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Rechercher : Rémi Hugues. histoire

  • Une Europe sans boussole

     

    par Gérard Leclerc

     

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    Il est désormais bien loin le temps où un universitaire américain pouvait tranquillement énoncer sa thèse de « la fin de l’histoire », grâce à l’avènement universel du capitalisme et de la démocratie. La chute du Mur de Berlin en 1989, avec l’effondrement du système soviétique semblait donner quelque crédit à cette idée d’une paix universelle avec la constitution d’un État de droit à l’échelle mondiale. D’ailleurs certains économistes libéraux plaidaient dans le même sens, en expliquant que désormais il était impossible de sortir du cercle de raison de l’économie mondiale, générant une prospérité générale. Ce bel optimisme s’est trouvé contrarié par des facteurs auxquels on n’avait guère pensé sur le moment. Mais il y eut un premier réveil brutal, le 11 septembre 2001, avec les attentats spectaculaires de New York et de Washington. On connaît la suite avec les guerres du Proche-Orient et l’offensive généralisée du fondamentalisme islamiste.

    Et puis il y a l’Europe elle-même. Ne devait-elle pas constituer l’exemple d’un espace de paix, assuré par son organisation politique ? Sa situation privilégiée ne devait-elle pas favoriser une extension du bien être et de la sécurité ? On a dû déchanter, non seulement à cause des attentats qui ont meurtri le sol européen mais à cause de la déstabilisation qui s’est emparée, depuis quelques années, du continent. Partout, on a assisté à la montée des populismes et au recul des formations de centre droit et de centre gauche. On parle pour l’Europe centrale, qui fut délivrée du communisme, de l’établissement d’un régime illibéral. Les vagues migratoires consécutives aux guerres et aux malheurs d’autres peuples ont suscité la crainte des populations locales, par ailleurs inégalement touchées par les retombées de la croissance mondiale.

    L’Italie est l’exemple même de cette incertitude qui s’est emparée surtout des classes moyennes et des classes défavorisées marquées par le chômage. Après les élections de dimanche on va jusqu’à parler de cataclysme électoral. Mais n’était-ce pas prévisible ? L’Europe semble avoir perdu la boussole qui avait orienté sa marche au lendemain de la guerre. On a peut-être aussi, du côté des élites, un peu trop pris de haut des gens qui n’étaient pas conquis par principe au bel avenir qu’on leur assurait. D’une façon ou d’une autre, il faudra bien répondre à un désarroi qui n’a pas trouvé, jusqu’ici, de réponse adéquate.   

    Gérard Leclerc

    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 6 mars 2018.

     

    Lire aussi dans Lafautearousseau...

    Italie : l'extension de l'euroscepticisme à l'aire des pays fondateurs

  • Italie : l'extension de l'euroscepticisme à l'aire des pays fondateurs

     

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    A quoi assistons-nous au fond, d'une journée électorale européenne l'autre, depuis le Brexit ?

    Il se pourrait bien que ce soit tout simplement à la déconstruction de l'Union Européenne, étape par étape. Chacune nationale. Pays après pays. On peut s’en féliciter ou le regretter, il devient difficile de ne pas le constater. 

    L'Union Européenne se défait donc elle aussi, du moins telle qu'elle avait été rêvée puis mise en route par les vieux messieurs qu'étaient déjà, dans les années 50 et 60 du siècle dernier, Konrad Adenauer, Robert Schumann, Alcide de Gasperi et Jean Monnet. Tous quatre avaient vécu deux guerres mondiales, deux tragédies immenses, et pensaient devoir faire en sorte qu'elles ne se renouvellent pas. Leur vision - celle qui prévalut - fut celle que Jean Monnet incarnait : économique et marchande.  Regis Debray disait dimanche matin sur France Inter qu’ils mirent la charrue avant les bœufs : il eût fallu commencer par la culture qui unit et non par l’argent qui divise. Nous avons toujours dit la même chose. Il faudrait sans-doute ajouter que la menace d'invasion soviétique commandait alors le regroupement. Cette menace, si inquiétante et mobilisatrice en ce temps-là, où Staline et les Bolcheviques régnaient au Kremlin, s'est aujourd'hui évanouie. Nous l’avons oubliée. La CECA, le Pool Charbon Acier, le traité de Rome, le Marché Commun, ce ne sont plus là eux non plus que des souvenirs d'une époque déjà lointaine. Il ne serait pas surprenant que l'idée européenne perdure car elle a toujours survécu au fil des siècles depuis la fin de l'empire romain et l'éclatement de l'unité chrétienne médiévale au XVIe siècle*. Mais sous sa forme strasbourgo-bruxelloise il n'est pas impossible qu'elle ait vécu, que ce ne soit plus qu'une survivance d'un passé révolu. Les peuples l’ont rejetée, le désenchantement n’a fait que grandir. Il s’est installé. Une autre Europe reste à construire. Il faut espérer que ce sera avec bon sens et réalisme. 

    Est-ce là la leçon qu'il conviendrait de tirer des élections italiennes ? Il nous paraît assez clair qu'après la sécession britannique, la dissidence polonaise, tchèque, hongroise et slovaque, la singularité autrichienne, l'Italie à son tour, quelle que soit l'anarchie de son système politique et les combinaisons palliatives qui pourraient être tentées, consacre l'extension de l'euroscepticisme à l'aire des pays fondateurs.  Ce dernier est de toute façon majoritaire désormais en Italie. Il se pourrait bien que les prochaines élections européennes confirment la tendance plus nettement encore.  

    * Sur ce sujet, nous recommandons la lecture d’un livre ancien instructif et toujours parfaitement pertinent, Survol de l’Histoire de l’Europe de René Sédillot, Fayard - Les Grandes Études Historiques, 1967.

    Retrouvez l'ensemble de ces chroniques en cliquant sur le lien suivant ... 

    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Cinéma • L’Apparition

     

    Par Guilhem de Tarlé 

    L’Apparition, un drame de Xavier Giannoli, avec Vincent Lindon, Galatea Bellugi, Patrick d’Assumçao, Anatole Taubman et Elina Löwensohn. 

    Un très bon film, malheureusement un peu compliqué dans lequel 3 histoires se superposent.

    L’atmosphère du lieu de l’apparition, avec les pèlerins et les Marchands du Temple, est admirablement décrite… on s’y croit et, précisément, c’est le problème de la Foi qui est clairement posé : s’il y avait des preuves de l’existence de Dieu, l’Homme n’aurait plus la liberté de croire (ou de ne pas croire)…

    Ainsi, il ne peut pas y avoir non plus de preuves indiscutables de la réalité des apparitions… mais seulement un faisceau de présomptions.

    Comme le dit très bien Anton – davantage « évangéliste » que catholique, et surtout « grossiste » du Temple – c’est la foule des pèlerins qui donne à ces présomptions leur consistance et finalement influence la décision de l’Église. A ce jour, une commission d’enquête continue de travailler sur les « apparitions » de Medjugorge qui remontent à 1981.

    En aucun cas - le film le précise clairement - la « reconnaissance » ou plutôt « l’acceptation » de ces « apparitions » (Lourdes, Fatima, l’Île Bouchard, etc.)  comme du « linceul de Turin » ou la « Tunique d’Agenteuil » ne constituent des dogmes ; elles laissent aux catholiques la liberté d’y croire ou non, à la réserve près que les pèlerinages de papes à Lourdes ou à Fatima donnent à ces deux sanctuaires une place privilégiée dans la dévotion des fidèles.

