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Que la France peut et doit manoeuvrer, par Louis-Joseph Delanglade
MM. Valls et Hollande ne cessent de répéter désormais que nous sommes en guerre et d’annoncer une série de mesures. Un domaine, pourtant essentiel, semble oublié: celui de notre politique étrangère. Notre pays est en effet engagé dans une lutte qui sera longue et sanglante, une lutte qui dépasse le cadre de nos frontières, ce qui justifie qu’on s’interroge sur notre diplomatie. C’est au fond ce que M. Fillon vient de faire lorsqu’il suggère tout à la fois un rapprochement avec la Russie de M. Poutine et une sorte de rééquilibrage de notre politique au Proche-Orient.
A l’évidence, la Russie ne peut qu’être un allié de poids dans la guerre contre l’islamo-terrorisme, dans la mesure où, pour avoir été plusieurs fois ensanglantée par la terreur verte (les Tchétchènes musulmans faisant systématiquement preuve d’une rare violence), cette guerre fait partie de ses priorités. Anathématiser la Russie au nom de la religion des « Droits de l’Homme » constitue une faute d’autant plus impardonnable qu’en fait il s’agit simplement de justifier un alignement pur et simple sur les Etats-Unis d’Amérique, lesquels, pour des raisons qui leur sont propres, font de la Russie un ennemi stratégique. Ce qu’elle n’est pas pour nous. Aussi ferions-nous mieux de refuser l’alternative Russie~Etats-Unis et d’entretenir, dans notre propre intérêt, des liens solides avec les deux.
Quant au Proche-Orient, la France s’est embourbée dans une démarche qui la réduit à n’être, là aussi, qu’un supplétif des errements de la politique américaine. S’il est légitime d’entretenir avec le Qatar et l’Arabie Saoudite des rapports permettant de défendre certains intérêts commerciaux, les liens pour le moins « suspects » de ces deux pays avec notre ennemi avéré, l’islamo-terrorisme et son substrat salafiste, devraient nous inciter à retrouver le chemin d’une politique étrangère plus raisonnable. Une politique prenant en compte le fait que désormais, et sans doute pour longtemps, le sentiment d’appartenir à une islamité sunnite transfrontalière domine et soulève les masses musulmanes, tournant ainsi la page des nationalismes arabes post-coloniaux.
Or, il existe dans la région au moins deux pays sans lesquels on ne pourra rien faire et avec lesquels on pourrait faire beaucoup : l’Iran chiite, contrepoids idéal à l’internationalisme sunnite - volontiers terroriste (Al-Qaïda et sa filiale Aqmi, Daesh, Hamas, etc.) -, et la Syrie de M. Assad dont, on le voit bien, la déstabilisation constitue une catastrophe géopolitique et un drame humain pour toutes les « minorités » livrées à tous les excès du fanatisme religieux islamique. Il s’agirait moins de s’allier avec Damas et Téhéran que de favoriser leur (ré)intégration dans le jeu politique régional. Ce rééquilibrage nous permettrait par ailleurs d’envisager à terme de nous désengager militairement d’un théâtre d’opérations où nous sommes probablement dans une situation sans issue.
La voie peut paraître étroite, mais une chose est sûre : avoir nommé l’ennemi risque de ne pas suffire si on refuse tout rapprochement avec ceux qui ont aussi d’excellentes raisons de le combattre. •
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A Suivre, demain ...
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La Semaine de MAGISTRO, une tribune d'information civique et politique
Après des années d'errance et par-delà les appareils et les discours dits de droite, dits de gauche ou d'ailleurs, ... revenons aux fondamentaux !
