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Rechercher : Rémi Hugues. histoire & action française. Rétrospective : 2018 année Maurras

  • Il y a ”immigrés” et ”immigrés” : la naïveté d'Olivier Grandmaison...

    olivier le cour grandmaison.jpg        On sait depuis belle lurette que les bon sentiments font rarement - voire jamais... - les bons films ou les bons livres. Feraient-ils, ces bons sentiments, les bonnes politiques ? C'est ce que semble croire, avec une naïveté touchante, Olivier Grandmaison, qui vient exposer sur France info - ce matin du mercredi 13 avril - ses idées concernant la ré-insertion, et comment il veut mener une politique de la main tendue à des jeunes délinquants issus de l'immigration.

            Et c'est là que le bât blesse. Car Olivier Grandmaison, généreux, positif - ou essayant de l'être - amical, bon esprit et tout ce que l'on voudra..., se trompe, tout simplement. Et pourquoi se trompe-t-il ? Parce que comparaison n'est pas raison....

            Il est tout fier d'avoir emmené des jeunes délinquants dans la région de Falaise, et de leur avoir fait rencontrer un décoré de la Légion d'honneur, un de ceux qui ont lutté pour la France durant la Seconde Guerre mondiale Et, ajoute-t-il, se croyant sûr de son effet, ce héros, eh bien c'est un immigré ! Un fils de polonais. Donc, le message est clair...

            Le seul problème, c'est qu'en fait, le message n'est clair que dans la tête d'Olivier Grandmaison, chez qui les bons sentiments ont remplacé le raisonnement, et qui raisonne, justement, par analogie. Or, le raisonnement par analogie, c'est bien connu, est le pire des raisonnements. Dans la tête d'Olivier Grandmaison cela revient à dire "Il est immigré, il est décoré, donc, vous, immigrés, vous pouvez faire comme lui" (sous-entendu : vous allez vous reprendre, et le faire...). La bonne volonté de Grandmaison semble évidente et nous ne cherchons pas un seul instant à la mettre en doute. Mais, le problème, ce n'est pas son mode de fonctionnement à lui, et ce qui se passe dans sa tête à lui. Le problème, c'est ce qui se passe dans la tête de ces ados. Suffira-t-il d'incantations, de paroles, que l'on pourrait presque qualifier - pour Grandmaison - de "magiques", bref, de leur sortir un syllogisme pour, comme par enchantement, les faire passer de l'état de jeunes délinquants à celui de "bons français", risquant leur peau pour la patrie ?

            Ce que n'a pas vu Grandmaison - qui n'a probablement pas écouté Hassan II parler des marocains qui "ne seront jamais français à 100%"... - c'est que, entre les immigrants d'hier (polonais, espagnols, italiens, portugais...) et la plus grande partie de ceux d'aujourd'hui (en tous cas ceux qui viennent d'Afrique) il y a, du moins bien souvent et pour beaucoup, "quelque chose" qui se dresse entre eux et nous : soit la religion, soit les moeurs, les mentalités, les coutumes, bref, les fondamentaux. Et il ne sert à rien de le nier... Et que, s'il n'y a pas une volonté politique et une action résolues de la part des accueillants (nous, en l'occurrence); et s'il n'y a pas une réelle volonté de se fondre dans l'ensemble où ils se rendent (pour les nouveaux venus), c'est Hassan II qui aura raison : les migrations d'hier étaient inter-européennes, et Est-Ouest, mettant en contact des peuples que rien de fondamental ne séparait ni n'opposait. Celles d'aujourd'hui sont Nord-Sud, et mettent en contact deux civilisations.

            Or, et nous en sommes désolés pour M Grandmaison, il n'y a pas place en France pour deux civilisations. Et tous les beaux syllogismes, les fausses fenêtres, les comparaisons fausses et autres raisonnements par analogie ne changeront rien à la réalité, et ne changeront pas les faits, dont la principale caractéristique, on le sait bien, est qu'ils sont têtus !.....

    PS : une semaine avant l'intervention d'Olivier Grandmaison, le Prince Jean avait pris l'initiative d'une démarche originale : parler de l'Histoire de France, montrer la France à des jeunes issus, précisément, de la diversité, comme on dit aujourd'hui, dans le jargon. Et il les a emmenés à Saint-Denis, où, Art et Histoire confondus, il leur a fait toucher du doigt, concrètement, ce que c'était que l'Histoire, ce que c'était que la Beauté, ce que c'était que la France... "Pensée magique" et généralités abstraites pour Grandmaison, d'un côté; France charnelle dans la réalité de son Patrimoine pour le Prince Jean - accompagné de Lorant Deutsch - de l'autre : qui parle le mieux de "la France" ? Qui la fera le mieux découvrir et aimer ? Qui travaillera le plus, et le mieux, pour l'intégration ?.... 

    Le prince Jean saint Denis et la diversité.pdf 

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  • Achever la bête, par Etienne Auderville.

    Source : https://lincorrect.org/

    Orwell affirme qu’en ces temps de tromperie universelle, dire la vérité est un acte révolutionnaire.” On connaît également le mot de Péguy : “Il faut toujours dire ce que l’on voit : surtout il faut toujours, ce qui est plus difficile, voir ce que l’on voit.”

    Face au marasme de l’époque, à une oligarchie financière reproduisant depuis dix ans les pratiques qui la firent dérailler en 2008 – avec la sereine assurance de voir à nouveau les peuples payer ses excès –, face à une situation démographique qui fait craindre le pire pour l’Occident, face à l’enlisement de l’action publique et à la médiocrité de la classe politique, nombre de ceux qui se croyaient du bon côté du manche n’ont rien voulu voir. Arrimé à l’illusoire certitude de faire partie du happy few, le socle électoral de la macronie s’est crevé les yeux pour mieux suivre son maître : de même qu’il aurait fallu plus de communisme pour sauver le communisme, il fallait plus de social-démocratie pour sauver la social-démocratie, plus d’économie de marché pour sauver l’économie de marché, et bien sûr plus d’Europe pour sauver l’Europe.

     

     

    En cette période pascale qui – pour les Chrétiens – est un temps de Révélation, l’épidémie est épiphanie : il aura suffi d’un pangolin pour que les certitudes se lézardent, pour que les dogmes économiques volent en éclat, pour qu’une vérité simple et limpide saute à la gueule de tous, y compris de ceux qui ne voulaient pas voir : tout va mal.

     

     

    Face à un germe à la fois très virulent et peu létal, la puissance publique est aux abois. Quand la Corée du Sud dépiste, confine les malades – seulement les malades ! – et les traite, la France peine à fournir masques, blouses et gants à ses infirmiers.

     

     

    Étranglé par une dette en deutschmarks qu’il ne peut révoquer par la dévaluation ni par l’impôt, livré pieds et poings liés à l’austérité germanique, l’État français sombre avec fracas. Il avait pourtant tout fait pour “gagner en efficience”, appliquant scrupuleusement les ordonnances bruxelloises et offrant à ses ministres des abonnements TGV Paris-Berlin, histoire de “présenter les réformes” au suzerain.

    Las ! la servilité ne paie guère, pas plus aujourd’hui qu’en 40.

    Las ! la servilité ne paie guère, pas plus aujourd’hui qu’en 40, et si nos réformes du Code du Travail et autres plans de restructuration hospitalière ont été validés par Angela Merkel, il en eût fallu davantage pour éponger le sacro-saint “service de la dette”. Au siècle dernier, les Européens magnanimes se sont assis sur leur créance vis-à-vis d’un pays qui les avait par deux fois saignés ; il ne fallait pas attendre que celui-ci leur rende la pareille.

     

     

    Aujourd’hui, l’Europe est un charnier à ciel ouvert. Madame Von der Leyen s’en lave les mains au son de Beethoven. Tant pis si elle et ses prédécesseurs avaient demandé à soixante-trois reprises aux pays membres de réduire leurs dépenses de santé. Chez nous, cela s’est traduit par l’embauche de bureaucrates grassement payés : moins de médecine et plus d’audits. Le génie français de la planification a laissé place à une dictature de comptables scrupuleux, capables de rogner sur tout – sauf sur leurs salaires, bien entendu.

     

     

    Il y a quelques semaines, à la frontière turque, le valeureux peuple grec venait à l’appui de son armée, afin de montrer porte close aux neurochirugiens pakistanais désireux d’exercer sur le Vieux Continent. La risible “Mission Frontex” n’a rien fait. Les commissaires européens se sont couchés devant le sultan Erdogan, en le suppliant d’accepter un bakchich supplémentaire pour qu’il retienne une partie – seulement – des physiciens quantiques et des ingénieurs en biochimie. C’est le peuple grec et son armée qui, seuls, ont remporté la bataille.

    L’Union c’est la paix : il fallait laisser négocier les technocrates et ne pas trop perturber la tutelle otanienne.

    D’autres nations autrement plus puissantes auraient pu leur venir en aide, faire front commun sous la bannière étoilée, mais comprenez bien que l’Union c’est la paix : il fallait laisser négocier les technocrates et ne pas trop perturber la tutelle otanienne. Un corps diplomatique de chapons, des négociations molles, l’humiliation du rançonnage : triptique de l’Europe-puissance. On aurait pu intimider le sultan, montrer un peu les crocs. Hélas ! pour la clique bruxelloise, le déshonneur vaut toujours mieux que la guerre ; il est même préférable à l’hypothèse d’une escarmouche. Car le conflit – qu’il soit économique, diplomatique ou militaire – c’est l’Histoire. Or l’Histoire, l’Europe n’en peut plus. L’Europe n’en veut plus. C’est même pour cela que l’UE perdure. Elle vit dans le perpétuel traumatisme des fosses communes et se rassure par la pensée magique : le doux commerce et les Droits de l’Homme la maintiendront dans la prospérité. Pensée performative de névrosé funambule, tremblant au-dessus de l’abîme, condamné à choir un jour sous les secousses du Réel.

     

    Après cet énième échec géopolitique, l’Union Européenne avait une ultime occasion de montrer qu’elle pouvait servir à quelque chose. C’est raté. Encore. Pas de mutualisation de la dette : les rentiers de la Forêt Noire et du Bénélux ne lèveront pas le petit doigt pour leurs “frères” latins, pas plus qu’ils ne le firent pour leur “mère” athénienne – en 2009 comme en 2020. Les Latins paieront donc, France comprise : dans l’illusoire “couple franco-allemand” – expression dont Coralie Delaume rappelle avec justesse qu’elle n’existe que de notre coté du Rhin – la France conserve le rôle de la femme battue. Ses élites choisiront sans doute de se tourner vers le M.E.S., afin qu’on lui prête une partie de sa propre contribution – cent quarante-deux milliards, une bagatelle.

     

     

    Pourtant, si l’Europe nous en fout plein la gueule, rien ne nous oblige à virer masochistes. En cette période de lutte contre les violences conjugales, sortons la Patrie du joug de son bourreau, sauvons notre mère la France, achevons le monstre bruxellois qui a déjà la pâleur du cadavre. Du courage ! Car ceux qui n’auront su donner le coup de boutoir paieront les frais d’enterrement.