    De même, on n’est pas obligé de croire aux miracles, même si l’on peut s’interroger sur la concomitance entre la sortie de ce film et la reconnaissance d’une nouvelle guérison « surnaturelle » à Lourdes. 

    Les voies de Dieu sont impénétrables, et ce film arrive à bon escient pour  « interpeller » - comme on dit – notre société française matérialiste d’aujourd’hui, et finalement offrir un chemin possible de conversion.   

    PS : Je vous propose mon blog  Je ciné mate avec déjà une quarantaine de films. Vous pouvez vous y abonner (en bas à droite) pour recevoir automatiquement les mises à jour et surtout y retrouver d’anciennes notices grâce au bouton Recherche (je continuerai de le compléter progressivement, à votre demande, de mes « critiques » 2016 et 2017)Merci, outre vos commentaires éventuels, de m’indiquer les difficultés que vous rencontrez, les corrections nécessaires ou les améliorations à apporter à ce blog.   https://jecinemat.wordpress.com

  • Famille de France • Les événements et les activités du prince Jean autour de Pâques

    Le régiment du Prince Jean lors du tir escadron à Arras 1992

     

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    Pêle-mêle

    Plusieurs événements et activités ont occupé notre agenda autour de Pâques.

    Je suis allé rencontrer le 4ème Régiment de Chasseurs, dont je suis le parrain, dans ses quartiers de l’est parisien alors qu’il était déployé pour l’opération Sentinelle. Puis des membres de l’association ANORABC, qui regroupe les anciens officiers de cavalerie passés à Saumur, sont venus nous rendre visite à Dreux à l’occasion de leur sortie annuelle.

    Cette visite a été suivie par celle d’une centaine d’élèves du Lycée Paul et Marie Curie de Dreux, dans le cadre du programme « La Nation en Partage » mené par la ville. Ces visites sont le cœur de l’action que nous menons au sein de Gens de France dont l’objet est de faire connaître l’histoire de France par la découverte de hauts lieux de notre patrimoine.

    Puis nous sommes partis pour Vienne où nous avons passé les fêtes de Pâques en famille. L’occasion de souffler un peu et de recharger les accus après un hiver difficile. Ce pays nous aide à mieux comprendre l’esprit de l’Europe centrale tel qu’il a été façonné par les Habsbourg et qui est encore manifeste.

    3-Recherche-à-lInstitut-Jérôme-Lejeune-300x133.jpgJe suis ensuite rentré à Paris pour assister à mon premier conseil d’administration de l’Institut Jérôme Lejeune. Cet institut scientifique travaille sur la trisomie 21 par la recherche, la consultation et la formation. (Photo ci-contre : Recherche à l'Institut Jérôme Lejeune)

    Philomena et les enfants m’ont ensuite rejoint pour les Naturalies qui avaient lieu en fin de semaine dernière. Cette manifestation a de nouveau attiré quelques 15 000 personnes sur deux jours.

    L’occasion d’évoquer la présence des frelons asiatiques à Dreux et des moyens à mettre en place pour piéger les reines. Elles survivent à l’hiver et sortent ensuite pour se nourrir à partir de février jusqu’à fin avril. Pour les piéger, il faut couper une bouteille de plastique en deux, retourner la partie haute et l’imbriquer dans la partie basse, y mettre ensuite un mélange de bière brune, de vin blanc (pour repousser les abeilles) et de sirop de cassis.  

    4-Quelques-frelons-asiatiques-piégés-à-Dreux-2017-300x225.jpg

    Quelques frelons asiatiques piégés à Dreux en 2017 

      

    Domaine Royal de Dreux, 17 avril 2018

    Jean de France, duc de Vendôme

     

    Le site officiel du Prince Jean de France

  • « Il n'y a jamais eu autant d'antifascistes depuis que le fascisme a disparu » ... Analyses de L'historien Frédéric Le M

     

    2293089609.14.jpgAu fil de cet entretien avec Eugénie Bastié [Figarovox, 4.05], l'historien Frédéric Le Moal, qui publie une importante Histoire du fascisme (Perrin) revient sur la définition d'un mouvement politique dont le retour fantasmé est invoqué à tort et à travers. Il établit la généalogie intellectuelle d'une doctrine qui puise ses sources dans l'imaginaire révolutionnaire. Telle est, en effet, la thèse de Frédéric Le Moal et, en tant que telle, peut-être la systématise-t-il à l'excès, encore qu'il la nuance par endroits à juste raison. Maurras a-t-il sous-estimé le caractère révolutionnaire du fascisme italien comme le pense Frédéric Le Moal ? Encore faudrait-il commencer par se demander si lui-même, comme déjà indiqué, ne le surestime pas. D'autre part, Maurras avait tout de même formulé à l'encontre des doctrines fascistes une objection de fond : « Comment ne voient-ils pas que la famille est antérieure à l'Etat ? ».  Enfin, Frédéric Le Moal signale à juste titre les sérieuses raisons de politique extérieure qui ont joué dans l'esprit de Maurras. Tenir l'Italie éloignée de l'alliance allemande était sa politique. Une politique que la France n'a pas suivie, malgré les avances répétées de Mussolini. Erreur - ou trahison - qui a coûté fort cher à la France et à la paix. Pierre Debray nous avait beaucoup intéressés naguère en publiant un article dont le titre était : « Le fascisme est passé » . Qu'il soit une forme politique du passé est le point où nous rejoignons les analyses de Frédéric Le Moal.   LFAR

     

    frédéric-le-moal-1-1024x680-740x480.jpgLe climat est à la dénonciation d'un «retour du fascisme», notamment par des groupuscules d'extrême-gauche qui s'autoproclament « antifas ». Que vous inspire cette crainte ? Le fascisme en tant que mouvement politique est-il mort ou peut-il renaître de ses cendres ?

    Si je voulais répondre par une boutade, je dirais qu'il n'y a jamais eu autant d'antifascistes depuis que le fascisme a disparu. Plus sérieusement, je considère que le fascisme est mort en tant qu'idéologie de masse, et ce pour plusieurs raisons. La première vient bien sûr des horreurs de la Seconde Guerre mondiale et du cortège de tueries auxquelles le nazisme et son comparse italien ont associé leur nom, ce qui provoque un rejet total. Ensuite le fascisme a constitué une réponse à plusieurs problématiques qui ont complètement disparu de nos jours : la crise de la modernité libérale de la fin du XIXe siècle, le problème de l'intégration des masses dans des systèmes politiques encore peu démocratiques, le cataclysme qu'a constitué la Grande Guerre (les fascistes, c'est la génération du front qui prend le pouvoir), la peur du bolchevisme et la crise de l'après-guerre. Tout cela a disparu dès 1945. Certes il existe encore des groupuscules se réclamant haut et fort du fascisme mais ce sont justement… des groupuscules ! Nous faisons face à de nouvelles problématiques, à de nouvelles contestations qui n'ont rien à voir avec celles du fascisme. Il faudrait juste faire un effort sémantique.

    Pourquoi selon vous la peur du retour du fascisme fait-elle tant recette (plus que le retour du nazisme ou du communisme) ?

    Personne aujourd'hui ne peut croire à une résurgence du nazisme et le communisme bénéficie d'une telle indulgence mémorielle qu'il n'effraye pas ou guère. Reste le fascisme et surtout l'antifascisme dont la gauche s'est emparée dès les années 1920. En outre, comment l'antifascisme pourrait-il vivre sans le fascisme ? Ce combat est un puissant instrument d'instrumentalisation politique et un formidable levier de mobilisation, encore de nos jours. Enfin, une fois l'étiquette fort pratique et facile de fasciste accolée à l'adversaire politique, plus besoin de polémiquer avec lui. Il est enfin plus facile d'insulter de fasciste un adversaire que de réfléchir à son idéologie.

