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  • NOTRE FEUILLETON ESTIVAL : UN ETE AVEC JACQUES BAINVILLE...

    A partir du vendredi 19 juillet, et jusqu'à la fin du mois d'août, nous vous proposerons de découvrir, ou de mieux connaître, mais aussi de faire découvrir à d'autres (par le jeu des partages) l'immense Jacques Bainville, par le biais d'une photo quotidienne tirée de notre "Album Jacques Bainville" (lafautearousseau vous propose également un "Album Léon Daudet" et un "Album Charles Maurras").

     

     

    Aujourd'hui : 25. Parution du "Napoléon" (III/III)

    15 octobre 1931 : parution du Napoléon (III/III)

    Voici les dernières lignes du dernier chapitre du Napoléon de Jacques Bainville.

    "A égale distance de tout parti pris, nous avons essayé d'écrire son histoire naturelle... Nous voudrions - écrit-il dans son Avant-propos - comprendre et expliquer la carrière de Napoléon Bonaparte, en établir l'enchaînement, retrouver les motifs qui l'ont poussé, les raisons qu'il a pu avoir de prendre tel parti plutôt que tel autre. Nous avons tenté de discerner les causes générales et particulières d'une fortune qui tient du prodige et d'événements qui semblent forgés par un conteur oriental...".

    Comprendre et expliquer, plutôt que d'accorder une place prépondérante au récit des événements - en l'occurrence, pour Napoléon, les batailles... : tout Bainville est là. 

    Comme dans ses autres livre majeurs : L'Histoire de France, L'Histoire de deux peuples, continuée jusqu'à Hitler, La Troisième République, Les conséquences politiques de la paix, Bismarck... 

    On verra une fois de plus, dans ces quelques pages qui clôturent son Napoléon, comment Bainville, selon le mot si juste du Duc de Levi-Mirepoix "...faisait, à la fois, de l’histoire un théorème par la logique de la pensée et une oeuvre d’art par la pureté de son style" (duc de Lévis Mirepoix, discours de réception a l’Académie, éloge de Maurras).


    "...S'il n'était que le soldat heureux devenu roi, il serait un entre mille. L'Empire romain, le monde asiatique regorgent de cas comme le sien. Mais le sien est unique aux temps modernes et sous nos climats. Un officier d'artillerie qui, e,quelques années, acquiert plus de puissance que Charlemagne et coiffe la couronne de Charlemagne, de telles étapes brûlées à toute vitesse, ce phénomène parut, à juste titre, prodigieux au siècles des lumières, dans une Europe rationaliste, en France surtout, où les débuts des autres "races" avaient été lents, modestes, difficiles, où les anciennes dynasties avaient mis plusieurs générations à se fonder. Les contemporains de Napoléon n'étaient pas moins éblouis de la rapidité que de la hauteur de son ascension. Nous le sommes encore. Lui-même, en y pensant, s'émerveillait un peu bourgeoisement, quand il disait à Las Cases qu'il faudrait "des milliers de siècles" avant de "reproduire le même spectacle". 

    Un spectacle qu'il a regardé, lui aussi, quand il en a eu le temps. Il ne tirait pas vanité d'être un grand capitaine. La guerre - "un art immense qui comprend tous les autres" - il savait la faire comme on sait jouer aux échecs, "un don particulier que j'ai reçu en naissant", et il se flattait que ce ne fût pas sa seule faculté. Le pouvoir, il l'a aimé, mais "en artiste" - il tient au mot qui le définit si bien - et il ajoutait : "Je l'aime comme un musicien aime son violon". Le plus étrange est qu'on lui demande encore ce que, de son temps, "l'école du possible" lui reprochait déjà de ne pas donner. Pourquoi ne s'est-il pas modéré ? Pourquoi n'a-t-il pas été raisonnable ? On s'est fait, on persiste à se faire de Napoléon une idée si surhumaine qu'on croit qu'il dépendait de lui de fixer le soleil, d'arrêter le spectacle et le spectateur au plus beau moment.

    Lui-même, qu'a-t-il été ? Un homme tôt revenu de tout, à qui la vie a tout dispensé, au-delà de toute mesure, pour le meurtrir sans ménagement. La première femme n'a pas été fidèle, la seconde l'a abandonné. Il a été séparé de son fils. Ses frères, ses soeurs l'ont toujours déçu. Ceux qui lui devaient le plus l'ont trahi. D'un homme ordinaire, on dirait qu'il a été très malheureux. Il n'est rien qu'il n'ait usé précocement, même sa volonté. Mais surtout, combien de jours, à sa plus brillante époque, a-t-il pu soustraire au souci qui le poursuivait, au sentiment que tout cela était fragile et qu'il ne lui était accordé que peu de temps ? "Tu grandis sans plaisir", lui dit admirablement Lamartine. Toujours pressé, dévorant ses lendemains, le raisonnement le conduit droit aux écueils que son imagination lui représente, il court au-devant de sa perte comme s'il avait hâte d'en finir.

    Son règne, il le savait, était précaire. Il n'a aperçu de refuge certain qu'une première place dans l'histoire, une vedette sans rivale parmi les grands hommes. Quand il analysait les causes de sa chute, il revenait toujours au même point : "Et surtout une dynastie pas assez ancienne." C'était la chose à laquelle il ne pouvait rien. Doutant de garder ce trône prodigieux, alors même qu'il ne négligeait rien pour le rendre solide, il reposait sa pensée sur d'autres images. Daru n'admettait pas que sa vaste intelligence se fût fait des illusions : "Il ne m'a jamais semblé qu'il eût un autre but que de ramasser, durant sa course ardente et rapide sur la terre, plus de gloire, de grandeur et de puissance qu'aucun homme n'en avait jamais recueilli." Mme de Rémusat confirme pour le sens religieux ce que disait Daru pour le sens pratique : "J'oserais dire que l'immortalité de son nom lui paraissait d'une bien autre importance que celle de son âme." 

    On a fait de Napoléon mille portraits psychologiques, intellectuels, moraux, porté sur lui autant de jugements. Il échappe toujours par quelques lignes des pages où on essaie de l'enfermer. Il est insaisissable, non parce qu'il est infini, mais parce qu'il a varié comme les situations où le sort le mettait. Il a été aussi peu stable que ses positions successives. Son esprit, qui était vaste, était surtout souple et plastique. Il avait des limites pourtant. Peut-être ne remarque-t-on pas assez que, fécond en prophéties, du reste contradictoires, Napoléon n'a prévu ni les machines ni le machinisme. Ses anticipations ne tiennent aucun compte du développement des sciences appliquées. Pour la guerre elle-même, il n'a pas songé à des engins nouveaux, il l'a faite avec les moyens, les instruments de Gribeauval et de Suffren. Ni le bateau à vapeur de Jouffroy, ni celui de Fulton n'ont retenu son attention. Grand lecteur d'Ossian, amateur de tragédies et du Discours sur l'histoire universelle, la mémoire garnie de vers qu'il s'applique à lui-même dans les occasions pathétiques, faiseurs de mots sur l'amour dont s'honoreraient Chamfort et Rivarol, son tour d'esprit est peut-être avant tout littéraire et, par là, un peu néronien. Cependant il se penche comme personne sur le détail des choses. Comptable méticuleux, il sait le nombre des caissons qu'il a dans ses parcs d'artillerie comme il sait la valeur de l'argent. C'est un maniaque du contrôle et de la statistique qui tient avant tout à l'exactitude. Mais des témoins sérieux rapportent qu'il affirmait volontiers des chiffres en l'air. Ainsi chacun de ses portraits est faux par quelque endroit et l'on peut lui faire tout dire parce qu'il a presque tout dit. On l'a appelé Jupiter-Scapin, on a répété le "commediante-tragediante" jusqu'à la fatigue. Mais il disait de lui-même qu'il n'y a pas loin du sublime au ridicule et, si l'on veut le prendre tout entier, ce n'est pas encore par ce côté-là. Ce n'est pas non plus par ses origines italiennes ou corses. S'il a eu une vendetta avec le duc d'Enghien, il n'en a pas eu avec Fouché ni bien d'autres qu'il a épargnés, fussent-ils Bourbons. Si l'on admet que, selon les moeurs de son île natale, il a été l'esclave du clan, on ne comprend plus qu'il ait excepté Lucien et Louis, ni que Louis et Lucien, nourris du même lait que leur frère, se soient retranchés de la tribu. Enfin s'il est proposé tant d'explications de Napoléon, s'il en est tant de plausibles, s'il est permis de le concevoir de tant de manières, c'est parce que la mobilité et la diversité de son esprit ont été égales à la variété, peut-être sans exemple, des circonstances de sa vie.