     

    Étienne Auderville

  • Société • La cause des arbres : les arbres, climatiseurs des villes [1]

     

    Par Jean-Philippe Chauvin

     

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    Mercredi matin, sur RMC, un spécialiste des changements climatiques expliquait qu'un arbre, par sa simple existence, équivalait à l'efficacité de cinq climatiseurs : en période de fortes chaleurs, l'argument peut être entendu plus facilement et largement, peut-être, qu'en temps normal. Or, dans certaines villes et dans des communes périphériques où le bitume marque l'envahissement « rurbain », les arbres sont souvent victimes de politiques qui se veulent d'aménagement quand elles ne sont, trop souvent, que d'arrangements commerciaux ou « économiques ». Ainsi, à Rennes, ville devenue « trop minérale » et qui met des arbres maigrelets en pots, sans enracinement, sur des places passantes souvent irrespirables l'été, la municipalité de Gauche n'a visiblement pas connaissance des qualités indéniables des arbres et la récente canicule ne lui a, non moins visiblement, rien appris, poursuivant ainsi dans sa politique « arboricide », depuis, hier, la place Hoche jusqu'à l'avenue Janvier dans quelques mois : l'abattage des beaux arbres sexagénaires de cette dernière voie est programmé pour l'automne, semble-t-il, sans que les cautions « écologistes » de la majorité municipale ne s'en émeuvent... 

    Et pourtant ! Un récent hors-série de La Vie-Sciences, encore en kiosques, est entièrement consacré aux arbres, et mérite lecture attentive. Ainsi, on y lit, sous la plume du botaniste Francis Hallé, quelques éléments qui montrent tout l'intérêt des arbres face au réchauffement climatique et à ses effets en milieu urbain : « Chacun sait bien qu'il trouve de la fraîcheur sous un arbre et encore plus dans un sous-bois. L'ombre coupe des effets du soleil, mais elle n'est pas seule responsable de la chute des températures. Cette dernière vient surtout de l'évaporation. Les arbres sont comme de formidables mèches : depuis leurs racines, l'humidité monte dans la plante, l'hydrate et finalement s'évapore par le haut, ce qui rafraîchit l'atmosphère. » Ce ne sont donc pas les misérables arbres en pot, à peine esthétiques, qui peuvent jouer le rôle de climatisation que les populations demandent parfois au cœur d'un été brûlant, puisqu'ils n'ont guère de racines, prisonniers qu'ils sont de leur carcan de plastique ou de bois peint. 

    Dans la même revue, le géographe Bruno Sirven complète le propos de son prédécesseur : « En ville, l'arbre habite le milieu le plus hostile : air et sol viciés, chaleur, éclairage permanent, vandalisme, pare-chocs... Ses bienfaits sont particulièrement appréciés des citadins, car il leur rend la ville plus hospitalière. 

    « Pour des raisons climatiques, d'abord. L'arbre abrite, il domine et offre un second toit aux immeubles. Il ombrage les terrasses et les jeux de boules, les foires et les marchés, et accompagne trajets et flâneries. Il fait chuter les températures estivales et combat les îlots de chaleur (jusqu'à 10 ° C). Que seraient nos villes sans ce parasol hors-pair ? Plus qu'un écran, il capte et diminue l'énergie solaire, ventile et hydrate l'air, le décrasse des gaz, suies, pollens et autres particules délétères. Il l'oxygène, l'ionise et même l'assainit en diffusant des molécules aseptisantes. » 

    Ce rôle majeur de climatiseur naturel, mais qui n'est pas le seul bénéfique des arbres comme on peut le voir et le constater en se promenant sous leurs branches et feuillages, ne peut désormais être négligé par les édiles locaux, de Rennes comme d'ailleurs, et il devrait amener aussi les villes à envisager une replantation massive de rangées d'arbres, en prévision d'un avenir que nombre de scientifiques, pas encore démentis par les faits, nous annoncent marqué par un sensible réchauffement climatique (même si nous savons que, en histoire du climat, comme en histoire tout court, l'imprévu est toujours possible, pour le meilleur comme pour VIEILLARD-ET-TROIS-JEUNES-H.jpgle pire). Jean de La Fontaine, en son temps, a tout dit de cette politique qui s'enracine (c'est le cas de le dire !) dans la durée, celle-là même que néglige trop souvent le « temps démocratique » : dans sa fable intitulée « Le Vieillard et les trois jeunes Hommes » [Illustration], il raconte l'histoire de cet octogénaire qui plantait des arbres quand les jeunes gens moquaient cette action dont il ne tirerait, croyaient-ils, aucun intérêt, eu égard à son grand âge. « Mes arrière-neveux me devront cet ombrage », affirme le vieil homme... Une politique « dynastique », en somme, qui pourrait profiter aux générations suivantes, et cela sur plusieurs décennies, voire siècles selon les espèces d'arbres envisagées. 

    Aussi, la volonté municipale d'abattage des arbres de l'avenue Janvier à Rennes, qui va à l'encontre de ce que les scientifiques prônent et de ce qu'il est raisonnable de faire ici et ailleurs, maintenant et demain, apparaît comme une absurdité écologique et, plus encore, un crime contre l'esprit et la raison : s'y opposer, c'est encore le meilleur moyen, ici et maintenant, de défendre la cause des arbres, et d'assurer celle des hommes !     (A suivre)

    Le blog de Jean-Philippe Chauvin

  • Mgr Athanasius Schneider : « L’exemple de ceux qui ont courageusement manifesté en public pour le droit à la liberté de

    Monseigneur Schneider, avec l’interdiction des messes publiques imposée par le , nous avons assisté à des scènes que nous n’aurions jamais pensé voir en France… messes clandestines volets fermés, dénonciation des voisins, intervention des forces de l’ordre. Elles rappellent un peu vos souvenirs d’enfance, que vous dépeignez dans votre dernier livre Christus Vincit… un signe inquiétant, selon vous ?

    En effet, les circonstances que vous avez évoquées me rappellent très vivement l’époque dans l’Église persécutée où les prêtres et les fidèles devaient se réunir en secret pour la célébration de la sainte et des sacrements. L’interdiction sans compromis du culte public dans les églises de nombreux pays du soi-disant Occident libre, et notamment en France, en Irlande et en Grande-Bretagne, est un signe indéniable de la persécution de l’Église par la classe politique dirigeante. Ces événements doivent nous réveiller tous. De nombreux catholiques ont, jusqu’à présent, vécu sous l’illusion que le monde et la classe politique de notre époque montraient de la sympathie pour l’Église. On peut espérer que leurs yeux aient enfin été ouverts à la vérité que l’Église n’est pas de ce monde et que les dirigeants de ce monde, ayant dépouillé Christ de sa royauté sociale, le persécuteront toujours ainsi que ses disciples.

    Par charité, les catholiques devraient accepter de sacrifier leur messe pour protéger leur prochain, lit-on souvent sur les réseaux sociaux. Que répondez-vous à cela ?

    Tant que les gens peuvent aller au supermarché et utiliser les transports en commun, cet argument reste un argument fallacieux. Cet argument ne serait crédible que si l’on disait que les catholiques doivent accepter le sacrifice de ne plus aller dans une épicerie ou de ne plus sortir dans la rue pour protéger leur voisin de la contagion. Cependant, ce raisonnement révèle également le véritable état d’esprit d’un bon nombre de ses partisans. Dans ce cas, c’est l’expression d’un matérialisme fortement développé. Dans cette vision des choses, seuls les besoins du corps et d’autres valeurs temporelles sont considérés comme d’une importance vitale. Cependant, l’âme est plus importante que le corps, la vie éternelle est plus importante que la vie temporelle. On oublie cet important enseignement divin de notre Seigneur qui disait : « L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » (Mt 4:4) et « Quel profit en effet aura l’homme, s’il gagne le monde entier, mais perd son âme ? » (Mt 16:26). C’est avec regret et étonnement que nous constatons que l’hérésie du matérialisme et du naturalisme a déjà pénétré si profondément dans les pensées et les actions de nombreux catholiques et même de nombreux prêtres et évêques. L’Église doit restaurer la primauté de l’âme et de la vie éternelle.

    Dans pas moins de 69 villes, les catholiques français se sont réunis sur le parvis de leur cathédrale pour protester contre cette interdiction. Essentiellement des laïcs. Les évêques les ayant soutenus se comptent sur les doigts d’une seule main. Plusieurs les ont même explicitement désavoués. Faut-il y voir la marque de cette « asthénie cardiaque » qui frappe l’Église actuellement, comme vous l’écrivez dans votre livre, ou est-il assez légitime qu’en phase de négociation avec le gouvernement, ces prélats se montrent prudents ?

    L’exemple des catholiques français, et parmi eux d’un nombre élevé de jeunes gens et même d’enfants, qui ont courageusement manifesté en public pour le droit à la liberté de culte chrétien restera une page glorieuse dans l’histoire du catholicisme français contemporain. Comme si souvent dans l’Histoire, Dieu choisit les « petits » pour faire honte à de nombreux apparatchiks cléricaux et à de nombreux évêques, qui sont lâches devant les puissants du monde politique et médiatique et se taisent à son propre profit. Nous vivons une situation très étonnante : les petites brebis n’ont pas peur des loups, tandis que les bergers se cachent des loups. Nous avons tant besoin de vrais bergers à l’exemple de Jésus et de tant de saints évêques courageux de l’histoire de l’Église, à savoir un saint Athanase, Hilaire, Ambroise, Jean Chrysostome, depuis des temps plus récents l’exemple d’un cardinal Pie, un saint Pie X, un bienheureux cardinal von Galen. Quelle est l’actualité de l’avertissement suivant du pape Grégoire le Grand aux évêques ! Il semble que cette mise en garde a été écrite pour notre situation actuelle : « Fréquemment d’imprévoyants pasteurs redoutant de perdre la faveur humaine n’osent pas librement prêcher la franche doctrine et, selon la parole de la Vérité, s’emploient à la garde de leur troupeau non point avec le dévouement des bergers, mais à la façon des mercenaires : car en se réfugiant ainsi qu’ils font dans le silence, ils s’enfuient à l’approche du loup. Ce sont eux, véritablement, que le Seigneur accuse quand il les qualifie par le prophète de “chiens muets qui ne peuvent pas aboyer” » (Is 56,99). Et, se plaignant de nouveau, il ajoute : « Vous n’êtes pas montés aux brèches, vous n’avez pas élevé muraille autour de la maison d’Israël, pour tenir ferme dans la bataille, au jour du Seigneur » (Ez 13,5). Or « monter aux brèches », c’est parler librement contre les puissances de ce siècle pour la défense du troupeau. Avoir peur de s’exprimer en toute franchise, qu’est-ce, en effet, pour un pasteur, sinon, en se taisant, abandonner son poste ? Mais s’il s’expose lui-même pour la défense de son troupeau, il élève, face aux ennemis, « une muraille autour de la maison d’Israël » (Regula pastoralis, II, 4).

    Pour le journaliste du Figaro Jean-Marie Guénois, spécialiste des affaires religieuses, cette affaire serait le signe d’une division plus profonde, non pas tactique mais théologique, qui porterait sur « la foi en l’Eucharistie » et en la présence réelle. Qu’en pensez-vous ?

    Je pense que cette remarque est correcte. L’interdiction du culte public et la réaction incompréhensiblement timide de nombreux évêques, expose la véritable blessure profonde de la crise actuelle de l’Église. Cette blessure est la « blessure eucharistique ». Faisant allusion à la question de Jésus dans l’Évangile : « Qui dit-on qu’est le Fils de l’homme ? » (Mt 16:13), se pose maintenant cette question pour chaque catholique, chaque prêtre et chaque évêque : « Quoi et qui pensez-vous que l’Eucharistie est ? » Nous devons prendre l’exemple de nos frères et sœurs de l’époque de la persécution dans les premiers siècles et proclamer haut et fort : « Sans la sainte Eucharistie, sans la sainte messe du dimanche, nous ne pouvons pas vivre ! » (sine Dominico non possumus). Puisse le feu de la courageuse confession des catholiques français, que nous avons vu ces derniers dimanches, brûler possiblement dans toutes les villes de France et aussi des autres pays catholiques, et que retentisse ce cri digne et intrépide : « Sans la messe de dimanche, nous ne pouvons pas vivre ! »

     

  • «Mila agit comme le révélateur de la médiocrité de tous les pouvoirs», par Céline Pina.

