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  • Délinquance et insécurité: les Français voient-ils juste ou sont-ils aveuglés par les faits divers?, par Adrien Peltier.

    © AFP 2021 PIERRE ANDRIEU

    Le dernier sondage IFOP sur la délinquance vient de paraître. Près des trois quarts des Français estimeraient ainsi qu’elle augmente. La majorité d’entre eux semblent de surcroît insatisfaits des politiques de sécurité actuelles. Leur perception est-elle tronquée par l’omniprésence de la question, ou est-elle conforme au réel? Décryptage.

    À écouter les Français, la délinquance n’en finirait pas d’augmenter. Cette année, ils seraient ainsi 71% à observer une hausse de l’insécurité, selon l’IFOP. Une inquiétude généralisée qui, selon Laurent Lemasson, docteur en droit public et responsable des publications de l’Institut pour la justice, reflète «correctement» la réalité:

     

    «La sécurité est dans le top 5 des préoccupations des Français depuis bien longtemps et leur perception correspond évidemment à une réalité», avance-t-il avant de préciser: «L’insécurité n’est pas toujours visible dans les chiffres qui ne montrent qu’une partie du phénomène, celui-ci n’étant pas toujours quantifiable.»

     

    A contrario, pour Véronique Le Goaziou, sociologue spécialisée dans les questions liées à la délinquance et chercheuse au CNRS, bien qu’existante, l’insécurité subit un effet de surexposition qui la rend omniprésente dans les esprits.

     

    «Le discours ambiant donne souvent l’impression d’être dans un pays à feu et à sang. Il y a eu quelques événements traumatisants cette année, toutes les rivalités entre bandes, l’histoire de cette fille tuée par ses camarades de classe,… dès lors que ces histoires tournent en boucle, elles contribuent à l’aggravation ou à l’éclosion du sentiment d’insécurité, c’est assez classique», observe-t-elle.

     

    Un avis identique à celui du garde des Sceaux, lequel affirmait en septembre: «L’insécurité, il faut la combattre, le sentiment d'insécurité, c'est plus difficile, car c'est de l'ordre du fantasme». Un sentiment nourri selon lui par «les difficultés économiques», «le Covid» et «certains médias» comme les «chaînes d'infos continues».

    La confiance en la justice entachée

    Le sondage pointe pourtant une réponse insuffisante des pouvoirs publics, qui serait même le cœur du problème de l’insécurité.

    Réalisée pour CNews et Sud Radio auprès d’un échantillon représentatif de 1.013 personnes, l’enquête s’intéresse en effet aux exigences des Français en matière de sécurité et de lutte contre la délinquance.

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    Y transparaît la volonté nette d’un système judiciaire plus strict. À la question «parmi les actions ou mesures suivantes, quelles sont celles qui vous sembleraient les plus efficaces pour lutter contre la délinquance?», les réponses les plus données concernent l’instauration de mesures plus radicales. Près de la moitié des sondés se sont ainsi montrés favorables à la suppression des aides (logement, allocations, etc.) pour les familles de mineurs délinquants multirécidivistes, ainsi qu’à l’expulsion des délinquants étrangers après avoir purgé leur peine.

    Question peines, ils sont aussi 44% à demander l’application systématique des peines d’emprisonnement. Des velléités qui suggèrent le sentiment d’une justice incomplète, ou incapable d’appliquer ses préceptes.

    L’efficacité des forces de l’ordre semble également remise en cause, avec seulement 8% des sondés réclamant avant tout l’augmentation des effectifs de police sur le terrain.

     

    «Le problème est en effet majoritairement du côté de la justice, et l’État en est directement responsable», tacle Laurent Lemasson avant d’asséner: «On observe chez une partie de la magistrature, chez les gardes des Sceaux, notamment depuis Taubira, une préoccupation pour la défense des délinquants. Quand vous entendez leurs déclarations, que vous observez leur politique carcérale, vous avez le sentiment que l’on n’a pas forcément envie de vous protéger.»

     

    Pour Véronique Le Goaziou, ces «poncifs classiques» ne sauraient refléter la réalité: «La justice traine avec elle cette étiquette de laxisme depuis plusieurs années maintenant, mais elle n’est pas une machine qui, dès lors que l’action est commise, va actionner la peine», entend nuancer la sociologue. Aussi, affirme-t-elle que les attentes du public face à la violence correspondent souvent aux propositions politiques du moment, voire aux idées en vogue: «La suppression des aides, par exemple c’est en pleine actualité, ça vient d’être voté au Sénat dans le cadre de la loi séparatisme». L’impression d’une hausse de la délinquance serait donc en partie contextuelle.

    Et dans les faits?

    Il en reste tout de même que, pour 71% des Français sondés par l’IFOP cette année, la violence continuerait de croître. Pourtant, celle-ci a bel et bien diminué, à en croire les chiffres du ministère de l’Intérieur… même si le phénomène s’explique.

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    En effet, en raison de la pandémie et des mesures restrictives, «la plupart des indicateurs de la délinquance enregistrée par les services de police et de gendarmerie reculent fortement en 2020», rapporte la place Beauveau. Seule exception, les viols (+11%) et les violences intrafamiliales (+9%) qui ont augmenté pour la troisième année consécutive. L’apparente accalmie de la violence serait donc à prendre avec nuance.

    Quoi qu’il en soit, la peur des citoyens n’est pas pour autant irrationnelle, notamment en raison de la médiatisation de faits divers parfois très violents, note Véronique Le Goaziou.

     

    «La délinquance et le sentiment d’insécurité peuvent être décorrélés. Les statistiques dont on dispose peuvent mettre en évidence une délinquance qui n’augmente pas, mais, en raison d’un malaise, une explosion de la violence peut être ressentie. Et puis celle-ci a toujours eu un côté spectaculaire qui marque.»

     

    Laurent Lemasson reconnaît, lui aussi, un écart entre les statistiques et le sentiment majoritaire des Français sur la question. En insistant toutefois sur l’incapacité des statistiques à refléter la réalité. Aussi, des faits pas si divers, aux incidences minimes dans les chiffres de la délinquance, nourrissent-ils selon lui durablement un sentiment d’insécurité parfaitement justifié, jusqu’à modifier les comportements de la population: «Il suffit d’un fait, le chauffeur de bus battu à mort à Bayonne pour avoir réclamé le port du masque à des jeunes par exemple, pour que les gens en déduisent qu’il vaut mieux ne pas s’exposer aux mêmes risques. Dans les faits, cela ne se verra pas, il y aura eu un seul mort, mais l’impact est réel». Ainsi, les Français en viennent-ils par exemple à adopter des «procédures d’évitement» des zones dangereuses.

     

    «Trois choses nourrissent le sentiment d’insécurité», explique Laurent Lemasson: «Il y a d’abord tous ces non-respects des règles de la vie commune et qui marquent une perte de confiance chez les citoyens. Deuxièmement, les violences urbaines, dont on trouve des cas tous les jours dans les journaux, tout comme le fait d’être exposé à certaines "zones de non droit". Enfin, la perception que les autorités ne répondent pas à cette demande de justice et de sécurité.»

     

    Si la délinquance est loin d’être la seule cause d’inquiétude des Français, elle risque néanmoins de peser lourdement dans la campagne présidentielle qui se prépare. Chiffre significatif, la politique sécuritaire d’Emmanuel Macron n’est jugée positive que par 26% des sondés de l’IFOP (contre 41% en avril 2018). Un pourcentage qui accrédite davantage l’idée d’une perte de confiance en la justice.

    Pour la présidentielle 2022, 55% se déclarent même prêts à renoncer à voter pour un candidat proche de leur sensibilité politique mais n’accordant pas assez d’importance à la lutte contre l’insécurité. Là non plus, rien de nouveau selon Véronique Le Goaziou, le débat sur l’insécurité étant «une thématique qui tire à elle tout le débat public et politique depuis les années 70-80». A-t-elle seulement été suffisamment prise au sérieux par les dirigeants? Pour la sociologue, aucun doute, la question a été «maximisée plutôt que minimisée, cette question étant même en tête de leurs préoccupations». Peut-être pas assez au goût des Français alors.

    Source : https://fr.sputniknews.com/

  • Discriminez qui vous voudrez, par Aristide Renou.

    Il faut saluer le principe de discrimination que promeuvent les indigénistes tout en condamnant leur racisme : l'État doit être forcé de considérer que les discriminations sont une composante essentielle de la vie sociale. Ou alors, nous permettons à l'État de détruire toute vie privée.

    Les récentes polémiques au sujet des réunions interdites aux Blancs organisées par l’UNEF nous ont entraînés, je le crains, dans une direction totalement inappropriée. Il était certes amusant – et facile – de mettre des gens comme Mélanie Luce ou Audrey Pulvar face à leurs contradictions en les accusant de pratiquer le racisme qu’elles prétendent pourtant combattre de toutes leurs forces.

    Bien sûr que des gens comme Mélanie Luce ou Audrey Pulvar, ou des organisations comme les Indigènes de la République, sont racistes, au sens strict du terme. Ces gens-là considèrent, implicitement ou explicitement, que la race est la réalité fondamentale de la vie humaine, conditionnant et expliquant toutes les autres, et que par ailleurs il existe une hiérarchie objective entre les différentes races, avec tout en bas les (hommes) Blancs, « responsables de tous les maux de la terre », comme dirait l’ineffable Camélia Jordana.

    Certes, à la différence des fondateurs du racisme moderne, comme Gobineau, ces gens-là ne se sont pas donnés la peine de réfléchir longuement ni d’écrire de savants volumes pour essayer de prouver la vérité de leur doctrine, et leurs positions sont extrêmement dogmatiques et pauvres intellectuellement, ce pourquoi il est facile de les convaincre de contradiction. Certes, il existe bien des questions irrésolues au sein de leur dogme : par exemple la place respective, dans la hiérarchie raciale, des Noirs et des « orientaux », et il sera certainement intéressant de voir comment ils résoudront ce problème une fois éteinte la domination du « Blanc » (un indice : si l’histoire peut servir à éclairer le futur, ça ne va pas bien se passer du tout).

    Mais enfin, ils sont racistes, cela ne fait pas de doute. Certes également, le racisme, au sens strict donné plus haut, en tant que matérialisme, est une erreur intellectuelle, en tant que fatalisme, est une erreur politique et une faute morale.

    Certes toujours, les démocraties modernes reposent sur l’idée que « tous les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits » ou qu’ils ont été « créés égaux ». Par conséquent, le racisme est incompatible avec la démocratie, en ce sens que les lois ne sauraient, bien évidemment, reposer sur des prémisses racistes, et, plus largement, la loi doit être la même pour tous, et ne tenir aucun compte de la « race » réelle ou supposée des individus.

    Les discriminations ou les libertés ?

    Mais, si un régime démocratique ne saurait être raciste, il ne saurait pas davantage se donner pour objectif d’éradiquer les « discriminations » au sein de la société, y compris les « discriminations » basées sur des conceptions plus ou moins racistes, car cela reviendrait à s’auto-détruire. À la question : « Est-il possible de mettre fin aux “discriminations” dont sont victimes les Juifs ? », Léo Strauss répondait très simplement : non, cela n’est possible d’aucune manière. Et sa réponse vaut bien sûr pour tous les groupes humains, quelles que soient les caractéristiques qui les constituent ainsi en tant que groupe.

    « Une société libérale », explique Strauss, « repose sur la distinction entre le politique (ou l’État) et la société, ou sur la distinction entre le public et le privé. Dans la société libérale, il existe nécessairement une sphère privée dans laquelle la législation de l’État ne doit pas interférer. […] L’interdiction de toute « discrimination » signifierait l’abolition de la sphère privée, la négation de la différence entre l’État et la société, en un mot, la destruction de la société libérale ; ce n’est donc pas un objectif ou une politique raisonnable. »

    Cette solution n’est pas raisonnable, notamment, car aussi bien la raison que l’expérience nous apprennent que, dans les régimes où il n’existe pas de sphère privée, la « discrimination » est beaucoup plus présente et est même, en règle générale, une politique d’État. La situation des Juifs, par exemple, était infiniment pire en URSS que dans des démocraties libérales tolérant un certain antisémitisme privé, comme la France ou les États-Unis.

    Vouloir faire disparaître les « discriminations » (c’est-à-dire les différences de traitement fondées sur de mauvaises raisons) dans la sphère privée implique de faire entièrement disparaitre la liberté d’association, comme le souligne Léo Strauss, et ce dans le sens le plus extensif du terme « association ». Non seulement une confrérie ou un club privé ne peut pas être interdit aux Juifs, ou aux Noirs, ou à qui on voudra, mais un employeur ne peut pas être libre de recruter qui il veut sur les critères de son choix, un propriétaire ne peut pas être libre de louer son bien à qui il veut sur les critères de son choix, et ainsi de suite. Partout l’État devra pouvoir intervenir et scruter les motifs des choix privés pour s’assurer que les différences qui résultent de ces choix ne sont pas des « discriminations » interdites par la loi.

    La lutte contre les discriminations ainsi entendue ne peut qu’avoir pour résultat final l’extinction totale de la liberté individuelle. Autant vaudrait vouloir faire disparaitre l’oxygène de l’air au motif que celui-ci est susceptible d’alimenter les incendies.

    Or, en hurlant au racisme au sujet des réunions « non-mixtes » de l’UNEF et en prétendant les interdire, nous validons précisément l’idée que l’État serait fondé à essayer d’éradiquer toutes les discriminations. C’est-à-dire que nous donnons raison à nos adversaires et nous alimentons ce qui fait leur puissance : tous les quotas, officiels ou officieux, toutes les subventions, qui les nourrissent, toutes les interdictions qui grignotent peu à peu nos libertés, toutes les condamnations, aussi bien morales que judiciaires, qui leur permettent d’intimider leurs contradicteurs, tout cela, dont nous nous plaignons si fort et à juste titre, découle inévitablement de l’objectif officiel d’éradiquer le racisme de la sphère privée. Il aurait donc fallu réagir d’une manière tout à fait opposée à celle qui a été choisie.

    Bien sûr, flétrir l’UNEF, organisation objectivement ennemie de la nation française. Mais en même reconnaître son droit à organiser des réunions interdites aux Blancs, et même sans doute la remercier de nous rappeler que les libertés individuelles garanties en démocratie incluent inévitablement la liberté de « discriminer », c’est-à-dire de choisir, sans que les pouvoirs publics puissent regarder par-dessus notre épaule, avec qui nous nous associons : pour faire du commerce, pour nous divertir, pour apprendre, pour habiter, pour toutes les activités que nous souhaitons mener. Et, bien sûr, il aurait fallu demander également que toutes les conséquences en soient tirées : que la loi, notamment, cesse d’essayer d’imposer une prétendue « mixité sociale » – faux nez de la mixité raciale – que les premiers concernés essayent à toute force de fuir dès qu’ils le peuvent.

    La loi doit être la même pour tous, soit qu’elle protège soit qu’elle punisse. Et la loi n’a pas à interdire à ceux qui le souhaitent d’organiser des réunions monocolores, que cette couleur soit noire, blanche, jaune ou tout ce qu’on voudra ; pas plus que la loi n’est légitime à imposer à une association de scouts d’accueillir dans ses rangs des homosexuels déclarés ou à une organisation homosexuelle de faire une place en son sein à des gens qui considèrent que l’homosexualité est une abomination ; et ainsi de suite.

