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Rechercher : qu'est ce que le système ?

  • Le progressisme, illusion suicidaire de l’Occident par Christian Vanneste

    Il est bien sûr stupide de nier le progrès scientifique et technique, et de cacher ce qu’il apporte dans la prise de conscience que l’humanité peut avoir d’elle-même et de sa place dans l’univers. En revanche, est contestable l’idéologie qui se sert de cette évidence pour imposer l’illusion que l’Histoire est à sens unique, que son processus linéaire est muni d’un cliquet qui empêche tout retour en arrière, et qu’un certain nombre d’évolutions localisées dans le temps et l’espace se poursuivront et se généraliseront. Cette idéologie c’est le progressisme, dont l’actuel président français est un adepte halluciné.

    3309368304.jpgOn pourrait lui faire remarquer, non sans ironie que la colonisation fut en son temps, surtout en France l’une des mises en oeuvre du progressisme, soutenue par la gauche républicaine sous la forme d’un devoir des « races supérieures » envers celles qui le seraient moins, et que la droite conservatrice était au contraire très réticente. Mais la décolonisation souvent trop rapide et aux conséquences désastreuses fut une autre étape de ce progressisme désormais voué à l’émancipation de peuples qui n’existaient pas vraiment dans les limites que l’étape précédente avait tracées. L’un des signes du caractère idéologique du progressisme est de nier ses contradictions tout autant que la réalité.

    Les grandes lignes de cette idéologie sont les suivantes : la liberté individuelle, l’égalité entre les membres de l’humanité doivent s’épanouir, conduire à l’installation généralisée de la démocratie comme régime politique, et s’inscrire dans un système juridique universel, les Droits de l’Homme, qui sera à terme la constitution d’un Etat dirigé par un gouvernement mondial. Il n’y a aucun doute que des forces puissantes agissent actuellement dans cette direction, sous trois formes, d’abord celle des organisations liant les Etats, comme l’ONU, ensuite dans l’armada des ONG qui militent en ce sens et dans laquelle figure, comme navire amiral, « l’Open Society Fondations » de George Soros, enfin dans une constellation de rencontres internationales réunissant l’oligarchie mondiale économique et politique, médiatique aussi.

    Deux processus semblent toutefois ébranler les certitudes propres à l’idéologie progressiste : l’un est extérieur, et vient de la résistance des identités civilisationnelles, transmises par les traditions, renforcées par l’histoire et qui s’opposent à l’effacement des différences ; l’autre est intérieur et se traduit par des contradictions destructrices. On pourrait prendre deux exemples pour illustrer le premier phénomène. Depuis la fin des années 1980, de nombreuses « révolutions » se sont produites, les unes pour démanteler le totalitarisme soviétique, les autres pour remplacer les dictatures militaristes qui dominaient le monde arabo-musulman. La première vague a renversé l’obstacle, mais on s’aperçoit aujourd’hui que les nouvelles démocraties apparues à l’Est de l’Europe ne reposent pas sur la même idéologie dominante, qu’elles sont plus conservatrices, dès lors notamment que l’on touche aux cadres familial ou national. Mais, pour les progressistes, ce n’est là qu’une question de temps : la démocratie aux frontières ouvertes et à la famille éclatée finira par l’emporter… La seconde vague a connu au contraire un échec consternant : les soulèvements démocratiques voilaient des coups d’Etat islamiques. En l’absence de véritables revendications sur la liberté individuelle ou l’égalité entre les personnes, difficiles dans un contexte religieux musulman, et non chrétien, ne laissant guère de liberté dans le domaine religieux, ni plus d’égalité entre les sexes, le face à face entre régimes autoritaires nationalistes et totalitarisme islamique s’est maintenu et même renforcé. On le voit en ce moment même en Libye où le Maréchal Haftar, soutenu par l’Egyptien Al-Sissi défie les Frères Musulmans épaulés par la Turquie, qui ont eu l’intelligence, coutumière chez eux, de se dissimuler dans les plis d’un gouvernement fantoche, mais reconnu par l’ONU, celui de Sarraj. Le second exemple reposerait sur l’abolition de la peine capitale, exigée par les élites occidentales au nom de l’humanisme, mais refusée par les peuples, dans de nombreux Etats des USA, et plus généralement dans les pays puissants porteurs d’une civilisation non-chrétienne : la Chine, l’Inde, le Japon, ce dernier illustrant la distance entre l’évolution technologique et sociale d’une part, et celle des mentalités d’autre part.

    Ce second exemple assure la transition avec les contradictions qui se développent au sein du progressisme. La peine de mort révulse les belles âmes occidentales, mais celles-ci semblent ignorer les « progrès » de la violence, et oublient volontiers les victimes, qui ont le tort d’être mortes. De même, au nom de l’émancipation et du « libre » choix, elles privilégient le droit à l’avortement sans prêter la moindre attention aux milliers de vies censurées, et à la double mort qui s’insinue dans nos sociétés, dont le Japon vieillissant illustre le premier aspect, en se dépeuplant mais sans favoriser le remplacement, et dont la France coche les deux cases : l’effondrement démographique et sa compensation par une immigration, qui introduit dans le pays de façon massive des mentalités rétives au progressisme. La contradiction la plus éclatante est celle de l’écologie, ce progrès moral qui culpabilise le progrès technique, mais surtout qui s’inscrit dans cette mise en accusation généralisée de notre mode de vie et de la civilisation à laquelle nous appartenons. Certes, la solution des problèmes « écologiques » exige un gouvernement mondial, mais bien malin serait celui qui nous dira quelle idéologie guidera celui-ci à partir des forces qui sont actuellement à l’oeuvre dans le monde !

  • Quand le gouvernement jette de l'huile sur le feu... par Jean-Philippe Chauvin

    Le débat sur la question des retraites sert-il encore à quelque chose ? C’est la réaction désabusée de quelques uns des acteurs de la scène politique et syndicale quand ils ont appris, par des indiscrétions vite dévoilées par la presse de ce lundi soir, que le projet de loi  a déjà été envoyé au Conseil d’Etat, avant même que les partenaires sociaux soient reçus mardi par le gouvernement au ministère du Travail…

    396556_jean-philippe-chauvincorr.jpgUne façon de dire aux grévistes et aux opposants à la réforme que contester celle-ci n’a aucun sens et que, en définitive, la cause est entendue : en fait, si l’on en croit Yves Veyrier, secrétaire général de Force Ouvrière, mais aussi les responsables de la CFTC, le projet devait déjà être écrit avant même les vacances de Noël, ce qui, si cela se confirme, montre le bien peu de cas que le gouvernement fait des partenaires sociaux et de l’idée même de négociation… Bien sûr, les aménagements (considérés comme des concessions coûteuses par les plus libéraux) à la réforme démontrent que celle-ci n’est plus tout à fait universelle puisque les militaires, les policiers, les personnels du secteur aéronautique, etc., conserveront des régimes particuliers (preuve s’il en est que la logique corporative n’est pas tout à fait négligée par le gouvernement, sans doute par la simple force des choses…).

     

     

    Ainsi, le gouvernement, pressé par la Commission européenne qui appelle à la poursuite des réformes (celle des retraites étant une étape majeure), veut accélérer et ne rien céder désormais à la grève elle-même, et cela passe par une forme d’assurance affirmée qui semble confiner au mépris de toute position ou événement protestataire, au risque d’agacer un peu plus les syndicalistes et nombre de salariés, voire de les « radicaliser ». Mais n’y a-t-il pas une sorte de jeu dangereux de la République, une sorte de « stratégie du choc » (dénoncée il y a quelques années par Naomie Klein dans un ouvrage homonyme) qui creuserait un peu plus le fossé entre les différentes classes et « blocs » (élitaire contre populaire, ou populiste), selon la terminologie de Jérôme Sainte-Marie ? Je le crois et je le crains ! La même stratégie a été largement utilisée depuis le début du soulèvement des Gilets Jaunes, avec les provocations verbales des partisans du pouvoir en place (contre ceux « qui fument des clopes et roulent au diesel », comme le clamait M. Griveaux, alors porte-parole du gouvernement), et la violence d’une répression qui n’a pas pour vocation de rétablir l’ordre, mais de maintenir le « désordre établi », ce qui n’a pas exactement le même sens.

     

     

     

    Alors même que l’insécurité progresse et que le nombre d’incivilités et d’actes de délinquance ne cesse d’augmenter dans notre pays, autant que la violence des agressions de rue, les forces de l’ordre sont « monopolisées » par le gouvernement pour empêcher l’accès des manifestants aux centres de la République métropolisée : les hypercentres sont désormais interdits aux manifestations politiques dans de nombreuses villes, ce qui n’empêche pas, d’ailleurs, la dévastation par des bandes organisées (et peu inquiétées, en définitive, ce qui peut amener à se poser quelques questions…) de nombreux commerces sur les parcours forcés et balisés par les autorités préfectorales, au grand dam de leurs gérants, impuissants et, eux, mal protégés par des forces de l’ordre qui semblent n’intervenir « qu’après coup », comme me le confiaient, dépités, des commerçants de l’avenue de la Liberté à Rennes… « Pourquoi la police ne protège-t-elle pas nos boutiques alors que nous payons aussi nos impôts et de lourdes charges ? », m’a-t-on dit l’autre jour, devant les panneaux de bois qui remplaçaient les vitrines défoncées d’une petite agence immobilière ? Et le marchand de journaux d’à côté me confiait que lui et ses voisins s’étaient sentis abandonnés face à la horde de casseurs qui, de noir vêtus, n’avaient plus grand-chose à voir avec une contestation politique, mais bien plutôt nihiliste. Or, toute contestation, si elle veut être reconnue légitime, doit aussi proposer, prôner, discuter, et c’est cela qui lui donnera ses lettres de noblesse ou la condamnera, selon les arguments et les fondations idéologiques qu’elle valorisera : toute contestation n’est pas légitime en soi, mais elle doit pouvoir s’exprimer et chercher à convaincre pour vaincre, sinon elle n’est qu’une usurpation supplémentaire, et doit être, à son tour, dénoncée et éventuellement combattue en politique.

     

     

    Cette stratégie gouvernementale du pourrissement de la situation et de l’exacerbation des conflits et des violences (soit par la répression politique, soit par le laisser-aller sécuritaire) est néfaste pour l’unité du pays et je le constate chaque jour dans les discussions au comptoir ou sur les forums électroniques : là où il faudrait parler avec mesure et discuter sans forcément abandonner la passion mais en cherchant la raison, le gouvernement préfère passer en force et brusquer ses adversaires quand il faudrait les amadouer et leur reconnaître quelques bonnes raisons de contester le projet de réforme des retraites. Là où il devrait y avoir vrai débat et confrontation des propositions et projets, il n’y a que la logique de l’affrontement et de la mauvaise foi qui, d’ailleurs, n’est pas que l’apanage du gouvernement et de ses partisans, certains syndicats s’enfonçant dans une démagogie qui n’est pas plus honorable que les mensonges ou les approximations gouvernementales et présidentielles.