    «Dimanche, de retour sur Twitter, Mila a été prise en chasse par une meute organisée alors que son post était des plus anodins.» @magicalorrs

    Le compte Twitter de la jeune Mila a été brièvemement suspendu à la suite d’une publication qui avait provoqué des commentaires «haineux». Pour l’essayiste Céline Pina, cette censure exercée par le réseau social est une pratique antidémocratique, qui stigmatise une victime et illustre le manque de courage politique des gouvernants, incapables de sanction.

    5.jpgPersonne n’a oublié Mila, cette jeune fille si courageuse qui n’a plus droit à une vie normale parce que des islamistes ont rétabli de fait le délit de blasphème sur notre sol. Pour avoir dit crûment ce qu’elle pensait de l’islam sur la toile, ce qui en France est parfaitement légitime, elle se retrouve menacée de mort par des personnes tout à fait capables de passer à l’acte.

    Depuis cette histoire, l’adolescente se terre et l’État peine à lui assurer un cadre protecteur et ne se soucie pas suffisamment de son avenir. Déscolarisée deux fois de suite, la jeune fille semble assez isolée et les réseaux sociaux sont un de ses seuls espaces de liberté, bien qu’elle y soit traquée par des islamistes parfaitement organisés qui ont fait d’elle un symbole et un trophée.

    Ainsi dimanche, de retour sur Twitter, Mila a été prise en chasse par une meute organisée alors que son post était des plus anodins. Et bien que croyez-vous que fit le réseau social? Il suspendit Mila, l’accusant de pratiquer ce qu’elle ne cesse de subir et a détruit sa vie: le harcèlement.

     

    On peut se demander à quel jeu joue le réseau social et se poser la question des conséquences de règles de modération qui stigmatisent une victime pour mieux gratifier ses bourreaux. 

     

    L’histoire est décourageante. Elle commence pourtant joliment. Mila retrouve un de ses dessins d’enfant et le poste. S’en suivent alors des centaines de messages de haine, lui promettant viols et diverses joyeusetés.

    D’après Ouest France, «les commentaires insultants proviennent pour la plupart de comptes anonymes. Mais tous revendiquent leur lien avec un mystérieux utilisateur, nommé FC Sinje.» Ce qui arrive ici est parfaitement connu de tous ceux qui ont une petite ou importante notoriété sur les réseaux: certains groupes organisés les prennent en chasse et se donnent le mot pour fondre en masse sur leur cible en meute. La méthode est connue et renseignée et bien entendu aucun des dirigeants de Twitter ou de Facebook ne l’ignore.

    Pourtant, suite à cette campagne de harcèlement organisée, Twitter, s’abritant derrière la logique des algorithmes, a choisi de censurer la victime et a envoyé un message de félicitations à l’un des persécuteurs en ligne. On peut donc réellement se demander à quel jeu joue le réseau social et se poser la question des conséquences de règles de modération qui stigmatisent une victime pour mieux gratifier ses bourreaux.

    Twitter a fini par concéder une «erreur de modération», mais ne semble pas avoir agi contre cette bande organisée, ni même contre les comptes qui persécutent Mila. Pourquoi un tel refus d’action?

    La question se pose d’autant plus que le réseau, très attaché à son image démocratique, n’a pas hésité à censurer, au nom de la morale, Donald Trump alors qu’il était encore président des États-Unis. Cela signifierait-il que selon Twitter, appeler au viol et à la violence sur une jeune fille de 17 ans, comme organiser des raids virtuels, ne pose aucun problème de «standard à la communauté»?

    Cela signifierait-il qu’il aurait exhibé un faux courage consistant à piétiner Donal Trump, alors qu’il était déjà à terre, pour s’offrir une image de courage et de dignité alors qu’en coulisse il laisse harceleurs et haineux mener la danse? En tout cas cela y ressemble beaucoup.

    Pour le reste, notre classe politique est toujours aussi peu courageuse, mais Marlène Schiappa et Cédric O ont protesté et demandé des comptes à Twitter. Le problème c’est que même si on peut croire à la sincérité de la réaction des deux ministres, il y a fort à parier que cela ne changera pas grand-chose. Souvent ce gouvernement croit qu’agir, c’est faire un tweet et en reste là. Il n’a même pas le courage d’envisager qu’il puisse exercer des rétorsions contre le réseau américain, ni même d’exiger quoi que ce soit de Twitter.

     

    Mila vient de démontrer que la censure exercée par Twitter à l’égard de Donald Trump n’avait rien de démocratique et qu’aucun principe ne la guidait. 

     

    Et pourtant, si ce qui a été fait contre Mila donnait lieu à un démantèlement en règle de la logique des raids en faisant de cette histoire, un exemple, en livrant les identités des harceleurs à la police et en leur demandant des comptes devant les tribunaux, nous commencerions à respirer un peu mieux. Mais il ne faudra probablement compter ni sur le gouvernement, ni sur twitter. Les deux préfèrent la communication à la responsabilité.

    Une fois de plus, Mila agit comme le révélateur de la médiocrité du pouvoir, de tous les pouvoirs. Elle vient de démontrer que la censure exercée par Twitter à l’égard de Donald Trump n’avait rien de démocratique et qu’aucun idéal ni principe ne la guidait.

    C’était juste un coup pour se donner l’air d’avoir une conscience sans en assumer les frais. Car quand il s’agit de défendre une frêle jeune fille menacée de mort par une idéologie portée par des hommes et des États riches et puissants, relayés par des internautes fanatisés et radicalisés qui agissent en bande, alors là, la violence est acceptée. Le nombre fait la loi, même si l’idéologie des islamistes n’a rien à envier à celle défendue par Hitler, on ne trouve personne pour fermer leurs comptes.

    Les dirigeants de Twitter, si scrupuleux quand il s’agit de mener le combat contre QAnon, peuvent même fermer les yeux sur des menaces de mort et de viols pour peu qu’elles soient faites au nom de l’islam ou que les messages invoquent «l’islamophobie présumée»de la victime.

    Et là, le puissant Twitter, tout d’un coup, devient incapable de bloquer les comptes. Cette nouvelle affaire n’est pas une affaire Mila, mais une affaire Twitter.

     

    Ancienne élue locale, Céline Pina est essayiste et militante. Elle est la fondatrice de «Viv(r)e la République», elle a également publié Silence coupable (Kero, 2016).

    Source : https://www.lefigaro.fr/vox/

  • 28 février 2007/28 février 2021 : lafautearousseau fête ses quatorze ans !

    (extrait de notre Éphéméride de ce jour)

     

    bouquet.jpg2007 : Première note de lafautearousseau
      
     
    C'est en effet le 28 février 2007 qu'a été "envoyée" notre première note, et qu'a débuté l'aventure de lafautearousseau. Intitulée "La question de fond", il s'agissait - dans cette première note - de dresser une sorte de bilan, à grands traits, de l'état dans lequel se trouve la France deux cent quinze ans après la rupture imposée par la Révolution.
     
    Et de poser cette simple question: Tout ça, pour ....ça ?

    Irrégulier d'abord, le rythme de publication des notes est devenu "quotidien" à partir du 30 juillet 2007, puis il est passé à deux notes par jour à partir du 8 février 2008 (avec une note brève, "Ainsi va le monde", signalant une tendance, un fait, un propos intéressant ou significatif, tiré de l'actualité immédiate...; suivie d'une note plus étoffée, traitant plus à fond d'un sujet important, de nature très variée...

    Ensuite sont venues les Éphémérides, puis plusieurs autres rubriques, notamment celle recensant les Activités partout en France, et la publication d'Albums, de Grands Textes, de Documents au format PDF, de Vidéos etc... Sans oublier, bien sûr, l'ouverture de notre Page Facebook Lafautearousseau Royaliste, puis de notre Compte Tweeter A.F. Royaliste, de notre Compte Telegram...

    Voici, à titre de document d'archive en quelque sorte, l'intégralité de cette première note : 

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    Mercredi, 28 février 2007

    "LA" question de fond...

    Comment en sommes-nous arrivés là ? La République a pris une France en bon état, elle nous laisse une France au plus mal... nous étions le pays le plus peuplé d'Europe sous Louis XV et Louis XVI, nous avons été rattrapés puis dépassés par les autres. Notre vitalité démographique a été brisée par les saignées effroyables directement liées à la Révolution et à la République : 800.000 morts (Révolution); 1.500.000 morts (folles guerres napoléoniennes); 500.000 habitants perdus en 1815 à cause des Cent jours, dernier mauvais coup porté à la France par l'orgueil délirant de Napoléon; I.5OO.000 morts en 14/18 et 600.000 en 39/45; total: 4.900.000 français "évaporés", disparus, sortis de l'Histoire par les conséquences directes ou indirectes de l'irruption des idées révolutionnaires et des politiques aberrantes des différentes républiques. Quel pays pourrait-il supporter de tels traumatismes à répétition ? La France y a perdu une part importante de sa substance, au sens fort du terme (physique, pourrait-on dire)...

    Et que dire du rayonnement de la France, de l'attrait universel que sa culture, ses Arts, sa civilisation exerçaient sur l'Europe entière, et bien au delà: tout le monde nous enviait et nous imitait sous Louis XV et Louis XVI : le Roi de Prusse commandait ses armées en français; Mozart commençait ses lettres à son père par "Mon cher père"; les écrivains russes parsemaient leurs ouvrages de mots français, et parfois de phrases entières; on construisait Washington (symbole d'un pays nouveau) en s'inspirant ouvertement du classicisme architectural français; presque tous les dirigeants européens se sont fait construire leur petit Versailles; dans tous les domaines, c'était la France qui donnait le ton, c'était vers Paris que convergeaient tous les regards: la France royale avait su amener la société à son plus haut degré de raffinement, et nous connaissions alors ce qu'était "la douceur de vivre"... : la France en est-elle toujours là aujourd'hui ? Séduit-elle toujours autant ? Tient-elle la même place, ou d'autres que nous donnent-ils le ton...?

    Comment ne pas être frappé par la dégradation effarante du moral des français, de leur "mental" ? Nous étions optimistes sous Louis XV et Louis XVI, car avec nos 29 millions d'habitants nous étions le mastodonte démographique de l'Europe, dont nous étions également, et de très loin, le pays le plus étendu: cette double sécurité nous rendait foncièrement optimistes, et c'est de cette époque que date ce dicton selon lequel "en France, tout finit par des chansons": aujourd'hui nous sommes un peuple frileux, qui doute, et qui est le champion d'Europe incontesté de la consommation d'anti-dépresseurs; et que dire de notre situation économique et de notre richesse: entre le quart et le tiers de notre patrimoine artistique a été détruit par la Révolution; notre pays ne cesse de reculer au classement mondial des performances, cependant que l'appauvrissement et la précarité ne cessent de s'étendre parmi nos concitoyens; la violence et l'insécurité (dans tous les domaines) ont littéralement explosé et sont devenus des réalités tristement quotidiennes; la classe politique est très largement discréditée - même si un grand nombre d'élus ne méritent pas de reproches particuliers - et l'opinion publique se détache de plus en plus de la "chose publique", n'ayant plus d'espoir en l'avenir et se laissant aller à un pessimisme nouveau dans notre Histoire...

