, ghilde, maîtrise, charité, hanse, collège, fraternité, jurande…
    Il reste difficile de donner une définition définitive tant les disparités existaient entre lieux, époque et professions…
    Devons nous parler du Moyen-âge ou du XVIème siècle ?
    « Vous avez le choix entre huit siècle d’histoire et entre plusieurs dizaines de provinces…D’une ville à l’autre et, dans chaque ville, d’une profession à la profession voisine, elles diffèrent plus que les amples bliauts du XIIIème siècle et les justaucorps collants du XVIème, que les draps riches et lourds des communes du Nord et les tissus légers du Midi moderne.»(E.Coornaert)

    frédéric winkler.jpgCelles-ci sont de vrais petites républiques autonomes dont les différences sont accentuées encore par le fait qu’elles soient réglés ou libres, c'est-à-dire jurés ou non. L’uniformisation n’est pas de rigueur. Les métiers jurés font des assemblées, le devoir du chef-d’œuvre, de la juridiction professionnelle, du droit du sceau, du contrôle de la production, avec plus de discipline…La différence essentielle entre juré et libre ne réside pas dans les conditions de travail mais dans les rapports avec l’Etat. « La réglementation est une garantie contre les excès de la concurrence, un gage de solidarité pour les producteurs.L’autorité en fait aussi le plus souvent une garantie pour les consommateurs, pour la collectivité.Mais elle y ajoute un autre gage de sécurité pour les premiers en élevant leurs communautés au dessus du droit privé, en leur donnant une personnalité juridique, d’ailleurs plus ou moins parfaite selon les cas, et en leur conférant une autorité propre sur leurs membres. » (E.Coornaert)
    On peut d’ailleurs faire un parallèle avec l’organisation territoriale entre ville franches et communes libres. Les métiers libres sont quelquefois plus contraignants que les métiers réglés. L’organisation autonome fonctionne par serment, qui à l’époque est respecté…Les métiers libres sont sous contrôle des pouvoirs publics ou religieux et leurs recettes sont versés sur un compte municipal ou à l’Eglise. Les chefs plaident avec un échevin ou un agent urbain. Il faut toujours se garder de prendre ses indications pour une stricte observance générale, on dira que ce sont les grandes lignes.Toute organisation dans l’ancienne France reste sur le modèle de la famille élargie avec le principe d’autorité…
    On trouve quelques révoltes sociales, les tisserands, les foulons et autres travailleurs de la laine, au XIIIème et XIVème siècle dans les Flandres. En France, grève des bouchers d’Evreux en 1244 (confrères de St Jacques) sous Charles VI au temps de Caboche et avec les canuts lyonnais en 1744…
    La France était alors hérissé de libertés bien réelles (devoirs avec droits et privilèges), on avait pas besoin alors de le marteler sur les mairies pour y croire. Nous sommes loin alors de l’univers gris des conflits incessants d’aujourd’hui…
    « Ne parlons pas de l’université parisienne du XIIIème siècle :maîtres et étudiants de la Montagne Sainte-Geneviève formaient alors une authentique corporation. Mais, au cours de l’ancien régime, on reunit parfois avec les corps de métiers, sous les mêmes noms de corps et communautés, les universités, collèges, chapitres, monastères et confréries et on tend, aujourd’hui, à allonger cette liste autrefois limitée : ensemble disparate, où les artisans pouvaient trouver, au vrai, des parentés inattendues à nos regards modernes. Leurs groupements sont confondus ainsi plus ou moins avec les « corps intermédiaires » qui contribuaient à assurer à la société d’autrefois hiérarchie et organisation. Ainsi associés à d’autres communautés, ils se rattachent, plus intimement encore qu’il ne paraît à première vue, à un aspect général de la société d’ancien régime, à ses tendances sociales, si différentes de l’individualisme du XIXème siècle. Ils témoignent bien de la place qu’elle accordait à l’homme, de l’idée qu’elle se faisait de la liberté, des rapports qu’elle établissait entre l’économie et les autres formes de la vie collective. »

    « Nous parlions, il y a un instant, des différences provinciales : elles imposent une discipline plus étroite dans le Nord, elles laissent plus de jeu à la liberté dans le Midi ;Toulouse et Montpellier en sont largement pourvues dès le XIIIème siècle ;Bordeaux, Nimes, Marseille se défendront encore au XVIIème siècle contre l’établissement de jurandes ; très tôt, les « chonffes » de Montbéliard, qui empruntent leur nom aux Zünfte, participeront étroitement à la vie artisanale allemande ; la vie corporative ne s’implantera en Franche-Comté qu’au XVIIème siècle. Au vrai, c’est d’une ville à la ville voisine que le décor change : de Saint-Omer, par exemple, à Abbeville, qui en est distante d’une vingtaine de lieues seulement, on passe d’un milieu industriel à un autre, d’une ville riche de traditions, de sève et de vigueur, et de libertés efficaces, à une ville longtemps médiocre où les corporations ont poussé plus tard, et moins librement. Mieux encore, dans la même ville, c’est successivement, métiers par métiers, que l’ambition est née parmi les travailleurs de constituer des corps autonomes ou que le moyen leur en a été procuré : à Lyon, où quelques communautés sont organisées dès la fin du XIIème siècle, c’est au XVème et au XVIème seulement que se propage la conquête corporative ; à Poitiers, c’est de la façon la plus irrégulière au cours de deux ou trois siècles, du XVème au XVIIème, qu’elle gagnera la plupart des professions. » (E.Coornaert)
    C’est un sujet très vaste et ces deux citations sont là pour expliquer qu’il ne faut pas systématiser la structure sociale de l’ancien régime.

    GREVE et CONFLITS
    Loin d'avoir tout inventer, comme nous essayons de le démontrer notre temps semble découvrir aujourd'hui ce qui hier était monnaie courante. La grève existait déjà sous Saint-Louis.Les organisations ouvrières s’organisent avec leurs Saints et fêtes chômés, leurs blasons avec privilèges et devoirs, leurs justice, police et coutumes.Quelques conflits naissent des rivalités entre maîtres et ouvriers car les premiers cherchent à se distinguer des seconds, nous sommes dans les temps dits classiques ou la bourgeoisie s’affirme, loin de l’humilité du Moyen-âge…
    _Maçons et ouvriers du bâtiment à Paris, 1660-62,
    _les papetiers en Auvergne, 1664 les garçons boulangers à Bordeaux, 1666-67 à Lyon…
    _Guerres et disettes en 1694.
    Plus tard il est important d’étudier les problèmes économiques liés aux temps de colères sociales comme l’inflation du système de Law de 1719 à 1721 et la déflation de 1724…
    Les artisans prennent l’habitude de se regrouper par profession et par rue (voir les noms de rues dans Paris…) présent. Un trafic intense se développe en Occident et l’aisance nouvelle permet à un marchand de St Omer de faire construire à lui seul, une Eglise…
    L’ascension des humbles se poursuit et certaines fois les consommateurs se liguent contre le monopole d’une corporation comme en 1267 à Pontoise avec les boulangers.
    _A Paris en 1250, les valets protestent contre les maîtres des foulons.
    C’est à la suite de ces divers conflits que St Louis demandera à Etienne Boileau de codifier les us et coutumes des métiers, jusqu’ici orales dans un livre. Cela n’empêchera pas d’autres conflits comme les tisserands contre les drapiers à Paris en 1270
    _ les valets contre les maîtres foulons en 1277-79.
    Frederic PORETTI - Winkler (Les Communautés de Métier, à suivre)

  • La loi Avia ou comment anesthésier la pensée !, par Christian Vanneste.

    Le passage en force de la « loi Avia » suscite une opposition large et nourrie. Que le premier texte voté après la douloureuse expérience du confinement soit attentatoire à la liberté d’expression relève de la provocation : après avoir suspendu les libertés d’aller et de venir, de travailler, de se réunir, de manifester, d’exercer son culte, voici que le pouvoir étrangle encore davantage la liberté d’expression dans notre pays. A peine les Français retrouvent-ils le goût de sortir, de renouer avec leurs familles et leurs amis, de fréquenter les magasins de leur choix, mais alors qu’ils n’ont pas encore la liberté de se déplacer à leur guise, on entend les punir d’avoir abusé de leur liberté de parole sur la toile, en profitant, les garnements, de leur inactivité.

    christian vanneste.jpgNon content de cette infantilisation du peuple à laquelle la macronie nous a habitués, le pouvoir fait voter ce dispositif alors que l’Assemblée ne fonctionne pas normalement, comme si le parlement n’était qu’une chambre d’enregistrement. Le spectacle du président de séance coupant la parole d’un député, en l’occurrence la présidente du RN, alors qu’elle défend la liberté d’expression, donne le vrai visage du système : technique, administratif, ignorant le respect du aux institutions et aux élus. On ne coupe pas la parole d’un parlementaire, quelle que soit son appartenance politique, quand le débat porte sur la liberté de parler. J’ai connu un président de séance communiste que les députés appréciaient car il les laissait toujours aller jusqu’au bout de leur intervention. Les quelques minutes perdues étaient une respiration démocratique, un gain pour la liberté.

