Charlotte d'Ornellas : l'indispensable retour à la messe.
Source : https://www.valeursactuelles.com/
Alors que le pays devrait se déconfiner progressivement dès le 11 mai prochain, Emmanuel Macron a annoncé que les cultes ne reprendraient qu'à la mi-juin. Une annonce difficile à comprendre.
Voilà déjà de longues semaines que les catholiques sont tentés de cocher la case de la « première nécessité » sur leurs attestations pour aller se confesser, se rendre à la messe, accéder à la communion, baptiser un enfant, confirmer un adolescent, marier un couple ou recevoir le sacrement des malades. Non par malhonnêteté administrative mais parce que c’est exactement ce que ces sacrements représentent pour eux : une première nécessité. Ceux qui ont du mal à le comprendre doivent au moins l’entendre, à moins de nier la dignitité et la liberté de ces citoyens Français et catholiques.
Certains l’ont d’ailleurs fait, qui étaient conviés à se rendre dans leurs églises pour que le prêtre puisse y dire sa messe, en toute légalité. Ils ont été infiniment peu nombreux. Les autres ont résisté, non par relativisme mais par obéissance et responsabilité, comprenant que le risque sanitaire imposait des règles drastiques à la société toute entière dont ils sont résolument. Ils ont profité de cette injonction historiquement inédite pour creuser leur désir spirituel avec patience, faisant vivre des petits églises domestiques parfois oubliées, redécouvrant les trésors de la prière personnelle et familiale. Les prêtres ont dit leur messe sans assistance, seul en face de ce Dieu à qui ils ont donné leur vie. Les évêques ont pris des mesures restrictives avant même qu’elles soient imposées à la société, les prêtres ont obéi sans rechigner, les fidèles ont suivi parfois douloureusement. Même pendant la semaine sainte, et même le jour de Pâques, sommet de la vie chrétienne. Ils ont accepté cette absence liturgique en sachant que ce trésor n’est dû qu’à Dieu, et non à eux, et que les prêtres pouvaient continuer à dire quotidiennement leurs messes, officiellement et sans contraintes (à quelques regrettables exceptions près).
Le réflexe est triste mais compréhensible de la part des dirigeants matérialistes que l’époque s’est forgée
Mais récemment, les catholiques étaient eux aussi derrière leur écran de télévision à attendre une bonne nouvelle de la bouche du chef de l’Etat. Ils aimeraient retourner à la messe, mais également à l’école, à l’usine, au bureau, chez leurs parents ou amis et au bistro. Comme tous les Français, ils espèrent le retour à une vie normale, fut-elle ajustée ou différente. Ce soir-là, Emmanuel Macron a annoncé la date du 11 mai. Quelques jours plus tard, les différentes composantes de la société ont donc fait remonter leurs propositions de déconfinement au Premier ministre, parmi lesquelles la conférence des évêques de France. Mais l’exécutif a alors annoncé que la reprise des cultes n’interviendrait qu’à la mi-juin… Le réflexe est triste mais compréhensible de la part des dirigeants matérialistes que l’époque s’est forgée. Sauf que les catholiques ont le devoir de rappeler aujourd’hui que la messe n’est pas un folklore et ne peut souffrir de recevoir les mêmes délais qu’une fête populaire ou qu’une salle de cinéma. Elle est une raison de vivre. il était déjà douloureux pour eux de voir que les trésors d’inventivité trouvés pour permettre aux hommes de se nourrir de pain aient été oubliés pour l’autre nourriture - spirituelle - qui les fait vivre. Il serait incompréhensible que cela dure plus longtemps, dès le déconfinement entamé.
La France a besoin, aujourd’hui encore, de la bonne volonté de tous ses enfants. Que chacun serve avec ses ressources et ses talents. Or l’Eglise, qui n’a pas cessé d’accompagner les malades, de consoler les familles, d’enterrer les morts, de secourir les pauvres n’est pas d’abord une ONG. Cette puissance de charité trouve sa source dans le coeur de la foi, dans ces sacrements dont les fidèles manquent aujourd’hui. Elle est littéralement essentielle.
Quand Emmanuel Macron faisait l'éloge de la France catholique au collège des Bernardins
« Lorsque vient l’heure de la plus grande intensité, lorsque l’épreuve commande de rassembler toutes les ressources qu’on a en soi au service de la France, la part du citoyen et la part du catholique brûlent, chez le croyant véritable, d’une même flamme ». C’est ce qu’Emmanuel Macron lui-même déclarait le 9 avril 2018, au collège des Bernardins. Il insistait même alors : « Si les catholiques ont voulu servir et grandir la France, s’ils ont accepté de mourir, ce n’est pas seulement au nom d’idéaux humanistes. Ce n’est pas au nom seulement d’une morale judéo-chrétienne sécularisée. C’est aussi parce qu’ils étaient portés par leur foi en Dieu et par leur pratique religieuse. » Il disait enfin, et chaque mot va puiser dans les siècles de notre propre histoire : « M’aveugler volontairement sur la dimension spirituelle que les catholiques investissent dans leur vie morale, intellectuelle, familiale, professionnelle, sociale, ce serait me condamner à n’avoir de la France qu’une vue partielle ; ce serait méconnaître le pays, son histoire, ses citoyens ; et affectant l’indifférence, je dérogerais à ma mission. »
Emmanuel Macron semblait avoir étonnamment compris - dans ces quelques mots- la puissance d’irrigation de la foi que recherche tout catholique dans sa vie. Quel meilleur moment pour s’en souvenir et prouver ainsi que les mots ne sont pas simplement de traîtres ressorts électoraux ? La vie va reprendre dans les rues, les écoles, les entreprises, les magasins. Toutes les consignes qui s’appliqueront pourraient être appliquées dans une église, et tous les prêtres du pays le savent. Comme tant d’autres acteurs indispensables du pays, ces hommes de Dieu ont largement et docilement prouvé leur responsabilité dans cette crise. Ils sont en droit, eux-aussi, de reprendre le travail ! Non parce que ce serait un dû réclamé au gouvernement, mais bien parce que c’est un devoir. Espérance et charité - dont le pays entier profite - ont besoin de la foi.