    Comment se fait-il donc, qu'en partant du pays le plus riche et le plus puissant d'Europe on en soit arrivé à un résultat aussi catastrophique et aussi désolant ? Puisqu'on a appliqué à ce pays la plus merveilleuse des constructions intellectuelles qui soient, puisqu'on l'a régi en fonction des meilleurs principes qui aient jamais été inventés, en toute logique ce pays n'a pu que passer du stade de super puissance qui était le sien à celui de super puissance démultiplié ! Nous devons donc nager dans le bonheur... sinon: cherchez l'erreur ! Il est vrai qu'avec le conformisme que fait régner la république, un conformisme qui n'a jamais été aussi fort chez nous et qui confine à l'étouffement de la pensée, nos concitoyens ont du souci à se faire: dire que nous vivons sous le règne du politiquement correct, de la police de la pensée, du conformatage de l'opinion ne relève même plus du constat mais de la banalité. Qu'on se souvienne de la grande liberté de ton, de parole, d'action dont nous jouissions sous Louis XV et Louis XVI, et une seule question vient à l'esprit: tout ça, pour... ça ?

    Avec, si rien n'est fait, l'effacement continu, la disparition progressive de la France, sa sortie prochaine de l'histoire, du moins en tant que grande puissance, voire puissance tout court...

  • Macron ou le Mépris au pouvoir, par Christian Vanneste.

    Jupiter à Athènes, Narcisse à Pointe-à-Pitre. Lorsque M.Macron use de mots insultants c’est de la provocation pédagogique. Lorsque l’opposition fustige la mauvaise gestion de crise à Saint Martin, c’est de la politique politicienne. Jupiter foudroie avec arrogance. Narcisse est immaculé. L’Etat qu’il préside ne commet pas d’erreur et avait anticipé les conséquences de l’ouragan : “L’Etat s’est parfaitement organisé” ose dire le Président.

    christian vanneste.jpgLorsque l’évidence est criante et la comparaison défavorable, il suffit d’écarter la réalité d’une phrase ! En revanche, ceux à qui il succède étaient des fainéants, des cyniques et des extrêmes ! C’est ainsi que Castaner a tenté de justifier l’emploi de qualificatifs méprisants destinés aux prédécesseurs, incapables de procéder aux réformes salutaires. A qui étaient-ils vraiment adressés ? Aux extrêmes aussi ? Comme ce mot ne peut viser le prédécesseur dont Macron a été le collaborateur zélé, il saute aux yeux que les trois termes qualifiaient les opposants du jour, ceux qui osent critiquer la défaillance de l’Etat à Saint Martin ou encore ceux qui ont défilé dans toute la France pendant que les caméras étaient habilement détournées vers les Antilles. Les deux autres mots, dont le révélateur “fainéant” avaient le même objectif. On peut certes penser que certains privilèges en matière de retraite et globalement face aux obligations du travail, peuvent susciter la colère et la vindicte de ceux qui en sont privés. Beaucoup pensent par exemple que les cheminots d’aujourd’hui ont hérité des avantages concédés en raison de conditions de travail pénibles qui ont disparu et qu’une telle situation est donc injuste. Pourtant, rares seraient ceux qui useraient d’un terme offensant pour exprimer leur dépit. Si le Président a l’intention d’améliorer une situation que les gouvernements de droite ont eu beaucoup de mal à traiter en raison des grèves et des manifestations que les amis de M.Macron soutenaient, on ne va pas le lui reprocher. Simplement, on ne voit pas en quoi l’injure pourrait faciliter les choses. Pour le coup, le Président, tel que le conçoit la Ve République, doit être le Premier de tous les Français. Il doit expliquer et montrer l’intérêt général au lieu de blesser, de stigmatiser, de dresser les Français les uns contre les autres. Par ailleurs, il doit accepter que l’opposition joue son rôle qui est de critiquer l’action gouvernementale lorsqu’elle n’est pas efficace. La polémique s’inscrit dans la vie démocratique et les débats qui en sont la matière quotidienne. La condamner trahit une difficulté à accepter la réalité de la démocratie.  Le modèle, hélas trop éphémère, était Pompidou qui affrontait les conférences de presse avec beaucoup d’intelligence et d’humanité, mais avait aussi créé ce contact intime et authentique avec les Français, dans ses causeries “au coin du feu”.  Refuser les conférences de presse, et leurs questions, choisir les médias qui bénéficieront de la parole présidentielle sont des comportements qui ne peuvent que susciter une légitime inquiétude. Une question se pose de plus en plus : la personnalité particulière de l’occupant actuel de l’Elysée est-elle compatible avec la fonction présidentielle ?

    Le monde de Macron est binaire. Il y a ceux qui réussissent et d’autres qui ne sont rien. Lui-même fait partie des premiers, et ce sentiment de supériorité, invité à la discrétion dans une République qui fait de l’égalité l’un de ses trois piliers, semble correspondre à ce que Freud appelle le “retour du refoulé”. Le Président sait très bien qu’il n’a pas le droit d’écraser de son mépris les alcooliques du nord, les illettrées de Bretagne, les “sans-costume”, et pourtant, comme si son inconscient brimé se réveillait, le trait jaillit, la main balaie avec arrogance ce peuple qui déteste les réformes, qu’on lui imposera quand même, parce qu’on sait et qu’il est ignorant. Selon lui, il faudrait qu’il y ait plus de Français valables, qui souhaiteraient donc devenir milliardaires. Lui-même aurait pu l’être, mais son extraordinaire générosité, son altruisme compatissant lui ont fait préférer le service de l’Etat, au niveau qui était, légitimement le sien, le plus haut, plutôt que de continuer à gagner des millions en organisant des mariages d’entreprises et des transactions financières dans une grande banque d’affaires. L’idée ne lui est pas venue qu’il n’est en rien un créateur, un inventeur, un ingénieur, mais seulement un membre du microcosme, comme tous ceux qui dans les affaires et dans la politique détiennent des postes qui demandent de l’habileté et des relations, non un travail dur et ingrat. Sans la moindre expérience de terrain, sans avoir affronté ce que les Romains appelaient la course aux honneurs, ce parcours des élus, qui d’un pouvoir local au pouvoir suprême, leur permet de connaître le pays, ses habitants, et les oblige à se livrer à ce délicat et épuisant exercice de la disponibilité et du service, pour pouvoir ensuite prétendre diriger la Cité dans le sens du bien commun, Macron a accédé immédiatement à la place qui était naturellement la sienne, qui lui revenait de droit. Du moins, le pense-t-il…

    Le mépris, c’est chez Monsieur Macron comme le bras tendu du nazi Docteur Folamour dans le film de Stanley Kubrick, une marque de fabrique indélébile de l’oligarchie, de l’énarchie, du microcosme pour lequel la démocratie est une façade, quand le pouvoir est dans les coulisses. Affiché sans nuances dans ses dérapages, il transparaît plus finement dans la mise en scène présidentielle. Celle-ci table sur la réaction de la foule aux modèles que lui ont imposés les médias. La proximité, en chemise et cravate est un copié-collé d’Obama, cette catastrophe américaine brandie comme une idole médiatique chez nous. Le couple étonnant, avec cette épouse improbable, est destiné à susciter la sympathie, sinon la compassion. Les images jetées à la presse spécialisée ne sont pas volées, mais savamment dosées. Comment ne pas succomber à cette histoire d’amour qui défie les normes et le temps. Comment ne pas y être sensible ? C’est d’ailleurs une histoire analogue qui avait suggéré une des plus touchantes réparties de Pompidou, citant Eluard, lors d’une conférence de presse. Mais, ici, on n’est pas mort d’aimer. Il y a eu une Happy end. Le public peut être content, et si l’histoire n’est pas vraie, c’est encore plus fort.

    Source : https://www.christianvanneste.fr/

  • Le numéro 1192 (15 juin 2020) de Royaliste est paru...

    Un nouveau numéro de “Royaliste” (numéro 1192, daté du 15 juin 2020) vient de paraître.

    SOMMAIRE DU NUMERO
     
    Page 2 - Economie, il est urgent d'agir. – Des chiffres et des lettres.
    Page 3 – Chronique des haines ordinaires. – L’Écho du net.
    Page 4 – La crise sanitaire et l’agriculture. – La quinzaine sociale.
    Page 5 – Vivre pour étudier, pas étudier pour vivre.
    Page 6 – Une Asie centrale en mutation. – Voix étrangères. – Les Faits marquants.
    Page 7 – Les émeutes et la présidentielle américaine.
    Pages 8 et 9 – Dissuasion : entretien avec l’amiral Debray.
    Page 10 – Congo belge. – Dans les revues.
    Page 11 – Albert Camus, toujours présent.
    Page 12 – Sida : quels espoirs pour demain ?
    Page 13 – Nos lecteurs ont la parole.
    Page 14 – Royalistes contre nazis : Maurice Dutheil de la Rochère.
    Page 15 – Le mouvement royaliste.
    Page 16 – Éditorial : Protéger l'économie nationale.
     
     

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    Bonne lecture.
    La Rédaction
  • Royaliste n°1199 (23 Novembre 2020)

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    Un nouveau numéro de “Royaliste” (numéro 1199, daté du 23 novembre) vient de paraître.
     
     
    Au sommaire :
     
    Page 2 - Education et Covid : mon école va-t-elle craquer ? – Sur le mur de Jean Chouan.
    Page 3 – Une panthéonisation en catimini. – L’Écho du net.
    Page 4 – Le ferroviaire alsacien sacrifié par Bruxelles. – La quinzaine sociale.
    Page 5 – Grandes surfaces : méli-mélo dans le chariot !
    Page 6 – Les heures sanglantes du Kosovo. – Voix étrangères. – Les faits majeurs.
    Page 7 – L'Amérique en pause.
    Pages 8 et 9 – Entretien avec David Cayla sur son livre Populisme et néolibéralisme.
    Page 10 – La mer, espace à ménager. – Dans les revues.
    Page 11 – Orwell pour aujourd'hui.
    Page 12 – Le Maître et Marguerite de Boulgakov.
    Page 13 – Le bataillon français de Corée. – France-USA.
    Page 14 – Royalistes contre nazis : Daniel Cordier.
    Page 15 – Le mouvement royaliste.
    Page 16 – Instituer la République.
     
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    Bonne lecture.
    La Rédaction
  • Sur TV Libertés, déboulonner la société en autocélébration permanente - Le Zoom - Maximilien Friche.


    Maximilien Friche, rédacteur en chef du blog "Mauvaise Nouvelle" et journaliste à "L'Incorrect", est un romancier en vue qui vient de publier "Apôtres d’opérette". Les apôtres du livre rédigent des articles métapolitiques pour "déboulonner tous les raisonnements d'une société en autocélébration permanente". Très vite, les héros de Maximilien Friche passent de la narration à l'action, et à l'action violente. Ils vont aller jusqu'à se faire sauter en place publique à Auch, Toulouse et Paris pour bousculer une société qui s'effondre. Derrière son aspect tragi-comique, "Apôtres d'opérette" est un roman subversif et exigeant qui veut combattre la société de l'autosatisfaction par le chaos.

  • Education • Jean-François Chemain : » On produit des citoyens frustrés »

     

    par Jean-Baptiste d'Albaret

    A l’heure de la rentrée des classes, Politique magazine a rencontré Jean-François Chemain, un professeur pas comme les autres. Ancien cadre dirigeant d’un grand groupe industriel français, il décidait, en 2006, de se consacrer à l’enseignement dans un collège de ZEP de la banlieue lyonnaise. Rencontre avec un homme qui porte un regard aimant mais lucide sur notre système éducatif.

    Chemain-600x417.jpgPourquoi avez-vous choisi d’enseigner l’histoire dans des quartiers réputés difficiles ?