Pour cela, MAGISTRO vous invite à lire :
• Aude de KERROS Essayiste, sculpteur, graveur Voeux, un @book
• Gérard-François DUMONT Géographe, Professeur d'université à la Sorbonne
2014, annus horribilis pour les chrétiens d’Orient
Les défis de l'Union européenne
• Vincent DESPORTES Officier général l’opération Chammal en Irak
• Chantal DELSOL Membre de l'Institut Prise de conscience
• Maxime TANDONNET Haut fonctionnaire Discours de Valls : après l'émotion, place à l'action
• Patrice MAYNIAL Ancien Directeur général de la Gendarmerie nationale La parole à libérer
• Jean-Luc BASLE Economiste La France suivra-t-elle l’exemple américain après le 11 septembre ?
• Marc DUGOIS Avocat Les autres fanatiques
• Henri de SAIN-BON Essayiste Quelles réflexions m’inspirent les évènements actuels
• Jacques BICHOT Economiste, Professeur émérite à l'Université Lyon 3 Pourquoi réforme-t-on à tort et à travers ?
• Michel MAFFESOLI Professeur de sociologie à la Sorbonne Rites piaculaires
Transmettez, faites suivre ... -
MARSEILLE : 21 janvier en images ...
Nous avons donné (vendredi 23 janvier) quelques images et un bref compte-rendu de la messe célébrée à Paris, le 21 janvier, à Saint Germain l'Auxerrois, à la mémoire du roi Louis XVI, en présence du comte de Paris.
En province, des cérémonies analogues ont également eu lieu en grand nombre, comme le montrent les longues listes que nous avons publiées régulièrement courant janvier.
Il s'est agi, bien-sûr, de commémorer un évènement funeste de notre histoire, mais aussi d'en mesurer les conséquences, d'en analyser les prolongements actuels, afin de travailler à ce que Philippe de Villiers appelle ce « grand mouvement de l’inversion » qu'il considère proche. Lequel ? Celui qui mettra en cause la Révolution, la Révolution historique (« La terreur est dans son ADN ») mais aussi la Révolution agissant aujourd’hui. « Il y a des signes du sursaut ; des gens qui bougent ; des voix qui s’élèvent et qui parlent de plus en plus fort ».
C'est dans cet esprit que Marseillais et Aixois ont organisé leur journée du 21 janvier 2015 et nous en donnons deux séries d'images : en premier lieu, celles qui ont trait à la Messe dite au Sacré Cœur; puis, celles qui évoquent le vin chaud servi ensuite, dans une atmosphère amicale et de libres discussions.
Photos L'Action française Provence
Photos Solange TRIMON
Dans les prochains jours, nous mettrons en ligne la vidéo de cette soirée, dont le point fort sera l'homélie - très remarquée - du Père Xavier Manzano. •
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Loisirs • Culture • Traditions ...
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Rire ou sourire un peu ... même s'il n'y a pas vraiment de quoi
Biocarburant - Signé : Nicolas VIAL - Figaro magazine
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MEDIAS & SOCIETE • Laurent Obertone : "Le système retourne les faits à l’avantage de son utopie"
Entretien de TV Libertés avec Laurent Obertone sur son dernier livre La France Big Brother.
Auteur du best-seller la France Orange mécanique, Laurent Obertone signe avec la France Big Brother (Ring) une critique tous azimuts du « conditionnement » imposé aux Français. Pour lui, « l’oligarchie dissimule ses crimes » après les attentats islamistes en France. Ce nouvel essai de Laurent Obertone est un réquisitoire parfaitement antisystème. Michel Houellebecq a estimé en novembre 2010 qu'il est « le grand polémiste de demain »
La vidéo qui suit dure environ 30 minutes. Ce n'est pas une perte de temps que de l'écouter ... •
La France Big Brother, Ring, 360 pages, 18 €.
A voir, aussi, cette courte bande-annonce :
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Retour à l'actualité, demain lundi ... Notre diplomatie est-elle à la hauteur de la guerre qui nous est déclarée, intra et extra muros ?
Les Lundis de Louis-Joseph Delanglade :
Ce sont des réflexions - hebdomadaires - sur l'actualité politique (politique intérieure et politique étrangère généralement alternées) qui synthétisent ou définissent les positions - la ligne politique - de Lafautearousseau.
