Plutôt Amy Coney Barrett qu’Éric Dupond-Moretti !, par Bernard Hawadier.
Donald Trump a fait son choix et l’a annoncé solennellement, ce samedi, depuis la roseraie de la Maison-Blanche : la juge conservatrice Amy Coney Barrett a été désignée pour remplacer Ruth Bader Ginsburg à la Cour suprême des États-Unis.
Juriste respectée, mère de sept enfants que l’on présente comme une conservatrice illuminée, Amy Coney Barrett a déclaré, lors de l’annonce de sa nomination : « Un juge doit appliquer la loi telle qu’elle est écrite. Les juges ne sont pas des décideurs politiques et ils doivent être résolus à mettre de côté toutes les opinions politiques qu’ils pourraient avoir. » Cela m’a, a contrario, fait penser à la récente installation de notre nouveau garde des Sceaux.
De l’autre côté de l’Atlantique, Emmanuel Macron avait fait son choix et nommé Éric Dupond-Moretti garde des Sceaux. Avocat craint et respecté, l’homme aux plus de cent acquittements a déclaré, lors de son installation : « Je serai un garde des Sceaux de sang mêlé, mon ministère sera aussi celui de l’antiracisme et des droits de l’homme. » Et à peine nommé, ce ministre a immédiatement volé au secours de Mme Obono à la suite de l’article de Valeurs actuelles qui avait défrayé la chronique.
La France est malade de sa politique moralisatrice. Les États-Unis sont forts de leur pratique des institutions et du droit.
Nous autres, Français, faisons la leçon au monde entier, en particulier aux États-Unis, et encore plus à ce Donald Trump que nous traitons comme un accident de l’Histoire et du populisme. Je suis, d’ailleurs, étonné que notre nouveau garde des Sceaux n’ait pas fait un couplet sur le populisme qu’il faut éradiquer…
La République française donne également des leçons de laïcité à la Terre entière. C’est en cela que la comparaison des déclarations de Mme Barrett et de M. Dupond-Moretti est éclairante. Les Français exercent avec une hypocrisie toute républicaine un pouvoir spirituel de fait, avec prétention et arrogance, confondant les deux ordres que Jésus-Christ avait distingés – et non pas séparés – devant Pilate, alors que Mme Barrett s’invite en tant que juge à mettre ses opinions politiques de côté. Car se faire le ministre de la Justice de l’antiracisme et (de la religion) des droits de l’homme, et donc demander aux juges de s’en charger – car c’est de cela qu’il s’agit -, consiste à se situer sur un terrain spirituel ; c’est vouloir en permanence refaire les lois et faire évoluer la jurisprudence pour corriger ceux qui ne pensent pas « comme il faut » et qui ne plient pas le genou devant la république comme leur souverain. À l’inverse des chrétiens qui ne reconnaissent comme dieu et comme roi que Jésus-Christ… Un « vouloir » qui, il y a près de 2.000 ans, conduisit la Rome des Césars à persécuter ceux-là parce qu’ils ne courbaient pas l’échine.
Les mêmes chrétiens catholiques, et la boucle est bouclée, qui, comme Mme Barrett, ne reconnaissent au juge que le pouvoir d’appliquer le droit et non pas de le créer. Les mêmes qui, au risque, comme Thomas More, de se voir décapiter, opposent leur conscience face au pouvoir qui veut changer la loi afin qu’elle corresponde à l’idée qu’il se fait du droit.
Décidément, ce Donald Trump, avec tous ses défauts, n’aura pas fini de nous étonner et, finalement, de nous donner des leçons de vraie et bonne politique.