Documents pour servir à illustrer une histoire de l'URP (64) : L'Almanach d'Action française pour l'année 1928 raconte la réunion de Barbentane de Mai 1927...
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Deux remarques importantes avant de laisser lire le compte-rendu enthousiaste qui suit (de la page 344 à la page 354 de l'Almanach) :
1. L'Action française, dans son numéro du Lundi 30 Mai 1927, relata le Rassemblement (en "Une", avec la suite sur l'intégralité des deux colonnes de gauche de la page deux). Certains passages sont identiques, forcément, mais l'Almanach ajoute de nombreux détails, informations et jugements qui ne figurent pas dans le compte-rendu du quotidien; comme, par exemple, les noms des localités constituant "la Vendée provençale", ou les noms des Maires royalistes présents, et ceux des villes qu'ils représentent : Reillanes, Mazan, Jonquerette, Jonquières, Barbentane, Graveson, Boulbon, Maillane, Mollèges, Rognonas, Vendargues, Villeveyrac, Saint-Drézéry et le Premier adjoint de Monteux; et il propose huit photos, dont une "double" : celle du Commandant Dromard, organisateur/fondateur de l'Union Royaliste Provençale, et d'André Vincent... :
2. L'Almanach insiste beaucoup sur "l'affaire Daudet" : il s'agit évidemment de l'assassinat du petit Philippe, 14 ans, premier enfant des Daudet, par la police politique du Régime, alliée aux anarchistes. Ces élans de sympathie et d'affection envers "ce père douloureux el meurtri" sont plus nombreux dans le compte-rendu de l'Almanach que dans celui du quotidien...
Les photos sont malheureusement de mauvaise qualité; nous en mettons trois, cependant, pour l'instant, et malgré tout, en plus de la "double (Dromard/Vincent); celle présentée ci-dessous n'est pas fameuse non plus : elle est parue dans Le Petit Marseillais, le 31 Mai 1927 :
344 ALMANACH D'ACTION FRANCAISE
(ndlr : une photo de Daudet, debout à la Tribune, remplit la totalité de cette page 344, entre la ligne ci-dessus et la ligne ci-dessous; elle ne "rend" pas du tout...°
LÉON DAUDET A LA TRIBUNE
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345 DANS LA LUMIÈRE PROVENÇALE...
L'ACTION FRANÇAISE A BARBENTANE
par F. DESVIGNES - Clichés Mougins
Barbentane ! Un village aux maisons blanches dont les
toits rouges s'étalent ainsi que d'énormes coquelicots parmi
la verdure des cyprès. Une fontaine qui pleure ou qui
chante sur une placette se cachant sous l'ombre grecque
des platanes. Une rue interminable servant de déversoir
central à une quantité de "traverses" lumineuses et fleuries
montant vers l'église coquette et la vieille tour bâtie par
"Mounsen Grimau", évêque d'Avignon, dont on admire
encore la mître sculptée sur les vieilles pierres roussies par
le soleil...
Barbentane, c'est aussi le cœur de la Vendée provençale.
Les localités qui l'entourent apparaissent comme les grains
divins d'un rosaire : le rosaire de la Fidélité catholique et
royaliste. Arles, Montmajour, Fontvieille, Les Baux, Saint-
Remy, Maussane, Mouriès, Aureille, La Roque·d'Anthéron,
Beaucaire, Graveson, Maillane, Chateaurenard, Rognonas,
Noves, Cabannes, Saint·Andiol, constituent quelques-uns
des grains du chapelet magnifique.
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346 ALMANACH D'ACTION FRANÇAISE
(ndlr : pas de photo dans cette page)
C'est dans ce cadre merveilleux de la Foi et de la Tradition que, le dimanche 29 mai, la Fédération des sections
d'Action Française de Provence conviait les populations
méridionales à venir entendre André Vincent, délégué
régional de Monseigneur le Duc de Guise, Paul Rohain,
l'amiral Schwerer, Bernard de Vesins et Léon Daudet.
