Beaucoup de gens reprochent beaucoup de choses contradictoires à Alain Finkielkraut. A Gauche, d'être devenu réac, de sympathie pour le Front National, d'islamophobie; à Droite, d'avoir été maoïste, dans sa jeunesse; plus à Droite encore, son attachement à Israël, qui n'est pas le nôtre, ici. Son élection à l'Académie française, malgré une polémique houleuse, assez indigne, a néanmoins consacré sa vie de réflexion et d'écriture.
Nous ne partageons pas toutes les options, ni toutes les réactions d'Alain Finkielkraut. Nous ne lui reprochons pas son engagement initial à l'extrême gauche, puisqu'il en est revenu et puisque chacun le voit, ce n'est pas ou plus de la Droite que montent aujourd'hui les idées, les réactions intelligentes; en soi, nous ne sommes guère enthousiastes de sa défense de l'école républicaine, encore que ce qu'elle fut, à ses origines et pendant longtemps, vaut bien mieux que ce qu'elle est aujourd'hui; enfin, le soutien qu'il a souvent apporté à Israël, ne fera pas de nous de chauds admirateurs de cet Etat.
Nous nous en tenons à l'essentiel qui, selon nous, est ailleurs : sa défense de notre langue, de notre littérature, de notre culture (et, d'ailleurs, de toute vraie culture), de l'héritage historique français, de nos racines, et, finalement, de notre identité profonde, aujourd'hui, en effet, malheureuse. Ce qui vaut bien, sans les dissimuler, de surmonter les divergences que nous pouvons avoir avec lui.
Il nous revient en mémoire, à cet égard, l'attitude de Maurras envers Anatole France. Ce maître de sa jeunesse - qui avait formulé par la bouche des personnages de ses romans, une féroce et lucide critique de la Révolution - était, dans ses vieux jours, sous l'influence de son entourage, devenu cryptocommuniste. Maurras refusa toujours de le combattre et lui conserva son amitié : "Tout ce qu'on voudra, disait-il à ses amis, Anatole France a sauvé la langue française". Ce qui, pour Maurras, était essentiel.
Cela étant dit, nous mettons en ligne, ici, la dernière édition de l'emission Répliques, que Finkielkraut anime, chaque samedi sur France Culture. Thème ? "Qu'est-ce qu'un réac ?", question posée à Denis Tillinac, qui publie Du bonheur d'être réac, en débat avec Laurent Joffrin. L'entretien est remarquable et illustre, 52 minutes durant, l'opposition Réaction - Révolution. Reprochera-t-on (encore !) à Denis Tillinac d'avoir été gaulliste et chiraquien ? Son propos est pourtant au delà de ces catégories !
Denis Tillinac, écrivain, ancien président des éditions La Table Ronde et ancien journaliste
(52 minutes)