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  • Histoire • Dans Causeur : 21 janvier, hommage à Louis XVI

     

    L'article qui suit - signé de Lucie Vilatte - est paru dans Causeur, le 21 janvier.  Il s'agit, selon son titre, que ne dément pas la suite, d'un hommage à Louis XVI. Il a été publié plusieurs hommages à Louis XVI dans d'autres médias en ligne. Par exemple dans Boulevard Voltaire. Nous avons retenu celui-ci parce qu'il émane d'une conscience républicaine. Républicaine au moins en ses enfances. Et, aujourd'hui, plutôt sceptique, on le verra. On pourra débattre de différents aspects de cet hommage bienvenu. N'en retenons qu'un : l'idée selon laquelle Louis XVI serait mort pour rien. Idée que contredit la juste analyse qui précède : au chapitre des conséquences de l'assassinat du roi, le solde, en effet, entre positif (?) et négatif, n'est pas à somme nulle. Lucie Vilatte dresse fort bien, elle-même, la liste des terribles conséquences qu'il est résulté de cette mort singulière, pour la France, l'Europe et le monde. Ce n'est pas pour rien que Louis XVI est mort mais pour une suite de  malheurs dont nous n'avons pas fini de faire l'inventaire et dont nous subissons encore les conséquences négatives.  Lafautearousseau   

     

    L’idée d’une lignée familiale régnant sur un pays a longtemps heurté ma conscience républicaine, dûment  formatée pendant mes douze années de présence sur les bancs de l’école du même nom.

    Instituteurs, puis professeurs, noblement investis de leur mission, mettant le paquet pour nous faire admettre le bien-fondé de la décapitation d’un roi exécuté pour le simple fait d’être roi. Cela avait permis d’en finir avec ce système injuste et absurde qui donnait le pouvoir à une famille régnante, et aux deux castes les moins nombreuses et les plus riches : noblesse et clergé, laissant de côté les représentants du Tiers-Etat, c’est à dire nos ancêtres directs.

    Aucun d’entre nous n’ayant a priori de représentant du clergé dans son ascendance, ni de particule à revendiquer dans son patronyme (les autres faisant profil bas), il était évident que le Tiers-Etat c’était nous, que c’était pour notre Bien et notre Liberté que ce gros benêt de Louis XVI avait été raccourci et que le pouvoir était enfin donné au peuple de France. De toutes façons ce n’était pas un roi qu’on avait tué mais un symbole. Voilà à peu près comment le Peuple en question s’est approprié la Révolution française.

    Mes valeureux professeurs, encore tout imprégnés du formatage qu’ils avaient eux même subi, ne s’arrêtaient pas plus que nécessaire sur les prisons pleines à craquer, les charrettes quotidiennes vers les actuelles places de la Concorde, de l’Hôtel de Ville ou de la Nation, les milliers de cadavres charriés sur la Loire à Nantes, la répression à Lyon, en Provence et ailleurs. Ni, surtout, sur ce qu’il faut bien appeler le génocide vendéen.

    Robespierre était l’Incorruptible, Mirabeau n’était pas beau et le calendrier de Fabre d’Eglantine était si poétique. Tant pis si ces révolutionnaires s’étaient finalement auto-détruits. Tant pis si tout ce sang versé avait eu pour résultat de laisser la place à un individu assoiffé de pouvoir qui, tout en reconstituant une cour et une aristocratie à l’identique avec son propre entourage, avait mis l’Europe à feu et à sang, terrorisant à ce point les monarchies voisines qu’il finit, pour se donner une légitimité européenne, par épouser la fille de l’empereur d’Autriche, accessoirement petite nièce de la Reine décapitée quelque dix-sept ans auparavant.

    La Révolution restait belle, idéale, rêve de tout le XIXème siècle, inspirant quelques soubresauts ici et là et finissant, un peu grâce aux Prussiens, par dégager le dernier tyran qui, comme son oncle, s’était servi d’un accès de fièvre républicaine (la seconde) pour se coiffer d’une couronne impériale.

    Nous étions donc enfin en République, troisième du nom. « On est en république tout de même ! » signifiant dès lors dans le langage populaire le droit de faire ce que l’on voulait. Non mais ! L’idéalisation de la Révolution allait pouvoir commencer, le mythe fondateur s’installer, balayant, sous le tapis des cimetières et du bagne, ses héritiers directs que furent les Communards.

    Malgré quelques voix discordantes, il devint courant pour les hommes politiques de se référer à la Révolution pour légitimer leur engagement républicain, en bons représentants du « Camp du Bien » face aux quelques survivances monarchistes des débuts de cette Troisième République. Le 14 juillet devint fête nationale. L’Exposition Universelle de 1889 célébra brillamment le centenaire de la Révolution, il nous en reste un des plus beaux monuments du pays, la Tour Eiffel.

    Aujourd’hui, 1789 a pris du plomb dans l’aile, il est difficile de se référer à cette époque sanguinaire dans une société qui a voulu gommer toute idée de violence. Seul un Mélenchon ose évoquer son admiration pour Robespierre, ou peut-être seulement pour son incorruptibilité ?

    Par contre, les références à la République, aux « valeurs républicaines » sont quasi quotidiennes depuis quelques années. D’ailleurs, il faudrait que l’on m’explique en quoi les valeurs en question sont spécifiquement républicaines, je n’y vois personnellement qu’un héritage du Christianisme et des Lumières.  Elles n’ont rien d’universel, elles sont notre identité.

    Le XVIIIème, siècle des Lumières portait en lui tous les germes de l’émancipation humaine, on aurait pu en tirer le meilleur. La violence de la Révolution est venue détruire et dénaturer tout cela. N’aurait-il pas mieux valu pour le peuple, un monarque éclairé et paisible plutôt que des ennemis de la liberté se réclamant de la liberté, puis un arriviste obsédé de pouvoir qui mirent l’Europe à feu et à sang ?

    Qui peut dire que notre pays n’a pas payé tout cela au prix fort  au cours des deux siècles suivants ? Et ne le paye pas encore ? Le Royaume-Uni a t-il du retard sur la France avec sa royauté ? Le Danemark, la Suède, la Norvège, la Belgique, les Pays-Bas ?Pouvons-nous nous poser la question sans passer pour des antirépublicains prêts à en découdre avec la « Gueuse » ?

    Louis XVI est mort pour que noblesse et clergé laissent le pouvoir au Peuple et que règne l’Egalité. Ce rêve a vécu. Aujourd’hui, nous avons presque à l’identique une noblesse d’Etat, sortie de l’ENA ou constituée de politiciens professionnels, la morgue de certains n’ayant rien à envier à l’Ancien Régime. Nous avons un clergé médiatique constitué d’animateurs ou d’artistes engagés nous assénant leur idéologie à la moindre occasion, et de journalistes, privilégiés fiscaux, chargés de nous apporter la Vérité à la grand-messe du 20 heures. Tout ce beau monde se chargeant de nous inculquer les Évangiles du politiquement correct.

    Ses membres exercent un pouvoir sans contre pouvoir, étant de plus en plus déconnectés de la réalité quotidienne de la « France d’en bas » expression douteuse, justifiant en elle même l’existence de l’Elite dominant le Peuple. Quant aux milliardaires, de plus en plus milliardaires, est il besoin d’évoquer leur influence sur la vie publique ou politique ?

    L’Histoire est écrite par les vainqueurs. Au fil du temps, la figure de Louis XVI est pourtant apparue sous un autre jour. L’idéologie républicaine en avait fait un balourd inapte à gouverner, ultime représentant d’une lignée d’oppresseurs. De tyran il est devenu victime. Les gens qui l’ont condamné, ont touché quelques mois plus tard le fond de l’ignominie, en osant accuser sa femme de relations incestueuses avec le petit Dauphin. Cela seul suffit à les discréditer, mais on ne nous racontait pas cela à l’école !

    La réalité du personnage (à part sous le bref épisode de la Restauration) aura mis deux siècles à nous parvenir, je veux dire à nous, grand public non spécialiste.

    Le roi horloger (une de ses passions) s’intéressait à son époque et aux progrès de la Science. La cartographie, la chimie, et même les débuts de l’électricité n’avaient pas de secret pour lui. Il avait été éduqué dans cet esprit des Lumières qui voulait le bien des peuples et la fin de l’obscurantisme. C’était un esprit ouvert et cultivé, des textes d’époque en attestent.

    En 1774, il s’était fait inoculer ainsi que toute sa famille le vaccin de la variole, pour donner l’exemple. Il fut sans doute le premier roi fidèle à sa femme. Il vécut comme un bon père de famille bourgeois, effondré de douleur à la mort de son fils aîné, en juin 1789 année décidément bien néfaste pour lui.

    On dit que le jour de son exécution il a demandé si l’on n’avait toujours pas de nouvelles de La Pérouse l’explorateur perdu avec navire et équipage depuis plusieurs années.

    C’était un homme de son temps, le malheur l’avait fait naître roi. Il n’avait pas eu le choix. Mais il choisit de ne pas faire tirer sur la foule pour se protéger. Ses dernières paroles furent « Je prie Dieu pour que le sang que vous allez répandre ne retombe pas sur la France » Si vous passez par la Concorde un 21 janvier, ayez une pensée pour le Roi. Il est mort pour rien. Et il n’est pas le seul.

    *Image : wikicommons/ Raymond Ellis.

    Lucie Vilatte

  • Macron, le président des nomades

    Le discours d'Emmanuel Macron à la Sorbonne

     

    Par François Marcilhac

     

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    La vie politique de chaque pays est naturellement rythmée par la discussion et l’adoption par le Parlement du budget de la nation puisque c’est lui qui décide des grands engagements annuels et pluriannuels de l’État. Ou, devrions-nous dire plutôt, «  était naturellement rythmée  », puisque, depuis l’adoption sous Sarkozy, en 2011, du traité budgétaire européen, ce n’est plus ni le Gouvernement français qui présente, ni le Parlement français qui discute librement, avant de l’adopter, le budget de la France, mais Bruxelles (et donc Berlin) qui l’avalise avant même sa présentation devant le Parlement français, Bercy l’ayant concocté sous le regard inquisiteur de la Commission européenne. Aussi Jean-Claude Juncker, son président, peut-il donner un satisfecit enthousiaste au projet présenté cette semaine à l’Assemblée par le Gouvernement comme un maître d’école donne un bon point à un bon élève. Le plus grave est que nos gouvernants, Macron en tête, loin de ressentir une telle approbation comme une humiliation pour notre pays, l’ont servilement recherchée. Avec Macron, cette servilité est même frénétique : son aliénation mentale européiste, qui le fait militer – seul en Europe  ! – pour le remplacement de la souveraineté nationale par une hypothétique souveraineté européenne, lui fait voir en effet «  dans le dépassement de la nation un devoir d’époque et une mission presque sacrée  » (Mathieu Bock-Côté, Figaro Vox, 12 octobre). Telle est bien la vérité de son progressisme qu’il assimile à un sens de l’histoire.

    L’Europe comme terre promise

    L’opinion publique n’en avait pas moins besoin d’être rassurée. Car on a beau se proclamer le prophète, ou plutôt, le «  pionnier  » – l’imaginaire de Macron est américain – de l’Europe comme nouvelle terre promise, ces grands enfants que sont les peuples ont besoin de «  pédagogie  », laquelle ajoute, au mensonge de la démagogie, l’infantilisation des citoyens. C’est pourquoi celui qui refuse une «  présidence bavarde  » et veut préserver une «  parole présidentielle [qui] garde de la solennité  », s’étant aperçu qu’il perdait en popularité, a pensé qu’il était temps de descendre de son Olympe et de passer, comme un vulgaire président normal, au JT de 20 heures sur TF1, le dimanche 15 octobre, pour expliquer, dans la mesure du possible, tant aux «  illettrés  » qu’à «  ceux qui ne sont rien  » et qui, de ce fait, «  foutent le bordel  », le sens de la solennité de sa parole comme celui de sa politique.

    Les Français n’auront toutefois rien appris, sinon qu’il est «  un enfant de la province  », qu’il fait ce qu’il dit, qu’il pense à «  la France qui souffre  », qu’il veut «  en même temps qu’on libère et qu’on protège  » – mais pas qu’on insère  ? – et, qu’enfin, il «  ne croi[t] pas au ruissellement mais à la cordée  » (sic), ce qui est peut-être préférable, en effet, au moment où l’on dévisse (dans les sondages). N’avait-il pas déclaré dans un entretien à l’hebdomadaire allemand Der Spiegel, publié deux jours auparavant, qu’ «  en forçant le trait, on pourrait dire que la France est un pays de monarchistes régicides, ou encore que les Français élisent un roi mais qu’ils veulent à tout moment pouvoir le renverser  »  ? L’arrogance macronienne dissimule une fêlure intime, comme une sourde angoisse, car ce n’est pas la première fois qu’il aborde le sujet. Serait-ce celle de voir sa tête finir au bout d’une pique  ?

    La patrie du portefeuille

    On aurait tort en tout cas de voir en Macron le «  président des riches  ». Laissons cela à une gauche sans imagination ou qui, plutôt, ne sait comment critiquer autrement une politique (impopulaire) qu’elle est heureuse de le voir pratiquer à sa place, puisqu’elle repose sur la même conception d’une société liquide, ennemie de la notion d’enracinement, diabolisé comme identitaire, raciste, nationaliste, etc. Le mensonge présidentiel sur la réforme de l’ISF en est un signe patent. Désormais, seule la propriété immobilière, en sus de quelques gadgets, entrera dans son calcul. Nous ne nous prononcerons pas ici sur l’efficacité, controversée, de cet impôt. Ce qui est significatif, c’est le choix effectué par Macron  : exonérer le capital financier, c’est-à-dire le liquide, aux dépens de l’immobilier, réputé improductif, car enraciné. Et comme s’il s’était aperçu du caractère scandaleux d’un tel choix, il a assorti la mesure d’un mensonge effronté  : «  si les gens ne réinvestissent pas, ils seront taxés  », ce qui est faux. À l’heure où nous écrivons, aucune mesure allant dans le sens d’un quelconque patriotisme économique n’est prévue dans le projet de budget. De plus, le serait-elle, que l’Europe nous interdirait de la destiner aux seuls investissements français. Macron n’est pas le président des riches, il est le président des nomades. Ce qui n’est pas la même chose. Il est le président de ceux pour qui le portefeuille tient lieu de patrie et qui habitent non pas une province, une nation – on peut être «  riche  » et patriote –, mais les résidences standardisées du village mondial – ou des paradis fiscaux. Mais comment la gauche, même insoumise, pourrait-elle le tacler sur ce point, alors que, tout aussi mondialiste, elle partage les présupposés, notamment immigrationnistes ou sociétaux, de son progressisme déraciné  ? Car la volonté de Macron, réaffirmée sur TF1, de légaliser la PMA «  pour toutes  » va dans le même sens d’une société ennemie de tous les enracinements et donc de toutes les identités. Aussi ne doit-on pas s’étonner de cet autre mensonge présidentiel  : «  Toutes celles et ceux qui, étrangers et en situation irrégulière, commettent des actes délictueux quels qu’ils soient, seront expulsés.  » Là encore, l’Europe, cette fois la Cour européenne des droits de l’homme, interdirait une telle systématicité, qui suppose, de plus, l’accord des pays d’origine. Or Macron n’a pas non plus évoqué un durcissement de notre politique étrangère en ce sens, lequel supposerait que nous nous réaffirmions sur le plan international autrement qu’en faisant élire une Française à la tête de l’Unesco au moment où les États-Unis quittent l’organisation, ou, surtout, qu’en recevant à Paris les JO de 2024… après le désistement de toutes les autres villes candidates.

