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Feuilleton : Chateaubriand, "l'enchanteur" royaliste... (2)

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Anne-Louis Girodet, Portrait de Chateaubriand,
Saint-Malo, musée d’Histoire de la Ville et du Pays Malouin.

(retrouvez l'intégralité des textes et documents de cette visite, sous sa forme de Feuilleton ou bien sous sa forme d'Album)

Aujourd'hui : enfance à Combourg, et souvenirs...

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1. Souvenir du pays de France, Romance

Combien j'ai douce souvenance
Du joli lieu de ma naissance !
Ma soeur, qu'ils étaient beaux les jours
De France !
O mon pays, sois mes amours
Toujours !

Te souvient-il que notre mère,
Au foyer de notre chaumière,
Nous pressait sur son coeur joyeux,
Ma chère ?
Et nous baisions ses blancs cheveux
Tous deux.

Ma soeur, te souvient-il encore
Du château que baignait la Dore ;
Et de cette tant vieille tour
Du Maure,
Où l'airain sonnait le retour
Du jour ?

Te souvient-il du lac tranquille
Qu'effleurait l'hirondelle agile,
Du vent qui courbait le roseau
Mobile,
Et du soleil couchant sur l'eau,
Si beau ?

Oh ! qui me rendra mon Hélène,
Et ma montagne et le grand chêne ?
Leur souvenir fait tous les jours
Ma peine :
Mon pays sera mes amours
Toujours !

 

2. Combourg (1/2) : Description du château...

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"...En sortant de l'obscurité du bois, nous franchîmes une avant-cour plantée de noyers, attenante au jardin et à la maison du régisseur; de là nous débouchâmes par une porte bâtie dans une cour de gazon, appelée la Cour verte. À droite étaient de longues écuries et un bouquet de marronniers. Au fond de la cour, dont le terrain s'élevait insensiblement, le château se montrait entre deux groupes d'arbres. Sa triste et sévère façade présentait une courtine portant une galerie à mâchicoulis, denticulée et couverte. Cette courtine liait ensemble deux tours inégales en âge, en matériaux, en hauteur et en grosseur, lesquelles tours se terminaient par des créneaux surmontés d'un toit pointu, comme un bonnet posé sur une couronne gothique.

Quelques fenêtres grillées apparaissaient çà et là sur la nudité des murs. Un large perron, raide et droit, de vingt-deux marches, sans rampes, sans garde-fou, remplaçait sur les fossés comblés l'ancien pont-levis; il atteignait la porte du château, percée au milieu de la courtine. Au-dessus de cette porte on voyait les armes des seigneurs de Combourg, et les taillades à travers lesquelles sortaient jadis les bras et les chaînes du pont-levis...." (Mémoires d'Outre-Tombe, La Pléiade, Tome I, pages 43/44.)

 

3. Combourg (2/2): Mes joies de l'automne.

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"Plus la saison était triste, plus elle était en rapport avec moi: le temps des frimas, en rendant les communications moins faciles, isole les habitants des campagnes: on se sent mieux à l'abri des hommes.

Un caractère moral s'attache aux scènes de l'automne: ces feuilles qui tombent comme nos ans, ces fleurs qui se fanent comme nos heures, ces nuages qui fuient comme nos illusions, cette lumière qui s'affaiblit comme notre intelligence, ce soleil qui se refroidit comme nos amours, ces fleuves qui se glacent comme notre vie, ont des rapports secrets avec nos destinées.

Je voyais avec un plaisir indicible le retour de la saison des tempêtes, le passage des cygnes et des ramiers, le rassemblement des corneilles dans la prairie de l'étang, et leur perchée à l'ombre de la nuit sur les plus hauts chênes du grand Mail. Lorsque le soir élevait une vapeur bleuâtre au carrefour des forêts, que les complaintes ou les lais du vent gémissaient dans les mousses flétries, j'entrais en pleine possession des sympathies de ma nature. Rencontrais-je quelque laboureur au bout d'un guéret ? je m'arrêtais pour regarder cet homme germé à l'ombre des épis parmi lesquels il devait être moissonné, et qui retournant la terre de sa tombe avec le soc de sa charrue, mêlait ses sueurs brûlantes aux pluies glacées de l'automne: le sillon qu'il creusait était le monument destiné à lui survivre.....

...Le soir, je m'embarquais sur l'étang, conduisant seul mon bateau au milieu des joncs et des larges feuilles flottantes du nénuphar. Là, se réunissaient les hirondelles prêtes à quitter nos climats. Je ne perdais pas un seul de leur gazouillis: Tavernier enfant était moins attentif aux récits d'un voyageur. Elles se jouaient sur l'eau au tomber du soleil, poursuivaient les insectes, s'élançaient ensemble dans les airs, comme pour éprouver leurs ailes, se rabattaient à la surface du lac, puis se venaient suspendre aux roseaux que leur poids courbait à peine, et qu'elles remplissaient de leur ramage confus." (Mémoires d'Outre-Tombe, La Pléiade, Tome I, pages 96/97.)

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