    Chasser les discriminations, c’est précipiter la racialisation

    Peut-être objectera-t-on à cela que, même s’il est certes conforme aux principes démocratiques de tolérer les discriminations dans la sphère privée, une société démocratique dans laquelle les discriminations, notamment raciales, prolifèrent, ne saurait subsister bien longtemps. Ce qui est vrai, mais il ne faut pas prendre l’effet pour la cause. Une société démocratique dans laquelle les distinctions raciales deviennent primordiales et où les associations fondées sur la race prolifèrent est une société dans laquelle les individus n’ont plus suffisamment en commun pour se considérer comme appartenant au même corps politique et se replient, par conséquent, sur des liens communautaires plus primitifs, moins abstraits, pré-politiques.

    Si le racisme gagne du terrain dans les cœurs et les esprits, ce n’est pas parce que la loi n’est pas assez sévère avec ceux qui « discriminent », c’est au contraire parce que nous avons assigné à la loi un rôle beaucoup trop large, un rôle qu’elle est incapable de remplir. Nous avons cru naïvement que la loi seule pouvait suffire à former une communauté politique, que l’adhésion à la « règle du jeu démocratique » pouvait remplacer le lien national. Nous avons méprisé les conditions pré-politiques de l’association politique : cette similitude d’opinions, de sentiments, d’habitudes, de mœurs, ces ancêtres et cette histoire commune qui nourrissent la confiance mutuelle indispensable à l’action commune et à un respect de la loi qui ne soit pas inspiré par la seule peur. En conséquence de quoi nous avons laissé l’hétérogénéité culturelle, ethnique, religieuse de la population « française » croître dans des proportions monstrueuses, jusqu’à paralyser peu à peu l’action commune et à menacer l’existence même de la France. Et désormais nous assistons, en quelque sorte, au retour du refoulé.

    C’est parce que nous avons considéré les « discriminations » nationales comme indignes de nous, comme attentatoires à l’unité de l’espèce humaine, que nous sommes aujourd’hui confrontés à une racialisation galopante de l’espace et de la conversation publique.

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    Source : https://www.politiquemagazine.fr/

  • Contre le piège du racisme pour tous, Laurent Dandrieu.

    Un essai de Mathieu Bock-Côté plonge au cœur de la pensée racialiste qui menace le débat public. Et qui, si l’on n’y prend pas garde, va nous entraîner encore plus loin dans le processus de décivilisation en cours.

    C’était il y a treize ans – autant dire une éternité. Dans la préhistoire, donc (en 2008 pour être plus précis), l’élection de Barack Obama était censée faire basculer l’Amérique – et donc le monde – dans une société “post-raciale”, où les questions de race, enfin dépassées, seraient désormais obsolètes. Treize ans plus tard, c’est exactement le contraire qui s’est produit : de Black Live Matters en dénonciation du “privilège blanc”, « la racialisation des rapports sociaux devient l’horizon indispensable du progrès démocratique dans la société occidentale », comme l’écrit Mathieu Bock-Côté dans la Révolution racialiste. La race, que l’on avait pu croire définitivement discréditée comme catégorie politique par les horreurs du nazisme, est redevenue, 75 ans plus tard, le pivot autour duquel, de plus en plus, tourne le débat politico-intellectuel en Occident. Comment cela a-t-il été possible ? Pasolini, en 1976, prophétisait que « le fascisme peut revenir sur le devant de la scène à condition qu’il s’appelle antifascisme » – le mouvement “antifa” confirme chaque jour la lucidité pasolinienne. On pourrait le paraphraser : le racisme est, pour notre malheur, en passe de redevenir dominant en s’appelant antiracisme.

    C’est cette révolution, dans les deux sens du terme, qu’analyse avec le brio qu’on lui connaît Mathieu Bock-Côté. Dans son introduction, l’essayiste québécois renvoie explicitement à la réponse que fit François de la Rochefoucauld à Louis XVI au lendemain de la prise de la Bastille : « – C’est une révolte ? – Non, sire, c’est une révolution. » Et Mathieu Bock-Côté d’ajouter : « On pourrait dire la même chose aujourd’hui de la révolution racialiste, en ajoutant qu’elle bascule dans la terreur. » À ceux qui jugeront ce mot de “terreur” excessif, nous répondrons par ce qu’écrivait de la Révolution française Augustin Cochin : « Avant la Terreur sanglante de 93, il y eut, de 1765 à 1780, dans la république des lettres, une terreur sèche, dont l’encyclopédie fut le comité de salut public, et d’Alembert le Robespierre. Elle fauche les réputations comme l’autre les têtes, sa guillotine c’est la diffamation. » Cette “terreur sèche” a aujourd’hui un autre nom : on l’appelle cancel culture, qui ne vise pas à seulement à purger l’espace public des statues des figures du passé non conformes à l’idéologie diversitaire ambiante, mais aussi à priver de parole publique tous les contemporains qui contreviennent à ses dogmes. Et, comme on en a vu une ébauche lors des émeutes suscitées par le mouvement Black Live Matters aux États-Unis, cette terreur sèche ne saurait manquer, si l’on n’y met un terme, d’être suivie d’une autre, bien sanglante celle-là.

    La France, cible majeure

    C’est à cette réaction que nous invite l’essai de Mathieu Bock-Côté, à faire lire d’urgence à toux ceux qui estimeraient encore que racialisme et décolonialisme ne sont que des dingueries sans conséquence. En pointant l’importance stratégique de la France dans cette guerre idéologique : « Cette nouvelle idéologie américaine s’acharne particulièrement sur la France, à laquelle on reproche de s’entêter à ne pas voir le monde à travers le prisme racial. […] La France, dans cet imaginaire, devient en quelque sorte la nation contre-révolutionnaire par excellence, et, comme à la Vendée en son temps, on veut lui réserver un mauvais sort – on pourrait parler ironiquement du destin vendéen de la France républicaine. »

    Cette révolution racialiste, nous dit-il, c’est ce moment historique du processus de déconstruction où la civilisation occidentale tout entière n’est plus vue que comme une structure par essence coloniale par laquelle se perpétue la domination blanche sur tous les peuples “racisés”. Structurellement raciste par le seul fait d’être issu de cette culture et de profiter de ses privilèges, le “blanc” (tous peuples fondus dans une même unité raciale fantasmée) se voit intimer l’ordre de plier le genou pour demander pardon de ce péché originel, ou bien de se taire : « Le progressiste se faisait une fierté de ne pas être raciste : il s’en fait une aujourd’hui de l’être, ou du moins d’avouer l’être, premier étape pour ne plus l’être. » Amener à résipiscence les “privilégiés blancs”, les forcer à participer au lynchage public de ceux qui persisteraient à ne pas mettre genou en terre, sont les étapes indispensables d’un processus plus général de “déblanchiment” des sociétés occidentales. Ainsi se produit une nouvelle décolonisation, interne aux sociétés occidentales, visant à les purger de leur identité propre, structurellement raciste : cette révolution, « c’est seulement lorsque les peuples occidentaux seront devenus étrangers chez eux qu’on la jugera achevée ».

    Retraçant la genèse intellectuelle du phénomène, démontant ses mécanismes, ses trajectoires, de l’université aux médias en passant par les stratégies marketing des grands groupes capitalistes, pointant ses délires (la petite sirène de Copenhague dénoncée comme un symbole de la suprématie blanche) et les lâchetés de ceux qui s’y soumettent (« Je suis désolée d’être née blanche et privilégiée. Ça me dégoûte », twittait ainsi en 2019 l’actrice Rosanna Arquette), Mathieu Bock-Côté invite à la résistance contre une révolution qui ne menace pas seulement notre liberté d’expression, mais bien notre être même.

    Réhabiliter le peuple

    Totalitaire par essence, le racialisme ne veut pas seulement nous contraindre à abjurer le racisme dont nous serions par essence coupables à raison de notre couleur de peau : puisque le racisme n’est plus une question d’individus, mais imprègne profondément toutes nos structures sociales, notre histoire, notre culture, puisqu’en somme les sociétés occidentales resteraient racistes quand bien même plus aucun de ses membres ne le serait intentionnellement, il faut éradiquer leur identité pour accoucher d’une société complètement nouvelle. Non seulement « l’abolition de la race blanche est au programme », mais l’abolition des sociétés occidentales l’est aussi.

    À cette révolution, que peut-on opposer, sans sombrer en miroir dans la logique raciste que cette révolution racialiste semble vouloir nous imposer ? L’universalisme ? Mathieu Bock-Côté montre bien que, pour les racialistes, « l’universalisme serait le mensonge que le monde occidental se raconterait à lui-même pour continuer à occulter les populations autrefois colonisées ». Il montre, surtout, que c’est une notion inefficace et vide de sens dès lors qu’on l’a coupée de ses racines : pas d’universalisme qui vaille s’il n’est enraciné dans le particulier d’une culture, d’une histoire, d’une identité. Cette identité que l’immigration de masse s’est attelée à dissoudre, fournissant à l’idéologie racialiste son indispensable base sociologique. Alors que les racialistes veulent promouvoir une reconstruction artificielle des sociétés occidentales « au point même […] de proscrire toute référence aux peuples historiques qui les composent, comme si la simple mention de populations natives conduisait inévitablement aux lois raciales et à une entreprise génocidaire », le seul moyen de les empêcher d’enfermer chacun dans son identité raciale est de réhabiliter la notion de peuple ; de renouer par elle avec « la densité existentielle de la communauté politique et de lui offrir un ancrage suffisamment fort pour chercher à se donner un élan vers l’universel. Rien n’importe plus, de ce point de vue, que de constituer sur son propre territoire […] une majorité nationale sûre d’elle et disposant d’une prépondérance démographique telle que son statut ne soit jamais fondamentalement remise en question. » Les peuples plutôt que les races : voilà le chemin de salut que nous offre ce petit livre indispensable.

    Illustration : Touchant soutien des minorités discriminées à Assa Traoré, égérie racialiste et fille d’un musulman polygame né au Mali, où on sait à quel point la diversité est prisée.

    La révolution racialiste et autres virus idéologiques, de Mathieu Bock-Côté, La Cité, 240 p., 20 €.

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    Source : https://www.politiquemagazine.fr/

  • Sur le site officiel de l'Action française : entre fri­lo­si­té et démobilisation, l’éditorial de François Marcilhac.

    Le suf­frage uni­ver­sel est conser­va­teur. Il l’est d’autant plus dans une période incer­taine, où il ne convient pas d’ajouter les risques d’un bou­le­ver­se­ment poli­tique aux aléas de la situa­tion. La « prime aux sor­tants », obser­vée au len­de­main des dépar­te­men­tales et des régio­nales, est la consé­quence de cette atti­tude fri­leuse. 

    françois marcilhac.jpgPour­quoi voter pour des can­di­dats ou des équipes inex­pé­ri­men­tés ou sans implan­ta­tion locale quand celles qui ont diri­gé les régions et les dépar­te­ments depuis sept ans ont fait hon­nê­te­ment ce qu’elles ont pu, sur­tout durant la période de crise sani­taire que nous venons de tra­ver­ser ? Le fait, d’ailleurs, que les Fran­çais connaissent mal les pré­ro­ga­tives tant des régions que des dépar­te­ments, s’il a joué un rôle dans l’abstention record à ces élec­tions, n’a pas été non plus, para­doxa­le­ment, sans favo­ri­ser les équipes sor­tantes. Car c’est l’Etat, c’est le Gou­ver­ne­ment, clai­re­ment iden­ti­fiés, que visent les cri­tiques (mais, là encore, dans un réflexe légi­ti­miste que nous avons maintes fois iden­ti­fié éga­le­ment lors des atten­tats ter­ro­ristes, ni l’un ni l’autre ne se sont effondrés).

    Car par­ler d’effondrement pour les macro­nistes lors de ces élec­tions seraient un contre­sens. Pour qu’il y ait effon­dre­ment, encore fau­drait-il que la REM eût été détrô­né. C’est d’autant moins le cas que, la REM n’existant pas lors des pré­cé­dentes échéances dépar­te­men­tales (mars 2015) et régio­nales (décembre 2015), le mou­ve­ment de Macron a sur­tout mon­tré son inca­pa­ci­té à s’ancrer dans les ter­ri­toires. Les élec­teurs de ce mou­ve­ment hors sol ont même sou­vent fait le choix de reve­nir aux can­di­dats de l’ancien monde, lorsqu’un bas­cu­le­ment de majo­ri­té se pro­fi­lait, comme dans la région Pays-de-la-Loire ou en Île-de-France. En région PACA, l’alliance LR-REM contre le RN anti­ci­pait ce risque. C’est aus­si la rai­son pour laquelle le Gou­ver­ne­ment n’a rien fait pour sus­ci­ter une forte par­ti­ci­pa­tion, jusqu’à un fias­co géné­ra­li­sé dans l’envoi de la pro­pa­gande : moins la par­ti­ci­pa­tion est impor­tante, moins il est pos­sible de tirer des consé­quences au plan natio­nal d’un échec cer­tain à s’ancrer dans le pays réel. Tou­te­fois, le camou­flet, lui, est réel, sur­tout dans les Hauts-de-France, où la majo­ri­té pré­si­den­tielle, en dépit de la pré­sence de cinq ministres, dont deux réga­liens (inté­rieur et jus­tice), ne lui a même pas per­mis de se qua­li­fier pour le second tour.

    Mais qu’importe, au fond, pour Macron ? Ce qu’il vise, c’est la pré­si­den­tielle et les res­sorts de celle-ci ne sont pas les mêmes que ceux des élec­tions locales. Oui, conclure quoi que ce soit de l’abstention à ces pré­sentes élec­tions ou de leurs résul­tats, ce serait tirer des plans sur la comète élec­to­rale. Par­ler de séces­sion est peut-être pré­ma­tu­ré, même si le second tour de la pré­si­den­tielle de 2017 a connu, avec 25,44 %, le plus haut taux d’abstention de toute l’histoire de la Ve Répu­blique, à l’exception de celui de la pré­si­den­tielle de 1969 (31,1 %) mais alors sans vrai enjeu poli­tique (oppo­sant la droite, avec Pom­pi­dou, au centre droit, avec Poher). On explique l’effondrement du RN par le phé­no­mène de la double abs­ten­tion mas­sive de son élec­to­rat, jeune et popu­laire. C’est un fait. Mais c’est un fait aus­si que le RN, en se chi­ra­qui­sant, en deve­nant chaque jour davan­tage inco­lore, inodore et sans saveur, n’a rien fait non plus pour cap­ter ce double élec­to­rat et l’inciter à se dépla­cer pour voter. On peut tou­jours par­ler de phé­no­mène social ou géné­ra­tion­nel : il n’en reste pas moins que le RN a de com­mun avec la REM son manque d’implantation locale, à l’exception, pour le RN, de quelques ter­ri­toires pré­cis, qui res­semblent sur­tout à des mai­sons témoins… La ges­tion auto­ri­ta­riste et erra­tique du mou­ve­ment en est évi­dem­ment la cause prin­ci­pale. Mais aus­si un dis­cours poli­tique éva­nes­cent et de plus en plus inau­dible aux classes popu­laires. Marine Le Pen fut aux abon­nés absents lors du mou­ve­ment des Gilets jaunes pour les mêmes rai­sons qu’elle s’abstient sur les ques­tions socié­tales : le refus de s’engager par peur de se lais­ser enfer­mer dans un quel­conque dis­cours. Elle ne s’aperçoit pas qu’elle ne peut que s’essouffler à cou­rir après la res­pec­ta­bi­li­té poli­ti­cienne en affa­dis­sant son pro­jet et que plus elle se dédia­bo­li­se­ra, plus elle sera dia­bo­li­sée par les autre for­ma­tions, qui ver­ront désor­mais en elle, une pos­sible concur­rente sur leur pré-car­ré politicien.

