Au lieu de faire du français et du multilinguisme les langues de l'Europe, après le Brexit, certains essaient d'imposer l'anglo-américain comme langue unique à Bruxelles !
(Vu sur le blog de notre ami Marc Rousset et merci d'avoir relayé cet article)
Sources : http://marcrousset.over-blog.com/
(LettreOuverteCollectiveauPrésidentRépubliqueSurUEpostBrexitetAnglicisationsServicesPublics.)
A Monsieur Emmanuel Macron, Président de la République
Palais de l’Élysée, 55, rue du Faubourg Saint-Honoré 75008
Monsieur le Président
Nous sommes un collectif d’associations de résistance francophone en synergie en France et dans d’autres pays ayant le français en partage.
Depuis votre candidature de 2017, nous vous avons saisi plusieurs fois de nos préoccupations au sujet de votre politique du français et de la Francophonie.
Vos engagements de candidat, écrits, sérieux, concrets, ont été accueillis en 2017 avec un vif intérêt. De même lorsque que vous reprîtes, le 20 mars 2018 sous la Coupole, l’essentiel de nos propositions dans la présentation de votre politique, ainsi que notre projet associatif (2001) d’« Institut de la Francophonie et de la diversité culturelle » au château de Villers-Cotterêts.
Nous nous réjouissons de la mise en place effective des moyens humains, financiers, administratifs, nécessaires au projet Villers-Cotterêts, dont les travaux commencent, en vue d’une inauguration en 2022.
Certes, en même temps, des signaux contraires inquiétants ont été émis par vous-même et votre gouvernement. Ils ont, du reste, été publiquement critiqués avec vigueur de divers côtés, y compris par nos associations.
Mais nous avons voulu croire que ces concessions à la « modernité » ne l’emporteraient pas sur votre rôle et votre volonté de Président de promouvoir les intérêts fondamentaux de la France et de sa civilisation, au cœur desquels figurent la langue française et la Francophonie.
Ainsi nourrissons-nous l’espoir que vous ferez, à terme rapproché, prévaloir ces intérêts face à deux évolutions fort dangereuses pour le français :
La première de ces évolutions découle du vote Brexit du 23/6/2016. La CEE avait fixé en 1958, en son règlement n°1, les langues officielles et de travail. Union, elle l’a, par votes à l’unanimité, adapté aux vagues d’adhésions. Après le Royaume-Uni qui déclara l’anglais pour l’usage de l’UE, l’Eire (République d’Irlande) fut le seul nouvel adhérent à déclarer cette langue, mais en ajoutant le gaèlique : unique exemple de membre à deux langues officielles « UE ».
Le Brexit fragilise donc - surtout politiquement - le statut actuel de l’anglais.
Or, un puissant mouvement s’est développé, dans diverses capitales et des institutions de l’UE, en faveur non de l’abandon ou de la réduction de la place de l’anglais, mais tout au contraire de son maintien. Voire de sa promotion comme « langue commune », officielle de fait, appelée à le devenir seule en droit. Cela en invoquant la situation actuelle conquise grâce à l’opiniâtreté des nouveaux entrants, et au laxisme persistant des autres, français en premier lieu. En osant aussi plaider que l’anglo-américain, n’étant plus langue officielle d’un membre important, devient « neutre », une sorte de commode « esperanto » !…
Il pourrait donc y avoir un vote du Conseil de l’UE pour adapter le statut des langues à la situation créée par le Brexit. Un vote selon la règle intangible de l’unanimité, qui entraîne le rejet du texte proposé si un seul pays y met son veto.
Monsieur le Président, c’est d’abord de la France que les Français – et des Européens et Francophones de partout – attendent un veto. Une opposition déterminée au mouvement pour la « langue commune ». Le Brexit aidant, on ne peut plus exiger des administrations nationales qu’elles travaillent sur des documents reçus uniquement en anglais, et répondent dans cette seule langue.
Il y va du destin de l’Europe elle-même, qui est diversité de hautes cultures, et non une vaste Prairie, un simple espace à uniformiser, notamment par l’anglais, pour mieux le dominer. Enjeu économique, mais surtout civilisationnel.
Monsieur le Président, la position que vous prendrez au nom de la France aura des effets et un retentissement considérables. Vous pouvez vous placer dans le sillage du Général refusant l’AMGOT en 1944, puis sortant de l’OTAN militaire en 1965 ; du peuple français repoussant la « Constitution Giscard » en 2005 ; et du Président Chirac, à qui vous venez de rendre un bel hommage, notamment pour son refus d’engager la France dans la guerre de M. Bush en Irak.
Monsieur le Président, à votre tour, vous avez entre vos mains le destin de la France. Pour la langue et les cultures en Francophonie, pour celles d’Europe, et la civilisation, vous seul pouvez dire « non » aux menées impériales.
La deuxième évolution très inquiétante est celle du passage de services publics français à l’anglo-américain toléré, voire officiellement encouragé. Il s’agit en particulier de l’enseignement supérieur public, à la faveur de la loi Fioraso de 2013, faite pour faciliter l’enseignement en anglais. Elle a pourtant interdit aux établissements d’offrir des formations diplômantes exclusivement en anglais.
Or, cette disposition reste ignorée par le ministère de l'Enseignement supérieur qui est allé jusqu’à accréditer ces formations malgré leur illégalité flagrante, pas davantage sanctionnée par les tribunaux administratifs, malgré tous les recours de nos associations auprès d’eux. En 2019, selon CAMPUS FRANCE, 1213 formations ne respecteraient pas la loi Fioraso et la Constitution (article 2) !
Il s’agit aussi de l’audiovisuel public, où le CSA n’a pas rempli sa mission.
