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  • Graines d'éducation (8), par Jeunesse si tu savais et Poussières d'étoiles.

    En contact avec les mouvements Jeunesse si tu savais et Poussières d'étoiles; voici les liens de leur page FB, de leurs sites officiels et de leur chaîne youtube :

     

    JEUNESSE SI TU SAVAIS

    https://www.facebook.com/jeunessesitusavais/

    https://www.jeunesse-si-tu-savais.fr/

     

    POUSSIERES D'ETOILES

    https://www.poussieresdetoiles.fm/

    https://www.youtube.com/channel/UCvYtt4Ws_Uc4Cj0LeLCoEJQ/videos

     

    Et voici le huitième article (aussi en vidéo/audio) qu'ils nous ont adressé, en attendant la suite...

    L'EDUCATION C'EST D'ABORD LA TRANSMISSION D'UN SAVOIR, PUIS UNE PRISE DE CONSCIENCE, ENFIN UN EXERCICE DE LA VOLONTE

    L’éducation, vaste sujet ! Aussi ne voici que quelques réflexions, quelques éléments sur l’éducation des enfants et des jeunes. Fruits de l’expérience.

    https://www.poussieresdetoiles.fm/ uploads/newscast/0/0/55/dc6b86e4-43c1-479b-bd1e-d418b7c6ac23.mp3

    Une bonne éducation commence dans la famille.

    Par une immersion dans un certain nombre de traditions et de coutumes entouré d’un climat d’amour. On transmet d’abord ce savoir, ce trésor légué par les générations précédentes et enrichi de sa propre expérience. Puis il s’agit de faire prendre conscience que l’on peut appliquer ce savoir, cette éducation reçue, dans la vie de tous les jours, dans la vie future, dans sa vie d’homme en construction. Ensuite il faut bien entendu commencer à appliquer cette éducation reçue. Cette mise en pratique se fera par l’effort de la volonté. Voilà les trois éléments que nécessite cette formation de base qu’est l’éducation :

    le savoir, la conscience et la volonté.

    Faut-il être sévère avec les enfants ou le contraire ?

    Le premier écueil – que l’on trouvait souvent dans l’éducation des siècles passés - c’est l’excès de sévérité. Ce qui peut générer des enfants soit rebelles, soit repliés sur eux-mêmes. Qui vont avoir comme premier objectif de s’échapper, au plus vite, de la cage familiale dans laquelle ils se sentent comme prisonniers. S’ils ne la font par exploser avec violence… L’autre écueil – dans la foulée de la Révolution de 68 et de son « il est interdit d’interdire » c’est le laxisme, un « laisser-faire, laissez-passer », une mise en pratique du libéralisme à l’éducation des enfants et à la famille. Chacun choisit son yaourt, son heure de repas, chacun choisit son programme télé (avec de préférence une télé pour chacun) ou son ordinateur pour faire ce que l’on veut à tout moment. Chacun choisit son heure de sortie. En fait c’est une absence d’éducation, c’est du laxisme. L’excès de sévérité provoque le fait que l’on veuille s’échapper, mais le laxisme ne donne aucun repère, aucune direction à sa vie. L’équilibre et l’harmonie sont à rechercher dans l’éducation pour donner des hommes et des femmes eux-mêmes équilibrés et harmonieux dans la vie. C’est là un chemin de crête qui n’est pas sévérité, mais plutôt autorité qui permet de savoir où l’on va, de poser des limites, de donner une direction. Cela passe bien sûr par des interdits, mais aussi par des encouragements. Les enfants sont encouragés à aller dans la bonne direction et sont aussi avertis quant aux voies sans issue. Un chemin de vie est aussi un chemin d’équilibre entre justice et miséricorde. Quand on parle de Dieu, pour les chrétiens, Dieu le Père représente souvent la Justice et le Fils Jésus représente la Miséricorde. Ainsi le Fils est désigné sous l’appellation « Jésus miséricordieux » et fêté le dimanche après Pâques - dimanche de la Miséricorde divine. Justice et miséricorde. Quand on en vient à la famille - créée à l’image de Dieu-Trinité - la justice est souvent représentée par le père et la miséricorde par la mère. L’éducation est un chemin de crête entre l’autorité et la compréhension. On ne peut pas représenter que l’autorité sinon on va vite verser dans l’excès de sévérité, et on ne pas choisir que la compréhension sans vite sombrer dans le laxisme. L’autorité dont il est question devrait être une autorité naturelle, une autorité qui va de soi, qui s’impose sans user de violence. A ce propos peut-on être violent avec les enfants ? La violence est officiellement aujourd’hui interdite par la loi, mais malgré tout la correction est quelques fois pratiquée. Il y a sûrement mieux à faire que d’user de violence dans l’éducation. Celui qui aura connu la violence régulièrement en tant qu’enfant sera tenté de la reproduire en tant qu’adulte dans sa vie de tous les jours : avec ses copains, avec les rencontres du quotidien, avec aussi ses propres enfants plus tard. La violence risque ainsi de se transmettre. Sans parler des extrêmes de la violence : les bagarres, les blessures, voire la mort. Tout le contraire d’une vie en société civilisée. Cependant il y a une autre solution pour mettre des limites aux enfants qui n’écoutent pas ce qu’on leur dit : c’est d’élever la voix. Avec la voix, c’est la vertu d’autorité. L’autorité doit pouvoir se comprendre simplement par le ton de la voix. Au-delà on peut aussi passer à la pratique de la vertu de force. Si un enfant ne revient pas alors qu’il est en train de s’amuser, on peut aller le chercher, sans faire preuve de violence, en le prenant par la main - comme le dit la chanson d’Yves Duteil « Prendre un enfant par la main » - on le prend par la main, on le pousse devant soi pour qu’il retrouve le droit chemin. On peut passer à la pratique ou simplement élever la voix sans user de violence. Autrefois les élèves respectaient le maître d’école ou le professeur. Aujourd’hui l’éducation ne va plus de soi. Le maître d’école, le professeur avait toujours raison, la fonction seule conférait le respect. Dans un village le maître faisait partie des trois personnalités les plus en vue et respectées avec le maire et le curé. Depuis Mai 68, rien ne va plus…Les maîtres d’école, les profs, tous ont été contestés dans leur fonction et leur savoir (les « mandarins », les « cours magistraux »), dans leur autorité (« il est interdit d’interdire »). De nos jours, même les enfants de 4, 6 ou 8 ans sont un peu comme les étudiants contestataires de Mai 68, ils contestent l’autorité qui s’impose. Aujourd’hui on ne peut plus se contenter d’une autorité liée à une fonction, mais on a besoin d’autorité naturelle. C’est la seule qui soit encore reconnue. Et quant au savoir, à la transmission, il faut des explications.

    Bien avant Mai 68, un philosophe français du siècle dernier n’avait de cesse de répéter :

    « Donnez-leur des raisons » !

    L’enfant ne pourra réellement savoir qu’en comprenant, en prenant conscience des choses à l’aide d’explications. Pour la bonne éducation il faut transmettre le savoir, mais il faut aussi initier à la conscience. Et la prise de conscience ne peut se faire que par des explications, que par la raison. L’enfant ne comprendra sûrement pas en un jour qu’il faut se brosser les dents tous les jours et que c’est le meilleur moyen pour éviter les microbes, pour éviter les caries. Mais au bout d’un ou deux ans et après s’être retrouvé chez le dentiste pour une carie, et que çà lui fait très mal, à ce moment-là, il prendra conscience de ce qu’on lui a expliqué. Aujourd’hui, et c’est ainsi depuis 68, des plus petits enfants aux étudiants il est essentiel de « leur donner des raisons ». Il faut leur expliquer les raisons de ses choix, de ce que l’on pense le meilleur pour eux. Ne pas avoir peur non plus de se répéter, de réexpliquer une fois, dix fois, 77 fois 7 fois comme il est dit dans la Bible à propos du pardon. Voilà quelques petites graines pour l’éducation. Ne pas penser à la violence, mais à l'autorité naturelle. Ne pas agir sous le coup de la colère, mais après mûre réflexion. Transmettre le savoir avec des explications et une prise de conscience. Qu’enfin la volonté personnelle puisse se mettre en œuvre, tôt ou tard, et qu’ainsi chaque jeune soit armé pour réaliser le meilleur dans sa vie en suivant ce chemin d’équilibre et d’harmonie auquel doit mener toute éducation bien comprise.

  • Michel Onfray : psychopathologie du Président (3/3).

    Devant trente-cinq millions de téléspectateurs, un record, le président de la République a excellé dans ce qu’il sait le mieux faire: tenir un double langage, dire une chose et son contraire -comme porter deux alliances...

    Cette fameuse schizophrénie, jadis tenue par les psychiatres pour pathologique, est devenue dans notre époque déconstructionniste une qualité dialectique, un genre de vertu hégélienne -c'est le fameux "en même temps" devenu slogan électoraliste puis, hélas, depuis deux ans, méthode de gouvernement!

    Les thuriféraires du chef de l'État prétendent qu'il disposerait d'une intelligence exceptionnelle, incompréhensible pour le commun des mortels -souvenez-vous des sorties de Gilles Le Gendre et de Richard Ferrand, deux flèches intellectuelles comme chacun aura pu s'en apercevoir. Ce génie que lui prêtent ses courtisans lui permettrait de renvoyer Descartes et le cartésianisme, sinon le plus élémentaire bon sens, aux poubelles de l’Histoire.

    Voilà qui permet de faire exploser en vol le fameux principe de non contradiction, un principe de base de toute rationalité -c'était jadis un enseignement délivré dès les premières heures de classe de philosophie en terminale. Il semble que le Grand Timonier d'Amiens ait sauté la leçon, probablement parce qu'il courrait d'autres lièvres...

    Selon ce principe, une chose ne peut être dite vraie en même temps que son contraire: de fait, on ne peut être à la fois mort et vivant, grand et petit, gros et maigre, crétin et intelligent, blanc et noir, musulman et chrétien, tatoué et sans tatouages, homme et femme -encore que, depuis un certain temps, un homme blanc, barbu, peut, sans se faire rire au nez, dire sur le plateau de Daniel Scheidermann qu'il est une femme de couleur parce qu'il est né au Liban en obtenant les plus plates excuses du journaliste qui ne s'en était pas aperçu... Comme quoi la contamination schizophrénique fait la course en tête avec le virus.

    C'est en vertu de ce paralogisme devenu marque de fabrique présidentielle qu'Emmanuel Macron peut se permettre d’annoncer, en prenant soin de ne jamais utiliser le mot, le confinement de toute la France pour cause de coronavirus.

    Donc: interdit de sortir de chez soi. Sauf quand on sort de chez soi, à savoir: muni d'une déclaration imprimée à partir de son ordinateur -bonjour les anciens sommés de se faire geeks pour l'occasion!

    "La France est en guerre" fut-il dit à plusieurs reprises de façon martiale, il faut donc rester confiné chez soi, mais on peut tout de même effectuer "les trajets nécessaires pour faire un peu d'activité physique". Énième variation sur le thème du "en même temps": restez confinés mais sortez quand même...

    Qui pourrait imaginer qu'en guerre, et la chose fut dite à plusieurs reprises, on puisse sortir de la tranchée pour aller faire un footing sous la mitraille, les obus, en avalant à pleins poumons les gaz de l’ypérite, en courant entre les éclats d'obus, puis rentrer, indemne, à la maison? Emmanuel Macron...

    Dans la foulée, son ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, une autre flèche du carquois présidentiel, annonce clairement: "Le mot d'ordre est clair (sic): restez chez vous!". Ce qui veut donc dire, en toute bonne logique... qu'on ne saurait effectuer "les trajets nécessaires pour faire un peu d'activité physique"!

    On imagine mal que Macron et Castaner ne se soient pas concertés! C'est donc une décision contradictoire à laquelle le chef de l'État nous contraint. Macron, en Dupond D, affirme: "Interdit de sortir, mais on le peut tout de même pour faire du sport"; Castaner, en Dupont T, ajoute: " je dirai même plus, interdit de sortir y compris pour faire du sport". Comprenne qui pourra!

    Bon courage aux forces de l'ordre quand elles devront tenter de faire respecter la loi le carnet de contravention à la main...

    Si l'on voulait tout de même obéir aux deux hommes en même temps, avouons que cette décision de Janus libérerait l'inventivité: nager le dos crawlé dans sa baignoire, faire du cyclisme dans son couloir d'appartement, descendre ses escaliers en ski, faire du parachute en sautant du haut de son armoire, partir en balade en canoë-kayak dans son évier, pratiquer la spéléologie dans la canalisation de ses toilettes, l'escalade en grimpant à ses rideaux, l'équitation en galopant sur son balcon -où l'on constate que le macronisme ouvre des possibles insoupçonnés!  Quelle intelligence inédite en effet...

    On peut également sortir pour des raisons de santé.

    Or, nous croulons sous les prescriptions médicales qui, entre cinq fruits et légumes par jour et pas plus de deux verres d'alcool quotidiens, nous invitent à faire de l'exercice dans le genre dix mille pas par jour: quiconque remplira son formulaire en disant qu'il lui faut marcher, faire du vélo, courir, sera fondé à le faire, donc à sortir de chez lui, sans besoin d'une prescription médicale, puisque les hygiénistes nous bassinent avec ces exhortations chaque jour que Dieu fait depuis des années. Demandez à Michel Cymes, le grand prêtre de cet hygiénisme, flanqué de sa caution scientifique Adriana Karembeu:  il faut bouger pour éliminer -c'est d'ailleurs également la maxime du coronavirus, son impératif catégorique ...

    Je gage qu'en vertu de la logique victimaire, des associations de cardiaques ou de victimes d'AVC (je peux les invoquer, j'ai le titre aux deux, héhé...) se retourneront bientôt contre l'État en le suspectant de vouloir augmenter la mortalité en France par une production massive de crises cardiaques et de congestions cérébrales, comme on disait dans le temps, faute d'exercice physique!

    Donc, le président de la République a dit: restez confinés chez vous sauf quand vous sortirez. Voilà le propos d'un philosophe, d'un sage, d'une intelligence exceptionnelle et d'un conducteur d'hommes. Jupiter, tu m'impressionnes...

    Ce même discours de vingt minutes a mis à jour un second paralogisme. Un toutes les dix minutes, c'est une copie nettement à noter en-dessous de la moyenne...  

    Depuis des semaines, pour contrer les souverainistes avant les élections municipales et, comme toujours, tenter de pousser les feux maastrichtiens, il a été dit, dans une belle formule ciselée par les communicants: "le coronavirus n'a pas de passeport"! C'était une belle image qui appuyait l'idée déjà martelée souventes fois que: "le coronavirus ignore les frontières".

    Dans sa première intervention, le 12 mars, Emmanuel Macron avait appelé à "éviter le repli nationaliste" face au virus qui, avait-il donc dit, "n’a pas de frontières, pas de passeport". Il avait, en même temps, assuré que les fermetures de frontières, "quand elles seront pertinentes", seraient décidées "à l’échelle européenne".

    Le paralogisme était donc déjà dans cette seule phrase: si le coronavirus n'a pas de frontières comment pourrait-il en avoir tout de même? Qu'est-ce qui rend "pertinent", pour utiliser son mot, qu'on les ferme?

    La conclusion s'impose: seule volonté de protéger l'Europe, un souci que ne mériterait pas la France tout juste bonne à crever, s’avérera pertinent...

    La France n'a pas de frontières, mais l'espace Schengen, si; le virus ignore les frontières françaises, mais il connait celles de Schengen; il n'a pas de passeport français, car c'est un vulgaire torchon, mais il possède un passeport européen, un sublime sésame: jamais le cynisme de l'Empire maastrichien qui aspire à détruire les nations pour imposer sa loi n'aura été autant visible.

    Un chef de l'État français qui expose sciemment son peuple et ne prend de mesures contre lui qu'en faveur de l'Europe, voilà le signe de la forfaiture -de la haute trahison si l'on préfère. Comment punit-on ce genre de crime? Le temps voulu, le peuple français saura répondre à cette question*.