    Votée quand les Français ont la tête ailleurs, cette loi n’aura pas seulement connu une naissance dont la légitimité est douteuse, elle présente aussi de nombreuses faiblesses. La première est de mettre au centre d’un texte un sentiment subjectif, la haine. La loi, surtout quant elle implique des dispositions pénales, exige des fondements plus solides, plus objectifs. Il s’agit, une fois encore, sous couvert de bons sentiments, d’éduquer le peuple, de changer les mentalités, de détruire des stéréotypes, en semblant ignorer que cela revient à les remplacer par d’autres issus d’une idéologie dominante. La répulsion, le mépris, la détestation, le dégoût, l’hostilité, l’opposition, la critique pourront-ils être confondus avec la haine ? La catharsis des mauvais sentiments chez tous ceux qui sont frustrés de ne jamais être entendus, et qui ne le seront pas davantage, aura-t-elle le même poids que la véritable menace, que les injures proférées par des ennemis qui préparent une guerre mortelle contre notre société, contre notre pays ? Ce texte accentue la confusion à l’oeuvre dans l’alourdissement et l’altération de la loi sur la liberté de la presse : l’hostilité à une race ne peut être mise au même niveau que celle qui vise une religion ou une prétendue identité de genre. On ne peut reprocher à une personne d’être née ce qu’elle est, mais on peut parfaitement haïr sa pensée, ou critiquer sa prétention à être ce qu’elle n’est pas. On ne peut mettre sur le même plan les faits scientifiques et les modes idéologiques.

    Notre société prétendument libérale restreint la liberté de penser sous prétexte de protéger les différences. Elle établit une inquisition qui scrute le for intérieur de ceux qui vont exercer leur sens critique à l’encontre de pensées ou de comportements absurdes, et permettre à ceux-ci de prospérer en dehors de toute rationalité. La liberté de pensée exige le débat jusqu’à l’invective, car elle doit aussi favoriser la libération à l’égard de toutes les erreurs et de tous les préjugés, et non de certains au détriment d’autres, triés par une idéologie larvée qui a, peu à peu, envahi l’éducation, la presse, et la politique, et qui entend, au nom de la lutte contre de prétendues phobies, imposer une pensée unique. Que cette démarche soit contradictoire puisqu’elle conduit à protéger, par exemple, des religions intolérantes, n’embarrasse pas ses promoteurs. L’ennemi est le peuple gaulois, sa faconde, son goût pour la dispute et les noms d’oiseaux. En cela, il y a dans cette loi une profonde méconnaissance de l’identité nationale. La loi Avia est copiée sur une loi allemande ! La NetzDG de Janvier 2018 est avant tout une réaction au déferlement de propos racistes qui ont suivi l’irruption tapageuse des « réfugiés » accueillis à bras ouverts par Mme Merkel. Les Allemands ont donc réagi à une situation conjoncturelle en fonction de leur mauvaise conscience historique lourdement chargée par le racisme. La rigueur et le conformisme germaniques n’ont jamais fait de l’Allemagne le foyer mondial de la liberté de penser. Il en va tout autrement du pays de Voltaire. Il est pathétique qu’au moment même où l’Allemagne montre la supériorité de son organisation et de son économie, on la suive sur un chemin où elle n’a pas de leçon à nous donner. Il est d’ailleurs cocasse que l’une des remontrances envers l’initiative française soit venue de Bruxelles, et à la demande de la République tchèque, qui voyait dans le texte français une restriction abusive de la libre circulation des services de la société de l’information en provenance d’un autre Etat membre de l’U.E. Ainsi donc les leçons de liberté nous viennent de l’Est, d’un membre du groupe de Visegrad. Il est vrai que l’argument repose davantage sur la liberté économique que sur la liberté d’expression.

    L’artillerie contre les réseaux sociaux et leurs opérateurs est lourde. Un refus de retrait pourra coûter jusqu’à 1,25 million d’euros aux opérateurs.  Le CSA exercera le contrôle. Un « Observatoire » sera créé pour le doubler. A l’heure où l’on s’interroge sur les moyens des hôpitaux face à un problème grave, la création de « machins » superflus consacrés à des sujets moins prioritaires donne une idée de notre « gouvernance ». Les éventuels signalements abusifs par les utilisateurs de plateforme seront eux passibles d’un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende. Le processus commence donc par déléguer aux GAFA sous la surveillance du CSA le soin de trier la bonne pensée, et donc d’exercer une censure, en enlevant ce pouvoir aux juges, et il aboutit quand même au bout des litiges à alourdir une justice déjà trop pauvre pour répondre aux vrais besoins. Devant la lourdeur des sanctions, on peut craindre qu’une censure très large, robotisée, sera effectuée en amont. Elle conduira à l’effacement « réflexe » à partir d’un mot. Elle suscitera l’autocensure. Elle entraînera la délation systématique et simplifiée, aidée par les associations communautaristes.

    Bienvenue dans le nouveau monde d’une pensée appauvrie et d’un peuple soumis !

     
  • Jérôme Fourquet : ”Les Français ont vu l’Etat en voie de clochardisation”, par Gérald Andrieu.

    Pour le sondeur et essayiste, "l’Etat central et sa haute administration" ont été "percutés" par la crise sanitaire. - Martin BUREAU / AFP

    Source : https://www.marianne.net/

    "Marianne" s'intéresse cette semaine aux Français qui, dans la période, de gré ou de force, pour le meilleur ou pour le pire, se débrouillent sans l’Etat, l’administration, les chefs, les intermédiaires... Jérôme Fourquet, directeur du pôle Opinion de l’Ifop et auteur de "L’Archipel français" (Seuil), nous en dit plus sur ces "sécessionnistes".

    Marianne : Dans la période, les responsables politiques nationaux, l’Etat, l’administration sont apparus défaillants à beaucoup de Français. Ces derniers ont donc fait sans eux. Dans le monde de l’entreprise aussi, ils ont parfois fait sans leurs chefs et ces intermédiaires que sont par exemple les consultants ou les chargés de mission. Qui sont-ils ces Français qui ont pris leur autonomie ?

    Jérôme Fourquet : Il faut déjà faire la différence entre autonomie choisie et autonomie subie. Dans le premier cas, on retrouvera les indépendants, les petits patrons qui étaient depuis longtemps vaccinés (si je puis dire !), qui savent qu’en temps normal il faut remplir 40 bordereaux pour pouvoir faire quoi que ce soit et qui, eux, aujourd’hui comme hier, sont toujours dans la « débrouille » et le système D. Et puis il y a ceux qui se sont tournés vers l’Etat, instinctivement, parce qu’ils n’ont que ça et qui, sans réponse, par dépit, de rage, se sont dits on va faire tout seul.

    Cette autonomisation, on y a assisté dans les hôpitaux par exemple. Ce sont ces soignants, médecins, infirmières, qui ont poussé les murs et organisé des lits de réa supplémentaires. Ils ont pris les manettes parce que - pour faire court - les administratifs étaient en télétravail. Ce sont ces gérants de supérettes qui se sont autonomisés de leur tutelle en élargissant les allées entre leurs rayons, et en y accueillant des producteurs locaux venus taper directement à leur porte. Ce sont aussi ces patrons de départements et de régions - avec parfois des arrières-pensées politiques, bien sûr - qui ont dit “Cet Etat est impotent, trop lourd, donc faisons par nous-mêmes !” Mais ça n’était que le sommet de l’iceberg car il y avait aussi ces maires qui avait un Ehpad sur leur territoire, une grosse entreprise en train de couler, qui ont organisé des distributions alimentaires pour leurs concitoyens et des ateliers de confection de masques avec quelques administrés installés dans un gymnase. Des maires à qui l’Etat dit maintenant “voici les 60 et quelques pages de consignes sanitaires à respecter pour rouvrir les écoles” !

    Ce “sans l’Etat” est sans doute à relativiser, notamment quand on songe au recours massif au chômage partiel qu’il a rendu possible. L’Etat a mis la main à la poche et pas qu’un peu. C’est pourtant lui qui apparaît comme le grand perdant du moment ?

    Oui, le grand perdant, c’est l’Etat jacobin surplombant. C’est l’Etat central et sa haute administration. Il a été percuté par cette crise sanitaire. L’exemple type, ce sont les Agences régionales de santé. Ce à quoi nous avons assisté, c’est à son “étrange défaite” - pour reprendre le titre du magnifique livre de Marc Bloch - et ça a été un choc. Parce que, dans notre pays en temps de crise, on se tourne spontanément vers l’Etat, très présent et censé nous protéger mais qui là a pataugé. Résultat : les Français ont eu le sentiment de vivre un violent déclassement national. Ils ont vu des scènes - comme ces soignants qui, faute de surblouses, mettaient des sacs poubelles ! - qui disaient de notre Etat qu’il était en voie de clochardisation.

    Notre pays a été plus proche, il faut bien le dire, de l’Espagne et de l’Italie que de l’Allemagne. Dans ce dernier pays, on le voit, les choses sont organisées par bassins de vie et les structures publiques sont apparues beaucoup plus réactives et préparées que chez nous.

    Cette défiance à l’égard des dirigeants, quels qu’ils soient, politiques ou économiques, cette sécession même, ne sont pas des phénomènes nouveaux. Mais avec l’épisode du Covid, ils s’en trouvent largement renforcés. Et ils posent la question majeure de la cohésion des Français demain ?

    La question est : comment les vieilles hiérarchies, qui ont été contournées dans cette période, notamment avec le télétravail, vont réagir à cette autonomisation ? Peuvent-elles revenir sur leur lieu de travail et dire : “Retour à la normale !” Certainement pas, parce qu’en face on leur répondra “Nous on a joué notre peau pour faire tourner le service ou l’entreprise pendant l’épidémie, on ne s’est pas simplement dépassé. On a besoin de reconnaissance. Et d’ailleurs, sont-elles vraiment nécessaires toutes ces procédures, toute cette paperasserie ? Quand vous n’étiez pas là, ça marchait très bien !”

    Il y a eu dans cette période et il va y avoir un affrontement entre cols blancs et cols bleus.