    L’exemple de l’Autriche

    Ce même dimanche où Jupiter s’exprimait sur TF1, la victoire du Parti populaire autrichien (ÖVP) aux législatives, mené par Sebastian Kurz, lui a donné un sacré coup de vieux  ! Voilà que la jeunesse est du côté des conservateurs – à trente et un ans, Kurz sera le plus jeune dirigeant européen – et non du côté des nomades, dont le président se trouve quelque peu ringardisé. Car Kurz a gagné grâce à une campagne menée très à droite, anti-migrants, sans toutefois laminer les populistes du FPÖ, qui ont obtenu plus de 26  %, et avec lesquels il pourrait gouverner, sans que, cette fois, le Big Brother bruxellois s’en mêle comme en 2000. Comme quoi, les conservateurs autrichiens n’ont pas les pudeurs de jeune fille des Républicains français. De plus, le projet de Macron visant à refonder l’Europe a été totalement ignoré de la campagne électorale autrichienne  : il est en effet «  assez logique qu’au cours d’une campagne électorale nationale, aucun parti ne [veuille] discuter de la réduction des compétences nationales pour les passer à l’Union européenne  » (Peter Filzmaier, politologue, Le Monde, 15 octobre). Non que les conservateurs autrichiens soient eurosceptiques ou s’apprêtent sous peu à rejoindre le groupe de Visegrad. Mais, forts d’une vraie identité, ils placent l’Europe à sa juste place. Qui n’est pas la première. Les Autrichiens n’auront pas la chance, c’est vrai, d’avoir un «  pionnier  » à la «  pensée complexe  » pour chancelier. Ils auront juste un patriote.  

     

  • Cercle Lutétia : Aux origines de la Question sociale (1ère partie), par Jean-Philippe Chauvin.

    Le Cercle Lutétia a pour vocation de faire connaître les fondements et les raisons du royalisme et de la Monarchie en France, et d’étudier ceux-ci, avec l’aide des travaux et des réflexions menés sur la société française, ses évolutions et ses institutions, selon une perspective historique mais aussi et surtout politique. Le texte ci-dessous est la première partie d’un cercle d’études sur les origines de la question sociale en France, et il doit être l’occasion de discussions, de précisions ultérieures et de critiques constructives : il n’est donc qu’une ébauche, celle qui appelle à la formulation et à la rédaction d’une étude plus vaste et mieux construite sur cette question qui préoccupe tant nos contemporains et à laquelle les royalistes sociaux du Groupe d’Action Royaliste consacrent aussi tant de temps et d’énergie, dans leurs réunions et publications comme sur le terrain, dans la rue ou sur leur lieu de travail…

    jean philippe chauvin.jpgLorsqu’on évoque la question sociale en France, on oublie souvent ses racines, ses origines, son histoire tout simplement, et l’on se contente trop souvent de quelques idées reçues, confortant l’idée, largement fausse, que seule « la gauche » (1) s’y serait intéressée et s’y intéresserait encore, comme une sorte d’avant-garde revendiquée des travailleurs ou de la « classe ouvrière ». Mais il est tout à fait possible, et encore plus convaincant, de rétorquer que la première mention de la « justice sociale » est attribuée au… roi Louis XVI, celui-là même qui va affronter la tempête révolutionnaire et, malheureusement, être emportée par elle, tout comme l’édifice social et corporatif qui, jusque là, constituait un modèle original et une alternative véritable et tout à fait crédible au modèle anglosaxon pas encore totalement dominant quand il avait, pourtant, conquis déjà les esprits des nobles et des bourgeois éclairés, anglophiles et libéraux.

     

    Ce qui va nous intéresser aujourd’hui, c’est la recherche et l’évocation des origines de ce que l’on nomme la question sociale, trop souvent limitée, d’ailleurs, à la seule question ouvrière mais qu’il semble pourtant important, voire nécessaire, d’élargir à la question paysanne (2) qui concerne aussi, même si cela paraît moins vrai et sensible depuis les années 1960-80 (3), des communautés importantes (numériquement et socialement) et, sans doute, nécessaires dans une société équilibrée ou soucieuse de l’être.

     

    Mais, tout d’abord, il importe aussi de dresser un tableau de la France d’avant la Révolution française, cette révolution qui apparaît bien (à la suite « pratique » des Lumières), à travers quelques dates symboliques et très rapprochées dans le temps, comme la véritable matrice, le véritable et terrible creuset de cette question sociale devenue dès lors symbole de souffrances ouvrières, y compris jusqu’à aujourd’hui et au-delà de nos frontières, la mondialisation étant l’extension et l’imposition du modèle anglosaxon quand elle aurait pu être l’occasion d’un « autre modèle », plus social et respectueux des hommes comme des environnements…

     

    La France est un royaume qui compte, depuis la seconde moitié du XVIIIe siècle, plus de 25 millions d’habitants et, même, près de 28 millions d’habitants en 1789 : c’est la première puissance démographique d’Europe, devant la Russie pourtant territorialement beaucoup plus étendue, et elle est surnommée alors « la Chine de l’Europe ». Il est vrai que la France est la première à être entrée dans le processus de la transition démographique, pour des raisons qui tiennent largement à la politique même de la monarchie dite absolue : des routes sécurisées qui permettent une meilleure circulation des grains et subsistances, y compris en période de difficultés climatiques et alimentaires ; un territoire préservé des invasions étrangères depuis près d’un siècle et demi par la puissance militaire du roi de France…, autant d’éléments qui « complètent et valorisent » le radoucissement climatique général et le recul des mortalités infantile, enfantine et maternelle. (4)

     

    C’est une puissance économique importante mais Pierre Gaxotte résumera la situation paradoxale de la France des années 1780 par une formule simple et très évocatrice : « un pays riche, un Etat pauvre », et endetté, peut-on rajouter, sans que cela, d’ailleurs, atteigne forcément les proportions d’aujourd’hui… Et, à l’époque, la France apparaît comme la première puissance économique comme politique en Europe, ce qui n’est plus le cas depuis… la Révolution française !

     

    La richesse de la France n’est pas seulement liée à ses productions agricoles qui occupent (pour leur propre consommation d’abord) une grande partie de la population française vivant dans les campagnes (5), mais aussi à l’industrialisation naissante, beaucoup plus avancée et marquée avant 1789 que ce que l’Histoire officielle en retiendra, la Révolution ayant brisé ce premier élan « industrialisateur » par le désordre économique et politique de la période 1789-1799 en France.

     

    Dans le royaume des Louis et depuis le Moyen âge, l’organisation du travail est corporative et familiale, et ce sont les Métiers, les corps de métiers (ce que l’on nommera, tardivement, les corporations), nés tout au long de l’histoire des villes et des circonstances, qui ordonnent le monde du Travail et permettent d’assurer et d’assumer la qualité du travail comme la protection des travailleurs, quels que soient leur rang et place dans la hiérarchie professionnelle. Leur extraordinaire diversité et multiplicité empêche longtemps de leur donner une définition exacte, et c’est la « remise en ordre » royale, sous l’administration colbertiste et dans le cadre de sa stratégie, qui va permettre de mieux préciser le sens et la portée de ces corporations…

     

    Depuis Colbert, en effet, les corporations sont devenues l’un des éléments importants de la politique économique et sociale de l’Etat royal, non sans quelques grincements de dents parfois : l’objectif était de les rendre plus efficaces dans le cadre d’une stratégie plus globale de l’Etat central, en cours d’affirmation de plus en plus visible. C’est cet ordre corporatif, ce « modèle » même, qui va être attaqué sous les Lumières puis détruit définitivement (au moins juridiquement) lors de la Révolution française et par ceux-là mêmes qui se revendiquent des idées libérales des Lumières.

     

    (à suivre : révoltes sociales, revendications libérales et Monarchie d’Ancien Régime)

     

    Jean-Philippe Chauvin

     

     

    Notes : (1) : « la gauche », une notion difficile à définir exactement, et que revendiquent de nombreux groupes et personnes en excluant dans le même temps tous les autres qui s’en réclament aussi…

     

    (2) : la question paysanne semble bien être la mal-aimée de la gauche, beaucoup plus marquée et inspirée par le « modèle » urbain que par l’écosystème rural, ses composantes et ses équilibres, et la Révolution française nous donne quelques éléments probants de cette exclusion, qui tournera parfois à l’éviction de cette question par la persécution, voire l’extermination des paysans rétifs à la domination urbaine et bourgeoise, comme on pourra le constater dans les provinces de l’Ouest dans les premières années de la République jacobine.

     

    (3) : les travaux d’Henri Mendras n’hésitent pas à titrer sur « la fin des paysans »…

     

    (4) : l’étude de la démographie, quand elle est menée de façon rigoureuse et qu’elle n’oublie pas la pluralité des facteurs qui la font telle qu’elle est, éclaire fortement l’histoire des peuples et de leurs Etats respectifs, et il serait dommage de la négliger dans l’étude des pouvoirs et des institutions politiques, ceux-ci ayant, à l’origine, un devoir nourricier à l’égard de leurs sujets.

     

    (5) : certains historiens contemporains évoquent une « agriculture jardinière », qui reste très majoritaire sans être « unique » dans le royaume, et qui permet une auto-suffisance paysanne dans nombre d’endroits et le dégagement de quelques surplus écoulés sur les marchés urbains.

  • Sur le site officiel de l'Action française, Bustes pour mairies, l’éditorial de François Marcilhac.

    «  La Confédération générale du Travail est, elle-même, cause seconde et non cause première  ; elle emploie toutes les armes qu’elle possède pour se défendre, mais l’agression ne vient pas d’elle.

    L’agresseur, le coupable, le responsable, c’est le gouvernement de M. Clemenceau  ; avec lui et derrière lui, le régime démocratique, le régime républicain. Vérité que l’ouvrier parisien comprend désormais. La pendaison de Marianne devant la Bourse du travail est l’acte le plus significatif de notre histoire depuis le 14 juillet 1789. Bourgeois conservateurs, le comprendrez-vous ?  »

    françois marcilhac.jpgVoilà ce qu’écrivait Maurras dans L’Action Française du 4 août 1908, en réaction aux émeutes ouvrières de Draveil et de Vigneux et à la répression sanglante de Clemenceau, qui fit arrêter, dès le 1er août, des responsables de la CGT. Puis, commentant le fait que le président du Conseil, toutefois, ne prononce pas la dissolution du syndicat incriminé, il poursuit dans L’AF du 11 août suivant : «  M. Clemenceau ne dissout pas la Confédération parce que cet organisme prolétarien qui lui cause aujourd’hui une gêne cruelle, il compte bien l’utiliser dès qu’il sera sûr de l’avoir en main. […] Convenons-en. C’est la solution éternelle. Transformer les braconniers en gardes-chasses, métamorphoser les chemineaux en soldats, les bandits en soutiens de l’ordre est un des a b c de la politique. Seulement, ici, l’ordre à soutenir est un ordre démocratique et républicain.  »

    Il faudrait être un sot ou un fou pour ne pas comprendre toute l’actualité de ces propos de Maurras en pleine crise politique et sociale, déclenchée à la fois par le projet de loi sur les retraites, des grèves et manifestations impuissantes, avec  le « retenez-moi ou je fais un malheur  » de la CGT et la domestication de la CFDT, jusqu’au recours, par la préfecture de police, à ces auxiliaires du régime que sont devenus les antifâ — «  transformer les bandits en soutien de l’ordre  », comme l’écrivait Maurras  —, un débat pour la forme au Parlement — ainsi le veulent les institutions de la Ve République instaurant le parlementarisme rationalisé, c’est-à-dire impuissant —, enfin,  le recours pitoyable au 49-3 pour débloquer une prétendue obstruction parlementaire — plus de 137 000 amendements avaient été déposés en 2006 sur le projet de loi relatif à l’énergie sans que le gouvernement de l’époque recourût alors à cette arme institutionnelle prévue, aux origines de la Ve République, pour pallier les incertitudes d’une majorité chancelante. 

    Cette actualité, nos militants de la Ville Rose l’ont comprise, qui ont pendu l’effigie de Marianne, samedi, peu avant qu’Edouard Philippe n’annonce le recours au 49.3. Heureuse rencontre des événements ! Qui montre combien l’essentiel est désormais non pas tant dans la déliquescence, réelle, d’institutions arrivées à bout de souffle, que dans les causes de cette déliquescence : un pays légal dont l’illégitimité s’est étendue à l’ensemble des partis et des corps intermédiaires, incapables de sortir du schéma libéral et européiste dont le macronisme est la partie émergée. Les réactions outrées, à l’action symbolique de nos militants, du pays légal, de gauche comme de droite, voire du Rassemblement national, comme des associations subventionnées en dit long sur leur autisme : totalement déconnectés de la réalité sociale et politique actuelle, en dépit du soulèvement des gilets jaunes, dont les braises couvent toujours, ces apôtres de la Liberté demandent des sanctions judiciaires, pour la pendaison d’un poupée de chiffons, eux dont l’héritage est celui, toujours revendiqué, des guillotineurs de la Terreur et des premiers génocidaires de l’histoire contemporaine. Un autisme que nos militants de Nantes dénonçaient, pour leur part, deux jours auparavant, en matière de sécurité — réduite à un «  sentiment  » par nos élites protégées des beaux quartiers. 

    «  Contre un régime instable, irresponsable, à court terme et qui divise, contre une république centralisatrice soumise aux lobbies qui sacrifie le bien commun aux intérêts particuliers et à la démagogie, vite la Monarchie  ! Pour que vive la France, vive le roi  !  » Ainsi se sont exprimés nos militants, sur le pont franchissant la Garonne, tandis que, Marianne se balançait au-dessus de l’eau : «  Qu’on la pende pour voir un peu dinguer en croix / Sa vie horizontale et sa mort verticale !  », chantait Verlaine, dans son poème Bustes pour mairies… Du reste, les réactions politiques et la couverture de cette action n’ont pas manqué de faire réagir nos camarades  : «  Il est honteux et inquiétant que notre action potache d’hier ait davantage retenu l’attention des médias et élus républicains que notre action du 30 novembre dernier, qui visait à alerter sur le rachat américain de Latécoère, entreprise française, fleuron stratégique  », peut-on lire sur le compte d’Action française – Toulouse. Cela prouve «  que la République est trop faible pour défendre les intérêts de la France et préfère défendre aveuglément ses symboles et ses valeurs abstraites, au détriment des Français et du bien commun  ».

    Qu’ajouter, sinon que nos militants, partout en France, sont la  voix du pays réel. Un semblant d’opposition s’organise contre le passage constitutionnel en force du texte sur les retraites, que Macron veut voir adopté en première lecture avant les municipales…  Ce projet de loi impopulaire sera-t-il la goutte d’eau qui fait déborder le vase — sans compter l’incidence éventuelle de l’épidémie de coronavirus, pour le cas où le gouvernement ne se montrerait pas à la hauteur, ou en profiterait pour repousser des élections qui seront catastrophiques pour lui, en  dépit de l’alliance objective de LR — l’opposition Canada Dry —, comme au Havre où se présente Philippe ? 

    Les fondements de la société n’ont jamais été aussi attaqués, notre peuple n’a jamais été aussi menacé dans son unité même — politique, culturelle —, son identité et son honneur sont battus en brèche par des élites à l’écoute des forces de dissolution instaurant une préférence étrangère s’accompagnant de discours de haine à l’encontre de la France. Le socle économique s’effondre, tandis qu’on promet aux Français toujours davantage de sacrifices sous prétexte qu’ils ne travailleraient pas suffisamment ou vivraient au-dessus de leurs moyens — à moins que ce ne soit plutôt nos élites qui vivent au-dessus des moyens du pays réel. Chacun sent que cela ne peut plus durer ainsi encore longtemps. 