Également de ministères et d’organismes publics divers. En voici un exemple révélateur, absurde, dans le domaine du ministre des Transports :
Après le « pass navigo » de la RATP devenu bizarrement « navigo easy » en passant à la région d’Île de France, voici que la SNCF affuble du nom de « Greenspeed » la société regroupant Eurostar et Thalys ! Alors qu’elle pouvait choisir le simple « Eurothalys », ou « Eurapid(e) », « Euréclair » ?
Cette évolution n’est pas seulement d’un ridicule avéré, elle est destructrice. Elle contribue à détruire la confiance des Français en leur État, en un gouvernement qui, à leurs yeux, accepte, encourage la soumission du pays. Elle peut provoquer les réactions populaires du type « Gilets jaunes », et nourrir les extrêmes.
Monsieur le Président, vous venez d’appeler à l’action dans un autre domaine très sensible. Par ce même élan, nous vous en prions : appelez à faire cesser l’arrachage public du français, d’abord les deux grandes évolutions citées qui constituent une dangereuse « substitution de langue, de culture, de civilisation ».
Veuillez, Monsieur le Président, recevoir l’expression de notre espoir tenace en votre volonté et votre pouvoir d’agir, et de notre très haute considération.
Liste des 24 associations signataires et de leurs représentants élus :
Association des Écrivains combattants (AEC), SG : Alfred Gilder ;
Association Francophonie Avenir (AFRAV), président : Régis Ravat ;
Association pour la Promotion de la Francophonie en Flandre (APFF asbl)
De Haan, Belgique, directeur : Edgar Fonck ;
Athena, Association pour la Défense et la Promotion des Langues officielles de la Communauté Européenne, (siège à Luxembourg): président Anna Maria Campogrande ;
Avenir de la langue française (ALF), président : Albert Salon ;
Carrefour des Acteurs sociaux (CAS-pôle Francophonie), vice-présidente : Catherine Distinguin ;
Centre d’Études et de Recherches sur le Monde francophone (CERMF), président : Ilyès Zouari ;
Cercle littéraire des Écrivains Cheminots (CLEC), SG : Maurice Le Lous ;
Collectif Langue française (CLF), Suisse romande, à Lausanne, président : Philippe Carron,
Collectif « Non au tout-à-l’anglais ! Non à l’anglais partout ! », présidente-fondatrice : Valérie Faisien ;
Comitato Allarme Lingua (Rome, Italie), président : Senatore Renato Corsetti ;
C.O.U.R.R.I.E.L. Association, président : Georges Gastaud ;
Défense de la Langue française (DLF), SG : Marceau Déchamps ;
Défense de la Langue française (DLF-Pays de Savoie), président : Philippe Reynaud ;
Droit de Comprendre (DDC), président : Marc Favre d’Échallens ;
Forum francophone international (FFI-France), président : Albert Salon ;
Forum francophone international (FFI-Québec), président : François Gauthier ;
Forum pour la France (FPF), SG : Henri Fouquereau ;
France-Univers, président : Michel Mourlet ;
Francophonie Force oblige (FFO), président : Alain Ripaux ;
Impératif français, (IF, au Québec), président : Jean-Paul Perreault ;
Institut Culture, Économie, Géopolitique (ICEG), président : Yves Montenay ;
Observatoire des Libertés (OdL), président : Louis Maisonneuve ;
République exemplaire, président : Michel Le Net.
Commentaires
Oui bien entendu , mais le français " moyen " , est aussi responsable : il n'est pas obligé d'employer .
Cette affaire du corona virus , pour ce qui est de plus récent , aura enrichi le vocabulaire du mot "cluster " ; avec quelle délectation ce mot était il dit et redit par un généraliste invité de plateau TV et qui en rajoutait avec " faire le job " au lieu de " faire le travail " , l'accent du Sud -Ouest en prime !
On parle beaucoup des réclames ; les eaux de toilettes sont en première ligne avec leurs accroches en anglais ; c'est simple : il suffit de renoncer à ces produits (au moins ne les utiliser qu'avec parcimonie ) .
Idem pour les publications scientifiques , en anglais : à faire passer directement de la bannette à courrier vers la corbeille à papier ; on ne perd rien !
Enfin , il semblerait que les milieux de l' aéronautique soient des vecteurs importants de l'utilisation de l'anglais ; curieux que cela ne soit jamais dénoncé .
Macron est fier de parler couramment l'anglais des affaires. D'un autre côté, son aura européenne a disparu au bout de trois ans - il est dans la posture du mendiant - et sa parole est lue comme de la communication. Autant dire que le poids de la France s'est considérablement allégé dans les instances décisionnaires et que nos objurgations seront prises avec le sourire.
Pour l'aéronautique, on touche là un domaine transnational qui tire profit d'une langue de travail commune, l'anglais OACI. De cet usage découle tous les autres emplois, jusqu'à la construction des aéronefs et des plateformes logistiques.
Notre association ICEO (Institut de Coopération avec l'Europe orientale), défend et promeut un trilinguisme "souple" en Europe, mettant en avant la langue du locuteur au sein des instances européennes.( https://www.association-iceo.fr/actualite-par-thematiques/trilinguisme-et-francophonie/n-001-3-campagne-du-cerm-pour-un-trilinguisme-souple-dans-les-pratiques-de-lunion-europeenne-2-2/).
Notre proposition a été soumise à deux présidents du parlement européen successifs qui ont à chaque fois "botté en touche". La défense de la diversité culturelle de l'Europe n'est pas une priorité de l'UE, pour autant qu'elle en ait une. Mais cette adresse au président de la république, nous nous y joignons volontiers. Sans illusion démesurée.