    C’était sans doute ma vocation. J’ai fait mon collège en banlieue lyonnaise, à Villeurbanne, où, dans les années 70, il y avait déjà une forte immigration maghrébine et cela m’a marqué. Or l’intégration des enfants d’immigrés est aujourd’hui en panne et laisse le terrain à un communautarisme où le mépris le dispute au ressentiment. Situation préoccupante, surtout quand ce communautarisme prend la forme du radicalisme le plus violent. Comment certains de ces jeunes débordant de vie en viennent-ils à avoir des pulsions de mort ? Je crois que l’éducation nationale a un rôle à jouer dans la réussite de l’intégration.

    Comment ?

    Comme le disait Simone Weil : « Il faut donner à la jeunesse quelque chose à aimer et ce quelque chose c’est la France »… Croyez-moi, ces jeunes n’attendent que ça. J’obtiens d’excellents résultats en évoquant Jeanne d’Arc ou Napoléon, fortement minimisés dans les programmes. A l’évocation du dernier carré de la garde à Waterloo, les yeux brillent de fierté. Donnons-leur de bonnes raisons d’aimer notre pays ! Même si dans leur famille ou leur pays d’origine ils entendent toutes sortes de clichés négatifs sur notre histoire – mais la faute à qui ? –, il n’en demeure pas moins que leurs parents ont, à un moment donné, choisi la France. C’est de cette histoire qu’ils attendent qu’on leur parle. Malheureusement, ce n’est pas le projet de ceux qui, au contraire, s’appliquent à déconstruire le roman national en imposant par les programmes un regard critique et distancié sur la France car il faudrait faire accéder notre jeunesse à une conscience supérieure, cosmopolite et mondialisée. Mais la mère de toutes les violences, c’est précisément celle qu’on lui inflige en refusant d’étancher sa soif d’aimer et de connaître. Dans ces quartiers, on risque de produire des citoyens frustrés.

    Ou, à défaut d’aimer la France et de se sentir français, on se revendique musulman…

    En banlieue, beaucoup se définissent en effet par rapport à l’islam. Il y a les convictions mais il y a aussi un fait sociologique : la grande majorité étant de confession musulmane, l’islam est une culture populaire qui homogénéise et structure l’environnement. C’est très net au moment du ramadan quand ceux qui ne le font pas sont regardés de travers. C’est que cette majorité religieuse n’imagine sincèrement pas que l’on puisse ne pas croire en Dieu ni même que l’on puisse venir d’une autre culture. Aussi faut-il montrer des signes d’appartenance. D’où de nombreux européens « de souche » qui se disent musulmans.

    On parle de plus en plus de laïcité à l’école. Ce discours a-t-il prise sur ces jeunes ?

    L’école s’est donné pour but d’éduquer les enfants afin d’en faire de bons petits républicains… Mais ce n’est pas avec des programmes édulcorés qu’on va leur donner le goût de notre pays. De même, quelques heures de morale laïque ne suffiront pas à faire d’une population très ancrée dans son identité culturelle et religieuse d’origine, un peuple unifié autour des « valeurs » promue par l’Education nationale. L’ambition est démesurée ! Certains tombent des nues en découvrant que certaines familles n’ont de cesse de déconstruire ce que leur enfant apprend à l’école. Dans les quartiers populaires, tel Sisyphe, le professeur doit recommencer le lendemain ce qu’il croyait acquis la veille.

    Vous dites que le discours sur la laïcité est inadapté auprès de la jeunesse des quartiers populaires ?

    Oui, car il est complètement à côté de la plaque. Dans un de mes livres (Une autre histoire de la laïcité, NDLR), je démontre que la laïcité, ce n’est pas le combat de l’état pour se libérer de la tutelle de l’église mais exactement l’inverse. Ce combat n’a pas 200 ans mais 2000 ans. Si nous sommes effectivement dans un pays laïc, c’est d’abord parce que ce pays est chrétien, et particulièrement catholique. La laïcité n’est donc pas neutre. D’ailleurs les principes dits « républicains » qu’elle veut imposer sont très largement issus du message évangélique : partage des richesses, accueil des étrangers, reconnaissance et expiation de ses fautes… Sauf que la gauche qui s’en réclame veut les appliquer sans référence à Dieu et les rendre obligatoires sous peine de sanctions pénales ! C’est ce que j’appelle une forme d’augustinisme politique… Pour résumer, contrairement à ce qu’on dit, la laïcité n’est pas une logique de neutralité religieuse mais un principe chrétien. On ne la fera pas accepter tant qu’on ne l’aura pas définie avec précision et vérité.

    Quelles sont, selon vous, les autres tares de l’éducation nationale aujourd’hui ?

    La toute-puissance de l’idéologie en son sein est un véritable drame. Un exemple. Au nom de l’égalité, on a supprimé partout les classes bilangues qui drainaient beaucoup de bons élèves. De mêmes origines sociales et religieuses que les autres, ces élèves « d’élite », mis dans une ambiance de travail et d’excellence, réussissaient souvent brillement leurs études et leur vie professionnelle. Demain, ces jeunes « bons » à l’école et motivés par les études se retrouveront dans des classes dissipées où ils seront aspirés vers le bas. Par idéologie égalitariste, on prive ainsi une part non négligeable de la jeunesse des banlieues de la possibilité de faire de bonnes études !
    Le collège unique est un autre fléau. Certains jeunes ont de l’or dans les mains mais sont obligés de rester au collège jusqu’à l’âge de 16 ans pour étudier des matières qui ne les intéressent pas. Naturellement, ces gamins décrochent et rentrent dans un cercle vicieux de chahut et d’indiscipline. Ils sortent finalement du système scolaire avec un total sentiment de dévalorisation mais aussi d’impunité qui en conduira certains à faire bien autre chose qu’un travail manuel. Concrètement, le collège unique, c’est ça. Mais nous avons affaire à des idéologues. Et le propre des idéologues, c’est de s’entêter à marcher tout droit, même quand le chemin emprunté mène manifestement à l’impasse. 

    Jean-François Chemain a publié plusieurs livres, tous chez Via Romana : La vocation chrétienne de la France (2010), Kiffe la France (2011 et 2015 en version poche), Une autre histoire de la laïcité (2013), L’argent des autres, histoire de la caution à Rome (2015).

      - Politique magazine

     

  • Yoram Hazony : «Les nouveaux universalistes vouent aux gémonies l'indépendance nationale», par Paul Sugy.

    Yoram Hazony est spécialiste de la Bible et docteur en philosophie politique. Il est auteur de The Virtue of Nationalism (Basic Books, 2018). Yochanan Katz

    Le nationalisme est sur toutes les lèvres, et pourtant, affirme Yoram Hazony, ce concept n'a jamais été aussi mal compris. Le philosophe entend réhabiliter la «vertu du nationalisme», qu'il oppose à la «tentation impérialiste», et promouvoir la vision d'un monde fondé sur l'indépendance et la liberté des nations.

    FIGAROVOX/GRAND ENTRETIEN – Le nationalisme est sur toutes les lèvres, et pourtant, affirme Yoram HAZONY, ce concept n’a jamais été aussi mal compris. Le philosophe entend réhabiliter la «vertu du nationalisme», qu’il oppose à la «tentation impérialiste», et promouvoir la vision d’un monde fondé sur l’indépendance et la liberté des nations.

    Yoram HAZONY est spécialiste de la Bible et docteur en philosophie politique. Il a fondé le Herzl Institute et enseigne la philosophie et la théologie à Jérusalem. Ce penseur de la droite israélienne est également auteur de nombreux articles publiés dans les journaux américains les plus prestigieux, du New York Times au Wall Street Journal. Presque inconnu en France, son livre The Virtue of Nationalism a suscité un vif débat aux États-Unis.

    LE FIGARO MAGAZINE. – Le 11 novembre dernier, Emmanuel MACRON déclarait aux chefs d’Etat du monde entier: «Le nationalisme est la trahison du patriotisme.» Qu’en pensez-vous?

    Yoram HAZONY. – Aujourd’hui, on ne cesse de nous répéter que le nationalisme a provoqué les deux guerres mondiales, et on lui impute même la responsabilité de la Shoah. Mais cette lecture historique n’est pas satisfaisante. J’appelle «nationaliste» quelqu’un qui souhaite vivre dans un monde constitué de nations indépendantes. De sorte qu’à mes yeux, Hitler n’était pas le moins du monde nationaliste. Il était même tout le contraire: Hitler méprisait la vision nationaliste, et il appelle dans Mein Kampf à détruire les autres États-nations européens pour que les Allemands soient les maîtres du monde. Dès son origine, le nazisme est une entreprise impérialiste, pas nationaliste.

    Quant à la Première Guerre mondiale, le nationalisme est loin de l’avoir déclenchée à lui seul! Le nationalisme serbe a fourni un prétexte, mais en réalité c’est la visée impérialiste des grandes puissances européennes (l’Allemagne, la France, l’Angleterre) qui a transformé ce conflit régional en une guerre planétaire. Ainsi, le principal moteur des deux guerres mondiales était l’impérialisme, pas le nationalisme.

    Donald TRUMP, lui, avait déclaré il y a quelques semaines: «Je suis nationaliste.» Y a-t-il aujourd’hui un retour du nationalisme?

    Le nationalisme est en effet en vogue en ce moment: c’est du jamais-vu depuis 1990, date à laquelle Margaret THATCHER a été renversée par son propre camp à cause de son hostilité à l’Union européenne. Depuis plusieurs décennies, les principaux partis politiques aux États-Unis et en Europe, de droite comme de gauche, ont souscrit à ce que l’on pourrait appeler «l’impérialisme libéral», c’est-à-dire l’idée selon laquelle le monde entier devrait être régi par une seule et même législation, imposée si besoin par la contrainte. Mais aujourd’hui, une génération plus tard, une demande de souveraineté nationale émerge et s’est exprimée avec force aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Italie, en Europe de l’Est et ailleurs encore.

    Avec un peu de chance et beaucoup d’efforts, cet élan nationaliste peut aboutir à un nouvel ordre politique, fondé sur la cohabitation de nations indépendantes et souveraines. Mais nous devons aussi être lucides: les élites «impérialistes libérales» n’ont pas disparu, elles sont seulement affaiblies. Si, en face d’eux, le camp nationaliste ne parvient pas à faire ses preuves, elles ne tarderont pas à revenir dans le jeu.

    Quel est ce «nouvel empire libéral» dont vous parlez? Et qu’entendez-vous exactement par «impérialisme»?

    Historiquement, le «nationalisme» décrit une vision du monde où le meilleur système de gouvernement serait la coexistence de nations indépendantes, et libres de tracer leur propre route comme elles l’entendent. On l’oppose à «l’impérialisme», qui cherche à apporter au monde la paix et la prospérité en unifiant l’humanité, autant que possible, sous un seul et même régime politique. Les dirigeants de l’Union européenne, de même que la plupart des élites américaines, croient dur comme fer en l’impérialisme. Ils pensent que la démocratie libérale est la seule forme admissible de gouvernement, et qu’il faut l’imposer progressivement au monde entier. C’est ce que l’on appelle souvent le «mondialisme», et c’est précisément ce que j’entends par «nouvel empire libéral».

    Bien sûr, tous les «impérialistes libéraux» ne sont pas d’accord entre eux sur la stratégie à employer! L’impérialisme américain a voulu imposer de force la démocratie dans un certain nombre de pays, comme en Yougoslavie, en Irak, en Libye ou en Afghanistan. En Europe, on se désolidarise du militarisme américain: les impérialistes allemands ou bruxellois préfèrent d’autres formes de coercition… mais leur objectif est le même. Regardez comment l’Allemagne cherche à imposer son programme économique à la Grèce ou à l’Italie, ou sa vision immigrationniste à la République tchèque, la Hongrie ou la Pologne. En Italie, le budget a même été rejeté par la Commission européenne!