    Il y a eu dans cette période et il va y avoir un affrontement entre cols blancs et cols bleus. C’est un peu comme quand il y a une grève dans une usine et qu’elle dure. Il y a des initiatives individuelles, des personnalités qui se révèlent, des solidarités qui se créent, une atmosphère particulière qui s’installe car le collectif est soudé dans la lutte et l’adversité. C’est très dur mais il y a un côté grisant. Et puis quand sonne l’heure de la reprise, c’est souvent la gueule de bois et le retour à « l’ordre ancien » est très douloureux.

    Sur un autre plan, on a aujourd’hui une Anne Hidalgo qui dit refuser le retour du “tout automobile” dans la capitale. Mais ceux qui vivent hors de Paris mais y travaillent vont lui répondre : “Je fais bien ce que je veux, je reprends ma voiture, il n’est pas question que je foute les pieds en ce moment dans un RER !”

    Si on pousse le raisonnement plus loin, ceux qui ont de l’argent ne vont-ils pas choisir de s’extraire encore un peu plus du monde du commun des mortels (en privilégiant encore plus qu’avant les cliniques privées, les lieux de villégiature isolés et préservés, etc.) ? Les survivalistes et les collapsologues, eux aussi, à leur manière, ne vont-ils pas être renforcés dans leur comportement qui consiste à se préparer dans leur coin à l’effondrement final ? Et quid des banlieues, où sur fond d’insuffisante présence des services publics, des initiatives spontanées ont fleuri ici et là pour aider les plus modestes ? On le voit, la crise du Covid-19 n’a sans doute pas donné un coup d’arrêt à l’archipelisation de la société française.

  • Déconfinement, Philippe Juvin: ”Si la France s’en sort aujourd’hui, c’est uniquement grâce aux Français, pas à l’État”.

    Source : https://www.atlantico.fr/

    Dans une interview donnée hier lors d’une visite dans une école primaire, Emmanuel Macron a déclaré que « nous avions réussi le confinement ». Il a ajouté que pour le déconfinement l’État devait « faire preuve de pragmatisme » et les Français de bon sens. Partagez vous ce point de vue ?

    Philippe Juvin : Par ces propos, le président joue son rôle de chef de l’État et je n’en suis pas étonné. En revanche, je ne partage pas son point de vue sur la question. Depuis le début de cette crise, l’État a montré son incapacité à préparer la lutte contre l’épidémie. Nous n’avions pas de stock stratégique, et l’État n’a pas montré sa capacité à mener la lutte contre le coronavirus. Les commandes de ce qui nous manquait et qui visiblement n’étaient pas en stock, n’ont pas été passées à temps. Le premier patient a été signalé fin janvier. Quand les premières commandes ont-elles été passées ? Si l’Etat avait été agile, il l’aurait été dans les jours qui suivent le début de la crise. Cela n’a pas été le cas. Ce qui a fait qu’un confinement indifférencié a été obligatoire, c’est que notre pays n’était pas préparé à la crise. Cette erreur ne doit pas être reproduite au moment du déconfinement. Si demain nous ne sommes pas capable de déconfiner massivement partout,  c’est que nous manquerons quelque part de masques, de tests ou de lits de réanimation. Je ne comprends pas qu’après deux mois de confinement, la question se pose encore. 

    Les seuls qui ont porté la lutte contre le virus, ce sont les Français. À tous les Français, on a demandé le lourd exercice de se confiner. Et il l’ont fait. Pourquoi leur a-t-on imposé ce confinement indifférencié? Parce que nous n’avions pas de masques, parce que nous n’avions pas de tests, parce que nous n’avions pas suffisamment de lits de réanimation. 

    Il serait faux de refaire l’histoire, comme Emmanuel Macron tente de le faire.

    La stratégie du gouvernement n’a-t-elle pas, à tort, trop infantilisé les Français ? 

    Malheureusement, il n’y a pas eu de stratégie de la part de l’État. Ni pour infantiliser les Français ni pour les responsabiliser. L’État navigue à vue, en improvisant en permanence. Ce sont les Français qui ont été extrêmement responsables. Si les Français n’avaient pas pris sur eux de se confiner, notre système de soin aurait explosé. Si la France s’en sort aujourd’hui, c’est uniquement grâce aux Français, pas à l’État. 

    Les sénateurs LR ont refusé de voter le plan de déconfinement proposé par le gouvernement.  En tant qu’élu LR, partagez vous cette position ?

    Je la comprends. Ce plan de déconfinement a été manifestement déposé sur le bureau des Assemblées et voté sans que les élus aient eu le temps de l’étudier. Cela a même été dénoncé par un certains nombres d’élus du parti présidentiel ! 

    De plus, ce plan présente de nombreuses contradictions et d’incertitudes, qui peuvent évidemment susciter l’insatisfaction des élus de l’opposition. Cela ne signifie pas pour autant qu’ils ne souhaitent pas déconfiner.

    À vos yeux, les oppositions ont-elles réellement fait leur travail de contrôle de l’action de l’exécutif ? Quelles leçons pouvons-nous en tirer ?

    Un des grands problèmes du confinement, c’est que nous avons facilement abandonné un certain nombre de libertés. Lorsque vous vous apercevez que les tribunaux n’ont pas le droit de fonctionner, que les chambres parlementaires ne peuvent être réunies, tout cela dans un état de droit, c’est tout de même ahurissant ! Il serait extraordinaire de reprocher aux oppositions de ne pas avoir tenu tribune alors que c’est bien l’impréparation du gouvernement qui a provoqué la situation où la tenue de ces tribunes n’était pas possible.

    Il faut réfléchir à une stratégie offensive qui permette de compléter la stratégie du déconfinement. Dans Le Figaro, j’ai expliqué par exemple qu’il faudrait s’armer d’une réserve stratégique de lit de réanimation. Il faudrait également préparer la France d’après. Cela passe par la prise de décision d’un certain nombre de mesures, comme celle d’une attitude positive à l’égard de ceux qui entreprennent afin qu’ils viennent s’installer dans notre pays. La question de la souveraineté industrielle n’est que la conséquence d’un pays devenu hostile à la libre et à la bonne entreprise.

    Où est-ce que les oppositions peuvent porter le fer afin de faire sauter les verrous qui ont empêché une gestion efficace de la crise sanitaire ?

    Les gens qui dirigent le pays devraient à l’avenir s’entourer de gens qui savent, plutôt que d’une administration qui prétend tout savoir.  L’hyperadministration française nous a conduit à être sous équipés, sous préparés face à cette crise. Au sein de  l’hôpital public par exemple, il y a autant de poste prévus pour le personnel administratif que pour les médecins ! Un symptôme qui ne trompe pas… et sur lequel il faudra travailler en premier au sortir de la crise. 

    Le confinement était indispensable au point de vue sanitaire. Il aurait pu être partiellement évité si nous avions été préparé. Aujourd’hui, nous savons qu’il va avoir un coût considérable, que nous allons payer très cher et très longtemps. C’est un bon exemple pour l’avenir de ce que nous ne devons plus faire. Comme dans une guerre, l’impréparation coûte plus cher que ce qui nous aurait permis de l’éviter. Nous avons payé une inconséquence. J’espère qu’à l’avenir, nous garderons à l’esprit que l’absence de réactivité de certains, l’inconséquence de quelques autres, parfois les mêmes, nous ont conduits à une faillite humaine. C’est une tragédie qui était en partie évitable si nous avions été plus prévoyants et mieux gérés. Puisse cela nous servir de leçon.

  • Pourquoi les Bourses mondiales jouent aux montagnes russes, par Marc Rousset.

    La Bourse de Paris a repris 5,16 %, lundi 18 mai, suite à un nouveau vaccin américain qui a soulevé des espoirs irréalistes et démesurés. La place new-yorkaise a terminé aussi chaque jour dans une direction différente, depuis le début de la semaine, signe d’une forte volatilité. En fait, les Bourses sont assises sur un volcan car elles se refusent à voir l’éléphant de la crise économique qui attend dans le couloir.

    marc rousset.jpgC’est bien l’Union européenne qui empruntera 500 milliards d’euros avec la garantie de tous les États de l’UE, mais l’UE ne pourra rembourser ces emprunts qu’avec un nouvel impôt européen, ou en demandant aux États de rembourser en fonction de leurs pourcentages respectifs dans le PIB de l’UE. Des subventions seraient accordées à certains pays ou à des secteurs économiques en fonction de leurs besoins, et il y aurait donc bien mutualisation au niveau de l’UE avec un taux d’emprunt plus faible et redistribution des ressources vers les plus démunis. Mais la chancelière Merkel a seulement fait un geste politique : l’Allemagne, grande gagnante du système actuel, suite au laxisme des pays du Sud, leur a seulement proposé un os à ronger.

    Les pays sérieux et frugaux tels que l’Autriche, la Hollande, la Suède, le Danemark et la majorité des Allemands n’ont pas encore dit leur dernier mot et peuvent contre-attaquer en demandant que des prêts soient accordés et non pas des dons, tout cela se terminant probablement par un mixage prêts/dons. De plus, ces 500 milliards ne représentent que 3,6 % du PIB de la zone euro (14.000 milliards d’euros), soit une goutte d’eau par rapport à l’hyperendettement existant (95 % du PIB) et à l’océan des besoins. L’Allemagne va dépenser 900 milliards d’euros pour ses propres problèmes, la France 500 milliards d’euros. La réalité, c’est qu’il y a toujours deux forces pour mettre fin à l’euro : l’Allemagne qui ne veut pas payer pour le « Club Méditerranée des pays du sud », qui se retranche derrière les traités de l’Union européenne et la Cour de Karlsruhe ; et, d’autre part, l’Italie, avec la France dans sa roue, qui va très vite se retrouver dans une situation impossible, n’ayant plus que la dévaluation d’une nouvelle monnaie nationale pour faire face à ses obligations.

