La tragédie des harkis, par Gérard Leclerc.
Le sampt de Saint-Maurice l’Adoise en 1975, où ont été parqués de nombreux harkis.© JACQUES CORNU / NAR
Le drame des harkis est une plaie au flanc de l’histoire récente de la France. Depuis 1962, il n’a pas été envisagé comme il convenait. Emmanuel Macron vient de demander pardon à ceux qui ont tant souffert et attendent justice.
Emmanuel Macron, en recevant 300 harkis à l’Élysée lundi, a rouvert une page ô combien douloureuse de notre histoire récente. En reconnaissant la responsabilité de l’État dans ce qu’il faut bien appeler un abandon, il est allé jusqu’à demander pardon. Pardon à ces hommes qui avaient choisi la France en Algérie et qui se sont retrouvés livrés à la vengeance de l’ennemi, au moment de l’indépendance en juillet 1962. Pourtant, l’armée française était encore présente sur le sol algérien, mais elle avait reçu l’ordre de rester dans ses casernes, laissant ainsi les harkis se faire massacrer. Quant à ceux d’entre eux qui avaient tout de même franchi la Méditerranée, ils étaient parqués dans des camps qui étaient autant de lieux d’internement.
Dans un de ses romans, Vladimir Volkoff racontait l’épopée d’un officier, qui, enfreignant tous les ordres, avait réussi à rapatrier sa harka sur le sol métropolitain. J’ai personnellement le souvenir des harkis, réfugiés dans des cryptes d’églises parisiennes, La Madeleine par exemple, pour engager une grève de la faim destinée à réveiller les autorités et alerter l’opinion publique. C’était dans les années soixante-dix. Aujourd’hui encore, pleine justice n’a pas été rendue à ces hommes et à leurs familles. Il arrive même que leurs enfants soient agressés en raison de l’engagement de leurs parents.
Emmanuel Macron a donc annoncé lundi « un texte de loi de reconnaissance et de réparation », qui devrait, sans avoir la prétention d’écrire une page d’histoire, signifier la singularité et la spécificité de la question harkie. Il a été pour cela applaudi par cette assemblée porteuse de tant de souffrances et blessée par tant d’ingratitude. N’est-ce pas Georges Clemenceau qui affirmait des anciens combattants : « Ils ont des droits sur nous. » Oui, les harkis ont des droits sur nous !
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 22 septembre 2021.