     

     

    Il y aurait tant à dire, pourtant, et tant à proposer : non pas un régime universel mais bien plutôt un régime juste qui reconnaîtrait les particularités propres à chaque métier et secteur socio-professionnel, sans méconnaître les traditions sociales et sans négliger les questions financières ; un système qui autorise et valorise l’existence des caisses autonomes par profession au lieu de vouloir les confisquer pour des raisons purement financières ; un Etat qui prône une politique de soutien à la natalité et d’intégration au Travail de tous quand le chômage reste un mal récurrent, et qui valorise le travailleur plutôt que le spéculateur… Surtout, un Etat qui joue son rôle de grand arbitre au-dessus des groupes de pression et celui de fédérateur des énergies sociales françaises, et qui ne mette pas constamment de l’huile sur le feu ; un Etat qui pense aux hommes et au bien commun du pays, au lieu de jeter les uns contre les autres au bénéfice des grandes féodalités financières et économiques ; un Etat qui pense France avant de parler Monde…

     

     

     

    Car le mépris des « princes qui nous gouvernent » (le « pays légal ») à l’égard des travailleurs, des métiers et des peuples de France (le « pays réel ») pourrait bien, en versant dans cette démesure (1) qui caractérise désormais les jeux pervers de la mondialisation et les rétributions des plus riches, alimenter une colère difficile à éteindre et dont les effets pourraient être encore plus dévastateurs que les feux du 1er décembre 2018 ! N’oublions jamais, et le gouvernement ferait bien aussi de s’en rappeler, que la politique du pire est souvent la pire des politiques, et qu’elle ouvre parfois des boîtes de Pandore qu’il est difficile de refermer. Cela mérite justement une réponse éminemment politique, dont il n’est pas sûr qu’elle soit ou, même, qu’elle puisse être institutionnellement « républicaine »…

     

     


     

     

     

     

    Notes : (1) : l’hubris dénoncée par les Grecs anciens, et qui aveugle ceux qu’elle veut perdre, en fait…

  • Pour réintégrer Maurras dans le paysage politique français...

    lafautearousseau se propose ici de vous faire découvrir Un patriote, nommé Maurras. Maurras est en effet inconnu du grand public, parce que volontairement ignoré par la conspiration du silence, entretenue par le Système pour lequel Maurras n'est pas "dangereux", mais "le seul dangereux", car il en a dénoncé les bases idéologiques et parce qu'il l'a remis en cause dans ses fondements révolutionnaires.

    C'est donc à une sorte de feuilleton, à la découverte de l'homme Maurras, que nous allons vous entraîner, d'ici les prochaines élections municipales.

    Celles-ci, nous l'avons dit, seront peut-être décisives pour l'avenir de la Maison du Chemin de Paradis, fermé aux Français aujourd'hui par le dernier Mur de Berlin d'Europe : celui, invisible, du sectarisme haineux de la Mairie communiste, qui préfère laisser fermée (en attendant qu'elle ne s'écroule ?) une belle demeure qui pourrait être intégrée au réseau des Maisons des Illustres, et devenir un centre national et international de recherches et débats intellectuels de haut niveau sur Maurras, sa vie, son oeuvre; un lieu culturel vivant et rayonnant...

    Du début février au 23 mars (fin de la première partie de notre campagne de sensibilisation pour la sauvegarde de la maison de Maurras) nous présenterons divers textes ou documents relatifs à Maurras, sa vie, son oeuvre... 

    Ensuite, après les élections, nous verrons quelles orientations donner à notre campagne  pour la réhabilitation/réouverture au public de la maison/jardin de Maurras...

    : Nous passerons cette semaine (du lundi au vendredi) en bonne compagnie, avec Axel Tisserand, qui nous parlera de... Maurras, naturellement ! (2/5)...

    Entretien avec Axel Tisserand : pour Maurras, naturellement

    Propos recueillis par Gabrielle Monthélie, Le Bien Commun, n° 7, mai 2019.

    Axel Tisserand continue son travail d’exploration de la pensée de Charles Maurras et publie ces jours-ci, aux éditions Téqui, un livre qui fera date : Actualité de Charles Maurras, Introduction à une philosophie politique pour notre temps.

     

     

    2. Yves Floucat, dans sa préface, précise qu’on aurait pu s’étonner du choix d’un disciple de Maritain pour cette tâche. Notre dossier thématique du mois est d’ailleurs consacré au dialogue entre Maritain et Maurras. Vous évoquez les critiques adressées aujourd’hui par certains catholiques aux idées inspirées par le Martégal : pensez-vous que l’absence de dépassement de la confrontation entre les deux auteurs soit un frein à la réflexion politique pour les catholiques ?

    Yves Floucat, dans la préface généreuse dont il a bien voulu m’honorer, note ce paradoxe apparent, puisque, grand thomiste, il a été également, comme il l’écrit lui-même, « profondément marqué par la pensée de Jacques Maritain ».

    C’est qu’on ne retient des relations intellectuelles entre Maritain et Maurras que le divorce, à l’initiative du premier, en raison des sanctions pontificales de décembre 1926 – parler de condamnation est un abus de langage, puisqu’il n’y a eu, comme l’observe Yves Floucat, « aucun texte magistériel […] de la main de Pie XI ».

    D’ailleurs, les sanctions furent levées en 1939 sans que l’Action française renonce à aucun point de sa doctrine. En 1927, Maritain fut même chargé de justifier ces sanctions sur le plan doctrinal, lui qui, quelques mois plus tôt, avait publié un livre, Une Opinion sur Charles Maurras, montrant en quoi être d’Action française n’était pas incompatible avec la foi catholique.

    Ne revenons pas sur cet épisode douloureux ni sur les raisons pour lesquelles Maritain a choisi alors, contrairement à Bernanos, l’obéissance jusqu’à brûler ce qu’il avait jusque-là, sinon adoré, du moins justifié. Comme l’écrit fort justement Yves Floucat, « peu nombreux sont ceux qui ont relevé que son rejet de la démocratie rousseauiste, commandant selon lui l’idéologie démocratiste moderne, était resté intact » dans la pensée de Jacques Maritain.

    C’est une évidence : la rencontre entre Maurras et Maritain, au début du XXe siècle, loin d’être un malentendu, reposait sur un fond commun : Aristote et Thomas d’Aquin. C’est sur ces deux penseurs que, dans une perspective différente, l’une politique, l’autre théologique, Maurras et Maritain se sont rencontrés. Le dialogue a été interrompu mais rien n’interdit de le reprendre.

    Comme l’écrivait déjà en 2011 Yves Floucat, dans le numéro 55 de Liberté politique : « Il est légitime (audacieux, hasardeux ou utopique diront peut-être certains) de se demander si le moment n’est pas venu, pour les disciples du “Paysan de la Garonne” comme pour ceux de l’auteur de l’Enquête sur la monarchie, de renoncer à tous les apriorismes réciproques et de revisiter avec discernement et un juste esprit critique l’œuvre de leur maître. […] Face à la dérive subjectiviste et relativiste programmée des démocraties selon un horizon idéologique « droit-de-l’hommiste », ils pourraient trouver, dans le seul souci de la justice sociale et du bien commun, quelques points d’entente essentiels.


    Ils s’accorderaient sur un antilibéralisme et un antidémocratisme qui, tout en revalorisant les principes d’autorité, de légitimité, de souveraineté, de représentation de la nation dans ses diverses composantes, et d’incarnation du pouvoir, les conjugueraient harmonieusement aux libertés concrètes, et attribueraient ainsi – comme un Pierre Boutang, authentique disciple fidèle et inventif de Maurras, avait su le faire – sa véritable place au consentement populaire ».

    Rien à ajouter...

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    lafautearousseau

  • La technocrature, maladie sénile de la démocratie, par Philippe Germain.

    Comment analyser les élites du Pays légal ?

    En 2017 l’élite technocratique, la «  technocrature  » donc, au travers son mandataire Emmanuel Macron, à pris le pouvoir politique. Tous les pouvoirs  ! Si elle a dégagé «  l’ancien monde  », celui de l’élite politique, en une soirée électorale, c’est tout simplement car il était disqualifié et qu’il fallait sauver le Système. Macron l’a fait tout comme Bonaparte avait sauvé la République le 18 Brumaire. La dénonciation de cette prise de pouvoir technocratique a rapidement été réalisée – souvent avec pertinence – par la Gauche et l’ultra-gauche mais dans une approche complotiste qui ne peut satisfaire la nouvelle génération des jeunes maurrassiens du XXI° siècle. 

    philippe germain.jpgIl importe donc aux jeunes néo-royalistes d’Action française de répondre à la question «  Qui gouverne ?  » sans sombrer dans le piège du complotisme ni d’ailleurs celui de l’aliénation complice.

    Généralement les réactionnaires sont présentés comme friands du complotisme à cause de l’ouvrage de l’abbé Barruel  : Mémoires pour servir à l’histoire du Jacobinisme (cinq volumes entre 1797 et 1803). Il y affirme que la Révolution n’a pas été un mouvement de révolte populaire spontanée, mais un processus organisé pendant plusieurs décennies dans des loges et dans des clubs — en particulier celui des Jacobins — afin de permettre à la bourgeoisie libérale de s’emparer du pouvoir. Contrairement au préjugé progressiste, cette explication conspirationniste – malgré un abbé Barruel bien mieux informé qu’on ne le dit, celons Emile Poulat – n’a jamais emporté l’adhésion de l’Action française. Les maurrassiens préfèrent très largement les travaux d’Augustin Cochin sur les sociétés de pensée. Certains des travaux de ce sociologue, réhabilité par François Furet, avaient été publiés dans le premier numéro de la Revue Universelle de Jacques Bainville en 1920. L’intérêt néo-royaliste pour les thèses de Cochin a été relancé par la «  Génération Maurras  » en 1989 – à l’occasion de la contestation du bicentenaire de la Révolution française – sous l’impulsion de l’animateur de l’Institut d’Action Française, Jean-Pierre Deschodt. Cet intérêt pour la grille d’analyse d’Augustin Cochin a encore été amplifié ces dernières années par Yves Morel, dans la Nouvelle Revue Universelle. Une preuve flagrante de la méfiance de l’Action française vis à vis de l’utilisation du mythe conspirationniste est le dédain avec lequel elle a ignoré le «  complot de la Synarchie  » en 1941 et 1942, alors que la presse collaborationniste mais aussi résistante, dénonçait ce mythe visant la Banque Worms et les trusts. Mythe d’ailleurs repris par le P.C.F. Après 1945. 

    Loin du piège de l’interprétation complotiste mais aussi de l’aliénation complice de la pensée correcte, nous allons, en suivant les recommandation de l’Historien Olivier Dard dans son ouvrage sur La Synarchie – le mythe du complot permanent, (chez Perrin) «   tenter de comprendre les mécanismes à l’œuvre et de saisir la complexité des réseaux d’influence comme la prise de décision  », même si nous avons conscience que c’est «  aussi ambitieux que délicat  » et «  oblige à emprunter une ligne de crête entre une suspicion généralisée qui n’explique guerre et se fourvoie dans le complotisme et un angélisme évidement hors de propos  ».