    L’espoir de reprise économique en V est risible. La dette des pays de l’Union européenne pourrait passer à 120 % du PIB d’ici fin 2020. Pour tous les économistes, le pire est à venir, la crise du coronavirus n’étant que le verre d’eau qui fait déborder le vase déjà plein en janvier 2020. Le MEDEF propose d’étendre la prime des voitures électriques boudées par les Français aux 700.000 voitures thermiques que les constructeurs ont en stock et dont ils ne savent que faire.

    Le plan franco-allemand a ramené le taux d’emprunt italien, qui était monté jusqu’à 2,228 %, à 1,601 %, mais l’endettement italien devrait bondir de 135 % du PIB à 155 % du PIB d’ici fin 2020, soit 2.400 milliards d’euros. De nouvelles frictions avec les pays « frugaux » pourraient faire remonter les taux italiens à la verticale.

    La tendance à long terme de l’or, si l’on considère un simple graphique depuis 1971, est clairement à la hausse, avec l’index technique actuel du RSI (relative strength index) de 70 qui renforce la probabilité. La Bourse américaine est toujours surévaluée avec un ratio P/E (cours/bénéfice) qui est actuellement de l’ordre de 30. Le métal précieux pourrait atteindre les 3.500-4.000 dollars l’once dans les trois années à venir. Rien d’étonnant puisque le bilan de la Fed est en train d’exploser, fin mai, à plus de 7.000 milliards de dollars, alors qu’il était à 4.200 milliards de dollars, seulement, fin février 2020.

    Si l’on évalue le coût de la facture des dépenses de l’État fédéral pour éviter le coût de la Grande Dépression aux États-Unis, ce pourrait être jusqu’à 10.000 milliards de dollars, soit une augmentation de 50 % de la dette publique américaine, alors que l’on est, à ce jour, à 2.000 milliards de dollars, avec une demande supplémentaire des démocrates de 3.000 milliards de dollars. C’est toujours la même chanson partout dans le monde : toujours plus de dépenses publiques et de dettes !

    Tout cela ne peut se terminer que par une immense explosion à venir et un nouvel ordre monétaire international fondé exclusivement sur l’or, contrairement à ce qui avait été décidé en 1945 à Bretton Woods (Gold Exchange Standard).

  • Raoult, ou le territoire victime de la carte !, par Christian Vanneste.

    Pour un habitant du nord de la France, l’aphorisme célèbre d’Alfred Korzybski, « la carte n’est pas le territoire » prend tout son sens. La dénomination dont on a affublé sa grande région, essentiellement plate, et dénuée de la moindre identité réelle, qui s’étend de la proximité parisienne jusqu’à la frontière belge, est grotesque. Aucune montagne n’y a arrêté le flux des invasions, mais lorsqu’on quitte le territoire pour regarder la carte, effectivement Lille, la capitale régionale, à une grosse dizaine de kilomètres de la Belgique, se trouve tout en haut. Personne, toutefois, n’aurait eu la malencontreuse idée d’appeler l’une des régions méridionales, « les bas de France ».

    christian vanneste.jpgIl y a, dans le choix du nom idiot de la réunion du Nord-pas-de-Calais et de la Picardie, l’effet d’une double réalité qui consiste en définitive à nier la réalité, à gommer le territoire pour n’en conserver que la carte. Il y a d’abord la réalité de celui qui choisit : le membre de l’oligarchie, celle qui peuple les Assemblées, les palais de la République, les ministères, les bureaux, les cabinets, les antichambres, les salles de rédaction, qui a perdu de vue le territoire depuis longtemps, si jamais elle l’a connu, et qui n’en conserve que la vision d’une carte qu’on fait apparaître à l’écran. Il y a ensuite la recherche purement verbale qui réduit l’action à la communication et fera opter pour le nom le plus valorisant, le plus démagogique : on va flatter les « chtis » en les situant dans les « Hauts de France ». Peu importe la rose, c’est son nom qui compte ! Comme le dit Michel Maffesoli au début de la Nostalgie du sacré, « il convient de se méfier de ce que Jean-François Colosimo nomme le « logisme » asservissant la vie à une représentation promue réalité ».

    C’est entendu, tous les hommes vivent dans la bulle de leurs représentations et n’ont du monde que la traduction que leur en donne le système de pensée, la religion, l’idéologie qui forgent l’esprit de la communauté au sein de laquelle ils vivent. Les choses ne nous apparaissent qu’à travers les mots par lesquels on les désigne. Mais on pouvait espérer que l’esprit scientifique, que la méthode cartésienne allaient dissiper les fantasmes, démonter les simulacres, pour parvenir à une représentation objective des choses et du monde. Dans le même temps, on pouvait imaginer que les peuples, mieux éduqués, allaient se libérer de leurs préjugés traditionnels, et se muer en nations de citoyens éclairés, libres et responsables. Or nous vivons une période qui remet en cause ces illusions. Tant que le rideau de fer séparait le « monde libre » du totalitarisme marxiste, on pouvait se dire que « 1984 », que la prison mentale peinte par Orwell, c’était l’autre côté, sa police politique et ses goulags, sa propagande tenant lieu d’information. D’une certaine manière, le mur ne protégeait pas seulement l’univers soviétique d’une réalité qui a fini par le détruire, il garantissait l’Ouest contre la confusion des idées, et confortait ses populations dans une vision rassurante de leur monde, celui où régnait la liberté de consommer et de penser.

    Trente ans après la chute du mur, le monde occidental a mal digéré sa victoire. Non seulement les certitudes qui formaient le cadre de la pensée à l’abri de laquelle il vivait ont été systématiquement déconstruites, non seulement il a pris conscience que lui-aussi, face à l’est, vivait dans une bulle, simplement plus agréable, plus hédoniste, mais encore il a du s’habituer à la confusion des valeurs et des idées, soumis cette fois non à une propagande unilatérale mais à matraquage quotidien et tournoyant, faisant se succéder les modes idéologiques, les peurs collectives et les obsessions communautaires. Dans ce chaos qui a pris la place de la conscience collective, une ligne de fracture s’est dessinée. De plus en plus, il y a, d’une part, le « courant dominant » qui vient d’en haut et tente d’imposer le conformisme de la pensée unique qui campe dans les lieux de pouvoir et dans les grands médias, au-delà de distinctions superficielles, et, d’autre part, le fourmillement, l’effervescence, le bourdonnement permanents qui se propagent sur internet. En haut, il y a ceux qui veulent imposer la carte au territoire, et en bas il y a ceux qui vivent dans leur terroir, celui qu’ils connaissent avec ses odeurs et ses saveurs, mais aussi, et plus nombreux, ceux qui habitent les chateaux enchantés de leurs rêves. On voudrait opposer l’objectivité et l’universalité des premiers au morcellement et à la dispersion des seconds. C’est ainsi que de grands organes de presse pourchassent les « désinformations ». C’est ainsi que le gouvernement avait même envisagé de créer un site rassemblant ces chasseurs de sorcières.

    La réalité est plus complexe. Quand on perçoit les intérêts qui dirigent le monde d’en-haut, orientent ses manipulations, et expliquent ses mensonges, le bruit de fond des internautes de tout poil prend davantage de valeur. Le lynchage médiatique et gouvernemental du professeur Raoult est un exemple riche de sens de cette confrontation entre la carte et le territoire, entre la pensée dominante et la contestation. Le « docteur » marseillais s’appuie sur son expérience de terrain, sur son « territoire ». Ses adversaires sont ceux qui dessinent les cartes, les peignent de couleurs diverses, maintiennent notre pays dans une étrange ambiance de menace et de catastrophe qui asphyxie la liberté. L’efficacité de l’hydroxychloroquine n’est plus le problème. La vraie question est de savoir dans quel simulacre de démocratie nous vivons !

  • Avantages du désastre, par Radu Portocala.

    Source : https://www.politiquemagazine.fr/

    Le monde d’après, promesse ou une menace ?

    Le monde d’après. Ces mots qu’on prononce de plus en plus souvent, avec une sorte de révérence presque religieuse, sont-ils une promesse ou une menace ? Ils prétendent se dresser comme une porte entre les temps : il y a eu celui d’avant la maladie et il y aura celui d’après la maladie, de même que nous parlons d’un avant et d’un après le déluge. Ils donnent à ce mal éphémère la signification d’un cataclysme qui a brisé l’histoire.

    radu portocala.jpgLe monde d’après… L’humanité a été placée sur son lit de mort et, à son chevet, des faux prêtres aux yeux luisants susurrent inlassablement ces mots, telle une extrême-onction dévoyée. À ceux qui se demandent si le moribond sera voué à l’enfer ou au paradis, il faut répliquer par une autre question : y aura-t-il désormais une vraie différence entre les deux ? N’oublions tout de même pas qu’au fil du temps, des visionnaires ont déjà proposé, ici et là, des paradis infernaux, et que nous sommes encore, bien trop souvent, harcelés par des prophètes à l’inspiration douteuse.

    De cette maladie est peut-être censé naître le Monde nouveau qui agite depuis trois ans les rêves d’Emmanuel Macron – ce monde où, nous assure-t-on avec sévérité, plus rien ne sera comme avant.

    Nous entrons, donc, dans un temps qui sera fait de rigueurs. « La confiance n’exclut pas le contrôle » annonçait Christophe Castaner, citant – peut-être même sans le savoir, ce qui ne fait qu’augmenter la violence du propos – une des pensées glaçantes de Lénine. Il y a là une absurdité et une misère. Atteint d’une affection rare, qui lui fait voir les choses à l’envers, le pouvoir nous informe par la voix de son ministre de l’Intérieur qu’il nous fait confiance. Après trois ans à la tête de l’État, ces gens n’ont pas compris que ce n’est pas à eux de nous faire confiance, mais à nous de leur accorder la nôtre, et que si, par erreur, ils ont gagné celle d’une minorité, ils sont en train de la perdre. Voilà pour l’absurdité – qui, sous-entendant que le peuple est le subordonné du pouvoir, frôle une arrogance à la fois insupportable et dangereuse.