    Dans votre livre « Histoire du fascisme » (Perrin) vous vous intéressez à la nature du fascisme italien. Est-il possible de donner une définition précise de ce mouvement ?

    C'est en vérité très difficile. Depuis son émergence en 1919, bien des historiens, des politologues, des philosophes ont tenté d'y voir clair dans ce véritable kaléidoscope qu'a été le fascisme, vaste mouvement recrutant à l'extrême-gauche et à l'extrême-droite. On peut pourtant tenter d'avancer quelques éléments : un mouvement révolutionnaire et donc totalitaire, qui unit socialisme et nationalisme, anticommunisme et antilibéralisme, visant à créer un homme nouveau sous la férule d'un État tout puissant pour engendrer une communauté nationale unie, purgée de ses ennemis intérieurs et militarisée, avec un programme d'expansion guerrière.

    Contrairement aux idées reçues, vous expliquez dans votre livre que loin d'être un mouvement conservateur, le fascisme porte un idéal révolutionnaire … En quoi ?

    Jamais aucun fasciste, et surtout pas le premier d'entre eux, ne s'est considéré comme un conservateur et encore moins un réactionnaire. La plupart des chefs avaient commencé leur engagement politique dans les mouvements de l'extrême-gauche socialiste, marxiste, anarchistes, etc. Et ils ne renièrent jamais ce passé. À leurs yeux, le marxisme en étant matérialiste ne correspondait pas à la soif d'idéal que porte chaque homme en lui. Le leur a été celui d'une révolution avant tout anthropologique visant à créer un homme nouveau, un guerrier patriote par élimination de l'esprit bourgeois fait de lâcheté, d'égoïsme, de goût de l'argent et de trahison. Il s'agissait, sans remettre en cause la propriété privée, de mettre fin au capitalisme libéral par un système corporatiste où l'État prendrait le contrôle de l'économie. L'exaltation de la romanité et de ses vertus guerrières, la mise en place d'un ordre moral pour différencier l'homme fasciste du bourgeois décadent, l'hygiénisme, le corporatisme, l'anticléricalisme et l'antichristianisme : autant de symptômes d'un projet de rupture avec l'ordre ancien que le grand capital, l'Église et la monarchie incarnaient. Un projet en fait issu de la modernité.

    Vous allez même jusqu'à faire du fascisme un mouvement héritier des Lumières…N'est-ce pas exagéré ?

    Vous évoquez ici un point capital qui renvoie le fascisme à sa nature révolutionnaire et à son lien avec la Révolution française. Le grand historien italien Renzo de Felice a été le premier à mettre en avant ses racines jacobines et rousseauistes. Réalité encore difficile à admettre en France et pourtant…

    Les Lumières constituent la première révolution anthropologique moderne car elle a coupé l'homme de son lien avec Dieu. Devenu de la simple matière, on peut agir sur lui, le remodeler, le rééduquer pour en faire un homme parfait. Le fascisme n'est pas un mouvement anti-Lumières pour la bonne et simple raison qu'il refuse de croire à la nature inaliénable de l'être humain qui est réduit à de la cire qu'on peut malaxer. Mussolini utilisait d'ailleurs très souvent la métaphore de l'artiste pour parler de son œuvre politique. Cette tentation démiurgique fait donc clairement du fascisme un mouvement appartenant à l'univers de la gauche révolutionnaire.

    L'héritage de la pensée de Rousseau est très clair dans le fascisme: la volonté générale et nationale qui annihile les libertés individuelles, le rôle du législateur et de l'État dans la naissance du citoyen modèle, la puissance du sentiment national transformé en amour pour la patrie qui exige le sacrifice ultime, l'union du pouvoir politique et du pouvoir religieux au bénéfice du premier - d'où l'installation d'une religion civile - la haine pour le cosmopolitisme supposé des riches.

    Le fascisme a bien des points communs avec la Révolution française dans sa phase jacobine (j'insiste sur cette nuance car les fascistes rejetaient bien sûr l'héritage libéral de 1789) jusque dans ses accents xénophobes de 1793, le soutien de la petite bourgeoisie, l'association de la nation et de la révolution introduit en Italie par Bonaparte et exaltée par le Risorgimento. S'il existe une cohérence dans le fascisme, c'est bien cet héritage. Juste un exemple éclairant : deux régimes ont introduit un changement de calendrier: la Convention et l'Italie fasciste !

    On sous-estime souvent le fascisme italien, en faisant un totalitarisme d'opérette, moins sanglant que le nazisme. Doit-on le considérer comme un véritable totalitarisme ?

    Sa nature totalitaire a été longtemps niée, notamment par Hannah Arendt alors que le mot est né en Italie dans les années 1920 ! Les travaux de Renzo de Felice et surtout d'Emilio Gentile l'ont mise en pleine lumière. Totalitaire parce que révolutionnaire, le lien de cause à effet est fondamental. Le régime mit en place des structures d'encadrement politique, notamment de la jeunesse car, selon Mussolini, c'était à l'État et non à la famille d'éduquer les enfants. Il le dit en 1929: « Dire que l'instruction revient à la famille, c'est dire une chose qui est hors de la réalité contemporaine. La famille moderne, assaillie par les nécessités d'ordre économique, accrochée chaque jour à la lutte pour la vie, ne peut instruire personne. Seul l'État, avec ses moyens en tout genre, peut assumer cette tâche.» Difficile ne pas y voir une continuité depuis les Lumières et les Jacobins dans la volonté de modeler les esprits par l'éducation étatique.

    Pour autant, je le qualifie de totalitarisme de basse intensité car le niveau de terreur est très faible, l'emprise sur le société relative et les contre-pouvoirs nombreux : le roi, les évêques et le pape, les industriels du nord. Or, il existe aujourd'hui une tendance à aggraver les aspects violents du fascisme. Au rythme où vont les choses ils dépasseront bientôt ceux du Troisième Reich… Incontestablement ils ont existé et ce dès la sanglante épopée squadriste. Et je ne parle pas de l'effroyable époque de la République Sociale de Salò où le fascisme républicain, libéré de ses entraves, s'est déchaîné y compris contre son propre peuple. Mais on ne trouvera ni d'Auschwitz ni de Goulag en Italie.

    On parle beaucoup en ce moment du retour de Maurras, dont on commémore le 150e anniversaire. En quoi le fascisme italien se distingue-t-il de la tradition de l'Action française ?

    Maurras ne cachait pas son admiration pour le régime fasciste, autoritaire, nationaliste, évoluant dans un cadre monarchique, bien qu'il fût l'expression d'un nationalisme d'expansion, agressif, conquérant, ce que n'était pas l'Action française. De surcroît, la latinité pouvait être un élément de cohésion entre les deux pays contre l'Allemagne. Maurras a donc été un partisan convaincu de l'alliance franco-italienne contre le Reich hitlérien. J'ajouterai qu'il avait compris le danger totalitaire à l'œuvre derrière la restauration de l'État ce qui ne manquait pas de l'inquiéter. Mais, à mon avis, il en sous-estimait le caractère révolutionnaire.   