    Cette analyse «  ligne de crête  » évoquée par Olivier Dard, les maurrassiens la pratiquent par la Physique sociale, qui est une particularité de la boite à outils de l’école d’Action française. Cette fois nous utiliserons à la fois la méthode de l’empirisme organisateur mais aussi le clivage Pays légal/pays réel. Ce dernier nous différenciera des monarcho-gaullistes qui préfèrent le concept de retour de la lutte des classes. Sur le sujet on peut s’appuyer sur l’excellent article de Diane de Rorruan dans le n° 12 de Le Bien Commun de novembre 2019  : «  France périphérique, banlieue du politique  » et sur celui du n° 16 de mars 2020 sur «  Actualité de la lutte des classes  ». Nous nous utiliserons aussi la critique de la technocratie entamée par Pierre Debray, dès 1962 sous la présidence du général De Gaulle. Nous nous appuierons également sur les travaux du sociologue maurrassien Michel Michelet en particulier son étude de 1971 sur Pays légal/pays réel. Le combat de l’Action française contre la technocrature est une vieille histoire  !

    Nous allons donc dans nos prochaines rubriques, avec les outils qui sont le propre de notre école de pensé – osons le dire, qui en font la force – chercher à comprendre la genèse de l’événement historique que nous traversons avec la prise de pouvoir de la technocrature. Nous allons en quelques rubriques chercher à comprendre les raisons historiques pour lesquelles la haute fonction publique française ne sert pas l’intérêt général mais s’est mise au service de la finance pour et finir par mettre la France dans l’état d’insurrection avec les Gilets Jaunes et aujourd’hui l’acculer dans une situation de faiblesse extrême face au désastre écologique dans lequel la mondialisation sans limite l’a amené avec la pandémie du coronavirus. 

    Remonter aux causes est le seul moyen de remettre notre pays sur les bons rails  !

  • Le petit virus, grand pédagogue ? (II) – La fin des illusions ?, par Christian Vanneste.

    Près de 500 morts en une journée, plus de 3500 au total, la contamination de la population française par le Covid-19 semble suivre la courbe à l’italienne avec une dizaine de jours de retard. Toutefois, le dénombrement n’est pas le même dans les deux pays, et en France, il ne tient pas compte des décès dans les Ehpad et à domicile, En revanche, les chiffres allemands sont beaucoup plus modérés. Ainsi, leur comparaison entre les trois grands pays voisins au coeur de l’Europe suscite l’étonnement : l’talie, la première touchée par l’épidémie recense 97 689 malades et 10 779 décès, la France paraît la suivre avec 52 128 personnes détectées et 3523 victimes, mais l’Allemagne qui pratique massivement des tests, sept fois plus qu’en France, a identifié 68 305 porteurs du virus alors qu’elle ne dénombre heureusement « que » 710 morts.

    christian vanneste.jpgMême si ces données doivent être relativisées en raison de la différence des stratégies et des méthodes, elles conduisent à recevoir une grande leçon de cette épreuve qui nous est imposée. La mondialisation, l’extension de la démocratie, la construction européenne devaient être des moteurs de l’égalité par la convergence. On doit prendre conscience avec lucidité d’une réalité toute autre : si cette triple évolution, en facilitant la circulation des personnes et des biens, a contribué à répandre le virus, elle n’a nullement fait avancer l’utopie, la grande illusion d’une égalité universelle entre les membres de l’humanité.

    Plus que jamais, l’inégalité est une réalité qu’on cherche en vain à ignorer. Il y a toujours des inégalités naturelles : Alors que le nombre d’hommes et de femmes infectés est relativement proche, le taux de décès apparaît très différent. En Chine, il est de 2,8 % pour les hommes, contre 1,7 % pour les femmes. Durant la période étudiée, 63,8 % des décès concernaient des hommes. Le constat est voisin en France, où 58,4 % des décès recensés à date du 15 mars sont masculins. Les hommes sont également deux fois plus nombreux que les femmes à passer en réanimation. Par ailleurs, des chercheurs de Wuhan ont comparé la distribution des groupes sanguins entre malades et non malades : alors que la population non-malade se compose de 32% de groupe A et 34% de groupe O, ces pourcentages sont de 38% pour le groupe A et de 26% pour les personnes atteintes par le Covid-19. Cette même différence est également observée pour les 206 personnes décédées de l’étude : 41% étaient du groupe A contre 25% du groupe O. Certes, on pourra dire que l’inégalité, en faveur des femmes, s’explique par un mode de vie spécifique selon le sexe, mais on peut aussi penser que la supériorité physique de l’homme destiné à chasser et à se battre pour protéger son clan a pour corollaire un avantage biologique de la femme destinée à enfanter. Pour les groupes sanguins, le fait est brut, comme l’évidence de la fragilité qui s’accroît avec l’âge. Là encore, l’inégalité devant la mort, d’un individu à un autre, et d’un âge à un autre, sont des fatalités, mais cessent de l’être lorsqu’un pays, imprévoyant et insuffisamment doté en moyens, est obligé de faire ce que l’on croyait réservé à l’horreur du nazisme : le tri entre ceux qui ont le droit de vivre et ceux qui doivent mourir parce qu’ils constituent une charge que le système ne peut ou ne veut plus supporter.

    Cette inégalité là est insupportable, inacceptable ! L’imprévoyance et l’impréparation dont l’Etat a fait preuve dans notre pays, en faisant croire que l’épidémie n’atteindrait pas la France, en laissant les frontières ouvertes, notamment avec l’Italie, en minimisant le mal, puis en justifiant les pénuries par des mensonges sur l’inutilité des tests précoces, des masques, ou la nocivité de la chloroquine, en organisant des élections avant de fermer précipitamment les écoles, sont des fautes lourdes dont les Français vont payer la note d’abord par un nombre élevé de morts, et ensuite par un désordre économique désastreux par ses conséquences sociales. Le manque de masques, notamment FFP2, pour les soignants, l’insuffisance des tests, le manque de respirateurs dans certaines régions sont autant de preuves que notre Etat si lourd est surtout mal dirigé, de plus en plus mal dirigé. Il est extravagant qu’un spécialiste de la vente de nos entreprises à l »étranger, devenu président de la République, veuille maintenant qu’on produise en France et s’érige en chantre de la souveraineté… française ET européenne, ce qui ne veut rien dire. Les divergences entre l’Allemagne, l’Italie et la France le montrent bien.

    C’est une seconde grande illusion française qui se dissipe, celle de l’Etat omnipotent et protecteur. La France réussit ce paradoxe d’une dépense publique record et d’un Etat inefficace ! Certains pointent la baisse des dépenses dans des domaines prioritaires comme la santé ou la sécurité, et ils ont raison, mais ils s’opposent à l’amaigrissement de l’Etat, et ils ont tort. Dans notre pays, les technostructures étouffent les organes publics efficaces. Le retard dans les commandes de produits essentiels, les réquisitions inutiles, les refus de faire appel à certaines entreprises ou aux cliniques privées, la guerre souterraine contre la chloroquine sans doute orchestrée par des groupes de pression puissants, sont autant de preuves que notre Etat pachyderme incapable d’agir vite pour servir le bien commun est pénétré sournoisement par des intérêts privés.

    Enfin dernière illusion : le regard des Français est aujourd’hui partagé entre deux jugements contradictoires. La popularité du chef de l’Etat augmente, mais la confiance envers Macron et Philippe s’érode. Les Français retrouvant leur tradition monarchiste se rassemblent autour du roi devant l’épreuve, mais en même temps, ils constatent avec bon sens sa mauvaise « gouvernance » de la crise. Selon une enquête Ipsos, 56 % des personnes interrogées se disent insatisfaites de la gestion de la crise sanitaire du gouvernement. Mais, selon une autre étude, le chef de l’Etat gagne des points dans toutes les catégories d’âge, en particulier chez les plus de 65 ans (+17). Il y a fort à parier que beaucoup, une fois la peur oubliée, songeront à lui couper la tête… (à suivre)

  • La liberté statutaire du Roi pour ordonner l'économique au bien commun par Jean-Philippe Chauvin

    Se battre pour une cause n’est pas forcément inutile, au contraire de ce que suggèrent les partisans du désordre établi et les fatalistes de tout acabit, et le royalisme, aujourd’hui marginalisé, mérite ainsi toute l’attention que l’on peut porter à une école de pensée et de pratique politique qui évoque le bien commun plutôt que la carrière de ses amis. Pourquoi ? Parce que, aujourd’hui, la question sociale semble, plus que jamais irrésolue et le pays déchiré autour du souci des retraites et de leur financement nécessaire. Or, s’il n’est pas de sauveur suprême, comme le chantaient jadis les marxistes, il n’y a pas pour autant de fatalité en ce domaine et la justice sociale n’est pas une option facultative mais une obligation, un devoir d’Etat qui, d’ailleurs, participe à fonder une part de sa légitimité.

    396556_jean-philippe-chauvincorr.jpgMais la République macronienne reste la République, et elle n’est pas, qu’on le veuille ou non, sociale, ne serait-ce que parce que son mode de fonctionnement favorise les rhéteurs et les « prêteurs » plutôt que l’intérêt supérieur de la nation et de ses peuples. Le mode de désignation du Chef de l’Etat, pourtant pensé par le général de Gaulle pour écarter les partis politiques, a, après lui, nourri les jeux politiciens et financiers : qui n’a pas le soutien d’un appareil (fût-il récent et largement artificiel dans le dernier cas vécu, mais toujours sous la forme de réseaux propre à l’époque et au système même) et des banques nécessaires à son bon fonctionnement, n’a guère de chance de pouvoir concourir et encore moins de conquérir la place ! M. Macron, habile ministre des finances sous M. Hollande et issu de la Banque, a su jouer des malheurs du favori de Droite comme de ceux de son propre tuteur élyséen pour se frayer un chemin vers la magistrature suprême de la République, profitant aussi du « dégagisme » pourtant théorisé par d’autres que lui, voire même opposés à lui dans la joute électorale du printemps 2017. Mais l’énergie utilisée à prendre le pouvoir est déjà une énergie perdue pour son exercice et elle est vite « revendiquée », plus ou moins discrètement, par ceux qui l’ont alimentée, que ce soit les puissances d’argent ou les catégories sociales dominantes ou « clientes » (classes supérieures et mondialisées, et classes moyennes consommatrices et connectées, dans le cas de l’élection de M. Macron).

     

     

    Une Monarchie royale « à la française », elle, ne doit rien aux jeux de la Banque et des partis, parce que la transmission héréditaire de la magistrature suprême de l’Etat donne, par essence même, une indépendance statutaire au monarque : la naissance ne s’achète pas, quand l’élection se monnaye ! Ainsi, le Roi est-il libre de décider sans l’aval des puissances financières, ce qui ne signifie pas que le monarque du moment soit forcément indifférent aux affaires financières et économiques du pays. Mais l’économique, « l’intendance » comme l’appelait le général de Gaulle, doit suivre et non « être suivie » : c’est le politique qui décide, et « la politique de la France ne se décide pas à la Corbeille », pour citer encore le fondateur d’une Cinquième République qui s’est faite à nouveau éminemment républicaine quand son père est parti, chassé par le suffrage référendaire. Cela est sans doute plus facile à théoriser qu’à pratiquer mais, la volonté du général s’en étant allée en même temps que sa personne du faîte de l’Etat, il s’agit d’enraciner cette volonté par le statut même de la magistrature suprême de l’Etat, et seule la Monarchie héréditaire et successible peut le faire, détachée du « choix des autres » qui, souvent, n’est que le paravent de celui de quelques uns, comme l’a démontré la dernière élection présidentielle…

     

    Cela signifie-t-il qu’en Monarchie royale sont bridées les expressions électorales et populaires ? Non, bien au contraire : la liberté statutaire de la magistrature suprême autorise les libertés réelles, citoyennes et professionnelles, provinciales et communales, et peut offrir plus de consistance aux pouvoirs locaux et sociaux. Cela pourrait redonner d’ailleurs du crédit à la discussion politique par la concrétisation locale de celle-ci à travers des décisions qui seraient prises conjointement par les administrés et les administrateurs communaux, professionnels, régionaux, après débats et expressions, y compris par le suffrage. C’était la motivation forte du royaliste La Tour du Pin quand il évoquait « la monarchie dans l’Etat, la démocratie dans la commune ».