C'est pourquoi ces chroniques sont regroupées et toutes consultables dans une annexe de Lafautearousseau, Les lundis de Louis-Joseph Delanglade, en permanence à votre disposition. •
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LIVRES - HISTOIRE • Arnaud Teyssier : « Richelieu fit du pouvoir un sacerdoce », entretien avec Raphaël de Gislain, pour Politique magazine
Arnaud Teyssier, haut fonctionnaire et biographe reconnu (Louis-Philippe, Charles Péguy) dresse un portrait du grand ministre de Louis XIII qui renouvelle l’approche de son œuvre politique. Approche qui peut, bien-sûr, être discutée...
Vous décrivez Richelieu comme un homme d’une piété profonde, à l’opposé du Machiavel en habit rouge que l’on se plaît habituellement à peindre. Est-ce le secret qui éclaire son action politique ?
Cela permet de l’envisager d’une manière beaucoup plus cohérente. Ce qui me frappe, c’est la façon dont on « exécute » en général toute la première partie de la vie de Richelieu. On explique qu’il fut un bon évêque de Luçon, non par vocation mais par esprit de devoir familial. On néglige le fait qu’il a passé des mois à Rome à une période de religiosité intense, qu’il a consacré beaucoup de temps à son diocèse, écrit un catéchisme pour ses prêtres, composé des traités théologiques jusqu’à son lit de mort. Ses travaux sont, certes, connus mais le doute est jeté sans aucune preuve tangible sur la sincérité de sa foi. Or l’énergie religieuse dont il fait preuve ne s’explique pas par la seule conscience de sa charge. Cette dimension n’a pas encore été vraiment étudiée. Elle met pourtant en lumière que le cardinal n’a rien d’un arriviste ; il accède au pouvoir en 1624, sept ans après ses premières missions, soit à quarante ans, ce qui n’a rien de fulgurant. Je crois que le problème vient du fait que l’on regarde les hommes d’église d’autrefois avec les yeux d’aujourd’hui. à l’époque, la foi est quelque chose de combatif, d’ardent ; cela fait partie du rôle du prêtre que d’agir pour la communauté, que de s’engager sur le terrain politique. Richelieu a cela ancré en lui.
Lorsqu’il accède aux responsabilités politiques, au Conseil de la reine-mère Marie de Médicis et comme ministre de Louis XIII, quelles menaces pèsent sur le royaume ?
Le royaume est déchiré. Il y a d’abord des guerres intérieures. Les grands du royaume, qui n’ont cessé de s’agiter depuis la mort d’Henri IV, ont été des acteurs du conflit qui a opposé Marie de Médicis à Louis XIII pendant de longues années ; il y a le problème de la puissance protestante, à la fois politique et militaire, héritage de l’édit de Nantes qui menace de faire vaciller le royaume : La Rochelle, au bord de la sécession, risque de provoquer une rébellion généralisée. Les dangers intérieurs sont donc énormes, surtout si l’on tient compte de l’affaiblissement politique de le France durant la régence de Marie de Médicis. La deuxième menace est d’ordre extérieur. Richelieu en prend conscience dès son passage au Conseil du roi en 1616 ; la stratégie d’unité des Habsbourg et de la monarchie espagnole qui vise à enfermer la France dans un étau lui semble un péril imminent. Entre 1624 et 1630, une partie du Conseil du roi, illustrée par Louis de Marillac rejoint par Marie de Médicis, souhaite se consacrer au rétablissement de l’ordre au sein du pays. Richelieu s’en dissocie. Il lui paraît nécessaire de se battre en même temps sur les fronts intérieur et extérieur, malgré les difficultés diplomatiques. Après la journée des Dupes en 1630, lorsqu’il est confirmé dans ses fonctions, sa politique est pleinement adoptée par le roi tandis que les rivaux sont écartés.
Richelieu présente Poussin à Louis XIII
Quelle relation se met en place entre Louis XIII et Richelieu ?