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    Frédéric Le Moal, docteur en histoire (Paris IV-Sorbonne), professeur au lycée militaire de Saint-Cyr et à l'institut Albert-le-Grand. Il publie « Histoire du fascisme » (Perrin, 421 p, 23 €)

    Propos recueillis par Eugénie Bastié

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    Eugénie Bastié

    Auteur, - Journaliste Débats et opinions

  • Cinéma • La Promesse

     

    Par Guilhem de Tarlé

    La Promesse, un film hispano-américain de Terry George, avec Oscar Isaac (Michael, étudiant arménien), Christian Bale (journaliste américain), Charlotte Le Bon (Ana, la compagne du journaliste), Angela Sarafyan (la femme de Michael) et Jean Reno (l’Amiral Fournet – alias le vice-amiral Louis Dartige du Fournet, commandant la 3ème escadre de Méditerranée sur la Jeanne d’Arc)

     

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    Je vous promets un bon film, et surtout un grand film sur une page d'histoire qu'on ne peut même pas oublier puisqu'on ne nous en a jamais parlé.

    « Nul n’éleva la voix dans un monde euphorique
    Tandis que croupissait un peuple dans son sang ».

    Hormis, évidemment, l’arménien Charles Aznavour, quel autre Jean Ferrat nous a « twisté les mots » dans une complainte de la shoah arménienne « pour qu'un jour les enfants sachent  qui (ils) étaient » ?

    Cette Promesse est apparemment le dixième film sur le génocide arménien . Mon épouse se souvient de La Blessure, mais personnellement je n'ai jamais eu l'occasion d'en voir... même à la télévision.

    Sans doute sommes-nous, là, confrontés effectivement à un « détail » de la guerre de quatorze : près de 2 millions d'Arméniens disparus, selon Mourre qui n'y consacre même pas un article!

    Sur fond de romance, ce long-métrage, violent, nous montre la déportation, les camps de travail, les exécutions sommaires, jusqu’au sauvetage par la Marine nationale française de 4.000 arméniens sur la plage de Ras el Mina, qui a fait précisément l’objet du film 40 days of Musa Dagh.

    Nous n'avons eu droit pourtant qu'à une seule projection au cinéma Art et Essai de Châteauroux.

    Il faut dire que l’extermination d’une ethnie chrétienne n’intéresse personne, alors que les Turcs sont nos alliés dans L'OTAN, et qu'on ne leur a toujours pas fermé définitivement la porte de l'Union européenne.

    « Ils sont tombés pour entrer dans la nuit
    Éternelle des temps au bout de leur courage
    La mort les a frappés sans demander leur âge
    Puisqu’ils étaient fautifs d’être enfants d’Arménie ».

                                                  Charles Aznavour)   

    PS : vous pouvez retrouver ce « commentaire » et plusieurs dizaines d’autres sur mon blog Je ciné mate.

  • Au cinéma, la chronique de Guilhem de Tarlé : Benedetta.

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    A l’affiche : Benedetta, un film de Paul Verhoeven, avec Virginie Efira (Benedetta Carlini), Daphne Patakia (Bartolomea), Charlotte Rampling (l’Abbesse, Mère Felicita), Lambert Wilson (le Nonce),
    « inspiré de faits réels », adaptaté du roman de Judith C. BrownSœur Benedetta, entre sainte et lesbienne, publié en France en 1987.

    guilhem de tarlé.jpgBenedetta… L’affiche m’attirait mais la « pub » du film vantait l’histoire d’une religieuse lesbienne. J’avais alors renoncé jusqu’à ce que les « faits réels » – et « quelque diable aussi me poussant » - ne m’incitent – hélas - à renoncer à mon renoncement.

    A vrai dire, comme tout âne ignorant, je n’avais jamais entendu parler de cette religieuse italienne du XVIIe siècle, Benedetta Carlini, et de son ordre des Théatines,
    et je ne suis d’ailleurs pas sûr après avoir vu ce film que cette lacune manquait à ma culture.
    S’agit-il réellement d’une « mystique » ou d’une folle, manipulatrice, habitée par le Diable ainsi que sa « complice », la novice Bartolomea ? 

    J’ai imaginé et espéré, en fait, un film qui aurait pu être passionnant sur le combat intérieur mené par une religieuse contre des assauts sataniques, et la scène des serpents m’a conforté dans cette idée. Malheureusement, ou Malencontreusement, le Mal, précisément, a pris un Malin plaisir à prendre le dessus avec sa fournée de grotesque, de violence, de porno et même de blasphématoire. 
    A aucun moment le réalisateur ne suggère le couvent en prières et ni la Mère Felicita ni le nonce ne semblent posséder une once de foi, au contraire.

    Déjà j’aurais pu ne pas voir Elle (2016) du même réalisateur, mais mon épouse est moins sévère que moi, qui n’aime pourtant pas Virginie Efira.

    PS : vous pouvez retrouver ce « commentaire » et plus de 500 autres sur mon blog Je ciné mate.  

    Pour mémoire :  palmarès des films vus au cinéma en 2020 et 2021

    Titre

    Réalisateur

    appréciation

    genre

    nationalité

    Date de sortie

    Dark Waters

    Todd Haynes

    Je recommande

    Biopic, drame

    américain

    Février 2020

    Le cas Richard Jewell

    Clint Eastwood

    Je recommande

    drame

    américain

    Février 2020

    La fille au bracelet

    Stéphane Demoustier

    Je recommande

    Drame, justice

    Français

    Février 2020

    5ème set

    Quentin Reynaud

    Un très bon film

    drame

    Français

    2021

    Cruella

    Craig Gillespie

    Une bonne soirée

    Comédie dramatique,

    américain

    2021

    Les Misérables

    Ladj Ly

    Je recommande

    Drame

    français

  • Au cinéma, la chronique de Guilhem de Tarlé : Unplanned.

    7.jpg

     

    A la télévision : Unplanned – Non planifié, un film américain de Chuck Konzelman et Cary Salomon, avec Ashley Bratcher (Abby Johnson, la directrice d’une clinique d’avortement du Planning familial), Robia Scott (Cheryl, responsable du Planning familial), et Brooks Ryan (Doug Johnson),
    d’après l’histoire vraie et le livre autobiographique éponyme d’Abby Johnson.

    guilhem de tarlé.jpgCheryl et Doug sont respectivement la supérieure hiérarchique et l’époux d’Abby Johnson.

    Merci à Vincent Bolloré

    Unplanned - Non planifié
    Ce n'était évidemment pas planifié par Marlène Schiappa, Olivier Véran ni Emmanuel Macron, que le Pass Sanitaire, en fermant les cinémas aux "Gaulois réfractaires", leur permettrait de voir à la télé un film précisément exclu des grandes chaînes de distribution.
    Vive donc le pass sanitaire, vive C8 (et vive www.sajediffusion.com) qui nous ont permis de regarder ce documentaire sur la réalité de l'avortement et du Planning dit Familial.
    1h3/4 de réinformation sur une chaîne mainstream... ça change de "Poubelle la vie" et de tous les films qui cochent maintenant obligatoirement une ou plusieurs cases de la société décomposée-recomposée dans laquelle nous vivons.

    Non, l'avortement n'est inscrit dans aucune Déclaration des Droits de l'Homme, qui affirment au contraire - et on ne cesse de nous le répéter pour nous imposer le vaccin - que "la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui".
    J'accuse Valéry Giscard d'Estaing, Jacques Chirac, Simone Veil et Jean Lecanuet, premiers coupables d'avoir légalisé en France le meurtre des enfants à naître.
    Tant que leurs successeurs, de droite comme de gauche, ne feront pas sur cette question la "repentance" alors qu’ils ont l'impudence de se frapper la poitrine sur tout autre sujet, ils auront beau faire preuve de « pédagogie » - comme ils ne cessent de le répéter à longueur d’antennes - ils ne retrouveront pas ma confiance, et certainement pas en matière de santé.