    Pour ce qui est de la misère, elle est et sera multiple. Le contrôle, d’abord – cette obsession primordiale d’Emmanuel Macron et des siens. Un pouvoir sans intelligence, assis sur une légitimité bancale, ne peut tenir que par l’encadrement de la société. Après les lois de censure, la maladie semble avoir été offerte comme un don inattendu à nos chefs. Elle leur a permis, d’abord, de mesurer les limites de notre obéissance. Entre prohibitions et contraintes, l’expérience leur a donné satisfaction. Ils sont contents de nous.

    « Cette maladie a mis le monde à genoux », disent-ils, pour pouvoir ensuite prétendre : « Maintenant, nous allons le reconstruire à notre idée ». Pourtant, le monde n’a pas vacillé à cause de la maladie ni des 300 000 morts enregistrés dans 187 pays (en 2017, la grippe et les maladies respiratoires qu’elle entraîne ont fait quatre fois plus de victimes), mais par la faute des décisions ineptes qui ont été prises, faites de mensonges, d’entêtements, d’incohérences, de cafouillages – et, par-dessus tout, d’une formidable incompétence. Le Monde nouveau, si nous le laissons advenir, sera le résultat de ces ratages et portera leur marque.

    Une mystique de la catastrophe

    En France, le pouvoir a profité de la maladie pour concevoir une étrange mystique de la catastrophe. De ce malheur qu’il affirme sans pareil, il peut nous ramener à la lumière – mais ce sera sa lumière, et il nous faudra suivre la voie qu’il nous indiquera d’autorité. Il se démène pour notre bien – tout système autoritaire le clame et s’en justifie –, nous pouvons donc, au moins, lui faire témoignage de notre reconnaissance en nous pliant à ses injonctions.

    Dans le Monde nouveau il faudra avoir peur, car la peur est l’acolyte le plus précieux des régimes qui cherchent à soumettre. Les chefs la prescrivent, les fonctionnaires de presse la propagent et l’entretiennent – les résultats de l’essai, ces derniers mois, sont probants. Il faudra aussi se laisser surveiller, et puisque la bonne cause sera invoquée, peu s’aviseront à protester au risque du châtiment et de l’opprobre. Chaque alarme, fût-elle fausse, conduira à des restrictions, auxquelles nous nous habituerons à tel point qu’il sera difficile de s’apercevoir quand elles deviendront définitives. En fin de compte, nous serons toujours en faute : contre les règles sanitaires, contre les oukases écologiques, contre les normes de plus en plus rigides du politiquement correct, contre la vérité officielle – et nous serons heureux quand le pouvoir magnanime omettra, de temps en temps, de nous punir. Car le Monde nouveau sera austère et implacable.

    C’est par ces moyens seulement que la prophétie qui veut que plus rien ne demeure comme avant pourra se réaliser. Il aura fallu une maladie pour que nous fassions un pas de plus vers l’étouffant Bien total.

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  • De l'Amoco Cadiz à Grande America : les tristes marées noires.

     

    Par Jean-Philippe Chauvin

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    Le 16 mars 1978 au soir, le pétrolier Amoco Cadiz s’échouait, se brisait en deux, puis coulait au large de Portsall, libérant des centaines de milliers de tonnes de fioul saoudien et iranien : je m’en souviens comme si c’était hier, et c’était pourtant il y a 41 ans et c’est encore aujourd’hui, avec ce nouveau naufrage d’un « navire poubelle » comme le qualifie Le Figaro dans son édition de vendredi dernier.

    Le nom de ce nouveau cauchemar s’appelle « Grande America », et son carburant, ainsi que l’huile et l’essence des vieilles voitures qu’il transportait, s’apprête à souiller les côtes charentaises et guyennaises, au grand désespoir des Français des bords de l’Atlantique et de tous les amoureux du littoral français. Un désastre écologique, au moment même où deux manifestations d’importance viennent d’avoir lieu dans notre pays, vendredi et samedi, pour sensibiliser nos concitoyens aux questions environnementales et alerter les pouvoirs publics sur les dangers de notre société de consommation : triste concordance des temps et dramatique collision des événements ! 

    Amoco_Cadiz_1_edit1.jpgIl y a quatre décennies, le bilan environnemental du naufrage de l’Amoco Cadiz [Photo] avait été particulièrement lourd, comme le rappelle Aujourd’hui en France ce dimanche 17 mars : « L’« Amoco Cadiz » a tué plus de 20.000 oiseaux, vitrifié 5 % de la flore et 30 % de la faune marine sur une superficie de 1.300 km2 ». Pour moi, adolescent, c’était la crainte de voir arriver sur notre plage de Lancieux ce fichu mazout et de retrouver nos mouettes engluées et étouffées par ce maudit pétrole : en fait, ce ne fut que « la queue de la pollution », et quelques grosses flaques et boulettes noires, visqueuses, mais quelques oiseaux, trop nombreux, en furent aussi les victimes au pied de l’Islet. Ce ne fut pas le même tabac un peu plus à l’ouest, et la colère saisit alors tous les amoureux de la Bretagne, comme le présentateur de la Première chaîne de télévision de l’époque, Roger Gicquel, qui le fit bien comprendre aux auditeurs de ses journaux du soir ! 

    Après l’Amoco Cadiz, il y eut l’Erika en 1999, puis le Prestige en 2002, avec des conséquences environnementales encore pires qu’en 1978 : les navires étaient devenus de plus en plus énormes et le rythme des circulations maritimes n’avait cessé de s’accélérer et de multiplier les flux, mondialisation oblige. Parmi tous les bateaux croisant sur les mers, combien de « navires poubelles » ? Trop, encore trop, toujours trop ! D’autant plus que celui de cette semaine emportait dans ses flancs et sur son pont des conteneurs de vieilles voitures, considérées comme trop polluantes en Europe et destinées aux marchés africains, moins regardants sur les questions environnementales au nom d’un « développement » qui consiste juste à préparer l’entrée de nouveaux pays et de nouvelles populations dans la société de consommation et de croissance : immense hypocrisie d’un système qui vante (parfois) l’écologie, en particulier lors des grandes marches pour le climat et des différentes COP, et qui se débarrasse de ses déchets pour quelques profits supplémentaires près de personnes qui, elles, n’ont visiblement pas droit aux mêmes attentions sanitaires ! 

    1903185873.pngQuels risques, aujourd’hui, pour nos côtes ? Dans Libération du lundi 18 mars, le maire de La Rochelle évoque une possible pollution au fioul de grande ampleur : « Ma plus grande préoccupation c’est la culture marine, les ostréiculteurs, les mytiliculteurs ou encore les sauniers. Sur les huitres ou les moules, les dommages peuvent être irréversibles et avoir un impact sur l’économie locale. » Et le journal de poursuivre : « S’il est impossible d’évaluer les répercussions, les conséquences sur l’activité des professionnels de la mer pourraient en effet être dramatiques, notamment en termes d’image. ». Car il ne faut pas oublier que toute catastrophe environnementale est aussi une catastrophe sociale, et qu’elle peut peser fortement sur certaines professions et sur l’emploi des régions touchées : ceux qui séparent l’environnemental du social commettent une erreur d’analyse, mais c’est une erreur désormais moins courante qu’il y a quelques décennies, et la réponse n’est plus seulement, et heureusement, de simples indemnités mais une stratégie visant à préserver et pérenniser les activités professionnelles locales. Est-ce suffisant pour autant ? Pas toujours, malheureusement, et cela ne répare pas ce qui est détruit, pour un temps plus ou moins long, c’est-à-dire la nature et ses richesses, aujourd’hui déjà fragilisées par les aspects et effets de la société de consommation. 

    1929471531.jpgCe qui est certain, c’est que ce nouveau naufrage et la difficulté qu’il y a à savoir ce que contenaient exactement les conteneurs reposent crûment quelques questions sur un modèle économique et idéologique qui, pour être dominant, n’en est pas moins dangereux pour la planète et ceux qui la peuplent ou y vivent, du végétal à l’animal, sans oublier, évidemment, les humains. Penser l’avenir français, pour notre cas spécifique, force à penser l’écologie : pour le vieux royaliste que je suis, celle-ci ne peut être qu’intégrale, c’est-à-dire éminemment politique et, pour la France, royale.  

     Le blog de Jean-Philippe Chauvin

  • Lourdes questions

     

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    « C'est contre la stratégie du Pouvoir qu'il convient aujourd'hui de porter les plus graves accusations. »

    Quelle aura été la stratégie du Pouvoir face aux Gilets jaunes ? Peut-on seulement imaginer qu'il n'y en ait pas eu une ? Et si la réponse est non, en quoi a consisté cette stratégie ?  

    « Lourdes questions », comme on l'a dit. Et réponses tout aussi lourdes. Gravement accusatoires. 

    Comment transmuer une saine révolte d'un Pays Réel exsangue, exaspéré par la voracité d'un Système désormais détesté dans son essence, en une troupe de casseurs marginaux, ultra-violents d'où la masse des gilets jaunes des débuts s'est retirée peu à peu, inexorablement, de semaine en semaine ? Comment lui ravir le soutien de l'opinion ? Elle est là évidemment la stratégie du Pouvoir. 

