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Face à la crise ... le bon sens du peuple, et l' "opinion" : rien à voir....

 

L’on aurait sans-doute raison de distinguer le bon sens du peuple français, dans ce qui lui reste de tradition et d’enracinement, qui s’exprime encore, parfois, en certaines circonstances particulières et sur des sujets concrets, de façon nette et conforme à la simple sagesse ou à l’instinct de survie, de ce que l’on nomme abusivement l’opinion qui est, en fait, une création pure et simple du conditionnement médiatique au jour le jour et se caractérise par la frivolité, la superficialité, le caprice, la tyrannie de l’immédiateté, l’inconséquence. Ou, pour parler plus simplement, tout bonnement la sottise. On pourrait dire, en ce sens, que le sentiment populaire est sage et que l’opinion est stupide, conformiste et serve. Et le « système » veille en permanence à étouffer le sentiment spontané du peuple français au profit de son contraire qu’il crée, façonne, manipule à l’envi et qui est l’opinion. Le peuple, il s’en méfie. L’opinion, c’est sa chose, sa créature. Elle va toujours, comme lui, et il fait tout pour cela, dans le sens de la dissolution, de la médiocrité, du vulgaire.  

 

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Ainsi, dans la crise qui ébranle, en ce moment, toutes les économies du monde, le réflexe habituel des Français, du moins d’une bonne partie d’entre eux, s’est exercé : épargner davantage, se «  serrer la ceinture » pour quelques temps, et attendre des jours meilleurs, qui ne manqueront pas de revenir, parce que la terre tourne et que les jours succèdent aux nuits. Ce n’est pas de la haute stratégie économique, mais c’est le bon sens et c’est sans-doute, en pareille situation, où nous ont mis les puissants et les intelligents du « système », tout ce que peut faire le commun des mortels. Ce réflexe d’épargne qui reste dans le fond du tempérament d’un grand nombre de Français, ne contribue d’ailleurs pas à la sortie de crise. Mais vivre sur des montagnes de dettes, qui sont d’ailleurs, le plus souvent, des dettes à la consommation (dont une bonne part de gadgets) et non des dettes d’investissement, est-ce la sagesse, est-ce le bon sens ?     

  

Les médias, le « système » l’entendent autrement : « l’opinion » veut à tout prix savoir quand la crise va finir. Cette unique question, à laquelle, pourtant, personne ne peut répondre sérieusement, est posée en boucle, comme on dit aujourd’hui, aux nombreux économistes, les compétents et les autres, ou aux responsables politiques qui se succèdent, sur les plateaux de télévision ou les studios de radio. S’ils ont le malheur de fixer un terme de quelques mois, les mines des journalistes s’allongent, la désapprobation se manifeste, sévère : c’est demain matin ou, tout au plus, après-demain que l’on aimerait entendre car, n’est-ce pas, l’opinion le veut. 

 

Tout le monde aimerait bien, dans le « système », que les choses reprennent leur train : le crédit facile ; l’immobilier que l’on peut acheter sans en avoir vraiment les moyens parce que sa valeur doublera nécessairement en cinq ou six ans ; les voyages pour tout le monde, à bon marché, très bon marché, même s’ils sont nuls et le plus souvent sans but, ni enrichissement, ni intérêt pour les voyageurs, considérés comme des troupeaux en simple transhumance ; la gadgétisation à outrance des biens de consommation, par une profusion de produits dont l’utilité pour la plupart est fort contestable et qui grèvent les budgets, au détriment de ce que l’on estimait, jusqu’à présent, l’essentiel ; les délocalisations, en Europe de l’Est, en Chine, ou en Inde, qui dopent momentanément la compétitivité des entreprises et qui nous permettront bientôt de ne plus travailler – ou presque – de nos mains, d’être tous des « cerveaux », des petits ordinateurs « intelligents » ; et puis les trente-cinq heures, les RTT ; les défilés de la CGT, comme en 36, les lycéens ou les étudiants ignares, mais dans la rue, avec leurs profs, devenus guère plus savants, en tout cas guère plus sages … ; et puis la confusion du monde politique avec celui du show-biz, la politique spectacle, le Bling Bling, et tout le reste, que l’on est contraint de mettre un peu en sourdine, pour un temps, le temps d’une crise que l’on aimerait très courte ; et, en contrepartie, les petits jeux de bourse pour tout le monde, pour adultes, ou même pour ados, qui donnent l’illusion que l’on peut gagner – et conserver - une fortune, en quelques semaines, en quelques clics d’ordinateur ; et puis, les stock options distribuées à profusion, les salaires mirobolants même en cas d’échec, les parachutes dorés. Et cetera … Nos anciens se méfiaient de « l’argent qui n’est pas transpiré » et sans-doute avaient-ils raison. Mais l’idéologie du « système » est tout à l’inverse : en tous domaines, financier ou autre, c’est, en quelque sorte, toujours la dette qui est prônée ; c'est-à-dire la consommation au présent des richesses accumulées dans le passé et la primauté de l’immédiat sur le long terme.