    Je suis vacciné contre ces gens-là !

    Question subsidiaire : quel est le montant des subventions (nos impôts et charges sociales) perçues par le Planning Familial ?

     

    Un long-métrage, pas tout public, qui montre la violence de ce que la novlangue nomme IVG ou IMG, mais que je recommande en replay, VOD ou DVD.  



    PS : vous pouvez retrouver ce « commentaire » et plus de 500 autres sur mon blog Je ciné mate.  
    Pour mémoire :  palmarès des films vus en salle en 2021

    Titre

    Réalisateur

    appréciation

    genre

    nationalité

    Date de sortie

    La Nuée

    Just Philippot

    bon film, mais pas recommandable

    Biopic, drame

    français

    Juin 2021

    Onoda, 10000 nuits dans la jungle

    Arthur Harari

    Un bon film

    Drame

    japonais

    Juillet 2021

    Sous le ciel d’Alice

    Chloé Mazlo

    Je recommande

    Drame

    Français

    2020

    5ème set

    Quentin Reynaud

    Un très bon film

    drame

    Français

    2021

    La fine fleur

    Pierre Pinaud

    Un bon film

    Comédie

    Français

    Juin 2021

    Cruella

    Craig Gillespie

  • Des lectures pour l’été : Le Moulin sur la Floss, de George Eliot, 1860, par Antoine de Lacoste.

    1A.jpg

    Monsieur et Madame Tulliver habitent un moulin sur une jolie rivière anglaise, la Floss. Ils ont deux enfants d’une dizaine d’années, Tom et Maggie. C’est leur que George Eliot nous raconte.

    LACOSTE.jpgTom est concret, puissant et sans pitié avec sa sœur qu’il méprise, non sans affection tout de même. Maggie est son exact contraire : rêveuse, sentimentale, aimant les livres et surtout son frère, d’un amour éperdu.

    Elle tente désespérément de se faire aimer et ses déceptions lui causent d’immenses chagrins d’enfant que personne ne remarque : « Si nous pouvions nous rappeler ces premières souffrances, ces conjectures confuses et cette conception de la vie étrangement dépourvue de perspective, qui donnaient à ces souffrances leur intensité, nous ne traiterions pas à la légère les chagrins de nos enfants. »

    Monsieur Tulliver gagne bien sa vie mais n’a pas d’instruction et veut que son fils en ait. Il envoie Tom en pension chez un pasteur afin qu’il apprenne le latin et la géométrie, ce dont le jeune garçon est bien incapable. Maggie, qui ne supporte pas son absence, vient souvent le voir et fait la connaissance du second élève de cette pension, Philipp Wakem. Il est bossu, intelligent et malheureux. Toute en bonté, Maggie l’enveloppe de sa gentillesse.

    Philipp ne l’oubliera pas et, plus tard, Maggie sera confrontée au croisement de la gentillesse et de l’amour. Ce sera d’autant plus délicat que, dans l’intervalle, le père de Philipp gagnera un procès contre M.Tulliver, ruinant la et engendrant une atmosphère étouffante si étrangère à la nature de Maggie.

    George Eliot est une romancière majeure de ce si fécond XIXe siècle anglais. Son talent est éclatant tout au long des 700 pages de ce roman. Ses analyses psychologiques sont remarquables, notamment sur l’ et il y a parfois des accents proustiens dans ses réflexions. D’ailleurs, Proust avait une passion pour Le Moulin sur la Floss et « ses mystères sublimes ».

    L’auteur s’attarde aussi longuement sur la nature. Son style semble fait pour en souligner les beautés et, pour en convaincre le lecteur, finissons par son incipit : « Une vaste plaine où la Floss, plus large, se hâte entre ses vertes rives d’aller vers la mer, tandis que la marée amoureuse se précipite à sa rencontre et l’arrête en une étreinte fougueuse. »

    Le Moulin sur la Floss Poche – 13 février 2003 de George Eliot (Auteur), Alain Jumeau (Traduction)

     

    Le blog d’Antoine de Lacoste.

     

  • L’écologie n’est pas l’apanage de la gauche, par Max-Erwann Gastineau.

    Dans cet entretien, l’essayiste Max-Erwann Gastineau explique que l’écologie peut être de droite. 

    3.jpgDémontrant les contradictions de l’écologie punitive et prenant l’exemple de l’éolienne, il dénonce la déconnection du réel des écologistes jusqu’au-boutistes ne se souciant pas des conséquences de leurs actes…

     

    Vous êtes essayiste, chroniqueur et vous contribuez notamment pour Marianne et pour Le Figaro. On vous a vu aussi dans la revue Front populaire. La campagne présidentielle se précisant, on a vu les écologistes en train de désigner le ou la candidate qui les représentera à l’élection présidentielle. On a notamment vu émerger le phénomène, Sandrine Rousseau. C’est un pur concentré de wokisme, d’écologie punitive, l’écologie dans tout ce qu’elle a de plus gauchiste.

    Quel regard portez-vous sur la candidate Sandrine Rousseau ?

     

    Je crois que vous avez déjà donné des éléments de réponse. Ce que je trouve intéressant chez Sandrine Rousseau et plus globalement chez les écologistes d’Europe Écologie Les Verts c’est qu’ils ont un point de vue cohérent, une vision philosophique du monde que nous aimons par moment railler, mais qui est un construit assez intéressant à décortiquer.

    Si les écologistes d’Europe Écologie Les Verts sont aujourd’hui dominants à gauche, c’est parce qu’ils arrivent à cocher toutes les cases qui façonnent la gauche contemporaine. Je vais essayer de définir ces trois cases assez rapidement.

    La première case définit la gauche contemporaine, c’est au fond le constructivisme. L’idée selon laquelle la société ne serait que rapport de force entre groupes sociaux et ne serait qu’un construit, l’histoire et les pesanteurs culturelles ne jouant pas. Il s’agirait simplement de déconstruire les rapports de forces présents et de faire en sorte que les minorités remplacent les dominants, pour qu’une nouvelle société soit construite. Ce constructivisme détermine depuis longtemps la gauche. Il est même le successeur de ce que Leszek Kolakowski, un grand penseur polonais appelait l’esprit révolutionnaire qui ne s’affirme en politique que sous le paradigme de la rupture entre le passé et le présent et un avenir forcément radieux qu’il s’agit simplement de construire.

    Le constructivisme est donc cette première famille de pensée que l’on retrouve chez les écologistes et qui détermine cette seconde tendance qui est le wokisme. Le wokisme vient du mot woke et désigne les personnes éveillées aux injustices envers les minorités qui seraient donc opprimées par une majorité, un homme blanc que Sandrine Rousseau désigne  en creux dans ses discours. Elle dit qu’au fond, l’humanité a été la victime de trois prédations majeures. Prédation à l’encontre du corps des noirs à travers l’esclavage qui a préfiguré le capitalisme. Prédation à l’encontre des corps de femmes qui désignerait ce machisme hétéro normé, qui depuis des siècles opprimerait les femmes.

    Et une troisième prédation à l’encontre de la nature. Ainsi coche-t-elle les cases de l’Écologie, la case féministe et la case néo anti raciste.

    Il y a une troisième famille de pensée que je perçois dans les discours de Sandrine Rousseau et des écologistes et notamment de ceux qui ont emporté les dernières municipalités dans les grandes villes qui est une sorte de libéralisme culturel. Les bases doctrinales du libéralisme sont nées suite aux guerres de religion qui ont ensanglanté l’Europe au 16e siècle. Les bases théoriques de ce libéralisme consistent à construire une société au sein de laquelle, le politique ne chercherait pas à défendre un point culturel, moral ou religieux supérieur. L’État doit se dégager du terrain culturel et s’assurer simplement de la coexistence pacifique des différences entre les individus.

