Bien-être animal : les agriculteurs face à l’ultra-violence des antispécistes, par Iris Bridier.
Il y a quelque jours, Emmanuel Macron courtisait les chasseurs. Ce lundi 4 octobre, il visite un refuge de la SPA pour défendre la cause animale et flatter les militants du Parti animaliste. Le Président du « en même temps » devrait donc logiquement encenser les éleveurs lors du Sommet de l’élevage qui se tiendra, du 5 au 8 octobre, à Clermont-Ferrand.
Car eux non plus ne sont pas en reste concernant les maltraitances… Aspersions de sang, incendies d’abattoir ou de ferme, saccages de boucheries et de poissonnerie, vitrines caillassées, graffitis… La violence des antispécistes est sans limite au nom du bien-être animal. En 2018, une militante végane se réjouissait, sur Facebook, de l’assassinat d’un boucher lors de l’attentat de Trèbes. Le 4 mai 2019, une vingtaine de militants s’en prennent brutalement à Steevens Kissouna, boucher bio vendant sur le marché des viandes pourtant issues de l’élevage raisonné. Il s’en sort avec une côte cassée et la peur de retourner travailler. « Depuis, on n’est plus du tout sereins, raconte le commerçant. Dès que des gens arrivent en groupe, on se crispe. L’agression n’a duré que dix minutes, mais elle était tellement violente que j’en ai gardé des séquelles psychologiques. À Lille, je connais des bouchers qui ont engagé des vigiles pour leur sécurité », témoignait-il dans Le Parisien.
La sémantique employée est aussi agressive que leurs actions. À Paris, des antispécistes du mouvement Boucherie Abolition exhibant un cochonnet mort dénoncent ces commerces qui « vendent du meurtre », ajoutant : « Démembrer un corps, ça n’est pas un métier. » Solveig Halloin, cofondatrice du collectif, compare les abattoirs à des « camps de la mort » et l’élevage à un « zoolocauste ». En Bretagne, des inscriptions n’hésitent pas à donner dans l’amalgame noir : les mots « Élevage = Nazisme. Auschwitz n’a jamais fermé » recouvrent des bâtiments d’élevage. “Cette idéologie est brutale, ce mouvement politique ne fait aucune différence entre une vache et un homme”, écrit le journaliste Frédéric Denhez, auteur de l’essai La Cause végane, un nouvel intégrisme ?. Il a reçu des menaces de mort. “Dans un débat, j’ai ainsi entendu une militante parler de cochons gazés, poursuit-il. Certes, certains élevages peuvent s’avérer concentrationnaires, mais il me paraît dangereux de parler de génocide et d’holocauste pour la condition animale. C’est du terrorisme intellectuel ».
« Il n’y a pas de frontière entre l’humain et l’animal et la prise en compte des intérêts des humains doit être identique à celle des animaux, nous expliquait Paul Sugy. journaliste au Figaro et auteur du livre Le Projet fou des antispécistes. On voit bien que c’est une radicalisation du combat pour la libération animale». Les plus radicaux vont même jusqu’à préférer défendre l’animal plutôt que l’humain, tel Paul Watson, de l’association Sea Sheperd, qui prétend qu’on peut choisir de protéger un requin plutôt que son pêcheur…
Un combat de citadins ?
À la veille du Sommet de l’élevage, Cédric Viallemonteil, éleveur de vaches dans le Cantal, est très actif sur les réseaux sociaux pour lutter contre la désinformation de ceux qui « se permettent de raconter n’importe quoi et dès qu’on leur répond ils nous bloquent ». Citant notamment Nagui, Julien Courbet et Hugo Clément, il fustige cette « petite caste de journalistes citadins qui ne mettent pas un pied à la campagne, qui nous tirent dans le dos à boulet rouge et qui ne connaissent vraiment pas ce qu’on fait, d’autant plus que ce sont souvent des gens de l’audiovisuel public, payés par nos impôts ». Il manifeste une défiance complète à l’égard « des politiques qui viennent et qui font des grandes promesses et de beaux discours, qui nous caressent dans le dos et on ne voit jamais rien changer » et n’attend absolument rien de ce salon européen. L’éleveur est aussi très remonté contre les défenseurs du loup : « Quand je vois ces types qui soutiennent le loup, le cul dans leur fauteuil dans un appartement à Paris, ça m’agace, car ceux qui nous imposent le loup ne sont pas ceux qui vivent avec. C’est l’enfer pour les éleveurs qui subissent des attaques, ça devient invivable ! »
De la violence à l’influence
Alors, inlassablement, pour répondre à « tous les mensonges », Cédric, comme de nombreux éleveurs, passe ses journées entre les bêtes et Twitter. De leur côté, les Vegans tentent sans relâche de faire changer les mentalités.
Ainsi, moins de jets de sang mais des Journées éthique animale et alimentation végétale sont organisées, le 16 octobre, par l’association L214. Chercheurs, associations, élus et professionnels alterneront pour discuter de l’éthique animale et de la végétalisation de l’alimentation, et tenter d’influencer ainsi l’opinion. L’association L214 vous accompagne dans cette « transition en douceur et en saveurs » en conseillant astuces, recettes et carnet d’adresses. L’abonnement à Mon Journal animal est proposé dans certaines classes et des ressources sont proposées aux « enseignant.es » pour initier l’éthique animale… à l’école ! Des animations gratuites sont également dispensées dans les écoles hôtelières pour sensibiliser les futurs chefs à la cuisine végétale. Si les méthodes évoluent, le message reste le même.
Et les conséquences de ce conditionnement médiatique s’avèrent parfois irréversibles. En témoigne l’avertissement du professeur Patrick Tounian, chef du service de nutrition pédiatrique à l’hôpital Trousseau : « On voit de plus en plus de situations dramatiques dans nos services. Comme ce bébé végétalien de 13 mois qui, au moment de se mettre à quatre pattes, s’est fracturé les deux avant-bras et les deux jambes, par manque de calcium. Un enfant est mort récemment parce que ses parents ne l’ont alimenté qu’avec du jus de châtaigne. J’entends aussi de plus en plus de gosses me dire : Je ne veux pas faire de mal aux animaux, ou je ne veux pas manger ce qui a des yeux. »
Journaliste