    Michel Onfray

    *: A l'heure où je finis ce texte, j'apprends qu'Agnès Buzyn, ministre de la santé démissionnaire en pleine épidémie, et ce afin de remplacer Griveaux mis hors-course dans les municipales de Paris, prétend dans Le Monde qu'elle aurait averti Emmanuel Macron de la dangerosité de la pandémie fin janvier 2019 et qu'il n'en aurait rien fait. Si tel était le cas, la forfaiture et la haute-trahison seraient avérés. A suivre...  

  • Paru sur le site Marcelle, entretien avec celui qui est au cœur des polémiques : Didier Raoult.

    https://marcelle.media/

    Le portait du Pr Didier Raoult paru dans Marcelle il y a une semaine a explosé tous nos compteurs (plus de 100 000 lecteurs). Plus surprenant encore, il n’a donné lieu à aucune polémique. Le chercheur est actuellement au cœur de tous les débats pour la solution thérapeutique qu’il préconise. Hier matin, le Canard Enchaîné titrait même sur les menaces de mort dont il a fait l’objet. D’où cet exercice de questions-réponses auquel le virologue aujourd’hui le plus célèbre de la planète a bien voulu se plier car il connaît bien et depuis longtemps les journalistes qui le questionnent.

    Vous avez fait savoir mardi que vous ne participeriez plus aux réunions du comité scientifique qui conseille nos autorités sur la conduite à tenir face à l’épidémie, pourquoi ?

    Je n’ai pas deux heures à perdre dans des discussions qui ne vont pas à l’essentiel. Ici, nous sommes submergés de travail, nous sommes submergés par les résultats des tests et les données de nos patients. Un tiers de nos 75 lits d’hospitalisation est renouvelé tous les jours, nos équipes sont mobilisées H24… C’est cela qui m’importe, pas les causeries où il ne faut surtout froisser personne.

    Les critiques, les mises en cause, cela vous blesse ?

    Les critiques et les conversations de bar sur les plateaux télé, je m’en fous à un point que vous n’imaginez pas. Ce qui m’ennuie, en revanche, c’est que la France, mon pays, ne suive pas ce qui est raisonnable et prenne du retard parce que des gens qui se pensent importants ne veulent pas se dédire. Moi, je suis serein, je sais comment cela va se terminer.

    C’est ce que certains vous reprochent, de prédire l’avenir.

    Il ne s’agit pas de prémonition mais de savoir. Dans le domaine qui est le mien, je sais ce que je dis, je sais ce que font mes équipes, j’accumule des données – donc du savoir supplémentaire – et je mesure tous les jours l’effet clinique de ce que je préconise. Certains ne veulent pas y croire ? C’est leur problème. Les politiques et leurs décisions, c’est l’Histoire qui les juge. On verra très vite ce qu’il en est pour cette crise. On connaîtra la vérité. Un millier de patients ont été déclaré positifs aux tests que nous avons réalisés. Grâce au suivi de leur traitement, nous disposons d’une somme considérable de données. Nous les compilons. Elles nous donneront bientôt une idée plus précise de l’action de l’hydroxychloroquine.

    Avez-vous ajusté vos indications thérapeutiques ?

    Notre doctrine, c’est de détecter et de traiter le plus en amont. L’hydroxychloroquine fonctionne sur les cas modérés à sévères. Au-delà, quand les patients sont en réanimation, c’est trop tard. Le virus est encore là, mais le malade souffre d’inflammations pulmonaires consécutives.

    Justement, l’essai clinique Discovery va être mené sur des patients très atteints…

    Si on avait envie de prouver que ça ne marche pas, on ne s’y prendrait pas autrement. Il y aura une enquête parlementaire après tout ça, et elle sera sanglante, autant que l’affaire du sang contaminé. Et ce sera pire si le gouvernement décide de refuser l’accès au médicament.

    Mais, même l’Organisation mondiale de la santé (OMS) met en garde contre le traitement que vous préconisez…

    Avant toute chose, je suis médecin. J’ai prêté le serment d’Hippocrate en 1981 et mon devoir depuis, c’est de faire ce qui me paraît le mieux pour les malades, en fonction de mes connaissances et de l’état de la science. C’est ce que je fais depuis 40 ans et ce que je fais en ce moment avec mes équipes : soigner le mieux possible les patients qui se présentent. Cela veut dire les tester, évaluer l’état de ceux qui sont positifs et les traiter avec les thérapies disponibles. Aujourd’hui, il n’y en a qu’une qui a commencé à donner des résultats, c’est l’hydroxychloroquine associée à un antibiotique, l’azithromycine. Toutes les données que nous recueillons depuis que nous avons commencé, il y a un mois, après les premiers essais en Chine, vont dans le même sens. Alors, que ça respecte ou non les procédures scientifiques habituelles… Je suis d’accord avec le Président quand il dit que nous sommes en guerre. Une guerre qui justifie de se battre avec toutes les armes dont nous disposons. En tant que médecins, il est de notre devoir de donner aux malades le meilleur traitement disponible à l’instant T. Le reste, c’est de la littérature.

    Quels mécanismes entreraient en jeu avec l’administration d’hydroxychloroquine ?

    Cette molécule aurait deux effets pour accélérer l’élimination du virus : il modifierait d’abord l’environnement acide de la poche vacuole de la cellule. Ce petit sac de liquide protégé par la membrane sert de nid aux virus. En augmentant son pH (potentiel Hydrogène), l’écosystème tranquille de cet abri est chamboulé et les enzymes, impliquées dans la machinerie cellulaire utilisée par le virus pour se répliquer, sont empêchées d’agir. L’hydroxychloroquine favoriserait également l’apoptose, c’est-à-dire la mort cellulaire programmée, un mécanisme génétique qui protège l’organisme des infections en commandant aux cellules infectées de s’autodétruire. Je vais travailler avec l’expert de renommée mondiale Guido Kroemer, professeur d’immunologie à la faculté de médecine de l’Université de Paris Descartes et directeur de l’unité de recherche « Métabolisme, cancer et immunité », pour approfondir les travaux sur les mécanismes impliqués.

    Sans présager de la publication de vos nouvelles observations, que pouvez-vous dire de l’efficacité de Plaquenil ?

    Ne vous inquiétez pas : ça marche. Et même mieux que ça : on a deux fois moins de victimes d’infections virales cette année, toutes maladies confondues, aucun pic de surmortalité et pas de résistance aux antibiotiques.

    Nombre de vos confrères poussent des cris d’orfraie en évoquant les effets secondaires délétères de la chloroquine…

    Tous les médicaments ont des effets secondaires, surtout lorsque l’on ne respecte pas les posologies. L’aspirine, le paracétamol et l’ibuprofène surdosés, c’est beaucoup plus dangereux que l’hydroxychloroquine aux doses où on les administre. Quant à l’azithromycine, un Américain sur huit s’en voit prescrire au moins une fois chaque année. Si cela tuait les gens ou les rendait plus malades qu’ils ne sont, nous le saurions.

    Vous avez annoncé dimanche que vous testeriez toutes les personnes fébriles qui se présenteraient à l’IHU. On a vu les queues qui se formaient devant chez vous. Que pouvez-vous nous en dire ?

    Depuis lundi, nous avons pratiqué 2 000 tests par jour. Environ 10% des personnes testées étaient positives.

    Que se passe-t-il pour les gens que vous dépistez ?

    Notre protocole est rodé. Nous regardons s’ils ont des signes cliniques de la maladie et nous leur faisons passer un scanner pulmonaire  « low dose » (1), comme le font les Chinois, car une partie des gens contaminés ne présentent pas de signes cliniques évidents de la maladie mais ont des lésions pulmonaires qui s’aggraveront s’ils ne sont pas traités.  C’est à eux que l’on administre ce que nous considérons comme le seul traitement disponible à ce jour.Deux jours après, ils sont invités à venir réaliser un électrocardiogramme. Le risque cardio-vasculaire est l’effet secondaire le plus important. Ce traitement est ambulatoire mais les patients les plus sérieux sont naturellement hospitalisés.

    Qu’est-ce qui, selon vous, empêche de généraliser ces tests et ces examens au scanner à l’ensemble du pays ?

    C’est d’abord une question de volonté politique et de mise en place logistique. Les moyens, nous les avons. Entre les laboratoires d’analyses privés, les laboratoires vétérinaires de très grande qualité que nous possédons, les médecins de ville et les infirmières libérales, tous qualifiés pour faire des prélèvements, ainsi que nos ressources hospitalières, il y a de quoi faire. Ici, nous ne sommes pas des extra-terrestres. Si nous arrivons à faire 2 000 tests par jour à l’IHU de Marseille je ne peux pas croire que la France entière ne soit pas capable de faire comme en Allemagne ou en Corée du Sud. 100 000 tests par jour, c’est ce dont nous aurions besoin et nous en sommes capables. Des tests PCR de base, hors épidémie, nous en faisons 300 000 par an à l’IHU. Quant aux scanners, nous faisons face à Marseille, mais cela sera peut-être plus difficile ailleurs, car notre taux d’équipement en scanners est un des plus faibles des pays de l’OCDE. C’est la conséquence des choix politiques et financiers des 30 dernières années. Les conneries finissent toujours par se payer.

    Comment expliquez-vous que cette stratégie qui a fait ses preuves ailleurs, ne soit toujours pas d’actualité chez nous ?

    En France, malheureusement, avant de se poser la seule question qui vaille, c’est-à-dire « que faut-il faire pour faire face à telle situation ? », on se demande toujours « est-on capables de mettre en place telle ou telle solution ? ». On met la charrue avant les bœufs et ça n’avance pas.

    Le ministre de la Santé vous écoute-t-il ?

    C’est un homme intelligent, mais il a hérité d’une situation très difficile, très désorganisée.

    Que pensez-vous de l’attitude des autorités, politiques et médicales, d’une façon générale ?

    Je me contenterai de citer la maxime attribuée à Sénèque : « Errare humanum est, perseverare diabolicum » (ndlr – L’erreur est humaine, persévérer -dans l’erreur- est diabolique) ♦

     

    (1) Un scanner « low dose » (faible dose en français) permet d’obtenir une image de bonne qualité avec un niveau d’irradiation très faible du patient.

    Par Hervé Vaudoit et Paul Molga

    Journalistes

  • Malédiction chilienne

    Par Mathieu Épinay* 

    Bloc-notes

    Macron sous l’uniforme de Pinochet ! Le photomontage où il siège entre ses ministres Philippe et Castaner en militaires bottés aura fait le tour de la toile, centrifugé par les tentatives de l’Élysée de l’en retirer et par la « main de Moscou » qui l’affichait avec gourmandise sur Sputnik, très lu des Français, honni de Macron.

    En Union européenne, Russia Today et Sputnik sont suivis comme jadis Radio Free Europe l’était en Union soviétique et ça horripile l’Élysée dont chaque bavure policière filmée tourne en boucle sur la planète. Récemment encore, un député, un journaliste, un couple de personnes âgées battus, un handicapé gazé à bout portant, pas bon pour l’image du régime dont l’usage déréglé du « lanceur de balles de défense », 20 éborgnés à vie, 180 blessés à la tête, excusez du peu, commence à émouvoir le Conseil de l’Europe. Macron, à qui il demande des comptes, rétorque implicitement qu’ils ne l’ont pas volé, ce sont des casseurs. Les mutilés apprécieront ! Dans les cités grenobloises en feu, les mutinés rigoleront.

    172958.jpgLa photo originelle de Pinochet dans le rôle du méchant, lunettes noires et mine patibulaire, alimentait jadis une campagne orchestrée par Moscou contre ceux qui avaient débarrassé le Chili du stalinien Allende, un coup d’arrêt sans précédent au communisme qui rongeait alors la planète. 17 ans plus tard, Pinochet était encore plébiscité à 43%, pas assez pour se maintenir, il laissait la place. Macron, qui n’est que l’élu des deux tiers de 43% des inscrits, ressemble plus à Allende. Comme lui, il a pris le pouvoir par un hold-up électoral qui le prive de légitimité représentative, comme lui il a cristallisé contre une « nomenklatura » d’idéologues bornés et profiteurs la vindicte d’un peuple exaspéré qui, en France, s’est affranchi de tutelles partisanes et syndicales disqualifiées par 50 ans de compromissions. Comme lui, il fait tirer sur la foule où le nombre de mutilés augmente chaque samedi. Dieu merci, il n’a pas encore suivi ses soutiens « foulards rouges » et l’ancien ministre-philosophe Luc Ferry qui lui conseillent de tirer à balles réelles sur les Gilets jaunes.

    Photo-bloc-note-3-450x225.jpgMadame Bachelet fut deux fois présidente du Chili après Pinochet. Il l’aurait torturée en 1973, lui laissant en tout cas les mains et les yeux que des Gilets jaunes ont perdus. L’ex-torturée de Pinochet, donc, devenue haut-commissaire des droits de l’homme à l’ONU, demande une enquête sur l’usage excessif de la force par Macron : y aurait-il une malédiction chilienne ?

    Crispation républicaine

    En France la situation reste bien inquiétante, non pas tant à cause de la ténacité d’un peuple méprisé par les incapables qui croient nous gouverner, mais plus par le comportement étrange d’un chef d’État dépassé par la fonction. Il organise un grand débat, comme si la situation relevait d’une thérapie de groupe, il croit encore avoir raison et veut l’expliquer à ces provinciaux rustauds qui ne comprennent rien ! Au passage il s’offre une tribune gratuite pour les européennes. Mais les discours fleuves assénés, manches relevées, à un parterre de maires dociles sélectionnés par des préfets qui ne le sont pas moins (mais c’est leur job) rappellent Castro ou Chavez qui tenaient eux aussi des heures au micro. On en frémit. Pire, Le Point, en délicatesse avec Macron, nous révèle qu’il a réuni les patrons des gros médias à l’Élysée pour réfléchir à un service d’information à la botte du palais et… au service de la vérité, « Pravda » en soviétique. Le silence de plomb des autres invités sur ce rendez-vous en dit long sur leur connivence !

    Photo-bloc-note-2.jpgComme chacun sait, la république qui gouverne mal se défend bien et ses tentatives de discréditer le mouvement portent. L’impunité des black blocs et autres antifas infiltrés avec ou sans gilet jaune dans les manifestations entretient un climat de violence qui inquiète. L’agression verbale de Finkielkraut par des « Gilets jaunes » fait le miel des Échos, de BFM TV et de Macron qui hurle au crime antisémite, organise une marche et en fait même trop au dîner du CRIF où son hôte, le président Kalifat, empoigne avec une fougue troublante le bras de Jupiter. Mais il y a un problème, ce sont des salafistes qui ont agressé Finkielkraut. Plutôt compréhensif avec les Gilets jaunes, il l’a constaté sans ambiguïté.

    Général providentiel

    L’exaspération populaire ne faiblit donc pas. La question urgente est maintenant de savoir comment la France pourra échapper à la tyrannie euro-mondialiste ou à la guerre civile. Que faire de Macron ? La dissolution de la chambre basse que la presse d’argent, tenant l’électeur sous hypnose, lui avait servi sur un plateau après l’Élysée, lui permettrait de sauver son mandat. Il serait muselé par une cohabitation, il n’en fera rien. D’aucuns ont proposé un général à Matignon, nommément Pierre de Villiers. On lui savait, par son frère Philippe, une certaine sympathie pour Macron dont la bourde du 13 juillet 2017 aura tempéré l’ardeur. Après cet affront public, Pierre de Villiers ne pouvait plus rester aux armées. Mais à toute chose malheur est bon puisque l’affaire lui valut deux succès éditoriaux, Servir puis Qu’est-ce qu’un chef ?, la consultation du Boston Consulting Group et la bienveillance étrange des gros médias. De fait, on ne trouve rien dans ses livres qui puisse fâcher le pouvoir sinon de timides réserves sur une armée européenne. La démission de son frère, jadis promis à une belle carrière dans la préfectorale, avait eu plus de gueule.

    portrait-1-506x535.jpgQuoi qu’il en soit, un militaire à Matignon ou un remaniement ministériel ne résoudra rien : le problème, c’est bien Macron et la finance apatride qui l’a placé pour purger la dette et nous étouffer dans l’étau européen. D’ailleurs, l’aptitude au commandement dont Macron est dépourvu n’est pas l’apanage des militaires. La France compte par centaines des cadres expérimentés parfaitement aptes intellectuellement, humainement et moralement à la fonction de chef d’État. Elle a même un Prince qui, en plus de tout cela, en aurait la légitimité sacrale et un soutien populaire qu’on ne soupçonne pas.