On a beaucoup glosé sur cette question et la véracité des sources est parfois douteuse. Il me semble qu’entre le Richelieu du début et le jeune Louis XIII, l’entente n’a pas été immédiate, dans la mesure où le roi a pu être influencé négativement par son entourage. Cette méfiance s’estompe lorsque Richelieu devient une figure principale du pouvoir. Il apprend au roi à se garder de la calomnie comme de ses propres faiblesses ; il existe des échanges extraordinaires à ce sujet… Richelieu incarne progressivement une sorte de directeur de conscience pour Louis XIII ; on retrouve là le prêtre qu’il a toujours été. Ce lien se renforce au moment du siège de La Rochelle, lorsqu’en butte à la dépression, le roi trouve un appui solide en son ministre. Pour lui qui n’a jamais eu d’entourage fiable, ce soutien est une découverte. La journée des Dupes témoigne peut-être moins de la force de caractère insoupçonnée du roi contre la cour que de cette confiance exceptionnelle qui s’est nouée entre les deux hommes. L’idée répandue selon laquelle Richelieu aurait manipulé Louis XIII est à mon avis contraire à la nature de leur relation. Richelieu avait un respect absolu de l’autorité royale et savait que son œuvre était d’aider le roi à advenir, à être à la hauteur de sa charge.
Quelle philosophie du pouvoir Richelieu développe-t-il ?
Pour mettre un terme à la décadence du royaume, la première idée du cardinal est que « chacun doit revenir en sa charge » pour que les institutions soient incarnées comme elles le doivent. Sa deuxième grande réflexion concerne l’administration de la société humaine, l’organisation de la vie collective, qui doivent s’accomplir parallèlement à l’exécution des devoirs du chrétien. Son premier devoir est d’aimer les autres en pratiquant la charité active ; être utile à sa famille, à sa communauté. L’ordre des affaires publiques fonctionne sur le même modèle, il revient à faire passer le service d’autrui et les intérêts collectifs avant les intérêts privés. C’est une leçon très simple. On observe cette correspondance en lisant le Traité de la perfection du chrétien et le Testament politique. Je ne crois pas que Richelieu avait deux dimensions, une politique et une religieuse, mais qu’il en avait une seule : celle du prêtre.
N’aurions-nous pas besoin de Richelieu dans la France d’aujourd’hui ?
Je crois que De Gaulle avait dit que de toute façon, si Richelieu revenait, il serait battu aux élections ! Dans un pays comme la France, qui n’a pas rompu avec une conception monarchique du pouvoir, la survivance de l’idée du prince est un facteur essentiel d’unité, étant donnée la faiblesse de nos institutions. Ce dont nous avons besoin aujourd’hui, et que Richelieu nous enseigne, c’est de retrouver une conception sacerdotale du pouvoir. Bien sûr, on imagine mal le retour à la tête de l’état d’un prêtre ardent comme l’était le cardinal, mais il faut que l’on reconsidère cette idée qu’il nous transmet que l’unité du pays et la suprématie de l’intérêt général possèdent une dimension sacrée. Ce qui est étonnant, c’est que cette conception chrétienne de la politique est restée dans la société française laïcisée d’aujourd’hui. C’est un paradoxe et une grande difficulté. Comment l’incarner dans un système moderne et déchristianisé ? Aucun régime, ni la monarchie parlementaire, ni le Second Empire, ni la République, ni même De Gaulle, n’ont réussi à « resacraliser » le pouvoir… •
Richelieu, l’aigle et la colombe, d’Arnaud Teyssier, éditions Perrin, 24,50 €
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« LOUIS XVI » 2015 ! Des messes et des activités sont encore prévues ces jours-ci, dans toute la France
Cliquez sur cette image pour ouvrir la liste. Vous y trouverez les messes et activités qui ont eu ou vont encore avoir lieu dans votre région. Nous en avons annoncé 80 ! Mais d'autres se sont sans-doute tenues ou se tiendront ces prochains jours sans que nous en ayons eu connaissance. Il ne s'agit pas de simples commémorations et notre présence, nombreuse, leur donne le sens qu'indique le propos de Philippe de Villers, repris ci-dessous.