     

     

    En tout cas, la Monarchie royale doit profiter de sa situation au-delà des jeux économiques et politiciens (les uns étant souvent liés aux autres en République) pour imposer les conditions véritables de l’équilibre social et incarner la justice sociale, y compris au risque de mécontenter les puissances financières qu’il ne s’agit pas de détruire mais d’ordonner au bien commun, comme les rois capétiens et suivants surent le faire jusqu’au XVIIIe siècle : les Fouquet contemporains doivent vivre dans cette crainte salutaire d’un Louis XIV embastilleur. Cette crainte serait le commencement de la sagesse pour eux, et l’assurance de leur serviabilité au bénéfice du pays et de ses forces vives et populaires…

  • A la découverte de l'homme Maurras : Notre visite du ”jardin qui s'est souvenu” est maintenant achevée...

    lafautearousseau se propose ici de vous faire découvrir Un patriote, nommé Maurras. Maurras est en effet inconnu du grand public, parce que volontairement ignoré par la conspiration du silence, entretenue par le Système pour lequel Maurras n'est pas "dangereux", mais "le seul dangereux", car il en a dénoncé les bases idéologiques et parce qu'il l'a remis en cause dans ses fondements révolutionnaires.

    C'est donc à une sorte de feuilleton, à la découverte de l'homme Maurras, que nous allons vous entraîner, d'ici les prochaines élections municipales.

    Celles-ci, nous l'avons dit, seront peut-être décisives pour l'avenir de la Maison du Chemin de Paradis, fermé aux Français aujourd'hui par le dernier Mur de Berlin d'Europe : celui, invisible, du sectarisme haineux de la Mairie communiste, qui préfère laisser fermée (en attendant qu'elle ne s'écroule ?) une belle demeure qui pourrait être intégrée au réseau des Maisons des Illustres, et devenir un centre national et international de recherches et débats intellectuels de haut niveau sur Maurras, sa vie, son oeuvre; un lieu culturel vivant et rayonnant...

    Aujourd'hui : Notre visite du "jardin qui s'est souvenu" est maintenant achevée...

    Vous en savez maintenant assez pour aller vous promener, un jour, dans le jardin de Charles Maurras, si un jour la Mairie de Martigues, dans sa grande bonté, rendait de nouveau possible sa visite...

    Pour l'instant, elle préfère laisser pourrir sur pied la maison, toujours fermée, jamais aérée ni chauffée; et la visite du jardin est impossible parce qu'interdite, ou l'inverse : pourquoi ? on ne sait plus trop, tant d'explications aussi incompréhensibles que contradictoires ayant été données...

    Contentons-nous donc de faire ce que nous pouvons, c'est-à-dire d'alerter, et nous verrons bien ce qui se passera, déjà avec les prochaines élections municipales...

    En attendant, nous sommes heureux de vous avoir fourni matière à vous cultiver, et nous continuerons notre campagne "Défendez Maurras ! Sauvez sa maison ! " jusqu'à ces municipales prochaines. Ensuite, on verra quelles formes notre action doit prendre...

    Terminons cette semaine notre explication de ce jardin en lisant un court passage du prologue des Quatre nuits de Provence : Imaginons, Maurras est chez lui, il regarde par sa fenêtre, il pense, il médite; le soir tombe...

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    Prologue des Quatre nuits de Provence....

    "La journée va finir sans flammes, j’ai prié qu’on n’allumât point.
    Que le soir monte avec ses fumées incertaines : le détail, l’accident, l’inutile y seront noyés, il me restera l’essentiel.
    Ai-je rien demandé d’autre à la vie ?

    Donc, çà et là, dans ses transparences divines, traversées de soudaines opacités, le Soir léger et pur se rend, peu à peu, à la Nuit. Sur la pente gauche du ciel, le croissant couleur de perle s’élève, glisse, coule à l’autre versant, pareil aux concessions d’une rêverie fatiguée qui se replie sans hâte et ne faiblit pas sans honneur. Cette face souffrante pourrait décliner en silence. Mais l’accent de sa flamme morte insiste, de très haut, et m’impose, en quelque manière, le ressouvenir du refrain d’un beau chant entendu, il y a de longues années, et qui n’a rien perdu de sa force sur ma pensée. Ses délices renaissent, leur voix remplit mon ciel, devenu tout entier musical et sonore :

    Va, mon ami, va,
    La lune se lève !
    Va, mon ami, va.
    La lune s’en va !

    L’astre, étonné, a fait une halte apparente. Ma veille est suspendue aussi, mais non le cours de mes pensées qui se précipitent, et les petits flots qu’elles roulent valent en nombre et en vertu les parcelles étincelantes dont l’éther est criblé.

    Le glissement lunaire reprend. J’ai quitté la fenêtre d’où je le regardais, et m’éveille sur ma terrasse provençale, un peu scandalisé du temps que je dissipe à subir la révolution nocturne des songes : car je les reconnais pour de simples échos du passé.

    Qu’on leur pardonne, ainsi qu’à moi ! Ces hôtes anciens d’une mémoire minutieuse et tenace ont d’abord été convoqués, s’il m’en souvient, comme les témoins du mouvement originaire de ma pensée : ils comparaissent devant moi pour m’aider à écrire un Mémorial intellectuel. Mais je vois bien qu’ils se moquent des témoignages et ne sont animés d’aucun désir étranger à leur joie de vivre ou plutôt de survivre.

    N’étant plus rien que ce qu’ils sont et ne voulant rien d’autre, ils marchent et ils parlent, ils pleurent et ils rient sur le théâtre intérieur sans autre objet que de reparaître tels qu’ils furent, non sans se retourner de temps en temps, pour me dire qu’il ne m’est pas permis de les laisser mourir.

    Pas plus que moi, ils ne s’étonnent de leur étrange résistance aux forces de ruine. Ils sont fidèles, étant vivaces, et me remplissent à mon tour de l’horreur d’un oubli qui doit les coucher avec moi. C’est pour cela que je redis à mes homuncules si vifs, en les dévisageant et en les nommant un par un :

    Va, mon ami, va.

    Un seul point me surprend, le charme que je trouve au jeu de mes ombres heureuses.

    Mais rien n’en délivre mon cœur, il est le prisonnier de ces figurines d’enfance que durant un demi-siècle je me suis montrées, racontées et presque chantonnées, à moi, il est vrai, pour moi seul…

    Va, mon ami, va,
    La lune s’en va !

    Qu’elle aille ! Seulement ne la suivez pas, vous autres, vieux amis, condamnés à passer comme elle ! Restez, attendez, revenez, pour revivre et briller, pour me baigner encore, pendant ces quelques nuits, d’un rayon du jour éternel.

    lafautearousseau

  • Le 21 Janvier 1793, la France s’est suicidée… par Christian Vanneste

    Le 21 Janvier 1793, la France se suicidait en guillotinant son Roi, Louis XVI. C’est Renan qui, après la défaite de 1870, portait ce redoutable jugement sur notre histoire. Au lendemain du désastre de Sedan, une majorité parlementaire monarchiste, mais divisée entre les prétendants au trône avait failli restaurer la royauté. Par la suite, c’est la République qui a été établie, d’une manière apparemment irrévocable, et portée par une idéologie qui faisait de l’ancien régime un passé non seulement révolu, mais condamnable, et d’ailleurs condamné par le progrès.

    3309368304.jpgLes Jacobins, les régicides de 1793, allaient imposer leur domination politique et intellectuelle, et leur vision de l’histoire à travers leurs héritiers et ceux-ci par le biais d’un enseignement pétri de leurs préjugés. Comme durant la première révolution, un mouvement sinistrogyre, « à gauche toute », s’enclenchait qui faisait se suivre les opportunistes, les radicaux, les radicaux-socialistes, les socialistes et les communistes. Beaucoup de Français ont baigné dans cette atmosphère idéologique qui a consisté à identifier la gauche au progrès social et la droite à la réaction sans lendemain. De Gaulle a, pour une part, échappé à ce mouvement, mais sans pouvoir l’arrêter. Le stupide « 1968 » le démontre : alors que la France s’est redressée, et a retrouvé sa place dans le monde, les enfants de privilégiés jouent à la prise d’une Bastille imaginaire, montent des barricades comme le Marius des Misérables, préfèrent Trotsky et Mao à de Gaulle, Sartre à Raymond Aron. Nos élites manquent rarement d’étaler leur légèreté politique. Les syndicats saisissent alors l’opportunité de partager les richesses avant qu’elles soient créées, sans le moindre souci de la compétitivité de notre économie. Il faudra la dévaluation, après le départ du Général, pour compenser le handicap, comme d’habitude. De Gaulle, lui-même, aura toujours cherché à composer avec le sens de l’histoire, en pensant que c’était le seul moyen pour la France de ne pas s’effondrer. Le problème, c’était que les gauchistes allaient plus vite et plus loin que lui dans cette direction : ils ont de plus en plus dominé la pensée française, influencé les élites, investi les médias, et la France a continué irrémédiablement sa chute en se croyant exemplaire.

    La comparaison entre les destins de la France et du Royaume-Uni devrait cependant rendre plus lucide sur le suicide français. En 1789, la France est de loin le pays le plus peuplé, le plus riche et le plus puissant d’Europe. Les cours européennes parlent français et imitent Versailles. Nos écrivains font rayonner la culture française. Depuis Denain, en 1712, pas une armée étrangère n’a foulé le royaume. La dernière guerre contre l’Angleterre a été gagnée à Yorktown en permettant l’indépendance des Etats-Unis. Louis XVI veille à ce que la flotte française gagne en puissance, puisqu’elle est notre faiblesse. L’armée est la plus forte d’Europe et fort bien équipée, notamment en artillerie. La partie n’est pas jouée avec les Anglais pour la domination du monde. L’Espagne a aussi pour roi un Bourbon, cette famille qui règne à Naples et à Parme. Après le mariage avec Marie-Antoinette, l’Autriche n’est plus l’ennemie mais l’alliée catholique contre la Prusse. Sur le plan de ce qu’on appelle aujourd’hui la géopolitique, à ce moment, le monde peut encore être français. Les désastreuses guerres de la Révolution et de l’Empire vont définitivement asseoir la domination des Anglo-Saxons, Anglais jusqu’au lendemain de la Première Guerre Mondiale, Américains ensuite, dont les Français ne seront plus que les seconds comme lors de l’absurde campagne de Crimée contre la Russie. L’Angleterre n’a subi ni défaite, ni invasion et s’est délestée de son Empire sans guerre tout en conservant avec lui d’étroits rapports à travers le Commonwealth dont la Reine est le chef symbolique, ses 53 Etats parmi lesquels 16 royaumes dont elle est la Reine.