    Est-ce que, selon vous, le nationalisme et l’impérialisme sont deux visions de l’ordre mondial qui s’affrontaient déjà dans la Bible?

    Le conflit entre nationalisme et impérialisme est aussi vieux que l’Occident lui-même. La vision nationaliste est l’un des enseignements politiques fondamentaux de la Bible hébraïque: le Dieu d’Israël fut le premier qui donna à son peuple des frontières, et Moïse avertit les Hébreux qu’ils seraient punis s’ils tentaient de conquérir les terres de leurs voisins, car Yahvé a donné aussi aux autres nations leur territoire et leur liberté. Ainsi, la Bible propose le nationalisme comme alternative aux visées impérialistes des pharaons, mais aussi des Assyriens, des Perses ou, bien sûr, des Babyloniens. Et l’histoire du Moyen Âge ou de l’époque moderne montre que la plupart des grandes nations européennes – la France, l’Angleterre, les Pays-Bas… – se sont inspirées de l’exemple d’Israël.

    Mais le nationalisme de l’Ancien Testament ne fut pas tout de suite imité par l’Occident. La majeure partie de l’histoire occidentale est dominée par un modèle politique inverse: celui de l’impérialisme romain. C’est de là qu’est né le Saint Empire romain germanique, qui a toujours cherché à étendre sa domination, tout comme le califat musulman. Les Français aussi ont par moments été tentés par l’impérialisme et ont cherché à conquérir le monde: Napoléon, par exemple, était un fervent admirateur de l’Empire romain et n’avait pour seul but que d’imposer son modèle de gouvernement «éclairé» à tous les pays qu’il avait conquis. Ainsi a-t-il rédigé de nouvelles constitutions pour nombre d’entre eux: les Pays-Bas, l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne… Son projet, en somme, était le même que celui de l’Union européenne aujourd’hui : réunir tous les peuples sous une seule et même législation.

    Pourquoi le modèle nationaliste est-il meilleur, selon vous?

    Parce que ce modèle permet à chaque nation de décider ses propres lois en vertu de ses traditions particulières. Un tel modèle assure une vraie diversité politique, et permet à tous les pays de déployer leur génie à montrer que leurs institutions et leurs valeurs sont les meilleures. Un tel équilibre international ressemblerait à celui qui s’est établi en Europe après les traités de Westphalie signés en 1648, et qui ont permis l’existence d’une grande diversité de points de vue politiques, institutionnels et religieux. Ces traités ont donné aux nations européennes un dynamisme nouveau: grâce à cette diversité, les nations sont devenues autant de laboratoires d’idées dans lesquels ont été expérimentés, développés et éprouvés les théories philosophiques et les systèmes politiques que l’on associe aujourd’hui au monde occidental.

    À l’évidence, toutes ces expériences ne se valent pas et certaines n’ont bien sûr pas été de grands succès. Mais la réussite de l’une seule d’entre elles – la France, par exemple – suffit pour que les autres l’imitent et apprennent grâce à son exemple. Tandis que, par contraste, un gouvernement impérialiste comme celui de l’Union européenne tue toute forme de diversité dans l’œuf. Les élites bruxelloises sont persuadées de savoir déjà avec exactitude la façon dont le monde entier doit vivre. Il est pourtant manifeste que ce n’est pas le cas…

    Mais ce «nouvel ordre international» n’a-t-il pas permis, malgré tout, un certain nombre de progrès en facilitant les échanges marchands ou en créant une justice pénale internationale, par exemple?

    Peut-être, mais nous n’avons pas besoin d’un nouvel impérialisme pour permettre l’essor du commerce international ou pour traîner en justice les criminels. Des nations indépendantes sont tout à fait capables de se coordonner entre elles. Alors, certes, il y aura toujours quelques désaccords à surmonter, et il faudra pour cela un certain nombre de négociations. Et je suis tout à fait capable de comprendre que d’aucuns soient tentés de se dire que, si on crée un gouvernement mondial, on s’épargne toutes ces frictions.

    Mais c’est là une immense utopie. La diversité des nations rend strictement impossible de convenir, universellement, d’une vision unique en matière de commerce et d’immigration, de justice, de religion, de guerre ou de paix. La diversité des points de vue, et, partant, chacun de ces désaccords, sont une conséquence nécessaire de la liberté humaine, qui fait que chaque nation a ses propres valeurs et ses propres intérêts. La seule manière d’éviter ces désaccords est de faire régner une absolue tyrannie – et c’est du reste ce dont l’Union européenne se rend peu à peu compte: seules les mesures coercitives permettent d’instaurer une relative uniformité entre les États membres.

    Ne redoutez-vous pas la compétition accrue à laquelle se livreraient les nations dans un monde tel que vous le souhaitez? Au risque de renforcer le rejet ou la haine de ses voisins?

    Dans mon livre, je consacre un chapitre entier à cette objection qui m’est souvent faite. Il arrive parfois qu’à force de vouloir le meilleur pour les siens, on en vienne à haïr les autres, lorsque ceux-ci sont perçus comme des rivaux. Mais nous devons alors reconnaître, tout aussi humblement, que les mouvements universalistes ne sont pas exempts non plus d’une certaine inclination à la haine ou au sectarisme. Chacun des grands courants universels de l’histoire en a fait montre, qu’il s’agisse du christianisme, de l’islam ou du marxisme. En bâtissant leur empire, les universalistes ont souvent rejeté les particularismes nationaux qui se sont mis en travers de leur chemin et ont refusé d’accepter leur prétention à apporter à l’humanité entière la paix et la prospérité.

    Cette détestation du particulier, qui est une constante dans tous les grands universalismes, est flagrante aujourd’hui dès lors qu’un pays sort du rang: regardez le torrent de mépris et d’insultes qui s’est répandu contre les Britanniques qui ont opté pour le Brexit, contre TRUMP, contre SALVINI, contre la Hongrie, l’Autriche et la Pologne, contre Israël… Les nouveaux universalistes vouent aux gémonies l’indépendance nationale.

    En quoi le nationalisme est-il une «vertu»?

    Dans le sens où un nationaliste ne prétend pas savoir ce qui est bon pour n’importe qui, n’importe où dans le monde. Il fait preuve d’une grande humilité, lui, au moins. N’est-ce pas incroyable de vouloir dicter à tous les pays qui ils doivent choisir pour ministre, quel budget ils doivent voter, et qui sera en droit de traverser leurs frontières?

    Face à cette arrogance vicieuse, je considère en effet le nationalisme comme une vertu. Le nationaliste, lui, dessine une frontière par terre et dit au reste du monde: «Au-delà de cette limite, je renonce à faire imposer ma volonté. Je laisse mes voisins libres d’être différents.» Un universaliste répondra que c’est immoral, car c’est la marque d’une profonde indifférence à l’égard des autres. Mais c’est en réalité tout l’inverse: le nationaliste est vertueux, car il limite sa propre arrogance et laisse les autres conduire leur vie à leur guise.

    Que vous inspirent les difficultés qu’ont les Britanniques à mettre en œuvre le Brexit ? N’est-il pas déjà trop tard pour revenir en arrière?

    Non, il n’est pas trop tard. Si les différents gouvernements nationalistes aujourd’hui au pouvoir dans le monde parviennent à prouver leur capacité à diriger un pays de manière responsable, et sans engendrer de haine ou de tensions, alors ils viendront peut-être à bout de l’impérialisme libéral. Ils ont une chance de restaurer un ordre du monde fondé sur la liberté des nations. Il ne tient désormais qu’à eux de la saisir, et je ne peux prédire s’ils y parviendront: j’espère seulement qu’ils auront assez de sagesse et de talent pour cela.

     

    Yoram Hazony est spécialiste de la Bible et docteur en philosophie politique. Il a fondé le Herzl Institute et enseigne la philosophie et la théologie à Jérusalem. Ce penseur de la droite israélienne est également auteur de nombreux articles publiés dans les journaux américains les plus prestigieux, du New York Times au Wall Street Journal. Presque inconnu en France, sonlivre The Virtue of Nationalism a suscité un vif débat aux Etats-Unis.

    Source : https://www.lefigaro.fr/vox/

  • Société • « Conspirationnisme » macronien

    Par Luc Compain

    Si LREM dénonce le conspirationnisme de ses adversaires, ses chefs aiment jouer avec l’idée du double complot intérieur et extérieur. Conspirationnistes eux-mêmes, les peu vraisemblables puissances de l’ombre qu’ils évoquent sont en fait autant de prudentes explications préventives de leurs échecs. 

    show.png« 40% des Gilets jaunes sont très complotistes », s’inquiète Le Point, qui veut nous convaincre que les Français adhèrent massivement aux théories du complot, « ce conspirationnisme étant nettement plus fort [chez les opposants au Président] que dans le reste de la population ». Ce chiffre « alarmant », « glaçant », relayé par toute la presse, est tiré d’un sondage Ifop pour la Fondation Jean Jaurès et Conspiracy Watch qui ne doit pas être pris au sérieux¹ : entre autres défauts, ce sondage ne se préoccupe pas de toutes les théories du complot existantes² mais uniquement de celles qui sont a priori populaires – et donc plus susceptibles de toucher un public moins élevé socialement, et de définir le profil type du complotiste comme « un jeune pauvre peu diplômé » d’extrême-droite ou d’extrême-gauche qui s’informe sur les réseaux sociaux.

    Pour autant, il existe un conspirationnisme chic, politiquement admis et socialement recommandé, qui sévit jusqu’au sommet même de l’État. Cela peut paraître surprenant, dans la mesure où les « théories du complot » sont généralement construites en opposition aux « thèses officielles » – et qui pourrait être davantage officiel que le président de la République ? Ensuite parce que selon une répartition des tâches bien établie le conspirationnisme est le privilège des « gens qui sont faibles, ou fragiles, ou en colère », selon la formule d’Emmanuel Macron, les élites étant par définition responsables, rationnelles et raisonnables, en bref dépositaires d’une pensée complexe. Le conspirationnisme est supposé chose trop vile pour les contaminer. Leur anti-complotisme plaiderait d’ailleurs en leur faveur, bien que l’on s’aperçoive qu’il est avant tout utilisé comme un moyen pour disqualifier un adversaire ou une opinion concurrente.

    Cependant, dès que l’on a à l’esprit que le conspirationnisme est moins une idée ou un thème qu’une manière de déchiffrer le monde, on s’ouvre à la possibilité que les élites puissent partager la mentalité conspirationniste, en lui donnant une coloration particulière. En effet, le conspirationnisme met en scène un groupe agissant dans l’ombre en vue de réaliser un projet de domination. Le conspirationniste a la conviction que la marche du monde est contrôlable et que tous les événements fâcheux, sans lien apparent, ont une cause unique cachée, se rapportent à un projet maléfique et s’expliquent par lui. Un bouc émissaire incarne ce mal et est désigné responsable des événements négatifs.

