Les monarchies, modèle actuel, par Frédéric de Natal.
Dans le monde entier, la monarchie est aujourd'hui le système politique de nombreux pays ; surtout, son principe même connaît un vif regain d'intérêt.
Source : https://www.politiquemagazine.fr/
En 1988, l’archiduc Otto de Habsbourg-Lorraine, prétendant à la double couronne austro-hongroise, écrivait : « On parle beaucoup de nos jours, des monarchies, présentes et passées. Cette vogue montre le désir d’une génération placée en face de problèmes en apparence insolubles – l’expansion de la bureaucratie, les nouvelles technologies ou l’endettement global – de retrouver ses racines historiques et, à travers elles, un élément humain de sécurité. » Rien n’est plus vrai aujourd’hui.
Face aux crises politiques qui se multiplient un peu partout dans le monde, l’idée monarchique connaît un nouveau regain. Aucun continent ne semble échapper à ce qui, pour beaucoup d’Européens, Africains ou Sud-Américains, représente encore une institution d’avenir et un symbole moderne, garant de la démocratie.
En Europe, les rois n’ont pas disparu. Douze monarchies, dont deux électives, ont survécu à toutes les tempêtes politiques et autres bouleversements révolutionnaires auxquels le « vieux continent » a dû faire face au cours des siècles précédents. Un système politique basé sur le principe de succession par hérédité qui recouvrait l’intégralité du continent jusqu’en 1914 et qui s’est réduit comme une peau de chagrin peu après la fin de la seconde guerre mondiale, dans des conditions souvent contestables. Avec ou sans pouvoir, les monarchies comptent encore des millions de partisans qui ne jurent que par ce type de régime qui leur apparaît comme le meilleur garant du respect de la démocratie. Face aux crises en tous genres, sans cesse aggravées, les peuples, privés de toutes alternatives possibles ou épuisés par des classes politiques qui trustent le pouvoir, se tournent désormais vers ces royautés qui restent populaires, incarnations d’unité et de stabilité, au-dessus des partis.
Monarchies absolues devenues constitutionnelles, elles revêtent des habits plus traditionnels ailleurs. Loin d’être un épiphénomène, la majorité des médias observent un regain du monarchisme un peu partout dans le monde où souffle un même « vent du changement ». Hier encore fantasme, la restauration des rois est à l’ordre du jour. Entre nostalgie et réalité, des pays ont déjà pris la décision dans le passé de rappeler leurs rois, parfois sous des formes diverses inattendues. Espagne en 1975, Ouganda ou Cambodge en 1993, les monarques ont ceint de nouveau des couronnes dont ils avaient été privés par les soubresauts de l’Histoire. Quand ils n’ont pas accédé à d’autres postes comme Siméon II : enfant-roi entre 1943 et 1946, le souverain de Bulgarie, chassé par les communistes, a fait un retour triomphal comme premier ministre entre 2001 et 2005. Enfin, d’autres ont accepté des statuts protocolaires qui, sans pour autant remettre en cause la forme républicaine des nations dont ils sont les prétendants, sont devenus peu à peu des états dans l’état comme en Roumanie ou au Monténégro. Dans cette partie des Balkans, ces dynasties, autrefois exilées, ont désormais de vrais pouvoirs diplomatiques, recevant membres du gouvernement ou ambassadeurs comme au temps de leur splendeur d’antan.
Les monarchies, gage d’avenir
Loin de toutes caricatures et autres anachronismes, les maisons royales, régnantes ou non, ont toujours su s’adapter à travers les siècles afin de ne pas disparaître de l’Histoire dont elles sont les gardiens de la mémoire. Les divers sondages démontrent que l’idée monarchique est loin d’appartenir au passé mais continue bien de s’inscrire dans un présent. En France, dans un pays qui n’en finit pas de panser les plaies de la révolution française, 17 % des français sont favorables à un retour du roi. Au Portugal, c’est 30 % de la population qui plébiscite ce type de régime aboli en 1910. Même en Allemagne, les Hohenzollern ont le vent en poupe avec près de 20 % des Allemands qui souhaitent le retour de l’empire. Des familles royales qui ont réussi à s’imposer naturellement comme des références incontournables.
L’Afrique n’échappe d’ailleurs pas à cette règle. L’ancienne famille royale d’Ouganda est devenue en moins de deux décennies un véritable contre-pouvoir au régime en place. Si les anciennes maisons royales ne président plus aux destinées de leurs peuples, à quelques exceptions près comme au Maroc, en Eswatini ou au Lesotho, elles sont courtisées dans un but électoral et demeurent partie intégrante du processus démocratique. Jetées aux oubliettes de l’Histoire, ces dynasties, qui ont participé à la lutte contre la colonisation et aux combats pour les indépendances, ont retrouvé toutes leurs regalia. Au Rwanda, au Burundi, en Éthiopie, aux côtés de partis monarchistes, elles sont désormais associées étroitement aux pouvoirs en place qui les ont pleinement réhabilitées ou bénéficient de Chambre de représentation comme en Côte d’Ivoire (depuis 2015).
Contrairement à l’idée reçue, les monarchies ne coûtent pas cher : 1 euro 30 au Royaume-Uni contre 3 euros en France par habitants pour entretenir le locataire de l’Élysée et sa cour. Et elles font toujours rêver. Plus de 80 % des Britanniques plébiscitent la reine Elizabeth II, devenue une icône mondiale dans son rôle et le symbole monarchique par excellence pour tous. Même la France régicide n’échappe pas à ce souffle monarchique. Sous l’impulsion du prince Jean d’Orléans, chef de la maison royale, qui multiplie les apparitions médiatiques et diplomatiques depuis deux ans et à qui on a prédit un destin national, les lys pourraient refleurir dans cette France marquée par une longue tradition de révolutions et de conflits sociaux. Monarchies et démocraties n’ont rien d’antagoniques mais sont bel et bien complémentaires. On est désormais loin des caricatures distillées habituellement par certains médias qui jugent le système ringard ou désuet. Les monarchies, régnantes ou non, se sont adaptées à l’évolution des société, s’imposant comme une solution naturelle pour des peuples en quête d’identité et d’un visage politique plus humain et attirant. Un visage qui n’est plus l’image d’une relique d’un passé révolu mais celle d’un modèle moderne, une source d’espoirs, une solution possible, un gage d’avenir.
Illustration : En Europe, en Afrique, en Asie, des pays vivent en monarchie et s’en portent bien. En France, l’expérience serait peut-être à retenter.