    La France, c’est un seul régime en mille ans, et une rafale baroque de rois, d’empereurs, de républiques et de dictatures, en deux-cents ans, pour aboutir à la conclusion que notre système ne fonctionne pas très bien, et qu’il faudrait le changer une fois encore …. Depuis leur seconde révolution en 1688, les Britanniques qui avaient préservé la monarchie et seulement changé de dynastie à cette occasion, ont régné sur la planète durant un siècle grâce à des institutions adaptées avec pragmatisme, mais jamais bouleversées, et un parti de droite insubmersible, le groupe parlementaire séculaire, Tory, devenu il y a plus d’un siècle le Parti Conservateur… Certes, l’Empire a vécu, mais le monde entier parle anglais, y compris en piétinant de plus en plus le français chez lui. Il est difficile de ne pas penser dans la langue que l’on parle. Le marché et le droit, le « libéralisme » se sont imposés à l’idée d’un Etat centralisateur et rationnel en recul partout.

    Bien sûr, il est absurde de vouloir réécrire l’histoire. Mais la nostalgie zemmourienne ne pointe pas suffisamment cette date, qui précède évidemment la conquête de l’Algérie. Le 21 Janvier 1793 fut le choc entre les préjugés de la tradition et ceux du fanatisme. Lorsque la tradition est revenue dans les fourgons de l’étranger, en 1814 et 1815, elle avait sans doute définitivement perdu la partie. Mais il serait bon que les Français prennent conscience qu’il y a 227 ans, la France a fait fausse route. La Russie de Poutine qui amoindrit la rupture révolutionnaire s’appuie sur la fierté d’une histoire qui englobe le Tsar, l’orthodoxie et la grande guerre patriotique contre le nazisme. Elle déplore l’assassinat de la famille impériale par les bolchéviques.

  • Diversité culturelle et pensée unique : quelle cohérence ? par Christian Vanneste

    Notre pays collectionne les contradictions mortelles. Parmi celles-ci, il y a l’incroyable rencontre du multiculturalisme et de la pensée unique. La tradition cohérente de la France reposait sur l’idée inverse : la France a bien, contrairement à l’une des sottises proférées par Macron, une culture, un mode de pensée largement dominant et qui consiste à « cultiver » l’esprit critique, la souplesse intellectuelle autant que la raison, en évitant les fanatismes et les systèmes.

    3309368304.jpgPar un incroyable renversement, la caste intellectuellement décadente qui domine l’enseignement, la culture, les médias, et influence de manière déterminante la politique, promeut jusqu’à l’absurde la diversité communautaire et fait preuve de sectarisme à l’encontre de tout ce qui s’écarte du « politiquement correct », formule lénifiante qui ne désigne rien d’autre que son idéologie, c’est-à-dire le discours inconséquent et fallacieux qui n’a pour seul mérite que de légitimer son pouvoir, de même que la marxisme-léninisme justifiait la dictature soviétique.

    L’un des derniers exemples de ces incohérences affichées avec une arrogance sans bornes a été offert par la direction de l’Institut des Sciences Politiques de Lille. « L’Arène » y organise des conférences-débats. L’association qui rappelle avoir invité précédemment Fabrice Arfi, rédacteur en chef de Médiapart ou Agathe Auproux, ex-chroniqueuse de l’émission « Touche pas à mon poste » avait donc programmé Charles Consigny et Geoffroy Lejeune, directeur de la rédaction de Valeurs Actuelles. Un collectif gauchiste a aussitôt clamé son opposition à cette venue , déclarant : « À une époque où la crise climatique s’accélère gravement, que l’extrême droite tue en masse et que l’islamophobie atteint des sommets, il est scandaleux, irresponsable et dangereux de tenir cette conférence.  » Le directeur de Sciences-Po, la main sur le coeur,  prend alors position et publie un texte sur la page Facebook de l’établissement. «J’ai fait savoir aux organisateurs que… la participation de l’un des invités ne m’apparaissait pas souhaitable … le journal pour lequel il travaille a été condamné en 2015 pour des faits particulièrement graves après la publication d’un dossier dont il avait été l’un des auteurs. » C’est Geoffroy Lejeune qui est visé en référence à la condamnation  pour «provocation à la discrimination, la haine ou la violence envers les Roms» après la publication en 2013, dans Valeurs Actuelles d’un dossier intitulé «Roms, l’overdose», auquel il avait contribué. Le directeur ajoutait bien sûr qu’il agissait en responsable pour éviter les incidents.

    Cette affaire est un modèle du genre. On y trouve d’abord l’inégalité de traitement en faveur de la gauche : Médiapart, c’est possible, Valeurs Actuelles, non ; ensuite, un collectif associatif qui s’érige en inquisiteur de la pensée incorrecte, avec une menace à peine voilée par l’adjectif « dangereux », une outrance des propos qui devrait les disqualifier, car on se demande quelle est cette « extrême-droite » qui « tue en masse », et l’accent mis sur deux menaces étrangères l’une à l’autre, le climat et l’islamophobie, dont le caractère obsessionnel vise à saturer l’opinion publique ; enfin, il y a le censeur à la tartuferie ciselée qui va chercher une condamnation indirecte pour justifier au scalpel la position au marteau-pilon du collectif. Les positions politiques et les amitiés de ce personnage sont bien connues. Il est consternant que dans notre pays la formation politique soit tombée sous la coupe d’individus capables de participer à la réduction du débat et de la liberté d’expression. La loi n’a cessé de rétrécir le champ du politiquement correct, c’est-à-dire du prêt-à-penser obligatoire. Les « phobies » univoques, comme l’islamophobie, sont des signes alarmants de cette atteinte à la démocratie, c’est-à-dire au pluralisme des idées. La phobie est une peur pathologique qui relève de la psychiatrie. La méfiance voire l’hostilité raisonnée  envers une religion, appartient au domaine de la pensée de même que le refus de la présence importune, voire dangereuse d’une immigration insuffisamment contrôlée. C’est une position et une opinion politiques que les faits sont loin de démentir. Valeurs Actuelles avait été condamné pour le dossier sur les Roms, et peu avant pour « islamophobie », justement à cause d’une couverture présentant une femme voilée. La Cour de Cassation a annulé cette condamnation, dieu merci.

    Il faut noter que c’est aussi dans le Nord, à Lille, que François Hollande devait s’exprimer mardi 12 novembre à l’université de Lille 2 sur la crise de la démocratie, et n’a  pas pu le faire. En cause, l’irruption d’une cinquantaine de militants d’ultra-gauche qui a dégradé la salle et détruit les exemplaires du dernier livre que l’ancien président de la République venait présenter. Là encore, un haut lieu d’enseignement où la liberté de penser devrait régner en maître, a été victime de ce qu’on appelle à gauche le fascisme, quand il est « de droite »et appartient à l’histoire, mais qui est pardonné et même parfois sanctifié lorsqu’il sévit à gauche. Cette orientation idéologique systématique de la pensée est une véritable décérébration. Qu’elle se produise dans des institutions vouées à l’enseignement est terrifiant. Le racisme anti-blanc, la christianophobie, la francophobie sont niés. En revanche, l’antiracisme peut devenir un racialisme où l’affirmation de la couleur noire se déploie, l’islam peut affirmer sa fierté d’être une religion de paix et d’amour, ce que ni ses textes, ni ses pratiques n’étayent de façon probante, les étrangers peuvent exhiber leur identité nationale, sans restriction. Tandis que la mosaïque culturelle prospère, la pensée subit le joug du terrorisme intellectuel.

  • La crise de 2008 a profité à l'Asie (petit rappel pour comprendre 2020), par Jean-Philippe Chauvin.

    Le texte ci-dessous a été écrit et publié en octobre 2008, et il ne me semble pas incongru de le republier aujourd'hui, pour entretenir la mémoire et en tirer quelques leçons, au regard de la crise actuelle qui voit désormais la Chine tirer bénéfice d'une situation qu'elle n'a pas entièrement créée même si elle en porte une part de responsabilité indéniable. Après 2008, la mondialisation a continué et s'est même accélérée, et la Chine a conforté ses positions, aidée en cela par l'irresponsabilité ou la cupidité des actionnaires et de nombre de multinationales qui ne raisonnent qu'en termes « d'avantages comparatifs » : les conséquences sont là, et nous pouvons les mesurer (les masques et le matériel médical qui manquent en France, puisque désormais fabriqués en Chine, par exemple), sans être bien certain, pour mon compte, que la République et les partisans de la mondialisation libérale aient la volonté réelle d'infléchir les choses et de revenir à plus de raison et, disons le mot, de « nation »...

    jean philippe chauvin.jpgLa crise financière continue à se développer sans que l’on sache combien de temps elle va durer et quelles en seront toutes les conséquences. La dégringolade des places boursières donne l’impression d’une vaste panique incontrôlée et d’une perte de confiance généralisée dans le système financier mondial. Mais, au-delà des évènements, il me semble important de chercher à comprendre ce qui se passe, condition indispensable à toute stratégie économique crédible et à toute réponse politique.

     

    En fait, il n’est pas inutile de se rappeler que le terme même de crise est la traduction française du mot grec « krisis » qui signifie « séparation » : c’est bien de cela dont il s’agit, une séparation entre un avant et un après, une forme de transition en somme entre deux situations, deux réalités, deux mondes.

     

    Ainsi, nous assistons au « passage de témoin » de la puissance financière et économique, des pays du Nord (Etats-Unis, pays européens, principalement) à certaines nations d’Asie, en particulier l’Inde et la Chine, ce que soulignent quelques (rares) articles qui évitent de tomber dans le piège d’une lecture simpliste et seulement idéologique, pas toujours suffisante pour comprendre la situation présente : si crise du capitalisme il y a, cela ne signifie pas la fin de celui-ci mais son transfert dans de nouveaux espaces dominants, dans de nouvelles zones de réalisation et d’expansion. Le centre du monde se déplace vers l’Asie et, comme tout déracinement de ce que l’on a cru éternel et inexpugnable, cela se fait dans de grands craquements et dans la poussière soulevée par ces grands arbres qui s’abattent sur un sol devenu aride… L’argent est désormais ailleurs que dans nos pays qui, en caricaturant un peu, se contentent juste de consommer des produits fabriqués en Asie, serrant par là-même la corde autour du cou de nos économies.

     

    La question posée dans « Le Monde 2 » dans son édition du samedi 4 octobre : « Au décours de cette crise, les actuels maîtres du monde seront-ils toujours ceux de demain ? » trouve ainsi sa réponse dans un autre article du « Monde » du même jour : « La crise renforcera l’Asie », article de l’économiste Jean-Raphaël Chaponniere qu’il conviendrait de découper et de conserver dans son portefeuille, non comme un talisman mais comme un avertissement, et qui confirme mes prévisions déjà anciennes.