    L’Histoire est évidemment à la porte, mais nul ne sait encore quand elle frappera, ou plutôt, à quelle occasion elle frappera. C’est la raison pour laquelle il faut se tenir prêt. C’est la raison pour laquelle le comte de Paris, lui aussi, se tient prêt. Lui seul est disponible à relever le drapeau national car lui seul est légitime pour le faire. Il n’y a pas de «  en même temps  » en royauté. La légitimité ne se divise ni ne se multiplie. Elle est une. En ce centième anniversaire de la canonisation de Jeanne d’Arc et de la création de sa fête nationale — Jeanne qui sut ne se confier qu’au seul et unique Prince légitime pour redresser la France —, la confiance dans les ressorts du pays doit être notre seule boussole.

  • Vivre Libre ou Mourir, par Frédéric Winkler.

    Il suffit de faire croire aux individus qu'ils sont libres et ainsi les mettre dans les chaînes. Notre civilisation se meurt du bourrage de crâne médiatique du prêt à penser. Nos vies sont déjà gravement menacées par la nourriture dépourvue du nécessaire vital pour notre santé. Comment faire confiance à une société empoisonnant sa population à coup de pesticides et autres chimies sortant des mêmes laboratoires que les gaz de combat !
    Tandis que l’humus disparait progressivement de nos sols les rendant imperméable à toute vie. Redonnons au monde paysan le respect et la liberté de produire comme le faisaient leurs pères et arrêtons de les soumettre à l’esclavage du productivisme. Gilles Lartigot dans son livre EAT, nous interpelle en disant que « nous vivons dans une société toxique pour notre santé. La nourriture industrielle nous rend malade. La pollution, le stress et les produits chimiques font partie de notre quotidien. Ce sont des faits. Il est encore temps d’en réchapper… »

    frédéric winkler.jpgQue devrions nous dire devant la puissance financière pharmaceutique incitant la médecine vers la surconsommation de médicament, est-ce là le serment d’Hippocrate ? La médecine a-t-elle encore une âme ?
    Comment parler aussi de la souffrance du monde animal que l’on soumet au nom de notre consommation aux pires élevages et tortures. Nous ne l’accepterions pas pour des êtres humains, alors ?
    Que sont devenus nos cités, nos rues et la nature environnante, véritablement dépersonnalisés pour le plus grand profit du politiquement correcte. La disparition graduelle des espaces verts, au profit de bureaux et autres cages à poule faisant naître une jeunesse désœuvrée, écœuré et déracinée. Les programmes scolaires sont orientés et falsifiés idéologiquement pour être assénés en vue de l’esclavage de masse sombrant dans un monde chimérique de non existence.

    Tout cela répond-il aux impératifs d'une vie saine et équilibrée ?

    Environnement saccagé, valeurs humaines anéanties, nos vies et nos esprits sont manipulés : voilà ce qu’il convient d’attribuer à la logique de destruction de cette anti-civilisation. Le système s’attache à enlever toute transcendance aux actes de la vie, à anéantir toute valeur alors que les yeux vides de tout idéal on avance aveuglément, musique bruyante aux oreilles dans des délires conditionnés.
    La répression s’abat sur les citoyens quand ils n’acceptent pas d’être soumis alors que l’insécurité s'installe partout en toute impunité. La République devra répondre devant le tribunal de l’histoire pour nos libertés perdues. La puissance bureaucratique et l'inquisition fiscale règnent, c’est une vaste machine à broyer les énergies. La France fonctionnarisé détruit systématiquement la paysannerie, l'artisanat et le petit commerce.
    Proudhon se serait exclamé : contrôlés, étiquetés, amendés, noyautés, enrégimentés, écrasés, endettés et finalement révoltés, enfermés, parfois suicidés ou fusillés...
    Nous ne voulons pas être des numéros. Dans ce système antisocial, la consommation de calment augmente comme le taux de suicide, l’adversaire a pris la forme d’une mécanique implacable, servie par la toute –puissance de l’Etat. C’est ainsi que se construit une société programmée pour la consommation et aboutissant au spectacle permanent de la vie artificielle et idiote.
    Notre travail et nos impôts financent un système bancaire et économique injuste ? Les financiers et des traders sans morale continuent à s’engraisser. Les superprofits explosent alors que des millions de travailleurs se retrouvent sans emploi ? Le travail doit-il être géré comme une marchandise, il se délocalise loin des lieux d’origines avec son lot de déracinement et de misère.

    Est-il admissible de vivre ainsi ?

    Sommes-nous dignes de la sueur et du sang versé par nos pères. Avons-nous bien dans l'esprit l'importance et la profondeur de ce sacrifice pour nos libertés. Faut-il accepter de voir notre langue et nos traditions disparaître au profit d'une culture de supermarché standardisée. La résistance devient la question de survie dans l’exaspération poussée à ses limites...
    Doit-on, aujourd’hui, se contenter de subir sans réagir ?

    Cette république aux scandales incessants, laisse au pouvoir pour cinq ans des petits chefaillons issus des divers partis politique, afin que ceux-ci alimentent la division et la haine entre nous. Des hommes « responsables mais pas coupables » comme le dit la rengaine venus se servir et non servir. Ce triste quotidien, n’est pourtant pas une fatalité ! Nous faisons l’histoire et la destinée de tout un peuple dépend de notre implication. Les soi-disant révolutionnaires, comme une mode de « bobos », ne remettent pas en cause les fondements même du système. Ceux-ci finissent par servir la pieuvre étatique satisfaisant ainsi leurs contestations superficielles.
    On est loin du temps où chaque ville se développait en parfaite harmonie, où il y faisait bon vivre, travailler et s'amuser. L’autonomie vécue était basé sur le savoir-faire et la qualité, jamais consommateur n’aurait été floué comme aujourd’hui car les Corps de métier veillaient. C’est pour cela qu’il faut ouvrir les archives et s’y plonger afin d’y tirer les leçons de nos pères pour demain. Il faut être imperméable contre ce système dans notre vie social et citadine, cela peut paraître surprenant et même inutile aux yeux d’une multitude déjà soumise. L’individualisme, l’inconscience et l’absence de repères favorisent chez certains une vision parfois peu objective des difficultés que subit aujourd’hui notre pays et dont eux-mêmes en sont souvent les victimes. Redonnons à la France la clef de sa civilisation par un régime stable et durable au-dessus des partis et des lobbies et dont la destinée a pour seul objectif de la faire rayonner dans la modernité au service de son peuple.
    Un individu venant au monde dans notre civilisation trouve incomparablement plus qu’il n’apporte, la défense de cet héritage, devient pour nous une priorité fondamentale. Toute initiative, si minime soit-elle n’est jamais inutile que ce soit par la plume, par l’action et dans l’exemple. Nous conclurons en rappelant que la France à vue jaillir jadis dans ses malheurs des preux. Le général Weygand disait : « …Mais si les vivants comprennent et suivent la leçon des morts, leurs « immortels conseilleurs », ils resteront vigilants et ils ne consentiront pas à être faibles ».
    A nous d’être à la hauteur et inlassablement convaincre par l’exemple en retrouvant le sens de la vie communautaire. Nous ne savons pas dans l’avenir, comment l’histoire nommera ceux qui ont lutté pour sortir la France d’aujourd’hui des difficultés qu’elle subit. Espérons seulement qu’elle ne dise pas de nous, que nous avons laissé faire ! Levons nous comme nos ancêtres se sont dressés pour être libre.
    Et relisons la mise en garde de Thierry Maulnier : « Quand la vie nationale est menacée dans ses sources mêmes, elle ne se sauve plus que par le sursaut qui s’attaque aux principes du mal. Dès maintenant, il n’est plus permis de choisir entre la facilité et l’effort, entre la mollesse insidieuse des déclins tranquilles et les dures reconstructions. Si nous ne choisissons pas de réagir et de renaître, il nous faut choisir de sombrer… La situation de l’Europe, la misère présente, la guerre possible, nous annoncent que l’abaissement de la France ne serait pas paisible. De telles menaces doivent nous remplir d’espérance et de courage : puisque l’époque de l’inaction et de la douceur de vivre est passée, faisons en sorte que la rudesse de ce temps soit féconde ; les efforts, les risques de la renaissance ne sont pas plus grands, ils sont plus beaux que ceux de l’agonie. ».
    Cette nouvelle voie reste celle de la vie face aux déstabilisations et destructions humaines où nous entraîne un libéralisme sans frein guidé par le seul intérêt de l’argent. Nous préférons garder l’image d’une famille responsable qu’une société de consommation sans vie aux ordres d’un mondialisme inhumain. Bref la chance de l’élévation de l’homme et non celui de la soumission au matérialisme. Humblement, dans cette voie nouvelle, gardons à l’esprit la justice et l’humanisme qui nous font choisir, par essence écologique, les lys pour une voie royale. …
    Notre Jour Viendra !

    F.W

  • SOUTENEZ, PARTICIPEZ ! ACTIVITES DES ROYALISTES ET/OU DU PAYS REEL DANS TOUTE LA FRANCE...

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    Cette page est ouverte à tous, lafautearousseau se voulant "la maison commune" de tous les royalistes, de toute obédience (RN/CRAF, NAR, GAR, DEXTRA, indépendants/"électrons libres"...)

    Aux deux seules conditions que l'on soit dans la double fidélité à l'école de pensée de l'Action française et à notre Famille de France, à laquelle nous sommes particulièrement attachés...

    Envoyez-nous les annonces et/ou les visuels de réunions de rentrée, Cercles d'études et de formation, Cafés politique/actualité/histoire, manifestations diverses etc...

    Après avoir appuyé la grande manif du 6 octobre, lafautearousseau appuie les suivantes : Manifestations contre la PMA les 1er décembre 2019, 19 janvier, 8 mars, 17 mai et 14 juin 2020...

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    Colloque de l'Action Française : Au service de l’Ecologie intégrale.

    Samedi 9 Mai 2020, de 14h à 22h 

    Colloque organisé par Le bien commun, L’Incorrect et Politique magazine.

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    https://www.actionfrancaise.net/evenement/colloque-au-service-de-lecologie-integrale/

     

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    Y aurait-il, même venant de loin, pour l'occasion, des personnes désireuses de venir se faire "expliquer", même de dehors, dans la rue et devant le portail fermé, l'ensemble "maison/jardin/l'homme Maurras" : lafautearousseau peut vous recevoir et vous fournir toutes les explications nécessaires...

    Ces rencontres calmes, pacifiques, seraient l'occasion de manifester, sereinement mais publiquement, devant le portail de la maison de Maurras :

    1. Pour demander la ré-ouverture de la maison et la possibilité de la visiter, ou alors que la Mairie donne publiquement la raison de la fermeture du site, et un calendrier pour les travaux et sa réouverture à la visite...

    2. Pour demander le libre accès au jardin, en permanence...

    3. Et pour demander l'inscription de la très belle "maison de Maurras" au réseau des Maisons des Illustres, afin qu'elle devienne un grand centre intellectuel - national et international - de recherches sur Maurras, sa vie, sa personnalité, son oeuvre...

    Il vous suffit de nous contacter, et nous organiserons la chose ensemble, aussi souvent que des groupes se manifesteront...

     

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    • Conférences, Réunions, Cercles de formation, Manifestations diverses... dans la France entière...

     

    L'Action française Bourg en Bresse vous invite à son 1er cercle de formation dont le thème sera "Bases de la doctrine maurrassienne" animé par Stéphane Blanchonnet le Jeudi 27 Février à 19h30.

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    L'Action française Lyon vous invite à son cercle de formation dont le thème sera "Les médias" animé par un militant journaliste le Vendredi 28 Février à 19h00.

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    Lancement d'une nouvelle section en Alsace : Mulhouse ! Pour cette occasion une conférence sur "les doctrines d'Action française" sera faite sur place le Vendredi 28 Février à 20h00.

    Plus de renseignements (lieu, etc) par message privé ou par mail : strasbourg.etudiants@actionfrancaise.net.

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    L'Action française Toulouse vous invite à son cercle dont le thème sera "Maurras et le renouveau classique" animé par un universitaire, professeur de littérature le Vendredi 28 Février à 20h00.

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    Union Royaliste Provençale : L'Action française Toulon vous invite à son Cercle Pierre Debray dont le thème sera "La politique naturelle" (Partie 2) animé par François Davin fondateur et blogmestre de lafautearousseau le Mercredi 4 Mars à 20h00.

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    La Restauration Nationale Section des Hauts de Seine de l'Action Française vous convie à un Diner - débat dont le thème sera "Idées et doctrines de la Contre-révolution" animé par Pierre de Meuse le Jeudi 19 Mars à 20h00.

    PAF : 17 € (Etudiants et chômeurs) 27 € (Tarif normal)

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    L'Action française Chantilly vous invite à une conférence dont le thème sera "Les mystères de la Russie, du Dr Jivago à Vladimir Poutine" animée par Vladimir FEDOROVSKI, ancien diplomate, acteur et témoin des années charnières, le Lundi 6 Avril à 20h00.

    Chantilly, Hotel de ville, salle des conférences

    Renseignement : chantilly@actionfrancaise.net

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    • PARIS CERCLE DE FLORE

    à 20h,

    10 rue Croix des Petits Champs, 75001 Paris, Metro 1 et 7 : Palais Royal - Musée du Louvre.

    PAF : 5€ (conférence) 10 â‚¬ (conférence + buffet)

     

    Le Cercle de Flore recevra Gérard Leclerc Vendredi 28 Février Ã  20h00 pour une conférence hommage à Pierre Debray dont le thème sera "Une politique pour le XXIe siècle".

    Une séance de dédicace ainsi qu'un buffet suivront la conférence.

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    • Les Mardis de Politique magazine

     

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    • Cercle Jean BODIN - Lyon

    Page FB : https://www.facebook.com/cerclejeanbodin/

     

    Jeudi 27 Mars à 18h30, le Cercle Jean Bodin vous invite à une conférence dont le thème sera "Etat des forces armées françaises en 2020" animée par Thierry Fortin.

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    https://www.facebook.com/events/120678032677741/

     

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    GROUPE D'ACTION ROYALISTE (GAR)

     

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    DEXTRA

    Page  FB : https://www.facebook.com/dextra.franceenracinnee/

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    https://www.facebook.com/events/1541740739326835/

     

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    • Le Café Actualité d'Aix-en-Provence

     

    Le prochain café d'actualité d'Aix en Provence se tiendra le Jeudi 5 Mars.

    Attention!
     En raison de la fermeture pour travaux du café "Le Festival", notre prochain café se tiendra le Jeudi 5 Mars au restaurant Hippopotamus 1 avenue Victor Hugo situé de l'autre côté du Cours Mirabeau par rapport au "Festival".
     
    Nous accueillerons Danièle Masson, agrégée de l'Université qui a publié quelques livres dont :
    -Sisyphe ou l'illusion d'optique (1974)
    -Dieu est-il mort en Occident (?1998)
    -France chrétienne-France laïque (2008)
    -Eric Zemmour, itinéraire d'un insoumis (2018)
     
    Après avoir vu, dans nos séances précédentes, les idées et doctrines de la contre-révolution avec Pierre de Meuse et après avoir passé en revue les raisons "raisonnables d'espérer», 
     
    DaniÃ
  • Bernanos, pèlerin de l'absolu, par Frédéric Winkler.