« On est près du grand mouvement de l’inversion ». Lequel ? Celui qui mettra en cause la Révolution, la Révolution historique (« La terreur est dans son ADN ») mais aussi la Révolution agiss ant aujourd’hui. « Il y a des signes du sursaut ; des gens qui bougent ; des voix qui s’élèvent et qui parlent de plus en plus fort ». Philippe de Villiers •
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Loisirs • Culture • Traditions ...
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MEDIAS • L’immunité de Philippe Tesson a pris fin le 13 janvier 2015… Dominique Jamet a raison de soutenir ce grand journaliste français
Par Dominique Jamet
Journaliste et écrivain. Il a présidé la Bibliothèque de France et a publié plus d'une vingtaine de romans et d'essais. Co-fondateur de Boulevard Voltaire, il en est le Directeur de la Publication.
Leurs origines familiales n’avaient pas suffi à protéger Alain Finkielkraut ou Eric Zemmour des accusations les plus violentes et les plus saugrenues. En dépit de son immense talent de romancier et de sa totale allergie à tout engagement, notamment politique, Michel Houellebecq est depuis peu désigné par la grande famille des gens comme il faut à la vindicte publique. Tous trois ont rejoint sur la liste noire des infréquentables Richard Millet, Renaud Camus, Alain de Benoist, Elisabeth Lévy ou Ivan Rioufol. Philippe Tesson avait jusqu’à présent échappé à la vigilance des chasseurs de sorcières. Il devait ce privilège aussi bien à la singularité de son parcours qu’à celle de sa personnalité.
Journaliste, et rien d’autre que journaliste, Tesson bénéficiait du réseau de connaissances et d’amitiés qu’il a tissé au long de plus d’un demi-siècle d’une vie entièrement consacrée à sa profession. Il est peu de « grandes plumes » contemporaines qui n’aient débuté ou transité par le légendaire Combat ou par Le Quotidien de Paris, les deux journaux dont il fut le rédacteur en chef, le directeur et l’animateur entre 1960 et 1994. Il n’est aucun connaisseur de la presse écrite qui ne garde la nostalgie du climat de liberté, de diversité, d’attachement au pluralisme de l’expression et de la pensée qui firent, tant qu’il en fut l’âme et le patron, l’originalité de ces deux titres. Les centaines de milliers de bonnes gens qui les regardaient de loin, je veux dire sans les acheter, n’en déplorèrent pas moins, et le plus sincèrement du monde, leur disparition. Ainsi va la vie.
Redevenu simple pigiste dans des journaux qui ne lui appartenaient pas, Philippe Tesson n’a cessé depuis vingt ans, sans jamais manifester la moindre amertume, d’y déployer, comme sur les plateaux de télévision ou de radio où il est régulièrement invité, une inlassable activité. Acrobatique funambule, impulsif, incisif, léger, charmeur, spirituel, mais surtout, mais d’abord, mais avant tout inclassable et indépendant, il restait l’inlassable danseur de corde de l’actualité à qui l’on pardonnait tout, bien que, de notoriété publique, il fût considéré comme un homme « de droite ». Ses rides d’expression et son regard pétillant avaient accentué sa saisissante ressemblance avec Voltaire. Il est de pires références. L’âge venu, du moins s’il faut en croire l’état-civil auquel il ne cessait d’apporter le plus insolent et le plus quotidien des démentis, il faisait figure de saint patron d’un journalisme à l’ancienne où l’on mettait du style non seulement dans ses écrits mais dans sa vie.
