Le coming out catho tradi (enfin presque) d’Édouard Philippe, par Gabrielle Cluzel.
Le ci-devant Premier ministre aurait-il trop écouté Georges Brassens ? Sans le latin, la messe l’emmerde-t-elle ? La pépite a été repérée par Famille chrétienne dans La Vérité sur Édouard Philippe, le dernier livre du journaliste de Valeurs actuelles,Tugdual Denis.
Le magazine évoque des « confidences inattendues » et « déroutantes » sur l’Église catholique actuelle. Et, de fait…
Édouard Philippe affirme ne pas croire en Dieu, mais il « aime aller dans les églises » et « aime le sacré », « parce que dans le cœur de l’humanité, [il croit] qu’il y a une notion d’absolu et d’éternité ».
Si Grégory Doucet snobe le Vœu des échevins, lui n’a aucun complexe à dire qu’il « [n’est] pas mal à l’aise à la messe » : « Quand j’y suis, à la traditionnelle cérémonie de la Mer au Havre, ou aux enterrements, ou aux mariages, j’essaie d’écouter ce qu’on me dit. […] d’une manière générale, moi, durant la messe, je pense aux morts. Et parfois à la mienne : la seule chose qui m’angoisse, ce serait de mourir après mes enfants. » Bref, des inquiétudes eschatologiques qui rendraient plutôt Édouard Philippe sympathique.
Mais il y a plus étonnant. À la question du journaliste de savoir s’il est anticlérical, il oppose une dénégation vigoureuse : « Je ne suis pas du tout anticlérical, mais je ne suis pas béat d’admiration devant ce que le clergé a fait de l’Église catholique. Le niveau du clergé français a globalement baissé, je trouve. » Et de poursuivre : « Je trouve qu’il y a, depuis quelques années, une forme de désinvolture liturgique. Qui me choque. La guitare à la messe, je n’ai jamais compris. Pour moi, le sacré est soit très sobre, tel le dénuement que l’on retrouve dans les monastères, soit très pompeux. »
« Édouard Philippe défenseur de la messe tradi ? » résume en boutade Famille chrétienne. Sur Twitter, l’abbé Simon d’Artigue – peut-être par réflexe corporatiste mais, sur le fond, comment lui donner tort ? – rétorque, et toc, que si l’on va par là, « le niveau des politiques français a [aussi] globalement baissé ».
Le rapprochement a d’ailleurs déjà été fait, d’une certaine façon, par le politologue Jérôme Fourquet qui, au lendemain des élections régionales, invité sur CNews par Eugénie Bastié, comparait la désaffection croissante pour le vote, ce rituel démocratique incontournable, ce devoir dominical auquel on sacrifiait solennellement en famille… à la fin de la pratique religieuse.
La pire des solutions, a-t-il expliqué, serait de suivre l’exemple de l’Église en tentant de simplifier un cérémonial perçu comme contraignant pour se mettre au niveau d’un public en fuite. Fourquet compare le vote électronique à Vatican II : un remède pire que le mal.
Est sacré ce que l’on ne doit pas souiller. Et pour cela, il faut le porter bien haut, dans les nuées, là où il est hors d’atteinte. Avec un protocole respectueux et codifié.
« Ma personne n’est rien, mon principe est tout », disait le comte de Chambord. Si Emmanuel Macron a été accueilli au départ avec autant d’aménité, y compris par ceux qui n’avaient pas voté pour lui, c’est qu’il semblait cultiver un goût pour l’apparat et la sobriété, les deux faces non oxymoriques du sacré, ainsi que l’a noté Édouard Philippe. C’est, en tout cas, ce que pouvait laisser espérer son air sérieux d’étudiant en propédeutique, son costume bien coupé et le décorum déployé pour sa marche solitaire à la pyramide du Louvre. Après le facétieux François Hollande et l’agité Nicolas Sarkozy, enfin un homme hiératique qui portait sa fonction comme le Saint-Sacrement. Las, la suite l’a démenti, jusqu’au point d’orgue Mcfly et Carlito. Et à trop s’abaisser, il s’est mis, comme l’on sait, à portée de soufflet.
Chacun s’accorde à le dire, les hommages officiels sont un exercice, maintes fois renouvelé depuis son élection, dans lequel excelle Emmanuel Macron. L’hommage à Jean-Paul Belmondo aux Invalides, où s’était réfugié tout ce qui reste de sacré dans notre pays – le drapeau, l’armée, la fanfare, les vieilles pierres – et pour lequel, il faut le noter, même les petits-enfants du défunt avaient respecté les codes – endimanchés, cravatés, rasés de près, tout de noir vêtus -, l’a encore montré.