Les trois petits cochons, par Louis-Joseph Delanglade
On y fait désormais à peine attention. Les dernières photos du « couple » présidentiel et, le même jour (vendredi 21), la démission de M. Arif ne font en effet que prouver une fois de plus la stupidité des prétentions moralisatrices du candidat Hollande. Et c’était peut-être là son moindre défaut car, pour le reste, il semble incapable de sortir le pays de l’impasse - ne montrant quelque efficacité que dans le domaine sociétal, mais pour mieux sévir en y appliquant les recommandations de « Terra Nova ». Il ne faut donc pas s’étonner si, malgré les postures de circonstance, à droite et à gauche, dans ce que l’on appelle les « partis de gouvernement », on a déjà tiré un trait sur l'actuel quinquennat pour mieux se positionner en vue de l’élection présidentielle de 2017.
Or, un ange est passé, ce même vendredi 21 novembre, lorsque se sont trouvés réunis, au Musée du quai Branly, MM. Chirac, Hollande et Juppé. M. Revault d’Allonges (Le Monde) parle d’ « un surprenant moment de douceur entre personnalités politiques de haut rang et d’excellente compagnie ». On se rappelle que M. Chirac a voté pour M. Hollande en 2012 et on sait qu’il soutient ouvertement M. Juppé pour 2017. D’où les assauts d’amabilité à son égard : M. Juppé rappelant son « admiration » et sa « fidélité », M. Hollande son « respect » et son « affection ».
Survenant peu après les déclarations consensuelles de MM. Valls et Bayrou, ces « amabilités transpartisanes » sont tout sauf anodines car, comme le rappelle le journaliste du Monde, tous ces gens sont«susceptibles de se retrouversur la même ligne ». L’ambiance est au consensus, à la confluence des « centres ». Après tout, sur la plupart des sujets d’importance, qu’ils soient d’ordre politique, économique, voire sociétal, peu de chose sépare les uns des autres. Les lignes de partage passent plutôt entre eux et ceux qui se revendiquent sans complexe de la droite ou de la gauche.
D’ailleurs, M. Juppé est devenu la coqueluche des médias parisiens « branchés » et cela risque de durer. Ne vient-il pas, en effet, de déclarer, « que la grandeur de la France dans le monde, c'est d'appuyer la démocratie et le développement » ? Propos dignes de n’importe lequel des idéologues de la bien-pensance. Dévoré par le feu de son ambition présidentielle, le maire de Bordeaux semble bien décidé à « ratisser (très) large ». Certains se prennent donc à rêver, à voix haute sur les antennes, d’une sorte d’union nationale à l’allemande qui prendrait, ici, la forme d’un rassemblement au centre : fuite en avant, ultime recours politicien. Cette option reste pour l’instant peu probable, car ce serait faire abstraction de la logique même des institutions, des réalités partisanes et des egos des uns et des autres.
Le jeu de rôles démocratique, pimenté par la présence d’un F.N. en progression et d’une gauche de la gauche en ébullition, aura donc sans doute bien lieu en 2017. La rencontre du quai Branly n’aura alors été qu’un épisode précurseur. ♦