    87876175_o.jpgLaquelle ? Pourrir la révolte populaire, celle des « braves gens » des débuts qui avaient fait reculer Macron en décembre par leur nombre, par leur sincérité et par leur détermination et qui l'avaient effrayé aussi à cause du soutien que leur apportaient plus des deux-tiers des Français, ramenant la popularité du Chef de l'État à presque rien. L'allié inavoué de cette opération, l'auxiliaire précieux du pourrissement, ce seront les hordes de l'ultragauche, troquant ou non, selon le cas, leurs cagoules, leurs capuches et leurs sinistres habits noirs, pour un gilet jaune. L'on ne distinguerait que rarement entre vrais et faux gilets jaunes. Ces derniers on les confondrait avec les vrais gilets jaunes. L'on appellerait l'ensemble  indifférencié « les manifestants ». Comme si les Black Blocs étaient des « manifestants » ! Les médias se chargeraient comme un seul homme de l'amalgame sans besoin d'instructions ni de consignes. Le soutien populaire au mouvement  Gilets jaunes s'effriterait lui aussi de semaine en semaine. Quoique, encore aujourd’hui, il avoisine toujours 50%.

    c05aa9dd4efdd196e5863951bf0e74120c023044_field_image_principale.jpgOn établirait des parallèles de diversion, dépréciatifs. Par exemple, l'on monterait en épingle les manifestations écologistes, si nombreuses, si paisibles et par-dessus le marché si « festives ». Le concept tant apprécié ! Il n'y aurait ni Baudelaire ni Murray pour dire son fait à  ce « festivisme » nigaud et parfaitement déplacé quand à quelques encablures les Champs-Élysées brûlent. Et puis l'on lancerait le Grand débat, réplique moderne, façon 2019, des États-Généraux de 1789, mais transformés en One man show présidentiel, ce que Louis XVI, roi d'une France organique et non d'un peuple atomisé, n'eût jamais osé faire en admettant que l'idée alors inconvenante lui en fût venue.  

    On ne tentera donc rien pour neutraliser les violents : Black Blocs, Antifas, racailles et pillards. Les mêmes ou à peu près que l'on avait vu se greffer sur les occupants plus ou moins alternatifs de Notre-Dame des Landes, les mêmes venant de toute l'Europe en appoint des troupes locales. Pour casser, détruire, exercer leur pleine violence révolutionnaire anarcho-nihiliste. Rien n'a été fait pour les neutraliser préventivement et peu de choses sur le terrain. Manque de moyens, désorganisation de la Préfecture de police, absence d'instructions claires et appropriées à la gravité de la situation, de la part des « politiques », trop d'effectifs de police - et les plus aguerris - affectés à la protection des bâtiments officiels plutôt qu'à la rue, comme le pense Alain Bauer ?  Ou stratégie du pourrissement, du discrédit et de l'amalgame ? Mais ces deux explications s'excluent-elles ? Et pourquoi donc ? Leur cumul, tout au contraire nous semble parfaitement vraisemblable. Et, en fait, conforme à la réalité. 

    La vérité est qu'on n'a pas voulu (Macron, Philippe, Castaner) se priver des précieux auxiliaires que l'on s'est trouvé depuis quatre mois pour se tirer d'affaire. Pauvres, pauvres Gilets jaunes ! 

    XVM4b9a4ea0-4d58-11e8-8fb1-21d07020916d-805x453.jpgDans un peu plus d'un mois, ce sera le 1er mai et ce seront les défilés traditionnels convoqués par des syndicats fantomatiques qui n'ont plus ni adhérents, ni troupes, ni gros bras pour expulser les indésirables. Plus question d'incriminer les gilets jaunes. Comme le 1er mai 2018, [Photo] les Black Blocs et autres similaires engeances se chargeront de la casse sur le dos des centrales syndicales frappées d’obsolescence et d'impuissance. Rendez-vous est pris. Il serait bien étonnant que les Black Blocs ne l'aient pas déjà inscrit à leur agenda. Ce sont des révolutionnaires organisés et efficaces. Nous verrons bien. Accusera-t-on les syndicats de la casse ?

    C'est contre la stratégie du Pouvoir dans l'affaire des Gilets jaunes qu'il convient aujourd'hui de porter les accusations les plus lourdes.   

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    En deux mots, réflexion sur l'actualité
  • LOUIS XVI 2019 ! Mémoire et acte politique fort : marquer le début de notre décadence

    Visuel Lafautearousseau Le quotidien royaliste sur le net ISSN 2490-9580 ©

    blue-wallpaper-continuing-background-wallpapers-bigest-images - Copie.jpgEn 1789, les principes du totalitarisme furent énoncés, ses bases furent jetées, et ils furent appliqués méthodiquement avec - comme conséquence inévitable - le Génocide qui en découlait fatalement.

    Au même moment, le principe opposé fut également proclamé : liberté intérieure face à l'oppression d'un pouvoir sans limite qui, ne se reconnaissant aucune autorité supérieure, se révélait vite mille fois plus tyrannique que les antiques autorités qu'il prétendait abolir.

    Deux messages, antinomiques et irréconciliables furent donc lancés au monde en France, et par la France, marquant l'ouverture du grand cycle révolutionnaire...

    sans-titre.jpgLe 21 janvier 1793 est l'acte fondateur de tous les totalitarismes modernes et il est à l'origine de toutes les horreurs qui devaient suivre : Staline, Hitler, Mao, Pol Pot, Ho Chi Minh, Ceausescu et la Stasi, Le Lao Gaï et le Goulag...

    Il est également - selon le mot fort juste de Prosper de Barante – « l'évènement le plus terriblement religieux de notre Révolution », car c'est bien une religion nouvelle qu'il s’agit d’instaurer, la Nouvelle Religion Républicaine, prétendant effacer toute trace de l'antique religion chrétienne.

    De ce fait, le 21 janvier dure encore aujourd'hui, par ses conséquences désastreuses, qui ont affecté non seulement la France mais toute l'Europe et, aussi, la terre entière. Il ne s'agit pas d'un fait historique « terminé ».

    Il est l'origine du premier crime de masse contre l'humanité des temps modernes - des crimes dont on sait qu'ils sont réputés imprescriptibles.

    A l'inverse, le soulèvement vendéen est lui aussi l'acte fondateur de toutes les révoltes modernes contre l'oppression tyrannique d'un Etat sans limites.

    En tant que fait historique donné, avec ses formes extérieures qui appartiennent maintenant à l'Histoire, les Guerres de Vendée, « Guerre de Géants » comme les a qualifiées Napoléon, sont évidemment terminées, et depuis longtemps.

    Mais, en tant que première expression collective du refus de l'oppression, de la défense de la liberté intérieure de la personne, de la résistance à l'Etat tout-puissant, tyrannique et oppresseur, elles sont un message universel, comme l'a très bien vu et très bien exposé Soljenitsyne. Et ce message appartient à l'Histoire en même temps qu'à chaque peuple, à chaque communauté historique, à chaque être humain.

    De ce point de vue - évidemment fondamental - les Guerres de Vendée ne sont pas terminées elles non plus, pas plus que le 21 janvier, leur acte fondateur contraire.

    4019472437.2.jpgLes Vendéens, les chouans, ne se soulevaient pas pour imposer l'Etat partout, le totalitarisme, aux autres habitants de France. Ils n'étaient pas agresseurs, ils étaient agressés. Ils ne souhaitaient pas imposer, ils souhaitaient qu'on ne leur impose pas. Ils se soulevèrent contre l'Etat, pour refuser son intrusion dans la sphère privée, pour l'empêcher d'organiser tout, de réglementer tout, d'installer une loi unique régissant tout et tous, jusques et y compris - et surtout - dans les consciences. Les paysans vendéens, les chouans ne se sentaient pas porteurs d'un modèle parfait qu'ils prétendaient imposer aux autres. Ils demandaient simplement que l'Etat ne sorte pas de sa sphère, et ne s'arroge pas le pouvoir sur les consciences. Ils voulaient qu'on les laisse en paix, et qu'on les laisse vivre comme ils l'entendaient.

    Les Vendéens - et Louis XVI en refusant la Constitution civile du Clergé et ce qui en découlait - sont bien les premiers résistants de France, et du monde, au totalitarisme qui pointe à la fin du XVIIIème, et qui va ravager la terre, sous ses diverses formes - diverses mais semblables, au fond - au XXème.

    Ce combat de titans entre libertés et oppression étatique dure encore. Le cycle révolutionnaire se poursuit et durera jusqu'à son épuisement. Jusque-là, pour reprendre le beau titre d’Arte pour l'une de ses émissions, on appellera les Vendéens « Dissidents : les artisans de la liberté... »

    Depuis plus de deux siècles maintenant, les victimes attendent non pas la vengeance, mais la Justice : qu'avec la reconnaissance officielle du Génocide vendéen, il soit mis fin au négationnisme, au mémoricide dont se rend coupable le Système actuel, héritier des crimes de 1793-1794 et du régime totalitaire qu'ils ont imposé à la France.

    C'est cela que nous marquons, chaque 21 janvier : et c'est un acte politique fort, tout au contraire d'une vaine nostalgie. Par le rappel de cette date fatidique et de son sens profond, nous redisons chaque année aux Français d'où vient leur décadence, quand et comment elle a commencé. Et nous leur disons que le seul combat qui vaille est celui de proposer le rejet de ce régime, un régime totalement en crise aujourd'hui, mais qui reste fondé sur les mensonges, les erreurs et les horreurs du Terrorisme révolutionnaire.

    Voilà pourquoi nous vous invitons tous à nous rejoindre et à participer aux différentes cérémonies et manifestations qui auront lieu dans toute la France, et qui sont d'ailleurs chaque année plus nombreuses et plus suivies. 

    Annonces

    Nous publierons rapidement le tableau récapitulatif de toutes les cérémonies et manifestations qui nous seront signalées, liste - toujours très longue - qui sera mise à jour au fur et à mesure que nous en aurons connaissance.
    Les organisateurs peuvent d'ores et déjà, nous en communiquer les détails, pour être publiés ici. 
    Courriel : lafautearousseau@outlook.fr
  • Résurgence du Pays Réel, effondrement du Pays Légal ...