    Sauf pour la gloire, sauf pour l' "art", il eût probablement mieux valu qu'il n'eût pas existé. Tout bien compté, son règne, qui vient, selon le mot de Thiers, continuer la Révolution, se termine par un épouvantable échec. Son génie a prolongé, à grands frais, une partie perdue d'avance. Tant de victoires, de conquêtes (qu'il n'avait pas commencées), pourquoi ? Pour revenir en-deçà du point d'où la République guerrière était partie, où Louis XVI avait laissé la France, pour abandonner les frontières naturelles, rangées au musée des doctrines mortes. Ce n'était pas la peine de tant s'agiter, à moins que ce ne fût pour léguer de belles peintures à l'histoire. Et l'ordre que Bonaparte a rétabli vaut-il le désordre qu'il a répandu en Europe, les forces qu'il y a soulevées et qui sont retombées sur les français ? Quant à l'Etat napoléonien, qui a duré à travers quatre régimes, qui semblait bâti sur l'airain, il est en décadence. Ses lois s'en vont par morceaux. Bientôt on sera plus loin du code Napoléon que Napoléon ne l'était de Justinien et des Institutes, et le jour approche où, par la poussée d'idées nouvelles, l'oeuvre du législateur sera périmée.

    Imaginatif, puissant créateur d'images, il sentait cette fuite des siècles. Las Cases lui demandait pourquoi, avec le réveille-matin de Potsdam, il n'avait pas emporté à Sainte-Hélène l'épée de Frédéric. "J'avais la mienne", répondit-il en pinçant l'oreille de son biographe et avec ce sourire qu'il rendait si séduisant. Il savait qu'il avait éclipsé le grand Frédéric dans l'imagination des peuples, qu'on répéterait sont histoire, qu'on verrait ses portraits aux murs, son nom aux enseignes jusqu'à ce qu'il fût remplacé lui-même par un autre héros. Ce héros n'est pas venu. L'aventurier fabuleux, l'empereur au masque romain, le dieu des batailles, l'homme qui enseigne aux hommes que tout peut arriver et que les possibilités sont indéfinies, le démiurge politique et guerrier reste unique en son genre. Pour le développement de l'humanité, peut-être, dans la suite des temps, Ampère comptera-t-il plus que lui. Peut-être l'ère napoléonienne ne sera-t-elle plus qu'un bref épisode de l'âge qu'on appellera celui de l'électricité. Peut-être enfin, apparu dans une île du Levant pour s'éteindre dans une île du Couchant, Napoléon ne sera-t-il qu'une des figures du mythe solaire. Presque aussitôt après sa mort, on s'était livré à ces hypothèses et à ces jeux. Personne ni rien n'échappe à la poussière. Napoléon Bonaparte n'est pas protégé contre l'oubli. Toutefois, après plus de cent ans, le prestige de son nom est intact et son aptitude à survivre aussi extraordinaire que l'avait été son aptitude à régner. Quand il était parti de Malmaison pour Rochefort avant de se livrer à ses ennemis, il avait quitté lentement, à regret, ses souvenirs et la scène du monde. Il ne s'éloignera des mémoires humaines qu'avec la même lenteur et l'on entend encore, à travers les années, à travers les révolutions, à travers des rumeurs étranges, les pas de l'empereur qui descend de l'autre côté de la terre et gagne des horizons nouveaux.

    Illustration : couverture de l'édition du "Napoléon" dans Le livre de poche.

     

     

     

    Tiré de notre Album "Maîtres et témoins"... (II) : Jacques Bainville" (186 photos)

  • NOTRE-DAME PAR-DELÀ LE DRAME

     

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    Les Français ont donc ressenti le terrible incendie de Notre-Dame comme un drame national.

    Mais plus qu'un drame comme un autre, plus qu'un drame comme tant d'autres. Une peine collective. Une tristesse partagée. Le regret et le sentiment d'une perte matérielle et plus encore immatérielle : celle d'un bien très précieux venu d'une France très lointaine, et où se sont pourtant déroulés quelques-uns des événements essentiels de notre histoire récente. Des événements du temps présent qui parlent à nos mémoires personnelles et émeuvent le cœur de tous. Cette permanence de Notre-Dame dans le temps long, le fait qu'elle témoigne toujours de l'héritage des siècles, dressée comme immuable au cœur de la Ville aux bouleversement inquiétants, le fait qu’elle demeure si singulièrement présente à la vie des Français d’aujourd’hui,  qu’elle soit vivante après tant de siècles dont elle garde toutes les gloires et toutes les beautés, est source de respect, d'admiration, et même d’une sorte d'affection, partagée par un très grand nombre de Français, jeunes ou vieux, pauvres ou riches, chrétiens ou non. On a vu, depuis hier, Notre-Dame apparaître comme un bien commun par excellence, dans un pays qui semble n'en avoir plus guère. Ainsi, hier mardi, l'excellent site Atlantico résumait l'événement en titrant un article de Bertrand Vergely : « Incendie de Notre-Dame : et notre mémoire ancestrale fit irruption dans la post-modernité ». Cette irruption, éclipsant tout, est aussitôt devenue le centre du débat public.      

    Reporté le discours d'Emmanuel Macron de lundi soir que l'on attendait religieusement depuis des jours. Reportée sa conférence de presse prévue ce mercredi. Le sort de Notre-Dame a pris naturellement le pas dans l’esprit et le cœur du pays sur les paroles contingentes que l’on y aurait entendues. La survie de Notre-Dame de Paris s’est révélée instantanément d’une dimension tout autre. Et le Président de la République, en radicale contradiction avec nombre de ses propos offensants pour la France, a eu raison de déclarer que Notre-Dame est « au centre de notre destin profond ». Ainsi, nous aurions un « destin profond » !   