    Que nos ins­ti­tu­tions ne soient plus capables de mobi­li­ser les Fran­çais, c’est la seule leçon cer­taine que nous puis­sions tirer de l’abstention à ces élec­tions dépar­te­men­tales et régio­nales. Avec une seconde : les Fran­çais ne sont pas prêts à l’aventure, sur­tout si l’objet est mal iden­ti­fié. Avec un Emma­nuel Macron, un Xavier Ber­trand ou un Laurent Wau­quiez, ils sau­ront à peu près à quel abat­toir ils seront conduits, et dans quelles condi­tions. C’est tou­jours plus ras­su­rant, pour un peuple que l’on convainc chaque jour un peu plus qu’il sort iné­luc­ta­ble­ment de l’histoire.

    Fran­çois Marcilhac

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

  • Pourquoi tant d’acharnement à humilier la France et son armée?, par Roland Hureaux.

    La technique est toujours la même. Au motif qui y aurait un contentieux à apurer dans le rapport de la  France à son passé, en réalité inventé par nos ennemis, M. Macron nomme une commission d’experts chargée de rédiger un rapport sur la question. Cette commission est présidée et largement composée de gens hostiles aux thèses profrançaises et favorables aux thèses antifrançaises de la partie adverse. 

    8.jpgElle rend son rapport qui est, on pouvait s’en douter, non une tentative d’apaisement, mais nouvelle salissure sur la mémoire de la France, et doit être l’occasion de nouveaux actes de repentance, s’ajoutant à d’autres, humiliants pour notre pays.

    Algérie

    Avec l’Algérie, on pouvait tout à fait laisser les plaies se cicatriser avec le temps – plaies ouvertes, non par le souvenir d’une guerre vieille de soixante ans, que très peu d’Algériens ont gardé, mais par la propagande antifrançaise insensée du FLN au pouvoir depuis 1962, un parti qui ne représente plus du tout les combattants de l’indépendance, presque tous morts, qui a échoué sur tout et est rejeté par le peuple algérien. Mais M. Macron a cru bon de confier à Benjamin Stora la présidence d’une commission soi-disant paritaire mais dont le président, universitaire d’extrême gauche, épouse entièrement les thèses du FLN, en occultant notamment le souvenir des harkis (dont le massacre, en violation des accords d’Evian qui prévoyaient l’amnistie des deux côtés, est de la responsabilité de l’Etat algérien) ou d’autres massacres.  En face, un rappel insistant des bavures incessamment reprochées à l’armée française depuis deux générations. Le résultat, par l’exaspération que ce rapport suscite : non point l’apaisement mais  un  renouveau d’hostilité à l’égard des  Algériens dans une partie de l’opinion. Quant au gouvernement algérien, loin d’être apaisé, il redouble de ressentiment à l’égard de la France. M. Macron est bien le seul qui ignore que les repentances à répétition suscitent le mépris et un surcroît de haine de la partie adverse. A moins que, plus malin qu’on pense, il ne le sache que trop bien.

    Rwanda

    Avec le Rwanda, le président a procédé de la même manière : il a installé une commission d’historiens ou prétendus tels, confiée à Vincent Duclert qui a remis, le 26 mars 2021, un rapport sur le rôle de la France dans le génocide des Tutsis au Rwanda en avril-mai 1994. Sans aller jusqu’à accuser l’armée française de complicité de génocide, du moins par écrit, ce rapport pointe des “responsabilités accablantes” pour la France. Quelles responsabilités ? Quand le Rwanda a été attaqué en 1990 par une milice sans légitimité venue de l’étranger, la France, par sa coopération militaire avec le gouvernement en place, ni meilleur ni pire que les autres en Afrique, quoi qu’on ait dit, a permis à celui-ci de se défendre. La France avait dès les années soixante-dix formé les forces armées rwandaises, notamment la gendarmerie, dans le cadre d’une coopération militaire normale. Nous ne leur avons pas appris le maniement de la machette, principal instrument du massacre. Cette coopération a cessé avec les accords d’Arusha (août 1993), qui devaient mettre fin à toute aide étrangère, accord respecté par la France et le gouvernement en place mais violé ouvertement par les envahisseurs et leurs parrains, principalement anglo-saxons.  Il s’en est suivi des massacres croisés entre les deux ethnies, tutsi et hutu, qui ont fait 5 millions de victimes dans lesquels Paul Kagame, le chef des envahisseurs, grand ami de Macron, porte une responsabilité accablante.  Cette responsabilité a été mise en valeur par des journalistes respectés et indépendants comme Pierre Péan et, plus récemment la canadienne Judy Rever, ou des universitaires comme le belge Filip Reyntjens ou le franco-camerounais Charles Onana, qui n’y avaient aucun intérêt, alors que les experts de l’autre bord ont souvent un lien avec le régime de Kagame. Il y a eu, entre 1994 et 1999, si l’on en croit des rapports de l’ONU peu divulgués entre cinq et dix fois plus de morts hutu que tutsi mais l’influence  des alliés de Kagame chef des envahisseurs tutsi et  président du Rwanda à partir de  1994   a permis que l’opinion internationale ne soit sensible qu’au massacre des tutsi . En aucun cas l’armée française engagée pour s’interposer entre juillet et août 1994 n’a, contrairement à ce qu’allègue Kagame, participé à un quelconque génocide ; elle a au contraire sauvé des centaines de milliers de vies au cours d’une mission pacifique qui avait l’aval du Conseil de sécurité.  Or Macron , entièrement acquis à la thèse des Anglo-saxons qui a déjà multiplié les faveurs pour le régime de Kagame, toujours en place 27 ans après, projette un nouveau voyage au Rwanda où il faut s’attendre à une nouvelle couche de repentance pour des griefs inexistants.

    Rappelons que l’égyptien Boutros-Ghali, qui était alors secrétaire général des Nations unies et donc bien placé pour savoir ce qui se passait, avait dit que la responsabilité de la tragédie rwandaise revenait entièrement aux Etats-Unis – qui ne s’en sont, eux, jamais repentis. En fait, notre pays fut le seul à tenter de faire quelque chose pour arrêter les massacres.  La France est, on le sait, le seul membre du conseil de sécurité à pratiquer la repentance !

    Le résultat de ces excuses à répétition : non point l’apaisement, mais la haine, l’humiliation de la France et de l‘armée française (qu’aucun président depuis 2007  n’a défendue), le ravivage des plaies, la diffusion de mensonges et de points de vue unilatéraux.

    Pourquoi, mais pourquoi ?

    On pourrait mettre cet acharnement  de Macron à salir son pays sur le compte du souci électoral : une partie de l’électorat d’origine algérienne pourrait être conduite à  revoter Macron par le gouvernement d’Alger, souvent prescripteur. Mais était-ce bien nécessaire ? Et si cela vaut pour l’Algérie, pourquoi le Rwanda, dont les Français ne savent rien et dont le gouvernement ne pèse nullement dans la politique française ? Et d’ailleurs, quelle famille de militaires votera encore pour un président qui ne cesse d’humilier l’armée française ?

    On pourrait dire aussi que le président n’est pas très intelligent. Accepter une thèse unilatérale, celle des partisans de Kagame, malgré les nombreux démentis opposés à cette thèse, sans jamais s’interroger sur sa véracité, est le signe d’un aveuglement qui confine à la bêtise.

    Un aveuglement qui n’a d’explication que l’idéologie : imprégné à Sciences Po (version Richard Descoings) par l’idéologie décoloniale venue des campus américains, Macron est sincèrement convaincu que la colonisation ne fut qu’une série de crimes, alors que la plupart des anciennes populations coloniales, hors d’Algérie, ne le pensent pas. Lors de sa dernière sortie antifrançaise en Côte d’Ivoire, Benalla lui-même rappela les bienfaits de la colonisation au Maroc. Mais, mois après mois, Macron s ‘obstine.

    Comme il ne faut rien exclure, l’inintelligence de cette posture semble avoir un côté pathologique : comme si le jeune et fringant président se voulait l’interprète d’un masochisme national. “Nous devons déconstruire notre propre histoire” a-t-il avoué à la chaîne américaine CBS. Rien que ça ! Déconstruire, en français, c’est démolir.

    Mais dans cette obstination où il a tout à perdre sur  le plan électoral, comment ne pas se demander s’il ne serait pas investi d’un  agenda d‘abaissement systématique de la France, lequel revêt  d’autres aspects comme le démantèlement de nos industries stratégiques ?  Un agenda dicté  par ceux  qui pensent que la mondialisation ne pourra atteindre pleinement ses objectifs que par une disparition du sentiment national, spécialement chez « la grande nation », plus que d’autres à même , par son histoire singulière,  de résister à ce processus. « La France, nous la punirons » disait Condoleezza Rice après le refus de Chirac de participer à la désastreuse guerre d’Irak. Apparemment la punition continue.

    Roland Hureaux, essayiste et haut fonctionnaire

    Source : https://www.ndf.fr/poing-de-vue/

  • Dictature des minorités ou soumission de la majorité ?, par Hil­de­garde.

    Des voix s’élèvent de plus en plus pour dénon­cer la Can­cel culture venue des Etats-Unis en boo­me­rang de la décons­truc­tion prô­née par des phi­lo­sophes et socio­logues bien fran­çais au XXe siècle (French théo­rie).

    Ces mêmes voix dénoncent, à juste titre, une dic­ta­ture des mino­ri­tés : racia­lisme, LGBTXYZ, isla­mo-gau­chisme, fémi­nisme à géo­mé­trie variable… Les stig­ma­ti­sa­tions offrent un panel infi­ni de vic­times dès lors que l’individu est roi.

    Mais pour­quoi les élites poli­tiques, média­tiques, cultu­relles sont elles les cour­roies de trans­mis­sion de ces minorités ?

    Le bien de l’individu contre le bien de la Cité ! Tout au long de l’Histoire ce débat ani­ma les phi­lo­sophes. Aris­tote s’en sai­sit quatre siècles avant notre ère jusqu’à

    St Tho­mas d’Aquin pour faire accep­ter de sacri­fier un peu de sa liber­té au ser­vice du Bien com­mun. Puis les modernes s’en sai­sirent à rebours pour redon­ner valeur aux droits de l’Homme. L’interprétation des Droits de l’Homme fluc­tue lar­ge­ment au XXe siècle : les Etats pro­tec­teurs de la Cité deviennent poten­tiel­le­ment les empê­cheurs de tour­ner en rond de citoyens oppri­més* En France, les lois sont modi­fiées sans cesse au pro­fit des dési­rs par­ti­cu­liers sans limites selon l’avancée des décou­vertes scientifiques.

    Mais para­doxa­le­ment, la reven­di­ca­tion de pou­voir exer­cer sa liber­té indi­vi­duelle sans contraintes, devient l’occasion pour tous les frus­trés de l’Histoire, en se vic­ti­mi­sant, d’agresser ceux qui se tiennent ingé­nu­ment dans une norme admise par la civi­li­sa­tion mil­lé­naire, en exer­çant sur eux un har­cè­le­ment et une répres­sion culpa­bi­li­sante sans précédents.

    Il res­sort de cette appli­ca­tion de la pen­sée « fran­çaise » décons­truc­ti­viste (Fou­cault, Bour­dieu, Déri­da), ayant retra­ver­sé l’Atlantique pour fondre sur une Europe en pleine crise d’anomie et de perte de sens, l’instauration  vio­lente et sau­vage de nou­velles normes s’appuyant sur l’absence de réflexes cri­tiques jugés sacri­lèges par le nou­veau cler­gé de « la cage aux phobes » (cf. Phi­lippe Muray)

    Ces élites tou­jours à l’affût de la meilleure bien-pen­sance du moment sont prêtes à lais­ser dépe­cer le peuple, déci­dé­ment trop rustre, par les groupes com­mu­nau­taires les plus extra­va­gants, les plus incultes aus­si à la mesure de l’inculture domi­nante en Occi­dent et à mettre le genou à terre à la moindre occasion.

    Il s’agit de consta­ter les frac­tures pro­fondes qu’occasionnent ces sin­gu­lières inno­va­tions dans notre socié­té et l’abîme qui se creuse entre les « élites » et la majo­ri­té des Fran­çais. Gilets jaunes, son­dages, désaf­fec­tion des urnes,  ouvrages d’essayistes ou de socio­logues, expriment suf­fi­sam­ment ce constat pour qu’il soit rece­vable… Jusqu’à il y a peu, nous pou­vions consi­dé­rer que la Can­cel culture était le fait de modes, de bobos, d’intellos per­chés, bref d’un pari­sia­nisme regar­dé avec com­mi­sé­ra­tion et indul­gence rési­gnée, ceci géné­rant peu de réactions.

    Désor­mais, l’affaire est plus grave car ces théo­ries ont infil­tré tous les étages de la socié­té : d’abord l’école (mal­gré les dénis offus­qués de ministres tels Madame Najat Val­laud-Bel­ka­cem) avec le tra­vail sur les pro­grammes sco­laires ou l’intervention d’associations mili­tantes ; ensuite le monde cultu­rel à tra­vers notam­ment  les dis­tri­bu­teurs de sub­ven­tions ou d’avances sur recettes (votre film ne sera jamais choi­si si vous ne cochez pas les bonnes cases) ; puis le monde poli­ti­co-média­tique qui, lui, suit ceux qui hurlent le plus fort notam­ment dans la rue. Il est frap­pant de voir, par exemple, com­bien quelques hur­lu­ber­lus assis par terre ou quelques femmes les seins nus, voire quelques trans en bas résille, attirent l’ensemble des camé­ras mains­tream alors que trente mille pèle­rins sur les routes de Chartres ne font pas une ligne dans cette même presse…

    Mais accu­ser autrui ne suf­fit pas à expli­quer l’emprise des mino­ri­tés. Déjà, dans « la grande peur des bien-pen­sants » en 1931, Ber­na­nos dénon­çait l’apathie des catho­liques…  Il est savou­reux de voir aujourd’hui des essayistes, sou­vent non catho­liques comme Zem­mour ou Onfray, remar­quer que la dic­ta­ture des mino­ri­tés fait son lit sur la chute du chris­tia­nisme pour le déplo­rer, tan­dis que bien des  élites catho­liques conti­nuent à vou­loir à tout prix suivre le vent  n’ayant en cela qu’une ambi­tion de feuille morte pour reprendre la for­mule du grand  Gus­tave Thi­bon. Le réveil de la France ne se fera que lorsque les Fran­çais se sou­vien­dront d’où ils viennent et qu’ils retrou­ve­ront leur cou­rage. Il est plus dif­fi­cile de ne pas être dans le vent pour reprendre la métaphore.