    Le complot russe

    Russia-Today-Tele-Poutine-sous-haute-surveillance.jpgAvant même l’élection présidentielle, le candidat Macron et son équipe de campagne avaient désigné leur bouc émissaire. Le 14 février 2017, Richard Ferrand, alors secrétaire général d’En Marche !, publiait dans Le Monde une tribune intitulée « Ne laissons pas la Russie déstabiliser la présidentielle en France ! » En cause, les cyberattaques contre son mouvement en provenance… d’Ukraine – « comme par hasard cela vient des frontières russes » : outre qu’une pareille déclaration revient à juger la Russie responsable des agissements ayant lieu dans les quatorze pays qui lui sont voisins, on soulignera le faussement ironique « comme par hasard » qui traduit la connaissance du complot -, les déclarations de Julian Assange à propos d’informations qu’il disposerait sur Macron et, enfin, la « volonté d’influencer l’élection » prêtée à Russia Today et à Sputnik, c’est-à-dire leur refus de participer au concert de louanges médiatique.

    L’affaire Benalla est une nouvelle occasion pour la Macronie d’agiter le spectre de l’influence russe. L’écho considérable que le scandale rencontre sur Twitter (4,5 millions de tweets en français postés par plus de 270 000 utilisateurs différents) laisse apparaître que 1 % des comptes a publié 47 % du contenu. Qu’une ONG belge, DisinfoLab, émette l’hypothèse de comptes pro-Mélenchon, pro-RN ou russophiles (et non russes, ce qui sous-entend que partager des articles de RT ou de Sputnik revient à travailler pour la Russie), il n’en fallait pas davantage pour que la majorité se mette à dénoncer une manipulation russe. Que DisinfoLab ait finalement conclu à l’absence de preuve d’une tentative d’ingérence organisée, que l’influence des robots ait été infinitésimale ou que des spécialistes en communication politique en ligne aient estimé qu’il n’y avait pas lieu d’y voir la main des Russes, aura en revanche laissé indifférents les macronistes.

    3113bc8_13178-1rvuta3.aaci5asjor.pngLorsqu’en décembre 2018 le JDD demande : « La Russie est-elle derrière de faux comptes qui attisent la contestation sur les réseaux sociaux ? », il ne fait que mettre un point d’interrogation là où Macron n’a aucune incertitude : « Dans l’affaire Benalla comme [dans celle des] Gilets jaunes, la fachosphère, la gauchosphère, la russosphère représentent 90 % des mouvements sur Internet », ce qui prouve que « ce mouvement est fabriqué par des groupes qui manipulent » (Le Point, 1/02/2019). Les Gilets jaunes sont « conseillés » par l’étranger, ça saute aux yeux : « Regardez, à partir de décembre, les mouvements sur Internet, ce n’est plus BFM qui est en tête, c’est Russia Today ».

    Le complot russe comme clef d’explication universelle des difficultés rencontrées par Macron peut prêter à sourire. Télérama ne s’en prive pas : à propos d’un échange âpre entre Macron et les élus d’outre-Mer portant sur un insecticide, dans le cadre du grand débat national, l’hebdomadaire ironise sur « cette histoire de chlordécone, […] complot de la russosphère antillaise pour déstabiliser notre Président ». Il faut toutefois noter que cette obsession d’une influence russe maléfique connaît une bienheureuse exception : alors que, selon Médiapart, Alexandre Benalla a été, depuis l’Élysée, l’architecte de contrats avec deux oligarques russes, dont Iskander Makhmudov, réputé proche de Poutine et soupçonné de liens mafieux, l’ouverture par le parquet national financier d’une enquête pour corruption n’a pas eu l’heur de déclencher une réaction de Jupiter et de sa galaxie, sinon celle, railleuse, de Christophe Castaner, évoquant une « affaire de cornecul ».

    La prolifération des complots

    images.jpgPour nos élites, il n’existe pas seulement des complots de l’étranger, il y a aussi des complots intérieurs, bien que la frontière qui les sépare soit purement formelle. Depuis peu, les Russes doivent partager le rôle de bouc émissaire avec les fameux extrêmes qui se rejoignent. Macron a ainsi estimé que Christophe Dettinger « a été briefé par un avocat d’extrême-gauche. Ça se voit ! Le type, il n’a pas les mots d’un Gitan. Il n’a pas les mots d’un boxeur gitan ». Plus encore, l’extrême-droite est désignée coupable d’un commun accord entre les responsables de LREM et ceux de la gauche institutionnelle, ce qu’illustre parfaitement le communiqué de la CGT s’inquiétant des « ressorts obscurs d’une colère » pour laquelle l’extrême-droite serait à la manœuvre. Quoi qu’il en soit, les extrêmes ont partie liée avec des « puissances étrangères », notamment les responsables italiens, selon Marlène Schiappa qui prétend, au micro de France Inter (9/01/2019), qu’ils ont peut-être « financé les casseurs ». Sur quels éléments s’appuie-t-elle ? Nous ne le saurons pas. Et l’Italie de rejoindre l’axe du Mal.

    La présidence, en déficit de confiance, a également trouvé un bouc émissaire idéal à la crise des Gilets jaunes en dénonçant l’omnipotence de la technocratie (Le Figaro, 14/01/2019) : tout est de la faute de « Bercy », mystérieux Léviathan qui empêche les Français de connaître le bonheur. Les conseillers de l’Élysée ont ainsi mis en cause « l’inspecteur des finances sortant de l’ENA qui décide de tout, alors qu’il n’a jamais mis un pied sur le terrain », symbole d’« une fonction publique toute-puissante ». Il serait vain de croire que les complots ne visent que la France. Macron en est conscient et, à la dénonciation du complot étranger, il substitue le temps d’un instant celle du complot à l’étranger, affirmant que le référendum britannique sur la sortie de l’Union européenne avait été « manipulé » et qu’on avait « menti aux gens » (Le Parisien, 15/01/2019). L’accusation est grave. On ne saura malheureusement pas qui elle visait ni sur quoi elle se fondait, les « Décodeurs » du Monde ayant oublié d’enquêter.

    Finalement, ce conspirationnisme élitaire peut être l’expression d’un machiavélisme, la Macronie surfant sur l’idée que les Français seraient complotistes pour rappeler à l’ordre les journalistes : « Ce mouvement [les Gilets jaunes] est fabriqué par des groupes qui manipulent, et deux jours après, ça devient un sujet dans la presse quotidienne nationale et dans les hebdos ». Pour parer à ces manipulations, les médias doivent « hiérarchiser ce qui, dans l’info, est accessoire et ce qui est important ». À charge pour Benjamin Griveaux de le déterminer. La manipulation n’est d’ailleurs pas à sens unique puisque, le 8 février, le porte-parole du gouvernement a accusé les médias d’alimenter les croyances complotistes dans l’opinion, au sujet de l’affaire Benalla et de la question de l’indépendance de la justice.

    1156973.jpgLa dénonciation d’un complot fictif est aussi la réaction des vaincus de l’histoire. L’insatisfaction éprouvée à l’égard de l’évolution du monde – en l’occurrence, l’opposition croissante des peuples au mondialisme – est un carburant du conspirationnisme. Les éventuelles défaillances de la société ou les échecs répétés des politiques gouvernementales ne peuvent en être la cause, seule une influence maligne peut l’expliquer. À cet égard, l’histoire de la taxe carbone est exemplaire : deux mois après son abrogation par le Premier ministre et alors même qu’elle est à l’origine de la mobilisation des Gilets jaunes à laquelle il n’a toujours pas été mis un terme, le ministre François de Rugy et les secrétaires d’État Brune Poirson et Emmanuelle Wargon militent ouvertement pour son retour (Le Figaro, 12/02/2019). C’est une mesure excellente, et si elle a suscité des oppositions, qui ont été « entendues », c’est par manque de « pédagogie », dont ont profité des manipulateurs. En effet, il est impensable que les Français s’opposent à la taxe carbone, imaginée par ceux-qui-savent. Outre qu’elle permet de ne pas avoir à réévaluer ses présupposés en prenant en compte le réel, l’explication conspirationniste offre l’avantage de donner du sens à l’événement, et donc de consoler, de justifier sa position malheureuse de victime subissant les événements, ne parvenant pas à faire preuve d’initiative – il n’est plus question de maître des horloges –, incapable d’être force de transformation. En somme, le conspirationnisme macronien serait un symptôme d’impuissance politique, aveu élégamment maquillé.   

    1. Nous renvoyons à la critique d’Olivier Berruyer, « Analyse du Sondage “Êtes-vous un con ?” de Conspiracy Watch », publiée sur le blog Les Crises.
    2. Il est question de Big Pharma, de l’implication américaine dans les attentats du 11 septembre 2001 ou du complot sioniste mondial, et non de Trump comme agent russe, de l’équipement télécoms Huawei comme espion chinois ou de l’obsolescence programmée.
    Luc Compain
    pour Politique magazine
  • Le plaidoyer d’évêques et d’intellectuels pour lever l’interdiction des messes

    Tribune collective

    «La célébration de la messe n’est pas pour les catholiques une modalité de l’exercice de leur foi, mais en constitue la source et le sommet.» Pawel Horosiewicz/wideonet - stock.adobe.com

    «La liberté de culte ne peut se négocier, surtout en des temps où elle est menacée», écrivent dans Le Figaro cinq évêques et plusieurs intellectuels catholiques, parmi lesquels Rémi Brague, Chantal Delsol, Fabrice Hadjadj et Pierre Manent.

    Au moment même où notre pays entrait dans une deuxième période de confinement, le triple assassinat de Nice est venu douloureusement nous rappeler que les chrétiens paient un lourd tribut dans les attentats terroristes. Trois personnes ont en effet été sauvagement massacrées dans une église pour le seul motif qu’elles étaient chrétiennes. Déjà, le 26 juillet 2016, le père Jacques Hamel avait été égorgé à Saint-Étienne-du- Rouvray, au cours de la messe qu’il était en train de célébrer.

    Les hommages qui se multiplient partout en France, en ces jours où nous sommes encore sous le choc de la décapitation du professeur Samuel Paty, montrent en ces jours où nous sommes encore sous le choc de la décapitation du professeur Samuel Paty, montrent à quel point notre pays reste attaché à ses libertés fondamentales, bafouées par ces crimes: liberté d’expression, liberté d’enseigner, liberté de culte.

    Les chrétiens en général, les catholiques en particulier, sont sensibles aux marques de sympathie et de solidarité qui leur sont adressées. Ils sont conscients de leur devoir de participer à ce sursaut collectif, si nécessaire dans la lutte contre le terrorisme islamique.

    Pourtant, alors qu’on réaffirme que la liberté de culte constitue un droit fondamental à protéger, on la restreint dans son exercice par une interdiction quasi totale de se réunir dans les édifices religieux. On considère par là qu’elle n’est pas une «activité essentielle».

    Nous pensons au contraire que la liberté de culte ne peut se négocier et qu’on doit lui permettre de s’exprimer, particulièrement en ce temps où elle est contestée. Si «la République assure la liberté de conscience» (loi de 1905, 1er article), l’État se doit de rendre possible l’exercice et la pratique du culte.

    De nombreux catholiques se refusent à déserter leurs églises, où les fidèles viennent trouver consolation et espérance, en ces temps qu’il est bien difficile de traverser seul. La célébration de la messe n’est pas pour eux une modalité de l’exercice de leur foi, mais en constitue la source et le sommet. L’eucharistie non seulement rassemble, mais construit l’Église; elle en est le cœur et le centre vital. Depuis les origines de l’Église, les chrétiens ont toujours affirmé: «Sans le dimanche, nous ne pouvons vivre.» Même les persécutions n’ont pas découragé les chrétiens de se réunir le jour du Seigneur.

    Ce nouveau confinement, nécessaire pour se protéger du virus, est un temps particulièrement difficile et anxiogène pour beaucoup. Les messes constituent un des rares moments où les fidèles viennent reprendre force et courage pour le supporter. En interdire l’accès, c’est la double peine pour les catholiques, si éprouvés dans leur foi. Ne les privons pas de ces espaces de ressourcement ! Si les lieux de consommation et les grandes enseignes de distribution restent ouverts, ils ne combleront pas les aspirations les plus profondes du cœur et ne suffiront pas à apaiser les craintes.