AVANT LA RÉUNION
Il convient tout d'abord de rendre un hommage mérité
aux organisateurs de la splendide manifestation. Au premier
rang, il faut citer le commandant Dromard, président de la
Fédération provençale; Me Amic, président de la section
d'Avignon; Régis d'Oléon, l'actif et distingué maire de'
Rognonas; le commandant Olivier, de la section de Toulon;
Léon Charlet, président de la Fédération des commissaires
d'Action Française; Duneau et Lavalade, dont lés activités
conjuguées firent face admirablement à l'ingrate et obscure
besogne de préparation; de Gerin-Ricard, président des
Étudiants d'Action Française de Marseille; Henri Martin, etc., etc...
Quant au service d'ordre, placé sous la compétente direction de Lucien Lacour et de Pierre Lecœur, qu'assistaient
Léon Charlet, André Guignard, Philippe Roulland, Darnand,
de La Roque, de La Rochefordière, Riasse, Lamy, Bergeaud,
de Caumont, commandant Ollivier, Mœttinger, Aitelli,
Duneau, etc., il suffira de dire qu'il a recueilli l'admiration
de tous, amis ct adversaires. A Barbentane comme à Paris,
l'ordre, la méthode et la discipline apparurent bien comme
les qualités essentielles des troupes d'Action Française.
Indiquons encore à titre documentaire que la Provence avait
fourni neuf cents commissaires.
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L'ACTION FRANÇAISE À BARBENTANE 347
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Dès le matin, en Avignon, les trains déversaient d'importants contingents d'auditeurs ou de commissaires. Le siège
de la section locale connut une affluence aussi persistante
qu'énorme. Le soleil est radieux qu'assombriront à peine
durant quelques instants des nuages fugaces et chagrins.
Nous allons accomplir une randonnée automobile à travers
la campagne provençale. Sur toutes les routes, nous croisons des véhicules de tous genres.
Aux , alentours immédiats de Barbentane a été installé le
service spécial chargé de canaliser et de diriger sur les
divers garages les voitures et autres engins de locomotion
qui affluent par centaines.
Arrivé à Barbentane dans la matinée, Léon Daudet y fut reçu par les acclamations de la population en fête. Accompagné de M. Lautier, maire, et de M. Daire, président de la
section locale, l'illustre patriote se rendit à l'église où il
entendit la messe.
A l'issue de l'office, vers 11 heures, devant toute la population du village et les milliers d'auditeurs déjà présents
pour le meeting, eut lieu une touchante cérémonie. Sur la
place aux platanes centenaires, tandis que flottait sur les
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348 ALMANACH D'ACTION FRANÇAISE
têtes le drapeau blanc fleurdelysé de la section de Barbentane, relique sans prix transmise en mains en mains pieuses de génération en génération, des jeunes filles offrirent à Léon Daudet, avec de splendides gerbes fleuries, une palme de bronze où se lisaient ces simples mots : "Les royalistes de Barbentane à Philippe Daudet."
En termes singulièrement émouvants, le père douloureux remercia. Des larmes coulaient des yeux du rude lutteur quand il parla de son fils, petit martyr assassiné à s a place. La minute est d'une grandiose et tragique beauté. Mais soudain, en rafales puissantes et mille fois répétées, montent vers les feuillages ombrageant la placette les cris vengeurs : "Vive le Roi ! Vive l'Action française ! Vive Daudet !" Le maire de Barbentane, M. Lautier, étreint longuement Léon Daudet, ainsi que M. Daire. La foule française a commencé la révision d'un odieux arrêt de justice.
Puis, tandis que l'auto du chef royaliste le ramène en
Avignon, l'auditoire se disperse. Des groupes, envahissent les terrasses des cafés et des restaurants. D'autres, les plus nombreux, vont faire la dînette dans les champs et les prés proches. Et, souriant à tant d'estrambord, René Benjamin passe, les yeux vifs et fureteurs derrière le rempart du lorgnon.
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L'ACTION FRANÇAISE À BARBENTANE 349
SUR LE TERRAIN
Certes, la Fédération Provençale des sections d'Action française escomptait un succès. Ce fut un triomphe qui l'attendait à Barbentane. La réunion est annoncée pour 3 heures. Dès midi 30, il devient très difficile de circuler dans la longue et large avenue traversant le village, tant
est compacte la foule se dirigeant vers le lieu du meeting.
Les gendarmes qu'on rencontrait sur toutes les routes, le
matin, en sombres bouquets d'un bleu presque de roi, sont
invisibles. Cette absence, est-il utile de le dire, n'enlève rien
à l'ordre et au calme dans lesquels sc meut l'immense torrent
humain. L'animation devient de plus en plus intense.