     

    Ainsi, est-il expliqué que « la crise financière, la plus grave depuis 1929, accélérera le glissement du centre du monde vers l’Asie », glissement commencé depuis les années 80-90 et freiné par la crise de 1997. « Cependant, tous les pays asiatiques ont tiré les leçons de la crise de 1997 et ont accumulé des réserves pour se protéger. Investis en bons du Trésor américain, elles ont permis aux Etats-Unis de maintenir des taux d’intérêt bas et aux ménages américains de s’endetter davantage. L’Asie a ainsi profité de la boulimie de consommation aux Etats-Unis. Ces excès ont conduit à la crise. (…)

    Depuis l’été 2007, les Etats-Unis souffrent de la grippe des subprimes et, si les marchés asiatiques ont souffert, les économies réelles ont été épargnées. En 2009, elles seront bien sûr affectées par la récession qui s’annonce. Pour autant, elles connaîtront un rythme de croissance supérieur à celui des économies américaines, européennes et japonaises.

    (…) L’attention portée aux échanges occulte l’essentiel : la croissance asiatique repose bien davantage sur la demande domestique. L’investissement et la consommation sont les principaux ressorts de ces pays. Ils ne seront affectés qu’à la marge par la crise. (…)

    Les Etats et les ménages asiatiques qui en ont les moyens financiers continueront d’investir et de consommer. S’ils ont pâti de la crise financière, les fonds souverains asiatiques vont quant à eux probablement saisir cette opportunité pour acquérir des actifs aux Etats-Unis et en Europe.

    (…) En accélérant le basculement vers l’Asie, la crise actuelle accouchera d’un monde multipolaire. ».

     

    Comprendre ce transfert de richesses et de puissance économique, c’est en prévenir aussi les conséquences et en amortir le choc : le capitalisme libéral, s’il se retire de nos terres pour aller fleurir ailleurs, pourrait bien laisser la place à de nouvelles formes, traditionnelles ou inédites, d’économie et de société, mieux orientées vers le partage et la sobriété. Pour en finir, non pas avec l’Argent, mais avec son règne indécent et cruel…

  • Santé et environnement, par Frédéric Poretti-Winkler.

    Un peuple drogué…
    Ecoutons Konrad Lorenz : « Dans la pensée occidentale, il est devenu courant de considérer comme étranger au monde des valeurs tout ce qui peut être expliqué par les lois de la nature. Être scientifiquement explicable équivaut à une dévalorisation ».
    Quel est l'impact réel de surconsommation de médicaments ?

    De nombreuses études tendent à prouver que l'utilisation élevée de calmants, dont la France est le 4ème consommateur mondial, rend les Français drogués, c'est-à-dire dépendants d'un certain nombre de substances pas forcément très naturelles. L'accoutumance et l'habitude, voir le phénomène de mode dans la prise régulière de certains traitements finit par transformer petit à petit la population en un monde de « zombies ». Quant à l'élevage agricole, des poissons aux bovins, celui-ci est aujourd'hui traité aux antibiotiques à grosses doses, au risque de provoquer des effets secondaires indésirables. Inutile de sortir des grandes écoles pour savoir que ces traitements se retrouvent dans nos assiettes et qu'ils sont ingérés pour être après retrouvés dans nos organismes.

    frédéric winkler.jpgLa dégradation de l'homme

    L'ingestion de ces viandes contenant de tels traitements rend les bactéries résistantes pour les patients humains obligeant ainsi la recherche médicale à trouver de nouveaux médicaments plus puissants jusqu'à ce que l'organisme humain ne puisse plus supporter une telle chimie. Ces bactéries ingérés par l'homme sont ensuite rejetées avec les déchets animaliers dans l'environnement, donc dans l'eau pour être ainsi retrouvées dans les animaux que nous consommons, bref dans nos assiettes… Rappelez-vous la « vache folle », et ces farines animales produites en dessous de la température nécessaire à l'éradication de certains virus, et cela pour plus de bénéfices mais n'éliminant plus suffisamment les bactéries. Voyez les conditions d'élevage en batterie et l'entassement d'animaux engraissés, cela pour satisfaire aux exigences de rentabilité de gigantesques firmes de l'agroalimentaire comme de la Grande distribution. Qu'importe la dégénérescence d'un peuple pour les hommes d'affaires qui nous gouvernent, mais ces hommes, eux, que mangent-ils ?
    C'est pourtant un problème de première importance pour un Etat pourtant responsable de la santé des citoyens !

    Mais qu'importe la santé publique pour la république ?

    Comme il lui importe peu, le taux de suicide des jeunes, des agriculteurs (un chaque jour, dans nos campagnes), des commerçants et autres professions, le mal vivre de nos concitoyens n'intéresse pas ceux qui nous gouvernent. L'élevage intensif est gros consommateur d'antibiotiques et de nombreux cheptels sont à la limite du tolérable. Les animaux sont traités comme jamais nous n'aurions accepté que soit traité un être humain. Les conditions d'élevage doivent être revues et les animaux ont droit à un minimum de respect dans un développement de vie naturel, même s'ils doivent finir dans nos assiettes. C'est une question d'éthique, l'entassement dans des hangars, la promiscuité, l'hygiène, voir la décence, bref de véritables camps de concentration animale, cela suffit !

    Le Problème de l'eau

    Une alarme fut lancée par de nombreux pays sur les dangers liés à la consommation de l'eau contenant des résidus de déchets humains. De nombreuses études font part des risques liés à la présence traces de pilules féminines retrouvées dans l'eau et le cycle alimentaire des poissons pour être finalement retrouvées dans nos verres. Je vous laisse imaginer ce que les résidus de pilules abortives donnent et donneront chez l'homme dans son cycle biologique sur plusieurs générations. L'eau, source de vie, or du XXIème siècle, est gravement menacée. Selon Hippocrate et plus près de nous, le docteur Carton, la première des médecines, reste notre nourriture. Nous vivons l'ère du tout médicament comme de l'alimentation produite à force d'engrais, d'insecticides, pesticides et fongicides, n'apportant plus le nécessaire vital à notre développement. Comme je l'avais écrit pour les déchets nucléaires comme de la radioactivité retrouvés jusque dans le pôle Nord, nous retrouvons dans les cours d'eau, lacs et fleuves des traces de métaux lourds, des déchets chimiques voir des hydrocarbures, sans compter les déchets humains, souvent bien voyants (plastiques et autres emballages…). Comment imaginer que nous ne puissions subir les conséquences de déchets comme le plomb ou le mercure, alors qu'il est prouvé que nous retrouvons 90% des antibiotiques dans notre eau domestique. Signalons au passage que les robinets des Côtes d'Armor déversent une eau bien trop chargée en nitrates à cause des engrais chimiques utilisés sur les champs !
    Que ce soit les produits pétrochimiques ou autres, ces diverses pollutions « bénignes » se retrouvent dans notre eau que nous absorbons, certes à faible quantité mais qui à terme endommagent nos reins, notre foie et déclenchent des maladies à plus ou moins brève échéance. Les diagnostiques, bien feutrées parleront, de vie surmenée, de nervosité, de manque d'activité sportive ou d’une alimentation mal équilibrée ! C'est un peu comme après le passage du nuage de Tchernobyl où l'augmentation des cancers de la tyroïde était un hasard !!!
    Quel sera l'impact sur les générations futures ?
    Mais dira-t on, on ne savait pas ? La nature est forte pour supporter et recycler naturellement bon nombre de nos extravagances, jusqu'à quel point ?
    Evitons de déshériter l'avenir, comme aurait dit de Bonald. Même si la dose absorbée reste infime, peut on réellement mesurer les dégâts biologiques pour l'avenir sur le plan environnemental dans le risque d'un enchaînement catastrophique de l'écosystème lorsqu'un composant de la chaîne alimentaire est irrémédiablement détruit ? Il y aura obligatoirement un point de non retour, car la destruction sera irrémédiable. Faut-il atteindre cette limite ?
    La présence d'hormones artificielles modifie la vie animale : on constate une augmentation des poissons cancéreux ou d'animaux devenus androgynes comme les ours et d'autres avec des malformations sexuelles : « On observe une forte dévirilisation des poissons mâles… ». Pas très rassurant pour la pérennité de la faune sauvage ! Sans oublier les risques que fait courir à la biodiversité florale comme animale l'usage des OGM et les contaminations par ceux-ci des espaces avoisinants. La société de consommation, en plus d'être énergivore, produit des tonnes de déchets et parmi eux bon nombre sont nocifs et difficilement recyclables. Dans les polluants que l'homme laisse dans la nature, il en est un qui petit à petit atteint la virilité même de l'homme. On a détecté plus de 200 polluants à dose toxique dans le cordon ombilical des nouveau-nés aux Etats-Unis !! Dangereux, non ?
    Bref, les médias comme l'histoire officielle ne sont que mensonges, au profit d’une caste de parvenus qui « sucent » l'énergie écologique, économique et financière de notre pays. Cela, au nom d’une trilogie mensongère : Liberté, Egalité et Fraternité. C'est ainsi en s'en réclamant, que la république berne le peuple auquel elle a enlevé toute volonté et pouvoirs concrets pour ne lui en laisser que l'apparence trompeuse. La solution reste dans la recherche d'un équilibre perdu, celui d'une société humaniste comme d'un élan que le système républicain a détourné de son but original, parce que celui-ci avait promis le bonheur du peuple et finalement l'entraîne dans l'abîme. Le royaliste Jean-Charles Masson disait : « Notre écologisme est construit autour de la tragédie de l'homme déraciné, et l'inhumanité des villes, le sac de la nature ne sont que les effets visibles de ce déracinement.... L'écologisme intégral est la défense de l'homme total tel que le définit la tradition latino-chrétienne ».
    F. PORETTI - Winkler (Projet de Société, à suivre)

  • Le virus se moque des mots et des chiffres !, par Christian Vanneste.

    Le Covid-19 a donc jusqu’à présent tué plus de 17 000 personnes en France. Notre pays se situe parmi ceux qui auront le plus mal résisté à la pandémie. Cette sinistre surprise devrait être pour les Français l’occasion d’une prise de conscience. Le système de santé que le monde nous enviait, l’Etat stratège, impérieux et omnipotent, censé nous protéger, n’ont pas été à la hauteur. La qualité de l’armée de ceux qui ont affronté le virus sur le terrain, leur savoir-faire et leur dévouement, ne sont pas en cause. Beaucoup sont allés au combat sans armes parce que l’Etat avait été imprévoyant. Et c’est bien ce rapport de la France charnelle avec son Etat qui doit être « réinventé », comme dirait notre bavard président.

    christian vanneste.jpgLe rapport entre le peuple et l’Etat en France n’est pas démocratique. La crise sanitaire actuelle le révèle cruellement. Une démocratie digne de ce nom repose sur le pluralisme, et sur la transparence de l’information. Or, le prétexte de l’urgence devant le péril a justifié au nom de l’union nationale, un accroissement inouï de la verticalité du pouvoir. La vie du pays semble rythmée par les allocutions présidentielles et les conférences de presse quotidiennes du Directeur Général de la Santé. Avec ce dernier, on comprend ce que Nietzsche voulait dire en parlant de « l’Etat, le plus froid des monstres froids » qui « ment froidement ». C’est chaque soir un long écoulement de chiffres. C’est ainsi qu’on apprend que le nombre élevé des décès ajoutés hier à la liste des victimes, 1438, s’expliquait par « une remontée des données », les 924 morts des Ehpad connues avec retard. Ainsi, les personnes âgées, décédées sans un adieu à leur famille, ne sont que des « données ». Pour l’Etat, les personnes ne sont que des statistiques, dont Churchill disait qu’il n’y croyait que lorsqu’il les avait lui-même falsifiées. Il faudrait s’interroger sur l’absence de « données » pour les décès à domicile. Le surprenant chassé-croisé entre la restriction de l’utilisation de la chloroquine et l’autorisation de la vente d’un puissant sédatif favorisant la « mort douce » chez soi, le « rivotril », soulève le doute quand on sait que plusieurs régions ont vu leurs capacités hospitalières saturées. Néanmoins, jour après jour, il s’agit pour la technostructure médicale de justifier les mesures prises par l’Etat, le confinement notamment, et les résultats positifs qu’elles engendrent. Pour l’instant, ceux-ci sont modestes : une décrue des réanimations d’abord, des hospitalisations ensuite. Il aurait été inquiétant qu’en restreignant les contacts entre les gens, l’épidémie ait poursuivi sa propagation à grande vitesse. En revanche, l’insuffisance des tests ne permet pas de mesurer le risque qui surgira à la fin du confinement.