    Dans une réunion quelle qu’elle soit, le mon­dain ou le mili­tant exprime ce que tout le monde doit pen­ser. Vous avez alors ceux qui approuvent béats se sachant dans le camp du bien, ceux qui approuvent du bout des lèvres n’osant sor­tir de ce camp , autant en emporte le vent, et par­fois, pas tou­jours, vous avez un enfant  qui crie « le roi est nu » ! On attend que l’adulte ait la luci­di­té de l’enfant mais donc aus­si du cou­rage.  Oh, il ne s’agit pas de ris­quer sa vie ou même l’opprobre car sou­vent (que celui qui n’a pas vécu cette expé­rience lève la main) vous n’êtes plus tout seul : Vous avez en quelque sorte fait souf­fler un autre vent, celui de la liber­té et quelques-uns, par­fois une majo­ri­té, se ral­lie à votre position.

    La chape de plomb est en train de fondre ; Espé­rons que la majo­ri­té des Fran­çais riche de l’héritage de notre civi­li­sa­tion et en par­ti­cu­lier de l’héritage de la fille ainée de l’Eglise se sou­vien­dra enfin des pro­messes de son baptême …

    * Voir à ce sujet le livre de Gre­gor Pup­pinck, les Droits de l’Homme dénaturé

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

  • Action française Compiègne : hommage à Louis XVI. Jeunes comme anciens, nous tenons à nos traditions et à notre identité

    Nous sommes réunis aujourd’hui à Compiègne, nous royalistes, ou encore nous, Français attachés à notre pays et sensible à son histoire, pour rendre hommage au roi Louis XVI. Louis XVI est mort martyr de la révolution dite française le 21 janvier 1793. Assassiné parce que roi, parce que représentant un rempart face aux folies de quelques émeutiers parisiens révolutionnaires.

    Louis XVI fut pourtant un roi proche du peuple et réformateur : il abolit le servage, accorda un état civil aux protestants, abolit les tortures de la question. Les révolutionnaires n’ont pas tué Louis XVI pour le punir particulièrement lui, ils l’ont fait car ils avaient en haine ce qu’il représentait : à savoir la royauté et le catholicisme. Si le roi représente et signifie, comme un symbole, il n’en reste pas là, il incarne des principes. Le comte de Chambord, petit fils de Charles X exprimait très bien cela, il disait : « ma personne n’est rien, mon principe est tout. » C’est ainsi qu’on ne peut rendre pleinement hommage à Louis XVI si on ne rend pas hommage, si on ne rappelle pas ce qu’est et ce qu’a apporté la monarchie à notre pays.
    « Il y a dans le processus démocratique et dans son fonctionnement un absent. Dans la politique française, cet absent est la figure du Roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français n'a pas voulu la mort. La Terreur a creusé un vide émotionnel, imaginaire, collectif : le Roi n'est plus là ! On a essayé ensuite de réinvestir ce vide, d'y placer d'autres figures : ce sont les moments napoléonien et gaulliste, notamment. Le reste du temps, la démocratie française ne remplit pas l'espace. On le voit bien avec l'interrogation permanente sur la figure présidentielle, qui vaut depuis le départ du général de Gaulle. Après lui, la normalisation de la figure présidentielle a réinstallé un siège vide au coeur de la vie politique. Pourtant, ce qu'on attend du président de la République, c'est qu'il occupe cette fonction. Tout s'est construit sur ce malentendu. » Ces mots ne sont pas les miens, mais ceux d’Emmanuel Macron alors ministre de l’Economie.
    Le roi était le père de la nation, il faisait l’unité entre tous les Français comme un père de famille la réalise entre ses enfants, sans distinction d’amour entre chacun. Faisons le parallèle avec nos jours, le président, chef suprême de la nation est élu, par une faction contre une autre, ce ferment de division, apporté au plus haut sommet de l’Etat est nocif ! Comment le président pourrait-il s’intéresser au bien commun, s’il est issu d’une faction? On nous dit que c’est le jeu de la démocratie, que les vaincus s’inclinent. Mais dans les faits que se passe-t-il ? Personne ne se résigne jamais, c’est la guerre civile larvée et permanente ! Les Français sont bien incapables de se mettre d’accord entre eux, et le roi constitue cette figure d’arbitre, et c’est parce qu’il n’est pas issu d’une faction il peut pleinement assumer ce rôle.
    Avant d’être guillotiné, Louis XVI clama ceci : « Je souhaite que mon sang puisse cimenter le bonheur des Français. » Puisse votre voeux Louis être exaucé, et nous le croyons, il le sera si nous renouons avec la monarchie, dans la continuité des 40 rois qui ont fait la France !
    Maurras, au début du siècle dernier, nous a légué une synthèse de la monarchie et de ses vertus celle que nous souhaitons !
    La monarchie sera héréditaire ! Le roi lègue la couronne à son fils, cela permet des successions paisibles. Mais surtout ! Comme un homme veut naturellement le bien de son fils, il est forcé de bien gouverner car son fils hériterait des malheurs qu’il aurait laissé.
    La monarchie sera populaire et antiparlementaire ! Le parlementarisme divise, et représente très mal la société. Nous préférons les corps sociaux, les corporations, les corps intermédiaires, les communes, les provinces, les familles à une assemblée qui résulte d’une fraction des votants, pure abstraction mathématique.
    La monarchie sera fédérative et décentralisée ! Nous souhaitons que l’Etat s’occupe essentiellement du domaine régalien. Comment ne pas voir aujourd’hui la faillite de l’Etat dans tous ces domaines, frontières, justice, sécurité, monnaie, infrastructure, quand l’Etat prétend décider de nous confiner à 18h, à son bon gré, pour pallier à ses propres faillites (masque, lits d’hôpitaux, tests etc) et de nous coller un masque sur le museau sous peine du amende, dehors !
    Enfin la monarchie sera traditionnelle ! Elle est catholique depuis toujours, et a ses lois propres. Elle a son héritier désigné.
    Comment parler de royauté sans parler de transcendance ! Comment ne pas voir dans la royauté, qu’il y a quelque chose de sacré, quelque chose qui dépasse notre pure humanité. La royauté française, et ce qu’incarnait bien Louis XVI, était une alliance entre le Trône et l’Autel. Comment ne pas voir que le sacre donnait au roi, une légitimité qui lui venait du Ciel, et qui l’obligeait gravement dans ses responsabilités ? Et Louis XVI, ce roi trop bon, était plus que dévoué au Ciel, je vous propose d’entendre quelques extraits de son testament :
    Au nom de la très sainte Trinité, du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Aujourd'hui vingt-cinquième jour de décembre mil sept cent quatre-vingt-douze, moi Louis, seizième du nom, roi de France, étant de puis quatre mois renfermé avec ma famille dans la Tour du Temple, à Paris, par ceux qui étaient mes sujets, et privé de toute communication quelconque, même depuis le onze du courant, avec ma famille, de plus impliqué dans un procès dont il est impossible de prévoir l'issue, à cause des passions des hommes, et dont on ne trouve aucun prétexte ni moyens dans aucune loi existante ; n'ayant que Dieu pour témoin de mes pensées et auquel je puisse m'adresser, je déclare ici, en sa présence, mes dernières volontés et sentiments. »

    Je pardonne de tout mon cœur à ceux qui se sont faits mes ennemis sans que je leur en aie donné aucun sujet ; et je prie Dieu de leur pardonner, de même qu'à ceux qui par un faux zèle ou par un zèle mal entendu, m'ont fait beaucoup de mal. Je recommande à Dieu ma femme et mes enfants, ma sœur, mes tantes, mes frères, et tous ceux qui me sont attachés par les liens du sang ou par quelque autre manière que ce puisse être ; je prie Dieu particulièrement de jeter des yeux de miséricorde sur ma femme, mes enfants et ma sœur, qui souffrent depuis longtemps avec moi ; de les soutenir par sa grâce, s'ils viennent à me perdre, et tant qu'ils resteront dans ce monde périssable. »

    Je recommande à mon fils, s'il avait le malheur de devenir roi, de songer qu'il se doit tout entier au bonheur de ses concitoyens ; qu'il doit oublier toute haine tout ressentiment, et nommément ce qui à rapport aux malheurs et aux chagrins que j'éprouve ; qu'il ne peut faire le bonheur des peuples qu'en régnant suivant des lois : mais en même temps qu'un roi ne peut les faire respecter, et faire respecter, et faire le bien qui est dans son cœur, qu'autant qu'il a l'autorité nécessaire; et qu'autrement étant lié dans ses opérations et n'inspirant point de respect, il est plus nuisible qu'utile." »
    Je pardonne encore très volontiers à ceux qui me gardent, les mauvais traitements et les gênes dont ils ont cru devoir user envers moi. J'ai trouvé quelques âmes sensibles et compatissantes : que celles-là jouissent dans leur cœur, de la tranquillité que doit leur donner leur façon de penser !.... Je finis en déclarant devant Dieu, et prêt à paraître devant lui, que je ne me reproche aucun des crimes qui sont avancés contre moi. »
    « Dieu veuille que ce sang ne retombe pas sur la France. » Puisse votre voeux Louis être exaucé !
    Il y a 228 ans, vous avez été décapité, pour laisser place à la république. Mais nous 228 plus tard, nous sommes ici réunis parce que nous croyons fermement que la monarchie sauvera la France. Cette même France, qui est aujourd’hui éclipsée et salie par la république. Cette même République, qui tue le pays. Que ce soit l’économie, la vie sociale, notre identité, nos traditions, la République brade tout, et laisse entrer des populations qui méprisent la France quand celles-ci ne nous égorgent pas dans les églises, ou qu’elles ne nous décapitent pas !
    Vous, Louis XVI, donnez-nous la force de croire à un retour à la monarchie, Donnez le courage, de continuer ce combat. Nous nous efforçons de suivre vos pas, de vous rendre fier. Nous nous efforçons de ne pas enterrer l’Histoire, et de vous garder dans nos mémoires.
    Nous ne sommes pas nés royaliste, nous le sommes devenus. Alors laissez-nous crier haut et fort :
    Le roi est mort, VIVE LE ROI !
  • Affaire Sud Radio : ”Rokhaya Diallo piégée par la violence du nouveau discours racial”, par Guylain Chevrier.

    Rokhaya Diallo
    © PHILIPPE HUGUEN / AFP 

    Guylain Chevrier, docteur en histoire, formateur, enseignant, consultant et ancien membre de la mission laïcité du Haut conseil à l'intégration, revient sur les propos racistes dont a été victime Rokhaya Diallo et sur sa responsabilité concernant la racialisation du débat public.

    3.jpgLa journaliste Rokhaya Diallo a annoncé, ce lundi 21 décembre 2020, sur Sud Radio avoir porté plainte contre une auditrice de la station Sud Radio qui avait livré à son encontre un propos injurieux à caractère racial lors d’une des émissions d’octobre dans la série Les Vraies Voix. Les chroniqueurs Philippe Rossi, Philippe Bilger, Jean Doridot et Céline Pina débattaient autour du sujet : « Diallo, Bruckner, les indigénistes ont-ils une part de responsabilité dans les attentats ? » Intervenait alors une auditrice : « Madame Diallo se plaint de la France, elle se plaint des blancs, mais si aujourd’hui elle est journaliste […] elle le doit à l’ouverture d’esprit de notre éducation et de notre pays (…) Parce que Mme Diallo, elle n’aurait pas bénéficié de tout ce que donne la France, je crois qu’il y a de fortes chances qu’elle serait en Afrique, avec 30 kg de plus, 15 gosses en train de piler le mil par terre et d’attendre que son mari lui donne son tour entre les 4 autres épouses. »

    Le poison du retour de la race dans le débat public

    Par-delà la tournure du propos moralement condamnable, et condamné de toutes parts, quelles qu’en soient les suites juridiques, on relèvera particulièrement l’aspect racial de celui-ci. L’auditrice dit réagir au fait que Mme Diallo se plaigne « des blancs ». Aussi, cet aspect racial d’une violence symboliquement certaine, viendrait-il de la seule imagination de l’auditrice, voire d’un racisme français, ou d’un climat sur ce sujet qui met le feu aux poudres ?

    Madame Rokhaya Diallo est l’une des chefs de file d’un retour de la « race » dans le débat public, que l’on croyait rayé de l’histoire depuis la victoire sur le nazisme. Elle participe d’un courant qui entend rabattre sur la question des discriminations toute analyse, traitant comme des races les couleurs de la peau, la différence des sexes, l’orientation sexuelle, l’origine géographique, telle ou telle filiation culturelle… C’est le propre d’un discours indigéniste, racialiste ou décolonial, qui s’est imposé à la faveur de médias complaisants et mêmes d’institutions officielles, mettant en accusation la France comme raciste. On justifie cette accusation par le fait qu’être « blanc » serait être l’héritier d’une domination coloniale qui perdurerait dans les rapports sociaux par des privilèges, ayant pour pendant la discrimination des autres. Les blancs seraient ainsi consciemment ou inconsciemment des racistes. Certains opposent ainsi aujourd’hui à la « lutte des classes » ce qui serait le seul vrai combat, celui de la lutte des « races ».

    L’affirmation d’un privilège blanc est sans fondement et dangereux

    Tout d’abord, s’il y a des discriminations qu’il faut combattre sans concession, cette généralisation d’un « privilège blanc » n’a aucun fondement, à moins de tirer un trait sur l’existence de classes sociales qui reste la réalité structurante des inégalités dans les sociétés développées, dont la France. Rappelons ici que selon l’Observatoire des inégalités, à classe sociale égale les enfants d’immigrés et de non-immigrés réussissent aussi bien. Ceci indiquant combien ce sont les classes sociales qui demeurent le critère essentiel en matière d’inégalités.

    On peut être discriminé pour sa condition sociale, son sexe, le fait d’être en surpoids, d’être handicapé, d’être âgé, d’être syndicaliste, et qu’on soit « blanc » ou pas, il n’y a là à attendre aucun privilège. Les personnes blanches, qui constituent une large partie des personnes sous le seuil de pauvreté, il suffit d’observer celles qui s’inscrivent et se rendent aux restaurants du cœur pour s’en apercevoir, de quel héritage colonial relèvent-elles, et de quels privilèges ? Bien des migrants venus d’Europe de l’est, qui sont en situation précaire, ont la peau blanche, cela en fait-il des privilégiés ? Et ces ouvriers désignés avant tout ainsi comme « blancs », qui subissent les licenciements régulièrement pour raison économique, comme les autres, en chômage de longue durée, des centaines de milliers vivant dans des régions industriellement sinistrées, des privilégiés ? On voit déjà combien cette assignation de chacun à une « race » est un fantasme, un tour de passe-passe pour alimenter un fonds de commerce idéologique, une hystérie identitaire, l’ambition d’un pouvoir politique qui a son projet : En montant les uns contre les autres, on cherche à instaurer des fractures poussant au renoncement à l’égalité républicaine, pour justifier le passage au multiculturalisme et à la discrimination positive !

    L’essentialisation du blanc, un renversement de l’antiracisme en son contraire

    Cette assignation des « blancs » à un statut de privilège est une essentialisation raciale, jetant à la vindicte des autres un groupe humain en raison de sa couleur de peau. Et donc, susceptible de l’exposer à une hostilité violente. N’est-ce pas là le renversement de l’accusation de racisme au regard de ce l’on prétend combattre ?

    Pour l’ONU, l’expression « discrimination raciale » « vise toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race, la couleur, l’ascendance, ou l’origine nationale ou ethnique, qui a pour but ou pour effet de détruire ou de compromettre la reconnaissance, la jouissance ou l’exercice, dans des conditions d’égalité des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social et culturel, ou dans tout autre domaine de la vie publique… » Autrement dit, en essentialisant les blancs comme privilégiés, on exclut ceux qui dans la réalité ne le sont pas d’une prise en compte des inégalités qui les frappent, on les y livre ainsi par un traitement racial de la question sociale.