    En fait, ce qui est intéressant chez les militaires c’est qu’ils ont des armes. Mais cela ne suffit pas pour déposer un tyran. Peut y contribuer un rejet massif du pouvoir en place, nous y allons, et une situation insurrectionnelle suite à une répression policière meurtrière, nous n’en sommes peut-être pas si loin. Mais la République en a vu d’autres sans en être ébranlée. Elle a même survécu aux deux invasions allemandes qu’elle n’avait su prévenir. En outre, l’armée française, loyale, ne bougera pas plus qu’après le 6 février 34. Il lui faudrait des chefs assez courageux pour une aventure où il y a tout à perdre. Il faudrait qu’elle fasse bloc derrière ces chefs et rien n’est moins sûr : il y a dans le haut commandement des obligés du pouvoir, « bons républicains », maçons de diverses obédiences et bien sûr les « généralles et colonelles » promues par la grâce des quotas comme dans les conseils d’administration. Car notre ministre Florence Parly émascule rageusement les tableaux d’avancement et listes d’aptitude que les conseils supérieurs d’armées lui proposent.

    x18laro-drjiy_0.jpgLes colonels courageux, intelligents et expérimentés dont nous avons besoin attendront ! On saluera à l’occasion le colonel Legrier pour son excellent papier sur notre stratégie en Syrie et les jours d’arrêt qu’il lui coûtera, on vomira celui du journaliste Merchet, de L’Opinion, qui le dénonce comme « catholique » au cas où cela aurait échappé au ministre. Un flicage qui rappelle les heures les plus sombres de la secte laïque. En 1904 il l’aurait fiché : VALM-AM (va à la messe avec missel). ■  

    Mathieu Épinay

    * Collectif de spécialistes des questions de Défense et géopolitique
  • Stupéfiant !

    Heinz-Christian Strache (FPÖ) et Sebastian Kurz (ÖVP), nouveaux vice-chancelier et chancelier autrichiens, et le président Alexander Van der Bellen, lundi 18 décembre à Vienne sous l’imposant portrait de Marie-Thérèse d’Autriche 

     

    Par François Marcilhac

     

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    On savait Emmanuel Macron disciple du philosophe Paul Ricœur. On ignorait qu’il était, en même temps, adepte de l’école péripatéticienne.

    Aristote déambulait en dissertant avec ses disciples dans les allées du Lycée  ; notre président déambule dans les couloirs de l’Élysée, entouré de caméras, pour répondre aux questions complaisantes d’un journaliste de la télévision d’État, le tout enregistré le mardi pour être diffusé le dimanche suivant. On n’est jamais trop prudent  ! En marche… vers feu l’ORTF  ? Il ne s’agit que d’une anecdote, mais elle en dit long sur cet art de la communication qui, inauguré sous Giscard, a remplacé la parole régalienne. Certes, il n’y a rien à retenir de ce vrai-faux entretien déambulatoire. Sinon qu’il faudra encore attendre deux ans pour espérer voir la courbe du chômage s’inverser – Hollande, sors de ce corps  ! Qu’il est temps de rattraper notre retard en matière d’énergies renouvelables et qu’on peut compter sur lui pour voir partout surgir de terre des éoliennes défigurant le paysage. Qu’ayant fait le don de sa personne à la France, il fait «  le maximum pour [nous] protéger, pour éviter que les conflits n’adviennent, pour préparer [notre] avenir commun, pour préparer le meilleur futur  ». Ou encore, «  que d’ici mi, fin-février, on aura gagné la guerre en Syrie  » – Bachar el-Assad et Vladimir Poutine ont été soulagés de l’apprendre.

    Le culte du Moi

    Pourquoi cet entretien maintenant  ? Alors que jamais la France n’a été aussi inégalitaire, comme l’a montré une passionnante enquête récemment publiée dans Le Monde, l’exécutif est en hausse dans les sondages, dans une période calme, c’est vrai, de discussion budgétaire, dont les décisions, bientôt définitivement votées, n’ont évidemment pas encore pu faire sentir leurs effets, surtout sur les classes moyennes. Macron joue sur le front international, plus consensuel car plus éloigné des Français, tandis que le Gouvernement fait dans la com’  : envers la «  France périphérique  », en se déplaçant à Cahors, économique et identitaire, en annonçant durcir la lutte contre les faux réfugiés. Peut-être Macron a-t-il jugé nécessaire, à la veille de nouvelles réformes, de focaliser les caméras sur sa personne, dans un exercice sidérant de culte du Moi. Apprentissage, formation professionnelle et assurance chômage, asile et immigration, réforme des institutions, sans oublier les dossiers néo-calédonien et corse, la décision sur Notre-Dame-des-Landes ou la rupture démagogique avec un consensus vieux de quarante-cinq ans sur le 90 km/h sur route  : Macron veut continuer d’aller vite en 2018 et a besoin pour cela de saturer l’espace pour apparaître comme le deus ex machina des maux de la France. Ce que confirme encore cet anniversaire fêté à Chambord, le château construit par François Ier, le «  prince architecte  », après la victoire de Marignan. Ne cessant de singer la fonction royale, dans l’espoir que les Français soient dupes, et déjà maître des horloges, Macron se pense aussi en nouvel architecte de la France. Voire en sauveur de la planète au moment où nous sommes, paraît-il, en train de perdre la lutte contre le réchauffement climatique, comme Superman l’a seriné lors du raout écologique et financier international («  One Planet Summit  » dans le texte) qu’il avait réuni à Paris la semaine dernière.

    Car la France ou les affaires internationales ne sont jamais, pour lui, que l’occasion de parler de lui-même. Le propos le plus révélateur de son entretien sur France 2, d’un point de vue clinique s’entend, a été  : «  [Les Français] ont décidé en mai dernier d’élire un président de trente-neuf ans qui sortait de nulle part. La France a stupéfait [sic] l’Europe et le monde par son choix.  » Macron serait donc, de son propre aveu, une personnalité stupéfiante. Quant à «  sortir de nulle part  », à moins que l’Inspection des finances, la banque Rotschild, le secrétariat général de la Présidence de la République ou le ministère de l’Économie ne soient «  nulle part  », Macron, peut, en effet apparaître comme un homme neuf  ! Au sens non pas romain de l’homo novus, bien qu’il le soit en un certain sens, mais plus prosaïque de celui qui n’aurait aucune responsabilité dans les politiques conduites avant son arrivée. Ce qui est évidemment un mensonge. Deux exemples parmi tant d’autres  : outre le bradage de notre industrie – secrétaire général puis ministre de l’Économie, il a livré la branche énergie d’Alstom aux Américains, avant de livrer, devenu président de la République, sa branche transports aux Allemands –, il était au secrétariat général de la Présidence, chargé, qui plus est, des questions fiscales, quand a été concocté ce «  scandale d’État  » (dixit son successeur Bruno Le Maire à Bercy) qu’est la taxe sur les dividendes des grandes entreprises, mise en oeuvre sous Hollande et déclarée inconstitutionnelle  ; facture pour l’État  : 10 milliards d’euros. Une enquête interne l’a évidemment blanchi.

    La recette autrichienne

    Alors, stupéfiant, Macron  ? En tout cas moins modeste qu’un jeune chancelier autrichien, le plus jeune dirigeant du monde, pour le coup – il a trente et un ans – qui, sans penser avoir stupéfié le monde, lui, réussit en quelques semaines ce que Merkel, avec toute son expérience, ne réussit plus en Allemagne  : former une coalition. Il est vrai que c’est avec les populistes du FPÖ, qui ont obtenu pour la première fois trois ministères régaliens – Intérieur, Défense et Affaires étrangères –, alors que l’Autriche présidera le Conseil de l’Union européenne au second semestre 2018. Paris, avec sa morgue habituelle – Macron avait déjà donné des leçons à la Pologne –, compte sur le respect des sacro-saintes «  valeurs européennes  » par l’Autriche. Loiseau, la ministre de l’Europe, y sera même «  très attentive  ».

    Occasion de nous interroger sur les grandes manœuvres qui agitent la “droite” française au lendemain de la victoire de Wauquiez, que Macron a particulièrement ciblé, lors de son soliloque déambulatoire, car il sait que la vraie menace pourrait venir du retour d’une droite de conviction, dont Wauquiez semble, à tort ou à raison, l’incarnation. Seul un avenir, qu’on peut supposer proche, car Wauquiez aura bientôt à prendre des décisions tranchantes en matière de positionnement idéologique, nous dira si le costume n’est pas trop grand pour cet ancien bébé Barrot, que sa large victoire à la tête de son parti avec un taux de participation honorable devrait inciter à jouer la carte d’une droite qui n’a plus peur de son ombre et ne cherche plus, inlassablement, son droit moral à l’existence dans le jugement léonin d’une gauche dont l’empire idéologique commence, seulement, à s’effriter après avoir failli sur les plans où elle était la plus attendue, économique et social. Mais renverser plusieurs décennies de honte de soi ne sera pas aisé. Si nous assistons, comme le montre le succès d’un récent dictionnaire, à un retour du conservatisme, le caractère ambigu d’un tel phénomène n’est pas sans interroger. La victoire de Macron au printemps dernier en est le signe  : s’il s’est fait élire au nom d’un progressisme assurément ringard, c’est qu’il a su instrumentaliser le besoin de dégagisme en assimilant le personnel politique sortant, dont il fait pourtant partie, à un passé politicien lui-même identifié au conservatisme, au profit d’une société civile qui n’est qu’un slogan. Lorsque la bulle Macron éclatera, seule une droite inflexible sur la question migratoire, tournée vers la question sociale, intransigeante sur le respect de l’identité nationale et de notre souveraineté et ouvertement décomplexée en termes d’alliances pourra susciter quelque espoir. Ce fut en tout cas la recette autrichienne.     

  • Vitesse limitée, « fake news » et hausse des prix: bienvenue dans la France de Macron

    Emmanuel Macron à Calais, janvier 2018. SIPA

     

    Par Roland Hureaux

    TRAVAUX DIVERS - Largeur +.jpgC'est, selon son habitude, à une fine analyse que Roland Hureaux se livre ici [Causeur - 18.01]Une fine et exacte analyse de la politique réelle d'Emmanuel Macron, intérieure et européenne. Faut-il cacher que nous nous sentons ici fort peu libéraux ? Encore faudrait-il s'entendre sur un sens précis à donner à ce mot-valise qui peut tout signifier. Ainsi, nous accepterions assez volontiers les notions par lesquelles ces excellentes analyses le définissent. Rappelons que Roland Hureaux fut l'un des participants au colloque d'Action française du 7 mai 2016, à Paris, « Je suis royaliste, pourquoi pas vous ? »    LFAR

     

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    Après un discours de vœux présidentiel assez plat, la rentrée a été inaugurée par trois coups de massue qui laissent pressentir ce qu’est la véritable nature du macronisme.

    Classes moyennes étouffées

    D’abord une hausse mirobolante des tarifs publics : fioul domestique, forfait hospitalier, cartes grises, paquet de cigarettes, timbres, etc. Toutes ces augmentations vont frapper les classes populaires, d’autant qu’elles s’accompagnent d’une hausse de la CSG ciblée sur les personnes âgées. Or, les revenus, salaires et retraites stagnent, on le sait, depuis des années.

    Peut-être certaines de ces hausses étaient-elles nécessaires, mais comment justifier celle des frais bancaires qui va peser principalement sur ceux qui ont du mal à joindre les deux bouts. Il est clair que les banques qui comptent sur ces frais pour rattraper certaines folies spéculatives ont été mieux entendues par l’ancien ministre de l’Economie qui trône à l’Elysée que ce que Christophe Guilluy appelle la « France périphérique ».

    Il est probable qu’avec ces coups de matraque, la suppression promise de la taxe d’habitation, sera vite absorbée et au-delà.

    Vivre à 80 à l’heure

    Va dans le même sens, la décision d’abaisser la vitesse limite sur route à 80 km/h et de renforcer toute une série de sanctions, comme celles qui frappent l’usage du portable en voiture. Les amendes de stationnement seront parfois doublées. Ces mesures sont d’une utilité douteuse : elles vont sauver des vies, dit-on. Peut-être, mais pourquoi ne pas instaurer la vitesse-limite à 0 km/h pour avoir 0 accident ? Le nombre d’accidents mortels a considérablement baissé depuis plusieurs années. En tous domaines, la sécurité absolue, c’est la fin des libertés. Elle n’existe que dans les cimetières.

    Mais est-ce vraiment pour améliorer la sécurité routière que ces mesures ont été prises ? N’y a-t-il pas là aussi la volonté de cogner, dans un domaine où la légitimité de règles de plus en plus sévères et de sanctions de plus en plus lourdes est difficile à contester. La sécurité routière est plus facile à assurer que la sécurité tout court pour laquelle le gouvernement n’a aucun plan. Il est plus facile de transformer en coupable un honnête homme qui roule à 85 km/h sur une route départementale que d’attraper de vrais délinquants. Sarkozy en début de  mandat avait déjà usé de cette ficelle en frappant fort sur… les prostitué(e)s du Bois de Boulogne. La discipline routière est une bonne école pour la discipline tout court : elle habitue le public à obéir à la manière forte. Elle est comme la marche au pas dans la caserne : exercice apparemment sans conséquence mais qui  donne aux conscrits le pli d’obéir sans murmurer.

    Les « fake news », un complot ?

    La troisième mesure n’est qu’annoncée mais elle est encore plus inquiétante : la volonté de contrôler les fausses nouvelles, dites « fake news », circulant sur internet, particulièrement sur les réseaux sociaux. Ce projet ne concerne pas que les périodes électorales : les pouvoirs du CSA d’interdire l’octroi d’un canal  numérique à certains seraient accrus. Mais en période électorale, la porte serait grande ouverte pour demander au juge de dire le vrai et le faux. L’immixtion de l’autorité judiciaire dans le processus électoral est contraire à  toutes les traditions républicaines de notre pays. Macron a été élu en partie grâce à elle ; il est visible que, se sentant quelque part vulnérable, il compte, en un sens, sur elle pour se faire réélire. Il est vrai que la loi de 1881 sur la presse sanctionnait déjà la diffusion de fausses nouvelles. Mais ni la police, ni la justice n’avaient jamais fait de zèle sur ce sujet et cela concernait la scène publique, pas les correspondances numériques dont beaucoup ont un caractère privé. Dans un pays où une proportion importante de médias soutient le gouvernement, comment ne pas voir dans cette intention le projet d’une réduction autoritaire du dernier espace de liberté qui demeure : la toile ?

    Ainsi se précise peu à peu le plaquage sur la France d’une chape de plomb qui n’a rien à voir avec l’allure décontractée et branchée, soi-disant « libérale », que se donne le président.

    Chape de plomb que l’on observe déjà dans d’autres domaines : l’étouffement progressif des collectivités locales par la diminution des dotations, la quasi-disparition de l’opposition au sein d’une Assemblée aux ordres où la majorité n’a, faute de compétence et d’ancrage local, pas les moyens de contrôler le pouvoir.