    Le versant humain de l’Etat est, lui, incarné par le président. Celui-ci a déployé une humilité et une empathie dont la foule de ses flagorneurs médiatiques s’est félicitée. Mais au-delà de cette orchestration des médias dont bénéficie étrangement le régime actuel, sans doute pour la première fois dans la Ve République, personne ne semble s’inquiéter de la dérive autocratique de celui-ci. Depuis 2017, les crises n’ont pas manqué. A chaque fois, le pouvoir a remonté la pente parce que le président monopolisait la parole. On subit donc une alternance entre les faits, plus calamiteux les uns que les autres, affaire Benalla, protestation des gilets jaunes, grèves paralysantes contre la réforme des retraites, et les logorrhées macroniennes noyant les difficultés. Plus celles-ci sont rudes, plus l’occasion semble s’offrir d’un exploit oratoire. Le virus doit être pour Macron une sorte d’Austerlitz du verbe. La France n’était pas prête, le gouvernement a pris un retard qui a coûté des vies, le président a montré le mauvais exemple et pris des décisions absurdes comme les municipales la veille de la fermeture des écoles, mais tout cela est effacé parce que le grand déclamateur a dit que ça allait mieux et que les résultats étaient là. L’ennui, c’est qu’il a aussi fixé une date et annoncé la réouverture des crèches et des écoles, en même temps que la possibilité de tester les personnes à risques, le dépistage généralisé n’ayant pas de sens. Cette absurdité en aval fait écho à la précédente : les jeunes porteurs présentent moins de risques pour eux-mêmes que pour les adultes qu’ils vont côtoyer. Tester toute la population serait inutile, car une personne négative pourrait être contaminée l’instant d’après ? Certes, mais la « positive », elle, pourrait être isolée et traitée, ce qui comme l’usage généralisé du masque, serait plus intelligent qu’un confinement prolongé dont la logique ne répond qu’à la pénurie, de tests, de masques, de lits, de respirateurs, et même de chloroquine comme le souligne le Professeur Perronne.

    Face au technocrate plus politique que médical, le DGS Salomon, il y a le vrai médecin, qui continue à voir des malades, le professeur Raoult. Quant à l’autocrate, « grand causeux, et petit faiseux » comment le définir ? Napoléon flattant ses troupes ? Moïse guidant son peuple vers la terre promise du 11 Mai ? Non, Néron disant : « Quel grand artiste meurt en moi ! » On croyait avoir un énarque-banquier, « Mozart de la finance », et la France est à 100% du PIB de dette et passera à 118%… cette année. On croyait avoir le guide d’un peuple en marche et il l’a mis aux arrêts. En fait, on a un comédien, dont le narcissisme prend un évident plaisir à tenir les Français par le verbe. Leur réveil risque d’être terrible lorsque la réalité percera l’écran de la parole !

  • Gouvernement : le « risque zéro » pour feuille de route, par Elisabeth Lévy.

    Source : https://www.causeur.fr/

    Big Mother is watching you

    Un pays dont le gouvernement affirme que préserver la santé des citoyens « est la première préoccupation » devrait davantage nous inquiéter.

     

    2.pngImagine-t-on le général de Gaulle dire aux Français « prenez soin de vous » ? Que le Premier ministre ait conclu sa conférence de presse par ces mots autrefois réservés à la vie intime, en dit long sur l’évolution de notre rapport à l’État, une évolution à l’œuvre depuis longtemps, mais que l’épidémie pousse dans ses retranchements. 

    Nous l’acceptons et en redemandons, l’État est aux manettes, de notre vie collective et de nos existences individuelles : pas l’État autoritaire, oppresseur, pour tout dire patriarcal, mais l’État nourricier et consolant, un État maternant, que le psychanalyste et écrivain Michel Schneider a baptisé Big Mother dès 2002. Cet État qui se manifeste moins par l’autorité que par la bonté répugne à montrer ses muscles quand cela serait nécessaire. En revanche, toute mère angoissée étant à ses heures abusive, il a la sollicitude étouffante et volontiers sermonneuse, comme le montre le zèle avec lequel policiers et gendarmes se sont mis à surveiller et punir des criminels en baskets et autres indisciplinés du confinement. 

    SOS Français en détresse, j’écoute !

    Puisque, comme nous l’a appris Agnès Buzyn, il n’y a plus de différence entre père et mère, disons qu’Édouard Philippe s’est montré très parental, donc un peu professoral sur les bords. Comme tous les parents, il répète pour que ça rentre – « lavez-vous les mains », « le 11 mai ne sera pas le 16 mars ». Et tel un prof soucieux de ne pas perdre le dernier de la classe, il souligne, en les redoublant, les phrases importantes : « la rentrée des classes sera progressive… La rentrée ne se fera pas en un jour ». Comme tout bon parent, nos gouvernants s’inquiètent pour nous. Olivier Véran nous a conseillé d’aller chez le psy si on se sentait mal. Le gouvernement va-t-il ouvrir une ligne « SOS Français en détresse » ? On pense à L’arrache-cœur, ce roman de Boris Vian dans lequel une mère, folle d’angoisse à force d’imaginer les dangers qui guettent ses bambins, finit par les mettre en cage. Allons-nous demander à l’État de nous mettre en cage pour nous protéger ? 

    Et puis, il y a eu cet aveu : « Préserver la santé des Français est notre première préoccupation ». En conséquence, assurer la continuité de la vie de la nation est seulement la deuxième. Bien entendu, il n’y a rien de choquant à ce qu’on s’inquiète de la santé des Français. Ce qui interroge, c’est que cette préoccupation jouisse d’une primauté de principe : n’est-ce pas la marque de peuples soucieux de sortir de l’Histoire ? Si de Gaulle avait pensé que la santé est plus importante que la continuité de la vie de la nation, il n’y aurait pas eu d’appel du 18 juin. La santé n’est pas une fin en soi, mais une condition du développement individuel et collectif (même si on peut être génial et malade). 

    Le risque porté disparu

    Cependant, il serait injuste de reprocher au gouvernement sa sollicitude. Elle répond en effet à une demande sociale irrésistible et folle de sécurité illimitée. Selon une étude CEVIPOF/Le Monde, 44 % des Français préfèreraient moins de démocratie mais plus d’efficacité

    Dimanche, pendant de longues minutes, ce titre s’est affiché sur BFM : « Écoles : peut-on rouvrir sans risque ? ». Eh bien non, on ne peut pas. Mais, sauf à vivre sous protection intégrale, donc sous perfusion, il faudra bien les ouvrir. Accessoirement, la comparaison avec les soldats qui sortaient des tranchées est un brin indécente. Du reste, il faut se demander pourquoi, à l’inverse des professeurs, les plus âgés refusent, eux, d’avoir la vie sauve au prix de l’assignation à résidence. « Laissez-nous vivre », clament-ils. Ce qui signifie aussi « laissez-nous risquer de mourir ». 

    Il ne s’agit évidemment pas de laisser agir l’épidémie sans rien faire. Que nous ayons sacrifié l’économie à la santé des plus fragiles témoigne en effet de notre humanité. Que nous refusions aujourd’hui de prendre le moindre risque témoignerait de notre lâcheté : avons-nous demandé aux caissières si elles voulaient risquer leur santé ? 

    Le gouvernement, pour le coup, ne nous a pas raconté de craques. Il nous a bien expliqué que nous pouvions ralentir l’épidémie, pas l’arrêter. Entretemps, nous avons dimensionné notre système hospitalier de sorte qu’il puisse accueillir tous les malades. Désormais, comme l’a rappelé Edouard Philippe, nous devons vivre avec le virus. Autrement dit, tous ceux qui ne présentent pas de facteur aggravant vont devoir courir un risque – raisonnable, pas nul. 

    La peur est légitime. Mais l’histoire humaine est faite de peurs surmontées, de risques affrontés et déjoués. Qu’on soit infirmier, professeur, vendeur ou banquier, on ne peut pas aller travailler sans risque. Et on ne peut pas non plus tomber amoureux, acheter une voiture d’occasion, découvrir l’Amérique ou un vaccin contre la rage sans risque. 

    Vivre tue. Ce n’est pas une raison pour arrêter. 

  • «La comparaison du masque et du voile fait le jeu du salafisme», par Sophie de Peyret.

    «Plutôt que d’accorder une primauté indépassable aux libertés individuelles et aux intérêts particuliers, la France, au nom de l’intérêt général interdit un vêtement qui fracture la communauté nationale.» MIGUEL MEDINA/AFP

    Source : https://www.lefigaro.fr/vox/

    Le Washington Post a récemment comparé le port du masque et celui du voile intégral. La chercheur Sophie de Peyret juge cette rhétorique dangereuse. Elle rejoint en effet la thèse des tenants du djihad culturel pour qui le voile intégral est un vêtement comme un autre, souligne-t-elle.

    Décidément, il est peu de dire que la question du voile intégral demeure un inépuisable sujet d’incompréhension entre la France et les États-Unis. Dans un long article publié le 10 mai, le Washington Post s’est ironiquement ému du traitement accordé aux musulmanes voilées sur le sol français à l’heure où le masque s’impose à tous.

     

    Tout les distingue le masque et le voile dans la motivation des porteurs et plus encore dans la finalité de la démarche.

     

    D’un côté, le port de la burqa ou de tout autre vêtement qui dissimule le visage est pénalement répréhensible dans l’espace public français. De l’autre, le port du masque y est encouragé, voire imposé, dans certains lieux, tels que les transports notamment, pour lutter contre la propagation du Covid-19. Le journaliste, moqueur, conclut rapidement à une incohérence typiquement française tandis que les personnalités interrogées évoquent quant à elles «une lecture asymétrique», «arbitraire», voire «discriminatoire», une «schizophrénie»… N’en jetez plus!