    Cette mise en procès générale pour racisme des « blancs » tend d’ailleurs à devenir un véritable terrorisme intellectuel, car l’accusation de racisme est sans doute moralement l’une des plus dégradantes. C’est aussi un instrument d’intimidation puissant, régulièrement brandi pour faire taire des voix contraires.

    Le racialisme, une voie sans issue, incendiaire et fratricide

    N’est-ce pas là ce qui enflamme aujourd’hui les esprits, cette outrance sur l’argument de « la race » qui pousse à ne se voir que chacun dans un camp, son présumé ghetto selon telle ou telle différence, au lieu de se penser en citoyens, travaillant à faire évoluer une société qui nous est commune vers plus d’égalité pour tous ? De plus, cette vision raciale tous azimuts divise les forces sociales dont l’unité est pourtant la seule à pouvoir, comme elle l’a fait par le passé, créer un rapport de force permettant de combattre les inégalités. Elle n’a rien de la gauche dont elle se réclame cette idéologie, elle est au contraire réactionnaire, en faisant resurgir du passé innommable le concept de « race » et le culte des tribus.

    La communauté scientifique s’accorde sur le fait qu’il n’y a qu’une race humaine, tous les êtres humains appartenant à une seule et même espèce, tous naissant égaux car avec les mêmes propriétés. Les sociétés ensuite leurs donnent des destins différents susceptibles d’évolutions. On voit ce que représente de recul le racialisme, au regard de cette vision universelle de l’Homme, au sens de ses droits naturels, affirmés par la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, repris dans les principes et valeurs fondamentaux de la République. C’est une voie sans issue, incendiaire et fratricide.

    Source : https://www.marianne.net/

  • Rendre compte de la guerre, entre distance et engagement, par Christophe Boutin.

    Entre genre littéraire et arme politique, le journalisme de guerre, au XXe siècle, consiste à prendre parti pour un camp ou à philosopher sur l'idée même de conflit.

    Les correspondants de guerre doivent à la fois en faire comprendre la stratégie ou les implications géopolitiques et faire sentir ce qu’elle peut avoir de tragique. Dans sa riche introduction à un volume qui leur est consacré, Emmanuel Mattiato évoque la naissance de telles informations, remontant aux campagnes contre le Turc au XVIIe siècle, pour noter qu’au cours des XIXe et surtout XXe siècles « la presse se politise véritablement en se divisant pour la première fois entre droite et gauche, et, grâce aux progrès techniques, fixe dans leur quasi immédiateté (leur actualité) le récit de guerres d’un nouveau genre ».

    Entre sous-genre littéraire et arme politique, de la guerre de Sécession à celle de 70, naît un « mythe moderne » – l’auteur renvoie au personnage de Gédéon Spillet dans L’Île mystérieuse de Jules Verne. Si la guerre est une chose trop sérieuse pour être confiée aux militaires, son compte rendu l’est aussi, même quand le pays n’y est pas directement engagé, ne serait-ce que parce qu’il participe au concert des nations. Armées ou gouvernements font des choix d’accréditation permettant à certains d’aller en première ligne et reléguant les autres à l’arrière, et le premier conflit mondial redéfinira la place d’une propagande essentielle pour maintenir le moral des troupes comme celui de l’arrière dans une même union sacrée. Mais tandis que monte la tension entre démocraties et totalitarismes, la presse politique manifeste sa vitalité dans l’entre-deux-guerres – période que traite cet ouvrage – avec deux opérations militaires relevant d’un colonialisme tardif, l’Espagne dans le Rif et l’Italie en Éthiopie, puis la guerre d’Espagne.

    Après la défaite d’Anoual (1921), l’Espagne reprend la lutte au Maroc, engageant ses troupes indigènes, les regulares, et sa Légion. Teresa de Escoriaza (Christine Lavail) se voit alors confier un reportage sur la situation des hôpitaux de campagne. Elle ira plus loin, se tenant au plus près de toutes les victimes, militaires espagnols comme victimes civiles des exactions des légionnaires, mettant en exergue des cas particuliers pour mieux toucher son public. Ernesto Gimenez Caballero (Manuelle Peloille) rend compte de cette même guerre du Rif autour d’un questionnement sur ce que devrait devenir cette Espagne qui n’a pas su garder ses colonies américaines et qui s’est tenue à l’écart du premier conflit mondial, plongée ici dans une guerre moderne déstabilisante – par la violence de la défaite initiale mais aussi en accentuant l’écart entre troupes métropolitaines et troupes coloniales. Pas question pour lui de grandes figures de héros : mécanisation, massification, ennui et abrutissement seraient la règle pour des soldats présents sans véritablement savoir pourquoi. Manuel Azana enfin (Elvire Diaz) est ici présent pour ses écrits portant sur la Grande Guerre d’une part, sur la guerre civile espagnole d’autre part, proposant une analyse globale de ces conflits qui va au-delà du simple reportage.

    Correspondant ou historien ?

    C’est au sujet de la guerre d’Éthiopie que reviennent les vrais correspondants de guerre, américains (Mauro Canali) ou plus globalement étrangers (Matteo Scianna). On suit des personnalités comme Evelyn Waugh, qui tira de cette expérience son admirable roman Scoop, chef-d’œuvre d’humour (on se souviendra de l’équipement surréaliste avec lequel part le héros), comme Georges L. Steer, représentant du Times qui sera quelques années plus tard, lors du Second conflit mondial, officier des services de propagande dans cette même Éthiopie puis en Birmanie, ou comme le général John M. C. Fuller, sympathisant d’Oswald Mosley venu pour le Daily Mail… Indro Montanelli (Sara Izzo) est lui un soldat du 20e bataillon érythréen qui livre des textes sur la vie quotidienne de cette unité qui n’a jamais été vraiment engagée, sorte de carnet de voyage dans des fortins perdus rappelant plus Le Désert des Tartares de Dino Buzatti que les Orages d’acier de Jünger.

    Olivier Dard fait le lien entre le conflit éthiopien et la Guerre d’Espagne en suivant ces nationalistes français qu’il connaît mieux que personne. Dans l’affaire d’Éthiopie, Gringoire, où officie Henri Béraud, mais aussi L’Action française, avec Jacques Bainville et Henri Massis, s’opposent aux sanctions contre l’Italie et dénoncent la main de l’Angleterre. Mais ils ne se rendent pas sur place, contrairement à Jérôme Tharaud, qui publie Le passant d’Éthiopie, ouvrage dans lequel il s’attache à mettre en perspective l’histoire du pays. Reste que s’il critique le Négus et son armée, c’est la guerre vue de très loin. Quelques années plus tard, avec Cruelle Espagne, le même Tharaud sera cette fois plus impliqué : après avoir évoqué ses rencontres passées avec les dirigeants espagnols pré-républicains, il dénonce l’« immonde tuerie qu’est une guerre civile », mettant en perspective la « terreur rouge » dans le Nord et la répression qui a suivi la prise de Badajoz par les troupes de Franco. Pierre Héricourt, venu de L’Action française, s’engage lui clairement derrière Franco, après avoir rencontré au Maroc des Espagnols fuyant les exactions du camp républicain, et son Pourquoi Franco vaincra sera bientôt complété par Pourquoi Franco a vaincu, puisque, finalement, han pasado… Autre intervenant plus militant ici que simplement correspondant de guerre, Jean Hérold-Paquis, qui sert dans la Bandera Jeanne d’Arc avant de parler au micro de Radio Saragosse. Reste bien sûr à évoquer un Robert Brasillach qui va publier, avec Henri Massis, un ouvrage glorifiant la résistance des Cadets de l’Alcazar, puis avec Maurice Bardèche une Histoire de la guerre d’Espagne. Correspondant de guerre ou, déjà, historien d’un conflit ? L’Espagne présente dans Notre avant-guerre est bien autre chose en tout cas que le simple lieu d’affrontements guerriers.

    Dans le camp opposé, les études présentées concernent essentiellement les « reportrices » (Anne Mathieu) travaillant pour Le Populaire, journal de la SFIO, ou la presse communiste, L’Humanité ou l’hebdomadaire Regards qui dénoncent les exactions des nationalistes et les menaces fascistes en Europe. D’autres femmes écrivains (Alison Palio) vont se mettre en scène en tant que « femmes écrivant » au cœur de cette tourmente avec toujours un accent particulier sur les souffrances des populations civiles espagnoles du côté républicain.

    La distance de l’écrivain

    Reste un cas particulier, celui d’Antoine de Saint-Exupéry (Lola Jordan) rendant compte de ce qu’il voit en Espagne dans Paris-Soir et dans L’Intransigeant. Il part souvent de circonstances particulières – l’arrestation d’un supposé républicain, des bombardements lointains – pour faire saisir au lecteur l’angoisse que génère une guerre civile comme le caractère irréel des combats. Saint-Exupéry renvoie ainsi à des questions sur ce que devient l’homme dans la guerre – rendant compte d’une certaine symétrie des attentes des soldats des deux camps –, tenant « plus de l’écrivain-voyageur que du correspondant de guerre ». Un dernier texte sur Ersnt Jünger (Laila Youssef Sandoval) traite lui aussi compte de cette distance conservée par rapport à la guerre par un tout autre écrivain.

    Le lecteur constatera la diversité de ces comptes rendus qui trouvent tous un débouché journalistique mais qui, en dehors des divergences politiques, montrent surtout combien l’approche du conflit peut différer. Pour beaucoup de correspondants envoyés par une presse de plus en plus politisée dans cette période, la neutralité ou l’objectivité ne sont pas de mise : il s’agit de prendre parti, non pas contre la guerre en soi, mais uniquement contre la manière dont le camp d’en face la mène. De manière symbolique, ensuite, on notera la part belle laissée à l’émotion, avec une personnalisation des situations très éloignée du seul déroulement des opérations militaires. Mais pour d’autres de ces correspondants, la guerre est vite prétexte à une réflexion sur les grandeurs et servitudes de l’état militaire, sur la situation de leur pays, quand ce n’est pas sur la nature de l’homme. En suivant ces récits croisés, on comprend qu’il faille souvent attendre les historiens futurs pour comprendre ce qui s’est vraiment passé…

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     Emmanuel Mattiato, Manuelle Peloille et Olivier Dard,  Correspondants de guerre 1918-1939. Maroc-Éthiopie-Espagne, Presses Universitaires Savoie Mont Blanc 2020 ; 321 p. 25 €

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    Source : https://www.politiquemagazine.fr/

  • La guerre des monnaies, par Olivier Pichon.

    Yuan contre dollar : la monnaie, valeur d'échange, a conquis une dimension politique. L'extraterritorialité abusive du dollar va-t-elle aboutir à donner aux Chinois un outil légitime de contrôle interne et externe, au détriment des États-Unis ?

    5.jpgCette guerre a commencé dès le XXe siècle au lendemain de la Grande Guerre quand le jeune dollar des années 20 commençait à tailler des croupières à la vieille lady, la livre sterling que Churchill, alors chancelier de l’Échiquier, voulut rétablir dans son antique splendeur en la rendant convertible en or (convertibilité suspendue à cause de la guerre) : il ruina consciencieusement l’industrie britannique devenue trop chère mais fit les beaux jours de la City.

    Le temps du roi dollar

    La suprématie du dollar fut affermie à Bretton Woods, en 1944, lorsque la thèse américaine l’emporta au cours de cette fameuse conférence à laquelle assistait Keynes, qui recommandait une monnaie internationale, le bancor. La thèse adverse, émise par un certain White, voulut avec succès opposer le dollar à ce bancor. Il est vrai que les États-Unis représentaient l’offre de production et que le reste du monde, ravagé par la guerre, représentait la demande. Quoi de plus facile alors que de faire de la monnaie américaine la devise mondiale ? De surcroît convertible en or sur demande des états participants (l’URSS n’en faisait pas partie) à condition de dégager des excédents de leur commerce extérieur, lesquels, payés en dollars, pouvaient donc être convertibles en or (70 % du stock d’or monétaire mondial en 1945). Ce que fit le général de Gaulle, la prospérité revenue, avec les excédents du commerce extérieur, conseillé en cela par Jacques Rueff.

    « Notre monnaie, votre problème »

    L’émission inconsidérée de dollar (commerce extérieur, guerre du Vietnam, euro-dollars) conduisit à la rupture du lien avec l’or au cours de l’été 71. On sait que cette rupture entraîna la hausse de l’énergie et provoqua la fin de la période des Trente Glorieuses. Dès lors, la valeur des monnaies devint fonction de leur demande ou leur offre sur les marchés, on appela cela les changes flottants ou flexibles (si on était optimiste). Mais, si l’on sait assez bien que cette rupture fut une cause de la crise, on voit moins qu’elle ouvrait aussi la page redoutable de la financiarisation de l’économie mondiale et l’invention de produits dit dérivés dont le caractère spéculatif n’avait d’égal que leur dangerosité financière. Paradoxalement, c’est au moment où la monnaie ne vaut plus rien que se vérifient les intuitions de Marx et de Weber sur la monnaie comme bien en soi et objet de marché. Néanmoins le privilège de l’Amérique devenait exorbitant puisqu’il n’y avait plus l’obligation de l’assise métallique : « le dollar est notre monnaie et votre problème » pouvait dire John Connally, secrétaire au Trésor de Nixon (août 1971), dans ce qui restera une date majeure de l’histoire monétaire. Perturbée par les changements erratiques de parité (le système de Bretton Woods avait établi une parité fixe des monnaies), une délégation européenne était venue se plaindre auprès de John Connally, en vain. Il restait aussi un autre privilège, beaucoup moins connu, que nous avions évoqué dans Politique Magazine d’octobre 2019 : le privilège d’extraterritorialité que s’octroie l’oncle Sam. Tout utilisateur du dollar est soumis à la loi américaine mais plus précisément, c’est moins connu, au FCPA : Foreign Corrupt Practice Act[1]. Cette loi date de 1977, à la suite de l’affaire du Watergate et surtout l’affaire Lockheed. Sous couvert de lutte contre la corruption, elle va devenir une véritable machine de guerre ciblant principalement les grandes entreprises européennes. C’est ainsi que l’Amérique (General Electric) pourra s’emparer d’Alstom.

    Guerre économique USA-Chine

    La question d’une alternative à cet ordre dollarisé a été posée un temps par l’euro, qui s’est néanmoins avéré incapable de rivaliser ; il est douteux d’ailleurs que celui-ci ait été voulu comme tel, même si une partie de l’opinion le souhaitait comme instrument d’une Europe-Puissance, la vassalisation étant trop prononcée dans le personnel européen. L’euro est une monnaie d’échange intra-européenne, mais il ne sert pas assez à acheter du pétrole, du blé, du cacao ; des pays se sont essayé à commercer en euro, mais la matraque étatsunienne était là pour les en empêcher.

    La Chine n’entend pas se laisser dominer par l’Amérique et vise le premier rang mondial, mais les États-Unis disposent encore d’une arme redoutable, le dollar, avec son cortège de sanctions, taxes, droits de douanes, et interdictions, copiés par les Chinois. Il s’agit donc pour la Chine de tailler à son tour des croupières à son rival, tâche difficile puisque tout le monde veut encore du dollar, les banques surtout, et que l’Amérique peut interdire à toute entreprise qui utilise le dollar de commercer avec un pays déclaré ennemi (Corée du Nord, Iran). La Chine a donc tenté d’imposer le yuan comme monnaie d’échange international.