De minute en minute, les délégations arrivent, quelques
unes précédées de leur drapeau. Il en est venu du Gard, de
l'Hérault, des Alpes-Maritimes, de Vaucluse, du Var, de
toute la Provence et du Languedoc maritimes.
Une joyeuse rumeur plane sur l'interminable cortège qu'on
aperçoit s'étendant plus de deux kilomètres, des fenêtres de
la mairie. Des sections défilent en chantant la "Royale". Les
applaudissements crépitent au passage des étendard, et des
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350 ALMANACH D'ACTION FRANÇAISE
(ndlr : pas de photo dans cette page)
fanions émergeant de la houle fantastique des têtes. Voici des délégués de Grenoble, Chambéry, Lyon, Vienne, Yssingeaux, Le Puy, etc. .
Pendant trois heures, le gigantesque flot ne cessera de
déferler vers le pré immense mis à la disposition des organisateurs par M. le marquis de Barbentane. Sur le terrain
situé en contre-bas de la route d'Aramon, une tribune a été
dressée dont les piliers supportent des gerbes de fleurs de
lys naturelles. Du haut de cette tribune, le regard découvre
la formidable marée humaine aux vagues toujours nouvelles. Un clair soleil ajoute encore à la gaîté ambiante; les
drapeaux frissonnent, sous la caresse d'un vent léger.
Tout là-bas, le regard découvre la procession sans fin des
groupes d'auditeurs dévalant vers le terrain. Jullian, le
ténor du Roi, en attendant l'ouverture du meeting, chante
au microphone des chants royalistes dont les refrains sont
repris par des milliers de voix.
Sur la tribune prennent, place les représentants du Prince :
MM. de Fraysse de Monval, F. Rocher. (Grenoble); marquis
de Forton, président du Comité royaliste de Montpellier;
de Bernis, Eugène Magne, anciens députés; Henri Lacour.
On remarque également la présence de divers maires royalistes. Citons parmi eux M. le vicomte de Salve, maire de
Reillane;, Chareyre, maire de Mazan; Guintrand, maire de
Jonquerette; Farjon, maire de Jonquières; Lautier, maire de
Barbentane; Petit, maire de Graveson; Barberin, maire de
Boulbon; Gauthier, maire de Maillane; le maire de
Mollèges; de Régis d'Oléon, maire de Rognonas; Martin Dupuy, maire de Villeveyrac; Jean Claret, maire de,
Vendargues; Berger, maire de Saint-Drézéry; le premier
adjoint de Monteux; M. Daire, président de la section d'A, F.
de Barbentane et Mlle de Ribbes, présidente des Jeunes Filles
royalistes. Citons encore parmi les présidents de la Fédération : MM. Louis Dromard, président de la Fédération
provençale; Amic, président de la Fédération du Vaucluse;
Richaud, président de la Fédération du Var; Ferlin, président de la Fédération des Alpes.Maritimes; Jean de Saporta,
président de la Fédération de Haute-Provence; commandant
de Portalon, président de la Fédération de l'Hérault; de
Campeau, président de la Section de Montpellier, ainsi que
les secrétaires régionaux; Jean Austin Brunel, secrétaire de
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L'ACTION FRANÇAISE À BARBENTANE 351
la 10ème zone bis; Louis Sentupéry, secrétaire de la 10ème zone;
Louis Jasseron, secrétaire de la 8ème zone.
Tandis que les notabilités occupent les sièges qui leur ont été réservés, la foule ne cesse d'affluer.
Un journaliste républicain de Marseille confie à l'oreille du signataire de ces lignes : "Je n'ai jamais vu un aussi fantastique auditoire, ni pareil "estrambord". Des divers contrôles effectués, il résulte que plus de
(ndlr : ici, une photo de l'Amiral Schwerer à la tribune en train de parler; elle ne "rend pas du tout non plus...)
30.000 auditeurs sont massés dans .. le champ du marquis de Barbentane.
LA RÉUNION
Mais soudain, formidable et ininterrompue, une clameur s'élève. C'est Daudet qui arrive, accompagné d'André
Vincent, délégué de Monseigneur le Duc de Guise, et du
commandant Dromard, président de la Fédération provençale des sections d'A. F., Bernard de Vesins, l'amiral
Schwerer el Paul Robain.