    2737274333.34.jpgL’intellectuel imbécile : « Ceux qui m’ont déjà fait l’honneur de me lire savent que je n’ai pas l’habitude de désigner sous le nom d’imbécile les ignorants ou les simples.

    Bien au contraire.

    L’expérience m’a depuis longtemps démontré que l’imbécile n’est jamais simple, et très rarement ignorant.

    L’intellectuel devrait donc nous être, par définition, suspect ? Certainement.

    Je dis l’intellectuel, l’homme qui se donne lui-même ce titre, en raison des connaissances et des diplômes qu’il possède.

    Je ne parle évidemment pas du savant, de l'artiste ou de l'écrivain dont la vocation est de créer – pour lesquels l’intelligence n'est pas une profession, mais une vocation.

    frédéric winkler.jpgOui, dussé-je, une fois de plus, perdre en un instant tout le bénéfice de mon habituelle modération, j’irai jusqu’au bout de ma pensée. L’intellectuel est si souvent un imbécile que nous devrions toujours le tenir pour tel, jusqu'à ce qu`il nous ait prouvé le contraire. » (La France contre les robots)
    VIVRE LIBRE !
    Il est très attaché aux libertés comme pouvaient l’être d’ailleurs tout Français de l’ancien temps, qui jamais n’aurait accepté les contraintes étatiques d’aujourd’hui. Ecoutons-le en parler : « Capitalistes, fascistes, marxistes, tous ces gens-là se ressemblent. Les uns nient la liberté, les autres font encore semblant d'y croire, mais qu’ils y croient ou n'y croient pas, cela n'a malheureusement plus beaucoup d’importance, puisqu'ils ne savent plus s'en servir. Hélas ! le monde risque de perdre la liberté, de la perdre irréparablement, faute d'avoir gardé l'habitude de s'en servir...
    Ah ! n'attendez pas trop longtemps, ne laissez pas trop longtemps la machine merveilleuse exposée au vent, à la pluie, à la risée des passants ! Mais, surtout, ne la confiez pas aux mécaniciens, aux techniciens, aux accordeurs, qui vous assurent qu'elle a besoin d'une mise au point, qu'ils vont la démonter. Ils la démonteront jusqu'à la dernière pièce et ils ne la remonteront jamais !... Oui, cher lecteur, je crains que vous ne vous imaginiez-pas la Liberté comme de grands orgues, qu'elle ne soit déjà pour vous qu'un mot grandiose, tel que ceux de Vie, de Mort, de Morale, ce palais désert où vous n'entrez que par hasard, et dont vous sortez bien vite, parce qu'il retentit de vos pas solitaires. Lorsqu'on prononce devant vous le mot d'ordre, vous savez tout de suite ce que c'est, vous vous représentez un contrôleur, un policier, une file de gens auxquels le règlement impose de se tenir bien sagement les uns derrière les autres, en attendant que le même règlement les entasse pêle-mêle cinq minutes plus tard dans un restaurant à la cuisine assassine, dans un vieil autobus sans vitres ou dans un Wagon sale et puant. Si vous êtes sincère, vous avouerez peut-être même que le mot de liberté vous suggère vaguement l’idée du désordre – la cohue, la bagarre, les prix montant d'heure en heure chez l’épicier, le boucher, le cultivateur stockant son maïs, les tonnes de poissons jetées à la mer pour maintenir les prix. Ou peut-être ne vous suggérerait-il rien du tout, qu'un vide à remplir - comme celui, par exemple, de l’espace... Tel est le résultat de la propagande incessante faite depuis tant d'années par tout ce qui dans le monde se trouve intéressé à la formation en série d`une humanité docile, de plus en plus docile, à mesure que l’organisation économique, les concurrences et les guerres exigent une réglementation plus minutieuse. Ce que vos ancêtres appelaient des libertés, vous l'appelez déjà des désordres, des fantaisies. « Pas de fantaisies ! disent les gens d'affaires et les fonctionnaires également soucieux d'aller vite, le règlement est le règlement, nous n`avons pas de temps à perdre pour des originaux qui prétendent ne pas faire comme tout le monde... » (Bernanos, La France contre les robots). Il est de cette France qui, toujours fut « rebelle », fermement attachés à ces privilèges, que les siècles avaient transformés en droits, consignés dans le « Livre des métiers » d’Etienne Boileau pour ceux corporatifs et jurandes, dans les archives communales pour ceux des villes et actes notariés pour ceux des familles.
    « Le mot de civilisation évoquait jadis celui de sécurité. On imagine assez bien l'espèce de sécurité d'une civilisation forcée d'entretenir contre elle-même, à frais immense et au prix de ce qui lui reste de liberté, ce prodigieux réseau d'espionnage, afin d’être au moins prévenue cinq minutes à l'avance de son anéantissement total. L’humanité est visiblement obsédée par des images de mort, par l’image de sa propre mort, multipliée mille fois comme l’œil à facette des insectes. L'humanité a peur d'elle-même, peur de son ombre, peur de ses mains sur la table, peur du tiroir entr'ouvert où brille doucement le canon bien huilé du browning. Quand l’humanité restreint peu à peu, volontairement et comme inexorablement, sa part héréditaire de liberté, en affirmant qu'elle fait ce sacrifice à son bonheur futur, ne la croyez pas un instant l Elle sacrifie sa liberté à la peur qu'elle a d'elle-même. Elle ressemble à un obsédé du suicide qui, laissé seul le soir, se ferait lier dans son lit pour ne pas être tenté d'aller tourner le robinet du
    gaz. Mais, en même temps qu'elle se torture ainsi elle-même, apprenant à mieux se haïr comme l'auteur responsable de ses maux, son génie d'invention multiplie les instruments et les techniques de destruction. Cet aspect démentiel de l’histoire contemporaine hante évidemment tout le monde puisque le principe de cette folie, hélas ! est en chacun de nous. L’espèce de panique provoquée et entretenue par l'Absurde ressemblerait plutôt à la stupeur de l‘animal fasciné. A cette forme torpide d'angoisse, à cette anémie pernicieuse de l’âme, l'ancienne idéologie du Progrès, du bon Progrès, du Progrès comme le bon Dieu, n'apporterait qu'un poison de plus. » (Georges Bernanos. L'Esprit européen, La Liberté pour quoi faire ?) On comprend mieux ainsi toute l’étendue du principe de liberté, cher à l’esprit de Georges Bernanos. Un absolu ? Oui et c’est finalement ce que les grecs anciens désiraient dans leurs longues observations des systèmes politiques possibles pour les hommes. Il ne s’agit pas de créer une prétendue liberté dont on martèle les monuments, alors que les peuples ne les vivent qu’en rêves…
    « Le roi est un roi de chevalerie, de l’honneur qui défend la sainteté et la liberté. Pour Bernanos, la liberté est une valeur…L’homme de l’Ancien Régime, est l’homme libre par excellence. La Révolution française a fourvoyé la liberté. Mais l’idée de liberté brandie en 1789 n’a pas surgi en France par hasard. 1789 est l’insurrection de la liberté et le peuple de l’Ancien Régime est un peuple libre : le lien entre le Roi et lui était un contrat entre hommes libres. « La liberté pour quoi faire ? » dira-t-il plus tard, « mot hideux de Lénine ». La liberté se défend en même temps que l’héroïsme et la sainteté. Les religions séculières sont en train de tuer la liberté. Alors, dit Bernanos, on ne peut faire sa part au totalitarisme moderne. Bernanos n’admettra jamais certaines complaisances de l’Action française pour le fascisme mussolinien ou pour le franquisme. Pour lui, la monarchie française, c’est l’antifascisme. Un royaliste défend les valeurs que les démocrates prétendent défendre alors qu’elles ne leur appartiennent pas. Bernanos le crie à tous les royalistes : nous sommes les vrais défenseurs de la liberté ! » (Georges Bernanos, prophète en notre temps, conférence de Gérard Leclerc, 6/11/1974)
    FWinkler (http://boutique-royaliste.fr/index.php…) à suivre...

  • Une politique pour l'an 2000 de Pierre Debray (21)

    lfar bleu.jpgNous poursuivons la publication de notre série, dont la lecture expliquera à ceux qui ne l'ont pas connu le rôle intellectuel important de Pierre Debray à l'Action Française dans les années 1950-2000. 

    Cette analyse politique, économique, sociologique et historique, menée méthodiquement, à la maurrassienne, comporte de multiples enseignements, utiles aujourd'hui à notre école de pensée. Comme un stimulant de notre réflexion sur la situation présente de la France et sur l'action que nous avons à y mener.

    Même si le lecteur devra tenir compte des événements et des faits intervenus au cours des trois dernières décennies.  LFAR

    Immigration italienne dans les années 30 (Musée national de l'immigration)

     

    2235704335.jpg2ème partie : Une révolution copernicienne 

    LES NOUVELLES INVASIONS BARBARES

    Il ne reste plus grand temps. Si, dans la prochaine décennie, les Français continuent de subir un déclin démographique, ancien et profond, qui brutalement s'accélère depuis 1974, la vieille nation sortira de la scène de l'Histoire. Ce ne sera pas sous les bravos et les hourrahs. L'événement peut être daté avec une certaine précision. Il devrait se produire vers.2050, un peu plus tôt, un peu plus tard. En tout cas, tout se sera joué en l'an 2000. Le processus deviendra irréversible. Seules des circonstances fortuites, liées à des conflits locaux ou généralisés, pour l'heure imprévisibles, allongeront ou accourciront les délais.

    Nous sommes les derniers Français capables de renverser le destin. C'est une affaire de nombre. Le redressement temporaire du taux de fécondité qui a suivi la seconde guerre mondiale, s'est continué jusqu'en 1964 et n'a décliné que progressivement, jusqu'en 1974, fera sentir ses effets pendant une dizaine d'années encore. En 1982, on a commencé de fermer des classes, dans le primaire. On continue d'en ouvrir dans le secondaire. Jusqu'à la fin du siècle, à condition de commencer immédiatement, une moyenne de trois enfants par famille suffirait pour assurer la survie de la nation. Dans les décennies suivantes, compte tenu du nombre décroissant de femmes capables d'engendrer, il en faudrait quatre, puis cinq.

    Objectif réalisable, étant donné la fécondité naturelle de l'espèce mais qui supposerait, pour être atteint, une dictature de fer, à la chinoise. On peut imaginer qu'un régime totalitaire imposerait, à chaque couple, d'avoir, dans les délais requis, le nombre d'enfants indispensable !! Ceux qui feraient mieux seraient richement récompensés. Les défaillants, exclus de la fonction publique et du Parti unique, accablés d'impôts, mis au ban de la société, seraient privés du bénéfice des retraites, tout en supportant la charge. Il ne leur resterait pour échapper à la vindicte publique, que la ressource de l'insémination artificielle et de la location d'utérus. Il ne s'agit encore que de politique-fiction. Pourtant le moment approche où il ne restera plus d'autre choix, en dehors de la résignation à la servitude.

    Nous pouvons encore éviter le recours à un totalitarisme, qui s'accompagnerait nécessairement d'une idéologie raciste et xénophobe sans, pour autant, accepter la fatalité du déclin. Il faudrait une volonté politique. En avons-nous le désir ? Chacun semble occupé à défendre son niveau de vie, ses grands privilèges ou ses petits, ses intérêts corporatifs, son confort. Un pays qui se contente de vivre au jour le jour se rend incapable de penser à long terme.

    Pourtant, selon l'expression de M. Mitterrand, « c’est une question de survie » et M. Chirac évoque le moment où l'Europe ne pourra plus résister à la poussée des peuples pauvres et nombreux. Un Français sur cinq se montre sensible à la propagande de M. Le Pen, dont ses adversaires reconnaissent qu'elle pose « les vraies questions » tout en n'apportant pas les bonnes réponses. Certes, il ne suffit pas de prendre des mesures policières et de refouler les étrangers. Il est néanmoins difficile de contester que si notre génération n'adopte pas une politique cohérente, celle qui nous suit sera acculée à choisir entre l'Apartheid et la transformation en mosquée de Notre Dame de Paris. Pour ne pas déranger le sommeil des Français, les hommes politiques leur chantent des complaintes. Le 14 Novembre 1984, après sa fameuse déclaration sur « la question de survie » le Président de la République s'est borné à approuver des mesures empruntées à l'attirail, désormais classique, des « aides financières à la famille » d'une consternante mesquinerie. Quant aux propositions de l'opposition, elles témoignent d'un manque d'imagination que les difficultés économiques ne suffisent pas à expliquer.

    Les problèmes conjoints de la natalité et de l'immigration ne datent pas d'aujourd'hui. En 1911, déjà, les étrangers (en comptant les naturalisés de fraîche date) représentaient 3,3 % de la population française. Ce qui provoquait des rixes sanglantes à Marseille et dans le bassin minier du Nord, les syndicats ouvriers reprochant aux patrons de recruter à l'étranger des briseurs de grève et des travailleurs au rabais. L'opinion s'inquiétait déjà de l'insécurité dont elle tenait les immigrés pour responsables, de la charge qu'ils représentaient pour l'assistance publique, de leurs mœurs irrégulières. En 1911, précisément, Jacques Bertillon publiait un livre, « la dépopulation de la France » ; qui condamnait « la colonisation » du pays par les étrangers qui s'introduisaient librement dans notre pays.

    Ces dangers, rétrospectivement, paraissent dérisoires. Les immigrés, dans l'ensemble, se sont intégrés. Les mariages mixtes l'emportaient d'ailleurs sur ceux dont deux époux étaient étrangers. Mais d'où venaient ces travailleurs, qui acceptaient les tâches les plus pénibles et les moins bien payées, dont, déjà, les Français ne voulaient plus ? Des Belges, des Allemands, des Anglais et des Suisses jusqu'au milieu du XIXème siècle, puis de plus en plus d'Italiens, d'Espagnols, de Polonais, tous gens facilement assimilables.

    Le rayonnement de notre culture exerçait une véritable fascination. Devenir Français représentait une promotion sociale, ainsi qu'en témoignent Kessel ou Ikor. De fait, l'intégration provoquait en une génération, un alignement sur le mode de vie des Français de souche. La misère des premières années, qui engendrait la délinquance, la promiscuité sexuelle et les aides de l'assistance publique faisait place à une aisance relative, à la vie de famille, à la stabilité de l'emploi. L'école, publique ou privée, y contribuait pour une bonne part. Dans ma petite ville, le fils du « turc », qui vendait sa camelote en plein air, possède depuis longtemps une belle boutique, préside l'association des anciens élèves et s'est marié à une chrétienne.

    Bertillon, comme Guiot, criait au loup et s'il y en avait un, du moins, ne demandait-il qu'à se transformer en chien de garde. Aujourd'hui, le loup est d'une autre espèce. Il n'a pas l'intention de se laisser domestiquer. Nos avertissements risquent cependant de n'être pas pris au sérieux. Après tout, il est facile de nous objecter que nos craintes naissent, comme celles de M. Bertillon, d'un imaginaire corrompu par un racisme inconscient. Hitler ayant déshonoré l'antisémitisme, nous n'oserions plus nous attaquer aux Juifs et nous les remplacerions par les arabes, qui après tout, sont aussi, des sémites. Quelques groupuscules d'extrême droite, qui crient « la France aux Français » justifient les dénonciations vertueuses des grandes consciences de la gauche malthusienne. S'il n'y a plus de Français, ou trop peu, il faudra bien que la France soit à d'autres. Les grandes consciences malthusiennes, à leur insu, font le lit du racisme et de la xénophobie, qui, à leur tour, les confortent dans leur aveuglement. Il y a là un cercle vicieux, une dialectique qu'il convient de briser.