    Modalités de la guerre monétaire

    Mais qui veut des yuans ? Pour l’heure, assez peu de monde, en vérité. Le yuan ne représente que 4 % des transactions mondiales. Seule peut-être la Russie vend ses hydrocarbures et achète en yuan des produit manufacturés (accords de Shangaï). Mais cela ne pèse guère pour faire du yuan une devise. La dévaluation compétitive (déprécier sa monnaie sur les marchés) permet de stimuler les exportations et de préserver le marché national puisque les prix des marchandises importés enchérissent (Trump ayant intelligemment utilisé les droits de douane pour freiner ces très importantes importations de produits chinois). Mais la contrepartie de cette dépréciation pèse sur le prestige de la monnaie, son attractivité. Nous sommes là dans une guerre qui n’est pas sans rappeler la crise des années 30, dévaluations en chaîne et protectionnisme.

    Pour sortir de l’impasse, la Chine a donc choisi une autre solution : le yuan ne parvient pas à s’imposer comme devise, qu’à cela ne tienne, il sera numérique : l’e-yuan est né !

    Cyber monnaie pour une cyber guerre

    Il s’agit d’échapper à l’étau du dollar mais aussi à ses circuits, soit le produit et le moyen de sa circulation, en créant une monnaie numérique, comme le bitcoin et toutes les monnaies numériques libres qui échappent à cette tutelle. Mais – et la différence est énorme –, ces monnaies ne sont pas discrétionnaires, elles sont le produit du seul marché. La Chine reste une dictature et, si elle a fait ses preuves numériques dans la surveillance de ses citoyens, elle ne saurait renoncer à son monopole d’émission de l’e-yuan, dont elle est en train d’accélérer le programme d’émission. Celui-ci lui permettrait de surcroît de contrôler immédiatement toutes les transactions faites par les Chinois, plus de contrôle a posteriori, coûteux et laborieux. Celui qui s’avise de ne pas traverser dans les clous est déjà fiché par reconnaissance faciale, il le sera aussi pour toute transaction suspecte, un vrai bonheur pour les banquiers et les politiques. L’e-yuan DCEP (Digital Currency Electronic Payment) doit donc remplacer le yuan, sous sa forme physique. Les deux monnaies ont la même fonction. Elle est distribuée par les banques nationales à leurs clients, sous contrôle de la banque centrale chinoise. Les premiers tests se déroulent depuis ce mois d’avril dans des villes choisies par le gouvernement. L’e-yuan pourrait donc aider Pékin à renforcer sa position sur la scène internationale, notamment en Afrique où la Chine gagne du terrain et où des dirigeants et des gouvernements subissent de plus en plus des sanctions économiques (pas toujours infondées, il est vrai) de la part de Washington. Pour Linghao Bao, analyste chez Trivium China, la principale raison de création de l’e-yuan est « d’égaliser les règles du jeu », entendez avec les Américains. Les chances de réussite internes sont grandes pour cet e-yuan. Une application pourrait permettre le paiement avec les téléphones portables, qui joueraient une fois de plus le rôle de portefeuille.

    Il reste qu’on ne voit pas encore cet e-yuan assurer les paiements sur les marchés internationaux et être recherché pour les achats en Chine, mais la technologie va vite et l’histoire aussi. Le dollar a néanmoins encore de belles années devant lui et ne doutons pas que son pays saura prolonger le « In God We Trust » pour quelque temps encore.

     

    [1] .  Wikipedia : « Le Foreign Corrupt Practices Act (FCPA) est une loi fédérale américaine de 1977 pour lutter contre la corruption d’agents publics à l’étranger. […] Elle concerne l’ensemble des actes de corruption commis par des entreprises ou des personnes, américaines ou non, qui sont soit implantées aux États-Unis, soit simplement cotées en bourse sur le territoire américain, ou qui participent d’une manière ou d’une autre à un marché financier régulé aux États-Unis. […] Par extension, le simple fait d’avoir établi une communication téléphonique ou envoyé un courriel transitant via le territoire américain permet l’application du FCPA. »

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    Source : https://www.politiquemagazine.fr/

  • Tous censeurs!, par Jean-Paul Brighelli.

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    La censure officielle n’existe plus, certes. Mais une vague, une déferlante, un tsunami de prétention, de bêtise et de méchanceté s’y substitue désormais et parvient aussi à faire taire…

    1.jpg« Lorsque Beaussant m’informait qu’il avait céliné une œuvre, c’est qu’il n’en restait, dans le volume et dans l’esprit, presque rien. Le verbe, on l’aura compris, se référait à Céline : Voyage au bout de la nuit, gros roman de plus de six cents pages, avait subi une cure d’amaigrissement, de sorte qu’il se présentait, dans notre collection, sous la forme d’une petite plaquette d’à peine vingt pages, dont le contenu printanier, guilleret et fleuri, n’aurait pas choqué les séides les plus soumis au politiquement correct. »

    Dans l’Homme surnuméraire, roman indispensable paru à la fin 2017, Patrice Jean met en scène un héros qu’une maison d’édition prudente a chargé d’épurer les textes classiques de tout ce qui pourrait choquer notre hypersensibilité contemporaine, somme de toutes les sensibilités de toutes les « communautés » dont la co-existence non pacifique fait ce que nous appelons désormais la France. Le roman n’invente presque rien : les grandes maisons d’édition, les « éditeurs » du Net type Facebook et les producteurs de cinéma et de télévision ont des « sensitivity readers » (je vais justifier dans un instant mon usage de l’anglicisme) qui ont pour tâche d’épurer les contenus de façon à ne choquer personne, à commencer par les khonnards, dont le nom est légion, comme dit l’Evangile de Marc (5, 9). 

    Je ne voudrais pas que le lecteur s’imagine que c’est une spécificité de notre modernité que d’avoir rétabli la censure, non par voie officielle mais grâce aux ciseaux vigilants et occultes des grandes compagnies. Non, c’est une tentation cyclique, typique des périodes de crise ou de doute.


    (Ami lecteur, à partir d’ici, le prof de Lettres que je suis va étaler un peu de culture. Si tu es allergique à cette denrée rare, passe ton chemin — sinon, tu es prévenu…).


    En février 1880, Zola sortit Nana en volume — après l’avoir édité en feuilleton dans Causeur (pardon : le Voltaire). La maison Hachette, qui contrôlait la totalité des 75 librairies de gare françaises, refusa de le proposer aux voyageurs. Il ne fallait pas qu’une adolescente non prévenue tombât par hasard sur un texte qui, que, queue.

    Il faut bien comprendre que ces librairies ferroviaires vendaient alors bien plus de livres que les « Relays » que tient toujours Hachette dans nos gares modernes. Quand vous mettez dix heures à faire Paris-Marseille, vous vous équipez en littérature divertissante et en journaux de tous acabits.

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    Flaubert et Maupassant, ont partagé une profonde amitié. Dans leur correspondance transparaît la bienveillance de l’aîné envers son cadet pour lequel il fut un véritable guide. Image: “La terre a des limites, mais la bêtise humaine est infinie – Correspondance”, Éditeur : Le Passeur. DR.

     

    La IIIe République, consciente de l’énormité de l’attentat contre les productions de l’esprit, et désireuse d’éliminer les dernières traces du Second empire honni, passa l’année suivante une loi (29 juillet 1881) levant toute censure sur la presse et les livres. Cela n’empêcha pas Hachette, cette même année, de refuser de vendre un recueil de nouvelles de Maupassant regroupées sous le titre de la plus célèbre d’entre elles, la Maison Tellier — l’histoire fort drôle d’un bordel de Fécamp dont les pensionnaires ont un jour de vacances pour aller assister à la première communion de la nièce de la tenancière. Puis, en 1883, ce fut le premier roman de Maupassant qui connut la même censure arbitraire. Pensez, Une vie racontait une histoire d’adultère, un phénomène si exceptionnel qu’on devait le passer sous silence. Maupassant, qui se rappelait que la Bovary de son maître Flaubert avait été traînée sur le banc d’infamie, s’en amusa et pondit une pétition fort bien argumentée, immédiatement signée par tout ce que la France comptait de bonnes plumes — celles avec lesquelles on écrit, pas celles que l’on taille.

    « La maison Hachette, écrit-il, qui détenait le droit excessif et abusif de vente de toutes les gares de France, quittant le rôle d’intermédiaire passif qui pouvait seul faire tolérer cet exorbitant monopole, rétablit à son profit l’ancien visa, l’ancien veto. »

    On se rappelle qu’il y a déjà quelques années, Facebook avait censuré une reproduction de l’Origine du monde de Courbet : le logiciel de Mark Zuckerberg a du mal à faire la différence entre une toile de maître et une pub pour Jacquie et Michel. Plus récemment, Hachette (encore eux !) a accepté qu’une de ses filiales américaines, Grand Central Publishing, refuse d’éditer A propos of nothing, le livre de mémoires de Woody Allen (contre lequel, rappelons-le, aucune charge n’a jamais été retenue, mais il fallait faire plaisir à son beau-fils, Ronan Farrow, qui a décidé d’enfiler les patins de son hystérique de mère.

    Et je préfère ne pas imaginer ce qui se passerait, là-bas et ici, si demain Roman Polanski décidait de raconter sa vie…

    Maupassant, dans sa diatribe, expliquait que tolérer un tel monopole de la diffusion et de la censure pouvait à terme autoriser une société privée à ne diffuser que la presse qui lui plaisait et les opinions qu’elle jugeait conformes. Ou soutenir les hommes politiques de son choix. Les rézosocios exercent déjà ce type de contrôle. Essayez d’avoir une pensée non conforme sur l’islam ou sur le Covid, vous verrez. Mais les maisons d’édition en font autant, de façon plus feutrée. Bien sûr vous trouverez toujours un minuscule éditeur pour publier vos opinions. Mais de là à ce que votre livre soit diffusé — étant entendu que trois ou quatre structures spécialisées couvrent la France entière et que ce sont elles qui placent les livres sur les rayons — ou ne les placent pas. Et se sucrent magistralement au passage. Oh, vous pouvez toujours commander un livre… Encore faut-il savoir qu’il existe.

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    Roman Polanski, décembre 1981. © Philippe Wojazer / AFP

     

    La censure n’existe pas — sauf que des compagnies privées se sont substituées à l’Etat pour y pourvoir. Autrefois, on censurait les livres selon leur rapport à la « morale » officielle — c’est ainsi que l’on a pilonné la première édition des Fleurs du mal, dont les exemplaires subsistants se vendent fort cher, comme je l’ai raconté jadis. Mais il n’y avait qu’un État, qu’une morale. Désormais, il y a dix mille morales en même temps, chacune garante du politiquement correct tel que le ressent tel ou tel groupe microscopique qui hurle d’autant plus qu’il est peu représentatif. Et comme il n’y a plus que des groupes, dans notre beau pays, ça hurle partout.

    Dès qu’un présentateur de télévision déplaît à l’establishment de gauche qui tient le haut du pavé de la sensibilité, il est fusillé d’avance. Zemmour en fait aujourd’hui les frais — ou Pascal Praud, sur lequel Causeur a fait sa couverture de juillet. L’étiquette suffit à révoquer par avance. « Pédophile » pour Woody Allen, « violeur » pour Polanski, « fasciste » pour Zemmour, « populiste » pour Praud. 

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    On peut aimer ou ne pas aimer tel ou tel livre, tel ou tel commentateur. On peut couper sa télé, ne pas acheter tel livre — ou ne plus participer à la mascarade des rézosocios. J’ai récemment fermé mon compte Facebook, pourtant très suivi par quelques milliers d’« amis » et bon nombre d’ennemis, parce que je n’ai pas vu d’autre issue contre la vague, la déferlante, le tsunami de prétention, de bêtise et de méchanceté. 

    Mais c’est au fond ce que cherchent les bien-pensants d’aujourd’hui : ils entendent rester entre eux, c’est leur vision de la démocratie. Eh bien, je suis assez content qu’ici, nous soyons entre nous — dans une minuscule république où chacun s’exprime comme il l’entend. Surtout, comme disait Maupassant, s’il le fait avec talent — et il contestait vigoureusement la capacité de Hachette d’avoir sur les œuvres un jugement esthétique compétent. Mais dans le chœur des hurlements contemporains, qui se soucie encore du talent ?

    Allons, une petite lueur d’espoir vient du marché lui-même. Quand Hachette réalisa que Maupassant en était au vingtième tirage d’Une vie, qui partait comme des petits pains, il réinstalla le roman sur ses étagères de gare, de façon à profiter des ventes. C’est dit : je vais écrire le livre ultime sur l’école qu’on me demande, tout plein de vérités déplaisantes, je vais l’écrire du mieux que je peux, avec le sens de la mesure qui me caractérise et sans un soupçon de polémique, et l’on verra bien qui s’oppose à sa publication — s’il se vend.

     

    Normalien et agrégé de lettres, Jean-Paul Brighelli a parcouru l'essentiel du paysage éducatif français, du collège à l'université. Il anime le blog "Bonnet d'âne" hébergé par Causeur.
     
  • Soljenitsyne, le Vendéen [2]

    La Chabotterie, le logis rustique témoin de la capture du chef emblématique du soulèvement vendéen, Charette 

    par Dominique Souchet

    2293089609.14.jpgComment commémorer plus dignement qu'il n'a été fait à ce jour le centenaire du grand Soljenitsyne ? Et comment évoquer en même temps  l'écrasement de la Vendée par la fureur révolutionnaire autrement que par les indignations faciles et les formules toutes faites cent fois répétées ? Le superbe récit des relations entre Alexandre Soljenitsyne et la Vendée de Dominique Souchet que le dernier numéro de la Nouvelle Revue Universelle vient de publier répond à ce souci de façon passionnante. On a là un récit précis mais aussi une réflexion à l'altitude qui convient pour évoquer en les reliant Alexandre Soljenitsyne, la révolution russe et le massacre de la Vendée. L'horreur révolutionnaire en soi-même d'un siècle l'autre. Du XVIIIe au XXe. Nous avons entrepris hier dimanche la publication de ce récit qui s'étendra aux jours suivants. En remerciant Dominique Souchet et la N.R.U. de nous l'avoir donné.  LFAR 

     

    Le récit

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    UN ITINÉRAIRE VENDÉEN EN QUATRE ÉTAPES

    Des liens profonds unissent la Vendée et la Russie. Elles ont partagé une épreuve et un élan de même nature : une épreuve et un élan existentiels.

    C'est la force de ces liens qu'ont voulu mettre en évidence les quatre étapes de l'itinéraire suivi par Alexandre Soljenitsyne en Vendée : le Puy du Fou ; le logis de la Chabotterie ; Les Lucs-sur-Boulogne ; et la côte océanique à Saint-Gilles-Croix-de-Vie.

