On a trouvé, cette année, plus « relou » que l’oncle raciste : la tante féministe…, par Gabrielle Cluzel.
Depuis quelques années, « l’oncle raciste » est à la presse et aux réseaux sociaux ce que le père Fouettard est aux contes pour enfants : un personnage fantasmagorique de Noël qui vous fait faire des cauchemars.
L’oncle raciste – avec ses variantes : homophobe, misogyne… – est immanquablement vociférant, vaguement éméché, sans doute ventripotent – car inutile de préciser qu’il ne turbine pas au quinoa -, parfois chasseur, souvent fumeur, et toujours « relou ».
Il n’a pas de filtre, il pose des questions gênantes, bref, il gâche les Noëls en famille, et Dieu sait si déjà on n’aime pas beaucoup Noël ni la famille. En tout cas, on tweete aussi sec le lendemain avec toujours beaucoup de succès les horreurs qu’il a proférées, qu’elles soient réelles ou inventées. Il n’est pas précisé si le chèque des étrennes que cet affreux bonhomme a glissé dans les petits souliers de chacun sous le sapin a été encaissé.
Caroline De Haas a donc eu une idée : Sur le média Konbini, elle a fait une vidéo en forme de « Petit guide anti-sexiste de Noël » pour river leur clou « avec humour » (sic) à tous les personnages détestables de ce type-là. Na ! Quand ils vous demandent, par exemple, « si vous avez un copain », vous répondez « que les femmes en couple hétérosexuel assument la majorité des tâches domestiques pour leur conjoint et pour toute la famille », ça fait réfléchir, n’est-ce pas ? Lorsqu’ils vous lancent « et les enfants, c’est pour quand ? », vous « mettez les pieds dans le plat » et pour les faire taire, vous leur parlez de votre « ovulation douloureuse » ou vous leur demandez conseil sur vos « règles un peu douloureuses », « un peu genre marron foncé ». Histoire de les mettre, bien sûr, horriblement mal à l’aise.
Il est étonnant de voir à quel point la gauche qui prône comme un mantra le vivre ensemble avec son lointain le pratique si peu avec son prochain. Le repas de Noël familial, c’est pourtant le premier vivre ensemble avec la diversité – la diversité des points de vue et des modes de vie – qui s’impose à vous et qui devrait, de ce fait, être accepté avec bienveillance et fraternité.
Ces dames se piquent d’humanitaire, ont soif de se donner aux autres. Leur altruisme les honore. Elle déploient des trésors de compréhension pour les migrants mais jugent durement leur sœur, mère ou grand-mère, quand celle-ci leur fait remarquer, avec une sollicitude toute maladroite, qu’à leur âge, elle était déjà mariée et venait d’avoir son deuxième. Est-ce si grave ? Cette injonction à aimer l’autre comme il est, à l’excuser car ses codes culturels ne sont pas les nôtres, ne s’appliquerait donc pas en famille, et entre générations ? Et ces questions, parfois involontairement blessantes, ne les pose-t-on pas, du reste, aussi aux hommes seuls de la même façon ? Se croient-ils obligés pour autant de nous donner des nouvelles de leur prostate ou de leurs hémorroïdes ?
Aussi relou que l’oncle raciste, la tante féministe. Susceptible, donneuse de leçons, dogmatique comme une bonne sœur agnostique. Mais le soir du réveillon, on oublie tout. Sur le piano du salon, à côté des noces de diamant des grands-parents, il y a une photo d’elle en CM1 et de l’oncle raciste en pyjama. Il sont tellement mignons qu’on les aime bien quand même. C’est le miracle de Noël et de l’amour familial.