L’immunité de Philippe Tesson a pris fin le 13 janvier 2015, lorsque, sur Europe 1, dans le cours d’un débat qui tournait autour des légères infractions à l’ordre public commises ces derniers temps par des fans de Mahomet, il s’est emporté jusqu’à dire : « Ce ne sont pas les musulmans qui amènent la merde ? » Interrogation apparemment scandaleuse dans un pays où il est bien entendu qu’il n’existe aucun lien entre les musulmans et l’islam, entre l’islam et les islamistes, entre les islamistes et le terrorisme, entre le terrorisme et l’assassinat de dix-sept innocents.
Certes, en d’autres temps, et sous d’autres climats, une telle assertion aurait seulement relancé la discussion. Tel aurait pu approuver totalement, tel autre contester absolument, un troisième faire valoir que si tous les terroristes sont musulmans, tous les musulmans ne sont pas terroristes… Nous n’en sommes plus là. À peine l’émission terminée, un quidam outré portait plainte (!), de bonnes âmes sommaient la radio de la rue François 1er et Le Point d’interdire le fautif de plume et de parole, le Conseil supérieur de l’audiovisuel était saisi, et le Parquet, enfin, ouvrait une enquête préliminaire pour « incitation à la haine raciale », une imputation doublement étonnante.
Il est en effet pour le moins surprenant, dans un contexte où l’on nous affirme constamment que le concept de race est une invention du racisme, que des magistrats, confondant race et religion, semblent considérer que les musulmans ont une morphologie ou une couleur particulières.
Il est surtout choquant que le cadre de la liberté d’expression, menacée par des tueurs fanatiques, mais garantie par la Déclaration des droits de l’homme, la Constitution, la loi, solennellement réaffirmée par le président de la République, ne cesse dans les faits de se rétrécir. Des propos comme celui de Philippe Tesson, tenus journellement dans le privé, à tort ou à raison, par des millions de Français, doivent-ils être attaqués, poursuivis et éventuellement condamnés par la justice ? Tout est possible quand Arno Klarsfeld, pour avoir énoncé la triste évidence d’un nouvel antisémitisme, se voit accuser d’avoir porté atteinte « à l’honneur et à la considération de la jeunesse des banlieues ».
La France qu’on nous fabrique au nom de la paix sociale serait-elle ce pays où, pourvu que l’on ne parle « ni de l’autorité ni de la politique ni de la morale ni des gens en place ni de personne qui tienne à quelque chose, on peut tout imprimer sous l’inspection de deux ou trois censeurs » ? Rien n’aurait donc changé depuis Le Mariage de Figaro ?
Il est évidemment plus facile de réprimer les libres propos d’un homme libre que d’empêcher des massacreurs de transformer une salle de rédaction en boucherie. •
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THEATRE • Paris : Dernières soirées pour « Les vignes du Seigneur » !
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Soumission : Houellebecq à rebours ... ou "ce désir de libération par lequel nous retrouverions une vie haute" ...
Dans son dernier roman, paru le jour même de l'attentat contre Charlie Hebdo, mais qui défrayait déjà la chronique avant sa sortie, Michel Houellebecq imagine une France gouvernée par l’islam. En voici une analyse perspicace, subtile, et profonde, qu'en a donnée Léo Pougnet dans la dernière livraison de l'Action Française 2000. Léo Pougnet est philosophe - jeune philosophe - et, au sens plein, maurrassien. Et c'est sous ce double signe qu'il mène cette réflexion qui nous paraît aller, avec toute l'ampleur voulue, à l'essentiel. Lafautearousseau •
Le dernier ouvrage de Michel Houellebecq, Soumission, apparaît au lecteur comme l’antidote à une idolâtrie républicaine qui s’empare du monde, à la suite des événements de ce début d’année, et qui embrasse comme jamais le Capital dans sa figure américaine, au lieu de remettre en cause, par exemple, la politique extérieure de la France ; surtout quand République et démocratie ne semblent sortir victorieuses de ces attentats que grâce à leur force policière, renforçant une unité nationale qui n’aura jamais été aussi vouée au cosmopolitisme.