    La France « illibérale » du président Macron

    Si les ordonnances travail accroissent quelque peu la liberté des patrons, elles rendent une partie de la population plus vulnérable et donc plus malléable. Ces textes prétendument libéraux contiennent au demeurant quelques  dispositions également dangereuses pour les libertés : si, comme il est normal, les indemnités de licenciement accordées par les tribunaux sont désormais plafonnées, elles ne le sont pas s’il est possible d’alléguer une discrimination quelconque. Le règne du politiquement correct judiciaire n’est pas près de se terminer.

    La politique de Macron a bien peu à voir avec le vrai libéralisme. Les décisions fiscales : l’exonération de l’ISF des seules très grandes fortunes, financières, la suppression (progressive) de la taxe d’habitation, vont prendre en sandwich les classes moyennes, déjà écrasées mais seules à même de compenser les pertes de recettes. Il est déjà question d‘un super impôt foncier dont seraient exonérés les investisseurs étrangers ou d’augmenter la taxe foncière, déjà très lourde dans beaucoup de communes. N’est-ce pas la liberté qu’on veut écraser en prolétarisant les couches intermédiaires instruites et enracinées, à même donc d’avoir encore quelque sens critique ? L’Empire romain finissant n’avait pas procédé autrement : une population accablée d’impôts glissant peu à peu dans le servage, la ruine des classes moyennes, un encadrement des  populations.

    Ne nous sera même pas épargnée la suite du grand remue-ménage des structures locales, parfaitement inutile et toujours  coûteux : les animaux de laboratoire dont on bouleverse sans cesse les repères territoriaux deviennent amorphes !

    Fort peu libérale est aussi l’absence dans le gouvernement actuel de la moindre velléité de réduire les dépenses publiques, qui atteignent déjà le record mondial, sauf les dépenses régaliennes (armée, justice), les seules auxquelles il ne faudrait pas toucher. Comme François Hollande, Emmanuel Macron a l’intention de respecter les critères de la zone euro : moins de 3 % de déficit, sans toucher aux dépenses sociales. Il ne lui reste qu’à augmenter les impôts : scénario déjà vu.

    La bruxellisation de la France

    Ne nous y trompons pas : la plupart de ces mesures ont probablement été imposées de l’extérieur, en particulier de Bruxelles. Toutes proportions gardées, le traitement qui est appliqué à la France ressemble à celui, totalement inhumain, que l’Union européenne inflige à la Grèce.

    Derrière une diplomatie virevoltante (et non exempte de bourdes), il y a la volonté de renforcer une Europe supranationale qui ne pourra être qu’allemande : la chape de plomb d’une discipline monétaire et financière, l’intolérance à la dissidence, l’ouverture à une immigration sur laquelle on compte à la fois pour payer les retraites et affaiblir les traditions nationales. On peut y ajouter la tendance, déjà vieille de plusieurs décennies, d’appliquer tous les règlements à la lettre sans cette flexibilité qui faisait le charme des pays latins. Même si le gouvernement de Berlin est pour le moment  en crise, son esprit est bien là.

    Dans la plupart des domaines, les logiques technocratiques, les mêmes qui depuis longtemps suscitent l’exaspération des Français : réduction du nombre des  communes, urbanisme de plus en plus contraignant, multiplication des vaccins obligatoires, installation d’éoliennes, réformes de l’Etat démobilisatrices, ne sont pas remises en cause et risquent d’être aggravées. Pour les bureaux qui les promeuvent, l’exaspération qu’elles suscitent chez beaucoup de Français ne sont pas interprétées comme l’expression légitime d’une autre rationalité qu’il conviendrait de prendre en compte, mais comme une résistance irrationnelle qu’enfin la conjoncture politique permet de briser.

    Si les mesures qu’a prises, ou s’apprête à prendre le Gouvernement, ne suscitent pas de réactions significatives, il est à craindre que notre pays ne s’enfonce peu à peu dans un nouvel âge de fer où l’esprit de liberté qui l’a longtemps caractérisé ne serait plus qu’un souvenir.  

    est essayiste.
  • Histoire • Saint-Roch : Les canons contre la démocratie

     

    Par Patrick Barrau

     

    LA VEDETTE SOURIANTE.JPGÀ la fin du Directoire, Sieyès, « homme sentencieux » selon Jacques Bainville, murmurait : « Il me faut une épée ! »

    Il constatait par là le rôle essentiel que l’armée, qui constituait avec les révolutionnaires un véritable « parti de la guerre », jouait désormais dans la vie politique de « l’après Convention », d’abord comme bras armé de l’exécutif, puis comme acteur politique direct. Cela allait conduire, après le coup de force du 18 fructidor (4 septembre 1797) au coup d’Etat du 18 brumaire. La première étape Royaliste numero 1150.jpgde cette intervention se trouve dans la sanglante répression de la manifestation des sections royalistes parisiennes du 5 octobre 1795, qui n’est pas, comme on la présente généralement, un coup d’arrêt à une tentative de prise de pouvoir, mais bien la suppression à coup de canon d’une revendication démocratique et une véritable « école du coup d’Etat ».

    Dans la « mélancolie des derniers jours de la Convention » qu’évoque Mathiez et dans le souci affirmé de « terminer la Révolution », la Constitution de l’an III fit l’objet de discussions vives entre le 23 juin et le 22 août 1795. Élaborée par une commission de onze membres, majoritairement modérés, elle confiait le pouvoir à un directoire de cinq membres et l’élaboration des lois à deux assemblées, le Conseil des Cinq-Cents et le Conseil des Anciens.

    La rédaction du texte se fit dans un contexte économique difficile, marqué par la perte de valeur de l’assignat et la hausse du coût de la vie qui frappèrent les masses populaires et les petits propriétaires.

    Lors des débats s’opposèrent le « parti de la guerre » représenté par les militaires affirmant la consubstantialité de l’armée avec la Révolution et le parti de la paix, royalistes et modérés, brocardés par les militaires comme étant « la Faction des anciennes limites », s’exprimant par la voix des sections parisiennes devenues royalistes. Beaucoup de Français aspiraient à l’ordre et à la paix et les concevaient sous la forme d’un retour à la royauté.

    Craignant que les élections aux nouvelles assemblées n’amènent une majorité d’élus royalistes ou modérés, le député Baudin préconisa dans un premier projet de décret** que les deux tiers des membres des deux Conseils, soit 500 sur 750, soient réservés aux membres de l’ancienne Convention. Puis, face aux protestations des sections, il prescrivit dans un autre projet que les assemblées électorales commenceraient leurs opérations par l’élection des deux tiers au début du processus électoral qui devait se dérouler du 20 au 29 Vendémiaire (12 au 21 octobre 1795). Il justifiait cette mesure comme le moyen de garantir un ordre stable et de poser « une barrière contre l’esprit d’innovation ».

    On peut pourtant s’étonner de voir des hommes habitués à gouverner de manière révolutionnaire vouloir gouverner constitutionnellement et constater qu’un régime qui se méfiait du peuple qu’il venait de proclamer « souverain » allait lui imposer ses propres choix.

    On peut aussi, avec Mona Ozouf, être surpris de voir « des constituants être constitués et des mandataires être mandatés ». Il y a une différence profonde entre permettre la rééligibilité et l’imposer sans donner au peuple la possibilité de se prononcer. C’est au nom du « salut public » qu’est justifiée cette atteinte au libre choix des citoyens. Mais peut-être s’agissait-il surtout pour eux, selon la formule de Taine, de « rester en place pour rester en vie ».

    Le premier décret fut adopté avec la Constitution du 5 Fructidor (22 août). Le second fut adopté le 13 Fructidor (30 août). Ces textes témoignent de la désinvolture avec laquelle on traitait le droit d’élire et la souveraineté nationale, portant ainsi la responsabilité du développement d’un courant antiparlementaire. Le 28 Fructidor (6 septembre) les assemblées primaires se déterminèrent au suffrage universel, sans condition de cens, sur la Constitution et les deux décrets. La ratification des deux textes fut plus difficile que celle de la Constitution. Avec un taux d’abstention de 95%, les textes furent rejetés par 19 départements et par 47 sections parisiennes sur 48. Les royalistes, qui espéraient rétablir la monarchie par des voies légales, s’insurgèrent contre ce déni de démocratie et appelèrent à l’insurrection pour forcer la Convention à révoquer ces décrets avant les élections.

    Le soir du 11 vendémiaire (3 octobre) sept sections se déclarèrent en insurrection. Le 13, la Convention, inquiète du mouvement populaire, chargea Barras du commandement des troupes de Paris. Celui-ci proposa à Bonaparte, qu’il avait connu lors du siège de Toulon, d’être son adjoint. Après réflexion Bonaparte accepta en déclarant à Barras : « Si je tire l’épée, elle ne rentrera dans le fourreau que quand l’ordre sera rétabli ». Celui-ci ordonna à Murat de récupérer 40 canons au camp des Sablons qui furent placés au petit jour aux extrémités des rues menant aux Tuileries où siégeait la Convention, en particulier à l’angle de la rue Saint Roch et de la rue Saint Honoré ainsi qu’au couvent des Feuillants pour couvrir la rue Saint Honoré. Les sectionnaires, auxquels s’étaient joints des gardes nationaux, soit 25 000 hommes s’organisèrent en deux colonnes, l’une partant de l’église Saint Roch, l’autre partant du Pont Neuf. À 15 heures les sectionnaires encerclèrent la Convention. À 16 heures 30 Bonaparte commanda aux canonniers de tirer des plombs de mitraille. La canonnade dura trois quarts d’heure et l’on releva près de 300 morts sur les marches de l’église Saint Roch. Ce massacre, qui valut à Bonaparte le surnom de « Général Vendémiaire », constitue la première illustration de la survie problématique d’un régime suspendu à l’intervention militaire.

    L’armée intervint une nouvelle fois le 18 Fructidor an V (4 septembre 1797) lors des élections suivantes qui amenèrent à nouveau une majorité d’élus royalistes à l’initiative de trois directeurs dont Barras. Les militaires dirigés par Augereau, fidèle lieutenant de Bonaparte, occupèrent Paris. Il y eut de nombreuses arrestations, y compris celle des deux directeurs hostiles à l’intervention militaire et les élections furent annulées dans quarante-neuf départements. À nouveau la République était sauvée au détriment de la légalité. Le rôle de l’armée allait s’affirmer après ces deux interventions jusqu’au 18 Brumaire et à la prise du pouvoir par Bonaparte – qui allait poursuivre la guerre révolutionnaire pour les « frontières naturelles ».

    Le 1er juillet 1791, s’adressant aux « Républicains » devant le club des Jacobins, Choderlos de Laclos eut cette phrase prémonitoire : « Je leur demanderai si nous n’aurons pas des empereurs nommés par des soldats. »

    Les 300 martyrs royalistes de Saint Roch témoignent donc du combat pour la défense de la démocratie et de la souveraineté nationale face à un pouvoir méprisant la légalité et les droits d’un peuple en s’appuyant sur la force. 

    * Historien du Droit, ancien directeur de l’institut régional du travail.

    ** Selon Mona Ozouf, l’appellation « décret » serait inadéquate : « Les deux lois […] improprement baptisées décrets des deux-tiers […].» Mona Ozouf, 1996, « Les décrets des deux-tiers ou les leçons de l’histoire » in 1795 pour une République sans Révolution, Rennes, PUR.

    Cet article est paru dans Royaliste, bimensuel de la Nouvelle Action Royaliste, numéro 1150 (10 septembre - 23 septembre 2018). La Nouvelle Action Royaliste rappelle en préambule que les royalistes d'alors préparaient le retour légal à la monarchie royale et que c’est la décision de réserver les deux-tiers des sièges aux anciens conventionnels dans les Conseils des Anciens et des Cinq-Cents pour éviter l’élection d’une majorité de royalistes qui poussa les sections parisiennes à l’insurrection. Il est indiqué que c'est ce mouvement populaire et démocratique que la Nouvelle Action royaliste va commémorer, le 6 octobre, devant l’église Saint-Roch.

  • Une statue n’est pas un livre d’histoire, par Aristide Renou.

    Revenons un peu sur ces histoires de statues vandalisées ou bien, pire encore, retirées à titre « préventif » pour ne pas risquer la colère des « antiracistes ».

    Quel est le problème ?

    Accordons à tous ces modernes iconoclastes qu’une statue n’est pas un livre d’histoire : elle ne vise pas simplement à rappeler tel ou tel fait ou évènement du passé, elle est une manière d’attirer l’attention sur ce fait ou cet évènement.

    Statufier, c’est valoriser, c’est donner de l’importance. Et, lorsqu’il s’agit d’un personnage historique, statufier revient implicitement à donner à admirer. Eriger dans un espace public la statue, mettons, d’un homme d’Etat, est une manière de lui rendre hommage et on ne rend hommage qu’à ce qu’on considère comme bon. C’est donc affirmer implicitement que l’action de cet homme d’Etat a été essentiellement bonne, ou en tout cas suffisamment bonne pour que nous puissions l’admirer.

    Bien entendu la réalité est souvent, peut-être toujours, complexe, car quel homme peut se vanter de n’avoir fait que du bien dans sa vie ? Mais le principe ne me parait pas vraiment contestable : une statue d’un personnage historique dans l’espace public est une sorte d’hommage rendu à celui-ci.

    Je ne crois donc pas qu’il soit pertinent de s’opposer au déboulonnage de telle ou telle statue en disant que nous devons assumer toute notre histoire, ombres et lumières comprises. Oui, toute histoire nationale est faite d’ombres et de lumières, mais ériger une statue n’est pas une manière « d’assumer » son passé. L’évêque Cauchon, Ravaillac et le docteur Petiot, par exemple, font incontestablement partie de l’histoire de France, et cependant il ne nous viendrait pas à l’esprit de faire des statues de ces trois hommes et de les mettre au milieu de nos places ou de nos jardins publics.

    Il faut donc donner raison à Olivier Duhamel lorsque celui-ci dit que les Roumains n’ont pas à garder les statues de Ceaucescu au nom du « respect de l’histoire ».

    Plus pertinente, mais pas entièrement pertinente, me parait être l’objection selon laquelle l’actuel iconoclasme reviendrait à « manipuler l’histoire », comme l’a dit Marion Maréchal, et à la juger à l’aune de nos petites obsessions actuelles. En effet, l’anachronisme est souvent patent dans ces accusations portées contre tel ou tel personnage historique et il y a quelque chose d’insupportablement stupide et prétentieux dans cette manière de se placer en position de supériorité olympienne par rapport aux siècles passés, alors même qu’on les juge à partir de critères non examinés qui ne sont rien d’autre que de purs préjugés.

    Cependant, le refus légitime de l’anachronisme ne doit pas nous faire sombrer dans l’historicisme. La nécessaire contextualisation d’une action, et notamment d’une action politique, ne doit pas nous faire perdre de vue qu’il existe des critères objectifs, transhistoriques, du bien et du mal (je ne crois pas que Marion Maréchal me contredirait sur ce point). Le genre de critères qui nous permettent d’affirmer, par exemple, que Tamerlan a été un conquérant particulièrement cruel et un fléau du genre humain et que Staline a été l’un des plus abominables tyrans que la terre ait jamais porté.

    Quel est le véritable problème ?

    Une statue est toujours élevée par un peuple particulier et c’est du point de vue de ce peuple particulier qu’est jugée la bonté de l’action de celui à qui on élève la statue. En effet, la nature humaine étant ce qu’elle est et la nature de la politique, par conséquent, étant ce qu’elle est, il est impossible que les intérêts légitimes de tous les peuples puissent tout le temps s’accorder. Par conséquent, il est très difficile à un homme d’Etat, et même peut-être pratiquement impossible, d’être bon pour le peuple dont il a la charge sans causer parfois quelque préjudice ou quelque déplaisir à d’autres communautés politiques.

