Si Marlène Schiappa est contre la polygamie, pourquoi n’a-t-elle pas réagi quand Assa Traoré en a fait l’apologie ?, par Gabrielle Cluzel.
Marlène Schiappa l’a affirmé haut et fort au micro de Jean-Jacques Bourdin, main dans la main avec Gérald Darmanin, elle entend lutter pied à pied contre… la polygamie : considérant que « la polygamie est interdite par la loi et contraire aux valeurs de la République », elle propose donc « d’inscrire dans la loi » que « toute personne étrangère en situation de polygamie n’aura pas de titre séjour pour rentrer sur le territoire français » et entend, par ailleurs, expulser les polygames de fait.
Tout cela est louable. Sauf que…
Il y a déjà une loi. Ficelée par Charles Pasqua en 1993. On pourrait aussi donner, tiens, le droit de vote aux femmes, ce serait sympa ?
Pour la défense de Marlène Schiappa, il est vrai que cette loi sert si peu qu’elle en est devenue transparente, s’empilant sur l’étagère poussiéreuse de l’arsenal « on-va-voir-ce-qu’on-va-voir » voté ces quarante dernières années, juste en dessous d’un vieux carton à l’intérieur duquel gît un Kärcher™. Aucun étranger marié plusieurs fois à l’étranger ne claironne son état en passant à la douane ni ne l’écrit sur ses papiers d’identité. Et lorsqu’il y a polygamie de fait, bien malin qui peut la prouver. Les diverses épouses se déclarent à la CAF « mères isolées » et le tour est joué.
Dans son édition du 23 avril 2010, le JDD titrait « Polygamie : Hortefeux tape fort », évoquant la proposition faite par le ministre de l’Intérieur de l’époque à son alter ego de l’Immigration, Éric Besson, de déchoir de sa nationalité un homme polygame et fraudeur aux aides sociales. Deux mois plus tard, le journal citait l’exemple d’un « heureux » quinquagénaire de Bobigny doté de 4 épouses, 46 enfants, « [régnant] sur son pavillon de banlieue ». D’abord agent d’entretien, il avait « cessé de travailler quand le montant des allocations familiales [était] devenu suffisant pour nourrir son monde » : « Dans le village du nord du Mali où il [avait] grandi, on [parlait ] de sa réussite avec admiration. Il [voulait] que ça continue. » On ne sait si, dans ce cas précis, « ça continue », mais il est un fait que dix ans plus tard, on songe très sérieusement et en tapant du poing à faire voter une loi qui ex
Pourquoi aurait-on plus de succès avec les expulsions de polygames que l’on en a avec celles de délinquants ?
Un exemple ? Le 8 septembre dernier, Le Figaro relatait le calvaire d’une jeune étudiante d’Angers, séquestrée, frappée, étranglée et violée, trois heures durant, par un « trentenaire, déjà condamné au moins six fois depuis 2018 pour des vols avec effraction, outrages et rébellion [ayant] également purgé des peines pour exhibitions sexuelles et agressions sexuelles, dont celle d’une handicapée au CHU d’Angers » et faisant l’objet de deux interdictions de territoire français pendant cinq ans prononcées en 2018 et 2019. Las, « Erjan I., qui a purgé ses multiples peines de trois à six mois de prison, n’a cependant pas été expulsé du territoire français. En cause, la non-reconnaissance des pays auxquels il prétend appartenir. Erjan I., démuni de document officiel, s’est déclaré de nationalité kosovare mais le Kosovo ne l’a pas reconnu comme l’un de ses ressortissants, a indiqué la préfecture. ».
Il faudrait une volonté et un courage de Titan pour s’élever contre les multiples obstacles – administratifs, judiciaires, politiques, diplomatiques, etc. – dont, à l’évidence, sont dépourvus Marlène Schiappa et Gérald Darmanin.
Le 24 juin dernier, le magazine Paris Match publiait un grand portrait sur papier glacé d’Assa Traoré, icône des banlieues, dans lequel elle décrit la polygamie de ses parents comme une « expérience formidable ». Interpellé sur les réseaux sociaux, ce gouvernement, si prompt pourtant à réagir à chaque fois qu’Éric Zemmour éternue, n’a pas bronché.