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Analyse & ironie : Méritons-nous Bruno Le Maire ?

 

Par Dominique Jamet

De son côté, dans un article de  Causeur titré « Un conformiste nommé Le Maire » [24.02], David Desgouilles rapporte les singuliers propos que Bruno Le Maire, a tenus aux journalistes, à l'issue de sa réunion de lancement de campagne de mardi dernier : « Attablé avec les autres journalistes dans un restaurant de Vesoul, quelques petites heures après sa déclaration de candidature, votre serviteur l’écoute expliquer à quel point la notion de nation constitue l’angle de sa campagne. Il n’invoquera pas la République. « Les gens » n’y croient plus. Elle n’a pas tenu ses promesses. Donc, il faut leur donner de la nation. »  Il faut leur donner de la nation... Tout est révélé de Bruno Le Maire dans ce propos de pur cynisme et absolue désinvolture. Tout est dit du désenchantement des Français pour la République. Tout est exprimé qui justifie l'ironie dont use ici Dominique Jamet. LFAR    

 

3312863504.jpg« T’as voulu voir Vesoul et on a eu Le Maire », aurait pu chanter Jacques Brel. Car ce n’est ni à la télévision, ni à la radio, ni à l’AFP, ni à Honfleur, ni à Vierzon, mais depuis la préfecture de la Haute-Saône (14.573 habitants au dernier recensement) que Monsieur Le Maire, à l’occasion d’un meeting, a déclaré sa flamme à Madame la France, mettant ainsi fin à l’insoutenable suspense qu’il entretenait depuis un peu plus de deux ans.

Du coup, dans son élan, l’ancien ministre de l’Agriculture ne s’est pas contenté d’annoncer qu’il prenait rang parmi les nombreux partants déjà inscrits ou à venir pour la grande primaire de la droite et du centre. Sautant une marche, il a bien précisé, à l’intention de ceux qui auraient pu encore en douter, qu’il était « candidat pour devenir président de la République française ». Une décision, pour reprendre ses propres termes, « simple, forte, inébranlable ».

Pourquoi, donc, avoir tant tardé à rendre publique une résolution qui, depuis longtemps, semblait aussi patente que le secret de Polichinelle, aussi visible que le nez au milieu de la figure de Cyrano ? Très simplement parce qu’au porteur d’un tel projet, la moindre sagesse, le plus élémentaire bon sens, la prudence et la modestie conseillent et même imposent de s’assurer qu’il est à la hauteur de son ambition. « Je suis dans une démarche d’humilité », confiait Bruno Le Maire au journal Le Parisien, le 12 septembre 2015. D’où une hésitation bien compréhensible.

Aussi bien n’est-ce qu’après avoir pris conseil de lui-même, dans le secret de sa conscience et de sa salle de bains, que Bruno Le Maire a osé franchir le pas, ainsi qu’il l’a confié avec une désarmante ingénuité. C’est devant sa glace, face à lui-même ou à son double, que l’élu de l’Eure a senti venir la sienne, comme dans les contes. « Miroir, petit miroir magique », demandait-il, « ne suis-je pas trop jeune ? » Jusqu’au jour où le miroir, tel un oracle chiraquien, lui a répondu : « Tu as l’âge pile-poil, ton moment est venu. » « Miroir, petit miroir magique, ai-je l’expérience nécessaire pour postuler à la magistrature suprême ? » Et le miroir, de guerre lasse, a fini par lui dire : « Tu es l’homme qu’il faut à l’endroit que tu sais. » Il ne pouvait plus se dérober à son destin et à nos suffrages.

Qu’on n’aille pas croire que l’enfance et la jeunesse de Bruno Le Maire ont été faciles. Combien de fois, pris d’un sentiment de révolte, n’a-t-il pas reproché à ses parents, qui n’y étaient pas pour rien, de l’avoir trop bien réussi ! Quoi de plus irritant, lorsqu’on se cherche des défauts, de ne s’en trouver aucun, ou si véniel, comme ces vedettes du show-business qui, interviewées dans les magazines féminins, finissent, après s’être longuement et vainement interrogées, par confesser être parfois impatientes ou avoir un faible pour le mille-feuille de chez Angelina.

D’autres, moins gâtés par Dieu et la nature, auraient enflé de la tête aux chevilles. Bruno Le Maire a victorieusement lutté contre la tentation de la mégalomanie. Il est le premier à savoir que rien ne lui est dû, que ce n’est pas gagné, et qu’il y a encore loin de la coupe aux lèvres et de Vesoul à la rue du Faubourg-Saint-Honoré. Comme il le déclarait au Point la semaine passée : « Mon intelligence est un obstacle. » Et, tout récemment, lors d’un déjeuner de presse : « Mon problème, c’est que j’ai les yeux trop bleus pour la télévision. »

Ces deux inconvénients seront-ils rédhibitoires ? On se refuse à le croire. Bruno Le Maire a-t-il les yeux trop clairs et la tête trop bien faite ? La question n’est évidemment pas là, mais bel et bien de savoir s’il n’est pas trop bien pour la France, trop beau pour être vrai ? Méritons-nous Bruno Le Maire ?

 
Journaliste et écrivain
Il a présidé la Bibliothèque de France et a publié plus d'une vingtaine de romans et d'essais. Co-fondateur de Boulevard Voltaire, il en est le Directeur de la Publication
 

Commentaires

  • Roboratif Jamet! L'ironie bien maniée quelle arme magnifique!
    Remarque : B.Le Maire "fait" dans l'humilité (et superbement.......)
    Nicolas Sarkozy "fait" dans le remords (parait-il , dans ce livre admirable qu'il vient de faire écrire......)
    Alain Juppé "fait" dans le reniement (Cf son passage il y a quelques temps chez Pujadas,visible sur le Net.....)
    On attend avec impatience de savoir dans quel domaine de l'ignominie leurs concurrents trouveront ou se glisser.......Ne nous decourageons pas : rien ne les arretera : l'Avenir de la Nation,leur seule préoccupation ,est en jeu! Allonzenfants! Encore un coup de collier,la Force est en vous......

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