    La France ressemble à Notre-Dame. Elle est en flammes, fissurée, fragilisée, effondrée, torturée. Peut-être trahie. Spontanément, la France retrouve dans l'instant le sens de son destin profond. Pas n'importe lequel. Celui que définit son histoire. Il est possible qu'elle ne demande, elle aussi, sans trop le savoir, qu'à être redressée, restaurée, reconstruite. Qu'à se retrouver. Il n'est pas interdit de persévérer dans cette espérance.   lafautearousseau

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  • Au cinéma, la chronique de Guilhem de Tarlé : Jocker

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    A l’affiche : Joker,  un film américain de Todd Phillips, avec Joaquin Phoenix (Arthur Fleck ou Joker, le clown), Françoise Conroy (Penny Fleck, sa mère), Zazie Beetz (sa voisine) et Robert De Niro (Murray Franklin, animateur télé).

    guilhem de tarlé.jpgLa bande-annonce m’avait intrigué, sans réellement m’attirer, et le synopsis me rebutait (j’ignore tout de Batman), jusqu’à ce que j’entende un critique – que je ne dénoncerai pas » - parler du « film de l’année ».

    Non !  Certainement pas !

    Il s’agit de l’histoire d’un clown et de clowns, et c’est peut-être du grand cirque, mais un cirque ultra violent qui n’est pas fait pour les enfants.

    C’est l’histoire « glauque » d’un fou, dans un contexte de crise sociale où les masques de clowns remplacent les gilets jaunes… et les trois traders n’ont eu que ce qu’ils méritaient…

    On assiste surtout à un one man show extraordinaire, une prestation remarquable de Joaquin Phoenix dont on retiendra les pas de danse.

    Si le film ne vaut pas les « dix mille oscars » espérés par le critique, ce Joker en revanche est un As qui méritera un César.

    « Pour ton nez qui s’allume

    Bravo ! bravo !

    Tes cheveux que l’on plume

    Bravo ! bravo ! »

                                         (Edith Piaf)

     

     

    PS : vous pouvez retrouver ce « commentaire » et plus de 400 autres sur mon blog Je ciné mate.

    Pour mémoire  

     

    Titre

    Violent/scabreux

    Date

    Il aurait été très dommage de ne pas le voir

    Donne-moi des ailes

    non

    09/10/2019

    Une bonne soirée

    Fête de famille

    non

    12/09/2019

    Un très bon film

    Chambord

    non

    22/10/2019

    Un bon film

    Joker

    Oui

    06/11/2019

    Très intéressant

    Thomas Pesquet, l’étoffe d’un héros

    non

    20/09/2019

    A revoir en VF

    La Famille

    non

    08/10/2019

    J’aurais pu  ne pas le voir

    La Fameuse invasion des ours en Sicile

    non

    13/10/2019

    Je m’y suis ennuyé

    Shaun le Mouton LE FILM,
    La ferme contre-attaque

    non

    29/10/2019

    Je n’ai pas aimé du tout

    Nous finirons ensemble

    non

    12/05/2019

    Le film à retenir depuis le 1er janvier

    Le chant du loup

    Non

    15/03/2019

     

  • Fabrice Hadjadj : Questions-Réponses essentielles et critiques sur notre époque [2]

     

    TRAVAUX DIVERS - Largeur +.jpgFabrice Hadjadj publie un recueil de chroniques où il mêle des réflexions inspirées de la vie quotidienne sur le sexe, la religion, la technique et le travail. Entre Houellebecq et Chesterton, il nous livre une profonde critique de l'époque ... Ces réflexions sont importantes et ne sont pas à prendre à la légère. Elle traitent de l'essentiel, de l'avenir de notre société et des personnes qui lui appartiennent par la naissance et par la tradition. Nous publions ces réponses de Fabrice Hadjadj à Eugénie Bastié [Figarovox, 21.12.2017] comme une suite, en plusieurs journées. Lafautearousseau

     

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    Vous prônez le retour à une vie simple, le goût du foyer et de la décroissance. Que répondez-vous à ceux qui vous accusent de vouloir retourner à la bougie ou de vivre comme un amish ?

    J'aime bien les amish, je l'avoue. J'ai la naïveté de penser que cultiver la terre, se déplacer à cheval et lire la Bible en famille est tout de même mieux que de faire du trading haute fréquence, prendre le RER et consommer du . Cependant, je ne prône aucun « retour ». Je ne veux pas déserter mon poste. Si la providence m'a fait naître à cette époque, c'est pour faire avec. Marx a très bien montré que les « robinsonnades » étaient complices de la logique capitaliste : on prétend retourner à la nature, refaire le monde avec quelques vieux outils sur une île déserte, mais par là on ignore que l'homme est par nature l'héritier d'une histoire, et l'on renforce le fantasme du self-made-man.

    Alors la vie simple, oui, bien sûr, qui ne voudrait d'une vie simple, au fond ? Mais on n'y arrive pas sans drame. Ni sans composition - sans modus vivendi. Mon ton est d'ailleurs moins prescriptif que descriptif. Je ne crie pas : « Vive la décroissance ! »

    J'observe seulement que la consommation des marchandises nous a fait perdre la pratique des choses. S'il fallait me rapprocher de certains courants politiques, j'évoquerais le mouvement Arts and Crafts de William Morris, et plus encore le distributisme de Chesterton (tous deux admirés par Houellebecq, du reste). À égale distance du socialisme et du capitalisme, et de leurs monopoles d'État ou de multinationale, ils préconisaient non pas une meilleure répartition des revenus (laquelle ne conteste pas la suprématie monétaire et marchande), mais une juste distribution des moyens de production, dans un éloge de la petite propriété familiale.

    À vrai dire, c'est une vieille histoire. Elle se trouve déjà dans la Genèse. Quand Laban propose à Jacob un meilleur salaire, celui-ci lui répond : « Et moi, maintenant, quand vais-je travailler pour ma maison ? » (Gn, XXX, 30). •  A suivre ...

    Directeur de l'université Philantropos. Il publie « Dernières nouvelles de l'homme (et de la femme aussi) », Taillandier, 352 p., 18,90 €.

     

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    Eugénie Bastié

    Journaliste Débats et opinions

    Twitter : @EugenieBastie

    A lire dans Lafautearousseau ...

    Fabrice Hadjadj : Questions-Réponses essentielles et critiques sur notre époque [1]

  • Maurras toujours vivant

     

    Par Hilaire de Crémiers

    2293089609.14.jpgCet article et le suivant sont préparatoires à notre colloque Charles Maurras, l'homme de la politique, qui se tiendra à Marseille samedi 21 avril [voir plus loin].   LFAR

     

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    Maurras ? Encore ? On croyait avoir oublié ce nom. Il n’était cité que comme exemple de ce qu’il est interdit de penser. Une fois que son nom était prononcé, il n’y avait plus qu’à mettre la main sur la bouche. Les autres auteurs réprouvés, journalistes ou écrivains, ça pouvait passer… mais lui, non ! 

    Et voilà qu’on s’aperçoit que ce nom voué officiellement à toutes les malédictions continue d’exercer, encore et toujours, dans une société en désarroi, sur une jeunesse curieuse et avide de compréhensions politiques, un attrait pour le moins étonnant et qui ne cesse de surprendre les maîtres – ou prétendus tels – de la pensée contemporaine qui l’ignorent superbement dans leur certitude d’en avoir fini avec un tel fantôme. Viendra-t-il encore hanter les nuits de la République ?

