Afghanistan : la déroute des démocraties ! (IV), par Christian Vanneste.
La capitulation de la démocratie la plus puissante du monde devant des bandes de fanatiques ne traduit pas seulement l’évolution des rapports de forces sur la scène mondiale, mais révèle le pourrissement interne des démocraties.
On brandit l’Etat de droit et la régularité des élections pour faire semblant d’ignorer que nos pays sont surtout des sociétés consuméristes, hédonistes, et individualistes plus attachées aux plaisirs de la vie, distribués de manière de plus en plus inégalitaire, qu’aux libertés essentielles. La ruée sur le pass sanitaire en témoigne en France. Quant aux migrants, c’est l’Eldorado qu’ils cherchent et non la liberté. Devant leur flux qui va métamorphoser nos nations, la passivité du très grand nombre et d’une majorité des dirigeants exprime fort bien la pensée dominante : “après nous, le déluge !” Dans la plupart de nos pays, en l’absence d’un recours systématique à la démocratie directe, c’est un microcosme qui détient le pouvoir, une oligarchie de politiciens professionnels, de fonctionnaires, de “communicants” en tous genres, de magistrats et de gens suffisamment riches pour peser sur l’orientation de l’ensemble, notamment parce qu’ils sont propriétaires des médias. Des scrutins de moins en moins crédibles, une incapacité des élus à gérer les crises et même à résoudre les problèmes les plus importants, une idéologie dominante, pensée unique contraire à l’essence même de la démocratie, qui s’impose de manière de plus en plus coercitive, tels sont les signes du crépuscule démocratique. Une élection présidentielle a eu lieu aux Etats-Unis, il y a moins d’un an dans des conditions rocambolesques, avec une campagne noyée dans la pandémie, un quasi unilatéralisme de la presse et même des grands réseaux sociaux dont certains sont allés jusqu’à la censure, et pour finir des conditions de vote douteuses. Alors que le président sortant avait fait de l’intérêt national sa priorité, une vague idéologique suicidaire minait les fondations de l’ordre, de l’identité et de la fierté nationales qui sont pourtant les garanties de l’existence d’un peuple, d’un “démos” conscient de lui-même et donc, à travers lui, de la démocratie. Ce moment a été vécu avec enthousiasme par la plupart des médias français aujourd’hui surpris par le désastre d’une équipe dirigeante inepte.
Pour le perdant, pour Trump, «C’est une période terrible pour notre pays. Je ne pense pas que sur toutes ces années notre pays ait jamais été aussi humilié. Je ne sais pas comment vous l’appelez – une défaite militaire ou une défaite psychologique -, il n’y a jamais rien eu de pareil à ce qu’il s’est passé là : vous pouvez remonter jusqu’à Jimmy Carter avec les otages». Quoi qu’on pense de Trump et de son apparente gesticulation sur la scène internationale, il y avait dans sa politique trois principes. Le premier était d’en finir avec l’ingérence du gendarme américain, du shérif aidé de ses adjoints occidentaux pour aller mettre de l’ordre chez les autres, le second était de ne pas perdre la face, comme il l’a montré en Syrie, le troisième était de cibler l’ennemi sans s’interdire de négocier avec ceux qui n’étaient pas les plus dangereux. Le tout devait accompagner un retrait américain dans les limites de l’intérêt national et en demandant aux alliés de participer davantage à la dépense. C’est la raison pour laquelle il avait entamé des négociations avec les Talibans et annoncé le départ de l’armée américaine. Trump ne croyait évidemment pas à l’ingérence en vue de procéder à la construction d’Etats. L’Afghanistan après l’Irak vient de lui donner raison. Un pouvoir sans racines dans le pays, méprisé parce que corrompu, une économie dominée par la culture du pavot et le trafic de l’opium, auxquels les Talibans avaient tenté de mettre fin en 1996, et qui assuraient leurs revenus depuis qu’ils avaient été chassés du pouvoir, des moeurs insoutenables mêlant une rigueur archaïque à une hypocrisie déroutante, l’exécution des homosexuels et des pratiques pédophiles, comme le “Bacha Bazi”, tel est l’Afghanistan après vingt ans de présence américaine. Les “progrès” ne touchaient qu’une minorité sans susciter un esprit national. Les policiers et les soldats avaient un travail pour gagner leur vie, non pour la perdre bêtement contre leurs frères. On peut donc penser que Trump a eu raison d’en finir, mais on suppose qu’il n’aurait pas accepté l’humiliation, laissé les Talibans opérer leur conquête-éclair sans riposter avec les moyens dont disposent les Etats-Unis. Le but était d’imposer un gouvernement incluant les Talibans, non de leur donner les clés de la maison et le droit de vie ou de mort sur ses habitants. Ou la victoire démocrate remettait en cause le désengagement, ce qui était son droit, ou en accord avec le principe, la nouvelle administration gérait au mieux la mise en oeuvre de la décision. Elle a été totalement dépassée et n’a pas su éviter la honte d’une défaite totale et rapide, sans combat, laissant aux mains de fanatiques non seulement un matériel militaire performant mais surtout des Afghans qui avaient cru en l’Amérique, et bénéficié dans les villes d’un réel progrès, pour les femmes notamment. On découvre une lettre des Talibans exigeant une liste des femmes de 15 à 45 ans afin de les marier de force comme “butin de guerre”, pratique habituelle chez les guerriers de Mahomet, citée dans les hadiths. Et les crétins diplômés qui peuplent les cabinets et les antichambres de nos démocraties n’ont rien vu venir ! Ces faux “sachants” mais vrais ignorants du passé ont cru à nouveau “choisir entre la guerre et le déshonneur”. Ils ont subi un désastre et sont couverts de honte. (à suivre)
Source : https://www.christianvanneste.fr/