« Élections, piège à cons » … Et la vaccination ?, par Jérôme Serri.
Pour les uns, s’être fait vacciner, c’était pouvoir partir en vacances à l’étranger. Pour d’autres, c’était pouvoir avoir la visite de ses enfants sans craindre de se faire contaminer par eux. Pour d’autres, c’était accomplir son devoir de citoyen en participant à la mise en place d’une immunité collective.
Pour d’autres, c’était une nécessité pour éviter, demain, un nouveau confinement. Pour d’autres, c’était tout simplement suivre l’avis de son médecin. Pour d’autres, encore, c’était se fier à un ami qui, travaillant dans un laboratoire, garantissait l’honnêteté de l’industrie pharmaceutique. Pour d’autres, c’était éviter d’être catalogué dans le camp infamant des complotistes. Pour d’autres, c’était assumer, aux côtés de celui que l’on avait élu en 2017, la difficulté de gouverner un peuple ingouvernable. Pour d’autres, c’était se conformer à la doxa de ses collègues ou obtempérer devant les intimidations de son employeur. Pour d’autres, c’était affirmer sa foi dans les progrès de la science. Pour d’autres, c’était témoigner son soutien aux journalistes malmenés par le professeur Raoult.
Sous ces diverses motivations se cache une même indifférence au désir de savoir ce qu’il en est réellement de cette épidémie. Comme si cette libido sciendi naturelle à l’homme avait cédé la place, plus qu’à une peur devenue déraisonnable, à une sorte de libido dominandi, à un souci entêté d’affirmer son appartenance à une élite. Je me vaccine, donc j’ai les moyens d’aller me reposer à l’autre bout du monde. Je me fais piquer, donc je relance l’économie, affirmant ainsi aux yeux de tous mon sens des responsabilités. J’écoute Emmanuel Macron, donc je ne suis en rien un populiste. S’informer, douter, hésiter devant l’injonction vaccinale du gouvernement serait même assez mauvais goût. Pourquoi ne pas enfiler, tant qu’on y est, un gilet jaune ?
Lundi soir, sur CNews, Pascal Praud et Yvan Rioufol eurent du mal à placer un mot, tant leurs confrères Jean-Claude Dassier et Jérôme Béglé fulminaient devant le ralentissement de la vaccination en France. Comment, lorsqu’on a reçu ses deux doses, ne pas avoir aujourd’hui le sentiment, devant l’efficacité du vaccin toujours plus improbable, d’avoir été dupé par la propagande gouvernementale. Tous deux pouvaient effectivement s’emporter : 37,10 % seulement des Français ont été doublement vaccinés. C’est là une faible participation vaccinale.
« Élections, pièges à cons », écrivait Jean-Paul Sartre, il y a cinquante ans, dans Les Temps modernes. La désertion des « vaccinodromes » sera-t-elle l’occasion pour les Français d’exprimer, comme lors des élections régionales et départementales de juin dernier, leur ras-le-bol ?