Réalisme d’anticipation
Contentons-nous d’être attentifs aux événements futurs. Soumission, à l’inverse, au moyen du formidable réalisme d’anticipation de Houellebecq, prend acte bien plutôt de la mort de ce qui crie pourtant sa victoire au travers des hommages rendus aux collaborateurs de Charlie Hebdo : la démocratie, la République, la liberté d’expression, c’est-à-dire les Lumières, le nihilisme, le Capital, jusqu’à la guerre civile : « À l’issue de ses deux quinquennats calamiteux, n’ayant dû sa réélection qu’à la stratégie minable consistant à favoriser la montée du Front national, le président sortant avait pratiquement renoncé à s’exprimer, et la plupart des médias semblaient même avoir oublié son existence. Lorsque, sur le perron de l’Élysée, devant la petite dizaine de journalistes présents, il se présenta comme le “dernier rempart de l’ordre républicain”, il y eut quelques rires, brefs mais très perceptibles. » (p. 114).
Houellebecq ne justifie pourtant pas tant un retour presque fatal au religieux qu’on ne pourrait, tout bien compté – c’est l’une des thèses possibles du livre –, éradiquer en l’homme, voué, après tous les matérialismes de l’histoire, à l’esprit c’est-à-dire, pour aller vite, à Dieu ; il vérifie bien plutôt que l’essence de l’Occident ne consiste pas dans la recherche d’une fixation, quelle qu’elle soit, uniquement spirituelle ou uniquement matérielle, mais qu’elle est fondamentalement historique, et entend considérer toutes choses bien plus dans le mélange de liberté et de nécessité qui constitue un destin que dans la fixation éternelle du monde, à la fois destructrice, prophétique, négatrice de toute vie comme de tout devenir. Ici s’enracine la vocation politique de ce livre. Dans ce sens, en effet, l’ouvrage de Houellebecq enseigne une transformation, bien plus qu’une soumission ou une conversion. Or cette transformation questionne le destin même de l’Occident et de la France, tout en redonnant à la conversion, non pas seulement de Huysmans au catholicisme mais de René Guénon à l’islam, une actualité saisissante.
Références identitaires
Même teintées d’ironie, ou plus exactement présentées flegmatiquement, il serait regrettable de manquer dans ce roman les multiples références faites aux pensées identitaires et traditionalistes, et ne considérer que l’opportunisme politique du nouveau président de la République, hypothétiquement élu en 2022, Mohammed Ben Abbes (avec son parti, Fraternité musulmane), ou encore la conversion finale du héros, professeur de littérature, à l’islam pour des raisons qui seraient non moins opportunistes.
Houellebecq ne laisse pas de questionner le retour de l’esprit en Occident, bien plus, en réalité, que l’islam en tant que tel. Il est temps de savoir si un dépassement de la religion des Lumières qui s’associe à la toute-puissance du Capital est possible, et à quel prix. Il faut d’autant plus questionner l’islam, en effet, que René Guénon lui-même avait estimé qu’une telle tradition, même au prix de sa décadence, de sa corruption ou de sa manipulation, n’en est pas moins beaucoup plus préservée que toutes les autres ; c’est d’ailleurs la raison pour laquelle elle connaît une guerre permanente. Nous pouvons également tirer de cette analyse que le XXIe siècle signifie à la fois que nous nous trouvons dans l’âge du déplacement toujours plus au Sud de la tradition qui jadis fut nordique, gréco-latine ou chrétienne, et qui devient désormais sémitique, qu’il se présente comme ce désir de libération par lequel nous retrouverions une vie haute, un devenir auquel il serait conféré une valeur, comme la reprise de l’histoire, par-delà toutes les dominations anhistoriques du Capital que Houellebecq comprend magnifiquement dans leurs significations politiques, professionnelles, amoureuses, sexuelles, etc., et dont la religion aurait vocation à nous libérer*.