    L’humanité a toujours été et sera toujours divisée en nations souvent rivales, parfois ennemies, et jamais amies au plein sens du terme, c’est aussi simple que cela. Le bien commun est le bien d’un corps politique en particulier, ce pourquoi Aristote affirme que la justice n’existe véritablement qu’à l’intérieur de la cité. Cela ne veut pas dire que nous n’ayons aucune obligation vis-à-vis des autres peuples de la terre, simplement ces obligations passent après celles que nous avons vis-à-vis de nos concitoyens dès lors qu’il y a conflit entre les deux.

    Par conséquent, il est tout à fait inapproprié, et même injuste, de reprocher à nos voisins de célébrer une victoire qui fut pour nous une cuisante défaite, ou d’ériger des statues à un brillant général qui, sur les champs de bataille, fut notre fléau. Et inversement, bien sûr.

    Plus généralement, il est inapproprié de reprocher à un peuple de célébrer un homme d’Etat qui fut réellement bon pour lui, qui sut défendre ses intérêts légitimes, qui sut contribuer à sa grandeur et à son rayonnement, au motif que l’action de cet homme d’Etat ne fut pas bonne pour d’autres peuples quelque part sur la terre, que cela soit volontairement ou involontairement – pourvu, bien sûr, que cela fut en poursuivant le bien véritable de sa propre nation, et en ayant une indulgence raisonnable à la fois pour les contraintes qui limitent toute action politique et pour d’éventuelles erreurs de jugement qui peuvent difficilement être évitées dans des matières aussi complexes.

    Il est donc tout à fait normal que les Français élèvent des statues à Colbert, qui fut un grand serviteur du royaume de France, quand bien même il serait l’auteur du fameux « Code Noir » (je suppose, pour les besoins de la discussion, que ce code est aussi vilain que ce que l’on nous en dit aujourd’hui, même si je sais bien que tout cela est très contestable). Le bien que Colbert avait en vue, et devait avoir en vue, était celui de la France telle qu’elle était dans la deuxième moitié du 17ème siècle. Le bien des esclaves noir présents dans les colonies françaises était nécessairement pour lui une considération très secondaire. Admettons, si l’on veut, que le Code Noir ne soit pas ce qu’il a fait de mieux : cela ne saurait en aucun cas effacer les services signalés qu’il a rendu à la France et qui justifient pleinement qu’il y ait des statues de Colbert.

    De la même manière, oui, Churchill était un « impérialiste » : l’empire britannique lui paraissait une grande et belle chose, parce qu’il n’était pas un relativiste et qu’il croyait, si ce n’est à la mission civilisatrice de la Grande-Bretagne, du moins à la supériorité de sa civilisation, et d’autre part car il était un patriote fervent et qu’il considérait l’empire comme indispensable à la puissance et à la grandeur de sa patrie. Peut-être se trompait-il sur cette question de l’empire (ce qui, à mon avis, reste à prouver), mais cela n’efface aucunement les services immenses qu’il a rendu à la Grande-Bretagne, et d’ailleurs au reste du monde en rendant service à la Grande-Bretagne. Churchill est, sans doute, le plus grand Anglais du 20ème siècle et si quelqu’un mérite que les Anglais lui érigent des statues, c’est bien lui.

    Or donc, ceux qui aujourd’hui prétendent détruire les statues de Colbert ou qui souillent celles de Churchill démontrent une chose par leur action : ils ne considèrent pas l’action de ces grands hommes du point de vue qui fut le leur, et qui était celui de leur patrie. Ils la considèrent d’un point de vue extérieur. Ils la considèrent comme s’ils étaient des étrangers. Ce qui leur importe, ce n’est pas le bien que Colbert a fait à la France, c’est le fait que, à leur avis, il n’ait pas été bon pour les esclaves noirs. Ce qui leur importe, ce n’est pas le bien que Churchill a fait à la Grande-Bretagne, c’est le fait, par exemple, qu’il ait eu une piètre opinion des Indiens ou qu’il ait considéré l’islam comme une religion néfaste.

    Bref, nos iconoclastes démontrent qu’ils ne sont Français ou Britanniques que de nom mais que leur cœur est ailleurs. Ils démontrent que leur loyauté va à… je ne sais pas, à l’Oumma ? A la négritude ? A leur race ? Au pays de leurs ancêtres ? Mais en tout cas qu’elle ne va PAS à la France ou à la Grande-Bretagne.

    L’actuelle vague d’iconoclasme n’est rien d’autre qu’une nouvelle phase dans la longue guerre menée en Occident contre l’idée de nation et, dans la mesure où elle est avant tout l’œuvre de gens qui sont censés être nos concitoyens, bien qu’à l’évidence ils ne se considèrent pas comme tels, elle est un des prodromes de la guerre civile qui vient.

  • Qui ensauvage la France ?, par Philippe Bilger.

    Source : https://www.philippebilger.com/blog/

    Je l'avoue : j'ai un peu peur de formuler cette interrogation. Je pressens les tombereaux d'insultes qui vont se déverser sur moi, notamment dans ce cloaque qu'est souvent Twitter, et dont la moindre sera l'accusation de penser et d'écrire comme le RN. Ce reproche sera grotesque mais il constituera, comme d'habitude, l'argumentation simpliste de ceux qui n'en ont pas d'autre.

    7.jpgMais qu'importe ! L'avantage décisif d'une vie intellectuelle libre et dénuée d'ambition officielle est qu'elle a le droit de tout se permettre et de ne pas récuser l'expression de la vérité au prétexte que celle-ci sera jugée indécente, provocatrice, scandaleuse.

    Laissons immédiatement de côté les débats périphériques qui n'ont généralement pour objectif que de vous détourner du questionnement central, de la problématique radicale.

    L'ensauvagement et le doute lexical s'attachant à ce terme ne seront pas mon sujet.

    Pas davantage que celui de l'existence débridée d'une délinquance et d'une criminalité qui augmentent, notamment dans leurs manifestations quotidiennes de plus en plus liées à une contestation de l'autorité, quelle que soit sa forme. Même les naïfs ou les humanistes en chambre n'auront plus le culot ou l'inconscience de discuter le fléau de cette réalité mais tout au plus celui de son ampleur.

    Le coeur de mon billet va concerner cette interrogation dominante mais toujours éludée : qui ensauvage la France ?

    Il me plaît de donner une interprétation élargie de cette dérive car elle ne se rapporte pas qu'à la matérialité d'infractions portant atteinte aux personnes et aux biens mais aussi à des comportements et à des propos qui participent d'une dégradation honteuse et, le pire, revendiquée de la politesse sociale et du respect humain.

    Qui a traité Eric Zemmour de sous-humain avant de retirer son tweet sous l'effet d'une réprobation générale mais de "pisser" sur lui et ses soutiens ?

    Qui a vanté la pratique de la polygamie et insulté la police en prétendant qu'elle massacrait des gens à cause de la couleur de leur peau ?

    Qui a agressé et tué Philippe Monguillot à Bayonne parce que conducteur d'autobus exemplaire, il avait voulu faire respecter l'ordre et la loi ?

    Qui, sans permis, sous l'emprise de la drogue, récidiviste, a été responsable de la mort de la gendarme Mélanie Lemée ?

    Qui à Seynod a insulté et agressé des chasseurs alpins faisant tranquillement leur footing ?

    Qui multiplie les refus d'obtempérer, se soustrait aux interpellations de la police avec des conséquences souvent dramatiques que leur mauvaise foi et le soutien médiatique imputeront systématiquement aux FDO ?

    Qui dans les cités et les quartiers sensibles se livre au trafic de stupéfiants, terrorise les résidents honnêtes, empêche les interventions de la police ou n'hésite pas à exercer des violences de toutes sortes contre elle ?

    Qui tend des guet-apens aux pompiers et à la police ?

    Qui s'en est pris à des citoyens rappelant l'obligation du masque dans une laverie ou ailleurs ? Qui est revenu, après s'être vu interdire l'accès à un bus à cause de ce manque, pour frapper le conducteur ?

    Qui a mis en branle une effrayante bataille de rue à Fleury-Mérogis où deux bandes armées se sont opposées pour une "embrouille" de drogue ?

    Qui sème la panique dans les centres de loisirs, comme à Etampes récemment ?

    Qui commet des cambriolages où on défèque sur le visage d'une victime de 85 ans, comme au Croisic ?

    Qui, en bande, se comporte dans l'espace public comme en terrain conquis, sans souci d'autrui mais avec l'arrogante certitude de l'impunité ?

    Qui vient, jour après jour, remplir la déplorable chronique des transgressions, des plus minimes aux plus graves ?

    Qui, pour tout et n'importe quoi, s'en prend aux maires au point que l'un d'eux, frappé, doit se satisfaire d'un rappel à la loi pour son agresseur campeur violent, l'anonymat systématique concédé aux transgresseurs laissant présumer leur origine ?

    Qui sont ces jeunes Français interdits de revenir à la piscine d'une commune suisse proche de la frontière française, parce qu'ils perturbaient la tranquillité du lieu ?

    Qui, majeurs ou mineurs, se livrent au pire au point que la majorité des citoyens prend acte avec accablement de ce qui se commet sur tout le territoire national et n'espère plus le moindre redressement politique et judiciaire ?

    On comprendra que ces interrogations sont de pure forme puisqu'à tout coup la responsabilité incombe à des fauteurs d'origine étrangère, maghrébine ou africaine, parés nominalement de la nationalité française grâce à un droit du sol qui n'a plus aucun sens puisqu'on l'offre mécaniquement à des générations qui haïssent ce cadeau et dévoient cet honneur.

    Sans oublier les clandestins qui se glissent dans ces bandes ou participent à ces exactions.

    L'infinie pudeur médiatique avec laquelle, dans neuf cas sur dix, on occulte les identités est la preuve la plus éclatante de l'écrasante domination de ces Français dans le tableau pénal national et dans les prisons, notamment en Île-de-France.

    Le refus entêté d'authentiques statistiques ethniques est également un indice capital qui explique la répugnance de la bienséance à prendre la mesure d'une réalité qui démolirait ses préjugés et sa bonne conscience.

    Est-ce à dire qu'il n'existe pas des voyous français de souche ? Assurément il y en a mais leur rareté est démontrée par le fait troublant que, si l'un d'eux est impliqué - une agression contre une mosquée à Bayonne par exemple -, on peut être sûr qu'on aura son identité complète, son âge, son passé judiciaire et sa structure familiale. Ces données sont si chichement communiquées dans les comptes rendus habituels qu'aucune hésitation n'est possible et l'appréciation quantitative vite opérée.

    Qui ensauvage la France ? S'accorder sur le constat que je propose ne permettra pas de résoudre magiquement le problème lancinant causé par ces jeunes Français d'origine africaine ou maghrébine et ces étrangers en situation irrégulière (il va de soi que tous ne sont pas à stigmatiser dans ces catégories) mais au moins ne nous voilons plus la face.

    On a trop longtemps refusé de répondre à cette interrogation, non pas à cause d'une quelconque incertitude mais parce que la vérité nous aurait encore plus confrontés à notre impuissance. Le désarroi d'une démocratie désarmée, répugnant à user de tout ce qu'elle aurait le droit d'accomplir, aspirant à l'ordre mais sans la force !

    Et terrorisée, depuis trop longtemps, à l'idée d'aller sur les brisées du FN-RN... Paradoxalement, et tristement, en refusant de lui donner raison sur ce plan, on ne lui donne pas tort assez vigoureusement pour le reste...

    L'ensauvagement que je dénonce et que j'impute n'est pas relié à la dégradation apparemment paisible mais insinuante, irrésistible, de notre vivre-ensemble à cause d'un séparatisme, caractérisé notamment par le voile et dont la finalité est plus politique que strictement religieuse. Ni à des modalités d'éducation ni à des politiques sans doute critiquables, comme le regroupement familial, qui ont favorisé la concentration de communautés en des lieux qui ont été rendus invivables et délabrés au fil du temps.

    C'est la perversion des attitudes individuelles que je mets en cause, au singulier mais le plus souvent au pluriel. La société n'est pas créatrice de ces malfaisances répétées de toutes sortes.

    L'immigration légale n'est pas coupable mais la clandestine contre laquelle jusqu'à aujourd'hui on lutte mal. Et, au sein de la première comme de la seconde, les délinquants déshonorant l'une et profitant de l'autre.

    Les solutions pour combattre cette réalité, après en avoir pris acte sans barguigner, imposeront, outre un courage politique de tous les instants et une politique du verbe sans complaisance, expulsions et éloignements à un rythme soutenu, une action équitable dans sa rigueur, une police et une gendarmerie accordées avec une justice sans faiblesse, une exécution des sanctions efficace et réactive et, surtout, le retour des peines plancher sans lesquelles la magistrature ne tirera jamais assez la conséquence de certains passés judiciaires.

    Rien de plus navrant, en effet, qu'un Etat sans autorité, une justice sans crédibilité et des FDO sans soutien.

    Il conviendra de remettre en discussion, dans un débat honnête, sans excommunication, le droit du sol. Envisager, aujourd'hui, dans une France éclatée, son effacement n'est ni inhumain ni contraire à une tradition dont les effets sont devenus dévastateurs. Ou alors continuons à révérer, contre vents et marées, celle-ci, et laissons l'ensauvagement de notre pays se poursuivre. Notre noblesse abstraite sera garantie mais non la sauvegarde de notre nation.

    On sait qui ensauvage la France. Ne fermons plus les yeux.

    Apeuré légèrement en commençant ce billet, je le termine en le jugeant nécessaire et, je l'espère, convaincant.

  • Tradition(s) vivifiante(s) contre Idéologie stérilisante : variations sur le Régionalisme, le Fédéralisme, l'Enracinemen

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    Pas de fédération sans fédérateur; sans Roi fédérateur...

     

    Pour prolonger la vision politico/poétique de Mistral, voici trois courts textes :

    D'abord, de Frédéric Rouvillois, qui présente le "fédéralisme" de Maurras...

    Ensuite, un court extrait de Frédéric Amouretti, tiré de la Déclaration des Félibres fédéralistes de 1892...

    Et, enfin, une courte réflexion de Chateaubriand, qui, on le verra, amène directement à Simone Weil et Albert Camus...

    I. Extrait de "Maurras fédéraliste", par Frédéric Rouvillois (Cahier de l'Herne "Charles Maurras", 2012)

     

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    "Le département est l' "un des pires mécanismes antiphysiques appliqués au corps de la France" (1).

    C'est parce qu' "elle subsiste contre le gré du sol, contre le voeu des intérêts et la nature même des races" que cette circonscription, purement artificielle, "empêche toute grande vie locale de se montrer... (2). Ses seuls effets sont négatifs... (Le département) comprime, il entrave la vie locale et n'y correspond à aucun intérêt réel, il contredit l'histoire, la géographie, mêle les races, brouille les intérêts les plus divers. C'est un rouage à supprimer absolument."

    Plus fondamentalement, poursuit Maurras, il importe de remettre en cause le principe même de l'uniformité administrative : car en définitive, "qu'est-ce donc que (...) la République française dite une et indivisible ? Une folie, et misérable; une sottise, et presque obscène : l'émiettement et la discontinuité française correspondent à cet immense variété de sols et de climats, de villes, de compagnies, d'associations et de moeurs qui composent l'idée réelle de la France physique et mentale, morale et politique..." (2).

    "L'uniformité - s'exclame-t-il - base de la Constitution d'un pays ! Cela revient à commencer par nier la nature de ce pays, avec les diversités nécessaires qu'elle réclame, et à constituer ensuite quelque chose au moyen de cette négation."

    Il faut donc en revenir au réel, à des "organismes d'action vivants", auxquels on rendra le pouvoir d'auto-détermination qui leur revient selon un principe consistant à reconnaître en toute hypothèse "la préséance (...) et la précellence de la plus petite unité".

    "Tout ce que peut la commune doit être fait par la commune seule. C'est après l'épuisement de ses compétences et de ses facilités que (la circonscription supérieure) devra être saisie de son appel au secours."