    Les mouvements migratoires sont aussi anciens que le genre humain. Ils constituent un facteur de progrès. Nos rois l'avaient si bien compris qu'ils encourageaient des travailleurs étrangers à venir travailler chez nous afin de nous enseigner des techniques que nous maitrisions mal. C'est ainsi que des paysans hollandais asséchèrent le marais poitevin. Qui serait assez fou pour soutenir que Madame Curie, parce que née Skodowska, n'a pas servi le prestige de la France ? D'ailleurs, les groupes humains, qu'isolèrent les conditions géographiques, sont demeurés à l'âge de pierre.   

    A suivre  (A venir : Les nouvelles invasions barbares 2).

     

    Lire les articles précédents ...

    Une politique pour l'an 2000 de Pierre Debray     

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    lafautearousseau

  • Aux origines de la question sociale en France. Partie 1 : Le royaume de France et la Monarchie avant 1789, par Jean-Phil

    Illustration : La saline royale d'Arc et Senans : ce qu'aurait pu être l'usine et la condition ouvrière sans la Révolution, qui a livré les travailleurs au Capital...

    Le Cercle Lutétia a pour vocation de faire connaître les fondements et les raisons du royalisme et de la Monarchie en France, et d’étudier ceux-ci, avec l’aide des travaux et des réflexions menés sur la société française, ses évolutions et ses institutions, selon une perspective historique mais aussi et surtout politique. Le texte ci-dessous est la première partie d’un cercle d’études sur les origines de la question sociale en France, et il doit être l’occasion de discussions, de précisions ultérieures et de critiques constructives : il n’est donc qu’une ébauche, celle qui appelle à la formulation et à la rédaction d’une étude plus vaste et mieux construite sur cette question qui préoccupe tant nos contemporains et à laquelle les royalistes sociaux du Groupe d’Action Royaliste consacrent aussi tant de temps et d’énergie, dans leurs réunions et publications comme sur le terrain, dans la rue ou sur leur lieu de travail…

    jean philippe chauvin.jpgLorsqu’on évoque la question sociale en France, on oublie souvent ses racines, ses origines, son histoire tout simplement, et l’on se contente trop souvent de quelques idées reçues, confortant l’idée, largement fausse, que seule « la gauche » (1) s’y serait intéressée et s’y intéresserait encore, comme une sorte d’avant-garde revendiquée des travailleurs ou de la « classe ouvrière ». Mais il est tout à fait possible, et encore plus convaincant, de rétorquer que la première mention de la « justice sociale » est attribuée au… roi Louis XVI, celui-là même qui va affronter la tempête révolutionnaire et, malheureusement, être emportée par elle, tout comme l’édifice social et corporatif qui, jusque là, constituait un modèle original et une alternative véritable et tout à fait crédible au modèle anglosaxon pas encore totalement dominant quand il avait, pourtant, conquis déjà les esprits des nobles et des bourgeois éclairés, anglophiles et libéraux.

     

    Ce qui va nous intéresser aujourd’hui, c’est la recherche et l’évocation des origines de ce que l’on nomme la question sociale, trop souvent limitée, d’ailleurs, à la seule question ouvrière mais qu’il semble pourtant important, voire nécessaire, d’élargir à la question paysanne (2) qui concerne aussi, même si cela paraît moins vrai et sensible depuis les années 1960-80 (3), des communautés importantes (numériquement et socialement) et, sans doute, nécessaires dans une société équilibrée ou soucieuse de l’être.

     

    Mais, tout d’abord, il importe aussi de dresser un tableau de la France d’avant la Révolution française, cette révolution qui apparaît bien (à la suite « pratique » des Lumières), à travers quelques dates symboliques et très rapprochées dans le temps, comme la véritable matrice, le véritable et terrible creuset de cette question sociale devenue dès lors symbole de souffrances ouvrières, y compris jusqu’à aujourd’hui et au-delà de nos frontières, la mondialisation étant l’extension et l’imposition du modèle anglosaxon quand elle aurait pu être l’occasion d’un « autre modèle », plus social et respectueux des hommes comme des environnements…

     

    La France est un royaume qui compte, depuis la seconde moitié du XVIIIe siècle, plus de 25 millions d’habitants et, même, près de 28 millions d’habitants en 1789 : c’est la première puissance démographique d’Europe, devant la Russie pourtant territorialement beaucoup plus étendue, et elle est surnommée alors « la Chine de l’Europe ». Il est vrai que la France est la première à être entrée dans le processus de la transition démographique, pour des raisons qui tiennent largement à la politique même de la monarchie dite absolue : des routes sécurisées qui permettent une meilleure circulation des grains et subsistances, y compris en période de difficultés climatiques et alimentaires ; un territoire préservé des invasions étrangères depuis près d’un siècle et demi par la puissance militaire du roi de France…, autant d’éléments qui « complètent et valorisent » le radoucissement climatique général et le recul des mortalités infantile, enfantine et maternelle. (4)

     

    C’est une puissance économique importante mais Pierre Gaxotte résumera la situation paradoxale de la France des années 1780 par une formule simple et très évocatrice : « un pays riche, un Etat pauvre », et endetté, peut-on rajouter, sans que cela, d’ailleurs, atteigne forcément les proportions d’aujourd’hui… Et, à l’époque, la France apparaît comme la première puissance économique comme politique en Europe, ce qui n’est plus le cas depuis… la Révolution française !

     

    La richesse de la France n’est pas seulement liée à ses productions agricoles qui occupent (pour leur propre consommation d’abord) une grande partie de la population française vivant dans les campagnes (5), mais aussi à l’industrialisation naissante, beaucoup plus avancée et marquée avant 1789 que ce que l’Histoire officielle en retiendra, la Révolution ayant brisé ce premier élan « industrialisateur » par le désordre économique et politique de la période 1789-1799 en France.

     

    Dans le royaume des Louis et depuis le Moyen âge, l’organisation du travail est corporative et familiale, et ce sont les Métiers, les corps de métiers (ce que l’on nommera, tardivement, les corporations), nés tout au long de l’histoire des villes et des circonstances, qui ordonnent le monde du Travail et permettent d’assurer et d’assumer la qualité du travail comme la protection des travailleurs, quels que soient leur rang et place dans la hiérarchie professionnelle. Leur extraordinaire diversité et multiplicité empêche longtemps de leur donner une définition exacte, et c’est la « remise en ordre » royale, sous l’administration colbertiste et dans le cadre de sa stratégie, qui va permettre de mieux préciser le sens et la portée de ces corporations…

     

    Depuis Colbert, en effet, les corporations sont devenues l’un des éléments importants de la politique économique et sociale de l’Etat royal, non sans quelques grincements de dents parfois : l’objectif était de les rendre plus efficaces dans le cadre d’une stratégie plus globale de l’Etat central, en cours d’affirmation de plus en plus visible. C’est cet ordre corporatif, ce « modèle » même, qui va être attaqué sous les Lumières puis détruit définitivement (au moins juridiquement) lors de la Révolution française et par ceux-là mêmes qui se revendiquent des idées libérales des Lumières.

     

     

     

    (à suivre : révoltes sociales, revendications libérales et Monarchie d’Ancien Régime)

     

     

    Notes : (1) : « la gauche », une notion difficile à définir exactement, et que revendiquent de nombreux groupes et personnes en excluant dans le même temps tous les autres qui s’en réclament aussi…

    (2) : la question paysanne semble bien être la mal-aimée de la gauche, beaucoup plus marquée et inspirée par le « modèle » urbain que par l’écosystème rural, ses composantes et ses équilibres, et la Révolution française nous donne quelques éléments probants de cette exclusion, qui tournera parfois à l’éviction de cette question par la persécution, voire l’extermination des paysans rétifs à la domination urbaine et bourgeoise, comme on pourra le constater dans les provinces de l’Ouest dans les premières années de la République jacobine.

    (3) : les travaux d’Henri Mendras n’hésitent pas à titrer sur « la fin des paysans »…

    (4) : l’étude de la démographie, quand elle est menée de façon rigoureuse et qu’elle n’oublie pas la pluralité des facteurs qui la font telle qu’elle est, éclaire fortement l’histoire des peuples et de leurs Etats respectifs, et il serait dommage de la négliger dans l’étude des pouvoirs et des institutions politiques, ceux-ci ayant, à l’origine, un devoir nourricier à l’égard de leurs sujets.

    (5) : certains historiens contemporains évoquent une « agriculture jardinière », qui reste très majoritaire sans être « unique » dans le royaume, et qui permet une auto-suffisance paysanne dans nombre d’endroits et le dégagement de quelques surplus écoulés sur les marchés urbains.

  • Bernanos.............Quelle civilisation ?, par Frédéric Winkler.

    Les Etats démocratiques sont des Etats lâches comme dictatoriales si l’on regarde bien que ceux dénoncés comme tels : « beaucoup plus égalitaires que libertaires ». En 1947, terminant une conférence à la Sorbonne, des journalistes américains le décrivaient comme un apôtre d’une humanité pacifiée, il rétorqua : « Mais je n’ai pas changé ! C’est la démocratie qui qui nous a assassinés ! Les totalitarismes sont les fils de la démocratie ! J’emmerde la démocratie ! »

    frédéric winkler.jpg« En 1950... à quoi bon ? Vous resterez bouche bée, imbéciles, devant des destructions encore inconcevables à l'instant où j'écris ces lignes, et vous direz exactement ce que vous dites aujourd'hui, vous lirez dans les journaux les mêmes slogans mis définitivement au point pour les gens de votre sorte, car la dernière catastrophe a comme cristallisé l'imbécile ; l’imbécile n'évoluera plus désormais, voilà ce que je pense; nous sommes désormais en possession d'une certaine espèce d'imbécile capable de résister à toutes les catastrophes jusqu'à ce que cette malheureuse planète soit volatilisée, elle aussi, par quelque feu mystérieux dont le futur inventeur est probablement un enfant au maillot. N'importe ! Parce que l'homme de 1870 dénonçait à la conscience universelle le vol des pendules, nous n'avons nullement le droit de conclure qu'il n’était pas capable de lâcher sur les villes endormies des fleurs de dix mille kilos. Il ne croyait pas une pareille saloperie possible, voilà tout. Et si l'idée lui en était venue par hasard, il n’y aurait pas arrêté son esprit. « Ce sont, eût-il dit, des choses qui ne se font pas » … Au cours de plusieurs millénaires le nombre des choses qui ne se font pas n'a guère varié. Mais depuis cinquante ans, la liste en a presque été réduite à rien... » (La France contre les robots)
    Les nombreux écrits de Bernanos nous font comprendre, combien ses préoccupations étaient annonciatrices des drames présents. Il était précurseur pour notre temps : « Nos ancêtres se sont servis d`une pierre tenue au creux de la main en guise de marteau, jusqu'au jour où, de perfectionnement en perfectionnement, l'un d'entre eux imagina de fixer la pierre au bout d'un bâton. Il est certain que cet homme de génie, dont le nom n'est malheureusement pas venu jusqu'à nous, inventa le marteau pour s'en servir lui-même, et non pour en vendre le brevet à quelque société anonyme. Ne prenez pas ce distinguo à la légère. Car vos futures mécaniques fabriqueront ceci ou cela, mais elles seront d'abord et avant tout, elles seront naturellement, essentiellement, des mécaniques à faire de l'or. Bien avant d’être au service de l’humanité, elles serviront les vendeurs et les revendeurs d’0r, c'est-à-dire les spéculateurs, elles seront des instruments de spéculation. Or, il est beaucoup moins avantageux de spéculer sur les besoins de l’homme que sur ses vices, et, parmi ces vices, la cupidité n`est-elle pas le plus impitoyable ? L’argent tient plus étroitement à nous que notre propre chair. Combien donnent volontiers leur fils au Prince, et tirent honneur du trépas de leur enfant, qui refuseraient à l’Etat leur fortune tout entière, ou même une part de leur fortune ! Je prédis que la multiplication des machines développera d`une manière presque inimaginable l’esprit de cupidité. De quoi cet esprit ne sera-t-il pas capable ? » (La France contre les robots). Cette « société des machines » est évidemment le fruit du capitalisme. Elle draine la spéculation, l’usure, l’injustice : « Bref, le jour où la superproduction menacera d'étouffer la spéculation sous le poids sans cesse accru des marchandises invendables, vos machines à fabriquer deviendront des machines à tuer, voilà ce qu'il est très facile de prévoir. Vous me direz peut-être qu'un certain nombre d'expériences malheureuses finira par convaincre les spéculateurs, au point de les rendre philanthropes. Hélas ! il est pourtant d'expérience universelle qu’aucune perte n`a jamais guéri un vrai joueur de son vice ; le joueur vit plus de ses déceptions que de ses gains. Ne répondez pas que les gros spéculateurs seront tôt ou tard mis à la raison par la foule des petites gens. L’esprit de spéculation gagnera toutes les classes. Ce n'est pas la spéculation qui va mettre ce monde à bas, mais la corruption qu`elle engendre. Pour nous guérir de nos vices, ou du moins pour nous aider à les combattre, la crainte de Dieu est moins puissante que celle du jugement de notre prochain, et, dans la société qui va naître, la cupidité ne fera rougir personne. Lorsque l’argent est honoré, le spéculateur l’est aussi. Il aura donc beaucoup plus à craindre l’envie que le mépris ; n'espérons donc pas le réveil des consciences. Quant à la révolte des intérêts, on a tout lieu de prévoir qu'elle ne pourra éclater qu`après un grand nombre de crises et de guerres si effroyables qu'elles auront usé à l’avance les énergies, endurci les cœurs, détruit chez la plupart des hommes les sentiments et les traditions de la liberté. Les spéculateurs seront alors si nombreux, si puissants, que les peuples désespérés ne sauront plus qu'opposer un seul Tyran à cent mille. Disposant des mécaniques, le Tyran, aussi longtemps que durera sa puissance, paraîtra moins un homme qu'un demi-dieu. Mais il faudra que, tôt ou tard. L’or le corrompe à son tour. Car, dans les circonstances les plus favorables, un homme ne saurait être plus qu'un demi-dieu. Mais l'or, lui, sera Dieu. » (La France contre les robots)
    Comment peut-on défendre la société mercantile, à moins d’y avoir quelques intérêts en affaire ! Bernanos conscient du mal que la « civilisation des machines » amène, tente d’analyser les périls avec toutes ses conséquences. « Evidemment, aucun Européen du XVIIIe n'aurait tenu ce langage, et c`est précisément ce qui me serre le cœur en écrivant ces lignes, aujourd'hui sans intérêt. Ceux qui voient dans la civilisation des Machines une étape normale de l'Humanité en marche vers son inéluctable destin devraient tout de même réfléchir au caractère suspect d`une civilisation qui semble bien n'avoir été sérieusement prévue ni désirée, qui s’est développée avec une rapidité si effrayante qu'elle fait moins penser à la croissance d'un être vivant qu’à l'évolution d'un cancer. » (La France contre les robots). Il n’hésite pas à comparer la société d’Ancien régime avec cet « aujourd’hui », issu de 1789, afin de montrer le terrible déclin, non seulement civilisationnel mais humaniste. Mais pas seulement car il nous amène à réfléchir sur les fondements même de la richesse. La conception civilisationnelle d’avant, basés sur du concret : le bon, le vrai, le beau, sur la permanence de la terre comme de la pierre, sur la continuité de l’homme par la juste acquisition de biens permettant à sa famille de durer… « Voilà par exemple un Français né vers 1770. Le mot de fortune évoque à son esprit un certain nombre d’idées traditionnelles. Des étendues de terres fertiles, peu à peu rassemblées par le travail des générations successives, des héritages et des alliances. N’est-ce pas ainsi que les rois de trois dynasties ont rassemblé la France ? Oh ! j'attends ici votre objection, il me semble que je la lis dans vos yeux. Vous croyez que je prétends vous imposer, en passant, une image bucolique de l’ancien régime. Nullement. J’accorde, avant d’aller plus loin, que ces fortunes avaient, elles aussi, leur part d’injustices, ou même de crimes. Mais ces injustices et ces crimes étaient des injustices particulières commises contre tel ou tel. Leurs plus lointains bénéficiaires pouvaient en ressentir du remords ou de la honte et d’une manière ou d’une autre, être au moins tentés de les réparer. Ce n'étaient pas des injustices et des crimes indéterminés, anonymes, auxquels s'associent secrètement, honteusement, des milliers d’obligataires ou d'actionnaires… » (La France contre les robots). Il va à travers son ouvrage expliquer tous les dangers, tel un prophète, de ce que nous vivons et voyons poindre dans un horizon proche. Une terrible décadence de l’homme se met en place. Le pire des esclavages qu’aucun siècle n’avait connu, dans une acceptation « imbécile » des hommes, abandonnant, petit à petit, leurs espaces de liberté, pour un Etat tentaculaire. Nos ancêtres n’auraient jamais pu imaginer qu’un jour, les hommes puissent ainsi vivre dans cette soumission à l’objet. Un assistanat librement consenti dans un monde consumériste, par le jeu des médias, du crédit, de la virtualité, de la « jouissance » programmée faisant des hommes, non plus des acteurs mais des voyeurs ! La peur du chômage, la vie dépendante du « prêt à penser » castratif, le besoin du consensus permanent, un avant-goût d’une finalité humaine pronostiquée par Orwell et Huxley, voilà contre quoi Bernanos nous met en garde : « La Civilisation des Machines a besoin, sous peine de mort, d'écouler l'énorme production de sa machinerie et elle utilise dans ce but – pour employer l’expression vengeresse inventée au cours de la dernière guerre mondiale par le génie populaire - des machines à bourrer le crâne. Oh ! je sais, le mot vous fais sourire. Vous n’êtes plus sensible au caractère réellement démoniaque de cette énorme entreprise d’abêtissement universel, où l’on voit collaborer les intérêts les plus divers, des plus abjects au plus élevés - car les religions utilisent déjà les slogans. Politiciens, spéculateurs, gangsters, marchands, il ne s'agit que de faire vite, d'obtenir le résultat immédiat, coûte que coûte, soit qu'il s’agisse de lancer une marque de savon, ou de justifier une guerre, ou de négocier un emprunt de mille milliards. Ainsi les bons esprits s'avilissent, les esprits moyens deviennent imbéciles, et les imbéciles, le crâne bourré à éclater, la manière cérébrale giclant par les yeux et par les oreilles, se jettent les uns sur les autres en hurlant de rage et d’épouvante ». (Georges Bernanos, La France contre les robots).