    Au Puy du Fou, le spectacle de nuit, la Cinéscénie, sera exception­nellement représenté pour lui, hors saison, par les bénévoles. Le produit de la soirée sera remis à Natalia Soljenitsyne, pour la Fondation d'aide aux victimes du Goulag et à leurs familles qu'elle préside. Le lendemain, le couple Soljenitsyne s'attardera longuement et passion­nément auprès de tous les artisans du Grand Parc, exprimant un amour profond pour la ruralité dans lequel Vendéens et Russes reconnaissent un de leurs traits majeurs communs. Au « village XVIIIe », il empoigne le marteau du forgeron pour forger lui-même un clou. Dans ses Mémoires publiés sous le titre Esquisses d'exil, Soljenitsyne revient longuement sur son passage au Puy du Fou, qui l'a littéralement fasciné : « De Villiers nous offrit d'assister à un extraor­dinaire spectacle populaire traditionnel (mais bénéficiant de la technique la plus avancée), avec ses effets de foule, représentant en plein air, dans une immense arène, de nuit mais avec quantité d'effets de lumière, l'histoire du soulèvement vendéen. Adia [Natalia, son épouse] et moi nous n'avions jamais rien vu de semblable et n'aurions même pu l'imaginer... Ce fut une impression poignante, qui ne s'effacera jamais. Quelqu'un pourra-t-il jamais, en Russie, reconstituer des scènes équivalentes de la résistance populaire au bolchevisme, depuis les junkers et les petits étudiants de l'armée des Volon­taires jusqu'aux moujiks barbus fous de désespoir, leurs fourches à la main ? » Le projet de création d'un « Puy du Fou » en Russie, c'est donc Soljenitsyne qui en fut l'initiateur véritable, avant Vladimir Poutine...

    35199086_521290081651640_5873474442792796160_n.jpgÀ La Chabotterie, le logis rustique le séduira par son charme propre sans doute, mais surtout parce qu'il est le témoin de la capture du chef emblématique du soulèvement vendéen, Charette. Un nom qui sonne familièrement aux oreilles de Soljenitsyne, un nom que l'illustre maréchal Alexandre Souvorov a rendu familier aux oreilles russes : dans une lettre qu'il lui adressa six mois avant sa capture dans les bois de La Chabotterie, il qualifiait Charette de « héros de la Vendée et illustre défenseur de la foi et du trône, éminent représentant des immortels Vendéens, fidèles conservateurs de l'honneur des Français. »

    Quant aux Lucs-sur-Boulogne, ils sont évidemment le cœur de l'itinéraire vendéen de Soljenitsyne, le lieu du grand discours qu'il va prononcer en guise d'adieu à l'Europe, après avoir inauguré, en compagnie de Philippe de Villiers, avec une émotion qu'il peine à contenir, le nouveau Mémorial érigé sur la rive sud de la Boulogne.

    Un discours qu'il porte et qu'il a préparé depuis longtemps. Un discours, inutile de le préciser, exclusivement de sa main. Un discours qu'il a soigneusement répété, dès son arrivée à Paris, sur le balcon de son hôtel, avec son ami et interprète Nikita Struve. Il y attache une telle importance qu'il revêt, ce soir-là, le costume qu'il portait le jour de la remise du prix Nobel, en 1974, à Stockholm.

    680816130.jpgLorsqu'il parvient au pied de la tribune, la clameur qui l'accueille est inouïe : elle paraît ne jamais devoir finir. C'était comme si cette foule immense ne parvenait pas à croire à la réalité de ce qu'elle voyait et était soudain prise de vertige devant la force symbolique de l'événement auquel elle participait : Alexandre Soljenitsyne, l'homme des brèches, était en train, par sa seule présence ici, au cœur de la Vendée suppliciée, d'abattre le mur de déni obstiné qui sub­sistait depuis deux cents ans. Même si la quête de reconnaissance devrait se poursuivre après son passage, quelque chose de décisif, cependant, était en train de se jouer. Un effet cliquet, sans retour possible. Et la houle des applaudissements se mettait à exprimer une reconnaissance infinie. Alexandre Issaievitch en était comme éberlué. Il murmurait : jamais, jamais, même lors de mon arrivée à Zurich en 1974, je n'ai vu une chose pareille... Les Vendéens l'accueillaient comme une grâce.

    Добровольцы_в_Киеве._Софийская_площадь.pngDernière étape, enfin, à Saint-Gilles-Croix-de-Vie, Soljenitsyne est venu marcher sur les pas de l'une des plus grandes poétesses russes, Marina Tsvetaieva. Elle avait séjourné sur la côte vendéenne en 1926, attirée elle aussi par le souvenir du soulèvement de 1793. Au lendemain de la révolution d'Octobre, alors que son mari servait dans l'Armée blanche, elle avait publié un recueil de poèmes, Le camp des cygnes, qui s'achevait par une admirable poésie réunissant la Vendée et le Don :

    Du monde d'avant, l'ultime vision :

    Jeunesse. Héroïsme. Vendée. Don.

    Sur la dune de la Garenne, où Marina aimait venir contempler l'océan, on inaugura une stèle portant ces deux vers, gravés en russe et en français. Puis on relut et on commenta les poèmes et les lettres exprimant l'amour que Marina portait à « sa » Vendée. Soljenitsyne — qu'elle inspira — dit à quel point il admirait l'étonnante musicalité et l'exceptionnelle densité de la langue de cette poétesse russe.

    De tout ce voyage, Nikita Struve tirera ce profond commentaire « Au pied de la chapelle des Lucs et sur les dunes vendéennes, se retrouvait dans une même vérité la France et la Russie, deux époques, deux pays, mais en profondeur un seul et même destin, authentifié par les souffrances des uns et des autres et porteur d'un message universel de courage et de liberté »

    Le voyage en Vendée d'Alexandre Soljenitsyne n'eut en effet rien d'une excursion touristique. « Ce projet était cher à mon cœur » écrira-t-il dans ses Mémoires. C'est une mission pleine de gravité qu'il vient accomplir. Comme la Vendée était venue se loger dans son œuvre, lui-même va venir faire irruption dans l'histoire France, sans mesurer sans doute alors la force de l'onde de choc que va produire sa venue en Vendée. Le quotidien Le Monde titre même en première page : Vendée et Goulag : Un moment d'égarement

    Mais quel rapport Alexandre Soljenitsyne lui-même entretenait-il avec la Vendée ? Il n'y était jamais venu. Comment se fait-il qu'elle lui fût apparemment si familière ? C'est ce qu'il a fait apparaître manière solaire dans le discours des Lucs, un discours d'une exceptionnelle densité qu'il faut lire, relire et méditer. ■  

    A suivre, demain mardi.

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    Soljenitsyne, le Vendéen [1]

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    La nouvelle revue universelle, 1 rue de Courcelles, 75008 PARIS - 4 numéros par an.  S'abonner

  • Des ravages de la domination gauchiste en salle des profs, par Aurélien Marq.

    Le professeur de philosophie Robert Redeker, 2007 © BALTEL/SIPA Numéro de reportage : 00541117_000004

    En 2006 déjà, le professeur de philo Robert Redeker recevait des menaces de mort suite à une tribune parue dans "Le Figaro"

    De Robert Redeker à Samuel Paty, la longue trahison de l’Education Nationale confrontée à l’islamo-gauchisme

    On parle trop peu de Robert Redeker, à tous points de vue. Parce que son travail de philosophe est remarquable : son dernier opus, « Les Sentinelles d’humanité », est un chef-d’œuvre d’intelligence et de profondeur. Le lire, c’est semer en nous des graines pour « quitter cette vie en créatures plus hautes que nous n’y étions entrés » – il y a du Soljenitsyne chez Redeker. Mais aussi parce qu’il a été un lanceur d’alerte d’un grand courage, en a payé le prix fort, et que nous n’avons tiré aucune leçon de son histoire. Si nous l’avions fait, Samuel Paty serait encore en vie et Mila n’aurait pas dû être déscolarisée, prisonnière dans son propre pays.

    Je croyais savoir ce qui s’était passé, mais je ne le mesurais pas. Le 19 septembre 2006, Robert Redeker a publié un texte, qu’il avait appelé « Le monde libre sous l’œil du Coran », qui lui a valu d’être menacé de mort par les islamistes, désigné à leur haine par Al-Qaradawi en personne, consciencieusement enfoncé par ce que l’on n’appelait pas encore l’islamo-gauchisme – Baubérot notamment, ce père spirituel sans esprit de feu l’Observatoire de la Laïcité, se distinguant par des sommets de veulerie, de fourberie et de malfaisance – et de devoir quitter son foyer, s’exiler de refuge temporaire en refuge temporaire, inquiet pour les siens, blessé des mille trahisons de l’éducation nationale et de ses collègues – il était professeur de philosophie – sous protection et en danger.

    #JeSuisRobertRedeker

    Je viens de lire son témoignage, Il faut tenter de vivre, et de la même manière que je peux dire #JeSuisCharlie et #JeSuisMila, je veux l’affirmer haut et fort, même après 15 ans : #JeSuisRobertRedeker. Et je remercie ceux qui l’ont soutenu, et j’assure de ma haine ceux qui l’ont poignardé dans le dos. Ni oubli, ni pardon.

    L’histoire a 15 ans, elle pourrait dater d’hier. Et cela, en soi, devrait nous révolter. Pas nous indigner vaguement, ou susciter un hashtag sur Twitter : nous faire descendre dans la rue pour hurler notre rage et exiger la condamnation de tous ceux qui auraient pu et auraient dû agir, mais n’ont rien fait.

    Le livre collectif dirigé par Georges Bensoussan Les Territoires perdus de la République – antisémitisme, racisme et sexisme en milieu scolaire » date de 2002. Le rapport de Jean-Pierre Obin « Les signes et manifestations d’appartenance religieuse dans les établissements scolaires » de 2004. Et voilà qu’en 2006, Robert Redeker se retrouvait confronté à l’hostilité généralisée du monde enseignant pour avoir dit la vérité au sujet de l’islam et de l’islamisme. Ravages de la domination gauchiste en salle des professeurs !

    Les profs solidaires mais…

    Car il ne faut pas s’y tromper : des personnalités de gauche l’ont soutenu, par exemple Caroline Fourest qui se montra admirable, mais c’est bien l’imprégnation du gauchisme dans la corporation enseignante qui fut la racine du mal, de ce « je condamne bien sûr les menaces de mort, MAIS…. » Mais il n’aurait pas dû écrire ce qu’il a écrit, ou pas comme ça, ou le devoir de réserve, ou la stigmatisation, le padamalgam, l’antiracisme, la cause palestinienne, ou que sais-je : mais, mais, mais, toujours ce « mais » qui n’a d’autre but que d’expliquer que ceux qui critiquent l’islam sont les vrais coupables, et que ceux qui appellent à tuer au nom de la « religion de paix et de tolérance » sont les victimes de « l’islamophobie », du « racisme », du « sionisme », et j’en passe. C’est bien connu, seuls l’islam et les musulmans sont innocents des crimes commis au nom de l’islam, c’est le reste du monde qui en est coupable.

    Et en 2020, que sait-on des derniers jours de Samuel Paty ? Le même abandon par une administration pleutre, la même réprobation de collègues du même bord idéologique que ceux qui se pinçaient le nez devant Robert Redeker, les mêmes arguments ineptes et la même inversion accusatoire de la part des mêmes « intellectuels » qui ont condamné son assassinat MAIS…. Hier Baubérot, Burgat, le MRAP, la LDH, l’Humanité, aujourd’hui Khosrokhavar, Médiapart, toujours Baubérot et Burgat, et les ambigus et les hypocrites…. Rien n’a changé. Rien.

    Institution structurellement complaisante

    Qu’ont donc fait pendant 15 ans les syndicats, les ministres, les gouvernements, les profs, les parents d’élèves ? Et qu’on ne vienne pas me dire que les rémunérations insuffisantes des enseignants sont la cause du problème : Les Territoires perdus évoque une situation qui en 2002 ne venait pas d’apparaître, et à l’époque on ne recrutait pas encore des profs de maths à peine capables de faire les exercices qu’ils sont censés donner à leurs élèves.

    À quelle institution structurellement complaisante envers l’horreur la République nous contraint-elle de confier nos enfants chaque jour ? À côté d’enseignants admirables comme un bon nombre de ceux que j’ai eu la chance d’avoir dans ma jeunesse, comme Robert Redeker ou Samuel Paty, comme Souâd Ayada, Jean-Paul Brighelli, Fatiha Boudjahlat ou François-Xavier Bellamy, qui incarnent la noblesse d’un engagement et d’un métier, combien de ces commissaires politiques staliniens de la salle des profs, combien de lâches adeptes du « pas de vague », combien de médiocres incapables de s’élever au-dessus de la mélasse du prêt-à-penser politiquement correct ?

    Instruire les générations naissantes est la clef de l’avenir. L’école républicaine fut l’une des plus belles réussites de la France, elle est aujourd’hui l’un des principaux artisans de son effondrement. Espérons que le think-tank annoncé par Jean-Michel Blanquer puisse avoir des effets concrets – même si compte-tenu du calendrier électoral et de la complaisance de la macronie envers le « progressisme », l’heure est tardive. Espérons que de futurs gouvernements auront le sens de leurs responsabilités et prendront enfin le problème à bras le corps. Mais n’attendons pas, et ne comptons pas sur une institution faillie pour enseigner l’essentiel à nos enfants. Et je ne parle pas seulement du passé simple, du subjonctif et des problèmes de baignoires qui débordent et de trains qui se croisent, je parle de ce qui leur permettra d’être des hommes et des femmes debout plutôt qu’à genoux, et des Français fiers de leur culture plutôt que des déshérités sans racines.

    C’est une transmission qui est l’affaire de tous, par les connaissances et plus encore par l’exemple que nous pouvons en donner. La dignité humaine, et les libertés de conscience, de pensée et d’expression ne disparaissent que si nous arrêtons de les revendiquer. N’y renonçons jamais : nous n’avons pas de plus impérieux devoir que de les transmettre à ceux qui viendront après nous, et de préparer nos successeurs à recevoir ce trésor incomparable.

     

    Haut fonctionnaire, polytechnicien. Sécurité, anti-terrorisme, sciences des religions. Disciple de Plutarque.
     
  • Numéro 200 !

    Sévillia, Petitfils, des Cars

     

    Un bon poste d’observation

    Par Jean Sévillia

    Deux cents numéros, presque vingt années d’existence. Durer, c’est assurément la première performance de Politique Magazine. Dans une période économique difficile pour la presse écrite ne peuvent survivre que des grands journaux appuyés sur des actionnaires dont l’activité principale se situe dans l’industrie et la finance, ou à l’inverse des titres indépendants qui ne prétendent pas participer à la course aux gros tirages mais qui assument leur statut de « niches », en visant la qualité rédactionnelle dans le domaine qui est le leur et en s’appuyant sur la fidélité de leurs abonnés.

    Il faut cependant souligner, pour cette seconde catégorie de journaux, que la qualité conditionne la durée : il est loin le temps où l’on était, par fidélité familiale, lecteur d’un journal de père en fils, journal qu’on ne lisait pas toujours. Aujourd’hui, au regard du temps limité qu’accordent nos contemporains à la lecture sur papier du fait de la concurrence croissante des écrans, la médiocrité et la routine ne pardonnent pas aux mauvais petits journaux. Si Politique Magazine a atteint le numéro 200, c’est précisément parce que ce mensuel, à travers ses équipes successives et grâce au fil rouge tenu depuis l’origine par Hilaire de Crémiers, a voulu et su, après des débuts hésitants où il a fallu inventer la juste formule, ne jamais renoncer à l’exigence de qualité, exigence qui s’est notoirement renforcée au fil du temps.