    Le principe de subsidiarité, car c'est bien de cela dont il s'agit, a donc vocation à déterminer les pouvoirs et à régir les rapports entre les différents niveaux : à la base, la commune, au-dessus, la région, et l'Etat au sommet.

    Ce faisant, ce projet se veut restaurateur d'un ordre naturel : le mot revient sans cesse : il s'agit de "restaurer (...) ces républiques" qui, même prisonnières de "leurs cages départementales" n'ont jamais disparu, dans la mesure où elles correspondent à des réalités intangibles.

    Le projet fédérateur consiste à faire en sorte que la liberté de gérer elles-mêmes leurs propres besoins leur soit enfin "restituée"...

    (1) : C. Maurras, J. Paul-Boncour "Un débat nouveau sur la République et la Décentralisation", Toulouse, Société provinciale d'édition. Bibliothèque de propagande régionaliste, 1905, pages 50/51.
    (2) : Charles Maurras, "L'étang de Berre", Champion, 1920, pages 125/127.

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    II :  Frédéric Amouretti, aux origines du sain fédéralisme...

     

    S’il est vrai que la pensée régionaliste trouva son véritable maître en Charles Maurras, de nombreux auteurs en bâtirent les premières fondations : des plus connus comme Frédéric Mistral à de plus méconnus comme Frédéric Amouretti, ces auteurs ont, apporté les premières pierres essentielles à l’édification de la véritable pensée régionaliste.

    Frédéric Amouretti naquit le 18 juillet 1863 à Toulon, et mourut le 29 août 1903, tout juste âgé de 40 ans...

    Parti à Paris pour décrocher sa licence ès lettre Amouretti rencontra à Paris Frédéric Mistral et fut reçu félibre en 1882. Revenu en Provence, il entama une carrière de journaliste et de publiciste. Dès 1890, à peine âgé de 27 ans, il lança son premier journal avec son ami Bérenger, Le réveil du Provençal : Organe des revendications autonomistes de la Provence.

    Prônant le fédéralisme et luttant résolument contre le jacobinisme républicain, Amouretti écrira, près de 30 ans avant l’Idée de Décentralisation de Maurras :

    "En adoptant le plan de Sieyès, et en découpant la France comme matière inerte en départements tracés arbitrairement sur la carte, la Convention a anéanti ces admirables cadres historiques où les hommes, unis par l’identité des souvenirs, de la langue, des mœurs, des intérêts pouvaient bien s’entendre pour s’occuper de tout ce qui les touchait de près...".

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    Pour Amouretti, au contraire, et pour les "fédéralistes", il faut respecter la liberté des communes reliées entre elles selon "sis enclin istouri, ecounoumi, naturau...", ce qui passe par la suppression des départements au profit des anciennes provinces avec à leur tête "uno assemblado soubeirano, à Bourdèus, Toulouso, à Mount-Pelié, à Marsiho o à-z-Ais". Ces assemblées devant jouir d'une autonomie complète en ce qui concerne l'administration, la justice, l'enseignement, les travaux publics…

    L'engagement régionaliste d'Amouretti se concrétisa davantage avec la Déclaration des Félibres Fédéralistes du 22 février 1892, co-rédigée avec le jeune Charles Maurras, Amouretti pouvant être considéré, à bon droit, comme "lou paire e lou redatour de la declaracioun", les deux amis se lançant donc face à l’ennemi républicain et jacobin.

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    Face aux multiples reproches de séparatisme ou d’anarchisme, Amouretti répondait :

    "Quelle erreur ! C’est l’unitarisme au contraire qui mène la France au séparatisme. La fusion, c'est-à-dire l’anéantissement des nationalités particulières où vivent et se distinguent les citoyens en une nationalité abstraite que l’on ne respire ni ne connaît plus, voilà l’unité. Le fédéralisme au contraire, respectant les diversités ethniques et favorisant le libre développement de chaque région, est le plus grand ennemi du séparatisme en le rendant inutile". 

    Amouretti avait compris que seule la voie monarchique et la présence d'un Roi au sommet de l'Etat pourrait permettre cette fédération :

    "Il faut rétablir les provinces, leur rendre la gestion des intérêts provinciaux, surtout en matière de travaux publics, et rétablir les assemblées provinciales avec une compétence assez étendue pour qu’elles aient des sessions fréquentes, longues, fécondes, de nature à attirer l’attention, le respect, la vue."

     

    III : vu par Chateaubriand, l'enracinement amène à Camus et Simone Weil...

     

    ... et pour l'enracinement

    Un chêne de la forêt de Tronçais...

     

    "La folie du moment est d’arriver à l’unité des peuples et de ne faire qu’un seul homme de l’espèce entière, soit ; mais en acquérant des facultés générales, toute une série de sentiments privés ne périra-t-elle pas ?
    Adieu les douceurs du foyer ; adieu les charmes de la famille ; parmi tous ces êtres blancs, jaunes, noirs, réputés vos compatriotes, vous ne pourriez vous jeter au cou d’un frère.
    N’y avait-il rien dans la vie d’autrefois, rien dans cet espace borné que vous aperceviez de votre fenêtre encadrée de lierre ?
    Au delà de votre horizon vous soupçonniez des pays inconnus dont vous parlait à peine l’oiseau du passage, seul voyageur que vous aviez vu à l’automne.
    C’était bonheur de songer que les collines qui vous environnaient ne disparaîtraient pas à vos yeux ; qu’elles renfermeraient vos amitiés et vos amours ; que le gémissement de la nuit autour de votre asile serait le seul bruit auquel vous vous endormiriez ; que jamais la solitude de votre âme ne serait troublée, que vous y rencontreriez toujours les pensées qui vous y attendent pour reprendre avec vous leur entretien familier.
    Vous saviez où vous étiez né, vous saviez où était votre tombe ; en pénétrant dans la forêt vous pouviez dire :

    Beaux arbres qui m’avez vu naître,
    Bientôt vous me verrez mourir

    (Mémoires d'Outre-tombe)


    "L'enracinement est peut-être le besoin le plus important et le plus méconnu de l'âme humaine. C'est un des plus difficiles à définir. Un être humain a une racine par sa participation réelle, active et naturelle à l'existence d'une collectivité qui conserve vivants certains trésors du passé et certains pressentiments d'avenir. Participation naturelle, c'est-à-dire amenée automatiquement par le lieu, la naissance, la profession, l'entourage. Chaque être humain a besoin d'avoir de multiples racines. Il a besoin de recevoir la presque totalité de sa vie morale, intellectuelle, spirituelle, par l'intermédiaire des milieux dont il fait naturellement partie." (Simone Weil)

      "II me parait impossible d'imaginer pour l'Europe une renaissance qui ne tienne pas compte des exigences que Simone Weil a définies." (Albert Camus)

    lafautearousseau

  • «Les statues qui veillent sur nous méritent notre gratitude et notre amour», par Par Bérénice Levet.

    La statue de Jean-Baptiste Colbert devant l’Assemblée nationale. JOEL SAGET/AFP

    Source : https://www.lefigaro.fr/vox/

    Dans une magnifique méditation, la philosophe et essayiste Bérénice Levet défend les statues de nos personnages historiques que certains activistes aimeraient détruire.

     

    1.jpgDans la préface à La Révolte des masses qu’il écrivit à l’attention des lecteurs français, le philosophe Ortega y Gasset raconte comment, à l’occasion d’un séjour à Paris, il s’avisa qu’il ne connaissait personne dans la capitale, « personne… hormis les statues » « Parmi elles, relate-t-il alors, je rencontrai de vieilles amitiés qui avaient stimulé ma vie intime ou en avaient été les maîtres durables. N’ayant personne avec qui parler, c’est avec elles que je m’entretins. (…) Peut-être un jour ferai-je imprimer ces Entretiens avec les statues qui ont adouci une étape douloureuse et stérile de ma vie. » Magnifique témoignage d’une expérience qui nous est devenue étrangère. Loin d’adoucir nos vies, les statues aujourd’hui les enflamment. Elles tendaient à n’être plus que le décor de nos existences, et il suffit d’une étincelle allumée aux États-Unis pour qu’elles se retrouvent contestées, vandalisées, déboulonnées ici en France.

    Sans doute, non sans quelque ingratitude de vivants, ne prenions-nous plus aucun soin de nos statues, ne daignions-nous plus leur accorder un moindre regard. Elles étaient là, de leur présence massive, évidente, familière et en apparence immuable, fond sur lequel se détachaient nos existences affairées ou au pied duquel nous nous donnions rendez-vous mais sans pour autant concéder un salut à Diderot ou à Danton. Cependant, si l’habitude, l’accoutumance, émousse l’attention, elle ne détruit ni l’attachement ni la fidélité. Présences familières et par là même rassurantes, garantes de continuité et de stabilité, preuves de ce que tout «ne meurt pas sur les saisons» (Rimbaud), les statues opposent la plus farouche résistance à la société liquide. Tout passe, elles demeurent. Elles sont, de surcroît, constitutives d’un monde qui nous est commun, et commun avec les morts. Le Condorcet du quai Conti, cher à Ortega y Gasset ne dédaignerait sans doute pas que nous poursuivions la conversation avec lui. C’est pourquoi ces offensives dirigées contre Colbert, Joséphine, Faidherbe, Hugo sont vécues comme des offenses par la grande majorité des Français, indépendamment des connaissances historiques qu’ils peuvent avoir des faits incriminés. Déboulonner, débaptiser une rue sont des gestes d’une extrême brutalité.

    Les militants dits antiracistes veulent que nous tournions nos regards vers ces témoins de pierre qui jalonnent nos villes et scandent nos promenades? Prenons-les au mot. Que ces passions épuratrices nous soient l’occasion de redécouvrir nos statues et, à travers elles, notre histoire. Que ces présences muettes mais impérieuses nous soient des éperons ; que chacune d’elles aiguise notre curiosité et notre soif de savoir, nous rappelle à notre amnésie historique et nous porte à rouvrir les livres d’histoire. «Les Français sont des héritiers, mais pour sauver l’héritage, il faut être capable de le conquérir à nouveau.» Entendons Raymond Aronet faisons de nos statues le point de départ de la reconquête! Un point de départ concret, charnel, incarné. Ces procureurs acharnés de la France, ces abstractions, aurait dit Camus, incarcérés dans leur prison idéologique, sont perdus pour la discussion, mais ils se nourrissent et se fortifient de nos doutes, de nos «en même temps», de notre sentiment d’illégitimité et d’abord de l’ignorance institutionnalisée. Quatre décennies d’éducation progressiste et presque autant de tyrannie de la repentance ont fait leur œuvre. Dans leur grande majorité, les moins de 50 ans vivent en étrangers dans leur propre pays, privés de l’expérience séminale, décrite avec gourmandise par François Mauriac, d’«habiter familièrement l’histoire de France», de s’y «promener comme dans un château de famille dont les moindres recoins nous eussent été connus(…) des rois fainéants à Jeanne d’Arc, de Jeanne Hachette au Grand Ferré, des camisards aux chouans, tout a été buriné à jamais dans notre cœur.»

    Que savent encore de la France nos concitoyens sinon qu’elle a été et demeure, leur répète-t-on, raciste, patriarcale, sexiste, misogyne, xénophobe, islamophobe, homophobe, transphobe, cruelle aux bêtes, j’en oublie assurément? Et avec quelles armes voudrions-nous qu’ils puissent répliquer à cette rhétorique victimaire et accusatrice? «D’autant que l’âme est plus vide et sans contrepoids, écrivait Montaigne, elle se baisse plus facilement sous la charge de la première persuasion.» Regarder les statues qui balisent nos villes comme autant d’invitations au voyage dans notre passé, dans la sédimentation des siècles dont le présent est la concrétion, c’est les rendre à leur mission première, que leur confia la monarchie de Juillet d’abord, la IIIe République ensuite: une mission pédagogique.

    La monarchie de Juillet hérita d’une France divisée, fracturée, décomposée par la Révolution. Elle va s’atteler à recoudre la robe déchirée, à réconcilier les deux France. « Il faut donner quelque chose à aimer, et leur donner à aimer la France », les mots sont de la philosophe Simone Weil mais ils résument le dessein de Louis-Philippe. L’époque est celle des grands historiens, tel Michelet, et c’est à l’histoire que la monarchie de Juillet confiera la tâche de cimenter le peuple français. L’établissement des statues s’inscrit, avec la galerie des Batailles de Versailles, avec la loi de Guizot sur l’enseignement de 1833 qui accorde une place éminente à l’histoire nationale, ou encore la commission du patrimoine, bientôt présidée par Mérimée, dans une constellation de mesures qui travaillent toutes à doter les Français d’un imaginaire commun. Louis-Philippe mise sur les vertus de mise en forme et en sens du récit pour forger une conscience nationale, mais aussi sur les vertus d’incarnation des images et de la statuaire. Ces témoins de pierre présentent la vertu insigne de donner un visage à l’histoire, et c’est cela qui les a rendues si précieuses à l’orléanisme comme à la IIIe République. En somme, la France post-révolutionnée est la première à donner raison à Burke, contempteur de son abstraction: sur la Déclaration des droits de l’homme, sur les «valeurs», sur l’universel, on ne construit rien, et surtout pas un peuple. L’âme humaine a besoin de réalités particulières.

    «Le passant est invité à lire, déchiffrer, s’instruire et pas seulement admirer» les statues, rappelle l’historien Maurice Agulhon. Nos statues nous parlent d’une France qui, plutôt que d’enfermer chacun dans le cercle étroit de son identité, le rattachait à une réalité plus vaste que la sienne, celle de la patrie. Une France qui certes renvoyait l’identité sexuée et sexuelle, religieuse, ethnique dans la sphère privée, non toutefois pour abandonner chacun au vide identitaire, mais afin de permettre à tous de prendre part à une épopée commune. Une France, enfin, qui, si nous lui demeurions fidèles, nous armait contre cette redoutable exigence de «visibilité», en exaltant au contraire cette belle et noble vertu qu’est la discrétion. Ne pas laisser le moi privé envahir l’espace public était notre code. Et si les Français sont si attachés à la laïcité, j’incline à penser que c’est en très grande partie pour cette prescription essentielle à la vie en commun. Les statues, choses belles, fragiles et périssables… Rappelés à leur présence muette par les procureurs et fossoyeurs de la France, ne les leur abandonnons pas.

     

    Bérénice Levet a en particulier publié «Le Musée imaginaire d’Hannah Arendt. Parcours littéraire, pictural et musical de l’œuvre» (Stock, 2011), «La Théorie du genre ou le Monde rêvé des anges», préfacé par Michel Onfray (Livre de poche, 2016) et «Le Crépuscule des idoles progressistes» (Stock, 2017). Dernier ouvrage paru: «Libérons-nous du féminisme!» (Éditions de l’Observatoire, 2018).

  • Série : Le legs d’Action française ; rubrique 3 : L’homme de la cité, le « républicain », par Gérard Leclerc.

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

    «  Voici la troisième rubrique de Gérard Leclerc sur «  Le legs de l’Action française  ». Elle nous explique comment les deux évènements du Ralliement des catholiques à la République et ensuite celui de l’Affaire Dreyfus, ont suscité le basculement de nationalistes vers la proposition monarchique, mais aussi du royalisme vers le nationalisme. Charles Maurras en fut la cheville ouvrière.

    gerard leclerc.jpgDécouvrons la fondation de notre Action française qui perdure depuis 120 ans. Ne nous trompons pas  ; il ne s’agit pas de nous complaire dans les origines de notre mouvement-école, mais au contraire d’utiliser ce passé pour que l’Action française reste une pensée vivante pour mieux répondre aux défis d’une société démocratique de plus en plus déshumanisante.