    Eh bien, oui, le revoilà ! Il a suffi que son nom fût cité dans le Livre des commémorations nationales de l’année 2018 à l’occasion du cent-cinquantième anniversaire de sa naissance pour que ce livre fût envoyé au pilon et que l’ostracisme qui frappe le nom exécré fût renouvelé. Rien ne saurait mieux prouver une réelle et prégnante présence qu’un tel rejet ! Et, précisément, le Haut Comité des commémorations avait estimé que le rejeter n’apportait rien et qu’il valait mieux lui reconnaître toute sa place et rien que sa place. Le ministère de la Culture – qui n’a de culture que le nom – sous la pression des aboyeurs de la crétinerie du fanatisme gauchard qui tient lieu d’inquisition officielle, a décidé de le rayer de l’histoire, de lui dénier jusqu’à l’existence. Plus de commémoration donc ! Mais aussi plus de Haut Comité. Il n’y en aura plus. Tel est l’effet « Maurras » ! C’est l’honneur des membres dudit Haut Comité – dix sur douze – d’avoir compris – sans donner aucunement leur approbation à quoi que ce soit – qu’il était vain et ridicule de supprimer de l’histoire de France un tel personnage qui l’avait suffisamment marquée pour en être inséparable, et ils ont donc démissionné. Ils ont manifesté leur indépendance intellectuelle et confirmé leur sens de la dignité morale en ne ratifiant pas les oukases d’une Culture officielle qui se réfugie pour préserver sa domination dans l’orgueil du déni culturel. Félicitations singulières à Messieurs Jean-Noël Jeanneney, Pascal Ory et leurs collègues pour leur geste qui garantit encore en France la liberté de pensée.  ■   

    Hilaire de Crémiers

  • Livres • Un prophète d’un nouvel âge ?

     

    par Gérard Leclerc

     

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    Faut-il ériger l’historien Yuval Noah Harari en prophète de notre temps ? On pourrait sérieusement l’envisager, rien qu’à constater le nombre de lecteurs enthousiastes que suscite son best-seller intitulé Homo Sapiens, traduit en une quarantaine de langues et diffusé à plus de huit millions d’exemplaires. Le président Barack Obama s’est passionné pour cet essai qui prétend nous raconter l’histoire de l’humanité en une synthèse complète. Et il est rejoint par un nombre impressionnant de personnalités, acteurs majeurs du monde actuel, tels Bill Gates ou Mark Zuckerberg. Et il semble que le second essai d’Harari, intitulé Homo Deus. Une brève histoire de l’avenir, rencontre un succès identique. Le savoir-faire de l’auteur y est pour beaucoup, car il faut du talent pour rendre crédible un tel tour de force. Mais il faut ajouter que sa prétention à nous offrir une explication globale de l’aventure humaine et à nous révéler vers quel accomplissement nous nous dirigeons a de quoi intriguer et même fasciner.

    Les deux livres d’Harari font penser à une œuvre de jeunesse d’Ernest Renan L’avenir de la science, car nous y trouvons le même projet qui consiste à imaginer le devenir de notre espèce grâce à la trajectoire du développement scientifique. Dans un cas comme dans l’autre, nous avons affaire à une sorte de gnose scientiste, un substitut de religion, puisqu’il s’agit de donner du sens à l’existence, tout en s’émancipant des âges révolus de l’humanité.

    Renan se demandait si la science n’obtiendrait pas l’ultime secret du monde, celui qui donnerait à l’homme le pouvoir de créer, qui jusqu’ici n’appartenait qu’à Dieu. Harari, lui, est aussi fasciné par les progrès de l’esprit de l’homme, mais il se montre angoissé par le développement d’une intelligence artificielle, que ce même homme a fabriquée et qui risque demain de le mieux connaître que lui-même ne se connaît. Ce n’est plus exactement la gnose scientiste de Renan, mais elle est encore plus inquiétante avec sa projection transhumaniste. Et c’est dans ce climat culturel-là, que les chrétiens ont à faire connaître la Bonne Nouvelle, dont saint Irénée montrait, qu’avec le Christ, elle était la nouveauté absolue. C’est un sacré défi !  

    Gérard Leclerc

    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 16 novembre 2017

  • Zemmour : Retour vers le djihad

     

    « La croisade ne fut pas autre chose que l'instinct de conservation de la société occidentale en présence du plus redoutable péril qu'elle ait jamais couru. On le vit bien quand l'Occident renonça à cet effort. » 

     

    Chatillon_Urbain2.jpgEntre la chrétienté et l'Islam, c'est une histoire millénaire. Qui ne s'unit pas se divise ; qui n'attaque pas recule ; qui ne recule plus conquiert. Qui ne conquiert plus est conquis. René Grousset en a tiré une leçon sur l'importance de la croisade d'Urbain II (photo), qui s'oppose à notre doxa contemporaine. Selon lui, le pape a permis à l'Europe de retarder de près de quatre siècles l'avancée de l'Islam et de préparer la lente émergence d'une Renaissance qui n'aurait jamais eu lieu sous le joug islamique : « La catastrophe de 1453 qui était à la veille de survenir dès 1090 sera reculée de trois siècles et demi… Pendant ce temps, la civilisation occidentale acheva de se constituer et devint capable de recevoir l'héritage de l'hellénisme expirant… La croisade ne fut pas autre chose que l'instinct de conservation de la société occidentale en présence du plus redoutable péril qu'elle ait jamais couru. On le vit bien quand l'Occident renonça à cet effort. »

    AKG969080.jpgPour fonder et justifier leurs attaques meurtrières sur le sol français en 2015, les propagandistes du califat islamique (Daech) sonnèrent l'heure de la revanche contre les « croisés » (photo). Cette appellation fit sourire nos esprits laïcisés et incrédules. Nous avions tort. Cette histoire longue est encore très vivante en terre d'Islam, alors que notre présentisme consumériste et culpabilisateur a tout effacé de nos mémoires. Nous avons oublié qu'Urbain II était français, que Pierre l'Hermite était français, que Godefroy de Bouillon était (pratiquement) français, que Saint Louis était français. Nous avons oublié que, grâce à eux, nous avons échappé à la colonisation islamique et que l'Europe, enracinée solidement dans la raison grecque, la loi romaine, et l'humanisme chrétien, a pu alors s'élever vers le destin inouï et glorieux qui fut le sien. Si nous l'avons oublié, eux ne l'ont pas oublié. 

    Extrait de son dernier livre - qui vient de paraître

    Destin français, d'Eric Zemmour, Albin Michel, 569 p., 24, 50 € 

  • Le Partenariat eurafricain.

    Le Partenariat eurafricain est né de la volonté que la réunification européenne, à partir de 1989, ne se fasse pas au détriment des relations que les pays, tant de l'Europe de l'Ouest que de l'Europe del'Est, avaient nouées avec l'Afrique.

    Animé par Joël Broquet et Hervé Nyam, l'action du Partenariat eurafricain s'étend aujourd'hui dans deux directions: d'une part, le soutien à des projets de développement en Afrique et, d'autre part,l'encadrement des diasporas africaines en France.

    Sur le premier point, le Partenariat eurafricain se concentre actuellement, en coopération avec l'association Le français en partage, à la fourniture de livres en français pour des bibliothèques de pays africains. Ainsi viennent d'être conclues des conventions avec la Faculté de Médecine de Toamasina à Madagascar et l'Université de la Corne à Boruma au Somaliland, tandis que des conventions sont en préparation avec l'Académie militaire d'Antananarivo à Madagascar et l'Université de Yaoundé au Cameroun. Le Partenariat africain suit aussi avec vigilance l'expansion chinoise en Afrique et développe une action spécifique dans l'Océan Indien.Sur le second point, le Partenariat africain s'attache à ce que les diasporas africaines réussissent à lafois à s'intégrer en France et à apporter une contribution utile à leurs pays d'origine. Il travaille avecune trentaine d'associations dont Les Chemins de la réussite, Laissez les servir, La France quelle Histoire! ou bien encore Mayesha Espoir France.Par ailleurs, le Partenariat eurafricain a contribué à la diffusion de l'exposition «Les Tirailleurs sénégalais pendant et après la Grande Guerre» montée par l'association Solidarité internationale quia été présentée entre 2015 et 2018 dans plusieurs villes en France et à l'étranger.

