Feuilleton : Chateaubriand, "l'enchanteur" royaliste... (55)
Anne-Louis Girodet, Portrait de Chateaubriand,
Saint-Malo, musée d’Histoire de la Ville et du Pays Malouin.
(retrouvez l'intégralité des textes et documents de cette visite, sous sa forme de Feuilleton ou bien sous sa forme d'Album)
Aujourd'hui : Mélanges...
I : "...vous faire chrétien et royaliste !"
"...Vous êtes jeune, monsieur, comme cet avenir que vous songez et qui vous pipera; je suis vieux comme ce temps que je rêve et qui m'échappe.
Si vous veniez vous asseoir à mon foyer, dites-vous obligeamment, vous reproduiriez mes traits sous votre burin : moi, je m'efforcerais de vous faire chrétien et royaliste. Puisque votre lyre, au premier accord de son harmonie, chantait mes Martyrs et mon pèlerinage, pourquoi n'achèveriez-vous pas la course ?
Entrez dans le lieu saint; le temps ne m'a arraché que les cheveux, comme il effeuille un arbre en hiver, mais la sève est restée au coeur : j'ai encore la main assez ferme pour tenir le flambeau qui guiderait vos pas sous les voûtes du sanctuaire..."
(Mémoires d'Outre-Tombe, tome II, p.517)
II : Revenu de tout, de tous...
"Il y a des temps où l'on ne doit dépenser le mépris qu'avec économie, à cause du grand nombre de nécessiteux..."
(Mémoires d'Outre-Tombe, tome 1, p.877)
III : "...le crucifix à la main, dans l'éternité."
"...En traçant ces derniers mots, ce 16 novembre 1841, ma fenêtre qui donne à l'ouest sur les jardins des Missions étrangères, est ouverte : il est six heures du matin; j'aperçois la lune pâle et élargie; elle s'abaisse sur la flèche des Invalides à peine révélée par le premier rayon doré de l'orient : on dirait que l'ancien monde finit et que le nouveau commence.
Je vois les reflets d'une aurore dont je ne verrai pas se lever le soleil. Il ne me reste qu'à m'asseoir au bord de ma fosse, après quoi je descendrai hardiment, le crucifix à la main, dans l'éternité."
(fin des Mémoires, La Pléiade, tome II, p.939)