    Ceux qui voudront allez plus loin dans la compréhension de la violence polémique au temps de l’Affaire Dreyfus, peuvent lire les articles de Maurras publiés dans la Gazette de France et mise en annexe du maitre ouvrage de Pierre Boutang  : Maurras, la Destinée et l’œuvre, Plon, 1984 ; La Différence, 1993. (ndlr, P Lallement)  »

    Enfin Maurras va être, de plus en plus, l’homme de la cité. Je dirais presque, si vous voulez, le républicain, au sens premier du terme, l’homme de la “chose publique”, de la “res publica“. C’est un homme qui va se sentir de plus en plus investi de responsabilité civique, de responsabilité vis-à-vis de la France, celle d’après 1870, quand, après avoir subi une terrible défaite, elle se trouve confrontée à une Europe instable et dominée par les ambitions allemandes. Le “républicain” Maurras, l’homme de la chose publique, va de plus en plus se distinguer par ce que Léon Daudet appelait l’angor patriæ – l’angoisse de la patrie – qui va en faire un citoyen de premier ordre, un citoyen qui va vouloir à tout prix éclairer ses contemporains, pour permettre à la France de surmonter sa défaite et affronter les étapes nouvelles de son histoire.

    Pour comprendre ce Maurras-là, le politique, le républicain, il me faut parler de deux événements fondamentaux qui sont à l’origine de l’histoire personnelle de Charles Maurras  : le Ralliement, et l’Affaire Dreyfus.

    Le premier événement, antérieur à la fondation de l’Action française date, de 1892  : dans une encyclique rédigée en français, le pape Léon XIII demande aux catholiques français de se rallier au régime républicain. Jusqu’alors, ils étaient réticents ou hostiles, l’épiscopat en tête, à l’idée d’accepter les institutions républicaines. Or le pape demande de jouer le jeu institutionnel de la IIIe République dans l’espoir de les conquérir. Maurras collabore alors à des journaux catholiques soutenant le Ralliement  : il considère la monarchie comme une institution complètement dépassée. Au début, il est, si j’ose dire, rallié au Ralliement… Ce n’est qu’après quelques années de réflexion politique intense qu’il va découvrir que, pour pouvoir surmonter la défaite de 1870 et affronter une Allemagne toujours menaçante, la monarchie est le régime qui convient le mieux à la France. Il réalise que la faiblesse structurelle de la République la rend incapable de mener, d’une manière continue, une politique étrangère cohérente. C’est là l’origine de son livre fondamental, Kiel et Tanger, qui constitue une analyse extrêmement précise de l’état des relations internationales et de la politique étrangère de la France face à l’Allemagne.

    Maurras pense que ce qui manque à la France, c’est une institution stable, permanente, ayant l’avenir devant elle, et capable de dépasser les querelles partisanes dans le souci prioritaire de protéger les Français de toutes les menaces. Un régime indépendant des partis, donc, et pouvant concevoir et conduire – c’est aussi un grand souci de Maurras – une politique militaire. Pierre Debray a consacré un certain nombre de cours aux analyses de Maurras sur la faiblesse militaire de la France face à l’Allemagne avant la Première Guerre mondiale. Il y a donc chez Maurras ce double souci d’une politique militaire forte, accompagnant une politique diplomatique intense.

    Deuxième événement capital à l’origine de l’Action française et du rôle que va jouer Maurras  : l’Affaire Dreyfus. Je ne peux malheureusement pas entrer dans les détails, mais l’Affaire Dreyfus va être un événement fondateur, avec tous les risques inhérents à une telle affaire. En deux mots, vous savez que l’officier français d’origine juive Alfred Dreyfus est accusé d’avoir livré à l’Allemagne des informations majeures sur l’armement français. Condamné par un tribunal militaire, il est déporté en Guyane. Commence alors une véritable guerre civile entre ceux qui jugent Dreyfus innocent, et ceux qui estiment que toute remise en cause de sa condamnation affaiblirait terriblement l’armée française face à la menace militaire allemande.

    Pour cette raison, Maurras va s’engager à fond dans le camp antidreyfusard. On le lui reproche ardemment aujourd’hui, l’historiographie moderne étant favorable à l’innocence de Dreyfus. Mais il faut bien voir que les choses sont loin d’être aussi simples que. Si vous voulez vous en faire une idée, je vous conseille de lire, non pas la littérature d’Action française sur le sujet, mais Notre jeunesse de Charles Péguy. C’est un livre facile à lire et très éclairant, car à l’époque, Péguy appartient au camp dreyfusard et s’est battu violemment contre les antidreyfusards.

    Que dit Péguy ? Dans ce pamphlet qu’est Notre jeunesse, il reproche à ses anciens amis dreyfusards leur antimilitarisme et leur antipatriotisme. Il est particulièrement sévère à l’égard d’un des principaux meneurs du dreyfusisme pour avoir trahi la cause de l’innocent en y associant sa passion antipatriotique et son aversion pour l’armée. Quand on ajoute au témoignage de Péguy celui de Daniel Halévy, lui aussi dreyfusard, mais qui avait exprimé très tôt ses doutes à ce sujet, on comprend la difficulté. On voit que la question ne se ramène pas à une pure confrontation entre, d’un côté, des salauds qui s’en prennent à un innocent et, de l’autre, des justes courant au secours de cet innocent.

    Mais ce n’est pas mon sujet aujourd’hui. Mon sujet, c’est que, si l’engagement antidreyfusard de Maurras est fondateur, c’est parce qu’il sera l’occasion pour lui de greffer la cause royaliste sur le nationalisme. Ce qui n’avait rien d’évident  : le mouvement nationaliste, avec Barrès, Déroulède et d’autres, s’est formé dans un climat, un milieu, une culture qui n’avaient rien de royalistes. C’est Maurras, et c’est Maurras seul, qui va imposer à la réaction nationaliste de l’époque de se faire monarchiste. C’est en observant les suites du Ralliement qu’il a réfléchi à la question institutionnelle et finalement compris la modernité et l’impérieuse nécessité de cette monarchie que jusque là il rejetait. Il va dès lors s’en faire le défenseur inconditionnel, et cela jusqu’au bout de son existence terrestre. C’est dans ce but qu’il va fonder l’Action française.

    *

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    Retrouvez les rubriques de l’été militant sur le site quotidien de l’Action française (Direction Olivier Perceval)

    Par Christian Franchet d’Esperey

    1 – Est-il opportun de s’accrocher à un homme aussi décrié ?
    2 – Les positions les plus contestées de Maurras ne doivent plus faire écran à ses découvertes majeures
    3 – maurrassisme intra-muros et maurrassisme hors les murs
    4 – Une demarche d’aggiornamento cest-a-dire de mise au jour

    Par Philippe Lallement

    Le maurrassisme est-il devenu un simple objet d’étude historique

    Par Gérard Leclerc

    1. Le legs d’Action française
    2. Maurras humaniste et poète
  • On sait qui ensauvage la France. Ne fermons plus les yeux !, par Philippe Bilger.

    Source : https://www.bvoltaire.fr/

    Je l’avoue : j’ai un peu peur de formuler cette interrogation. Je pressens les tombereaux d’insultes qui vont se déverser sur moi, notamment dans ce cloaque qu’est souvent Twitter, et dont la moindre sera l’accusation de penser et d’écrire comme le RN. Ce reproche sera grotesque mais il constituera, comme d’habitude, l’argumentation simpliste de ceux qui n’en ont pas d’autres.

    7.jpgMais qu’importe ! L’avantage décisif d’une vie intellectuelle libre et dénuée d’ambition officielle est qu’elle a le droit de tout se permettre et de ne pas récuser l’expression de la vérité au prétexte que celle-ci sera jugée indécente, provocatrice, scandaleuse.

    Laissons immédiatement de côté les débats périphériques qui n’ont généralement pour objectif que de vous détourner du questionnement central, de la problématique radicale.

    L’ensauvagement et le doute lexical s’attachant à ce terme ne seront pas mon sujet.

    Pas davantage que celui de l’existence débridée d’une délinquance et d’une criminalité qui augmentent, notamment dans leurs manifestations quotidiennes de plus en plus liées à une contestation de l’autorité, quelle que soit sa forme. Même les naïfs ou les humanistes en chambre n’auront plus le culot ou l’inconscience de discuter le fléau de cette réalité mais tout au plus celui de son ampleur.

    Le cœur de mon billet va concerner cette interrogation dominante mais toujours éludée : qui ensauvage la France ?

    Il me plaît de donner une interprétation élargie de cette dérive car elle ne se rapporte pas qu’à la matérialité d’infractions portant atteinte aux personnes et aux biens mais aussi à des comportements et à des propos qui participent d’une dégradation honteuse et, le pire, revendiquée de la politesse sociale et du respect humain.

    Qui a traité Éric Zemmour de sous-humain avant de retirer son tweet sous l’effet d’une réprobation générale, mais de « pisser » sur lui et ses soutiens ?

    Qui a vanté la pratique de la polygamie et insulté la police en prétendant qu’elle massacrait des gens à cause de la couleur de leur peau ?

    Qui a agressé et tué Philippe Monguillot, à Bayonne, parce que, conducteur d’autobus exemplaire, il avait voulu faire respecter l’ordre et la loi ?

    Qui, sans permis, sous l’empire de la drogue, récidiviste, a été responsable de la mort de la gendarme Mélanie Lemée ?

    Qui, à Seynod, a insulté et agressé des chasseurs alpins faisant tranquillement leur footing ?

    Qui multiplie les refus d’obtempérer, se soustrait aux interpellations de la police avec des conséquences souvent dramatiques que leur mauvaise foi et le soutien médiatique imputeront systématiquement aux forces de l’ordre ?

    Qui, dans les cités et les quartiers sensibles, se livre au trafic de stupéfiants, terrorise les résidents honnêtes, empêche les interventions de la police ou n’hésite pas à exercer des violences de toutes sortes contre elle ?

    Qui tend des guets-apens aux pompiers et à la police ?

    Qui s’en est pris à des citoyens rappelant l’obligation du dans une laverie ou ailleurs ? Qui est revenu, après s’être vu interdire l’accès à un bus à cause de ce manque, pour frapper le conducteur ?

    Qui a mis en branle une effrayante bataille de rue, à Fleury-Mérogis, où deux bandes armées se sont opposées pour une « embrouille » de drogue ?

    Qui sème la panique dans les centres de loisirs, comme à Étampes, récemment ?

    Qui commet des cambriolages où on défèque sur le visage d’une victime de 85 ans, comme au Croisic ?

    Qui, en bande, se comporte dans l’espace public comme en terrain conquis, sans souci d’autrui mais avec l’arrogante certitude de l’impunité ?

    Qui vient, jour après jour, remplir la déplorable chronique des transgressions, des plus minimes aux plus graves ?

    Qui, pour tout et n’importe quoi, s’en prend aux maires au point que l’un d’eux, délégué, frappé, doit se satisfaire d’un rappel à la loi pour son agresseur campeur violent, l’anonymat systématique concédé aux transgresseurs laissant présumer leur origine ?

    Qui sont ces jeunes Français interdits de revenir à la piscine d’une commune suisse proche de la frontière française parce qu’ils perturbaient la tranquillité du lieu ?

    Qui, majeur ou mineur, se livre au pire au point que la majorité des citoyens prend acte avec accablement de ce qui se commet sur tout le territoire national et n’espère plus le moindre redressement politique et judiciaire ?

    On comprendra que ces interrogations sont de pure forme puisqu’à tout coup, la responsabilité incombe à des fauteurs d’origine étrangère, maghrébine ou africaine, parés nominalement de la nationalité française grâce à un droit du sol qui n’a plus aucun sens puisqu’on l’offre mécaniquement à des générations qui haïssent ce cadeau et dévoient cet honneur.

    Sans oublier les clandestins qui se glissent dans ces bandes ou participent à ces exactions.

    L’infinie pudeur médiatique avec laquelle, dans neuf cas sur dix, on occulte les identités est la preuve la plus éclatante de l’écrasante domination de ces Français dans le tableau pénal national et dans les prisons, notamment en Île-de-France.

    Le refus entêté d’authentiques statistiques ethniques est également un indice capital qui explique la répugnance de la bienséance à prendre la mesure d’une réalité qui démolirait ses préjugés et sa bonne conscience.

    Est-ce à dire qu’il n’existe pas des voyous français de souche ? Certainement, mais leur rareté est démontrée par le fait troublant que, si l’un d’eux est impliqué – une agression contre une mosquée à Bayonne, par exemple -, on peut être sûr qu’on aura son identité complète, son âge, son passé judiciaire et sa structure familiale. Ces données sont si chichement communiquées dans les comptes rendus habituels qu’aucune hésitation n’est possible et l’appréciation quantitative vite opérée.

    Qui ensauvage la France ? S’accorder sur le constat que je propose ne permettra pas de résoudre magiquement le problème lancinant causé par ces jeunes Français d’origine africaine ou maghrébine et ces étrangers en situation irrégulière (il va de soi que tous ne sont pas à stigmatiser dans ces catégories) mais, au moins, ne nous voilons plus la face.

    On a trop longtemps refusé de répondre à cette interrogation, non pas à cause d’une quelconque incertitude, mais parce que la vérité nous aurait encore plus confrontés à notre impuissance. Le désarroi d’une démocratie désarmée, répugnant à user de tout ce qu’elle aurait le droit d’accomplir, aspirant à l’ordre mais sans la force !

    Et terrorisée, depuis trop longtemps, à l’idée d’aller sur les brisées du FN-RN… Paradoxalement, et tristement, en refusant de lui donner raison sur ce plan, on ne lui donne pas tort assez vigoureusement pour le reste…

    L’ensauvagement que je dénonce et que j’impute n’est pas relié à la dégradation apparemment paisible mais insinuante, irrésistible, de notre vivre ensemble à cause d’un séparatisme, caractérisé notamment par le voile et dont la finalité est plus politique que strictement religieuse. Ni à des modalités d’éducation ni à des politiques sans doute critiquables, comme le regroupement familial, qui ont favorisé la concentration de communautés en des lieux qui ont été rendus invivables et délabrés au fil du temps.

    C’est la perversion des attitudes individuelles que je mets en cause, au singulier mais le plus souvent au pluriel. La société n’est pas créatrice de ces malfaisances répétées de toutes sortes.

    L’ légale n’est pas coupable mais la clandestine contre laquelle, jusqu’à aujourd’hui, on lutte mal. Et, au sein de la première comme de la seconde, les délinquants déshonorant l’une et profitant de l’autre.

    Les solutions pour combattre cette réalité, après en avoir pris acte sans barguigner, imposeront, outre un courage politique de tous les instants et une politique du verbe sans complaisance, expulsions et éloignements à un rythme soutenu, une action équitable dans sa rigueur, une police et une gendarmerie accordées avec une Justice sans faiblesse, une exécution des sanctions efficace et réactive et, surtout, le retour des peines plancher sans lesquelles la magistrature ne tirera jamais assez la conséquence de certains passés judiciaires.

    Rien de plus navrant, en effet, qu’un État sans autorité, une Justice sans crédibilité et des forces de l’ordre sans soutien.

    Il conviendra de remettre en discussion, dans un débat honnête, sans excommunication, le droit du sol. Envisager, aujourd’hui, dans une France éclatée, son effacement n’est ni inhumain ni contraire à une tradition dont les effets sont devenus dévastateurs. Ou alors continuons à révérer, contre vents et marées, celle-ci et laissons l’ensauvagement de notre pays se poursuivre. Notre noblesse abstraite sera garantie mais non la sauvegarde de notre nation.

    On sait qui ensauvage la France. Ne fermons plus les yeux.

    Apeuré légèrement en commençant ce billet, je le termine en le jugeant nécessaire et, je l’espère, convaincant.

     

    Philippe Bilger

    Magistrat honoraire et président de l'Institut de la parole

  • «Un défaut d’acculturation scientifique de la population française»: ce que révèlent les propos de Sibeth Ndiaye, par El

    L’ancienne porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye. Jean-Christophe Marmara/JC MARMARA / LE FIGARO

    Dans les mots des gouvernants se cache un mépris implicite pour les gouvernés, analyse Elodie Mielczareck. Selon la sémiologue, le gouvernement ferait mieux d’adopter une posture plus humble lorsqu’il communique avec les français.

