De la Scène au Prétoire…, par Christian Vanneste.
Macron avait désiré appuyer son pouvoir sur une mise en scène théâtrale parfaitement maîtrisée et entamée dans les décors somptueux légués par l’Ancien Régime. Trois ans plus tard, dans une ambiance tragique, le spectacle vire à la bouffonnerie. L’homme qui se vantait de chasser du pouvoir les politiciens du passé dont il fustigeait l’incompétence, qui disait avoir une vision de l’avenir avec une France ouverte sur le monde et pétulante de créativité, une « start-up nation », celui qui prodiguait ses conseils aux chefs d’Etats d’Europe et de la planète, le voilà englué dans un scénario où toutes ses promesses deviennent des malédictions.
Il ne voulait pas de frontières. Les autres pays, et même les Allemands, les ont voulues pour lui. Alors, ce chantre du « bougisme » a enfermé chaque français dans les frontières de son logement, lui a interdit de traverser la rue sans impératif, même pas celui de trouver un emploi au bistrot d’en face. Le bistrot est fermé et ses employés au chômage. Face au virus, il y a pourtant une frontière individuelle portative que chaque Français peut emporter avec soi : le masque. Le gouvernement et son administration savaient depuis 2018 que le stock n’était plus suffisant pour répondre à une crise sanitaire, et il avait laissé fermer la même année l’usine bretonne de Plaintel qui fabriquait les FFP2 dont les soignants ont manqué au péril de leur vie. Six jours après avoir repoussé la réouverture du site, les machines étant dispersées, le voici qui passe commande à son fantôme… ce qui donne l’occasion au président de l’annoncer comme par hasard lors d’une visite dans un magasin de la région… Le visionnaire est devenu myope et ne voit plus qu’à l’horizon d’une communication coupée en tranches et dénuée de la moindre authenticité, une communication « officielle » entrelardée de contradictions, d’oublis et de mensonges. Le progressiste lyrique lutte contre l’épidémie du XXIe siècle avec les moyens du Moyen-âge ! Celui qui s’apprêtait à célébrer triplement une année de Gaulle a créé une ligne Maginot d’où il faudra bien que les Français sortent un jour sans avoir été testés alors que 75% des porteurs sont asymptomatiques !
Arrivé grâce à une irruption judiciaire qui ne devait rien au hasard dans le déroulement d’une élection qu’elle a faussée à son profit, il craint maintenant que la justice ne soit actionnée par les Français pour mettre fin à l’usurpation dont ils se croient de plus en plus les victimes. Ainsi donc, le pouvoir savait que l’épidémie atteindrait la France contrairement à ce qu’a dit le ministre de la Santé, Mme Buzyn, au mois de Janvier. Il savait que la France n’était pas préparée à y faire face, mais ce n’est que le 20 Mars que le nouveau ministre M. Veran en a fait l’aveu devant l’Assemblée Nationale, alors qu’il avait affirmé le 18 Février que la France était prête et disposait d’un système de santé solide. Le gouvernement a donc menti sur l’absence de masques et des autres vêtements protecteurs, mais aussi sur les capacités d’accueil des hôpitaux, sur les lits de soins intensifs et sur les respirateurs, sur les moyens de réaliser les tests, enfin. Alors, il a fallu inverser la logique médicale qui consistait à dépister les porteurs du virus avant même qu’ils aient des symptômes, à les isoler, et à les suivre médicalement : tester le maximum de personnes, protéger toute la population grâce à des distributions massives de masques, et soigner les malades. On a enfermé tout le monde, déconseillé le masque comme inutile, empêché l’immunité collective, car l’obsession était de ne pas saturer les trop peu nombreux lits d’hôpitaux déjà remplis dans certaines régions. Faute de combattre la maladie avec une stratégie claire, une thérapeutique efficace, on a seulement pratiqué une gestion hôtelière de la maladie, rythmée par les conférences du grand vizir de la santé qui commente la fin progressive de la pénurie plus qu’il n’annonce celle de l’épidémie. Des malades sont morts, faute d’avoir été informés des risques, des médecins sont morts pour les avoir soignés sans protection. Le pouvoir a laissé la frontière ouverte avec l’Italie, laissé se tenir un match de football Lyon-Turin, maintenu le premier tour des élections municipales, alors qu’il connaissait les dangers. Il y a là les arguments d’un terrible réquisitoire ! Certes, le président est intouchable, mais ses ministres ne le sont pas, et s’ils étaient reconnus coupables de mise en danger de la vie d’autrui, c’est le pouvoir tout entier qui serait ébranlé…
Emmanuel Macron s’en est inquiété publiquement, le 31 mars, lors d’une visite dans une usine de masques à Angers : « Toutes celles et ceux qui cherchent déjà à faire des procès alors que nous n’avons pas gagné la guerre sont irresponsables… » Sauf qu’une guerre ne suspend ni la démocratie ni la justice, et que la lutte contre un virus n’est pas une guerre où l’ennemi pourrait tirer parti des débats. Entré, côté jardin par la Justice, il se pourrait bien que la sortie se fasse côté cour par la Justice aussi !
Commentaires
Une nouvelle fois nous avons la confirmation de la citation d'Anatole FRANCE: la République ne sait pas gouverner, mais elle sait très bien se défendre.