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Feuilleton : "Qui n 'a pas lutté n'a pas vécu"... : Léon Daudet ! (47)

 

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 (retrouvez l'intégralité des textes et documents de ce sujet, sous sa forme de Feuilleton ou bien sous sa forme d'Album)

Aujourd'hui : Deux inséparables : Forain... et Caran d'Ache...

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ndlr : ce sujet a été réalisé à partir d'extraits tirés des dix livres de souvenirs suivants de Léon Daudet : Paris vécu (rive droite), Paris vécu (rive gauche), Député de Paris, Fantômes et vivants, Devant la douleur, Au temps de Judas, l'Entre-deux guerres, Salons et Journaux, La pluie de sang, Vers le Roi...

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Jean-Louis Forain (1852-1931), peintre, caricaturiste et graveur, par Nadar...

 

De "L'Entre-Deux-Guerres", pages 83/84/85 :

"..."Est-il bon, est-il méchant ?" disait Diderot, songeant à lui. Cette question, posée quant à Forain, appelle comme réponse : "Les deux à la fois", ou : "Il dessine bien."
L'homme, son trait, sa voix, ses légendes, forment un ensemble magnifique et génial, donnent le frisson.
Il est petit, concentré, pétri de feu, de douleur et de comique. A peine a-t-il distingué qu'il formule.
Son oeil, aussi prompt que celui du grand Léonard, court aux mobiles moraux des mouvements, aux vertus et aux tares qui actionnent les êtres.
Dans les gens, dans les oeuvres, dans les idées, dans les actions, il saisit l'essentiel et il s'y attache, avec une déconcertante soudaineté.
Ce sont ses dons, mais il s'applique, et son labeur est plus fort que son énervement.
Il grince, il déchire, il invente, il griffe, il mord; puis il se reprend, il élimine, il simplifie et, sans apprivoiser son dragon, il lui donne la belle ligne classique.
On peut l'aimer ou le détester. Moi, je l'aime, malgré toutes les mauvaises blagues qu'il a débitées ou débitera sur mon compte et dont on ne peut lui tenir rigueur, parce qu'elles font partie de son jeu sublime et féroce.
Je l'aime pour sa surabondance de vie, d'une vie qui coule depuis soixante ans, sans jamais épuiser son réservoir, en reflétant et multipliant la lumière.
Je l'aime pour son rire pathétique, qui vaut la trompette de Jéricho., pour les "hein ! hein !", les grondements, les grincements, les regards furibonds dont il poursuit votre assentiment, votre acquiescement à ses boutades explosives.
Je l'aime pour sa naïveté, qui pousse parfois sur son expérience amère, telle une fleur sur un talus du vieux Montmartre.
Je l'aime enfin parce qu'il est de Pantruche, la seule ville du monde où l'on dise leur fait aux crétins nantis, où les avantages extérieurs n'en imposent pas.
Le plaisir de rencontrer Forain, c'est qu'il est, à lui tout seul, une délivrance..."

 

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Portrait d’Emmanuel Poiré, dit Caran d’Ache (Moscou, 6 novembre 1858 - Paris, 26 février 1909), par Nadar.
Le grand-père d'Emmanuel Poiré, venu en Russie avec l'armée napoléonienne, y était resté; son petit-fils fils n'avait donc pas la nationalité française lorsque, à vingt ans, il décida de retourner dans la terre de ses ancêtres, où il mit son talent de dessinateur au service de son nationalisme aussi ardent qu'intransigeant...
Son pseudonyme, Caran d'Ache, vient du mot russe "karandach", qui signifie "crayon"...

 

De "L'Entre-Deux-Guerres", pages 89/90 :

"... Il n'était pas de taquineries dont Forain ne criblât Caran, lequel supportait tout avec placidité, se contentant de murmurer de temps à autre : "Peux-tu êtl'embêtant, tout de même, mon pauvl'ami."
Mais il admirait son tourmenteur et ses inventiosn verbales l'enchantaient.
Puis, tout à coup, laissant le frivole, ces deux grands artistes s'entretenaient de leur métier et s'élevaient, Forain par ses formules, Caran par ses constatations aigües, jusqu'aux sommets de l'art.
J'ai gardé le souvenir d'une de ces causeries, sous les étoiles, au bord de la mer, où Forain fut étourdissant.
Mais comment fixer l'étincelle, le jet, la déflagration de cette intelligence universelle ?..."

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