Mélenchon tire ses dernières cartouches sur les « militaires factieux », par Georges Michel.
Cette fois-ci, y a pas, la République est en danger. C’est un expert qui le dit. Pas comme ça, mais en gros, c’est l’idée. L’expert, évidemment, c’est Jean-Luc Mélenchon. D’ailleurs, le député des Bouches-du-Rhône est plus qu’un expert en République, il est la République. En toute simplicité. C’est celui qui dit qui est. Donc, ça ne se discute même pas.
Il vient d’où, le danger ? De hordes islamistes égorgeant nos femmes dans nos banlieues ? Pas du tout. À Rambouillet, pour Jean-Luc Mélenchon, il s’agit seulement d’un « révoltant meurtre ». Service minimum, comme l’ont fait remarquer certains sur les réseaux sociaux. Non, la République est en danger après « l’appel des militaires (en retraite) factieux, diffusé par l’hebdo d’extrême droite Valeurs actuelles ». Un appel, en plus – horreur absolue -, « soutenu par Marine Le Pen » et qui « reste sans réaction de Macron, chef des armées ». Factieux ? « Qui fomente des troubles, prépare une action violente contre le pouvoir établi ; séditieux », nous dit le dictionnaire.
Mais, en fait, de quoi s’agit-il, comme disait le maréchal Foch ?
Des généraux en deuxième section ainsi que des officiers, sous-officiers et même quelques militaires du rang en retraite, qui n’ont donc pas accès à l’armurerie (au cas où Mélenchon l’ignorerait !), signent une tribune à l’adresse du président de la République. Une initiative dont Jean-Pierre Fabre-Bernadac, bien connu des lecteurs de Boulevard Voltaire, est à l’origine. Le titre de cette tribune : « Pour un retour de l’honneur de nos gouvernants. » Et que lit-on, dans cette tribune ? Un appel à la sédition ? Pas vraiment. Jugez-en.
D’abord, un constat que beaucoup de Français partagent sans doute. « Délitement qui, avec l’islamisme et les hordes de banlieue, entraîne le détachement de multiples de parcelles de la nation pour les transformer en territoires soumis à des dogmes contraires à notre constitution. » Un constat qu’Emmanuel Macron doit partager, sinon il n’aurait pas lancé, en 2018, le concept, avec le succès que l’on sait, de « quartiers de reconquête républicaine ».
« Délitement, car la haine prend le pas sur la fraternité lors de manifestations où le pouvoir utilise les forces de l’ordre comme agents supplétifs et boucs émissaires face à des Français en gilets jaunes exprimant leurs désespoirs. » On ne reviendra pas sur cet épisode douloureux de notre histoire contemporaine et qui restera peut-être, toutes proportions gardées, comme l’expression d’une haine d’une certaine classe de la France d’en haut pour la France d’en bas. Cette « France d’en bas » qui n’hésite pas, d’ailleurs, à donner ses filles et ses fils pour servir le pays sous l’uniforme pour de maigres soldes. Certains y laissant leurs jeunes et belles vies.
Ensuite, face à ce constat, que souhaitent ces anciens militaires ? Que « ceux qui dirigent notre pays doivent impérativement trouver le courage nécessaire à l’éradication de ces dangers. Pour cela, il suffit souvent d’appliquer sans faiblesse des lois qui existent déjà. » Appliquer la loi : on a vu plus factieux !
Mais pour Jean-Luc Mélenchon, des anciens militaires qui se rassemblent, même armés de leur seule plume, ça sent le putsch. En plus, le 21 avril, c’était le soixantième anniversaire de celui d’Alger : vous imaginez, l’occasion était trop belle ! Et, brochant sur le tout, Marine Le Pen qui tend la main à ces anciens militaires ! Et Macron qui ne réagit pas, non franchement. Alors que…
Alors que tout le monde s’est mobilisé « contre l’UNEF pour de pauvres réunions de groupe de parole »… On est bien d’accord, ces « pauvres réunions de groupe de parole » de l’UNEF sont ces réunions où l’on demande aux Blancs de rester gentiment dans le couloir ? On a du mal à suivre Jean-Luc Mélenchon, l’universaliste. Face à de factices factieux, Mélenchon veut réveiller une gauche tout aussi factice : « Il est temps de nous entendre alors que, depuis plus d’un mois, nous appelons à une marche des libertés. » La ficelle est grosse, mais on ne sait jamais, sur un malentendu. Disons que l’Insoumis tire ses dernières cartouches avec son pistolet à eau.