    Face à l’épidémie de coronavirus, nous sommes conscients des précautions sanitaires à prendre et du respect de toutes les normes à observer rigoureusement. Depuis le déconfinement, nous avons pris nos responsabilités et les mesures barrières ont été strictement respectées. On n’a pas recensé de foyers de contamination dans les églises. Nous partageons pleinement le souci de préserver la santé publique. Mais l’interdiction générale des messes nous paraît avoir un caractère disproportionné face au besoin de réaffirmer nos libertés les plus chères, parmi lesquelles celle de pratiquer notre religion. Aussi, nous voulons pouvoir célébrer publiquement la messe, notamment le dimanche. L’eucharistie est le cœur de notre vie.

    Pour autant, il nous semble que cette question doit interpeller tous les hommes attachés à nos libertés publiques fondamentales. En effet, à travers cette interdiction de la pratique religieuse, c’est la liberté de culte que l’on ne respecte pas.

    Devant cette situation d’une profonde gravité, nous avons déposé plusieurs recours devant le Conseil d’État puisque déjà lors du déconfinement de juin, ce dernier avait enjoint le premier ministre de prendre des mesures mieux proportionnées aux risques sanitaires encourus.

    LISTE DES SIGNATAIRES : Marc Aillet, évêque de Bayonne; Bernard Ginoux, évêque de Montauban; Jean-Pierre Cattenoz, archevêque d’Avignon; David Macaire, archevêque de Saint-Pierre et Fort-de-France; et Dominique Rey évêque de Fréjus-Toulon. Charles Beigbeder, entrepreneur; Rémi Brague, philosophe; Thibaud Collin, professeur de philosophie; Chantal Delsol, philosophe; Fabrice Hadjadj, philosophe, Jean d’Orléans, comte de Paris; Pierre Manent, philosophe; Charles Millon, ancien ministre de la Défense; Jean Sévillia, historien et journaliste; Martin Steffens, professeur de philosophie.

    Source : https://www.lefigaro.fr/vox/

  • François Lenglet : « Les responsables de la crise : les élites mondialisées et leur libre-échangisme »

     

    par Jean-Baptiste d'Albaret

    Les prochaines échéances électorales seront dominées par les populistes, explique l’éditorialiste François Lenglet dans Tant pis ! Nos enfants paieront (Albin Michel), un livre où il retrace la généalogie de la profonde mutation idéologique en train de s’opérer, du libéralisme au protectionnisme.

    Vous expliquez que les inégalités entre générations n’ont jamais été aussi criantes. Est-ce un phénomène inédit ?

    C’est d’abord un constat. Pour la première fois dans l’histoire, les seniors profitent – malgré des disparités importantes – de revenus et de conditions de vie bien supérieurs à toutes les autres tranches d’âge. C’est une inversion inédite, observable dans la plupart des pays mais qui est plus marquée encore en France que chez nos voisins. Les grands bénéficiaires de cette inversion sont ceux qu’on appelle les « baby-boomers », nés dans les années 1940 et 1950.

    Cette génération s’est intégrée sans difficulté sur un marché du travail en pleine santé, grâce à la croissance exceptionnelle des Trente Glorieuses. Elle s’est enrichie en achetant à faible prix un patrimoine immobilier avec des créances remboursées en monnaie de singe, grâce à l’inflation. Elle a organisé un état-providence financé à crédit grâce auquel elle prend – ou prendra – une retraite dans des conditions de confort sans précédent.

    En quoi cela a-t-il un impact sur les générations suivantes ?

    Parce que les règles ont changé. Nicolas Sarkozy et François Hollande, nés au mitan des années 50, sont les meilleurs représentants de cette génération de favorisés qui a toujours su tirer profit de circonstances avantageuses. Faut-il expliquer autrement le changement radical d’environnement économique au début des années quatre-vingt ? Un renversement opéré sous l’impulsion de la banque centrale des états-Unis, bientôt imitée par la plupart des pays : on remonta d’abord les taux d’intérêts pour favoriser l’épargne et on désindexa ensuite les salaires des prix afin de juguler l’inflation, destructrice de dette.

    C’est ainsi que le modèle des Trente Glorieuses, fondé sur l’investissement, laissa la place au modèle actuel, fondé sur la rente et le capital. Depuis trente ans, les jeunes et les travailleurs doivent donc supporter non seulement leurs emprunts privés, mais aussi le poids de la dette publique qui n’a jamais été aussi élevée. Dette qui sert, en particulier, à financer la retraite, la santé et autres transferts à destination des seniors ! C’est tout le problème qui se pose actuellement dans la gestion des crises, particulièrement en Europe. On voit bien que la préoccupation principale est de préserver la valeur des dettes accumulées et, in fine, du capital.

    C’est le cas de la Grèce…

    La Grèce est un cas d’école d’erreur économique. Et d’erreur majeure… D’un côté, on lui interdit de s’endetter davantage et, de l’autre, sa compétitivité est structurellement obérée par une monnaie qui ne correspond pas à son niveau de spécialité. C’est dramatique. Les crises asiatiques ont été surmontés à l’aide de dévaluations qui ont fait baisser le coût des exportations, ramené la croissance et permis à l’économie de redémarrer en quelques mois. Rien de tel pour la Grèce qu’on maintient à tout prix dans la zone euro pour qu’elle s’acquitte de dettes… qu’elle est bien incapable de rembourser !

    Si la Grèce aurait intérêt à sortir de l’euro pour dévaluer sa monnaie, la solution ne pourrait-elle pas s’appliquer pareillement à la France ?

    L’histoire, le contexte, les économies ne sont pas comparables. Sortir de la monnaie unique ne résoudrait pas tous nos problèmes comme par magie. En France, les promoteurs d’une sortie de l’euro en font le préalable au financement d’un programme absurde de distribution généralisée et d’allocations en tout genre. Soyons sérieux. On ne répare pas le moteur d’une voiture en changeant les pneus ! En revanche, il est certain que l’euro a aggravé nos faiblesses.

    Quid des questions de compétitivité ou de la montée en gamme de notre économie ? L’union monétaire a été bâtie sur des illusions, sans tenir compte des déterminants de long terme de la croissance. Il est d’ailleurs de plus en plus probable que la zone euro ne subsiste pas telle qu’on la connaît. Des sorties, des changements de périmètre et d’organisation sont à prévoir à court terme. Mais la génération libérale qui l’a mise en place s’y accrochera, même si c’est au mépris de l’évidence. On l’a vu avec la Grèce.

    Sauf que les partis hostiles à l’Union et à la monnaie unique ont le vent en poupe. D’une façon générale, les positions protectionnistes, souverainistes, voire nationalistes, se multiplient…

    En effet, c’est d’ailleurs la thèse principale de mon livre. La prochaine présidentielle sera dominée par ceux qu’on appelle les populistes. C’est vrai pour la France, mais c’est le cas partout dans le monde et cela n’a rien d’étonnant. La crise financière a donné le sentiment que les règles de l’économie mondialisée n’étaient pas les mêmes pour les petits et pour les gros. La période de très forte mondialisation qui l’a précédée a accru les inégalités entre ceux qui profitent de l’ouverture, les plus qualifiés et les plus mobiles, et les autres, qui en subissent les conséquences en termes de revenu et d’emploi.

    Elle a créé des désordres, déstabilisant les communautés par une immigration incontrôlée sur laquelle se focalisent les peurs. Ajoutez à cette potion amère les attentats qui sont venus renforcer le sentiment d’insécurité générale et vous obtenez tous les ingrédients d’une très forte poussée de populisme. Populisme qui exacerbe le ressentiment des citoyens contre l’impunité dont semblent jouir les responsables de la crise : les élites mondialisées et leur libre-échangisme.

    D’aucuns prétendent que le phénomène n’est que passager. Est-ce votre sentiment ?

    Absolument pas. Les crises économiques et migratoires ont cristallisé une révolution idéologique progressive, comparable à celle déclenchée par le libéralisme il y a cinquante ans. Nous sommes entrés dans une nouvelle ère idéologique où le besoin de protection est plus fort que le désir de liberté. Maints exemples en attestent. Je pense par exemple à l’usage des nouvelles technologies, hier symboles de la mondialisation et de l’ouverture au monde et aujourd’hui de plus en plus utilisées comme des outils de surveillance.

    Si l’on vous suit bien, vous nous annoncez le Front national au pouvoir ?

    Pas nécessairement. Généralement, les partis populistes cèdent le pas à partir du moment où les partis traditionnels comprennent les peurs qui sont à l’origine de leur extension. Ils s’approprient les thèmes populistes mais avec leur humanisme, ce qui change quand même la donne. C’est ce qui se passe au Royaume-Uni, avec la nouvelle orientation des Conservateurs. Teresa May a une très grande intelligence du Brexit et répond exactement au bon niveau pour couper l’herbe sous le pied des populistes.

    Ce n’est pas encore le cas sur le continent, d’où les scores énormes des populistes en France et, désormais, en Allemagne. Mais le corset craque de partout. Schengen explose. Que la Commission européenne mène une enquête sur Barroso est aussi le signe d’un changement d’époque, comme la récente polémique sur les travailleurs détachés, inimaginable il y a seulement cinq ans. Nous vivons actuellement l’exact contraire de la fin des années quatre-vingt qui, avec la chute du mur de Berlin, fut le sommet de la vague libérale et mondialisante portée par une génération de « baby-boomers » alors dans la maturité de son âge. D’autres générations montent aujourd’hui en puissance et elles n’ont pas les mêmes aspirations.

    Vous établissez un parallèle entre la situation actuelle et les années 30. L’histoire est-elle un éternel recommencement ?

    Il y a des récurrences, des phénomènes qui se reproduisent à intervalles réguliers et dans des formes relativement similaires. C’est le cas, grosso modo, tous les quatre-vingt ans, ce qui correspond à peu près à la durée d’une vie humaine. Comme si les mêmes erreurs étaient commises dès que les témoins de la catastrophe précédente n’étaient plus là. Même si l’intégralité du schéma n’est pas forcément réplicable, les similitudes sont frappantes entre la situation actuelle et la crise des années trente ou celle de 1873 : crise financière, longue période de stagnation, montée des populismes, reflux de la mondialisation, retour des frontières… Tout cela met vingt ans à se matérialiser. Le temps que la génération qui a créé les conditions de la crise quitte le pouvoir et soit remplacée par une autre.

    Le retour du protectionnisme, est-ce la fin de la mondialisation ?

    C’est plutôt le protectionnisme qui se mondialise ! On pense toujours que la mondialisation est un phénomène récent, linéaire et irréversible. Rien n’est plus faux. Nous sommes au cœur d’un processus démarré il y a 500 ans, qui connaît avancées et reculs. La première réaction à la mondialisation, dans une période de grandes découvertes à l’origine de fortunes inouïes, c’est la Réforme de Luther dont un texte très important est une critique féroce du commerce international. Libre-échange ou protectionnisme, il n’y a jamais de victoires définitives. En la matière, il n’y a pas de loi éternelle. L’un et l’autre progressent et régressent alternativement en fonction des époques, des intérêts nationaux et du degré de tolérance des peuples à l’ouverture. Or le nôtre, et c’est rien de le dire, est de plus en plus faible… 

    Tant pis ! Nos enfants paieront, de François Lenglet, éditions Albin Michel, 240 pages, 18€

    Entretien repris du numéro d’Octobre de Politique magazine. A commander ici pour 5€ seulement !