    FWinkler (http://boutique-royaliste.fr/index.php…) à suivre...

  • Sur Figaro Vox, Michel Maffesoli : «La crise du Coronavirus ou le grand retour du tragique».

    Des cercueils dans une église de Serina, près de Bergamo en Italie, le pays le plus touché par la pandémie. 21 mars 2020 PIERO CRUCIATTI/AFP

    La pandémie de coronavirus ébranle l’idéologie progressiste des sociétés modernes et sa prétention à tout résoudre, analyse le sociologe Michel Maffesoli.

    Michel Maffesoli est sociologue et professeur émérite à la Sorbonne. Il a récemment publié Être postmoderne (Cerf, 2018) et Le temps des tribus: le déclin de l’individualisme dans les sociétés postmodernes (Table ronde, 2019).

    2.jpgSans craindre les foudres d’une intelligentsia apeurée, on ne dira jamais assez que nous assistons à la décadence inéluctable de la modernité. Fin d’un monde se manifestant, au quotidien, dans une dégénérescence intellectuelle, politique, sociale dont les symptômes sont de plus en plus évidents.

    Dégénérescence de quoi, sinon du mythe progressiste? Corrélativement à l’idéologie du service public, ce progressisme s’employait à justifier la domination sur la nature, à négliger les lois primordiales de celle-ci et à construire une société selon les seuls principes d’un rationalisme abstrait dont l’aspect morbide apparaît de plus en plus évident. Les réformes dites «sociétales» (mariage pour tous, PMA-GPA, etc.) en étant les formes caricaturales.

    Le concept hégélien de « dépassement » est le maître mot de la mythologie progressiste.

    Le point nodal de l’idéologie progressiste, c’est l’ambition voire la prétention de tout résoudre, de tout améliorer afin d’aboutir à une société parfaite et à un homme potentiellement immortel.

    Qu’on le sache ou non, la dialectique: thèse, antithèse, synthèse est le mécanisme intellectuel dominant. Le concept hégélien de «dépassement» (Aufhebung), est le maître mot de la mythologie progressiste. C’est stricto sensu, une conception du monde «dramatique», c’est-à-dire reposant sur la capacité à trouver une solution, une résolution permettant d’accéder à la perfection à venir.

    Il est une formule de K. Marx qui résume bien une telle mythologie: «L’humanité ne se pose jamais que les problèmes qu’elle peut résoudre.» Ambition, prétention de tout maîtriser. Et que l’on veuille ou non le reconnaître, il existe, gauche et droite confondues, une véritable «marxisation» des esprits. L’élite moderne: politiques, journalistes et divers experts, est contaminée par cette prétention quelque peu paranoïaque. Dans un avenir, plus ou moins proche, l’on arrivera à réaliser une société parfaite!

    Dans le balancement inexorable des histoires humaines, c’est le sentiment du tragique de la vie qui, à nouveau, tend à prévaloir.

    C’est bien cette conception dramatique, donc optimiste qui est en train de s’achever. Et, dans le balancement inexorable des histoires humaines, c’est le sentiment du tragique de la vie qui, à nouveau, tend à prévaloir. Le dramatique, je l’ai dit, est résolument optimiste. Le tragique est aporique, c’est-à-dire sans solution. La vie est ce qu’elle est.

    Plutôt que de vouloir dominer la nature, on s’accorde à elle. Selon l’adage populaire, «on ne commande bien la nature qu’en lui obéissant.» La mort, dès lors, n’est plus ce que l’on pourra dépasser. Mais ce avec quoi il convient de s’accorder.

    Voilà ce que rappelle, en majeur, la «crise sanitaire». La mort pandémique est le symbole de la fin de l’optimisme propre au progressisme moderne. On peut le considérer comme une expression du pressentiment, quelque peu spirituel, que la fin d’une civilisation peut être une délivrance et, en son sens fort, l’indice d’une renaissance. Indice, «index», ce qui pointe la continuité d’un vitalisme essentiel!

    Cette mort omniprésente rappelle dans sa concrétude que c’est un ordre des choses qui est en train de s’achever.

    La mort possible, menace vécue quotidiennement, réalité que l’on ne peut pas nier, que l’on ne peut plus dénier, la mort qu’inexorablement l’on est obligé de comptabiliser, cette mort, omniprésente, rappelle dans sa concrétude que c’est un ordre des choses qui est en train de s’achever.

    Ce qui est concret, je le rappelle: cum crescere, c’est ce qui «croît avec», avec un réel irréfragable. Et ce réel c’est la mort de cet «ordre des choses» ayant constitué le monde moderne!

    Mort de l’économicisme dominant, de cette prévalence de l’infrastructure économique cause et effet d’un matérialisme à courte vue.

    Mort d’une conception purement individualiste de l’existence. Certes, les élites déphasées continuent à émettre des poncifs du type «compte tenu de l’individualisme contemporain», et autres sornettes de la même eau. Mais l’angoisse de la finitude, finitude dont on ne peut plus cacher la réalité, incite, tout au contraire, à rechercher l’entraide, le partage, l’échange, le bénévolat et autres valeurs du même acabit que le matérialisme moderne avait cru dépasser.

    Encore plus flagrant, la crise sanitaire signe la mort de la mondialisation, valeur dominante d’une élite obnubilée par un marché sans limites, sans frontières où, là encore, l’objet prévaut sur le sujet, le matériel sur le spirituel.

    Souvenons-nous de la judicieuse expression du philosophe Georg Simmel, rappelant que le bon équilibre de toute vie sociale est l’accord devant exister entre le «pont et la porte». Le pont nécessaire à la relation, et la porte relativisant cette relation afin d’accéder à une harmonie bénéfique pour tout un chacun.

    Face à la mort omniprésente, est rappelée la nécessité de la solidarité propre à un « idéal communautaire ».

    C’est ce que j’ai appelé «Écosophie», sagesse de la maison commune. En termes plus familiers, il s’agit de reconnaître que «le lieu fait lien». Toutes choses rappelant qu’à l’encontre du leitmotiv marxiste: «l’air de la ville rend libre», formule archétypale du déracinement, la glèbe natale retrouve une force et vigueur indéniables.

    Enracinement dynamique rappelant que, comme toute plante, la plante humaine a besoin de racines pour pouvoir croître, avec force, justesse et beauté! Ainsi face à la mort on ne peut plus présente, est rappelée la nécessité de la solidarité propre à un «idéal communautaire» que certains continuent à stigmatiser en le taxant, sottement, de communautarisme.

    La mort de la civilisation utilitariste où le lien social est à dominante mécanique, permet de repérer la réémergence d’une solidarité organique. Organicité que la pensée ésotérique nomme «synarchie». Ce qu’avait également bien analysé Georges Dumézil en rappelant l’interaction et l’équilibre existant, à certains moments, entre les «trois fonctions sociales».

    La fonction spirituelle, fondant le politique, le militaire, le juridique et aboutissant à la solidarité sociétale. Ainsi, au-delà d’une suradministration déconnectée du Réel, c’est bien un tel holisme que l’on voit resurgir de nos jours.

    Mais la prise en compte d’une telle synarchie organique nécessite que l’on sache le dire avec les mots étant le plus en pertinence avec le temps. Il est amusant, il vaudrait mieux dire désolant, de lire sous la plume de la plupart des observateurs sociaux que la situation est dramatique et quelques lignes plus loin parler de son aspect tragique. Ce qui montre bien que la formule de Platon est toujours d’actualité: «la perversion de la cité commence par la fraude des mots!»

    Le « tragique » s’accorde à la mort. Il sait, d’un savoir incorporé, savoir propre à la sagesse populaire, vivre la mort de tous les jours.

    La conception «dramatique» est le propre d’une élite croyant trouver à tout une solution opportune. Le «tragique», bien au contraire, s’accorde à la mort. Il sait, d’un savoir incorporé, savoir propre à la sagesse populaire, vivre la mort de tous les jours.

    Voilà en quoi la crise sanitaire porteuse de mort individuelle est l’indice d’une crise civilisationnelle, celle de la mort d’un paradigme progressiste ayant fait son temps. Peut-être est-ce cela qui fait que le tragique ambiant, vécu au quotidien, est loin d’être morose, conscient qu’il est d’une résurrection en cours. Celle où dans l’être-ensemble, dans l’être- avec, dans le visible social, l’invisible spirituel occupera une place de choix.

  • Le 2 Décembre : se délivrer de la « napoléonite » …. par Christian Vanneste

    1031116395.jpg"Trois invasions : deux pour l'oncle, une pour le neveu, voilà une famille qui a coûté cher à la France" disait Jacques Bainville, en parlant des Napoléon.

    Dans ce remarquable article, magistral résumé du "stupide XIXème siècle" (comme le disait Léon Daudet) et de la non moins stupide Napoléo-mania, on croit lire du Bainville dans le texte, mais c'est bien Vanneste qui parle : Vanneste qui a  manifestement lu et, surtout, compris, digéré, assimilé le grand, l'immense Jacques Bainville...

    Mais on y retrouve aussi le Maurras, qui écrivit "Les Princes des Nuées", et de nouveau le Bainville qui avait expliqué "le chef-d'oeuvre absolu" que furent les Traités de Westphalie : une Royauté française qui travaillait à la paix pour la France, dans le sens de ses intérêts vitaux et du Bien commun, alors qu'Encyclopédistes, révolutionnaires, républicains et impérialistes voulurent et firent, follement, l'unité de l'Allemagne, ce qui revenait à travailler "en intelligence avec l'ennemi" : "..Avec application, ils (les deux Napoléon, ndlr) ont permis la réunification de l’Allemagne et de l’Italie que les Bourbons avaient morcelées le plus possible à nos portes..." écrit, lapidaire, Christian Vanneste

    La page facebook de lafautearousseau est très fière de compter Christian Vanneste au nombre de ses "amis"...

    3309368304.jpgLe 2 Décembre est une date « bonapartiste ». Couronnement de l’Empereur Napoléon 1er, en 1804, victoire d’Austerlitz en 1805, et coup d’Etat en 1851 qui va permettre au neveu de devenir Napoléon III.

    Cette date est toutefois revêtue d’une certaine ambiguïté. On ne se risquerait guère à célébrer l’anniversaire du renversement militaire de la IIe République. L’actuelle rue du 4 Septembre à Paris a été dénommée en 1870, en remplacement de « rue du 10 Décembre ». Tout un symbole de l’histoire agitée de notre pays au XIXe siècle : Napoléon III ce grand bâtisseur dans la capitale, et urbaniste en grande partie du Paris d’aujourd’hui, avait prolongé la rue de Réaumur jusqu’à l’Opéra, et l’on avait à la fin du second empire, devenu libéral, donné à ce nouveau tronçon, la nomination d’une date, non pas celle du coup d’Etat, mais au contraire, celle de son élection triomphale comme Président de la République, le 10 Décembre 1848.

    Effaçant d’un coup l’Empire et le Prince-Président devenu Empereur après le désastre de Sedan, la rue marquait désormais l’avènement de la IIIe République proclamée le 4 Septembre 1870 par Léon Gambetta à l’hôtel de ville de Paris dont le maire était le républicain farouchement anti-bonapartiste Etienne Arago, qui décida du changement d’appellation. On remarquera que ce maire éphémère avait été un peu vite puisque après l’épisode chaotique et sanglant de la « Commune », et la prise de Paris par les « Versaillais », le tout sous les yeux des Prussiens victorieux, notre pays mit encore neuf ans à constitutionnaliser ce retour à la République, les monarchistes, divisés en légitimistes, orléanistes et bonapartistes, majoritaires au début, ne parvenant pas à rétablir la monarchie.

    L’invraisemblable succession de révolutions, de coups d’Etat, de régimes font du XIXe siècle le plus consternant de l’histoire de France jusqu’alors. Pendant que l’Angleterre colonisait la planète, que l’Allemagne s’unissait et gagnait la prépondérance européenne, que les autres populations du continent croissaient et émigraient, notamment en Amérique, la France contente d’elle-même et jouissant universellement d’une réputation acquise par sa langue, sa culture, son histoire, et ses « valeurs », s’agitait sans cesse en croyant toujours détenir l’avenir du monde, et tachait de compenser ses défaites en Europe et son amoindrissement par la conquête de vastes déserts à l’extérieur. En fait, même en un sommeil agité et plein des rêves d’une gloire passée, elle s’endormait sur de brillants lauriers.

    Or ces brillants lauriers sont souvent liés à l’image de Napoléon. Si on reprend les trois « 2 Décembre », c’est bien sûr Austerlitz qui brille le plus légitimement. C’est l’une des plus splendides victoires de l’Histoire, où le général Bonaparte, devenu empereur depuis un an, a fait preuve d’un génie tactique et stratégique sans pareil face aux Autrichiens et aux Russes. Qu’on refuse de célébrer le souvenir de cette éclatante victoire, comme le fit Chirac naguère, est stupide car il faut qu’un peuple soit fier de ce passé qui l’a construit.