    Les publications

    Le CAS dispose de plusieurs supports de communication destinés à la fois à maintenir le lien entre les membres du réseau et à faire rayonner, au-delà, les initiatives qu'il porte ou qu'il soutient.

    Les lettres électroniques.

    La Lettre aux Abonnés, hebdomadaire, est adressée à ses quelques 500 abonnés dont elle relate les initiatives et qu'elle informe des activités du Carrefour.Les destinataires sont également membres de doit du Comité d'animation du CAS, dirigé par Joël Broquet, qui se réunit au moins une fois par an et qui constitue le cœur du réseau animé par le Carrefour.LaNote d'Information, trimestrielle, est envoyée à environ 20 000 contacts dans le but d'assurer le rayonnement du Carrefour au-delà de son réseau.

    Vivre l'Histoire ensemble!

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    Il s'agit d'une revue imprimée, à périodicité irrégulière, mettent l'accent sur les actions du CAS présentant également un contenu historique. Six numéros ont été diffusés à ce jour.C'est aussi un label accordée à des manifestations à caractère historique organisées ou soutenues parle Carrefour.

  • Saint Louis et nous, par Gérard Leclerc.

    Blanche de Castille et Saint Louis

    Détail d’une miniature de la Bible moralisée de Tolède, 1240.

    Jean-Luc Mélenchon ne veut pas seulement que la France se créolise à l’image du Brésil. Comparaison discutable. Il s’attaque aussi à la hache à notre histoire, en marquant sa répulsion à l’égard de Saint Louis.

    gerard leclerc.jpgHier, je me suis intéressé brièvement au concept de créolisation que Jean-Luc Mélenchon entend projeter sur l’avenir de la France, non sans manifester quelque scepticisme, mais avec le désir de mieux comprendre de quoi il pourrait s’agir. Imaginer ce que pourrait être notre pays confronté à de multiples défis, pourquoi pas, même si on perçoit les pièges et les défauts de la manœuvre. Mais il est un point sur lequel je dois affirmer mon radical désaccord avec le leader des Insoumis, c’est l’attaque violente qu’il a conduite dans le fil du même discours à l’égard du roi Saint Louis, en qui il ne veut reconnaître qu’un Louis IX maudit, à exclure de l’imaginaire national, après que sa statue ait été expulsée de l’enceinte du palais du Luxembourg.

    Cette violence ne participe pas seulement d’une haine personnelle à l’égard d’un personnage du passé, elle se rapporte à ce qu’on pourrait appeler une volonté éradicatrice à l’égard de l’ensemble de notre histoire. On y retrouve la rage révolutionnaire, celle qui s’acharna contre la sépulture des rois de France à la basilique Saint-Denis. On peut aussi y discerner l’inspiration idéologique, qui, hier, sous l’emprise du léninisme, voulait du passé faire table rase pour inventer un futur mirifique, qui tourna d’ailleurs au cauchemar. Jean-Luc Mélenchon ne procède pas en historien qui reconnaît, par exemple, en quoi la mentalité médiévale diffère de la nôtre et explique certains écarts de sensibilité et de conduite. Il détruit tout à la hache, en nous rendant orphelins d’un passé qui nous a façonnés.

    À ceux qu’une telle hargne a justement blessés, je conseille de lire ou de relire la belle biographie de Saint Louis que le grand médiéviste qu’était Jacques Le Goff a publié en 1996 [1]. Il ne cache rien de ce qui peut nous choquer ou nous déconcerter aujourd’hui. Mais la rectitude du chercheur, sa proximité critique avec Saint Louis nous permettent de comprendre comment le passé nous construit. En le reniant, c’est nous-mêmes que nous détruisons.

    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 24 septembre 2020.

    [1Jacques Le Goff, Saint Louis, NRF Gallimard.

    Source : https://www.france-catholique.fr/

  • L’énigme écologique, par Gérard Leclerc.

    Laissons aux politologues, aux experts en sociologie électorale, le soin d’analyser les résultats de cet étrange second tour des élections municipales. Le record d’abstention est forcément à mettre en relation avec la crise sanitaire dont nous ne sommes pas sortis. Est-il vraiment possible, avec une participation si faible, d’accomplir un diagnostic sur la réalité des mouvements internes à l’opinion française ?

    gerard leclerc.jpgIl est tout de même singulier que les deux formations qui obtiennent les scores les plus importants aux élections nationales, à savoir le Rassemblement national et La République en marche, soient sous-représentés à l’échelon communal. Cela s’explique évidemment pour des raisons d’implantation locale. Les Républicains et les socialistes conservent leurs fiefs, grâce aux personnalités qui les tiennent solidement. Mais il n’est pas avéré qu’il seront en capacité de reconquérir prochainement la présidence de la République et le Parlement.

    En revanche, il ne fait pas de doute que ceux qui ont marqué le plus de points dans cette compétition, avec les réserves qui s’imposent, sont les écologistes. Des écologistes qui manifestent leur puissance dans les plus grandes villes du pays. Sociologiquement, c’est intéressant, car si l’on se réfère aux travaux de Christophe Guilluy et de Jérôme Fourquet, c’est là où les flux de la mondialisation s’avèrent les plus positifs qu’ils rencontrent leurs succès, et non dans la France périphérique, celle des Gilets jaunes précisément. La sensibilité écologiste semble s’épanouir de façon privilégiée dans les classes aisées. C’est une première remarque.

    La seconde concerne l’énigme de l’écologie politique. Sans doute, depuis la candidature de René Dumont à la présidentielle de 1974, un courant écologique s’est affirmé au long des décennies, avec déjà des victoires partielles, notamment aux européennes. Pour autant, il n’est pas assuré que l’identité intellectuelle du phénomène soit complètement lisible. Sans doute échappe-t-il à la traditionnelle opposition de la droite et de la gauche, mais c’est une raison pour laquelle il est difficilement identifiable historiquement. D’ailleurs, chez certains idéologues on trouve une haine de l’histoire dans la mesure où l’histoire est l’anti-nature, où elle ajoute à la nature ou la contredit. C’est pourquoi, personnellement, je m’interroge avec perplexité sur cette nouvelle donnée qui transforme notre sociologie électorale. Autant je suis proche de quelques uns des pionniers de l’écologie comme Jacques Ellul, autant je suis circonspect devant l’énigme de cet écologisme encore mal formulé.

    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 29 juin 2020.

  • Vraie et fausse réforme dans l’Église, par Gérard Leclerc.

    Place Saint Pierre, Vatican, Rome.

    © Antoine Mekary / Godong

    En 1950, paraissait un ouvrage fondamental du futur cardinal Yves Congar : Vraie et fausse réforme dans l’Église. Rétrospectivement, on conçoit l’importance du sujet, puisque c’est bien cette réforme qui justifiera largement la décision du pape saint Jean XXIII de réunir le second concile œcuménique du Vatican. Il s’agissait, pour le théologien, de clarifier avant tout ce concept de réforme, en tenant compte de l’identité d’une Église, qui est forcément en mouvement dans l’histoire, mais toujours en fidélité vivante à l’intention divine qui l’a créée.

    gerard leclerc.jpgUne réforme des structures ?