    6.jpg«Je crois qu’on a souffert au cours de cette crise d’un défaut d’acculturation scientifique de la population française»: voilà comment sont résumés les contre-sens gouvernementaux de ces derniers mois. Prenez cela dans les dents! C’est votre nullité et imbécilité qui explique la situation gravissime dans laquelle la France s’est trouvée.

    La posture est osée, d’une condescendance affichée: c’est celle de l’ancienne porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, expression publique et représentative d’un positionnement de fond impulsé par le Président de la République, et ce, dès le soir de son élection. Décidément, ce «nouveau monde» aura accouché des pires «négociateurs», ceux qui oublient la définition de l’intelligence relationnelle.

    De la verticalité sous le règne macronien

    Les représentants du gouvernement En Marche n’ont pas le monopole de la phrase condescendante: «les petites gens» (Manuel Valls), «la France d’en bas» (Jean-Pierre Raffarin) les sans dent», (François Hollande), les discours politiques et médiatiques regorgent de ces substantifs pour désigner une catégorie de la population française. Mais le maillage linguistique gouvernemental est spécifique. S’il est un schème particulièrement caractéristique de ses discours, c’est celui de la verticalité. Présente de manière symbolique au soir de l’élection d’Emmanuel Macron au travers de la Pyramide du Louvre, la hiérarchisation verticale est un invariant des prises de paroles gouvernementales.

    Revenons pour exemple sur cette phrase d’Emmanuel Macron: «dans les gares, il y a ceux qui réussissent et ceux qui ne sont rien». Si elle est correcte grammaticalement, le choix sémantique du verbe être («ne sont rien») au lieu du verbe avoir («n’avoir rien») interpelle. D’ailleurs, pour sortir de la crise des «gilets jaunes», Emmanuel Macron propose de créer un «Haut Conseil pour le climat». Tout est donc haut et vertical dans la logorrhée macronienne.

     

    Les mots utilisés par le président dans son livre de campagne Révolution (« pauvres », « démunis », « faibles ») sont empruntés au langage forgé par l’Église médiévale

     

    L’historien Gérard Noiriel précise: les mots utilisés par le président dans son livre de campagne Révolution («pauvres», «démunis», «faibles») sont empruntés au langage forgé par l’Église médiévale. Il y a le haut et le bas, sans intermédiaire. Cette verticalité se décline comme un leitmotiv: «trop intelligents, trop subtiles» (Gilles LeGendre) face à des «fainéants et des cyniques» (Emmanuel Macron), ou bien à des acculturés. En somme, des cons qui n’arrivent pas à se mettre en marche. Les mots diffèrent mais la logique sous-jacente est identique: le mépris de l’autre.

    Plus largement, «ceux qui fument des clopes» (Benjamin Griveaux) ou «ceux qui foutent le bordel» déterminent des catégories très vastes: il y a au moins une chance pour que vous qui lisiez ces lignes, soyez dans au moins une des catégories décrites négativement par le gouvernement. Une erreur de tact volontaire.

    Les inaptes sont les gouvernants, pas les gouvernés

    «Ça marque le rapport au temps de notre société. Aujourd’hui, on veut que d’un claquement de doigts, toutes les réponses aux questions qu’on se pose, soient apportées immédiatement». Pour une fois, nous ne pouvons que souscrire à cette analyse de l’ancienne porte-parole. Mais alors, n’est-ce pas aux gouvernants de faire preuve d’adaptabilité? N’est-ce pas justement de leur ressort que de décoder les attentes? N’ont-ils pas le devoir de s’adapter aux enjeux de notre époque?

    Cette époque justement, on peut la qualifier de «post-moderne», comme le fait le sociologue Michel Maffesoli. Le présentéisme est bien une de ses valeurs. Plutôt que de lutter contre ce phénomène, accentué par nos réseaux sociaux et accompagné de nouveaux codes dans la communication, le gouvernement a la responsabilité de développer des procédures de décision plus pertinente et immédiate. Etonnamment, quand il s’agit de mettre en place des actions dans une vision court-termiste, souvent électoraliste, le présentéisme semble une valeur plus affectionnée que rejetée.

    Autre valeur de la post-modernité dont le gouvernement ferait mieux de s’inspirer: le perspectivisme. Prétendre à longueur de journée détenir «La Vérité» ou bien prétendre savoir ce qu’est «La Réalité», c’est méconnaitre les mécanismes cognitifs à l’œuvre. Nous évoluons dans un monde passé au tamis de nos sensations, ressentis, filtres et biais de perception.

    Les pires négociateurs accentuent la polarisation par leur posture

    Depuis plusieurs mois, la posture gouvernementale est un excellent contre-exemple. Dans quelques années, elle servira d’exemple pour illustrer ce qu’il ne faut surtout pas faire en situation de négociation, de ce qu’il ne faut surtout pas faire lorsqu’on souhaite augmenter son intelligence situationnelle. Voici ce programme récurent auquel nous a habitué le gouvernement:

    I: Ne pas (se) faire confiance : N’en déplaise à la sagesse populaire, la confiance ne se mérite pas, elle se donne! Et c’est en tous les cas la conclusion d’Anatol Rapoport, ce psychologue et philosophe américain d’origine russe, figure de proue de la «théorie des jeux». Vous avez déjà sans doute entendu parlé de ce dilemme du prisonnier: deux personnes enfermées ont davantage intérêt à coopérer entre elles plutôt que se dénoncer mutuellement afin de maximiser leurs gains.

    Réalisé à grandes échelles et de manière multipliée grâce à l’intelligence artificielle, les résultats confirment l’injonction de Rapoport: «Cooperate on move one ; thereafter, do whatever the other player did the previous move.» (Traduction: «Coopère sur le premier mouvement, et ensuite fait exactement ce que l’autre joueur fait»). Et cela, les meilleurs négociateurs au monde le savent bien: la confiance ça se donne d’entrée de jeu.

     

    Les bons négociateurs savent que, pour arriver à leur fin, il est plus efficace de cultiver l’humilité, la réciprocité et le respect de l’autre.

     

    Au contraire, le gouvernement favorise la société de défiance telle que la décrivait Alain Peyrefitte à son époque: «La société de défiance est une société frileuse, gagnant-perdant: une société où la vie commune est un jeu à somme nulle, voire à somme négative (si tu gagnes, je perds) ; société propice à la lutte des classes, au mal vivre national et international, à la jalousie sociale, à l’enfermement, à l’agressivité de la surveillance mutuelle. La société de confiance est une société en expansion, gagnant- gagnant, une société de solidarité, de projet commun, d’ouverture, d’échange, de communication.» (La Société de confiance, 1995). Merci nous y sommes.

    II - Cultiver le rabaissement personnel : En France, on raille beaucoup les saillies conquérantes d’un Donald Trump. Emmanuel Macron n’en est que la version plus «frenchie», moins directe, plus louvoyante. La violence est la même. Les bons négociateurs savent que, pour arriver à leur fin, il est plus efficace de cultiver l’humilité, la réciprocité et le respect de l’autre. Encore faut-il connaitre le mot «considération». Une qualité dont semble bien incapable un gouvernement qui n’a de cesse que de renforcer la polarisation de l’espace public: sans nuance, c’est pour ou contre, c’est Jojo-le-Gilet-Jaune avec les «Kwassa Kwassa» contre le progrès et le sens de l’Histoire.

    III - Favoriser la non-transparence : Que ce soit dans une organisation étatique jamais réformée ou bien dans des propos qui ont toutes les apparences linguistiques de la langue de bois, nos Hommes d’Etat adorent pérorer dans des mots complexes pour mieux camoufler leur ignorance. Dernière mot en date donc: «acculturation». Pourquoi ne pas avoir choisi le terme de «culture»? Sibeth Ndiaye aurait pu se plaindre «d’un manque de culture scientifique»? Non, le terme acculturation est faussement plus «sachant» et «expert». Ne serait-ce pas de la poudre de perlimpinpin?

     

    Élodie Mielczareck est sémiologue, spécialisée dans les dynamiques comportementales verbales et non verbales. Elle a notamment publié Déjouez les manipulateurs (Éditions du Nouveau Monde, 2016) et La Stratégie du Caméléon (Cherche Midi, 2019).

     

    Source : https://www.lefigaro.fr/vox/

  • Robert Ménard : « Pour la présidentielle de 2022, il faut un aventurier de droite ! ».

    Source : https://www.bvoltaire.fr/

    Dernièrement, Robert Ménard s’est montré relativement critique vis-à-vis de la candidature de Marine Le Pen à l’élection présidentielle, tout en réaffirmant sa proximité sur de nombreux sujets, tels que « la sécurité, l’immigration et l’identité ».

    Il souhaite « poser des questions » et se pencher sur quelle pourrait être la candidature qui permettrait à son courant politique de gagner en 2022.


    Emmanuel Macron s’est engagé à introduire de la proportionnelle dans les prochaines élections législatives. Est-ce une bonne nouvelle pour nous ? Ce souhait était longuement avancé notamment par le Rassemblement national.

    Dans l’absolu, oui. Quand vous voyez 5 ou 6 élus en tout et pour tout du Rassemblement national comme députés, alors que le Rassemblement national c’est 20 % de l’électorat, il y a une vraie injustice. Spontanément, ma première réaction est de dire qu’il faut de la proportionnelle. En même temps, la proportionnelle est le règne des partis. Ce sont les partis qui décident pour les électeurs et qui seront en tête de liste. On ne vote plus pour quelqu’un, mais on vote pour un parti. Oui, parce que cela introduit un peu de justice, mais il n’en faut pas trop parce que normalement on vote pour des hommes et des femmes de chair et de sang et pas simplement pour le logo d’un parti.

    On a l’impression que votre principal adversaire s’appelle Marine Le Pen. Vous êtes très critique à l’égard de sa candidature aux présidentielles. Vous appelez de vos vœux une candidature alternative. En quoi la présidente du RN n’obtient pas vos suffrages ? Qu’est-ce qu’il ne vous plaît pas chez elle ?

    Vous me posez la question sur le Rassemblement national. Vous pourriez ne pas m’en poser et je vous parlerais d’autre chose. Lorsque tous les journalistes m’interviewent sur le Rassemblement national, je réponds sur le Rassemblement national. Je ne réponds pas contre Marine Le Pen. Simplement, j’essaie de voir comment on peut gagner les prochaines élections. « On » c’est le courant de pensée qu’on représente. Dans ce courant de pensée, il y a évidemment le Rassemblement national. Rien ne peut se faire sans Marine Le Pen et rien ne peut se faire contre Marine Le Pen. Peut-on gagner avec Marine Le Pen ? Pardon de vous dire qu’à cette réponse, si vous êtes sûr de vous et que vous me dites oui, j’applaudis des deux mains. Sauf que je ne suis pas sûr que vous me répondiez oui !
    Moi-même je me demande comment on peut y arriver. Je n’interviens pas contre Marine Le Pen. Je pose les questions que tout le monde a en tête.
    Comme elle est à la droite de la droite, tout le monde a peur. J’essaie de poser de vraies questions.
    On ne peut pas dire à la fois que la France vit une crise importante, économique, sanitaire, identitaire et ne pas se poser la question «  a-t-on aujourd’hui toutes les armes pour gagner ? »
    En 2017, j’ai aidé Marine Le Pen à faire la campagne. Par conséquent, les remarques de certaines personnes, elles peuvent se les garder. Aujourd’hui, je me demande si elle est la bonne candidate. Je me demande si quelqu’un pourrait incarner mieux qu’elle. Aujourd’hui, elle est là. Je suis absolument d’accord sur toute une partie de ses idées, notamment sur les questions d’identité, de sécurité et d’immigration. En revanche, sur d’autres questions, j’ai aussi le droit, on est pas encore dans un régime totalitaire, de critiquer.

    François Lejeune disait dans l’enquête sur Valeurs actuelles qui est sortie dans Le Monde que son courant politique était orphelin. Par commodité, on va dire que vous faites partie de ce camp d’idée. Comment espérer prendre le pouvoir, dans la mesure où il faut un maillage territorial, des élus locaux et un travail de subsidiarité pour prendre le pouvoir. Vraisemblablement, votre camp n’a pas fait ce travail de subsidiarité. Comment gagner des présidentielles lorsqu’on n’a pas commencé à la base ?

    Pardon de vous dire que vous êtes mal placé pour me poser cette question-là. Pour être à la base, j’y suis. Après avoir gagné la mairie avec près de 70 % des voix. Là, on vient de gagner l’agglo. Je pense donc qu’on aura un certain nombre d’élus au niveau du département. Je vous rappelle que tous les élus dans ce département et dans ce coin de France, sont tous des élus proches de moi. Pour le Rassemblement national, c’est le même problème. Est-ce que les élections municipales ont été un succès ? Non ! Louis Aliot a été élu en prenant ses distances avec son propre parti. Allez me trouver une de ses affiches et vous verrez le logo du Rassemblement national.
    On est dans cette configuration-là. Dire cela n’est pas critiquer, mais c’est constater. Personne dans notre courant de pensée n’a un vrai maillage de terrain avec des élus. On pensait en avoir beaucoup plus au niveau municipal, mais on ne les a pas. Bien sûr, ce sera compliqué.
    J’ai repris un mot d’un homme politique de droite qui disait «  peut-être qu’un aventurier de droite pourrait faire l’affaire ». Peut-être que Marine Le Pen deviendra une aventurière de la droite. Elle va peut-être essayer d’écouter d’autres gens que ceux qui la conseillent en ce moment. Elle va peut-être prendre d’autres positions.
    Ce que dit le Rassemblement national ne peut pas réunir une autre partie de la droite. Oui, peut-être que sur les questions de société, elle sera encore plus ferme. On peut rêver ! Aucune porte n’est fermée…
    J’essaie juste d’être utile. Mon utilité est de dire haut et fort un certain nombre de questions que notre camp ne veut pas entendre. C’est un comble pour un camp qui passait sa vie à dire «  je dis haut et fort ce que les autres ne veulent pas dire, mais que les Français pensent ».
    Moi, je dis haut et fort ce que notre courant pense, mais que ses leaders ne veulent pas dire !

    Ce camp a autant de chapelles qu’il a de membres. Ces divisions internes que l’on peut avoir sont-elles surmontables ?

    On ne va pas être la caricature de nous-mêmes. Aujourd’hui, il faut se retrouver autour de quelqu’un. Les Républicains se déchirent. Il faut ouvrir nos portes, respirer, aller voir ailleurs et entendre d’autres gens. C’est juste ce que j’essaie de faire en me le disant peut-être de façon maladroite et un peu provocatrice, mais je ne vais pas me refaire là-dessus.

    Jean-Frédéric Poisson a annoncé qu’il se présentait à l’élection présidentielle. Serait-il plutôt de votre camp ? Seriez-vous prêt à soutenir la candidature de Jean-Frédéric Poisson ?

    Pour tout vous dire, je vais le voir puisqu’il a mal pris cette expression. Ce n’était pas pour moi quelque chose de péjoratif. Il a le courage d’être le premier à dire «  je ne me contente pas de parler de la présidentielle, je fais acte de candidature et je suis en train de me donner les moyens d’être candidat ». Peut-on penser que Jean-Frédéric Poisson peut remporter la présidentielle ? Bien sûr que non ! Ce n’est pas gentil de le dire, mais c’est la stricte vérité. Je ne crois pas que ce soit tout de suite dans l’ordre des choses. Voilà ce que j’ai voulu dire.
    Il ne faut pas éparpiller les choses. Sur l’immense majorité de ce qu’elle dit, je suis évidemment d’accord. À force de se diviser, il ne faudrait pas faire en sorte qu’on ne soit même pas au second tour de la présidentielle. Attention de ne pas jouer avec le feu

     

    Robert Ménard

    Maire de Béziers
    Ancien journaliste. Fondateur de Reporters sans frontières et de Boulevard Voltaire