    Le problème de cette théorie, c’est que dans les faits si l’État peut être neutre d’un point de vue philosophique, moral ou culturel, la société ne l’est pas. Une société, un peuple c’est une histoire et des traditions. Il s’agit dans un certain discours libéral de neutraliser culturellement la société et de faire en sorte que la société ne se détermine plus d’un point de vue culturel, mais soit simplement une entité juridique sur laquelle des individus sont titulaires de droits.

    Dans le discours sur l’immigration, on voit bien que l’Écologie politique s’inscrit dans ce paradigme culturel. Elle ne veut pas voir les individus comme étant les héritiers d’une histoire et d’une culture. Elle ne veut voir que des individus et des droits consacrés par un état droit.

     

     

    L’été dernier, vous aviez publié dans Le Figaro une tribune « Et si l’Écologie était de droite ».

    Y aurait-il une autre écologie qui ne soit pas justement teintée de constructivisme, de wokisme ou autre ?

     

    J’avais en effet publié une tribune pour essayer de réfléchir à quoi pourrait ressembler une Écologie de droite ou qui ne soit pas en tout cas préemptée par la gauche.

    Intéressons-nous factuellement à l’Écologie. Politiquement, elle nait en France que dans les années 70. Georges Pompidou crée le premier ministère de l’Environnement. Certes, dans la société la thématique écologiste environnementale commence à émerger, mais on ne peut pas dire que pour des raisons électorales, Pompidou avait intérêt à se saisir de l’enjeu environnemental. Il y a eu une prise de conscience qui est le produit d’un ancrage culturel. Pompidou est un fin lettré, un connaisseur de l’Histoire de France. Il a étudié le grec et le latin. Cet homme avait un regard sur l’homme et sur l’évolution du monde. Il voyait bien que la modernisation de l’économie et de la France dans les années 60 avait opéré un certain nombre de transformations qui risquaient de bouleverser nos modes de vie et un certain nombre d’équilibres, notamment dans une France encore très rurale. Il crée donc dans les années 70 ce ministère de l’environnement, une sorte de contre poids à travers une lettre adressée aux arbres sur le bord de la route. Je recommande d’ailleurs de lire cette très belle lettre. Il dit qu’il nous faut développer le pays, construire des routes, mais il faut faire attention que ces routes ne défigurent pas notre beau pays et que nous devons  continuer d’observer les paysages comme les marcheurs jadis observaient nos paysages.

    Ce premier acte nait à droite avec un regard sur les paysages et la nature et sur cet équilibre qu’il convient de trouver entre cette beauté du monde dont nous avons hérité et l’impératif de développement économique.

    Valéry Giscard d’Estaing poursuit l’œuvre de son prédécesseur et va avoir un bilan écologique tout à fait important. Plusieurs lois vont être votées. Pompidou avait fait une loi qui permettait de défendre nos forêts en 1973. Valéry Giscard d’Estaing va adopter plusieurs lois sur le statut notamment des animaux. Nous ne sommes pas encore sur la cause animale d’aujourd’hui, mais il y a déjà un souci pour le bien être animal qui émerge. Et plus fondamentalement, une loi qui m’a beaucoup intéressée, la loi qui sur le littoral vise à fixer des limites au développement économique. Un journaliste lui demande «  vous mettez en place une politique écologique, or l’écologie est à gauche ». Valéry Giscard d’Estaing a une phrase absolument fondamentale, à partir de laquelle nous pourrions décider toute une doctrine conservatrice sur l’Écologie. Il dit «  l’Écologie c’est d’avoir peur pour ce qui existe et c’est cela être de droite ». Ce n’est pas avoir peur du monde et donc se replier dans sa grotte parce qu’il faudrait se protéger des évolutions. Cela veut dire que des choses existent. Des choses nous ont été transmises et ces choses sont vulnérables. Elles peuvent disparaître. Elles peuvent être des paysages, une culture, un art de vivre ou une langue. Au fond ce qui est précieux est périssable. Par conséquent, nous devons en prendre soin.

    Dans les années 70 vous avez ce grand livre de Anxionnaz, Le principe responsabilité, qui appelle à sortir du paradigme du progrès, de l’idée, que pour avancer il faudrait transformer l’existant et qui invite les hommes à fixer un certain nombre de limites. Il faut des entraves librement consenties pour protéger la beauté du monde et ce que nous avons reçu en héritage.

    Je crois que le conservatisme se définit en écho à cette sensibilité que nous avons reçu de nos aïeux, que nous n’avons pas construit et que nous faisons que recevoir. Nous en avons une certaine responsabilité pour ensuite le transmettre à nos descendants.

     

     

    Que la transmission soit de la nature ou intellectuelle, elle est de droite.

     

    Je crois qu’à partir de cette idée de la transmission, de l’attachement que nous avons reçu en héritage, nous pouvons fonder une doctrine conservatrice qui englobe l’Écologie. L’Écologie est quelque part de droite, puisqu’elle est avant tout un regard critique d’un certain modernisme qui voit la nature comme une sorte de stock inépuisable de ressources que nous pourrions reprogrammer à l’infini y compris l’homme, à travers notamment tous ces procédés techniques qui demain vont amener l’utérus artificiel et qui feront que nous n’aurons plus besoin de nous associer pour perpétuer l’humanité. Nous pourrons simplement déléguer cette tâche à des machines. Nous devons veiller à notre humanité. Cette humanité ne saurait faire fi de certains équilibres naturels qui nous donnent un certain nombre de ressources pour nous alimenter ou nous vêtir et également un certain art de vivre. C’est à travers cet art de vivre et à travers un certain nombre de référents culturels que nous construisons une société, que nous vivons dans une société politique et que nous pouvons débattre de ce qu’il conviendrait de faire pour améliorer l’existant et préparer notre société à construire son avenir.

     

     

    Au nom de ces limites-là, nous avons fermé des centrales nucléaires, nous avons réouvert des centrales à charbon pour un coût écologique désastreux. Nous sommes en train de polluer tout le littoral et la campagne française d’éoliennes et l’efficacité est au bilan écologique plus que douteux. Les écologistes demandent à remplacer les voitures diesel par des voitures électriques.

    Ce qui nous arrive aujourd’hui, est-ce des limites mal comprises, de l’idéologie pure ou un déni de la réalité ?

     

    Au  nom du fait qu’il faudrait en effet changer de modèle, puisque notre modèle économique est assis sur des énergies fossiles qui ont un coût pour la planète, nous parions sur l’éolien et le solaire, technologies qui seraient parées de toutes les vertus. En diminuant la part du nucléaire pour faire monter en substitue les énergies éoliennes et solaires, nous utilisons une énergie pilotable par des énergies intermittentes qui dépendent de la météo. Si vous n’avez pas de vent, les éoliennes ne fonctionnent pas et par conséquent ne fournissent pas l’énergie nécessaire. En hiver, de fait, le solaire et l’éolien en fonction du vent ne produisent pas suffisamment d’énergie et génèrent des risques de coupures et même au-delà. Pour éviter ces coupures, la France a dû importer de l’électricité produite en Allemagne à partir de charbon. Vous avez un coût financier important pour développer des éoliennes et des panneaux solaires. Vous avez un coût industriel puisqu’il faut importer des matériaux qui ne sont pas construits en France et en plus génèrent des pollutions à l’étranger, puisqu’il faut extraire des terres rares pour produire notamment les panneaux solaires . Et vous avez un coût en termes d’indépendance énergétique.