    Néanmoins, cette analyse américaine revient à comparer des carottes et des choux-fleurs. Certes, carottes et choux-fleurs sont l’un et l’autre des légumes, tout comme masques et burqas sont l’un et l’autre des morceaux d’étoffe qui dissimulent le visage. Il serait alors tentant de les comparer. Pour autant, tout les distingue non seulement dans la motivation des porteurs mais plus encore dans la finalité de la démarche et dans les incidences sur la société. La comparaison constitue un contresens doublé d’une faute.

     

    Le masque, qui s’impose à tous sans distinction de sexe ou de religion, n’est le miroir d’aucune idéologie.

     

    Ici, le voile intégral qui relève d’une décision délibérée d’interpréter, de pratiquer et de manifester sa religion, qui réduit l’individu à son appartenance religieuse et qui sépare l’homme de la femme, la musulmane de la non-musulmane (ou de la mauvaise musulmane) dans une acception rigoriste de l’islam. Et là, le masque qui s’impose à tous sans distinction de sexe ou de religion, et qui n’est le miroir d’aucune idéologie si ce n’est celle de se protéger d’un mal invisible et planétaire.

    Plus largement, cet article suscite deux autres formes de remarques. La première concerne la thèse défendue par l’auteur et les personnes interrogées dans l’article - dont le moins que l’on puisse dire, est qu’ils ne brillent pas par la diversité des points de vue. Cette thèse rejoint dangereusement celles des mouvements communautaristes et des promoteurs d’un djihad culturel qui tentent d’imposer une lecture salafiste et de faire passer le voile intégral pour un vêtement comme un autre.

     

    En plaçant sur un pied d’égalité un masque à visée sanitaire et un voile à portée politico-religieuse, feignant de ne pas y voir de différence, le Washington Post s’aligne, l’air de ne pas y toucher, sur les propos de prêcheurs radicaux tels qu’Hani Ramadan (directeur du Centre Islamique de Genève) qui, s’appuyant sur un hadith, affirmait en mars dernier que «l’une des causes de la maladie est le fait que les hommes se livrent ouvertement à la turpitude comme la fornication et l’adultère». Elle alimente les messages qui fleurissent sur certains forums et réseaux sociaux où l’on peut lire que la pandémie frappant l’Occident n’est que juste retour des choses: ceux qui ont pénalisé la burqa et fait la promotion des mœurs dissolues sont aujourd’hui contraints de tous se couvrir, de garder leurs femmes à la maison, de fermer leurs bistrots et de bannir les contacts physiques de leurs habitudes. Idriss Sihamedi, fondateur de l’association Barakacity, s’est ainsi publiquement réjoui: c’est «la première fois de ma vie que je peux dire à une femme qui veut me serrer la main «non» dans la joie et la bonne humeur. Ça fait bizarre de voir que des choses halal deviennent normales»

     

    Dans la logique anglo-saxonne, les cultures, les comportements et les identités sont d’égale importance.

     

    Le second type de remarque nous emmène vers la philosophie politique. Dans la conception française, une large place est accordée aux notions d’universalisme des droits, de primauté de l’intérêt général ou de non-reconnaissance des groupes et des communautés. En revanche, les pays d’inspiration anglo-saxonne privilégient une approche multiculturaliste, selon laquelle différentes entités minoritaires culturellement hétérogènes sont juxtaposées sur un même territoire sans qu’il leur soit demandé d’abandonner leurs particularités. Dans ce système où les cultures, les comportements et les identités sont d’égale importance, tous sont fondés à revendiquer des droits et tous sont voués à évoluer de manière parallèle et donc non-miscible.

    De cette divergence essentielle naissent des conceptions bien différentes. À l’automne 2018, Emmanuel Macron rappelait que «nous ne sommes pas 66 millions d’individus séparés mais une nation qui se tient par mille fils tendus» : l’addition des intérêts particuliers ne constitue pas l’intérêt général. Il faut parfois en passer par des mesures exigeantes et contraignantes, consentir à renoncer à certains particularismes pour s’approprier un projet national plus grand que soi, pour s’incorporer à un tout qui dépasse l’individu.

     

    Le port du masque manifeste une volonté de vivre. Ensemble, quand les circonstances le permettront.

     

    Ainsi, ce que le journaliste du Washington Post qualifie de contradictoire et d’incohérent, se révèle en définitive très logique. Tout ne se vaut pas. Plutôt que d’accorder une primauté indépassable aux libertés individuelles et aux intérêts particuliers, la France, au nom de l’intérêt général interdit un vêtement qui fracture la communauté nationale. C’est bien au nom de ce même intérêt supérieur qu’il encourage le port du masque.

    Dans son article, le journaliste américain rappelle la position des législateurs français qui, lors des travaux préparatoires à la loi de 2010, considéraient que «la dissimulation du visage dans l’espace public manifeste le refus de vivre ensemble». En l’espèce, le port du masque manifeste surtout la volonté de vivre tout court. Ensemble, quand les circonstances le permettront.

     

    Sophie de Peyret est chercheur associé à l’Institut Thomas More. Elle a notamment publié le rapport L’islam en France, le temps des solutions. 35 propositions pour agir maintenant.

  • Vers l'aristocratie ouvrière, par Frédéric Poretti-Winkler.

    3834054413.45.jpgC’est dans un contexte de conflits et dans le but de la paix sociale que la rédaction des droits et devoirs par profession sera rédigé.

    La codification des corporations représenta à l’époque une grande avancée sociale et une conquête ouvrière…

    Ces organismes à la fois économiques et politiques, gérant l’organisation sociale dans la cité, représentaient un barrage aux gros entrepreneurs et aussi garantissaient les droits des ouvriers.

    frédéric winkler.jpgIl existait déjà de grandes industries qui employaient de nombreux ouvriers et celles-ci étaient tenues par de riches propriétaires bourgeois :
    « Toujours tisserons drap de soie,
    Jamais m’en serons mieux vêtues,
    Toujours serons pauvres et nues,
    Et toujours aurons faim et soif… » (Chrestien de Troyes 1170/1175)
    La terre de France voit s’élever les Cathédrales comme des champignons, symbolisant la richesse urbaine de l’époque. Les seigneurs féodaux et les villes organisent leur gouvernement à partir des cadres corporatifs présents, pour l’administration fiscale, militaire et électorale. C’est surtout dans les villes que les corporations jouent un rôle de premier plan, dans l’organisation politique et sociale, véritable chef d’œuvre économique des bourgeoisies du moyen-age. Imaginons comment une telle organisation pouvait tenir avec les difficultés qui pouvaient surgir ; guerres, pénuries, conflits sociaux…Les corporations sont des personnes féodales avec leurs droits et devoirs, blasons et gens d’armes. Les règles s’installaient et malgré quelques petites divergences, une harmonie s’établissait. On voit des seigneurs créer des communautés de travailleurs.L’abbé de St Denis(1175) garantie l’organisation de ses bouchers. Les rois auront toujours le soucis des travailleurs et seront qualifiés par eux de prince besogneux (Henri Ier,Philippe Ier,StLouis,Louis le Gros).Sous le règne de Philippe Auguste, la capitale compte 30 métiers organisés. Il laissa le gouvernement de Paris aux bourgeois pendant l’expédition en Terre Sainte. On trouve bien là, l’alliance peuple et Roi, chère à la vieille France. « Le bon roi Philippe »criaient les classes artisanales. Saint Louis, outre le fait d’organiser les métiers, voulut organiser la garde, l’approvisionnement des villes(le guet fut réorganisé en 1254) et tenu par des gens de métier…L’extension du marché international et la rigueur corporative fait apparaître le contrôle technique et cela pas seulement dans le domaine industriel des grandes entreprises mais dans le monde artisanal, agricole et littéraire(l’université parisienne, les ménestrels) .Les corporations jouèrent un rôle d’émancipation et les caractères analogiques avec l’université sont criants(bacheliers, doctorat, maîtrise de métier…).Quelle richesse alors dans les sciences d’art et métiers et quel gâchis quand on compare avec aujourd’hui. Mais encore une fois, attention, l’ancienne France n’avait rien d’uniforme mais un enchevêtrement de droits divers, de coutumes locales, un véritable canevas riche de multiples organisations complexes suivant les lieux…On est loin du gaufrier étouffant d’aujourd’hui… « Il y a, indéniablement, montée sociale des travailleurs manuels…le Registre de 1292 qui signale des cotes appréciables pour plusieurs valets…Autre indications :des maçons et des tailleurs de pierre qui travaillaient au couvent des Augustins dans les dernières années du XIIIème siècle étaient payés 20 deniers par jour ouvrable, leurs aides 14 deniers ; des travailleurs de l’habillement gagnaient de 24 à 36 deniers ; mais il semble que le salaire moyen de beaucoup de compagnons fût d’environ 18 deniers. Or, en 1312…un mouton valait 6 sous huit deniers (80deniers), un pourceau 14 sous 7 deniers (175 deniers).N’allons pas conclure à d’exceptionnelles conditions de vie : il y a des métiers dont nous ignorons les salaires…»
    De là l’extension des corporations malgré quelques zones de « franches aires » maintenant leurs privilèges en dehors du cadre corporatif. Cette multiplication, toujours à l’ombre du roi, permet aussi l’obtention de pouvoir comme l’élection des chefs de métier. En 1338, à Rouen, « les filassiers sont invités à se dire d’accord avec un règlement fait, sur leur demande, par le maire et ses pairs…»Entre le XIIIème et le XIVème siècle, le pouvoir qu’exerçait les capitouls de Toulouse sur les métiers, passe aux mains des jurés de ceux-ci.

    GREVE et CONFLITS
    Loin d'avoir tout inventer, comme nous essayons de le démontrer notre temps semble découvrir aujourd'hui ce qui hier était monnaie courante. La grève existait déjà sous Saint-Louis.Les organisations ouvrières s’organisent avec leurs Saints et fêtes chômés, leurs blasons avec privilèges et devoirs, leurs justice, police et coutumes.Quelques conflits naissent des rivalités entre maîtres et ouvriers car les premiers cherchent à se distinguer des seconds, nous sommes dans les temps dits classiques ou la bourgeoisie s’affirme, loin de l’humilité du Moyen-âge…
    _Maçons et ouvriers du bâtiment à Paris, 1660-62,
    _les papetiers en Auvergne, 1664 les garçons boulangers à Bordeaux, 1666-67 à Lyon…
    _Guerres et disettes en 1694.
    Plus tard il est important d’étudier les problèmes économiques liés aux temps de colères sociales comme l’inflation du système de Law de 1719 à 1721 et la déflation de 1724…
    Les artisans prennent l’habitude de se regrouper par profession et par rue (voir les noms de rues dans Paris…) présent. Un trafic intense se développe en Occident et l’aisance nouvelle permet à un marchand de St Omer de faire construire à lui seul, une Eglise…
    L’ascension des humbles se poursuit et certaines fois les consommateurs se liguent contre le monopole d’une corporation comme en 1267 à Pontoise avec les boulangers.
    _A Paris en 1250, les valets protestent contre les maîtres des foulons.
    C’est à la suite de ces divers conflits que St Louis demandera à Etienne Boileau de codifier les us et coutumes des métiers, jusqu’ici orales dans un livre. Cela n’empêchera pas d’autres conflits comme les tisserands contre les drapiers à Paris en 1270
    _ les valets contre les maîtres foulons en 1277-79.
    Frederic PORETTI - Winkler (Les Communautés de Métier, à suivre)