Poutine, Erdogan et Rohani négocient l’offensive sur Idleb.
Par Antoine de Lacoste
La Conférence de Téhéran s’est déroulée le vendredi 7 septembre. Le Président iranien Rohani y a accueilli Poutine et Erdogan. Aucun autre invité : ce sont ces trois-là qui ont l’avenir de la Syrie entre leurs mains.
Mais les divergences sont réelles et la Conférence, sans être inutile, n’a pas permis de les aplanir.
Russes et Iraniens sont à peu près d’accord à court terme : il faut lancer une offensive générale sur la province d’Idleb, occupée à 60% par le groupe islamiste Hayat tahrir al-Cham (HTC), l’ex Front al-Nosra dont tous les cadres viennent d’al-Qaïda.
HTC et Daech ne sont que les deux faces de la même pièce, comme le rappellent les autres groupes insurgés sunnites (photo), qui tiennent 40% du territoire et qui ont eu des accrochages sanglants avec HTC.
Le problème, ce sont justement ces 40% restants : ils sont tenus par des islamistes à la solde des Turcs qui ont d’ailleurs plusieurs postes militaires au cœur même de la province.
Erdogan n’a pas envie de lâcher ses alliés et surtout il ne veut pas que ce soit ensuite l’occasion pour les Kurdes de se réinstaller près de sa frontière, notamment à Affrin, d’où il les a chassés il y a quelques mois.
Il a pourtant fait une concession importante en qualifiant Hayat tahrir al-Cham de « groupe terroriste ». C’est une première mais il n’est pas allé plus loin : son objectif était d’obtenir qu’un nouveau cessez le feu soit établi et que le mot figure dans le communiqué final. Il n’a pas eu gain de cause. Poutine, sous le regard amusé de Rohani, a déclaré : « Je pense que, globalement, le Président turc a raison : ce serait une bonne chose. Mais nous ne pouvons pas assurer à leur place qu’ils (les islamistes) arrêteront de tirer ou d’utiliser des drones armés. »
Rappelons à ce sujet que les bases russes installées non loin d’Idleb font régulièrement l’objet d’attaques de drones armés et Poutine ne peut évidemment accepter que cette situation se prolonge indéfiniment.
Les Iraniens veulent en découdre comme toujours : en face, ce sont des sunnites et, pour la grande puissance chiite, aucune discussion n’est envisageable.
Pour les Russes, moins concernés par ces divisions internes à l’islam, il s’agit d’un problème stratégique crucial : il est hors de question de laisser 10 000 combattants islamistes administrer une province sur le territoire syrien.
L’assaut aura donc lieu, mais ce sera une opération délicate : il ne faut pas se fâcher avec Erdogan et donc éviter de lui tuer ses alliés et que faire si Erdogan envoie des renforts, comme l’armée syrienne est en train de le faire ?
Les occidentaux eux, sont pathétiquement inutiles : les Américains rappellent tous les trois jours qu’une attaque chimique entraînerait une riposte massive de leur part, ce qui est une façon de laisser faire Poutine tout en laissant la porte ouverte à une nouvelle manipulation. La France et l’Angleterre ont confirmé, comme il se doit.
Les Russes, de ce fait, ont renforcé leur présence navale au large de la Syrie.
En attendant l’offensive terrestre, les bombardements russes et syriens ont repris. Leur intensité et le choix des cibles (exclusivement des positions tenues par HTC), montrent que le compte à rebours a commencé. ■
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Commentaires
Les RUSSES ont toujours voulu ( Tsars ou Soviétiques) avoir accès aux mers chaudes. Ils y sont parvenus en Syrie, accès à la Méditerranée, DONC ils n'abandonneront pas ce pays. Quant à l'Occident, où ce qui en reste, leur profonde addiction aux droits de l'Homme les rend incapables d'examiner la situation syrienne avec lucidité
La France qui disposait d'un capital de sympathie important en Syrie et de bonnes cartes dans les domaines économique et commercial a tout gâcher. Le comble, elle a abandonné les chrétiens d'Orient et par une aberration invraisemblable elle a appuyé des mouvements islamistes locaux. Lesquels sont tout sauf des démocrates. De fait ils représentent des courants islamistes affiliés directement ou indirectement à El Quaïda ou autres mouvances financées par des émirats du Golfe. Ce faisant elle a fait entrer dans ce jeu pervers les Iraniens qui se frottent les mains. On ne peut avoir une diplomatie plus stupide et contre-productive. De leur côté, les concurrents de la France dans cette région se réjouissent de sa disparition progressive dans une partie du monde si stratégique pour nos intérêts. .Hollande et maintenant son successeur continuent dans leurs errements illustrant tous deux ce proverbe latin : " Errare humanum est, perseverare diabolicum ".