Chère Amazonie, par Gérard Leclerc.
Aujourd’hui, l’exhortation post-synodale du pape François intitulée Chère Amazonie, doit être rendue publique. On sait qu’elle constitue la conclusion ultime d’un synode qui s’est tenu à Rome en octobre dernier, avec les divers représentants de cette région d’Amazonie aux caractéristiques bien singulières, puisqu’elle consiste en une immense forêt dont le devenir est problématique.
Il se trouve que parallèlement aux travaux des responsables de l’Église catholique, le gouvernement brésilien se souciait aussi de ce territoire, en élaborant un projet de loi qui concerne son exploitation économique et le sort des Indiens qui constituent l’essentiel de sa population.
Michel Leclercq, le correspondant du Figaro à Rio de Janeiro, fait part de la vive inquiétude que provoquent sur place le projet gouvernemental et la nomination d’un ex-missionnaire évangélique chargé de s’occuper des Indiens. Ceux-ci rejettent en grande majorité l’exploitation minière et les barrages hydro-électriques envisagés par le président brésilien Bolsonaro. Ils craignent aussi les dégâts humains provoqués par la volonté de remettre en cause toute une organisation ethnique délicate. De ce point de vue, les évangéliques n’ont pas bonne réputation avec leurs méthodes plutôt radicales.
À partir de là, on comprend mieux les difficultés rencontrées par le synode romain rassemblant les évêques de la région. Comment respecter les équilibres écologiques et humains de l’Amazonie ? Comment annoncer la bonne nouvelle de l’Évangile en se gardant des contraintes brutales qui arrachent un peuple à ses traditions ? Le débat à Rome a parfois été abrupt entre ceux qui voulaient respecter les rites ancestraux et ceux qui les rejetaient comme idolâtriques. L’équilibre est-il seulement possible ? Pour éclairer la question, un texte du cardinal Newman, cité par le Père de Lubac, a été parfois proposé : « Dès le commencement, le maître du monde moral a répandu les semences de la vérité sur toute l’étendue de sa surface, et elles y ont pris racine. » Ainsi l’Église a-t-elle pu être conçue comme « une sorte de maison du trésor où l’on distribuait des choses anciennes et des choses nouvelles ». Newman croyait à « une plénitude catholique » capable d’accueillir le meilleur des cultures anciennes en les ouvrant à la nouveauté du Christ.