    La grande rupture du XVIe siècle est significative de la difficulté propre à une institution qui est toujours à réformer, mais jamais hors de son organicité propre. C’est pourquoi il n’est pas possible de l’envisager en termes de purs changements structurels. Tout d’abord, parce que ce qu’il y a de contingent dans sa structure ne saurait se séparer de ce qui est constitutif d’elle-même. Yves Congar abordait donc la question en se référant à un approfondissement théologique, sans lequel toute tentative d’adaptation aurait été vaine ou ruineuse.

    Jean XXIII se situait dans la même perspective, lorsqu’il expliquait que Vatican II aurait à déployer, au regard des contemporains, toute la richesse de la Révélation. L’originalité du concile tient, en effet, à un ressourcement de l’Église dans la profondeur de l’Écriture et de la Tradition. Tenter de comprendre Vatican II, en dehors de cette donnée première, c’est forcément se méprendre. La thématique de l’ouverture au monde, qui a souvent été reprise, n’a de signification adéquate que dans la perspective, non pas d’un alignement, mais d’un surcroît d’intelligence du contenu de la foi, de telle façon que le monde perçoive mieux ce qu’il en va du Salut apporté par le Christ. C’est pourquoi, avant même d’envisager les mises au point en ce qui concerne les grands problèmes du monde contemporain, de la liberté religieuse et du rapport avec les autres religions, ce sont les constitutions dogmatiques qu’il faut étudier en premier lieu. Le cardinal de Lubac insistait sur Dei Verbum qu’il qualifiait de chef-d’œuvre du labeur conciliaire, parce que c’est le message même du christianisme qui y était rapporté dans son origine et sa transmission.

    Ressourcement spirituel

    Ce qui manque cruellement dans les divers projets qui circulent en ce moment sur «  l’Église de demain  » c’est ce ressourcement doctrinal et spirituel qui conditionne tout et sans lequel toute tentative de réformer des structures s’avère superficielle. Dans l’histoire de l’Église, il n’y a aucune réforme véritable qui ait eu lieu sans un approfondissement doctrinal et sans expansion d’une spiritualité forte. Il en va aussi pour aujourd’hui et pour demain. La vraie réforme si elle se dessine nous restituera mieux encore la lumière du mystère chrétien.

  • La statue de Louis XIV reviendra-t-elle à Rennes ?, par Agnès Le Morvan.

    Une statue représentant Louis XIV à cheval se trouvait place du Parlement en 1726, avant d’être fondue pendant la Révolution. Sa réduction en bronze pourrait rejoindre les collections du musée des Beaux-Arts de Rennes. | OUEST-FRANCE

    Source : https://www.ouest-france.fr/

    La réduction en bronze de la statue équestre de Louis XIV, réalisée par Antoine Coysevox pour la place du Parlement de Bretagne, pourrait rejoindre les collections du musée des Beaux-Arts de Rennes.

    Il s’agit d’une pièce d’exception, une « œuvre d’intérêt patrimonial majeur ». L’avis d’appel au mécénat a été publié au Journal officiel par le ministère de la Culture dimanche 19 juillet 2020. L’idée : acquérir la réduction en bronze de la statue équestre de Louis XIV, réalisée par Antoine Coysevox pour la place du Parlement de Bretagne entre 1688 et 1689, à la demande des États de Bretagne, initialement destinée à Nantes, et finalement installée à Rennes en 1726.

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    Une statuette représentant Louis XIV sur son cheval. | DR

    Une fois acquise, cette réduction rejoindrait la collection du musée des Beaux-Arts de Rennes, ainsi que les reliefs qui ornaient le soubassement de la statue royale de Rennes, seuls vestiges conservés de cette œuvre monumentale. Fondue lors de la Révolution française, on ne la connaissait donc qu’à travers les gravures et dessins de Jean-François Huguet.

    L’appel au mécénat d’entreprise porte sur la somme de 2 370 000 €. Une coquette somme. Mais le classement en œuvre d’intérêt patrimonial majeur permet un abattement de 90 %.

    Découverte dans une collection britannique

    La statuette était conservée depuis le début du XXe siècle dans une prestigieuse collection aristocratique britannique. C’est un bronze inédit. Remarquable par la qualité de sa ciselure, son bel état de conservation, elle est aussi à ce jour l’unique témoignage en volume de la célèbre statue de Coysevox, le plus important sculpteur français de la fin du règne de Louis XIV.

    Cette statue, représentant le roi vêtu à l’antique, est une évocation de la volonté du roi de signifier dans les plus grandes villes de France (Bordeaux, Lyon…), par l’érection de statues monumentales lui rendant hommage, la présence d’un État puissant et centralisé.

    Témoignage de l’histoire de la Bretagne

    « C’est une occasion de faire revenir un trésor national en France. Et dans un musée de région, ce qui est rare », témoignait Guillaume Kazerouni, responsable des collections anciennes du musée, en novembre. Ce bien met en relief toute une histoire de l’Ancien régime et de la Bretagne, la révolte du papier timbré en 1675, la rivalité entre Nantes et Rennes pour avoir la statue…

    L’acquisition de cette statuette, témoin de l’unique monument élevé dans cette région à un roi de France au XVIIe siècle, viendrait enrichir le corpus encore peu fourni des réductions anciennes des statues équestres royales conservées dans les collections publiques françaises.

  • Sur Sacr TV, chroniques de la Monarchie populaire - Société mercantile ou recherche du Sacré - 2.


    Antoine de Rivarol disait "La faveur que le gouvernement accorde aux sujets doit toujours être en raison inverse de la mobilité de leurs richesses. Ainsi celui qu’on doit favoriser le plus, c’est le laboureur…Je mets au dernier rang l’homme à argent qui, tel qu’un magicien, peut d’un trait de plume transporter sa fortune au bout du monde ; et qui, n’agitant jamais que des signes, se dérobe également à la nature et à la société…Cette maxime est fondamentale, et on peut toujours juger un ministre d’après elle". Dans un chapitre précédent, nous avions parlé de la féodalité par le mouvement des communes et dit combien celle-ci était bienfaitrice à l’époque de sa création face aux barbares envahissants. L’école républicaine la présente comme oppressive et inhumaine vis-à-vis des faibles. Ecoutons Louis Dimier : « Le préjugé révolutionnaire enseigne à ne reconnaître dans ce sort des petits que l’objet d’un devoir moral ; il y subordonne tout l’Etat. Cet intérêt particulier, dans une fonction qui ne doit considérer que les intérêts généraux, ruine l’Etat sans profit pour ceux qu’on lui préfère. Ceux-ci pâtissent deux fois de la Révolution : de l’impuissance à laquelle son erreur la condamne et de la banqueroute sociale à laquelle elle aboutit » (« Les Préjugés ennemis de l’Histoire de France »). Imaginons un instant, les hommes vivant cette époque, construire des cathédrales, élever des familles nombreuses, subir les fléaux de la guerre et les épidémies…Parcourir pour les compagnons, la France entière…Poser une pierre ici, tailler un meuble là. La mobilité géographique des hommes de ce temps est impressionnante, autant pour les chevaliers que pour les simples ouvriers. La fabrication des vêtements, les tapisseries, les meubles et articles divers se vendaient et se vendent encore dans le monde entier.