 

Il paraît assez normal que nous sortions de la crise et qu’une reprise intervienne à terme plus ou moins rapproché, ne serait-ce qu’en raison des liquidités considérables que les banques centrales et les Etats ont injectées ou qu’ils ont garanties - dans des entreprises du secteur financier puis industriel qui, sans cela, auraient été placées inéluctablement en redressement judiciaire ou liquidées. En un certain sens, il aurait été sain qu’elles le soient. C’eût été au détriment des actionnaires, mais surtout des épargnants et, plus généralement, de l’activité économique elle-même. Mais les immenses volumes de dettes qui auraient été épongés par des redressements judiciaires ou des liquidations, ne se sont pas évanouis : ils ont été, en fait, transférés et pris en charge, ou, à tout le moins, garantis, par les Etats, qui ont creusé d’autant leurs propres engagements ou leurs propres dettes, souvent déjà considérables et excessives. Il faudra bien les payer un jour et c’est ici, après que nous soyons sortis d’une première crise, grâce à l’intervention financière de la puissance publique, que nous entrerons assez probablement dans une seconde crise qui sera bien, alors, celle des Etats.

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Il n’y a pas beaucoup de moyens pour un Etat, lorsqu’il lui devient difficile d’emprunter, de réduire ou contenir sa dette. Il n’y en a même guère que deux, à notre connaissance : le recours à l’impôt et l’inflation, ou à l’un et l’autre. Le bon sens nous suggère que le recours à l’impôt sera difficile, du moins en France, parce qu’il y atteint déjà des niveaux record et parce qu’il pénalise immédiatement l’activité économique. L’inflation est plus indolore et ses effets sont différés. Elle rogne essentiellement l’épargne, souvent détenue par des personnes d’un certain âge, et les rentes de divers ordres, notamment les retraites, alors que la pression sociale, en période d’inflation, permet généralement aux salariés d’obtenir au moins le maintien de leur rémunération.

 

Ici, les Français qui en ont fait l’expérience, d’ailleurs du temps des trente glorieuses qui furent une ère de grande prospérité, savent que l’on peut vivre avec l’inflation et s’en accommoder un certain temps, comme l’on peut vivre avec du cholestérol ou du diabète. Elle n’ira pas toutefois, en l’occurrence, sans conflits et difficultés substantielles. Sur le plan international, par exemple, la Chine accepterait-elle sans se considérer gravement lésée, que la dette américaine soit financée par la dévaluation du Dollar, dont elle détient des stocks considérables, en bons du trésor américain ? Sur le plan intérieur, les épargnants de tous les âges et les retraités français – qui sont en partie les mêmes - n’ignorent pas qu’ils seraient sans-doute les premières victimes d’un retour à l’inflation.

 

Peut-être faudra-t-il, comme en certaines périodes difficiles, que les Français, du moins un certain nombre d’entre eux, les plus touchés, recourent au complément d’un deuxième emploi et que des retraités reprennent un travail, pour compenser l’insuffisante revalorisation de leurs retraites, face à l’inflation. Le mouvement est déjà amorcé, notamment par les dispositifs Novelli qui viennent d’être mis en place.   

 

Si ces perspectives – ou hypothèses - plutôt pessimistes, ont quelque réalisme, l’infantilisation de l’opinion par les médias et le « système » en général a quelque chose de dérisoire et de coupable qui finira bien par apparaître un jour, parce qu’ils se heurteront au mur des évènements et de situations nouvelles, sérieuses et graves. Les journaux télévisés devront bien alors, au moins pour quelques temps, « ouvrir » sur autre chose que sur le petit garçon, si triste que ce soit, qu’un chien a mordu grièvement … ou sur la petite fille franco-russe ou russo-française enlevée par sa maman et retrouvée par son papa, à la frontière austro-hongroise …  

 

Le très vieil homme, mais très sage, très expérimenté et très noble qu’est l’archiduc Otto de Habsbourg l’a dit récemment, à propos de la crise : les problèmes d’argent ne sont pas les plus graves ; ce n’est pas d’eux dont on souffre le plus, encore moins ceux dont meurt.

 

Mais de quels maux est-ce donc que l’on meurt ? Et comment le « système » qui n’est préoccupé que de savoir quel mois, quel jour nous « sortirons de la crise » pour que le monde mercantile, médiocre et dérisoire qui est le sien reprenne sa course sans souci, comprendrait-il un tel langage ?    

 

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