    L’éolien est l’expression de ce que l’on disait en début d’intervention. Une certaine déconnexion volontaire des écologistes à l’endroit du réel. Ils défendent des convictions avec une cohérence idéologique. Le souci des conséquences de leur idéologie les intéresse assez peu. Si on est vraiment écologiste, la sagesse nous impose aujourd’hui de défendre le nucléaire d’autant plus que l’avenir du nucléaire pourrait se passer de déchets si on en croit les dernières évolutions technologiques qui viennent de Chine, mais sur lesquelles la France avait un certain degré d’avance avant qu’elles ne fassent demi-tour, notamment sous le quinquennat d’Emmanuel Macron. Nous allons en revenir et retrouver la voix de la sagesse.

    Cependant, il est absolument essentiel aujourd’hui de tourner le dos à ces dernières années qui ont fait croire aux Français qu’on allait pouvoir sans arrêt diminuer le nucléaire pour le remplacer par l’éolien. Nous pouvons continuer dans cette voie, mais il faudra expliquer à nos industriels et aux ménages que l’hiver risque d’être un peu plus froid que d’habitude.

     

    Max-Erwann Gastineau

    Essayiste et chroniqueur politique
  • Royaliste n°1216 (13 Septembre 2021).

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    Un nouveau numéro de “Royaliste” (numéro 1216, daté du 13 Septembre) vient de paraître.

     
    Au sommaire de ce numéro :
     
    Page 2 – Afghanistan : un désastre inévitable.
    Page 3 – Écologie : Les bobos parlent aux bobos.
    Page 4 – Recherche grand patron responsable. La quinzaine sociale
    Page 5 – Irresponsabilité pénale : la réforme impossible.
    Page 6 – Belgique : Vers la crise. Voix étrangères.
    Page 7 – Les papiers d'Abbotabad.
    Pages 8 et 9 – Agir contre les pandémies.
    Page 10 – Une Wesphalie orientale. Revue de presse.
    Page 11 – Un monde fou ?
    Page 12 – Histoire : Naissance d'une Révolution.
    Page 13 – Bruno Lafourcade : L'inspecteur Harry de la littérature. Regard sur Flaubert.
    Page 14 – Guy Courtin de Neufbourg.
    Page 15 – Le mouvement royaliste.
    Page 16 – État d'urgence climatique.
     

    Pour nous contacter : Royaliste, rédaction-administration :

    Bloc C, BAL 13 – 36,38, rue Sibuet, 75012 PARIS
     
    Téléphone : 06 43 11 36 90 

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    Bonne lecture.
    La Rédaction
  • Sur le blog ami du Courrier Royal : conférence: « Ferdinand-Philippe d’Orléans (1810-1842) - Images du prince idéal ».

    Ce jeudi 30 septembre 2021 à 12h30, l’Auditorium du Louvre à Paris, proposera une conférence intitulée « Ferdinand-Philippe d’Orléans (1810-1842). Images du prince idéal ». Cette conférence est organisée  en marge de l’exposition « Ferdinand-Philippe d’Orléans, images d’un Prince idéal » du Musée Ingres-Bourdelle à Montauban. 

    Cette conférence sera suivie de la lecture, par Adrien Goetz (de l’Académie des beaux-arts) de son uchronie « Et s’il avait régné…», récit du règne imaginaire de Ferdinand-Philippe d’Orléans sur les arts jusque vers 1880.

    Oublié aujourd’hui dans les soubresauts de l’histoire, Ferdinand-Philippe d’Orléans, héritier du trône français entre 1830 et 1842, jouissait pourtant d’un rayonnement considérable en son siècle. C’est grâce au génie d’Ingres que son élégante silhouette hante encore notre imaginaire, non sans un sentiment funeste : ce portrait est la dernière effigie pour laquelle le prince a posé, avant de mourir dans un accident. Profondément affecté par la disparition tragique de son mécène âgé de 31 ans, Ingres n’a plus peint d’autre portrait masculin par la suite.

    Prenant ce chef-d’œuvre d’Ingres comme point de départ, l’exposition propose de parcourir la vie du prince à travers ses images peintes, dessinées, gravées et sculptées, de sa modeste enfance en exil jusqu’aux somptueuses funérailles, de la propagande aux caricatures. Le parcours se concentre ensuite sur son remarquable mécénat artistique : conscient de son rôle de futur souverain, Ferdinand-Philippe d’Orléans a soutenu les meilleurs peintres et sculpteurs vivants de son temps, d’Ingres à Barye en passant par Delacroix, Scheffer et Corot. Il a formé en une décennie une collection au goût moderne, fastueux et indépendant, aujourd’hui dispersée mais à laquelle l’exposition redonne partiellement vie. Incarnation des espoirs d’une dynastie, d’une nation mais aussi de toute la communauté artistique, Ferdinand-Philippe est resté le prince idéal, que sa mort précoce a préservé des désillusions du pouvoir. Sa disparition tragique a provoqué la commande d’un nombre inédit de monuments et d’objets commémoratifs, à l’aune de la vague d’émotion ressentie.

    Les commissaires vous proposent de parcourir virtuellement l’exposition du musée Ingres-Bourdelle de Montauban, scénographiée par Silvo Crescoli. Ils seront accompagnés par Adrien Goetz, de l’Académie des Beaux-arts, qui fera la lecture de son essai uchronique commandé spécialement à l’occasion de l’exposition et publié à la fin du catalogue.

     

    Informations et inscriptions, cliquez ici

    Sources : https://le-courrier-royal.com/

    https://www.facebook.com/lecourrierroyal

  • Un jeune sur deux aurait succombé au matraquage de l’idéologie inclusive, par Jany Leroy.

    La propagande entre-t-elle dans les cerveaux comme un couteau dans une motte de beurre ? 20 Minutes a établi un contrôle technique du phénomène au travers d’un Opinionway effectué auprès des intéressés.

    7.jpgSur la base du cahier des charges inclusif et de ses dadas obsessionnels opéré par Netflix, un jeune sur deux présenterait une certaine similitude avec la motte de beurre.

    Paranoïas du racisme, homophobie, et autres « -ismes » n’ont eu aucune difficulté à pénétrer la matière encéphalique de la moitié des sujets. À la pointe du bourrage de crâne, la série Sex education de la chaîne payante américaine serait un modèle du genre.

    Pour illustrer son article, le journal publie une image extraite de ce spot de pub pour l’idéologie dominante : un garçon et une fille assis respectivement sur un bidet dans des toilettes sales. Hmmmm… De l’action, du romantisme, de la d’eau. Peut-être des cascades… Le spectateur est appâté par cet univers magique. Comme précisé par 20 Minutes, « la série est devenue le porte-drapeau des teen-shows progressistes et inclusifs ». La fonction du drapeau en des toilettes si peu entretenues laisse envisager les pires extrémités… Les héros vont-il se débrouiller avec les moyens du bord ? Le suspense est à son comble. La lutte contre les stéréotypes sévit en toutes circonstances. C’est tout le charme de la série.

    Après les convaincus de l’utilité d’un tel matraquage, arrivent les sceptiques. Ceci dit sans aucune allusion à l’univers précédent. Quoique… L’entrée en matière d’un interviewé nous ramène inexorablement sur le terrain peu glorieux du transit intestinal : « C’est chiant de devoir systématiquement mettre chaque minorité dans tous les films/séries. Netflix abuse avec ça, ça en devient ridicule. » « Chiant », le mot est lâché. « Emmerdant » eût très bien convenu également. Les partisans de cette litanie de sujets qu’ils qualifient de « sensibles » ne semblent pas avoir pris conscience de l’ennui qu’elle générait. « Du coup, c’est toujours un peu les mêmes histoires », remarque une jeune fille au cerveau encore intact.