    Lisons sous la plume d’Alain Decaux, ce que l’école n’apprend pas sur nos rois : « L’Ancien régime avait su, par le jeu savant des dimanches et des jours fériés, équilibrer de façon très remarquable le travail et le repos. Il y avait les saints romains, les saints nationaux et les saints locaux : tous, excellent prétexte à interrompre le travail. M.Patrice Boussel, dans sa passionnante et si amusante Histoire des Vacances (Berger-Levrault, éditeur), à laquelle il faut obligatoirement se référer dès qu’on aborde ces sujets, nous dit qu’au XVIe siècle on comptait une soixantaine de fêtes chômées, outre les dimanches. Au XIIIe siècle, les ouvriers parisiens exerçant la profession de tréfileurs d’archal (Fil de laiton) bénéficiaient de vacances d’un mois.» Certes, c’était l’exception, mais « avec des semaines de travail d’environ quatre jours, l’ouvrier du Moyen-âge avait joui à la fin de l’année d’une période de repos plus longue que celle à laquelle on parvient en additionnant les jours de repos hebdomadaires, les jours fériés et les congés payés. »

  • Sur le blog de Marc Rousset (1/2) : Jean Rottner (LR) ne voulait pas d’un lycée Beltrame… il débaptise le lycée Colbert

    Sources : https://www.bvoltaire.fr/

    http://marcrousset.over-blog.com/

    Baptiser un lycée de la région Grand Est Arnaud-Beltrame, non. Mais Rosa-Parks, oui ! Quand la majorité LR abdique et promeut les revendications des racialistes…

    Quel choc, quand nous avons découvert que la région Grand Est, lors de la commission permanente du 19 juin 2020, mettait aux voix un dossier de changement de dénomination des lycées Colbert et Sophie-Germain, à Thionville (Moselle), en Rosa-Parks !

    Quelle déception quand, il y a deux ans, lors de la plénière de juin 2018, nous avions proposé une motion au président LR Jean Rottner de baptiser un lycée à la mémoire d’, mort pour la France en se substituant à un otage au cours d’une attaque terroriste islamiste à Trèbes, et qu’il l’a balayée d’un revers de la main !

    À peine sortis d’une crise sanitaire sans précèdent, et à l’aube d’une crise économique historique, nous avons tous été rattrapés par un autre virus : « l’antiracisme ». Il aura fallu un drame aux États-Unis pour que, d’un coup, dans tous les médias, on nous tartine toute la journée de racisme dans la police ou pour avancer l’idée que la France serait raciste.

    Les Traoré en tête de gondole soutenus par des activistes indigénistes, le tout supporté par une extrême gauche en mal de retrouver un électorat, sont un beau combo qui a presque su nous faire oublier nos trois mois enfermés dans un 4-pièces et les files d’attente sur les parkings de supermarché avec notre autorisation de sortie bien remplie.

    Comme tous les virus, celui-ci s’est propagé de manière fulgurante mais il a la particularité de ne pas faire de chichis avec le « pas d’amalgame » et la fameuse « stigmatisation ». Tous les policiers sont donc violents et racistes et le racisme anti-blanc n’existe pas. La région Grand Est aurait donc, elle aussi, cédé à la dictature de l’émotion ? Une émotion, somme toute, relative puisqu’elle avait refusé notre proposition de baptiser un lycée Arnaud-Beltrame, cet officier de gendarmerie mort en héros.

    Que Castaner lâche ses troupes et que Macron ignore le principe démocratique de séparation des pouvoirs pour déconstruire la France en participant à la réécriture de l’Histoire et en inversant les valeurs n’est pas étonnant, mais quid des LR, de cette droite de plus en plus molle et sans colonne vertébrale ? L’acceptation par la majorité régionale LR-UDI-MoDem de changer le nom du lycée en pleine campagne de revendications des activistes décoloniaux qui veulent déboulonner nos statues est une lâcheté de leur part.

    La région Grand Est, présidée par Jean Rottner, a donc décidé d’effacer les noms de , ancien ministre de Louis XIV, et de Sophie Germain, grande mathématicienne et philosophe française, au profit d’une personnalité qui n’a aucune attache directe avec notre territoire français et avec notre Histoire.

    LR est un parti à l’agonie qui accompagne Mélenchon dans l’opportunisme électoral en choisissant la soumission. LR = Le Renoncement.

  • Onfray, ou la sculpture de soi, avec Annick Geille.

    Source : https://www.atlantico.fr/

    Michel Onfray publie ces jours-ci le douzième volume de sa contre-histoire de la philosophie –La résistance au nihilisme- (Grasset) ainsi que le premier numéro (en ligne) de sa revue « Front populaire ». Double actualité du philosophe le plus populaire de France.

    4.jpgLire Michel Onfray ces derniers temps, l’écouter sur un plateau ou à la radio, c’est constater le même phénomène. Onfray est devenu bon. Très bon. Pourquoi ? Depuis sa  -regrettable- lettre à Macron, et la mise en lumière d’erreurs  et d’approximations dans certains textes concernant l’histoire des religions, le fondateur des « universités nomades» s’est repris. Michel Onfray est une éponge. Il lit, écoute, entend, ressent et corrige le tir. Très réceptif, celui qui fait aimer la philosophie un peu partout en France apprend de ses erreurs, s’il y en a : tant et si bien qu’en ce début d’été 2020, le « sachant » médiatique qu’il est devenu parvient à une sorte de perfection dans  la consolidation de son image.

    «  Le gauchisme culturel fait la loi dans la plupart des médias traditionnels »,  précise l’auteur dans « La résistance au nihilisme », douzième volume de sa contre-histoire de la philosophie ( Grasset). Après cet hommage aux théories  de l’essayiste et sociologue Jean-Paul Le Goff « Le gauchisme culturel et ses avatars » (cf. revue « Le Débat » 2013), Michel Onfray déroule sur 528 pages une somme considérable : Le panorama intellectuel de la France d’après 68. Un vade-mecum du « nihilisme contemporain  comme symptôme de ce que les déshérités n’ont plus aucune consolation »  précise l’éditeur. Une sorte de défilé des penseurs du demi-siècle, avec le déroulé des œuvres, théories et opinions, espoirs, contradictions, désillusions  en  mémoire d’une époque assez bouillonnante ;  facile à lire  - malgré son érudition-, « La résistance au nihilisme » regroupe, tels les onze précédents volumes de cette « Contre-histoire de la philosophie », les cours que le philosophe délivra à ses étudiants de tous âges lors de ses « universités populaires itinérantes ». Le volume 12 de cette «philosophie alternative » fait l’inventaire des vraies- ou fausses- valeurs du dernier demi-siècle, dans le vide des promesses non tenues de Mai 68. « Il s’agit de l’extraordinaire chantier de Michel Onfray :écrire une contre- histoire cheminant le long de la » philososophie officielle » indique la quatrième de couverture. Nous croisons Bernard- Henri Levy et les « Nouveaux philosophes », tels que vus par Gilles Deleuze (1925-1995) : «  Ils ont introduit en France le marketing littéraire ou philosophique au lieu de faire une école (…) Il faut que la multitude d’articles de journaux, d’interviews, d’émissions de radio ou de télé remplacent le livre, qui pourrait très bien ne pas exister du tout. Au fil des pages, nous rencontrons Bourdieu (1930-2002) : «  Pierre Bourdieu fait exploser les catégories qui voudraient qu’on soit de droite donc contre mai 68, ou de gauche, donc pour mai 68 ». Or il y eut des gens de droite pour Mai 68, Maurice Clavel par exemple, et des gens de gauche contre, ainsi Régis Debray » rappelle l’auteur.  

