Feuilleton : "Qui n 'a pas lutté n'a pas vécu"... : Léon Daudet ! (124)
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Aujourd'hui : Les "formidables inondations" de 1910...
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ndlr : ce sujet a été réalisé à partir d'extraits tirés des dix livres de souvenirs suivants de Léon Daudet : Paris vécu (rive droite), Paris vécu (rive gauche), Député de Paris, Fantômes et vivants, Devant la douleur, Au temps de Judas, l'Entre-deux guerres, Salons et Journaux, La pluie de sang, Vers le Roi...
La rue de Seine, durant les inondations !
De "Vers le Roi", pages 113/114 :
"...Une circonstance dramatique donna l'essor à la popularité des Camelots du Roi, ces gendarmes supplémentaires comme les avait baptisés Maurice Pujo.
Au début de l'année 1910, pour des causes encore mal connues - comme tout ce qui concerne l'hydrologie et la météorologie - se déchaînèrent, en France et notamment à Paris, de formidables inondations.
La Seine, ordinairement si tranquille, aimable et souriante entre ses vieux quais plantés d'arbres, devint pareille à un lion furieux.
Très vite la banlieue fut tendue d'une eau bourbeuse et sans cesse grossie, notamment la banlieue sud, du côté de Charenton et de Villeneuve-Saint-Georges, à cause du grossissement simultané de la Marne.
Les pauvres gens demeurant dans des cahutes ou de petites maisons de cette région durent déménager en hâte.
D'autres se trouvèrent subitement cernés chez eux par le fléau et dans une situation périlleuse.
La police de sauvetage était débordée, la police tout court aussi, à cause des malandrins, qui, bien entendu, profitaient du désastre et pillaient les mobiliers flottants, toutes les épaves.
Alors, sous la direction habile de leurs chefs, les Camelots du Roi, déjà nombreux, bien que d'institution récente, se mirent à l'oeuvre.
Ils se divisèrent par équipes, louèrent des barques.
Une souscription rapidement ouverte, rapidement fructueuse, leur permit d'acheter des vivres - notamment du fromage de cochon, du pâté de foie ordinaire, des miches de pain, du vin, des boissons maintenues chaudes - qu'ils allèrent distribuer dans les cités ouvrières, devenues lacustres, qui s'étendent de Bercy à Draveil.
On les appelait, on les remerciait, on les acclamait, avec cette ferveur dans la gratitude, qui est le propre des masses populaires, à la sensibilité toujours frémissante, en raison, je pense, de la gêne quotidienne et de l'entr'aide devenue indispensable.
Ils dépensaient leurs provisions sans compter, et plus ils dépensaient, plus les subsides augmentaient.
L'élan de tous fut extraordinaire, ainsi que dans toutes les circonstances impérieuses ou tragiques.
Le public royaliste est le plus généreux de France, c'est bien connu.
Quand il a de l'argent, il donne son argent.
Quand il n'a pas d'argent, il donne sa peine, son encouragement, ou ses prières, selon les cas.
Il ne demeure jamais indifférent aux appels, ni à la détresse, ni aux deuils.
Cela tient à l'équilibre de l'idéalisme et du réalisme, qui est comme la fleur de la raison française.
Je me rappelle les figures joyeuses de nos chers Camelots, au retour de ces expéditions, leurs manteaux trempés d'eau, leurs bons rires, leurs récits, et aussi les lettres extasiées de ceux et de celles qu'ils avaient secourus.
Ceci fait, les Camelots du Roi s'employèrent à rebâtir bon nombre des maisonnettes démolies par la rage de l'eau.
Une partie de la nouvelle agglomération de Villeneuve-le-Roi date de là.
Dans notre pays, on aime les besognes bien faites. Ce fut certes une besogne bien faite et qui témoigna de l'extraordinaire discipline, de la cohésion, en vue du bien public, de cette élite de jeunes gens..."
Dans notre Catégorie "Grandes "Une" de L'Action française", voir les 22 "Une" consacrées à ce magnifique exemple donné par les Camelots du Roi, à l'occasion de cette tragédie...