De la tribune la vision est véritablement féérique de ces
milliers de cannes, de chapeaux et de mouchoirs s'agitant
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352 ALMANACH D'ACTION FRANÇAISE
aux extrémités des bras tendus, cependant que, sans répit,
durant de longues minutes, trente mille voix crient: "Vive
le Roi ! Vive Daudet ! Vive Maurras !". Les drapeaux
s'inclinent et s'agitent en des gestes de salut. Puis, lorsque
Léon Daudet apparaît debout à la tribune, les ovations se
font plus délirantes encore. C'est toute la Provence qui crie
au père de Philippe sa foi monarchique et son appel à la
justice royale.
(ndlr : ici, une photo de la foule, qui ne rend rien...)
Quand les acclamations furent calmées, André Vincent prit la parole. Après lui Paul-Robain, l'amiral Schwerer,
Bernard de Vesins se succédèrenl à la tribune.
Quand Léon Daudet se lève pour prononce son discours,
les interminables ovalions qui accueillent son arrivée
reprennent de plus belle. Toute l'immense multitude est
debout, et, de nouveau, cannes et chapeaux s'agitent. Cela
dure plusieurs minutes. Enfin, Daudet peut parler.
Ceux qui n'ont pas assisté à la formidable ovation qui
salua la vibrante harangue de Léon Daudet ignoreront
toujours ce qu'est l'enthousiasme. Nous ne trouvons pas les
mots qu'il faudrait pour la dépeindre. Quand le merveilleux
tribun s'écrie : Je veux voir, avant de mourir, le retour de
la Justice par le Roi, c'est un véritable délire sacré qui tend
les visages et les bras vers ce père douloureux el meurtri.
De même, quand Daudet donna l'accolade à Eugène Magne,
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DANS LA LUMIÈRE PROVENÇALE 353
un tonnerre d'acclamations retentit à l'adresse des deux
hommes. Le directeur de L'Action Française accompagne son
geste de cette réflexion : J'ai l'habitude d'embrasser Magne
en public. Ça me lait du bien et ça lait plaisir à tous les
gens justes.
L'hilarité est violemment déchaînée quand l'orateur,
faisant allusion aux élus de la Chambre, dont il fil partie,
déclare : Ils étaient 450 députés de droite qui voulaient avoir l'air d'être des députés de gauche.
Jamais le merveilleux tribun n'empoigna avec plus de
maîtrise son formidable auditoire.
Une clameur vibrante s'éleva, cependant que, de toutes parts, fusait ce double cri: "Vive le Roi ! À bas la République !"
André Vincent fil alors acclamer l'ordre du jour qui suit :
Trente mille royalistes, réunis à Barbentane sous la présidence de M. André Vincent, délégué de Monseigneur le Duc
de Guise, après avoir entendu Paul Robain, l'amiral
Schwerer, Bernard de Vesins, Léon Daudet, adressent à
Monseigneur le Duc de Guise l'hommage de leur entière fidélité et, considérant que la France ne peut vivre plus
longtemps en l'absence de son protecteur et de son Roi,
jurent de hâter le retour sur le trône de France de Jean III
ct cela par tous les moyens.
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354 ALMANACH D'ACTION FRANÇAISE
(ndlr : pas de photo dans cette dernière page du compte-rendu)
a
Entre deux haies de commissaires; Léon Daudet passe sous
une voûte de cannes entrecroisées pour rejoindre sa voiture.
Le formidable ... armement fut même dénoncé quelques jours
après par un organe socialiste. de Marseille. Cette dénonciation a bien fait rire d'ailleurs les braves Provençaux.
Pendant plus de deux heures, l'immense foule recommence
en sens inverse la lente procession du matin à travers les
rues de Barbentane. Les sections. défilent au pas, drapeaux
au vent, acclamées par les spectateurs. Le même ordre méticuleux qui présida à l'arrivée des 30.000 auditeurs se
retrouva au départ. La belle cité royaliste est en fête. Des
chants montent dans le crépuscule. Une farandole s'organise
qu'animent les rires joyeux des belles Provençales... .
Puis. tandis que peu à peu s'avance le départ, nombreux
sont ceux qui pensent de la journée de Barbentane qu'elle
est mieux encore qu'une manifestation de la fidélité royaliste. C'est une étape dans l'action.
F. DESVIGNES.