    Onfray renverse certaines statues à bon escient. « Pour le dire  autrement, tous ceux qui ont trempé dans Vichy, Guitton, Valéry, ou Maurice Clavel, la collaboration, soit activement comme Rebatet, Chardonne ou Morand, soit passivement comme Beauvoir, Sartre, et Merleau-Ponty,  ces derniers en ayant vécu normalement, sans rien faire contre l’occupant, en s’arrangeant même plutôt bien de sa présence (…) ». Beau chapitre consacré à Jankélévitch, et à l’antisémitisme tel que défini par « Yanké », qui exige de « pouvoir revendiquer sa judéité sans qu’autrui l’assigne à ce qu’il aura présenté comme étant sa définition. » 

    Comment  ce «nihilisme »  contemporain est-il advenu  ? Outre le « gauchisme culturel » qui  en est le principal artisan,  s’est déchaîné l’antiracisme. «  SOS Racisme a introduit le principe racial et le communautarisme ethnique qu’il affirme combattre. Cette façon de faire marque une rupture avec la tradition républicaine française : les Juifs, les « Beurs », les Maghrébins, les »Blacks » revendiquent des droits pour eux, ils mènent un combat politique en leur faveur et de ce fait, ils inaugurent la revendication identitaire qui fait fi de l’appartenance commune à la collectivité. (…) La République a vécu. » ,dit Michel Onfray à ce propos. 

    L’auteur règle ses comptes à l’écologie punitive. » Leur critique de la raison, du cartésianisme, de la science, du progrès, des Lumières est partielle et partiale(…)» Contrairement à ce que font croire au peuple les clichés du gauchisme culturel ,Michel Onfray note la présence d’hommes de droite dans les rangs de la Résistance, dont le premier d’entre eux, le Général de Gaulle « sans cesse récusé par la gauche pour n’être pas des siens a été l’homme qui a initié la Résistance en France « mais les légendes ont toujours été préférées aux vérités qui gênent », conclut Onfray sur ce chapitre.`

    « Dans l’histoire de la philosophie, il existe une domination  idéaliste, notamment platonicienne. Or, on peut proposer une contre-histoire de la philosophie qui se soucie d’un autre lignage : matérialiste, hédoniste, nominaliste, athée, sensualiste,etc. », dit encore Onfray pour définir le concept de ses recherches. D’abord repris par France-Culture, ses cours sont commercialisés « sous forme de coffrets comprenant chacun 11 à 13 disques compacts audio », édités par Frémeaux & Associés ». On les trouve aussi sur le site de Michel Onfray. Le discours se propage.

     

    Et voici que le philosophe alternatif devient éditeur  de  presse, alors que paraît sa revue « Front populaire » (titre qui a les défauts de ses qualités, mais pourquoi pas ?) («  Déjà imprimée, la revue papier trimestrielle sera disponible le 23 juin en kiosques et le 25 en librairies. Mais d'ores et déjà, cette publication de 166 pages qui entend "mener le combat des idées pour retrouver notre  souveraineté" a gagné le pari financier de son lancement. (cf. Challenge/juin 2020.)»Soyez résolus à ne plus servir et vous voilà libres ! » : tel est la profession de foi de «  Front Populaire » ( cf.Discours de la servitude volontaire/1548/. La Boétie) « Le Discours sur la servitude volontaire » n’est rien d’autre qu’un manuel d’insurrection – mais quel manuel! », précise Onfray, dans  son édito. « Résister à la petite musique crétinisante du pouvoir »… Et de tous les pouvoirs, au fond :  la formule pourrait définir non seulement la revue, mais le projet de la galaxie Onfray 2020. Le fondateur et l’ animateur treize années durant  de la « l’université populaire » de Caen est aujourd’hui le dirigeant d’une entreprise « made in Onfray ». Entreprise pensée au millimètre près, depuis le site : contact@michelonfray.com, avec comme logo les lunettes rectangulaires du philosophe. Lui qui n’a pas de passion pour les journalistes- et c’est un euphémisme- en est devenu un. Editeur de presse, à lui et à Stéphane Simon -son associé- (ex associé de Thierry Ardisson), les joies du « business plan », du retour sur investissement ,du stress et du surmenage propres aux lancements de presse. Les contributeurs de « Front Populaire « sont des « souverainistes de droite ou de gauche » issus de la société civile. 

    Les  cours de « contre-philosophie » sont dans l’air du du temps. Une fureur  sourde gagne le pays. Tout le monde est « contre » tout. Les amphithéâtres des universités populaires sont bondés. Michel Onfray a compris. Le public n’en peut plus des discours idéologiques préfabriqués. Onfray est donc  devenu imprévisible. Plus libre. Et c’est ce que son public attend. Cette liberté de ton, cette proximité qui force le respect car il n’y a jamais de préétabli des mots, de théorie guidant le téléspectateur dans la « bonne » direction.

    Jadis impressionnée par « La stricte observance » (Gallimard/Folio), petit texte (128 pages) limpide, d'une grande importance, peu remarqué, dans lequel Onfray s'interrogeait sur la mort (celle de la femme aimée, suivie du décès de son père, ouvrier agricole en Normandie), j’en avais rendu compte ici. L’auteur posait des questions à la foi chrétienne, qu’il respecte. L’homme qui advenait était vrai. Croyants ou pas, nous partagions sa peur. Sa douleur. "Humain, trop humain" : Michel Onfray nous ressemblait. "On ne fait jamais son deuil, disait-il, "c'est le deuil qui nous fait”. Bras tendus dans le noir,Onfray cherchait la lumière. Cela arrive à des gens très bien.Le deuil, la solitude,  la peur.Pas très gai, mais universel. Ce récit romanesque, inspiré de « Vie de Rancé », dernière et magnifique oeuvre de Chateaubriand, disait presque tout de Michel Onfray. « Heureuse solitude, Seule béatitude, que votre charme est doux, De tous les biens du monde, en ma grotte profonde, Je ne veux plus que vous ». (François-René de Chateaubriand, Vie de Rancé/1844)

    Avec « La résistance au nihilisme » et « Front populaire »Michel Onfray s’impose. Au point que le philosophe, de plus en plus « populaire », pourrait (dit-on) « songer à un destin politique ». Problème. Il y a deux Onfray. Le tribun, qui a l’art et la manière de développer la planète Onfray, et l’auteur de « La stricte Observance ». Pudique, sauvage. Une sorte d’ennemi intérieur du premier, résistant à la résistance. Entre l’homme des vidéos, des sites, des abonnements et de l’édition, et l’écrivain secret qu’est Onfray, - qui va l’emporter ? L’artiste fasciné par le « Cosmos », ou le dompteur des foules assoiffées de considération ? Le romancier de « La Stricte Observance » ou le bateleur du tarot ? A suivre.

    « La résistance au nihilisme »/contre- histoire de la philosophie 12 (Grasset)/29 euros/ 528 pages

    « Front populaire »/ Revue trimestrielle mise en ligne le 18 juin/ publiée en kiosque et dans les librairies  le 23 juin/166 pages/ 14,90€. 

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