L'aventure France en feuilleton : Aujourd'hui (125), Une page sombre : le commerce triangulaire...
Le "commerce triangulaire" - également appelé la "traite atlantique" - et qui, de fait, est la traite négrière, est incontestablement une page sombre, et peu glorieuse, de l'histoire de France, en particulier, et de l'histoire du continent européen, en général.
Au moins peut-on considérer que, d'une certaine manière, les peuples européens se sont rachetés en mettant fin à cette horreur, l'abolition de l'esclavage ne concernant qu'eux seuls, alors que l'esclavage et la traite négrière subsistent encore, de nos jours, ailleurs qu'en Europe...
"L'infâme trafic" était particulièrement lucratif :
• les bateaux partaient depuis Nantes, Saint-Nazaire, Le Havre, Bordeaux... chargés de tissus, d'armes à feu, d'alcool, de verroterie...
• ils allaient échanger ces produits en Afrique, notamment du côté du Niger ou du Bénin, contre des esclaves noirs...
• puis ils repartaient en Amérique, pour vendre ces esclaves, et rapporter des produits tropicaux tels que le sucre, le café, le cacao, le coton...
Ces produits étaient ensuite ramenés en Europe.
C'est ce commerce, qui se déroulait en trois étapes (Europe, Afrique et Amérique), qui se nomme "commerce triangulaire".
Quelques chiffres :
Du XVIème au XIXème, on estime qu'environ 12,5 millions d'esclaves ont été embarqués de force d'Afrique pour l'Amérique par des Européens (environ 10-11 millions sont arrivés en Amérique).
Les principaux pays européens ayant participé à la traite transatlantique sont le Portugal avec environ 5 millions d'esclaves, la Grande-Bretagne avec environ 3 millions d'esclaves et la France avec un peu moins de 1.500.000 esclaves déportés...
Cette dure réalité ne doit évidemment pas être occultée.
On se gardera, cependant, de tomber dans le travers de certaines bonnes âmes qui, si elles n'ont pas de mots assez durs pour condamner cette traite négrière - qui doit l'être, en effet - oublient deux choses importantes, dans leur critique à sens unique de la France et du monde européen.
1. D'abord, ces bonnes âmes, généralement recrutées dans les milieux auto-proclamés "progressistes" et "éclairés" oublient que notre République idéologique honore, en conservant ses cendres au Panthéon ("Aux grands hommes, la Patrie reconnaissante"...) un certain Voltaire qui, antisémite furieux, était aussi joyeusement raciste. En témoigne, entre autres, ce propos :
"Nous n'achetons des esclaves domestiques que chez les nègres. On nous reproche ce commerce. Un peuple qui trafique de ses enfants est encore plus condamnable que l'acheteur. Ce négoce démontre notre supériorité. Celui qui se donne un maître était né pour en avoir". (Voltaire, Essai sur les moeurs et l'esprit des nations, 1756).
Et aussi :
"Leurs yeux ronds, leur nez épaté, leurs lèvres toujours grosses, leurs oreilles différemment figurées, la laine de leur tête, la mesure même de leur intelligence, mettent entre eux et les autres espèces d'hommes des différences prodigieuses. Et ce qui démontre qu'ils ne doivent point cette différence à leur climat, c'est que des Nègres et des Négresses transportés dans les pays les plus froids y produisent toujours des animaux de leur espèce." (Voltaire, Essai sur les moeurs et l'esprit des nations, 1756).
Ou encore :
"Il n'est permis qu'à un aveugle de douter que les blancs, les nègres, les albinos, les Hottentots, les Lapons, les Chinois, les Amériques ne soient des races entièrement différentes..." (Essai sur les moeurs et l'esprit des nations, 1756).
On notera juste - comme le fait remarquer avec pertinence le site Hérodote.net - qu'en croyant constater l'existence de "races entièrement différentes", Voltaire prend ici le contre-pied du christianisme qui, depuis Saint Paul, n'a de cessé de proclamer l'unité de la condition humaine.
Il rompt avec ses prédécesseurs en pensée, généralement indifférents au concept de race.
Il annonce aussi les théories scientistes du XIXe siècle qui, libérées du poids de la religion, assimilent les hommes à une espèce parmi d'autres...
2. Ces mêmes bonnes âmes - telle une Christiane Taubira - se montrent d'un parti-pris vraiment étonnant. Christiane Taubira a cru, ainsi, pouvoir déclarer :
"...Il ne faut pas trop évoquer la traite négrière arabo-musulmane, pour que les "jeunes Arabes" ne portent pas sur leur dos tout le poids de l’héritage des méfaits des Arabes..." (!).
Il y a, maintenant, une "Loi Taubira" sur l'enseignement de l'esclavage, qui ne reconnaît que "...la traite négrière transatlantique ainsi que la traite dans l'océan Indien d'une part, et l'esclavage d'autre part, perpétrés à partir du XVème siècle, aux Amériques et aux Caraïbes, dans l'océan Indien et en Europe".
Ce à quoi l’anthropologue et économiste Tidiane N’Diaye, spécialiste des civilisations négro-africaines et de leurs diaspora, répond dans "Le Génocide voilé" :
"Les Arabes ont razzié l’Afrique subsaharienne pendant 13 siècles sans interruption.
La plupart des millions d’hommes qu’ils ont déportés ont disparu du fait de traitements inhumains.
La traite négrière a commencé lorsque l’émir arabe Abdallah ben Saïd a imposé aux Soudanais un accord en 652 les obligeant à livrer annuellement des centaines d’esclaves.
Ce fut le point de départ d’une énorme ponction humaine qui devait s’arrêter officiellement au début du XX° siècle...
Sous l’avancée arabe,… des millions d’Africains furent razziés, massacrés ou capturés, castrés et déportés vers le monde arabo-musulman.
Cela dans des conditions inhumaines, par caravanes à travers le Sahara ou par mer, à partir des comptoirs à chair humaine de l’Afrique orientale..."
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L'aventure France racontée par les Cartes...
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