     

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    On l'a dit - en reprenant la vieille dialectique maurrassienne : les événements que nous venons de vivre et sans-doute encore ceux qui vont suivre, peuvent s'analyser comme une résurgence du Pays Réel que l'on croyait anéanti à tort, et, sous ses coups de boutoirs, comme un effondrement parallèle du Pays Légal, élargi à toutes les composantes du Système, aujourd'hui décréditées dans leur globalité à un point, semble-il, irréversible. 

    Certes, la cible principale de la révolte c'est Emmanuel Macron et, bizarrement, comme si nous étions encore en monarchie, c'est aussi son épouse Brigitte, objet de railleries et d’insultes de tous types. Il faut, pour s'en rendre compte, avoir entendu sur le vif les cris de la rue. D’aucuns se sont rappelé que, comme les Anglais et les Russes, les Français sont au propre ou au figuré un peuple régicide... Mais les sondages montrent aussi la déconfiture généralisée des partis - hormis, il est vrai, celui de Marine Le Pen. Les grands partis traditionnels sont tous autour de 10%, voire très au-dessous. Et les syndicats, donc ! Chaque fois qu'ils ont voulu entrer dans le jeu, ils ont été récusés, toute représentativité leur étant à juste titre déniée. Ils ne font plus illusion. Il n'y a plus vraiment d'organisations ouvrières. Il en est de même des parlementaires. Les nostalgiques doivent s'y faire : le  parlementarisme classique, façon XIXe ou XXe siècle, n'est plus du tout au goût du jour. C'est un archaïsme. Les journalistes, universellement décriés, n'ont pas meilleure presse... Méfiance générale à leur endroit. Finalement, ce n'est qu'avec les forces de l'ordre que, paradoxalement, les manifestants de ces derniers samedis ont eu des moments de fraternisation ... 

    Que peut donner une révolte populaire de type spontanéiste, sans commune substance, sauf ce qu'il lui reste d'enracinement, sans organisation, sans hiérarchie, sans conscience claire des conditions et des limites du raisonnable et du possible ? C'est une autre question. Elle est principale. 

    Qu'il existe toujours un peuple français enraciné, capable de « faire société »,  au moins sous forme embryonnaire, et doué d'une faculté de réaction non-négligeable, au point de faire reculer, tanguer, capituler un État puissant mais sans légitimité vraie, est une bonne nouvelle. 

    2432677-la-gauche-francaise-pionniere-de-la-deregulation-financiere.jpgSera-ce au point d'avoir réellement contraint - persuasion ou simple rapport de force - le président de la République à un renversement durable et complet de politique – assimilé à celui opéré par Mitterrand en 1983 -  comme le croit Éric Zemmour ? A ce dernier l'on ne peut dénier expérience, culture et flair politiques. On doute toutefois un peu lorsqu'il écrit : « Macron ne jurait que par l'Europe et le libéralisme. Depuis lundi, il s'est rabattu toute honte bue sur le national et le social.  C'est la grande victoire des gilets jaunes et de cette France périphérique qui avait été jusque-là sacrifiée à la mondialisation. C'est la grande défaite des élites qui avaient hissé Emmanuel Macron sur le pavois » Et encore : « il a été obligé de baiser la babouche de ces Gaulois réfractaires qu'il méprisait et de jeter ses armes au pied de son vainqueur. Son quinquennat est fini. En tout cas celui qu'il avait débuté triomphalement en mai 2017. » Les semaines qui viennent confirmeront-elles ou non cette analyse ? En tout cas, il est clair que ces derniers jours, le pouvoir s'en est constamment tenu aux reculades, à la repentance, aux excuses, aux concessions, aux regrets assortis d'une distribution d'espèces sonnantes et trébuchantes. En réponse aux contestataires et aux émeutiers, « Vous avez raison » a été le maître-mot du Chef de l'État et de ses ministres. En ont-ils eu réellement peur ? C'est bien possible.  

    Le mouvement contestataire vient de très loin et de très profond même s'il est fait d'un peu n'importe quoi et s'il ne repose sur aucune intelligence politique structurée. Est-il fait pour durer, s'amplifier, se métamorphoser ? Nous le verrons. Dans une chronique alarmiste sur Europe 1, Jean-Michel Apathie, pour une fois lucide, a montré en tremblant comment l'État ne tient plus qu'à un fil. "Et ce fil, c'est la police". Elle-même en colère et susceptible de retournement. Dans un entretien de haute volée avec Mathieu Bock-Côté, Alain Finkielkraut signale de son côté que le gouvernement français craint un embrasement des banlieues ! 

    XVM5b1b42c6-fcc1-11e8-b5a2-b44637c34deb - Copie.jpgEmmanuel Todd, enfin, avance une analyse fine, subtile et profonde, à l'encontre d'Emmanuel Macron : son image hier charismatique et forte, s'est transmuée en celle d'un enfant. C’est désormais sous les traits d’un enfant que les Français l’envisagent. L'autorité ayant toujours plus ou moins la figure du père, Emmanuel Macron en a perdu l'apparence et sans doute la réalité. Irrémédiable déchéance ! Décidément, la coupe est pleine. De quoi demain sera-t-il fait ? Mais, en tout temps, les « remises en cause » sont suivies d’une remise en ordre. 

    Vers quel type de remise en ordre, au bout du compte, cela peut-il conduire ? C'est, pour l'instant, la grande inconnue. Les nécessités françaises oscillent entre ces deux impératifs. Un peuple et un Etat. 

    Il n'y aurait plus de nation française sans un Pays Réel minimum. Mais pas de France non plus sans ordre politique et social, sans autorité reconnue, sans un État rétabli, sans une action politique volontariste et nationale,  en bref, sans une incarnation agissante du Bien Commun. 

    Sans-doute, dans cet esprit, comme de nombreux Français le pensent, une période « autoritaire » transitoire de reconstruction du pays serait-elle nécessaire pour affronter la situation présente. A terme, le recours au Prince, le retour au principe dynastique,  demeure la  solution optimale.  ■ 

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    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Saint Augustin actuel [4]

    Augustin dans son bureau par Vittore Carpaccio, 1502 

    Par Rémi Hugues 

    saint_augustin visuel.jpgA l'approche des Fêtes, Rémi Hugues propose une série de sept articles consacrés à l'actualité de la pensée de Saint Augustin, père de l'Eglise. Ils sont publiés chaque jour. Bonne lecture !  LFAR

     

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    Augustin dʼHippone, premier grand philosophe de lʼÉglise  

    Comme tout bon moderne qui se respecte, Marx sʼattache à rompre avec la Tradition, ce qui le pousse à adopter le matérialisme, inspiré quʼil est tant par Héraclite que par lʼéconomisme des philosophes anglais. La pensée traditionnelle est en réalité plus spiritualiste quʼidéaliste. Elle est fondée sur le postulat suivant : un Esprit suprême, Dieu, a, à la suite d’un acte impératif, créé la matière ex nihilo. Le Verbe divin créateur façonne le monde physique, et non comme le croyaient gnostiques et cathares, le dieu mauvais, le démiurge. 

    Grégoire de Nysse, qui vécut comme Augustin au IVème siècle, en Cappadoce, une région de la Turquie actuelle, explique que la matière naquit de lʼinteraction, de lʼinterférence, entre des puissances spirituelles. Il dit en effet que « la nature spirituelle donne lʼexistence à des forces spirituelles et la rencontre de celles-ci donne naissance à la matière. »[1] Chez Marx le cœur du problème réside non pas dans la création de la matière, sa mise en effectivité, mais dans sa transformation. Qui contrôle le processus de transformation de la matière, la gestion de lʼutile et du nuisible, quels types de machines sont utilisées, quel est le statut juridique du lieu de cette transformation, ainsi que le statut juridique de ceux qui sont les exécutants, ceux qui plus prosaïquement reçoivent les ordres... 

    ainsi-parlait-zarathoustra-9782253006756_0.jpgMais le matérialisme de Marx est inséparable de son athéisme, forme radicale du rationalisme. Il participe pleinement à ce processus que Friedrich Nietzsche appellera dans Ainsi parlait Zarathoustra la « mort de Dieu », la sécularisation. Une autre expression de Nietzsche sʼapplique parfaitement à Marx : celle dʼinversion ou de renversement des valeurs. Lʼun des traits caractéristiques du système philosophique composé par ce dernier est lʼantinomisme, lʼhostilité à la Loi du Père. 

    Prince_of_darkness.jpgÀ la loi du Père suprême, que lʼon retrouve explicitement exposée chez son propre gendre Edward Aveling, dans la stance The Prince of Darkness :

    « Telle la tombe qui étend ses ailes

    Il passe, ô peuple, Satan le grand !

    Salut grand défenseur de la Raison !

    Vers toi monteront lʼencens sacré et les vœux

    Tu as détrôné le dieu du prêtre. »[2] 

    Un antinomisme visiblement typique des socialistes, comme en attestent ces lignes écrites de la main de Pierre-Joseph Proudhon dans De la justice dans la Révolution et dans lʼÉglise : « Viens, Satan, viens le calomnié des prêtres et des rois, que je tʼembrasse, que je te serre sur ma poitrine ! »[3] 

    Mais aussi cette hostilité vise le père symbolique de Marx, son maître à penser, à savoir Hegel. Le jeune Marx appartenait même à un groupe qui se faisait appeler les « hégéliens de gauche ». En 1844 Hegel est lʼobjet dʼune diatribe de la part de son ancien disciple, publiée dans les Annales franco-allemandes. Marx y écrit : « Hegel va presque jusquʼà la servilité. On le voit totalement contaminé par la misérable arrogance du fonctionnarisme prussien, qui, dans son étroit esprit bureaucratique, regarde la confiance en soi-même de lʼopinion (subjective) du peuple. »[4]      

    Conséquence de cette rébellion contre le père, Marx oppose, à lʼidéalisme de Hegel, le matérialisme. Il renverse également le rapport de détermination établi par Hegel entre lʼÉtat et la société civile. 

