Retour aux valeurs traditionnelles en Chine et en Russie ! Quand en Europe ?
Confucius
Par Marc Rousset
Le système de valeurs confucéen consacre l’importance accordée à l’autorité, à la famille, au travail et à la discipline. Un retour aux valeurs traditionnelles s'observe, notamment, en Chine et en Russie ! Quand en Europe ? Question qui va à l'essentiel. LFAR
Le journaliste Cyrille Pluyette nous apprend, dans Le Figaro du 19 août dernier, que la promotion des valeurs traditionnelles, tant condamnées sous Mao Tsé-toung, est orchestrée par les autorités et fait son grand retour en Chine. On peut lire, aujourd’hui à Pékin, des affiches du style : « On est béni quand on fait preuve de piété filiale, quand on est honnête, quand on est patriote. » Ailleurs, des panneaux relatent la vie des disciples de Confucius, expliquent que l’on doit être « soumis et respectueux face aux parents, fidèle à la mère patrie » et qu’il faut être indifférent à la célébrité et à la richesse. Quant aux amoureux, ils ne doivent pas être trop démonstratifs et « respecter la morale sociale ».
La pornographie, l’homosexualité, l’adultère, l’hédonisme matérialiste stupide, les scoops ou les ragots sur la vie privée des stars chinoises sont également censurés sur Internet afin de ne pas flatter les « bas instincts du public ». Xi Jinping, dans une société largement bâtie sur l’argent, veut donc combler le vide idéologique par de nouvelles valeurs compatibles avec son gouvernement autoritaire. Le parti unique cherche à se réapproprier le confucianisme qui implique que le peuple obéisse à une élite d’hommes intègres et dignes de confiance.
Samuel Huntington, dans Le Choc des civilisations, avait déjà remarqué que la réussite de l’Asie était le résultat de l’importance culturelle accordée à la collectivité plutôt qu’à l’individu. Dans le monde démocratique occidental règne la culture de l’individualisme ; la tradition chinoise enseigne que la société est une communauté complexe. Le système de valeurs confucéen consacre l’importance accordée à l’autorité, à la famille, au travail et à la discipline, le rejet de l’individualisme, la primauté de l’autoritarisme « doux » et des formes très limitées de la démocratie.
Le triomphalisme asiatique face au déclin de l’Occident s’est exprimé dans ce que certains avaient appelé « l’offensive culturelle de Singapour ». Lee Kuan Yew, souvent qualifié de despote éclairé, a opposé les vertus de la culture asiatique confucéenne (l’ordre, la discipline, la responsabilité familiale, le goût du travail, le souci de l’intérêt collectif, la sobriété) à la complaisance, la paresse, l’individualisme, la violence, la sous-éducation, le manque de respect pour l’autorité et l « ossification mentale » qui seraient responsables du déclin de l’Occident.
On retrouve, en fait, dans les valeurs confucéennes, l’opposition bien connue en Europe entre le holisme s’appuyant sur des valeurs traditionnelles et l’individualisme des « Lumières » qui nous mène à la société décadente actuelle dont l’argent est la seule valeur. Dans ses déclarations, Lee Kuan Yew n’avait d’ailleurs jamais caché que la politique qu’il suivit à Singapour, et qui fut une source d’inspiration d’idées nouvelles pour les dirigeants chinois, consistait en fait à appliquer des vertus que les Européens avaient possédées et pratiquées en d’autres temps. Pour leur plus grande disgrâce, ils les avaient oubliées ou leurs nouveaux maîtres les leur avaient fait détester.
La perte des valeurs traditionnelles tient à la destruction volontaire ou induite de toutes les structures et contraintes, doctrines, lois, rites, codes de conduite et devoirs au bénéfice des « Lumières » progressistes destructrices. Comme le remarquait Gilles Lipovetsky dès les années 80 dans L’Ère du vide, les valeurs qui structuraient encore le monde de la première moitié du XXe siècle (épargne, conscience professionnelle, sacrifice, ponctualité, autorité) n’inspirent plus de respect et invitent davantage au sourire qu’à la vénération.
Et qu’a fait Poutine, en Russie, si ce n’est procéder, dès sa prise du pouvoir en 2001, à un retour aux valeurs traditionnelles russes comme la famille, la patrie et la religion orthodoxe. Une religion orthodoxe beaucoup plus réaliste et moins naïve que le catholicisme romain, en faisant construire des églises et reconstruire des cathédrales dans toute la Russie ! •
Commentaires
Ils sont en train de réinventer la devise: Travail, Famille, Patrie.
Je comprends l'intérêt de Mr Rousset à l'égard du retour des valeurs traditionnelles en Chine, mais il eût été plus judicieux de se référer à la pensée d'un Roger Scruton par exemple, plutôt qu'à l'exemple des dirigeants chinois. Je trouve cet article bien naïf. Il y a tout de même une chose qu'il ne faut pas oublier, c'est que la Chine est une dictature communiste. Un journaliste dans le dernier numéro du Figaro Magazine faisait remarquer que ce pouvoir communiste était en train d'organiser par la contrainte et la force le départ de peut-être 250 millions de paysans chassés des campagnes ( on rase leurs villages au bulldozer) pour en faire de ma main d’œuvre citadine pour le plus grand bénéfice de l'industrie chinoise qui va ainsi pouvoir continuer à nous inonder de camelote. Le pouvoir communiste a besoin d'un outil de domestication de ces malheureux paysans auxquels personne n'a demandé leur avis et cet outil c'est le recours à la pensée traditionnelle, du moins la conception qu'en ont les dirigeants, pour obtenir obéissance et soumission de la population. Il est important de redécouvrir les vertus du conservatisme mais il vaut mieux choisir de se référer à ceux qui en sont les meilleurs représentants plutôt que de se faire de douces illusions sur les intentions des tyrans communistes chinois.
Cher Monsieur,
Vos observations sont pertinentes, sur le caractère dictatorial du régime chinois. Cependant une observation sans parti-pris de la réalité doit permettre de reconnaître des aspects positifs même dans ce que nous n'aimons pas, a fortiori s'il s'agit de cultures éloignées de la nôtre. Ainsi, même si nous n'aimons pas le socialisme absurde de Chavez et de son successeur, il est permis de distinguer la manoeuvre d'asservissement opérée par les USA et l'occidentalisme contre lui, ainsi que la légitimité de sa résistance. Même si le régime de Kim en Corée du nord est détestable, cela ne doit pas nous empêcher de remarquer la mobilisation par la dynastie des mythes coréens les plus anciens et les plus profondément enracinés dans l'âme de ce pays, que la Corée du sud a tout simplement oubliés. Le monde existe dans sa diversité. Bien des choses qui nous paraissent insupportables chez certains peuples sont considérées comme naturelles par ceux qui leur appartiennent. Et rien ne nous oblige à passer immédiatement à une conclusion globale: louange ou blâme. Pour une raison simple: seul doit compter notre intérêt collectif et notre survie.