    Mais il faut demeurer lucide : Austerlitz n’a servi à rien de durable car quelques semaines auparavant, le 21 Octobre, c’était Trafalgar, l’une des défaites infligées par les Britanniques à la marine française, et la plus décisive, car elle conduit immanquablement à Waterloo dix ans plus tard. Le 2 Décembre 1803 (encore !), le Premier Consul, Napoléon Bonaparte avait constitué l’armée d’Angleterre. Trafalgar tua toute possibilité d’un débarquement, permit à Londres de tramer des complots, d’organiser et de financer des coalitions, et parfois de débarquer des troupes au Portugal, en Espagne ou aux Pays-bas.

    Ne pouvant atteindre l’ennemi essentiel sur son île, l’Empereur vainquit successivement tous les ennemis subalternes du continent, notamment pour étrangler économiquement les Anglais par le blocus continental. Ce plan démesuré et fou le conduisit à sa perte. Et pour ce faire, cet homme qui disait avoir « deux-cent-mille hommes de rentes par an », grâce à la conscription, avait déclaré à Lucien, le plus réticent de ses frères, qui craignait de voir la France se révolter contre la dictature : « Ne crains rien. Je l’aurai tellement saigné à blanc avant qu’elle en sera pour longtemps incapable ».

    La France ne s’est en fait jamais relevée de l’épuisement dans lequel l’a plongée l’épisode napoléonien. Le faste du sacre du 2 Décembre 1804 est surtout un monument de vanité. La plupart des mesures positives que l’on doit à Bonaparte avaient été prises sous le Consulat, et la paix d’Amiens en 1802 aurait pu assurer un autre avenir si le dictateur avait, comme Monck en Angleterre, rétabli la monarchie légitime.

    "Malheureusement son « ombre brillante » a obscurci tout ce qui a succédé. "L’Histoire est le produit le plus dangereux que la chimie de l’intellect ait élaboré… Il fait rêver, il enivre les peuples, leur engendre de faux souvenirs… entretient leurs vielles plaies… les conduit au délire des grandeurs ou à celui de la persécution…" écrivait Paul Valéry. La centralisation administrative, le protectionnisme économique, la censure intellectuelle ont étouffé la France sous le Premier Empire, et malgré tout son talent, Zemmour n’est pas Chateaubriand qui a donné de cette période de notre histoire une vision plus juste.

    Les conséquences les plus néfastes de la nostalgie napoléonienne ont été de juger médiocres les régimes suivants, de croire à la puissance inégalée de notre armée, et de conduire à la restauration de l’Empire. Napoléon III n’avait en commun avec son oncle qu’une désespérante ignorance dans ce qu’on appelle aujourd’hui la géopolitique qu’ils encombraient l’un et l’autre de rêves et d’abstractions.

    Avec application, ils ont permis la réunification de l’Allemagne et de l’Italie que les Bourbons avaient morcelées le plus possible à nos portes. Faisant la guerre inutilement à ceux qui devaient être géographiquement nos alliés, Russes et Autrichiens, allant jusqu’à Moscou ou à Mexico pour chercher une vaine gloire, ils ont tous deux conclu par un désastre tel que la France n’en avait pas connu depuis la guerre de Cent ans… dont elle s’était relevée.

    Alors on pourra vanter le développement économique et les modestes progrès sociaux du Second Empire, comme le fera Philippe Seguin. Croit-on vraiment qu’un autre régime ne les aurait pas aussi bien réalisés ?

    A la fin du siècle, l’Angleterre et l’Allemagne étaient passées devant !

  • Paru sur le site Marcelle, entretien avec celui qui est au cœur des polémiques : Didier Raoult.

    https://marcelle.media/

    Le portait du Pr Didier Raoult paru dans Marcelle il y a une semaine a explosé tous nos compteurs (plus de 100 000 lecteurs). Plus surprenant encore, il n’a donné lieu à aucune polémique. Le chercheur est actuellement au cœur de tous les débats pour la solution thérapeutique qu’il préconise. Hier matin, le Canard Enchaîné titrait même sur les menaces de mort dont il a fait l’objet. D’où cet exercice de questions-réponses auquel le virologue aujourd’hui le plus célèbre de la planète a bien voulu se plier car il connaît bien et depuis longtemps les journalistes qui le questionnent.

    Vous avez fait savoir mardi que vous ne participeriez plus aux réunions du comité scientifique qui conseille nos autorités sur la conduite à tenir face à l’épidémie, pourquoi ?

    Je n’ai pas deux heures à perdre dans des discussions qui ne vont pas à l’essentiel. Ici, nous sommes submergés de travail, nous sommes submergés par les résultats des tests et les données de nos patients. Un tiers de nos 75 lits d’hospitalisation est renouvelé tous les jours, nos équipes sont mobilisées H24… C’est cela qui m’importe, pas les causeries où il ne faut surtout froisser personne.

    Les critiques, les mises en cause, cela vous blesse ?

    Les critiques et les conversations de bar sur les plateaux télé, je m’en fous à un point que vous n’imaginez pas. Ce qui m’ennuie, en revanche, c’est que la France, mon pays, ne suive pas ce qui est raisonnable et prenne du retard parce que des gens qui se pensent importants ne veulent pas se dédire. Moi, je suis serein, je sais comment cela va se terminer.

    C’est ce que certains vous reprochent, de prédire l’avenir.

    Il ne s’agit pas de prémonition mais de savoir. Dans le domaine qui est le mien, je sais ce que je dis, je sais ce que font mes équipes, j’accumule des données – donc du savoir supplémentaire – et je mesure tous les jours l’effet clinique de ce que je préconise. Certains ne veulent pas y croire ? C’est leur problème. Les politiques et leurs décisions, c’est l’Histoire qui les juge. On verra très vite ce qu’il en est pour cette crise. On connaîtra la vérité. Un millier de patients ont été déclaré positifs aux tests que nous avons réalisés. Grâce au suivi de leur traitement, nous disposons d’une somme considérable de données. Nous les compilons. Elles nous donneront bientôt une idée plus précise de l’action de l’hydroxychloroquine.

    Avez-vous ajusté vos indications thérapeutiques ?

    Notre doctrine, c’est de détecter et de traiter le plus en amont. L’hydroxychloroquine fonctionne sur les cas modérés à sévères. Au-delà, quand les patients sont en réanimation, c’est trop tard. Le virus est encore là, mais le malade souffre d’inflammations pulmonaires consécutives.

    Justement, l’essai clinique Discovery va être mené sur des patients très atteints…

    Si on avait envie de prouver que ça ne marche pas, on ne s’y prendrait pas autrement. Il y aura une enquête parlementaire après tout ça, et elle sera sanglante, autant que l’affaire du sang contaminé. Et ce sera pire si le gouvernement décide de refuser l’accès au médicament.

    Mais, même l’Organisation mondiale de la santé (OMS) met en garde contre le traitement que vous préconisez…

    Avant toute chose, je suis médecin. J’ai prêté le serment d’Hippocrate en 1981 et mon devoir depuis, c’est de faire ce qui me paraît le mieux pour les malades, en fonction de mes connaissances et de l’état de la science. C’est ce que je fais depuis 40 ans et ce que je fais en ce moment avec mes équipes : soigner le mieux possible les patients qui se présentent. Cela veut dire les tester, évaluer l’état de ceux qui sont positifs et les traiter avec les thérapies disponibles. Aujourd’hui, il n’y en a qu’une qui a commencé à donner des résultats, c’est l’hydroxychloroquine associée à un antibiotique, l’azithromycine. Toutes les données que nous recueillons depuis que nous avons commencé, il y a un mois, après les premiers essais en Chine, vont dans le même sens. Alors, que ça respecte ou non les procédures scientifiques habituelles… Je suis d’accord avec le Président quand il dit que nous sommes en guerre. Une guerre qui justifie de se battre avec toutes les armes dont nous disposons. En tant que médecins, il est de notre devoir de donner aux malades le meilleur traitement disponible à l’instant T. Le reste, c’est de la littérature.

    Quels mécanismes entreraient en jeu avec l’administration d’hydroxychloroquine ?

    Cette molécule aurait deux effets pour accélérer l’élimination du virus : il modifierait d’abord l’environnement acide de la poche vacuole de la cellule. Ce petit sac de liquide protégé par la membrane sert de nid aux virus. En augmentant son pH (potentiel Hydrogène), l’écosystème tranquille de cet abri est chamboulé et les enzymes, impliquées dans la machinerie cellulaire utilisée par le virus pour se répliquer, sont empêchées d’agir. L’hydroxychloroquine favoriserait également l’apoptose, c’est-à-dire la mort cellulaire programmée, un mécanisme génétique qui protège l’organisme des infections en commandant aux cellules infectées de s’autodétruire. Je vais travailler avec l’expert de renommée mondiale Guido Kroemer, professeur d’immunologie à la faculté de médecine de l’Université de Paris Descartes et directeur de l’unité de recherche « Métabolisme, cancer et immunité », pour approfondir les travaux sur les mécanismes impliqués.

    Sans présager de la publication de vos nouvelles observations, que pouvez-vous dire de l’efficacité de Plaquenil ?

    Ne vous inquiétez pas : ça marche. Et même mieux que ça : on a deux fois moins de victimes d’infections virales cette année, toutes maladies confondues, aucun pic de surmortalité et pas de résistance aux antibiotiques.

    Nombre de vos confrères poussent des cris d’orfraie en évoquant les effets secondaires délétères de la chloroquine…

    Tous les médicaments ont des effets secondaires, surtout lorsque l’on ne respecte pas les posologies. L’aspirine, le paracétamol et l’ibuprofène surdosés, c’est beaucoup plus dangereux que l’hydroxychloroquine aux doses où on les administre. Quant à l’azithromycine, un Américain sur huit s’en voit prescrire au moins une fois chaque année. Si cela tuait les gens ou les rendait plus malades qu’ils ne sont, nous le saurions.

    Vous avez annoncé dimanche que vous testeriez toutes les personnes fébriles qui se présenteraient à l’IHU. On a vu les queues qui se formaient devant chez vous. Que pouvez-vous nous en dire ?

    Depuis lundi, nous avons pratiqué 2 000 tests par jour. Environ 10% des personnes testées étaient positives.

    Que se passe-t-il pour les gens que vous dépistez ?

    Notre protocole est rodé. Nous regardons s’ils ont des signes cliniques de la maladie et nous leur faisons passer un scanner pulmonaire  « low dose » (1), comme le font les Chinois, car une partie des gens contaminés ne présentent pas de signes cliniques évidents de la maladie mais ont des lésions pulmonaires qui s’aggraveront s’ils ne sont pas traités.  C’est à eux que l’on administre ce que nous considérons comme le seul traitement disponible à ce jour.Deux jours après, ils sont invités à venir réaliser un électrocardiogramme. Le risque cardio-vasculaire est l’effet secondaire le plus important. Ce traitement est ambulatoire mais les patients les plus sérieux sont naturellement hospitalisés.

    Qu’est-ce qui, selon vous, empêche de généraliser ces tests et ces examens au scanner à l’ensemble du pays ?

    C’est d’abord une question de volonté politique et de mise en place logistique. Les moyens, nous les avons. Entre les laboratoires d’analyses privés, les laboratoires vétérinaires de très grande qualité que nous possédons, les médecins de ville et les infirmières libérales, tous qualifiés pour faire des prélèvements, ainsi que nos ressources hospitalières, il y a de quoi faire. Ici, nous ne sommes pas des extra-terrestres. Si nous arrivons à faire 2 000 tests par jour à l’IHU de Marseille je ne peux pas croire que la France entière ne soit pas capable de faire comme en Allemagne ou en Corée du Sud. 100 000 tests par jour, c’est ce dont nous aurions besoin et nous en sommes capables. Des tests PCR de base, hors épidémie, nous en faisons 300 000 par an à l’IHU. Quant aux scanners, nous faisons face à Marseille, mais cela sera peut-être plus difficile ailleurs, car notre taux d’équipement en scanners est un des plus faibles des pays de l’OCDE. C’est la conséquence des choix politiques et financiers des 30 dernières années. Les conneries finissent toujours par se payer.

    Comment expliquez-vous que cette stratégie qui a fait ses preuves ailleurs, ne soit toujours pas d’actualité chez nous ?

    En France, malheureusement, avant de se poser la seule question qui vaille, c’est-à-dire « que faut-il faire pour faire face à telle situation ? », on se demande toujours « est-on capables de mettre en place telle ou telle solution ? ». On met la charrue avant les bœufs et ça n’avance pas.

    Le ministre de la Santé vous écoute-t-il ?

    C’est un homme intelligent, mais il a hérité d’une situation très difficile, très désorganisée.

    Que pensez-vous de l’attitude des autorités, politiques et médicales, d’une façon générale ?

    Je me contenterai de citer la maxime attribuée à Sénèque : « Errare humanum est, perseverare diabolicum » (ndlr – L’erreur est humaine, persévérer -dans l’erreur- est diabolique) ♦

     

    (1) Un scanner « low dose » (faible dose en français) permet d’obtenir une image de bonne qualité avec un niveau d’irradiation très faible du patient.

    Par Hervé Vaudoit et Paul Molga

    Journalistes

  • C'est la guerre, malheur à celui qui se pose des questions !, par Natacha Polony.

    Aujourd’hui, nombre de commentateurs déploient des trésors de rhétorique pour démontrer que non, les méchants "souverainistes" n’avaient pas raison de plaider pour le maintien de capacités de production en France. Admettre qu’on s’est planté, c’est visiblement douloureux.

    « Union nationale ». Ça sonnerait presque comme une injonction. Malheur à qui viendrait rompre cette belle union. C’est vrai, on est en guerre, il ne faudrait pas commencer à poser des questions ou détourner l’effort des combattants. Contentez-vous d’applaudir les soignants, et, quand on vous le demande, de revenir travailler. D’ailleurs, effort de guerre oblige, on en profitera pour vous rogner quelques droits et quelques libertés. Mais on est en guerre, n’est-ce pas...

    La posture du chef de guerre, hélas, a des ratés. L’air martial et le ton grave, la mobilisation générale, demandent un minimum de crédibilité. Et ce qui semble s’imposer dans une part de l’opinion, c’est que le Président fait ce qu’il peut (pour ceux qui lui accordent au moins ce crédit), mais qu’il ne peut pas grand-chose.

    L'état d’esprit des Français

    Qui se promène sur les réseaux sociaux (seul lieu de « promenade » autorisé en ce moment) y voit, non pas un condensé mais un concentré de l’état d’esprit des Français. Des états d’âmes et des opinions amplifiés, exacerbés, poussés à l’extrême. Bien sûr, il y a les élans de solidarité. Tous ces gens, de quelque milieu que ce soit, qui se mobilisent, parfois en toute discrétion, pour agir, pour faire leur part. Et puis il y a le reste. Le débat, tout à fait justifié, mais aussi les assauts de haines, de jalousie, de soupçon. Les mots-dièse accusateurs, les délires complotistes, les obsessions revanchardes. Les fractures béantes qui se manifestaient depuis des mois ne disparaissent pas. Une crise comme celle que nous vivons est au contraire une centrifugeuse. Et c’est la Nation qui se disloque un peu plus.

    Emmanuel Macron est en train de comprendre ce à quoi est réduit un président français. Appuyer sur des boutons, seul dans le cockpit, et constater que rien ne se passe.