    La deuxième caractéristique de Politique Magazine, qui est liée à ce qui précède et qui explique encore plus la pérennité du titre, c’est d’avoir su rester fidèle à l’intuition de ses fondateurs. Affichant des convictions bien ancrées mais sortant des habitudes psittacistes et des naïvetés militantes, ce magazine entend analyser l’actualité selon les lois de la politique, au sens noble du terme, que ce soit la politique intérieure ou la politique internationale. Politique Magazine ne pratique pas l’esprit de parti, se réfère au bien commun et à l’intérêt national, croit au Politique avec un grand P, mais sans ignorer que la politique n’est pas le tout de l’homme et des sociétés, bien au contraire. Car nombre d’enjeux cruciaux actuels sont aussi philosophiques, religieux, historiques et culturels, et que de nouveaux débats d’idées sont apparus, de la bioéthique au transhumanisme et de l’écologie à la dictature des réseaux sociaux, qui appellent des réponses inédites. Ces réponses, on ne les dénichera pas chez les maîtres d’hier, puisque ce sont des problèmes qu’ils n’ont pas connus. Il appartient par conséquent à nos générations de les découvrir. À sa place, Politique Magazine contribue à ce travail.

    Ajoutons qu’un bon journal ne peut être un journal de professeurs (que les professeurs me pardonnent…) Il faut aussi de l’humour, de l’impertinence, un zeste de polémique qui ne soit ni bête, ni méchante. Ce registre est présent dans Politique Magazine, je pense par exemple aux pages de photos assorties de légendes fantaisistes, mais il mériterait, à mon goût, d’être plus développé. Le moyen le plus efficace d’être sérieux est de n’être pas ennuyeux.

    Nous traversons une époque bouleversée, où tout semble se décomposer, ce qui signifie que tout se recomposera un jour. Politique Magazine est un bon poste d’observation de ce double mouvement. Mouvement de mort, et mouvement de renaissance.

     

    EN ROUTE POUR LE NUMÉRO 300 !

    Par Jean-Christian PETITFILS

    Je vais vous faire un aveu. Quand dans ma boîte aux lettres, au milieu d’un courrier souvent abondant, j’aperçois la fine couverture de plastique grise qui l’enveloppe, je m’empresse de la déchirer et me précipite sur Politique Magazine ! Cela fait des années que je le lis avec bonheur. Autant vous dire que je l’apprécie, même si ça et là je ne partage pas tous ses points de vue.

    Son positionnement dans la presse mensuelle est unique. Remarquablement présenté, abondamment illustré, bien aéré, il attire de suite l’attention par sa qualité et une distribution claire des rubriques qui en facilite la lecture : un éditorial tonique, une partie consacrée à l’actualité toujours substantielle, de grands dossiers politiques ou historiques documentés, des analyses économiques et géostratégiques remarquables, des tribunes libres bien senties, des pages culturelles abondantes.

    Voilà un journal de combat qui ne met pas son drapeau dans sa poche. Il affirme ses convictions haut et fort tout en écartant les invectives gratuites et les vaines polémiques. Le ton est à la rigueur de l’information, au décryptage pertinent de l’actualité, au réalisme lucide, à la dénonciation inlassable des mensonges médiatiques et des manipulations politiques de ceux qui salissent délibérément la mémoire et l’histoire de notre beau pays. Place est faite aux analyses métapolitiques, aux leçons du passé, à la défense prioritaire de l’État-Nation, à son indépendance, à sa souveraineté « une et indivisible » (quelle pénible farce que cette prétendue « souveraineté européenne » !) face aux dangereuses rêveries bruxelloises ou aux impostures mondialistes, à la dénonciation inlassable des maux qui minent notre pays : le déclin de sa démographie, son délitement social et familial, l’immigration incontrôlée, le multiculturalisme, la montée du péril islamique, le terrorisme et les idéologies mortifères qui remplacent aujourd’hui le vieux marxisme-léninisme et ses goulags : l’islamo-gauchisme, l’indigénisme, le décolonialisme, la cancel culture, l’ultra-féminisme… Il s’agit sans cesse d’attaquer le mal à sa racine, de dévoiler le dessous des cartes.

    J’apprécie particulièrement la place faite au combat culturel et spirituel, aux comptes rendus de livres, à la critique de films ou de spectacles, aux références historiques constantes, à la défense de la langue de Molière et de Chateaubriand et surtout de la foi chrétienne, malheureusement subvertie de toute part, y compris de l’intérieur.

    Ouvert aux grandes familles politiques de la droite, Politique Magazine incarne un traditionalisme intelligent, s’adaptant aux défis technologiques, économiques, financiers, aux mutations sociales irréversibles, tout en s’attachant à préserver les valeurs essentielles, constitutives de l’identité française et de la civilisation gréco-latine multiséculaire qui en a été le terreau. Comment ne pas penser que ce sont là les clés de l’avenir ? Longue vie donc à Politique Magazine ! Et en route pour le numéro 300 !

     

    POLITIQUE MAGAZINE : UNE REVUE INDISPENSABLE

    Par Jean des Cars

    Dans la pénible et inquiétante époque que nous vivons, rares sont les lumières qui nous aident à avancer dans une nuit d’incertitudes et d’angoisses. À l’heure où j’écris ces lignes, nul ne sait si nous apercevons une lueur d’espoir ou si nous devons, encore, nous résigner à une vie étriquée, souvent caricaturale, réduite à peu de contacts et d’échanges. Mais ce que je sais est que l’arrivée du nouveau numéro de Politique Magazine sera instructif, informé et écrit dans une belle langue, la nôtre, qui ne s’aventurera jamais sur les sentiers boueux et dévastateurs de l’écriture inclusive… Voici une revue de haute qualité, sur le fond comme sur la forme, élégante, bien mise en pages par une illustration choisie avec talent. On mesure cet exploit quand on sait combien la presse écrite est menacée par une invasion d’images et de commentaires trop souvent dénués de réflexions et de connaissances. Si l’image vaut des milliers de mots, ici des milliers de mots nous permettent de voir des images de notre temps et du passé. L’histoire est rappelée avec pertinence et courage.

    Politique Magazine défend la France quand elle est belle, courageuse voire héroïque, divertissante, et s’insurge contre la laideur et l’ignorance. De l’éditorial à l’actualité, des dossiers aux spectacles (le cinéma et le théâtre sont très bien servis par des plumes aussi élégantes que bien informées), c’est un plaisir. Et je m’y plonge avec bonheur ! On nous dit que le monde est devenu un village. Soit ! Mais alors il faut s’y promener avec gourmandise, curiosité et soulagement. Cette revue nous aide à comprendre le monde d’aujourd’hui, d’hier et d’envisager celui de demain. Dans ces temps calamiteux où d’anonymes, donc lâches, expéditeurs déversent des flots de haines, de jalousies, de fausses « informations », cette revue assure une mission de salut public. Depuis que j’y suis abonné, je n’ai jamais été déçu, même si certains éclairages méritent, parfois, d’être approfondis, ce qui est normal : la lectrice et le lecteur sont des partenaires. Et si un désaccord se glisse entre les mots ou les lignes, c’est une preuve de vie. Selon Paul Valéry, « la politique est l’art d’empêcher les gens de se mêler de ce qui les regarde », j’ose dire que notre chère revue « permet aux gens d’apprendre ce qu’ils doivent savoir ». Je souhaite, de tout cœur, longue vie à Politique Magazine. Le cardinal de Richelieu estimait que « la bonne politique est l’art de rendre possible ce qui est nécessaire » Cette revue nous est nécessaire.

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    Source : https://www.politiquemagazine.fr/

  • Coopérations européennes dans l’armement : ”Notre devoir est de s’opposer à ce désastre programmé pour la France”, par P

    Philippe Meunier, vice-Président de la région Auvergne-Rhône-Alpes en charge de la sécurité et des partenariats internationaux et contributeur du laboratoire d’idées universitaires le CERU, dénonce une politique d’abandon de l’indépendance nationale dans le domaine de la défense.

    À peine nommée ministre de la Défense, Mme Goulard théorisait le 8 juin 2017 la politique d’abandon de l’indépendance nationale dans le domaine de la défense dont elle avait pourtant la charge : "Si nous voulons faire l’Europe de la défense, il va y avoir des restructurations à opérer, faire des choix de compatibilité et, à terme, des choix qui pourraient passer dans un premier temps pour aboutir à privilégier des consortiums dans lesquels les Français ne sont pas toujours leaders."

    Les erreurs allemandes !

    En faisant ainsi "don" de la souveraineté nationale, portée pourtant par les contribuables français des décennies durant, à la construction de l’Europe fédérale qu’elle appelle de ses vœux, la doctrine "Goulard-Macron", poursuivie par Mme Parly avec toujours autant de constance délétère à l’encontre de notre indépendance, légitimait ainsi officiellement la "liquidation" programmée de la souveraineté de notre industrie de l’armement (Eurodrone, SCAF, MGCS, MAWS…). Cette doctrine est une faute politique et morale, car contraire aux intérêts du peuple français en entraînant nos industriels dans une impasse impardonnable.

     

    "L’histoire des programmes de défense allemands est une longue liste de retards, de surcoûts et de sous-performances" 

     

    Impardonnable d’abord sur le plan de la doctrine ; la Bundeswehr est une armée "l’arme aux pieds" qui attend l’hypothétique menace russe. L’armée française est une armée qui combat l’islamisme au Proche-Orient et en Afrique, qui se prépare au choc en Méditerranée orientale et dans le Pacifique. Dans le domaine de l’armement terrestre : confier le programme de char de combat à une nation dont l’armée n’a jamais fait la guerre depuis 1945 est un non-sens que l'armée de terre française paiera, notamment ses soldats, si ce programme va à son terme. Dans le domaine aéronautique : confier les deux tiers d’un programme d’avion de combat à un pays qui n’a ni dissuasion, ni porte-avions, ni armée de l’air frappant dans la profondeur, trois missions essentielles à la France, relève pour le moins de l’abandon de poste pour ne pas dire plus.

    Impardonnable ensuite dans le domaine capacitaire et industriel ; l’histoire des programmes de défense allemands est une longue liste de retards, de surcoûts et de sous-performances. En comparaison, la conduite de programmes menés par la DGA, confiés ensuite à des maîtres d’œuvre expérimentés, a abouti à un modèle d’armée complet dont tout le monde s’accorde à dire qu’il est le meilleur d’Europe par ses capacités, sa polyvalence et son autonomie.

    La France a organisé son industrie de l’armement autour de maîtres d’œuvre de rang mondial pour garantir son autonomie stratégique. L’industrie allemande de l’armement est une courroie de transmission de l’option "tout OTAN", voulue et poussée par l’ensemble de sa classe politique, mêlant au gré de ses intérêts, syndicats, parlementaires et comités d’entreprise pour marginaliser ou déstabiliser les positions françaises pourtant supérieures en tout point en la matière. C’est un fait.

     

    "L’Allemagne fait planer le risque d’un dédit en raison du pouvoir de blocage du Bundestag sur les budgets de défense à chaque appel de fonds" 

     

    Négligeant ainsi tous les fondamentaux de la conduite d’un programme d’armement, les zélateurs de cette coopération européenne dévoyée commettent toutes les erreurs possibles pour mener ces projets à l’abîme :

    - aucune convergence des objectifs diplomatiques et des doctrines permettant de conduire des programmes opérationnels,

    - absence de maître d’œuvre expérimenté faute d’acteur en capacité,

    - irruption incontrôlée d’acteurs tiers arrogants, alors que le char français Leclerc a montré par exemple sa supériorité en comparaison du Léopard allemand, sans parler des capacités réduites de l’Eurofighter Typhoon comparées à celles du Rafale,

    - pas de budgets sanctuarisés, faute d’accord politique au sein de la classe politique allemande, y compris au sein même de la coalition au pouvoir. La France a une loi de programmation militaire assurant le financement sur le long terme de ses programmes, l’Allemagne fait planer le risque d’un dédit en raison du pouvoir de blocage du Bundestag sur les budgets de défense à chaque appel de fonds.

    Un pilier français

    Contrairement à la France qui a fait de l’exportation d’armement un pilier de sa diplomatie et de la pérennité de son industrie d’armement, l’Allemagne la restreint sans cesse et laisse planer un doute quant à la mise en œuvre de ces accords bilatéraux, potentiellement en opposition avec nos partenariats stratégiques. Tout cela conduit et conduira à une perte de souveraineté et de compétitivité de la France dans ce domaine industriel, pourtant un des rares qu’il nous reste, suite à la désindustrialisation qui frappe la France depuis les années quatre-vingt-dix. La voie empruntée par le gouvernement français, à la demande d’un président de la République aveuglé par son dogmatisme idéologique dont le seul but politique est l’Europe fédérale, affaiblit ainsi jour après jour notre souveraineté.

     

    "Ce constat est largement partagé par la communauté industrielle et militaire française et par quelques-uns d’entre nous" 

     

    De la part des concurrents de la France, on peut comprendre leur volonté de s’approprier notre technologie que nous maîtrisons dans tous les domaines (aérien, terrestre, naval), leur capacité de maître d’œuvre étant réduite voire inexistante ; mais de la part du Président de la France et de son gouvernement, l’obstination dans la conduite d’une telle politique est gravissime.

    Ce constat est largement partagé par la communauté industrielle et militaire française et par quelques-uns d’entre nous, élus opposés dès le début à cet abaissement et affaissement de la France qui a commencé avec "la loi Macron" de 2015 (fusion de Nexter avec KMW). Aujourd’hui, l’ensemble des Français opposés à cette liquidation de notre patrimoine industriel doit se mobiliser pour faire cesser cette aventure avant qu’elle ne se termine en un désastre.

    Après de fausses noces qui s’avèrent être une mésalliance complète, il est urgent de replacer l’action de la France au cœur de la nécessaire sauvegarde de notre souveraineté. Pour ce faire, il s’agit de revenir aux fondamentaux en passant des accords d’État à État, sans d’ailleurs forcément limiter notre champ d’action aux seuls pays membres de l’UE.

     

    "La France doit préserver en national ses capacités qui font sa spécificité et assurent son rang mondial" 

     

    La solution nationale s’impose et doit s’imposer une nouvelle fois et pour les mêmes raisons que le général de Gaulle avançait aux stagiaires de l’École de Guerre le 3 novembre 1959 : "Il faut que la défense de la France soit française. C'est une nécessité qui n'a pas toujours été très familière au cours de ces dernières années. Je le sais. Il est indispensable qu'elle le redevienne. Un pays comme la France, s'il lui arrive de faire la guerre, il faut que ce soit sa guerre. Il faut que son effort soit son effort. S'il en était autrement, notre pays serait en contradiction avec tout ce qu'il est depuis ses origines, avec son rôle, avec l'estime qu'il a de lui-même, avec son âme."

    La France doit préserver en national ses capacités qui font sa spécificité et assurent son rang mondial : la dissuasion, le combat terrestre de haute intensité, la supériorité aérienne et le respect de sa présence en mer. Elle en a les moyens. Il s’agit tout simplement d’en avoir la volonté.

    Toute autre voie "obligeant" nos entreprises de l’armement à "brader" ce capital industriel, qui est avant tout celui des Français, relève tout simplement de la trahison à l’encontre des intérêts de la France.

     

    Source : https://www.marianne.net/