Nouveau règne mondial
Il reste surtout à savoir si l’homme occidental a encore un rôle à jouer dans ce nouveau règne mondial qui, renonçant à trouver quelque avenir à la Chine ou à la Russie, se recentre essentiellement sur l’opposition entre islam et judaïsme. Houellebecq enquête sur l’avenir de la civilisation et est comme le pendant, certes romanesque, en France, d’un Alexandre Douguine qui défend une ouverture de l’orthodoxie à l’islam, pour des raisons elles-mêmes historiques au vu du lointain passé de la Russie, notamment médiéval. À partir d’un tel modèle, porté jusqu’au bout, Houellebecq imagine la reconstitution d’un empire romain à l’initiative d’une France revitalisée par l’islam, qui certes se maintient, durant l’espace du roman, dans l’horizon du Capital et du mondialisme. Pour Ben Abbes pourtant : « Sa grande référence, ça saute aux yeux, c’est l’Empire romain – et la construction européenne n’est pour lui qu’un moyen de réaliser cette ambition millénaire. Le principal axe de sa politique étrangère sera de déplacer le centre de gravité de l’Europe vers le Sud ; des organisations existent déjà qui poursuivent cet objectif, comme l’Union pour la Méditerranée. » (p. 157). Plus loin : « À elle seule l’idée de la patrie ne suffit pas, elle doit être reliée à quelque chose de plus fort, à une mystique d’un ordre supérieur. […]. La Révolution française, la République, la patrie... oui, ça a pu donner quelque chose ; quelque chose qui a duré un peu plus d’un siècle. La chrétienté médiévale, elle, a duré plus d’un millénaire. […] Je n’étais pas convaincu pour ma part que la république et le patriotisme aient pu “donner lieu à quelque chose”, sinon à une succession ininterrompue de guerres stupides. » (p. 162-163)
Il est frappant, pour finir, que l’ouvrage de Houellebecq soit – islam à part – à ce point maurrassien ; c’est pourquoi nous y trouvons précisément un conseil quant à l’avenir de notre nation. Car nous n’y retrouvons pas seulement le rapport à Rome ; par certains côtés, Ben Abbes s’affiche bien plus comme un Roi réconciliateur que comme un président de la République impuissant ou agressif ; le modèle qu’il entend donner enfin à son empire principalement méditerranéen est celui de la Chrétienté médiévale. Ajoutons qu’il prend le pouvoir par « tous les moyens mêmes légaux », contre l’héritage des Lumières, contre la République et la démocratie, à rebours des déracinements du Capital ; une défense du principe de subsidiarité achève la liste de ces proximités.
Contre-Révolution
Soumission de Houellebecq pourrait tout aussi bien s’intituler “Contre-Révolution”. Les nombreuses références faites à la littérature “réactionnaire” ne cessent de l’indiquer : « C’est à peine s’il revenait sur le cas des civilisations occidentales, tant elles lui paraissaient à l’évidence condamnées (autant l’individualisme libéral devait triompher tant qu’il se contentait de dissoudre ces structures intermédiaires qu’étaient les patries, les corporations et les castes, autant, lorsqu’il s’attaquait à cette structure ultime qu’était la famille, et donc la démographie, il signait son échec final ; alors venait, logiquement, le temps de l’islam). » (p. 271) Que tout cela soit aussi la leçon rendue, d’ailleurs par avance, et du haut de tout son détachement, à l’affairement caricatural dans lequel la République et Charlie Hebdo ne font plus qu’un. •
Léo Pougnet
* Sur ce nihilisme anhistorique traité le plus souvent avec une grande drôlerie, nous pouvons lire page 50 : « Curieusement, les pays occidentaux étaient extrêmement fiers de ce système électif qui n’était pourtant guère plus que le partage du pouvoir entre deux gangs rivaux, ils allaient même parfois jusqu’à déclencher des guerres afin de l’imposer aux pays qui ne partageaient pas leur enthousiasme. »
Michel Houellebecq, Soumission, Flammarion, 320 pages, 21 euros.