    La grandiloquence présidentielle n’y fera rien. Elle agit plutôt comme un révélateur de l’impuissance. Personne n’ira soupçonner le Président de ne pas faire tout ce qu’il peut pour limiter les effets de cette pandémie. Il faudra bien évidemment discuter les choix, enquêter sur les procédures, une fois l’urgence passée, mais la volonté, elle, est indéniable. Le problème est autre. Emmanuel Macron est en train de comprendre ce à quoi est réduit un président français. Appuyer sur des boutons, seul dans le cockpit, et constater que rien ne se passe.

    « - Faites livrer des masques, des tests, qu’on sache tout de suite qui est malade.
    - Monsieur le Président, on n’en a même pas assez pour les soignants.
    - Mais il faut en fabriquer ! Faites tourner les usines.
    - Mais Monsieur le Président, il n’y a plus d’usine en France depuis longtemps. Souvenez-vous, on trouvait ça génial, une société de services. L’industrie, les usines, c’était ringard. Il fallait que tout le monde devienne autoentrepreneur...
    - Alors on fait quoi?
    - On fait une intervention télé, vous leur dites que les masques, ça sert à rien, mais qu’on est en guerre et qu’on va gagner.
    »

    Il est des éléments que nul ne pouvait prévoir. La Chine a sous-estimé l’épidémie dans une proportion effarante. Les 45.000 urnes funéraires remises à des familles chinoises de Wuhan, alors que le chiffre officiel des morts chinois est de 3.298, laissent imaginer l’ampleur du mensonge. Et des médecins, supposés spécialistes, ont expliqué durant tout le mois de février que les médias en faisaient trop avec cette épidémie. L’humilité est donc de mise, et les « ils savaient et n’ont rien fait » sont stupides.

    gouverner, c’est prévoir

    En revanche, il est un principe face à l’incertitude : gouverner, c’est prévoir. Et prévoir même l’imprévisible. C’est-à-dire préparer les instruments pour lutter contre une menace qu’on n’identifie pas encore. « Si tu veux la paix, prépare la guerre ». Et ce qui scandalise nombre de citoyens est l’impression que nous abordons cette supposée guerre totalement désarmés. Pas de respirateurs, pas de masques, pas de réactifs pour les tests. Et la seule usine de production de bouteilles d’oxygène fermée en 2019. La fatalité ? C’est ce qu’essaient de nous faire croire certains commentateurs. Alors que tout cela résulte des politiques mises en œuvres depuis vingt ou trente ans, avec l’assentiment de tout un système politico-médiatique. Emmanuel Macron ne fait qu’hériter d’une situation dont il est loin d’être le principal responsable - mais responsable tout de même, puisqu’il n’a eu de cesse de sanctifier et perpétuer ce système, d’abord en tant que conseiller puis ministre de l’Economie de François Hollande, ensuite comme candidat et président.

    La « projection des fantasmes », c’est l’argument ultime

    Seulement voilà, depuis vingt ans, on explique au peuple français que ceux qui alertent sur la folie de la désindustrialisation, ceux qui parlent de filières stratégiques à protéger, sont d’affreux nationalistes, des nostalgiques ringards à l’idéologie nauséabonde, des suppôts de l’extrême droite. Et visiblement, certains ont comme des aigreurs à reconnaître qu’ils se sont plantés. Alors, il faut à tout prix démontrer que ça n’a rien à voir. Sur France Inter, le 20 mars, on entendait Léa Salamé regretter que « chacun projette ses fantasmes sur cette crise. Les souverainistes, les décroissants, les anti-mondialistes... » Dans Libération, Laurent Joffrin tient à peu près le même genre de discours, quitte à caricaturer la pensée de Marcel Gauchet.

    La « projection des fantasmes », c’est l’argument ultime. Le même qu’on avait vu apparaître avec la crise des gilets jaunes. Vous pensez que les gilets jaunes sont le résultat de trente ans d’abandon des territoires, de recul des services publics, de destruction du tissu de PME dans les villes moyennes ? Voyons, vous projetez vos fantasmes ! D’ailleurs, il n’y a rien à comprendre de cette crise, et surtout pas que les défenseurs du système actuel se sont vautrés dans les grandes largeurs.

    "reprendre le contrôle"

    Aujourd’hui, même chose. Puisqu’on vous dit qu’on n’aurait pas pu faire mieux ! Et puis, ce n’est pas le moment, on parlera de ça plus tard, pour l’instant, il faut être solidaires et lutter tous ensemble. Et plus tard, quand ce sera fini, on vous dira qu’il n’est plus temps de revenir sur cette crise, qu’elle est derrière nous, qu’il ne faut pas vivre en permanence tourné vers le passé. Ceux qui ont alerté, ceux qui alerteront, sont d’insupportables idéologues. Quand on appartient au cercle de la raison, aux gens propres sur eux qui pensent comme il faut, on s’interdit d’analyser... enfin, surtout quand une analyse honnête obligerait à remettre en cause les dogmes dudit cercle.

    Les défenseurs de la souveraineté, donc de la capacité à ne pas dépendre d’autre pays pour la production de biens essentiels, sont depuis longtemps qualifiés de « souverainistes », ce qui, en langage médiatique, signifie « d’extrême droite », accusés de vouloir fermer les frontières, assimilés aux identitaires de tous poils. Et bien sûr, quand Emmanuel Macron constate qu’on « a abandonné trop de choses au marché » et qu’il est temps de « reprendre le contrôle », ça n’a rien à voir. Lui, il n’est pas souverainiste, il dresse un constat raisonnable. Et comme il prônait l’inverse il y a quelques semaines encore, il n’est pas soupçonnable d’être dans le mauvais camp...

    Temps de guerre ?

    D’ailleurs, fort de cette idée que l’idéologue, c’est toujours l’autre, on peut, dans un journal raisonnable, titrer un article, en dehors de toute idéologie : « Les droites accros à la chloroquine ». Les droites, dont l’extrême droite, mais aussi les mélenchonistes, ce qui prouve bien, n’est-ce pas... Mais en dehors de toute idéologie, bien sûr...

    On peut ne pas goûter les capacités d’autopromotion du professeur Raoult et pour autant se demander si l’allergie légitime du milieu médical aux figures médiatiques ne serait pas, cette fois, un frein dommageable

    Entendons-nous bien. Il est actuellement impossible pour un non-spécialiste d’avoir un avis éclairé sur l’efficacité ou non de la chloroquine. Les discours scientifiques sont éminemment contradictoires et devraient inciter chacun à cultiver l’art de la nuance. En revanche, il est possible de s’interroger sur la façon dont les différents pays s’organisent pour avancer dans les recherches, sur les délais administratifs. Il est permis de se demander si, dans une crise d’une telle ampleur, il ne faut pas prendre davantage de risques qu’en temps normal. On peut ne pas goûter les capacités d’autopromotion du professeur Raoult et pour autant se demander si l’allergie légitime du milieu médical aux figures médiatiques ne serait pas, cette fois, un frein dommageable. De même, on peut avoir conscience de ses limites en matière de recherche biologique et comprendre que la pesanteur administrative explique, bien mieux que la prudence scientifique, le temps qu’il faut à la France pour mettre en route la production de tests efficaces. Quatre laboratoires vétérinaires départementaux se sont ainsi vu refuser l’offre qu’ils faisaient de produire plus de mille tests par jour, au motif qu’on ne mélange pas la santé animale et la santé humaine. Étrange façon de mener une guerre...

    Le virus le plus fréquent en France

    Pointer tout cela relève-t-il du complotisme ou de la déviance idéologique ? A chaque crise, les esprits éclairés nous expliquent que les Cassandre, qui avaient alerté dans l’indifférence générale, sont un peu responsables du malheur qui survient. Qu’ils se taisent, les oiseaux de mauvaise augure, et que la fête reprenne de plus belle ! Le virus le plus fréquent en France, celui qui consiste à renvoyer à l’extrême droite quiconque a le mauvais goût de ne pas applaudir à ce système dont les incuries apparaissent de plus en plus au grand jour, n’a pas encore trouvé de vaccin.

    Source : https://www.marianne.net/

  • Sur le site officiel de l'Action française, l'Europe est nue, l’éditorial de François Marcilhac.

    «  Au niveau national, le gouvernement commence à réagir, mais cela reste chaotique. […] Nous avons été loin d’être efficaces pour des raisons économiques. […] Depuis trop longtemps, on a laissé les intérêts financiers et personnels prendre le pas sur l’intérêt général. Dans la gestion de cette crise, on s’aperçoit que finalement l’Europe est complètement invisible. La crise montre que les concepts et les idées sont loin de la réalité des gens qui sont confinés chez eux. L’économie en prend un coup et pour la santé, la réalité que le monde médical a toujours pointée du doigt apparaît au grand jour. […] J’espère que le gouvernement saura redresser la barre.  »

    françois marcilhac.jpgEn peu de mots simples, accessibles à tous les Français, le comte de Paris a tout dit, ce 3 avril dernier, sur M Ta Ville, un magazine en ligne drouais. [1]  La gestion «  chaotique  » de la crise par le gouvernement, appelé à «  redresser la barre  », une politique à court terme, privilégiant «  les intérêts financiers et personnels  » aux dépens de l’intérêt général, notamment en matière de santé publique, et là, si Macron a encore aggravé les choses, depuis juin 2017, il s’est toutefois inscrit dans la lignée de ses deux ou trois prédécesseurs  ; la déconnexion de la communication gouvernementale avec le vécu des Français et, plus encore, celle de l’idéologie avec la réalité du terrain — Macron est passé maître en la matière  ! —  ; enfin, l’invisibilité totale de l’Europe, en matière d’efficacité, bien sûr, car elle s’agite, elle ne sait même ne faire que cela, mais exécuter des moulinets avec les bras n’a jamais fait reculer le covid-19  !

    Qu’Ursula von der Leyen, la présidente allemande de la Commission européenne, ose déclarer, dans une récente tribune à la presse européenne [2] que la «  solidarité est au cœur même de l’Europe  » et que «  c’est ce qui va lui permettre de renaître  », s’apparente plus à la méthode Coué qu’à une analyse lucide de la situation. «  Aujourd’hui, ajoute-t-elle, l’Europe répond “présent” et travaille d’arrache-pied chaque jour pour sauver le plus de vies possibles, protéger le plus d’emplois possible et pour relancer notre économie le plus possible.  » Elle oublie de préciser que c’est à travers l’aide interétatique que s’est organisée la solidarité entre les différents pays européens, et qu’il ne pouvait en être autrement, car le niveau interétatique, reposant sur les réalités nationales, est celui de l’efficacité — une efficacité que l’idéologie européenne et la lourdeur de la machinerie bruxelloise ne pouvaient qu’enrayer, en déplorant un «  chacun pour soi  » qui n’était que l’application de mesures de précaution légitimes et pertinentes. Il est vrai que Macron s’est alors particulièrement illustré en ravi de la crèche européenne, avant d’être ramené à la réalité par ses partenaires européens. L’Europe, comme l’a fort justement souligné le comte de Paris, a été en la matière «  invisible  ». 

    Quant au redémarrage de l’économie qu’elle souhaite, son apologie de la politique européenne est aussi un aveu cinglant des rigidités contre-productives des traités européens, puisque c’est en y dérogeant qu’il sera possible de limiter les dégâts  : «  Pour y arriver, nous avons pris, ces dernières semaines, des mesures sans précédent dans notre histoire. Nous avons assoupli les règles en matière d’aides d’Etat afin que les Etats puissent soutenir les grandes et les petites entreprises. Nous avons assoupli nos règles budgétaires afin que les budgets nationaux et européens puissent aider au plus vite ceux qui en ont besoin. Cela a permis aux institutions européennes et à nos Etats membres de dégager une enveloppe de 2 800 milliards d’euros pour lutter contre la crise – soit plus que partout ailleurs dans le monde.  » L’Europe a ainsi dû manger son chapeau pour répondre aux défis qui l’attendent, en mettant provisoirement fin à son si précieux Pacte de stabilité et de croissance, qui prévoit notamment que le déficit public d’un pays ne peut dépasser 3  % du PIB et que son endettement ne peut excéder 60  % de ce même PIB.  On ne peut mieux désigner les handicaps structurels que constituent des traités dont la logique strictement financière est un obstacle à la réactivité nécessaire. Comment ne pas comprendre que ces obstacles, que les États membres de l’Union européenne sont les seuls à s’imposer dans un monde globalisé, constituent un frein permanent à nos économies respectives et pas seulement en situation de crise pandémique ?

    Enfin, Von der Layen appelle de ses vœux un «  plan Marshall pour l’Europe  », …tout en taisant le refus de Merkel et de pays du nord de l’Europe — toujours les mêmes — de constituer un fonds reposant sur des coronabonds, à savoir un emprunt commun, impliquant une mutualisation de certaines dettes, qui viendrait en complément de ce plan. «  Un plan Marshall de cette nature contribuera à bâtir une Europe plus moderne, plus durable et plus résiliente. J’en suis convaincue : c’est cette Union qui peut et qui doit émerger de cette crise, tout comme elle l’a fait après chaque crise de notre histoire. Dans ce grand défi, l’Europe aura besoin d’une chose plus que tout : la volonté partagée d’un avenir commun, où chacun est solidaire des autres.  » Rien n’est moins sûr, tant les intérêts des Etats membres sont divergents, non en raison des égoïsmes nationaux — concept psychologique qui n’a rien à faire en la matière —, que parce que les réalités nationales demeurent pérennes en matière économique, financière, culturelle — car le refus de l’Allemagne et de certains Etats du nord est aussi, peut-être avant tout, un refus culturel, comme l’a bien montrée la crise grecque  : l’économie n’est pas qu’affaire de chiffres  ! 

    En revanche, l’Europe ne cesse pas d’apparaître comme la marâtre de certains de ses Etats-membres, dont les choix souverains lui déplaisent  ! La Hongrie, par exemple, risque de faire encore les frais des rodomontades de la présidente allemande  : il n’est pas certain qu’elles impressionnent beaucoup Viktor Orban. De même, alors qu’elle est au beau milieu d’une pandémie, les ministres des affaires étrangères de l’UE ont donné leur feu vert pour lancer les discussions d’adhésion avec l’Albanie et la Macédoine du Nord  ! Ou comment la machinerie bruxelloise impose ses étranges priorités aux Etats membres  !

    Le mérite de cette pandémie aura au moins été de montrer que l’Europe est nue  : seule la solidarité interétatique est efficace, seuls pourront surgir des compromis âprement négociés, dans lesquels ne pèseront que les Etats décidés à faire prévaloir la seule souveraineté qui existe, la souveraineté nationale. L’Europe n’est pas une réalité transcendante, dépassant les Etats-membres : en tant que telle, elle n’existe pas, la «  souveraineté européenne  », si chère au cœur de Macron, est une chimère, elle est «  invisible  », pour reprendre le mot du Prince. Certes, prédire que l’Union européenne ne survivra pas au covid-19 relèverait, aussi, de la méthode Coué. La machinerie bruxelloise, les intérêts de nombreux Etats-membres, l’idéologie européiste des élites françaises, l’inertie des peuples européens, qui ne voudront pas vivre une nouvelle aventure au lendemain de la pandémie, tout concourt pour que l’Europe n’éclate pas de si tôt. Du reste, ce n’est pas tant son éclatement que nous devons souhaiter qu’une sortie encadrée, coordonnée, pragmatique  ; conforme à l’intérêt national.

    François Marcilhac

    [1] https://www.mtaville.fr

    [2] https://www.lalibre.be/debats/opinions/ursula-von-der-leyen-l-europe-s-en-sortira-grace-a-la-solidarite-5e878c4bd8ad581631acd7e0