    711x400_gettyimages-159828268.jpgHegel défend lʼidée selon laquelle lʼÉtat, en tant que garant de lʼordre, assure aux individus la sécurité, qui est la première des libertés. Cʼest le sens de sa définition de lʼÉtat comme réalité effective de la liberté concrète. Lʼexistence de lʼÉtat est la condition de possibilité de la vie menée collectivement par les hommes au sein dʼassociations en tout genre (familles, tribus, églises, guildes, entreprises, clubs, etc.), hormis la vie de lʼÉtat lui-même, qui correspond à lʼadministration de la coercition (police, justice, et armée ; les fameuses fonctions régaliennes de lʼÉtat). 

    Cette vie hors de lʼÉtat, Hegel lʼappelle dans Principes de la philosophie du droit État « extérieur », État « de la nécessité et de lʼentendement », ou plus simplement société civile bourgeoise. Jean-François Kervégan met en évidence que Hegel est à lʼorigine de « la conceptualisation dʼune société civile bourgeoise qui, enracinée dans le mécanisme du monde moderne (capitaliste) dʼéchanger et de produire, est à la fois distincte de la sphère proprement politique et nécessairement coordonnée et subordonnée à celle-ci. »[5] 

    Il y a en somme pour Hegel un lien de dépendance de la société civile vis-à-vis de lʼÉtat. Lʼune est subordonnée à lʼautre. Selon lui le politique est principe : à la fois premier, originaire, et prescripteur, organisateur de la vie sociale en général. Rapport qui chez Marx est inversé : la société civile (bourgeoise) installe, fonde, lʼÉtat.  (A suivre)  

    [1]  Grégoire de Nysse, La création de lʼhomme, Paris, Cerf, 1943, p. 195. Ce traité date de 379 environ.
    [2]  Cité par Rolland Villeneux, Dictionnaire du diable, Paris, Omnibus, 1998, p. 72.
    [3]  Cité par ibid., p. 876.
    [4]  Karl Marx, Œuvres philosophiques, IV, Paris, Ivréa, 1981, p. 254.
    [5]  Jean-François Kervégan, Hegel Carl Schmitt. Le politique entre spéculation et positivité, Paris, P.U.F., 1992, p. 186-187.
    A lire de Rémi Hugues Mai 68 contre lui-même ...
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  • Saint Augustin actuel [7]

    Augustin vu par Philippe de Champaigne, musée d'art du comté de Los Angeles

    Par Rémi Hugues 

    saint_augustin visuel.jpgA l'approche des Fêtes, Rémi Hugues propose une série de sept articles consacrés à l'actualité de la pensée de Saint Augustin, père de l'Eglise. Ils sont publiés chaque jour. Celui-ci est le dernier de la série. Bonne lecture !  LFAR

     

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    Augustin dʼHippone, premier grand philosophe de lʼÉglise  

    Au sujet du déchaînement du princeps hujus mundi, du diable, qui se manifeste par lʼirruption de Gog et Magog et leur affrontement, saint Augustin précise que « plus le choc de la guerre sera terrible, plus il y aura de gloire à ne pas céder, et plus riche sera la couronne du martyre. »[1] 

    Il y a une universalité du concept de Gog et Magog, que lʼon retrouve également dans le judaïsme et lʼislam. 

    Dans le corpus vétérotestamentaire, on retrouve ces figures pleines de mystères notamment dans le livre dʼÉzéchiel. Jean Vacquié signale la chose suivante : « Deux chapitres d’Ézéchiel sont entièrement consacrés à Gog et Magog, les chapitres XXXVIII et XXXIX. Dieu parle à Gog et lui dit : ʽʽEn ce jour-là, des pensées s’élèveront dans ton cœur, et tu concevras un mauvais dessein. Tu diras : Je monterai contre un pays ouvert ; je viendrai vers ces gens tranquilles qui habitent en sécurité, qui ont des demeures sans murailles, qui n’ont ni verrous ni portesʼʼ (Ézech. XXXVIII, 10-11). Telle est l’activité de Gog, couverte et dissimulée, qui s’empare sournoisement des demeures sans serrures. Magog est, à l’origine, le nom de l’un des sept fils de Japhet. Le prophète Ézéchiel l’emploie dans un autre sens. Il en fait le pays qui sert de refuge à Gog et d’où il s’élance à la tête de ses peuples. Dans sa marche conquérante, Gog le rusé, prend comme point de départ Magog, le pays de la violence. Les chapitres XXXVIII et XXXIX d’Ézéchiel sont à lire attentivement ; ils fournissent une vue prophétique sur les grandes guerres mondiales modernes. »[2] 

    Enfin, deux sourates du Coran mentionnent Gog et Magog, Yâjuj wa Mâjuj en arabe. La sourate XVIII appelée « La Caverne » et la sourate XXI qui a pour titre « Les Prophètes ». Les figures de Gog et Magog sont décrites comme des forces destructrices qui sont alliées avec le diable contre lʼhumanité et son Créateur. 

    ob_afa2ab_califat-w.jpgDans cette troisième guerre mondiale qui oppose des structures réticulaires transnationales désirant la domination planétaire – soit une ploutocratie protestante protégée par sa citadelle insulaire se prenant pour le gendarme du monde, qui soutient une théocratie juive qui entend déployer ses frontières du Nil jusquʼà lʼEuphrate, et qui combat après lʼavoir suscitée une théocratie musulmane qui projette de reconstituer un califat sʼétendant cette fois du Maroc à lʼIndonésie – les nationalistes français nʼont pas à prendre parti. En optant pour la neutralité ils échappent au piège tendu par le princeps hujus mundi. 

    Nous nʼavons pas à choisir entre Gog et Magog, entre le terrorisme dʼÉtat et lʼÉtat terroriste. Nous nʼavons pas à nous engager dans ce que lʼon nous présente comme une guerre entre le Bien et le Mal.      

    Ce nʼest pas la science qui nous enseigne cela, mais la culture. Voilà pourquoi la seconde est supérieure à la première. La science est sans conscience, elle nʼa que la détermination du vrai, par le truchement dʼabstraites formules mathématiques, comme objet. Elle est recherche de la vérité pour la vérité, sans lien avec un but supérieur. Elle sépare lʼhomme de toute transcendance, qui à cause dʼelle voit son univers être désenchanté. 

    Alors que la culture contient une visée morale. Elle est connaissance au service de principes moraux. Dans Essais sur la théorie de la science Max Weber a souligné quʼil y a dans le notion de culture une dimension éthique, un rapport avec les valeurs : « La signification de la structure dʼun phénomène et le fondement de cette signification ne se laissent tirer dʼaucun système de lois, si parfait soit-il, pas plus quʼils nʼy trouvent leur justification ou leur intelligibilité, car ils présupposent le rapport des phénomènes culturels à des idées de valeur. La réalité empirique est culture à nos yeux parce que et tant que nous la rapportons à des idées de valeur ; elle embrasse les éléments de la réalité et exclusivement cette sorte dʼéléments qui acquièrent une signification pour nous par ce rapport aux valeurs.[3] » 

    St._Gregory_of_Nyssa.jpgCommentant le verset 23 du chapitre VII de lʼÉvangile de Matthieu, Grégoire de Nysse (ci-contre) fait remarquer que la science est le « pur savoir » tandis que la connaissance est une « disposition intérieure vis-à-vis de ce qui nous est agréable. »[4] Elle est la condition du progrès moral de lʼhomme, de son bien-être, de son bonheur.  

    Mais une culture qui nʼest pas transmise est une culture en voie de disparition. Il faut conserver et diffuser ce que nous a amené saint Augustin. Car cʼest le moyen le plus précieux pouvant nous aider à emprunter la voie qui mène au salut. La lecture des textes écrits il y a des siècles par l’évêque dʼHippone reste indispensable. Elle est un viatique : elle nous permet de faire les bons choix. 

    Ne méprisons pas la pensée de ce père de lʼÉglise : elle est pleine de sagesse, et en aucun cas dépassée ou datée. Il y a bien une actualité de saint Augustin, mais la revue LʼHistoire a échoué à en restituer tout son sens. Ses rédacteurs nʼont pas intériorisé lʼaxiome central de lʼaugustinisme, qui est au fondement de la distinction entre les deux Cités : deux amours ont fait deux cités : lʼamour de soi jusquʼau mépris de Dieu, la cité terrestre, lʼamour de Dieu jusquʼau mépris de soi, la cité céleste. Les historiens stipendiés du magazine LʼHistoire préfèrent ainsi relayer la mémoire des vainqueurs, guidés par leur amour-propre. 

    À la recherche de lʼexactitude des faits, qui peut amener à nier ce qui paraît le plus évident – et même à nier ce que depuis 1990 la Loi ordonne de croire – ils préfèrent leur confort personnel (entendu plus comme intellectuel que matériel au demeurant) et les égards du monde. (FIN) 

    [1]  Saint Augustin, op. cit., p. 920.
    [2]  https://bibliothequedecombat.wordpress.com/2013/03/08/gog-et-magog-les-deux-visages-de-la-bete/
    [3]  Cité par Freddy Raphaël, Judaïsme et capitalisme, Paris, P.U.F., 1982, p. 8.
    [4]  Grégoire de Nysse, op. cit., p. 176.
    A lire de Rémi Hugues Mai 68 contre lui-même ...
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