    Dernier détail avant fermeture de ce petit coin d’inclusivité : « 77 % des femmes de 18-30 ans ont un avis positif sur l’inclusivité dans les séries contre seulement 53 % des hommes ». Les fictions Netflix produiraient-elles sur les femmes le même effet que les romans-photos à l’eau de rose des années 60-70 ? La disparition dans la désuétude de magazines tel que le sirupeux Nous deux laisse bon espoir sur le devenir de cette ambiance littéralement nauséabonde.

     

    Jany Leroy

    Source : https://www.bvoltaire.fr/

  • Éric Zemmour : « Cette autre révolution en marche »

    La « marche pour la vie » dimanche 20 janvier à Paris - Photo : Vincent Isore/IP3 /MAXPPP

    blue-wallpaper-continuing-background-wallpapers-bigest-images - Copie.jpgLes héritiers de la Manif pour tous doivent choisir leur camp. Rejoindre l'alliance des bourgeoisies libérales mondialistes - libéraux-libertaires et libéraux conservateurs - nouveau « parti de l'ordre », ou suivre la révolte des classes populaires. Le capitalisme mondialisé, est l'ennemi du Pays Réel français. D'accord avec Zemmour. (Figaro Magazine du 23.01)LFAR

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    Ils étaient nombreux. Sans doute plusieurs dizaines de milliers de personnes. Ils défilaient dans les rues de Paris.

    Mais c'était un dimanche et ils ne portaient pas de gilet jaune et ils ne cassaient rien, pas la moindre devanture de banque, ni ne guillotinaient Macron en effigie. Ils protestaient surtout contre la « PMA pour toutes », le nouveau grand projet porté par les lobbys homosexuels et la majorité présidentielle. Ils « marchaient pour la vie ». Ils étaient les derniers bataillons de la cohorte imposante quoique vaine de la Manif pour tous du printemps 2013 qui avait alors tenté d'empêcher l'instauration du mariage homosexuel. Leurs opposants les traitaient d'« homophobes » et croyaient clore le débat ainsi. Ils les traitaient aussi de « catholiques » et sans doute voulaient l'insulte encore plus infamante.

    Catholiques, la plupart l'étaient. C'était une sociologie assez particulière de classes moyennes ou supérieures. Pratiquement pas d'ouvriers ni d'employés. Beaucoup de provinciaux. De jeunes gens, aussi. Les retraités de Mai 68 voulaient voir en eux l'avenir d'une revanche culturelle de la droite réactionnaire. C'était une bourgeoisie très française tout en étant favorable à l'Europe. Des catholiques mais qui n'avaient pas franchi le Rubicon de la gauche quand ce fut à la mode dans les années 1970. Sens commun fut son bras armé idéologique et politique et rejoignit Fillon pour la présidentielle.

    Ce n'était guère étonnant. En 2013, le géographe Christophe Guilluy avait fait pertinemment remarquer que ce duel entre les socialistes et les lobbys LGBT, et la Manif pour tous était l'affrontement de catégories sociales qu'on pouvait classer toutes deux dans les « vainqueurs de la mondialisation ». Ils vivaient pour la plupart dans les métropoles. Ils n'avaient pas de souci de fin de mois. C'était un combat entre deux sortes de libéraux mondialistes, libéraux-libertaires et libéraux conservateurs.

    Ces derniers sont des opposants au « progressisme » cher à Macron, mais ne sont pas des « gilets jaunes ». Ils sont favorables à l'Europe et à la mondialisation, mais considèrent qu'on peut arrêter « la marche du progrès » aux questions sociétales. Le philosophe Jean-Claude Michéa les traite d'« idiots » qui ne comprennent pas que le libéralisme économique entraîne inexorablement le libéralisme sociétal. Que le capitalisme est une machine révolutionnaire qui détruit toutes les structures traditionnelles, la féodalité jadis, la famille aujourd'hui.

    Depuis lors, il y a eu la victoire de Macron et les « gilets jaunes ». Les héritiers de la Manif pour tous doivent choisir leur camp. Rejoindre l'alliance des bourgeoisies, nouveau « parti de l'ordre », ou suivre la révolte des classes populaires. Suivre la logique de ses intérêts économiques et y sacrifier son éthique (les progressistes feront la PMA et même la GPA pour tous!) ou « trahir sa classe » pour prendre la tête d'une rébellion populaire et nationale. Un choix vieux comme l'histoire de France. ■

  • Littérature & Spiritualité • Sous le soleil de Satan

    par Gérard Leclerc

    Bernanos et Houellebecq - et « leur fraternité » en apparence improbable - évoqués ici, mis en perspective. Mais il est aussi question de Houellebecq à propos de cinéma, dans le bel article de Pierre Builly qui suit celui-ci. Et d'une autre comparaison. Houellebecq est devenu un centre. Nous aurons à y revenir. LFAR 

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    Un très grand livre, mais complètement anachronique ... 

    J’ai reçu hier la réédition, sous la marque Folio Classique, du premier roman de Georges Bernanos Sous le soleil de Satan.

    Un très grand livre, mais complètement anachronique, du moins si l’on prend pour repères les idéologies dominantes. En pleine période de déchristianisation, que peut bien signifier l’histoire d’un petit prêtre en conflit avec le mal, non pas le mal abstrait, mais Satan en personne. Une sorte de curé d’Ars en lutte avec le « grappin ». De quoi susciter l’ironie grinçante des incrédules et des rationalistes. Mais déjà, Bernanos se moquait de ce genre d’esprits superficiels en la personne d’un Anatole France, brillant écrivain académique, représentant typique d’une certaine mentalité Troisième République.

    bernanos.jpgPrès d’un siècle plus tard, Sous le soleil de Satan n’est-il pas aussi incongru, voire incompréhensible ? Qui sait ? Si l’on se rapporte aux deux pages conclusives du dernier roman de Houellebecq, auteur bien contemporain en phase avec les mœurs du temps, on se trouve face à une poignante interrogation métaphysique, qui consonne étrangement avec Bernanos. En lisant ces deux pages, ma jeune collègue du Figaro, Eugénie Bastié a pleuré comme elle avait pleuré en lisant les dernières pages du Crime et châtiment de Dostoïevski. Il n’est pas question de Satan chez Houellebecq, mais il est présent à chaque page. Il détruit les corps et les âmes, il détruit les couples. Le romancier décrit, de façon impitoyable, le travail de destruction qui s’opère et infuse partout le goût du néant. Et pourtant, dit-il « Dieu s’occupe de nous en réalité, il pense à nous à chaque instant, et il nous donne des directives parfois très précises. » Et d’évoquer « ces élans d’amour qui affluent dans nos poitrines jusqu’à nous couper le souffle ».

    En ce sens, il y a bien une fraternité entre les deux écrivains, même si Bernanos est plus explicitement du côté de ce Christ que Houellebecq, pourtant, nomme aussi. L’un et l’autre sont des explorateurs du désespoir contemporain. Michel Crépu, dans sa belle préface, note que Bernanos, explorateur de la nuit et des ténèbres, nous ouvre à la grande aventure spirituelle du XXe siècle. Elle se poursuit aujourd’hui.  ■ 

    Gérard Leclerc
    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 10 janvier 2019.